Il a marqué l’histoire moderne du continent. Béchir Ben Yahmed, fondateur de Jeune Afrique, a vécu des vies multiples. Éditeur, entrepreneur, militant aussi. Portrait d’un homme qui se voulait libre avant tout.
PAR ZYAD LIMAM
DEMAIN, APRÈS LE COVID édito
Les épidémies, les virus, les bactéries font partie de notre humanité. La lutte est incessante depuis la nuit des temps. Les civilisations ont dû faire face à des vagues meurtrières parfois endémiques et durables. On pense aux grands épisodes de peste du Moyen Âge européen, venue d’Asie sur les bateaux de la première mondialisation, et qui décimèrent une population sans repères scientifiques et qui s’en remettait à Dieu (ou au diable). On pense aussi au typhus, aux maladies dites infantiles, comme la rougeole, la rubéole, aux grippes… Certains de ces vecteurs ont été éradiqués. D’autres résistent (paludisme/malaria). De nouveaux agresseurs apparaissent. On pense au sida, et à la succession d’épidémies à coronavirus qui nous touchent depuis le début des années 2000 : SRAS, MERS, et le tout nouveau SARS-CoV-2 – provoquant le Covid-19 –, qui a mis notre monde à l’arrêt. Ces pandémies auront souvent induit de véritables bonds scientifiques, comme la vaccination (la toute première en 1796, contre la variole), arme majeure de l’immunité collective et de l’éradication des agresseurs. C’est le cas avec celle du Covid-19 et l’apparition de vaccins ARN de première génération, révolutionnaires dans leur approche.
Toutes les épidémies ne changent pas le monde de la même manière. La peste noire (13471352) tua entre un tiers et la moitié des Européens. En moins de cinq ans… Pour de nombreux chercheurs, le bacille provoqua in fine la chute de l’ordre moyenâgeux. Et de nouvelles recherches assez stupéfiantes estiment que ces épisodes de peste dévastateurs auraient pu atteindre l’Afrique subsaharienne (via l’Afrique du Nord), provoquant de graves ruptures démographiques et structurelles tout au long du XIV e s iècle. Les civilisations incas et mayas ont été détruites aussi par l’arrivée des germes portés par des conquistadors avides. Le paludisme aura, lui, décimé les troupes coloniales aux quatre coins du monde, ralentissant souvent leurs avancées vers l’intérieur des
terres. Les vagues de choléra du XIXe siècle provoqueront une véritable prise de conscience sanitaire. Et la grippe dite espagnole (mars 1918-juillet 1921) ravagera l’humanité (de 20 à 10 0 millions de décès selon les études) au lendemain d’une Première Guerre mondiale déjà particulièrement cruelle. Provoquant dans la foulée une éphémère valse des « années folles ».
La pandémie de Covid-19 laissera des marques profondes. Elle a touché au cœur le modèle de globalisation, d’urbanisation, de densification des échanges, des mouvements de populations, du tourisme, qui enrichit l’humanité depuis des décennies. Elle a percuté le mythe de sociétés occidentales invulnérables. La Chine, barricadée, en sort (provisoirement) grandie, mais c’est également le pays des origines de l’épidémie et des secrets qui l’entourent. Le Covid a stoppé net l’évolution positive d’un certain nombre de zones émergentes, l’Afrique en particulier. Le modèle global a déraillé, entraînant chômage, dette et désordres multiples. Enfin, surtout, les vaccins posent une question presque ontologique, celle d’un partage globale, à l’échelle de la planète, au-delà des frontières, des règles dictées par la puissance et la richesse. On ne pourra pas sauver les uns sans sauver les autres.
