Zoophile contant fleurette de Pierre Senges

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Zoophile contant fleurette

Texte au carré

PIERRE SENGES

Cadex Éditions



Zoophile contant fleurette

Illustrations de Sergio Aquindo


www.cadex-editions.net © Cadex Éditions, 2012 ISBN ----


Pierre Senges

Zoophile contant fleurette

Préface de Stéphane Audeguy

Collection Texte au carré

Cadex Éditions



99 espèces de préfaces comment Noé a-t-il pu faire tenir sur son arche tous les animaux de la création ? dans un texte malheureusement méconnu, mais qui n’a pas échappé à l’érudition de pierre senges, Gordiano Bruno laisse entendre que Noé a seulement embarqué les femelles de toutes les espèces. La Bible, elle, jette sur la question un voile pudique. c’est ce voile d’inconnaissance que pierre senges soulève avec courage, d’un index éthologique et délicat. Le silence n’avait que trop duré. Les françaises et les français ont le droit de connaître la vérité. Les animaux aussi. Moi-même je me demandais. désormais personne ne regardera le déluge de la même


façon. On ne pourra plus dire qu’on ne savait pas. Les mots me manquent. depuis les informations affluent, et je ne vois pas de plus bel hommage à rendre à l’auteur de Zoophile contant fleurette que de livrer les plus récentes à la connaissance du grand public.

Quand il sut que l’éternel avait promis la Terre au déluge, Noé se demanda ce qu’il convenait de faire des poissons (1).

On isola l’effraie (2), le lieu noir (3), le bourdon (4), de crainte qu’ils ne nuisent au moral de l’équipage.

Un jour le phasme (5) trouva une brindille et s’y hissa. Tous les efforts pour le retrouver furent vains.

parfois, pour se distraire, Noé rêvait à des animaux plus utiles : la mouette trieuse (6) ; l’écrevisse (7) ; la grue


métallisée (8) ; mais il n’osait en parler à dieu, de peur d’être envoyé par le fond.

Noé eut toutes les peines du monde à capturer les espèces les plus discrètes, telles que la paramécie furtive (9), le kangourou de poche (10), l’amibe naine (11), le caméléon des neiges (12). souvent les papillons (13) s’ennuyaient des fleurs.

Les enfants de Noé avaient insisté pour avoir un chiot (14), ainsi qu’un hamster (15) et un lapin nain (16) ; mais naturellement ce fut leur père qui dut s’en occuper.

sachant que son temps de gestation était de 20 mois, pour gagner de la place Noé choisit une éléphante enceinte (17-18).


Ni les femmes de ses fils, ni ses fils, ni sa femme ne voulurent se charger du ver solitaire (19) ; Noé se dévoua, mais leur confia le pou (20), le morpion (21) et même l’acarien (22).

pendant 40 jours et 40 nuits, les escargots (23) et les limaces (24) se crurent au paradis : il pleuvait.

Quelques animaux refusèrent catégoriquement de quitter l’arche après le déluge : la puce de bastingage (25) ; la mésange des dunettes (26) et, sous la ligne de flottaison, les berniques (27) et les moules (28).

ayant construit une arche en bois résineux, Noé hésita longtemps avant d’y admettre des termites (29) ; puis s’en remit à dieu.

pour leur donner une chance Noé fit sortir les antilopes (30) avant les guépards (31).

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La reproduction des lapins (32) obéissant à la loi de fibonacci, Noé et sa famille mangèrent du civet à tous les repas.

On profita du déluge pour abandonner sur la terre quelques espèces non viables : l’abeille asthmatique (33), le chardonneret aptère (34), le cachalot soluble (35), la fourmi agoraphobe (36).

au départ les fils de Noé et leurs femmes avaient essayé de maintenir une ambiance festive : ils avaient joué à cacheputois (37), à se lancer des gymnotes (38) et des torpilles (39) – le premier électrocuté recevait un gage –, à glisser des échinodermes (40) dans leurs lits, des holothuries (41) dans leurs verres à dents. au bout de dix jours le cœur n’y était plus. comme il faisait chaud dans la cale, l’ours polaire (42) dormit pendant 960 heures d’affilée et jamais ne voulut croire qu’il y avait eu déluge.

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certains animaux, mettant à profit ces 40 jours de répit, et faisant réflexion que l’homme les exploitait au péril de leur vie, cherchèrent à s’adapter aux besoins de leur cruel prédateur : ainsi naquirent le vison à col de fourrure (43), le lézard à queue en portefeuille (44), le boa à plumes (45).

Noé avait goûté le gavial (46) brouillé, la fauvette (47) pochée, la tortue (48) frite, l’émeu (49) mollet, la caille (50) mimosa et l’iguane vert (51) cocotte ; puis il s’était juré de ne plus manger d’œufs, s’il s’en sortait.

Le coucou (52) s’aperçut qu’il n’y avait pas autant de canots de sauvetage que d’animaux à bord, mais certain de trouver une place ne le dit à personne.

Les éphémères (53) sortirent de l’arche à la 33 e génération.

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pendant les premiers jours des cadavres d’hommes et d’animaux venaient cogner contre la coque. Noé interdit l’accès du pont aux espèces les plus sensibles – gazelles de Thompson (54), colibris (55), orang outangs (56) – ainsi qu’aux nécrophages – crocodiles (57), coléoptères (58), vautours (59) ; puis les cadavres coulèrent.