L’intensité et la fréquence de ces pandémies augmentent. Une situation liée aussi à la destruction des équilibres naturels. Comme jamais dans l’histoire, nous perturbons l’ordre de la nature, par la déforestation, l’urbanisation, l’impact de nos modèles de croissance. En ce mois de mai 2021, personne ne sait vraiment où va la pandémie (variants, résistance et adaptabilité des vaccins, nouveaux foyers, comme en Inde…). Il va falloir que l’on change, que l’on sorte des carcans conceptuels d’hier. Que l’on pense et agisse autrement. Que l’on génère du progrès pour tous avec d’autres méthodes. Les virus, le Covid, la protection de notre écosystème, le changement climatique, le mode de vie, le partage, tout est corrélé. ■
N°416 MAI 2021
3 ÉDITO
Demain, après le Covid par Zyad Limam
6 ON EN PARLE
C’EST DE L’ART, DE LA CULTURE, DE LA MODE ET DU DESIGN
Mad in Bled, l’ethno-chic à la marocaine
26 PARCOURS
Jhonel par Astrid Krivian
29 C’EST COMMENT ?
Terres brûlées par Emmanuelle Pontié
80 CE QUE J’AI APPRIS
Omar Sosa par Astrid Krivian
88 LE DOCUMENT
Barack Obama par lui-même par Cédric Gouverneur
106 VINGT QUESTIONS À…
Nesrine par Astrid Krivian
TEMPS FORTS
30 C’était BBY par Zyad Limam
38 La révolution ARN messager par Cédric Gouverneur
DOSSIER CÔTE D’IVOIRE
48 La réforme permanente par Zyad Limam
54 Portfolio : Construire le futur ! par Jihane Zorkot
60 K herann Yao : « Il faut sensibiliser les opinions aux défis écologiques » par Alexandra Fisch
62 L’urgence du développement durable par Élodie Vermeil
P.06
68 A xelle Fanyo, tout feu tout flamme par Catherine Faye
74 Toumani Diabaté : « Seule la culture peut faire bouger le monde » par Astrid Krivian
82 Gaëlle Prudencio : « J’ai décidé de v ivre ma meilleure vie » par Astrid Krivian
Afrique Magazine est interdit de diffusion en Algérie depuis mai 2018. Une décision sans aucune justification. Cette grande nation africaine est la seule du continent (et de toute notre zone de lecture) à exercer une mesure de censure d’un autre temps. Le maintien de cette interdiction pénalise nos lecteurs algériens avant tout, au moment où le pays s’engage dans un grand mouvement de renouvellement. Nos amis algériens peuvent nous retrouver sur notre site Internet : www.afriquemagazine.com
BUSINESS
Le Sénégal face à ses défis
La RDC se rêve en géant mondial du cobalt
L’illusion de la souveraineté monétaire par Jean-Michel Meyer VIVRE MIEUX
Arthrose : les solutions pour moins souffrir
Trois plantes qui améliorent le sommeil
Le vrai et le faux sur le gras 105 Rhinite allergique : Comment soulager les troubles par Annick Beaucousin et Julie Gilles
C’est maintenant, et c’est de l’art, de la culture, de la mode, du design et du voyage
DESIGN
Mad in Bled, l’ethno-chic à la marocaine
Le volcanique créateur HICHAM EL MADI continue de pousser sa créativité et de se fixer de nouveaux défis.
Ses créations
sont la p lupart du temps des pièces uniques, puisque fabriquées à partir de matières de récupération et de tissus tissés à la main.
En ces moments si durs d’épidémie et de distanciation sociale, une belle sélection quand même, pour penser à autre chose, lire, écouter, regarder, s’évader.
LE MAROCAIN HICHAM EL MADI s’est fait connaître pour sa façon innovante de réutiliser déchets et résidus de production dans ses créations contemporaines et uniques. Aujourd’hui, il gère une belle équipe de production artisanale, performante et polyvalente, qui lui garantit une liberté créative qu’il n’aurait nulle part ailleurs : « C’est l’un des points forts du Maroc. En Europe, il faut des mois pour voir l’aboutissement d’un projet. Ici, on va à toute vitesse. Au point qu’en ce moment, on essaye plutôt de brider notre inventivité », explique celui qui est à la tête de Mad in Bled. Le designer veut se lancer un nouveau défi : offrir aux clients la possibilité de composer leur article, en choisissant la taille, la texture et le modèle de pieds du meuble. Le résultat sera quand même une pièce unique, puisque le procès de production (à partir de bois, verre, céramiques et tissus artisanaux de récup ou tissés à la main) ne peut qu’amener à des créations originales. Le fil rouge derrière ses collections est toujours là : créer un modèle pour se faire plaisir, puis le décliner, le faire évoluer en travaillant les couleurs et la matière pour obtenir des objets de déco ethno-chic qui donnent de l’énergie à n’importe quelle pièce. madinbled.com ■ Luisa Nannipieri
THE UNDERGROUND RAILROAD (États-Unis), de Barry Jenkins. Avec Thuso Mbedu, Joel Edgerton, Chase W. Dillon. Disponible sur Amazon Prime Video.
ÉPOPÉE HISTORIQUE
UN TRAIN D’ENFER
Une femme tente de fuir l’horreur de L’ESCLAVAGE aux États-Unis grâce à un réseau ferré sous-terrain. Une série puissante et douloureuse.
LA SCÈNE EST SAISISSANTE : une famille déjeune dans le jardin d’une belle propriété de Géorgie, au milieu du XIXe siècle, et des musiciens jouent pour eux, tandis qu’un homme noir, suspendu par les bras à un immense gibet, hurle sous les coups de fouets stridents qui lui lacèrent la chair : son torse est en lambeaux. Le maître des lieux va ensuite allumer un feu sous ce corps supplicié, en faisant la leçon à tous les esclaves de la plantation, obligés d’assister à cet insoutenable châtiment. On comprend que la production ait fait appel à un psychologue sur le tournage… Cette épopée en 10 épisodes, inspirée du roman éponyme de Colson Whitehead (prix Pulitzer 2017 et coup de cœur de Barack Obama), montre comment Noirs affranchis et Blancs abolitionnistes ont aidé des milliers d’Afro-Américains à s’échapper grâce à un réseau clandestin baptisé « chemin de fer souterrain », car il reprenait un vocabulaire ferroviaire (passagers, stations, agents…). Les trains à vapeur ne circulent pas sous terre, mais Barry Jenkins utilise cette métaphore en montrant des tunnels secrets empruntés par de vraies locomotives, ajoutant au spectaculaire d’une mise en scène aussi soignée qu’anxiogène. Après avoir remporté un Oscar (Moonlight, 2016) puis adapté l’écrivain James Baldwin (If Beale Street pouvait parler, 2018), le cinéaste lui-même afro-américain signe une ambitieuse fresque qui suit la traque de Cora (la SudAfricaine Thuso Mbedu, magnifique), échappée de la plantation évoquée au début, mais poursuivie par un redoutable chasseur d’esclaves. D’État en État, la jeune femme va croiser l’horreur, l’amour aussi, parfois des Blancs qui veulent trop bien faire, des Noirs complices des maîtres, sans parler d’une religiosité étouffante. Et partout, cette cruauté qui est au fondement des États-Unis, comme le dit un leader noir : « La race blanche croit, avec tout son cœur, que c’est son droit de prendre leur terre aux Indiens et de les tuer, et de réduire leurs frères en esclavage […]. Cette nation est fondée sur le meurtre. » Plus de cent ans après Naissance d’une nation de D. W. Griffith, classique muet et novateur mais qui faisait l’apologie du Ku Klux Klan, Barry Jenkins répond implacablement. ■ Jean-Marie Chazeau
SOUNDS
À écouter maintenant !
Thaïs Lona
Dancing Again, Mister Ibé
Signée par le label Mister Ibé, Thaïs Lona est une chanteuse – également capable de rapper avec brio – qui revendique ses origines plurielles et ses premières amours soul, lesquelles déteignent sur ce premier EP de cinq morceaux ensoleillés. Si l’on ne peut hélas pas encore la voir le défendre sur scène, on devine le potentiel live de cette musique anglophone, dans l’air du temps sans en faire trop.
Samba Touré
Binga, Glitterbeat/Modulor
Située sous le désert saharien du Mali, la région de Binga a vu grandir Samba Touré. Celui-ci revisite aujourd’hui les mélodies de ses racines avec la fibre songhoy qui l’anime depuis ses débuts. Au cœur du propos sonore, la guitare de Touré, mais aussi des percussions, du n’goni, de l’harmonica et de la calebasse. Face à la violence qui dévaste son pays, il offre aujourd’hui de magnifiques chansons acoustiques adoucissant les mœurs.