Il fallut surveiller constamment les lemmings (60), qui parlaient sans cesse de se jeter dans le vide.

profondément écœurés de l’inique prééminence accordée à Noé et à ses pareils par le seigneur de toutes choses, les grands singes (61) cessèrent à jamais de parler.

Une nuit Noé fit ce cauchemar particulièrement éprouvant : son orque épaulard (62), ayant échappé à sa surveillance, avait englouti d’une bouchée un léopard des mers (63) qui venait de dévorer un manchot royal (64), lequel

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venait de gober un encornet (65) dans l’estomac duquel agonisait un jeune nothothénidé (66) qui avait avalé sa ration quotidienne de krill (67), profitant d’un moment où ces petites crevettes insouciantes se gavaient de plancton (68), et alors dieu demanda des comptes à Noé, qui s’éveilla en sueur.

pour distraire leurs compagnons d’infortune pendant les longues nuits sans lune, les lucioles (69) organisaient des spectacles.

Quelques animaux qui n’avaient pas le pied marin ne marchèrent ensuite jamais plus comme tout le monde : la hyène (70), le crabe de cocotier (71), le lémurien (72).

parmi les différentes espèces de tiques (73), deux écoles philosophiques s’affrontaient : l’une affirmant que le monde était entièrement composé de poil et de sang ; l’autre

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prétendant que ces attributs appartenaient à de grands êtres chauds et infiniment bons qu’elle proposait d’appeler chiens (74).

L’isolement, l’ennui, une promiscuité toujours plus entêtante poussèrent un certain nombre d’espèces à se livrer à des accouplements contre nature ; Noé dut éliminer discrètement les rejetons les plus dénaturés en les jetant par-dessus bord. ainsi disparurent, à peine nés, le cochon ramier (75), l’hippocampe (76), la mouche à bec jaune (77), le gardon à rémiges mordorées (78), le brochet pèlerin (79), la crevette des alpages (80), la taupe argentée (81), l’anguille à poils longs (82) et le martin-chasseur (83).

Tandis que les eaux se retiraient, différentes variétés de lions (84), de tigres (85) et de rhinocéros (86) se battirent pour savoir qui aurait le droit de fouler la terre en premier ; beaucoup moururent.

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pour distraire sa famille Noé, qui se faisait vieux, inventait des façons de classer les animaux toujours nouvelles, encore que discutables. dans la catégorie des animaux qui n’ont pas un visage avenant, il plaçait la sole (87), le bouledogue (88) et la larve du fourmilion (89) ; dans celle des animaux qu’on ne peut caresser sous le menton sans danger, le gavial (90), l’orque (91), le zébu (92) et le cobra (93). dans celle des animaux dont le mâle est cent fois plus petit que la femelle, le vers bonnellidé (94) et la baudroie (95). enfin il distinguait les bêtes qui savent simuler la mort, comme la poule domestique (96) ou le lapin de garenne (97), celles qui sont obligées d’être mortes pour en avoir l’air et qui sont les plus nombreuses, enfin celles qui ne savent que contrefaire une blessure pour éloigner un prédateur de leur progéniture, comme la perdrix (98) ou la hulotte (99). et personne n’osait le contredire. stéphane audeguy

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PRÉLUDE

TOMASO : Le doute n’est pas le propre des mécréants, Manfredo, il est aussi celui des charpentiers : ils ne voient pas comment Noé a bien pu abriter toute la faune de toute la Création et la nourrir au sec dans son Arche pendant quarante jours. Au risque de faire dresser tes derniers cheveux sur ta tête de jars, j’affirme me ranger derrière l’opinion de Bracciolini Poggio, lequel suggère que notre vieux Noé, considérant le manque de place, a donné l’hospitalité aux seules femelles de toutes les espèces. Par conséquent, toujours dévoué à la cause commune de Dieu et de ses créatures, il a bien voulu assurer la descendance de chaque famille,


mammifères, reptiles, jusqu’aux insectes, de même que Lot avait assuré sa postérité en offrant sans manière à ses filles un tout petit peu de sa semence, une semence déjà sainte. Je te vois rouler des yeux ronds ; tu finiras par comprendre qu’il était ainsi, Noé, notre père ivrogne à tous : généreux, bénévole, prêt à donner sa chemise, fidèle serviteur de Dieu – ajoute à ça l’esprit pratique et une grande curiosité. Au fond, l’Arche n’est rien d’autre sinon un morceau de Paradis agrémenté de foin flottant sous les trombes d’eau : Noé y demeure, il y fait le capitaine : s’il couvre la chèvre, la pintade, l’antilope, l’oie sauvage, la marmotte et la fouine, s’il s’efforce de féconder l’insondable vache, c’est pour repeupler la Terre, et pour achever son ouvrage : on ne construit pas une Arche pour simplement attendre la décrue. MANFREDO : J’en reste sans voix. Giordano Bruno, L’Arche de Noé


CARNET TENU PAR LE VÉNÉRABLE NOÉ DÉLUGE – PUIS AU COURS DES MOIS SUIVANTS, DE MÉMOIRE.