Neta Elkayam
Muima, CD Baby
Depuis quelques années, l’Israélienne Neta Elkayam puise dans ses origines et dans le patrimoine judéomarocain. Dans cet EP, elle twiste le beau « Muima », interprété au départ, dans les années 1970, par Yasmine Al-Maghribia. De même pour « Hak a Mama », de Zahra El Fassia, et « Muhal Nensah », de Sliman Almagribi. Revigorés par une approche à la fois pop, jazz et urbaine, ces trésors sortent de l’oubli. ■ Sophie Rosemont
ilb
Le premier chapitre, « Mangrove », met en scène des activistes jugés pour incitation à l’émeute.
SÉRIE
ANTHOLOGIE DU RACISME ANGLAIS
Cinq épisodes magistraux qui racontent la CONDITION DES NOIRS dans la Grande-Bretagne de la seconde moitié du xxe siècle.
PLUS QU’UNE SÉRIE, c’est une collection de cinq films qu’a réalisés Steve McQueen (12 Years A Slave, oscarisé en 2014). Les personnages sont différents d’un récit à l’autre, mais tous nous racontent ce que vivaient les Noirs dans la société britannique des années 1960 à 1980. Avec une bande originale très soul et reggae, particulièrement dans le deuxième épisode, qui nous immerge, façon Abdellatif Kechiche, dans une soirée dansante au cœur du « black London ». Le premier chapitre raconte comment des policiers de Notting Hill ont harcelé pendant des années le patron et les clients d’un restaurant caribéen. Les autres épisodes nous montrent les racines des émeutes de Brixton en 1981, la difficile intégration d’un policier noir (John Boyega, aussi à l’aise que dans Star Wars), et la force des mères antillaises et africaines face à un système éducatif qui exclut leurs enfants. Parfois démonstratif, mais drôlement efficace. ■ J.-M.C. SMALL AXE (États-Unis), de Steve McQueen. Avec Letitia Wright, Shaun Parkes, John Boyega. Disponible sur Salto.
TRADITIONNEL
VOUS AVEZ DIT HYPNOTIQUE ?
Basé à Kinshasa, le collectif KASAI ALLSTARS continue de réinventer à sa sauce les danses rituelles d’antan.
DEPUIS SON PREMIER ALBUM, In The 7th Moon, The Chief Turned Into A Swimming Fish And Ate The Head Of His Enemy By Magic, paru en 2008, Kasai Allstars s’est fait un nom bien au-delà des frontières congolaises, grâce à l’énergie contagieuse de leurs chansons mais aussi du spectacle Congotronics vs Rockers et de la bande originale du film Félicité d’Alain Gomis (inspiré par la chanteuse du groupe, Muambuyi). Elle tient encore la barre haute sur ce nouvel album, réalisé par le guitariste Mopero Mupemba. Le collectif originaire de la province du Kasaï bénéficie également de la dextérité de Baila Tshilumba (xylophone), Célestin Kabongo (likembé) ou encore Tandjolo Yatshi (tambour à fente). Tous ont pour objectif
AFROSURF, Mami Wata,
300 pages, 52,99 €. mamiwatasurf.com
PHOTOS
de rendre accessible la musique des cérémonies de transe du Kasaï (notamment des Luba, Songye et Tetela), désormais considérée comme pécheresse. S’ils puisent aussi leurs influences dans le rock et l’électro, ne fût-ce que le titre du disque (« Les fourmis noires volent toujours en groupe, un seul bracelet ne peut pas produire de son », en français) revendique l’importance que revêtent pour eux les mythes et proverbes du Kasaï. ■ S.R. KASAI ALLSTARS, Black Ants Always Fly Together, One Bangle Makes No Sound, Crammed Discs/L’Autre Distribution/Pias.