PENDANT LES JOURS DU

1. L’écrevisse : trouver par où lui faire un enfant n’est pas trouver par où lui faire l’amour, ni par quels biais (chercher encore et encore avait de quoi ravir ma maîtresse, à cause de mes empressements de jouvenceau, fourvoyé six ou sept fois de suite au mauvais endroit : il s’en est suivi une sorte de pâmoison, difficilement identifiable). 2. Le serpent : non seulement elles étaient neuf, mais il a fallu plusieurs heures avant de m’en apercevoir, heures passées dans le fourvoiement plutôt que la distinction, et

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finalement réjouissantes pour tout le monde – même si les neuf, toujours lovées, n’ont pas pris garde à mon départ, j’en mettrais ma main au feu. 3. L’oursin : cela peut paraître incongru (héroïque, obsessionnel, courageux, cocasse, masochiste, intrigant, gourmet, snob, irréfléchi), mais j’ai aussi connu l’oursin femelle. 4. La limace : on peut mépriser la limace, classée un rang au-dessous de l’escargot faute d’avoir su concevoir de coquille – jusqu’au jour où l’on mesure la part que prend la mélancolie dans son alanguissement, sa résignation permanente. Encore faut-il aimer la limace sans se contenter d’une aventure d’un soir, comme ci comme ça, très agréable sans aucun doute (elle est une amante pulpeuse) – au contraire, se montrer constant, à sa manière : gastéropode.

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5. Le yack : je ne sais pas au juste si j’ai été l’amant de la grande yack du Tibet : à force de comparer notre nuit d’amour à une cavalcade, à une échauffourée, à un enfouissement, à la danse du chaman, à la fumée d’un incendie de forêt, à une chasse au cerf, à un mugissement, l’évidence s’est diluée dans toutes ces métaphores. 6. Le rhinocéros : sagesse veut que l’amant refuse poliment sept jeux sur les dix que propose la rhinocéros – parmi ces sept, cinq sont mortels, deux dangereux ; les trois suivants seulement sont des fantaisies sans risque, mais bien loin tout de même de l’idée que l’on se fait de l’amour dans les bras, par exemple, d’une alouette. 7. La puce : pas la plus belle des histoires d’amour, en tout cas la plus minutieuse – je ne dis pas ça pour me vanter.

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8. La chauve-souris : inutile de l’appeler, dans la nuit, inutile : et moi, pourtant, comme un nigaud, je rentonnais mes sérénades. N’empêche, ç’aura été assez voluptueux : la tête en bas, les ongles dans le dos. 9. L’éléphant : surmonter sa placidité, sa jalousie, son indifférence, sa mauvaise humeur, son inertie ou son hostilité impossibles à distinguer de ses plus ardents désirs (car trois tonnes caparaçonnées ne sont pas d’une lecture facile pour un amant à la peau frêle), surmonter tout cela signifie parvenir déjà fourbu à pied d’œuvre, en s’agrippant. Ensuite, il faut que l’amoureux se figure une brèche sans doute délicieuse mais abyssale : sur ce chemin il est censé se montrer tendre, puis furieux, puis tendre. 10. La poule : convoitée sans cesse au point d’abandonner la ferveur pour la bonne volonté conjugale, y compris avec ses amants de fortune ; un peu d’humour

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permet de retrouver une gaîté bon enfant, juste un instant – à condition de ne pas se mettre à chanter, comme ça arrive trop souvent, après la ponte. 11. La pieuvre : Dieu sait si les vieux séducteurs de ma trempe, désinvoltes et sincèrement pâmés d’amour, redoutent les femmes entreprenantes – huit pseudopodes n’étaient pas faits pour m’attirer, les ventouses non plus : pourtant, il m’a fallu reconnaître l’intérêt que représente la virtuosité sur huit fronts à la fois, et une certaine culture classique. 12. La girafe : comment se montrer à la fois escarpé et sensible ? la girafe y parvient, bien mieux que moi, je dois l’avouer. 13. La sauterelle : des heures d’attente, en plein soleil, puis des séries de fuites par bonds loin de l’endroit où

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l’amoureux croit avoir accompli son devoir (il n’en est jamais sûr, l’amour s’accomplissant à l’instant même où la série de bonds succède aux heures d’attente) ; par ailleurs, la sauterelle n’est ni causante, ni souriante. 14. Le lézard : l’erreur consiste à exhiber un chapelet de queues coupées, frétillantes toujours, comme les trophées de l’amour : en vérité, c’est le signe que sa maîtresse s’en est allée ventre à terre rejoindre un autre fiancé, bien moins analytique. Reste le souvenir d’une fraîcheur délicieuse à la saison des grandes chaleurs – et l’amour est impure horizontalité. 15. L’autruche : bien sûr, un certain athlétisme, soixante-dix kilomètres-heure, des coups de pattes à décapiter un jeune tigre : mais toutes ces plumes, toutes ces plumes, et là-dessous un vrai boudoir de coquette, un confort fin-de-siècle – enfin, une fois chose faite,

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l’idée saugrenue d’avoir fécondé un œuf de la taille d’un globe. 16. Le requin : une peau de satin, la souplesse de l’anguille à l’extrémité de la queue, la membrane des nageoires plus douce que le septième voile de Salomé, et des branchies qui sont les secrets par où s’insinue le bel amant, en faisant mine de se méprendre – tout pour rendre heureux, s’il n’y avait ces légendes de maris jaloux revenus trop tôt de la chasse, car leur odorat est sensible à des centaines de milles marins. 17. La méduse : transparente, urticante, insaisissable, jamais là où on l’attendait, et quand elle daigne s’approcher, c’est en flottant, à contrecœur : une ostensible volonté de s’abandonner aux éléments. Il faudra bien pourtant perpétuer l’espèce : alors l’amant s’imaginera jouer, dans une baignoire de dame, avec son filet à cheveux, en mousseline.