LE BERCEAU DU SURF
CHOSE MÉCONNUE, le premier témoignage écrit sur le surf date du XVIIe siècle et ne vient pas d’Hawaï, mais d’une région qui est aujourd’hui le Ghana. Ce beau livre (en anglais) riche en photos et histoires fantastiques, véritable petit bijou éditorial, ne cesse de nous le rappeler : que ce soit au Maroc, au Sénégal, au Congo ou en Afrique du Sud, la pratique du surf a toujours existé. Loin de la culture californienne, les Africains attrapent les vagues pour se reconnecter avec les traditions et la nature. Afrosurf est le premier livre à leur donner la parole. Financé grâce à une campagne de crowdfunding lancé en janvier dernier par la marque de surf captonienne Mami Wata, l’ouvrage a été réalisé avec l’aide de photographes et de connaisseurs éparpillés sur le continent. Un projet si original que les New-Yorkais de la Penguin Random House vont le rééditer cet été. Le résultat, un mix d’histoires, de portraits et de fiches pays évocatrices, donne envie de mettre sa planche à l’eau. Le plus ? Les droits d’auteur sont reversés à des associations qui pratiquent la surf thérapie avec les enfants. ■ L.N.
LITTÉRATURE
Pour penser les plaies
Au fil d’une narration foisonnante, l’auteur congolais Blaise Ndala ausculte la RELATION POST-COLONIALE entre la Belgique et la RDC.
BLAISE NDALA, Dans le ventre du Congo, Seuil, 368 pages, 20 €
DIFFICILE DE NE PAS SE PRÉCIPITER sur un roman qui invoque, en exergue, Victor Hugo, James Baldwin et Toni Morrison. Surtout lorsque son titre, Dans le ventre du Congo, et son propos, l’histoire douloureuse et singulière entre les Belges et les Congolais, réveillent en nous les vers emblématiques d’Alfred de Musset : « Sombre et silencieux, étendu sur la pierre / Partageant à ses fils ses entrailles de père / Dans son amour sublime il berce sa douleur. » Il y a dans le romantisme tourmenté du Pélican l’idée de sacrifice et de rédemption. De malheur et d’espérance. Comme dans ce récit captivant, qui emporte le lecteur sur les traces de la jeune Tshala, fille de l’intraitable roi des Bakuba, exhibée en 1958 dans le « village congolais » de l’Exposition universelle de Bruxelles – c’était hier –, avant de disparaître sans explication. Près d’un demi-siècle plus tard, l’une de ses nièces croise la route d’un professeur de droit à l’Université libre de Bruxelles, hanté par le fantôme de son père, qui fut l’un des responsables de l’exposition consacrée aux colonies. Une succession d’événements et de révélations leur dévoile peu à peu les secrets emportés dans la tombe. C’est justement en découvrant les tombes de sept Congolais, morts après avoir été exhibés dans le parc de Tervueren lors de l’Exposition internationale de Bruxelles de 1897, qu’est venue à Blaise Ndala l’idée de raviver la mémoire de ces hommes et femmes oubliés de l’histoire, des deux côtés de la Méditerranée. Hanté par ces figures éteintes, le juriste et auteur de deux romans remarqués, J’irai danser sur la tombe de Senghor (L’Interligne, 2014) et Sans capote ni kalachnikov (Mémoire d’encrier, 2017), s’est fixé comme objectif de donner une voix à cette relation, souvent complexe, entre les anciens colonisés et la Belgique contemporaine. À travers trois personnages très forts, la princesse, son père et sa nièce, il se fait le chantre des héros occultés, des 5 millions de Congolais exterminés par les travaux forcés imposés par Léopold II, de toutes les femmes qui ont joué un rôle important pendant la période coloniale. Mais aussi du royaume Bakuba, l’un des plus fastueux, qui résonne encore aujourd’hui à travers l’art statuaire exposé, à son corps défendant, dans les musées occidentaux. Sans jamais tomber dans un manichéisme réducteur. ■ Catherine Faye