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18. Le vautour : il ne faut pas s’y fier, c’est une grande amoureuse, facilement abordable dès lors que la fréquentation de la mort ou l’attente de l’agonie la rend d’une placidité inépuisable (et pourtant, il y aura toujours quelque chose de hiératique dans ses orgasmes). 19. L’huître : dès le lendemain, ça paraît inconcevable, la présence d’un organe reproducteur chez des créatures aussi peu tangibles – des reflets irisés, un léger parfum d’iode, un fragment de nacre, admettons, mais pour le reste ? 20. Le pingouin : je le reconnaîtrais entre mille. 21. La raie manta : ensuite, elle me recouvre comme un drap et adapte son sommeil au mien ; à se demander si l’amant, pour faire bonne mesure, s’est montré suffisamment étale.

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22. Le chat : tout ou presque échappe à l’amant, le voilà prévenu : miaulements, danse, orgasme sont différents moments de l’esquive, le propre de la chatte, d’une vélocité agaçante. Qu’il se rassure : dans ce qui se dérobe, l’amant trouve une sorte de délices comparables à une promesse, du bout des lèvres, en s’en allant – des griffes enfoncées sont sa seule certitude : il regretterait alors de n’avoir pas laissé filer. 23. La grue : il faut aimer la grue avec passion, avec tendresse, avec constance, il faut y revenir plusieurs fois, il faut ne pas se chagriner d’un air d’ennui debout sur une seule patte (la morosité même, dirait-on, une morosité fluette de roseau ou de canne, tandis qu’on fait aller ses membres le long de ce corps haut perché). Il ne faut s’attendre ni à des éclats de voix ni au dérèglement des corps ; la posture de la grue est une question de pondération et d’incrédulité ; le plaisir est un

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tremblement qu’elle accepte comme une conséquence probable. 24. La grenouille : l’inconvénient est de ne jamais savoir au juste quand ça commence et quand ça se termine : pendant qu’il réfléchit, s’il réfléchit au contact des peaux trempées, l’amant voit l’amour aboutir malgré lui : un léger trouble à la surface de l’eau – on engendre des têtards par milliers avec une telle désinvolture. 25. La mante religieuse : les risques encourus ne sont pas aussi grands qu’on ne le craint d’ordinaire, avant de courtiser la mante – mais d’une telle complexité, tout cela, malgré mon ardeur : parmi tous ces bras et ces jambes, ces articulations, ces pièces de pantin sans ficelle, ces emboîtements de casse-tête chinois, rien n’est précisément assigné à l’amour (et ses adieux sont secs – tout aussi compliqués d’ailleurs).

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26. La colombe : notre lexique reste intraitable, le mot stupre conserve tous son sens quelles que soient les circonstances. 27. Le nautile : ça peut sembler incongru, mais l’amant découvre d’autres délices à mesure qu’il s’engage le long d’une spirale jusqu’au cœur du cœur de sa maîtresse, en s’amenuisant – le plus important par la suite est de ne pas prolonger son séjour : question de confort, et de tact. 28. La chenille : ce sont des amourettes simples, si insouciantes – mais tout autour chacun me dit : à quoi bon, à quoi bon ? 29. La taupe : la taupe ne m’a pas trouvé adroit – le fait est que je n’ai pas trouvé la taupe : notre amourette a été le plus tendre des ratés : des fiancés se manquent dans l’obscurité.

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30. L’amibe : l’amibe est voluptueuse, à sa manière, à peine visible ; mais elle vous fait rapidement comprendre qu’elle saurait se passer de vous pour se reproduire comme pour atteindre l’un de ses microscopiques orgasmes. 31. Le chimpanzé : qu’on ne s’inquiète pas, au dernier moment, la passion amoureuse l’emporte sur l’effet comique – advient ce qui doit advenir. 32. La tortue : devenir l’amant de la tortue de trois cents ans n’est pas faire preuve de nécrophilie, mais de patience : des siècles passent sur des amoureux qui n’ont pas eu encore le temps de faire connaissance. 33. La mouche : encore maintenant, il est presque impossible de dire où, et comment, et combien de temps, et dans quelle posture, et si cette nervosité suivie d’abattement était bel et bien des noces.

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34. La mouche (une autre mouche) : l’idée de recourir au miel pour rendre les amours possibles (sans aucun soupçon de luxure), cette idée a froissé la mouche : et nous nous sommes quittés sur des querelles. 35. Le dodo : il y a quelque chose de mélancolique à devenir l’amant d’une espèce en voie d’extinction – et c’est funeste, l’amoureux se sent responsable à la fois du plaisir et de la disparition. 36. La gazelle : bien entendu, il faut savoir courir très vite ; mais la gazelle, si elle le souhaite, sait puiser son plaisir dans la plus obscène des lenteurs (l’amant peut y trouver son compte). 37. La baleine : il est étrange de savoir sa maîtresse si loin de l’endroit où on lui fait l’amour – quand la reconnaissance, si reconnaissance il y a, parvient à l’amant, c’est

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avec un délai qui fait croire un instant à des prouesses surnaturelles, ou au contraire l’échec complet. 38. L’anguille : l’anguille se montre magnanime, sinon électrique ; dans les deux cas, elle sacrifie l’inventivité à la nécessité de reproduire l’espèce : il ne faut pas se fier à ses ondulations d’espèce sauvage en haute mer. 39. L’anaconda : le plaisir de l’anaconda tarde à venir le long de plusieurs méandres, s’enroule autour des branches, n’en finit pas de se diffuser avec une lenteur de venin depuis une extrémité jusqu’à l’autre – l’amant, qui s’évertue le mieux possible, n’est qu’un accident au détour de ce cheminement. 40. L’hermine : l’hermine a une réputation bien nourrie, comme la mandragore, le basilic et le cheval de mer, qui lui vient certainement des cycles arthuriens ; en

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dehors des légendes superbes, elle fait beaucoup penser à la marmotte. 41. La jument : tout le monde s’accordera à le dire, et pas seulement les don Juan coutumiers de certains faits d’alcôves et des amours aventureuses sur des pentes, pardessus les murs : il est grotesque d’accomplir sa passion à l’aide d’un tabouret – (pourtant, et pourtant). 42. Le lièvre (la hase) : sur la fin, ses bonds se sont faits de plus en plus rares, et espacés, et d’une langueur de feuille d’automne – le lendemain, de nouveau vive, elle était repartie, cette fois pour de vrais contes de fées. 43. La chouette : c’est peu dire que tout est voluptueux chez la chouette, à commencer par le regard qui vous constate sans vous demander votre avis (l’impériosité en harmonie avec les heures les plus profondes de la nuit,

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paraît-il), puis cette douceur de coussin de duvet à franges, sur quoi on voudrait bien se reposer. Mais pas question de s’endormir : l’œil de l’amante veille sur l’amour comme sur des manigances de cambrioleurs à minuit. 44. La rate : on espère des morsures précises, on reconnaît à tâtons son allure d’intellectuelle dévoreuse de vieux livres, casanière et pensive – mais il y a autre chose : on apprend à ses côtés à rejoindre l’amour par des voies sordides. (Après quoi, elle tourne le dos, laissant à l’amoureux le soin de trouver ce que sa fuite a de sentimental.) 45. Le phasme : l’amoureux, même très décidé n’y retrouve plus aucun repère : ni la séparation des êtres entre mâle et femelles, ni l’orientation des corps de recto à verso, ni l’ordre distinguant l’animal du végétal, mais s’il s’aventure malgré tout, sans savoir ce qu’il embrasse

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exactement : avec le phasme femelle, dit-on, la nuit d’amour la plus délicieuse est en réalité un interminable quiproquo. 46. Le lévrier : rien de bien haut, mais tout ce galbe donne le vertige (et la désagréable impression de forniquer sur un meuble Louis XV). 47. La coccinelle : cent fois l’amant a le temps de compter l’âge de sa maîtresse d’après les points de son dos, faire et défaire les calculs – pour lui donner congé ensuite, c’est bien connu, il faut la laisser cheminer jusqu’à l’extrémité d’un doigt, et puis attendre son bon vouloir (et se demander ce qu’elle en pense). 48. Le porc-épic : des prétentieux auraient compté sept cent soixante-dix-sept façons de faire l’amour au porc-épic.

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49. L’hippopotame : l’amour n’est pas une force brute, il est immobilité, immobilité absolue, mais en dépit de sa posture de bœuf tassé, abasourdi par l’eau boueuse, l’hippopotame est l’une des rares auprès de qui l’acte amoureux devient une vue de l’esprit : alors il semble s’évaporer. 50. Le kangourou : du folklore, de l’exotisme, certes, mais pas seulement : il y a chez la femelle du kangourou une grâce de dame courtoise soucieuse de son rang, une beauté de Junon stricte pour pallier tout pittoresque. À ses débuts entreprenant, l’amant se laisse finalement transporter avec plaisir ; de toute façon, il n’a pas le choix. 51. Le paresseux : la maîtresse idéale, puisque sa lenteur est la plus précise, sa fourrure est généreuse, ses frissons si lents à venir ne sont pas feints et ne désarçonnent pas ; la maîtresse idéale puisque tout entière concentrée sur les plaisirs, au point de retenir son souffle – seulement,

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il faut parvenir à ses fins en maintenant sa tête en bas, il faut aussi admettre le bâillement comme l’une des manifestations de la jouissance. 52. Le ouistiti : non, tout n’est pas que chatouilles et coups de dents, acrobaties et crises de nerfs – mais il y a de ça ; et à l’inverse de certains mammifères, ou même des primates, une queue déliée n’est pas fatalement un obstacle sur le chemin de l’extase. 53. L’ânesse : bien sûr, l’entêtement prend une part importante dans le plaisir que prodigue l’ânesse, et le plaisir qu’elle accepte, après un long refus – mais il s’agit de mélancolie et de prudence, pas seulement d’obstination ; et dans de rares moments de fantaisie, l’ânesse se montre irrésistible. 54. Le perroquet : l’inconvénient est que les paroles d’amour se prolongent bien au-delà de l’amour lui-même :