COMÉDIE MUSICALE
LE PLAY-BACK ENCHANTÉ
Cette série ivoirienne accueille des GRANDS NOMS du continent, mais ses audaces sont bien timides…
ALAIN GUIKOU CONNAÎT LA CHANSON : le réalisateur et producteur avait déjà introduit des tubes africains et français dans sa série Brouteur.com. Cette fois, il se lance dans la comédie musicale, façon sitcom, avec sentiments surjoués et cascade d’invraisemblances qui s’étirent sur 12 épisodes. L’enjeu, c’est Mélody, une école de musique de théâtre et de danse à Abidjan, menacée d’être remplacée par un luxueux centre commercial. Il y a des méchants, des couples qui se font et se défont, et des comédiens qui reprennent avec leur voix (mais dans un play-back parfois hésitant) des chansons d’Ismaël Lô ou d’Alpha Blondy, mais aussi de Patrick Bruel, d’Édith Piaf ou d’Amel Bent. Des séquences souvent dansées, du zoblazo au zouk, en passant par le hip-hop. Mais surtout, à chaque épisode, un guest d’envergure internationale vient soutenir l’école : Meiway, Khadja Nin, Pat Sako, Lokua Kanza ou encore Jacob Desvarieux jouent leur propre rôle. La série aborde aussi, bien que parfois maladroitement, des dossiers difficiles : place de la culture, émigration de la jeunesse, enfants des rues (Nash, qui s’exprime en noushi, vient bousculer la francophonie lisse de la série), corruption généralisée, violence policière, et même homosexualité – presque normalisée, jusqu’à ce que le personnage gay de l’école finisse par tomber amoureux d’une femme… Un peu d’audace, mais pas trop ! ■ J.-M.C.
MELODY, LA VICTOIRE EN CHANSONS (Côte d’Ivoire), d’Alain Guikou. Avec Polha Andréa Goure, Landry Gnamba, Franck Vlehi. Disponible sur TV5MONDEplus.
BEAU LIVRE
ÉTATS DE GRÂCE
Un livre hommage paru à l’occasion de l’exposition « Azzedine Alaïa, Peter Lindbergh » (pour l’instant, entre parenthèses) à la fondation du couturier, à Paris.
L’UN EST L’ARCHITECTE des corps, celui qui les habille, les sculpte, l’autre est le révélateur, celui qui met en lumière l’avers et l’envers. Alaïa et Lindbergh. Deux immenses talents. Et une connivence, chacune de leur expression se voulant le reflet de l’autre. De main de maître, l’un et l’autre subliment mannequins et stars du show-biz, telles Naomi Campbell, Milla Jovovich, Tina Turner, Madonna ou encore Dilone, et cultivent le noir, en tirages argentiques ou en aplats vestimentaires. Comme Richard Avedon et Christian Dior ou Helmut Newton et Yves Saint Laurent, Peter Lindbergh et Azzedine Alaïa convergent vers une communauté d’esprit, où photographie et haute couture dialoguent sans trêve. Ce livre immortalise un partenariat artistique unique, qui aura duré quarante ans. Et une quête d’authenticité.
Où l’âme et l’image se fondent dans un même souffle. ■ C.F.
PETER LINDBERGH, AZZEDINE ALAÏA, Taschen, 240 pages, 60 €.
À Philadephie, de s cavaliers soudés et fiers se retrouvent autour de valeurs rédemptrices.
DRAME
LES COW-BOYS NOIRS
Sortir des stéréotypes grâce aux chevaux : un beau WESTERN DES T EMPS MODERNES emmené par Idris Elba.
« HOLLYWOOD a fait du white washing, on nous a complètement rayés des livres d’histoire », déplore une Afro-Américaine, chapeau de cow-boy sur la tête, auprès d’un feu de camp dans la banlieue de Philadelphie. Premier mérite de ce film : nous apprendre qu’un tiers des cow-boys étaient noirs ou métis ! Et qu’aujourd’hui encore, certains de leurs descendants vivent auprès de leur écurie un peu misérable, en milieu urbain. Une communauté marginale, mais soudée et fière de ses valeurs.