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c’est un peu gênant, on frôle le ridicule, l’amant se dit que c’est une forme de poésie dont il ne saura jamais rien. 55. Le cobaye : comme elle devine, d’après des rumeurs maussades, un destin de cobaye entre les quatre murs d’un laboratoire, l’amoureuse se prête à l’amour avec une docilité déchirante – l’amant y renonce par éthique, préférant l’amitié, en espérant que l’amitié échappe à la science du comportement. 56. L’hirondelle : l’impatience, la nervosité, la brièveté et l’inquiétude, peu de temps consacré à l’amour sous quelque forme que ce soit. Une jolie robe, j’en conviens, mais l’hirondelle croit toujours avoir sept bouches d’oisillons à nourrir dans l’urgence. 57. La louve : d’humeur apparemment carnassière (comme s’il fallait toujours montrer les dents pour proté-

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ger son lit), mais pacifique puis rêveuse quand elle a la bonté de prendre la pluie pour une neige d’hiver et ma maladresse, mes gestes de travers, pour les dessous de sa forêt profonde. D’un certain point de vue, elle m’a épargné ; pour faire bonne mesure, j’ai hurlé à sa place : certaines morsures réveillent le gentleman en moi. 58. Le varan : mon grand regret est de n’avoir pas su me montrer digne du varan. 59. La seiche : trop de mollesse (faudrait-t-il parler de langueur ?) peut déplaire, c’est une question de goût, d’école d’esthétisme, d’appétit ou d’âge, je ne sais pas au juste – pourtant, la seiche était prometteuse. 60. L’hippocampe : quoi de plus délicat ? sans défroisser les courbes, sans arracher les cils, sans déchirer la peau, il faudrait se montrer précautionneux au point de faire

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l’amour sans déflorer – mais la préciosité de l’hippocampe est au-delà de nos forces. 61. Le morpion : a priori, le sentiment d’aller gaillardement lutiner une vraie bête de sexe, plus vorace que distinguée : en vérité, tout n’a été qu’exigences, netteté, précautions, raffinements, hygiène, puis un plaisir semblable à un tintement de clochette – et encore. 62. Le fourmilier : manque de chance, son amour, sa passion, ses caresses, sa sensibilité, ses préventions même sont chatouilleuses : la fécondation, il faut l’admettre, procède du rire nerveux. 63. L’écureuil : il faut donner cinquante rendez-vous à sa maîtresse, et ne pas s’y rendre puisqu’elle n’y sera pas, continuer de la sorte les jeux d’évitement jusqu’à ce qu’un jour par accident le plumet de la queue vous sollicite

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comme un début de caresse donné du bout des doigts sur le bord de la joue – très agréable, mais ce plumet démesuré semble être un troisième invité au bal. 64. L’épervier : le tout est de ne jamais avoir l’air de vaincre, c’est-à-dire ne jamais considérer l’offrande amoureuse comme une façon, pour l’épervier, de céder à un amant plus entreprenant que les autres – il y a chez elle suffisamment de bec et de serre pour faire comprendre qui l’emporte. 65. La mangue : elle est un fruit, quoi qu’on en dise, pas un mollusque, mais le devoir oblige à dire : on ne sait jamais. 66. Le papillon : oui, mais lequel ? (À cause de la trompe, des ailes, des pirouettes, de l’ocre bleu jaune intermittent, d’un torse et d’un abdomen aussi tendres

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qu’un foulard de velours, et cette impermanence de fleur à fleur, cet odorat sensible à des milliers de kilomètres, une existence si brève consacrée à la reproduction, le papillon femelle se considère comme virtuose de l’amour – j’avoue ne pas avoir eu la cruauté de la détromper.) 67. L’ourse blanche : elle est exclusive, on s’en voudrait de la contrarier ; l’amant bienheureux, comblé, attend l’hibernation pour s’en aller vers des amours moins pondérables. 68. Le flamant rose : ah, c’était une idylle doucereuse au coucher du soleil, pendant que d’autres par milliers s’envolaient comme il se doit au-dessus des grands arbres ; et l’amoureux faisait de son mieux pour rendre compatible la grâce avec ce que l’amour peut avoir de clownesque, debout, en pleine lumière (une histoire plutôt sage jusqu’à ce que la femelle du flamant

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décide brusquement d’échapper à son destin d’ornement rose pâle). 69. Le dromadaire : l’amant, même maladroit, même débutant, n’a pas à s’inquiéter de ces profonds tangages – bien au contraire, bien au contraire : il se damnera, plus tard, pour connaître à nouveau l’amble. 70. L’orignal : c’est fou ce qu’il peut y avoir de maternel et de matrimonial chez les aventurières du grand nord. 71. La chèvre : il fallait s’attendre à des amours rustiques, peu de manières, des caresses aussi rêches que le pis, des baisers obtenus de la même façon qu’à la traite, avec une certaine violence mécanique, le tout contre la paille où elle se complait – mais, vous savez : des yeux de biche et le sens du devoir.

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72. La souris : elle prolonge les jeux avant même les préliminaires, des heures et des heures de course dessus dessous les draps, jusqu’à ce que mort s’ensuive : allez savoir comment l’accouplement s’accomplit malgré tout, dans la confusion. 73. Le pélican : ce n’était donc pas une légende : cette poche membraneuse dilatable, sous la mandibule inférieure – dieux des Enfers. 74. La truie : la soie est pour beaucoup dans l’attachement qu’un amoureux éprouve à l’égard d’une truie, pour beaucoup également dans le chagrin qui le saisit au moment des adieux (une minute seulement après avoir terminé les danses nuptiales : l’épuisement absolu et la volupté lasse). Le souvenir qu’il lui en reste n’est pas le mélange de soie et de bauge d’où pourrait naître le mot très chrétien de luxure, mais les rondeurs et les trémoussements.

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75. La mouette : une vie de sauvageonne, plutôt rudement menée, à coups de bec, pas seulement au bord des lagons mais sur des monceaux d’ordures : voilà pourquoi elle n’a pas froid aux yeux : les tendresses passeront pour des anomalies, mais pas désagréables, les rudoiements pour la violence nécessaire à la survie de l’espèce. 76. Le poisson-chat : s’il souhaite avoir une réputation de malotru, rien de tel pour l’amoureux que chercher le chemin de l’amour comme un isthme à l’endroit délicat où le poisson devient un chat, et vice versa – il pourra lui arriver de déchanter, mais déchanter n’est pas désagréable. 77. Le mille-pattes : finalement, on se fait beaucoup d’idées pour pas grand-chose, le mille-pattes est le premier à le reconnaître.

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78. Le pigeon : comme il s’avance vers les pigeons, l’amoureux s’attend à des amours monotones – l’agréable surprise vient de l’impression, dans la bousculade, de toujours lutiner un autre oiseau que celui qui se débat à l’instant même, comme il peut, entre ses bras, et finira par s’échapper. 79. Le gnou : pure curiosité – mais il suffit, après tout, de convertir la curiosité en désir, le désir en force mécanique : la force est pour l’engendrement, et le désir passera pour de l’amour. 80. Le scorpion : voilà bien des dérobades, bien des esquives, la danse avec la mort, selon ce qui se dit partout, des frayeurs assez soudaines qui auraient pu me rendre plus vigoureux ou au contraire pusillanime – le tout pour des amours assez tranquilles : son dard dressé en guise de lampion par-dessus nos deux têtes.

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81. La salamandre : l’amoureux a vite fait d’apprendre comment d’incessantes reptations (ou bien la reptation ellemême) sont une manière d’aller droit au but (on se lasse vite des couleurs chatoyantes, jamais de ces satanées ondulations). 82. L’étoile de mer : il suffit de rappeler que l’étoile de mer possède deux gonades à chaque bras. 83. Le ragondin : à la dernière minute, je me suis rendu compte que je ne savais plus au juste ce qu’est un ragondin – le ragondin a pris ombrage d’une ignorance affectant si peu pourtant mon enthousiasme, ma belle allure (maintenant, je sais, car l’amour éconduit trouve un peu de consolation dans la lecture des dictionnaires : le ragondin est un myopotame). 84. La pie : j’ai eu beau faire, la pie ne m’a ni chapardé, ni détroussé, ni convoité ; il semble que j’ai eu le tort de n’avoir

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pas été assez rutilant ou de refuser toute espèce d’éclat – les noces se sont accomplies malgré tout, dans la mésentente. 85. Le scarabée : l’après-midi entier passé à orner mon nombril : c’était peut-être trop. 86. Le corail : il aura fallu bien du courage, de longues, longues heures d’effort, de recommencement, pour prouver aux yeux de tous que le corail, avant de mourir pétrifié, est bel et bien un animal – par la même occasion, il faut convaincre le corail lui-même, ce qui n’est pas le plus désagréable (il a une façon si touchante d’admettre l’un après l’autre les arguments). 87. L’alligator : on évitera les mignardises pour s’en tenir à l’essentiel (les écailles sont un avantage : elles remplacent les crans d’une crémaillère, je ne sais pas si je me fais bien comprendre).

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88. Le dauphin : je n’ai rien contre l’évanescence, la passivité, la langueur, les consciences brumeuses, le sentiment océanique, la beauté fade, l’excessive gentillesse, le pacifisme, le chant des sirènes dans l’eau tiède et ce que le bonheur peut avoir de lisse – ce n’est pas de ma faute si les amours du dauphin aiment trouver refuge dans l’irénisme : mais j’ai préféré la murène. 89. Le castor : il faut alors trouver beaucoup de charme à l’utilitarisme. 90. La marmotte : quelle douceur, quelle douceur, en plus d’un air déluré – au point de la prendre, sans réfléchir, pour une hermine : la marmotte préfèrerait être aimée pour elle-même. 91. Le pétoncle : tout en faisant courir de-ci de-là mille caresses, j’ai voulu me montrer libertin, et jouer les

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amants volages, vagabonds, sans attaches – j’ai bien peur d’avoir peiné la pétoncle. 92. La biche : ses yeux sont deux oiseaux-lyres, ses oreilles sont deux orchidées, son ventre est un coussin d’hermine, son sabot est la pointe d’une plume trempée dans l’encre de Chine, sa croupe est le bossoir d’un navire au départ pour Cythère, ses genoux sont des noix du Liban, son jarret est le cou d’un cygne, son encolure un tapis de velours, chacune de ses mamelles est elle-même une biche – mais en matière de plaisir, croyez-moi, elle ne vaut pas un chiffon de daim. 93. La truite : l’amant risque de prendre les élans de sa passion, aux meilleurs moments, pour une paire de gifles – hélas, il n’aura pas entièrement tort. 94. La guêpe : tandis que l’amant et sa maîtresse convolent sans aucune mesure, l’un et l’autre déjà passablement

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éméchés oublient tout ce qu’ils ont pu apprendre au sujet du miel et du pistil, du calice des fleurs et des cycles incessants de la reproduction. 95. Le caméléon : la langue bien pendue et l’impassibilité même : ce n’est pas une raison pour ne pas l’aimer. 96. Le crabe : à certain moment de l’amour, peut-être le plus ardent, l’amant comprendra à quel point il n’était pas nécessaire de bien savoir s’y prendre : le crabe le sait, lui, parfaitement. 97. Le tyrannosaure : escalader n’est rien, grimper pendant des heures, mais s’apercevoir qu’on s’épuise à ranimer une espèce disparue depuis des millions d’années – (le plaisir pris devient coupable : car, au fond, on a trouvé du réconfort en se frottant à des fossiles).

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98. Le faucheux : c’est en été, au bord des murs, de délicates ombres, une finesse de filament – Dieu sait pourtant si le faucheux, une fois disparu, peut nous laisser le cœur gros. 99. Le gorille : un grand mâle dominant est venu interrompre les amours débutées avec une imprévue délicatesse de colibri – s’en est suivi une courte séance de lutte, ou boxe, ou massacre, jusqu’à ce que je comprenne enfin, à terre, que le massacre était les amours et le grand mâle ma maîtresse.

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DU MÊME AUTEUR

Veuves au maquillage, Verticales, , et Points Seuil,  Ruines-de-Rome, Verticales, , et Points Seuil,  Essais fragiles d’aplomb, Verticales,  Géométrie dans la poussière (avec Killoffer), Verticales,  La Réfutation majeure, Verticales, , et Folio Gallimard,  L'Idiot et les hommes de paroles, Bayard,  Sort l'assassin, entre le spectre, Verticales,  Fragments de Lichtenberg, Verticales,  Les Carnets de Gordon McGuffin (avec Nicolas de Crécy), Futuropolis,  Les Aventures de Percival : un conte phylogénétique, Dis voir,  Études de silhouettes, Verticales,  Environs et mesures, Le Promeneur, 


Sergio Aquindo est un auteur et dessinateur argentin né en . Il a publié : Les Jouets perdus de Romilio Roil, éditions R de réel, , et L'Œil d'or,  ; Lexique érotique illustré, texte d'Alfred Delvau, L'Archange Minotaure,  ; La Mère Machine, Rackham, .


COLLECTION TEXTE AU CARRÉ dédiée à la nouvelle Le Perron de Dominique Fabre illustrations de Christine Voigt, préface d’Éric Faye juillet  Un cri de Pierre Autin-Grenier illustrations de Laurent Dierick, préface de Dominique Fabre novembre  Un alibi de rêve de François Salvaing illustrations de M. M. Schmitt, préface de Jaume Melendres février  Billet pour le Pays doré d’Éric Faye illustrations de Laurent Dierick, préface d’Éric Chevillard mars 


Le Voyageur sans voyage de Pierre Cendors illustrations de Vincent Fortemps, préface de Cécile Wajsbrot février  Petit Traité d’éducation lubrique de Lydie Salvayre illustrations de Boll, préface d’Arno Bertina octobre , nouvelle édition octobre  Circé ou Une agonie d’insecte de Christian Garcin illustrations de Philippe Favier, préface de Christophe Fourvel mars  Les Madones du trottoir de Sylvain Fourcassié illustrations d’Aiham Dib, préface de Lydie Salvayre octobre  La Source d’Hubert Mingarelli illustrations de David Rebaud, préface de Joël Egloff mars 


Les maquettes de ce livre ont été réalisées durant un hiver glacial à Russan, sur la commune de Sainte-Anastasie, dans un bureau uniquement chauffé par la présence de deux chats très affectueux (mais parfaitement inaptes à la reproduction).


Achevé d’imprimer en mars deux mille douze par Gérard Bourdarias à Salasc (Hérault, France), Zoophile contant fleurette de Pierre Senges comprend six cents exemplaires sur Vergé.


e

T sI NOé,

pour pallier l’étroitesse de son arche, s’était contenté d’offrir l’hospitalité aux seules femelles de toutes les espèces – se chargeant luimême, par la suite, de la reproduction ? Hypothèse avérée, puisque de cette expérience hors du commun (il faut dire que c’était pendant le déluge), Noé a rapporté ces quelques notes : à la fois souvenirs de voyage, élégie amoureuse et manuel pratique. Le lecteur trouvera dans ce livre 99 bêtes de toutes les formes et toutes les tailles, épinglées dans un certain ordre.

avec son arche, Noé a redonné vie au règne animal. avec sa langue inventive, intelligente et cinglante, sa langue procréatrice, pierre senges rend aux hommes ce qui leur est propre : le rire !

pierre senges, né en 1968, vit à paris. Il est l’auteur d’une quinzaine de livres, dont Veuves au maquillage (Verticales, 2000), Fragments de Lichtenberg (Verticales, 2008), Environs et mesures (Le promeneur, 2011).


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