C’est là qu’atterrit un ado paresseux et à fleur de peau, amené de Détroit par sa mère qui n’en peut plus. Il se retrouve les pieds dans le crottin, avec un père taiseux (Idris Elba) qu’il connaît mal. Au contact des chevaux, il va s’ouvrir aux autres et se transformer. Un beau film sur la relation père-fils, et un salutaire pied de nez aux westerns de John Wayne. ■ J.-M.C. CONCRETE COWBOY (États-Unis), de Ricky Staub. Avec Idris Elba, Caleb McLaughlin, Lorraine Toussaint. Disponible sur Net fl ix.
La jeune génération, Caleb McLaughlin et Jharrel Jerome.
Tony Allen, vivant pour toujours
Un an après la DISPARITION du batteur nigérian, cet album donne la parole à de jeunes artistes qu’il souhaitait accompagner de ses grooves légendaires. Précieux.
TONY ALLEN, There Is No End, Blue Note Records.
L’ANNONCE DE SA MORT, le 30 avril 2020, alors qu’il devait fêter ses 80 ans, a été une secousse. Comment croire que le Tony Allen que l’on avait eu la chance de rencontrer quelques mois plus tôt, vu jouer sans faillir tant de fois, toujours tout sourire et malice, s’était éteint ? D’autant que le plus grand batteur du monde avait une foule de projets en tête. Comme celle de proposer à de jeunes artistes évoluant au sein des sphères urbaines de s’exprimer sur des beats concoctés sur mesure par ses soins. Qu’à cela ne tienne, les producteurs Vincent Taeger, alias Tiger Tigre, et Vincent Taurelle ont décidé que ce disque aurait lieu, quoi qu’il arrive : « Tous les grooves ont été créés par Tony avant sa mort, et il avait sélectionné de nombreux invités parmi les rappeurs et chanteurs que nous avons utilisés. Les beats collaient parfaitement quand nous avons recommencé la production quelques semaines après son décès, et qu’il a fallu marier ses grooves avec les voix… »
Ainsi, There Is No End brille par la richesse de son expressivité, chaque intervenant étant conscient de l’importance de sa mission. Avec « Cosmosis », le romancier et poète nigérian Ben Okri, aux côtés du rappeur britannique Skepta, perdure ce que Allen proposait au monde : une dimension parallèle capable d’illuminer nos jours moroses, d’avoir foi en l’avenir. Lui qui voulait « ramener les jeunes rappeurs à la maison » réussit, même après sa mort, à fédérer. Ce que l’on entend effectivement sur le hip-hop tendance G-funk de « Rich Black » (feat. Koreatown Oddity), plutôt synthétique de « Coonta Kinte » (feat. Zelooperz), de profundis grâce au flow de Danny Brown sur « Deer in Headlights ». Brillent aussi le futurisme spirituel de « Stumbling Down », porté par la rappeuse Sampa the Great, ou l’afro-trap en mode swahili sur « Mau Mau », avec la chanteuse kenyane Nah Eeto. Ici, on chante des quatre coins du monde avec, en tête, le jeu de batterie elliptique, fantastique et profondément généreux de Tony Allen. Et en effet, « there is no end » (« il n’y a pas de fin ») : même après sa mort, les précieuses leçons du musicien continuent de porter leurs fruits. ■ S.R.
NOSTALGIES D’ENTRE LES MURS
Un récit sur les derniers jours des lieux de l’enfance, la violence des rapports familiaux et des interdits sociaux.
ELLE A ÉCRIT cette histoire entre Tanger, Alger et Alicante. Un premier roman ancré au bord de la Méditerranée, dans un village imaginaire, Tephles – « l’enfant », en arabe. Une manière pour Hajar Azell, 29 ans, née à Rabat, de revendiquer une part d’universalité et d’interroger le besoin d’ancrage du lecteur. Plus encore, de redessiner une géographie. Les lieux des souvenirs, de l’attachement à un territoire, à un récit familial, éveillant par trop souvent des blessures gardées secrètes. Ce qui fascine la primo-romancière est de voir comment tout ce qui symbolise l’unité d’un collectif devient, à un moment ou à un autre, l’objet d’une inflation de récits discordants au sein d’une même famille. De rivalités. De révélations. À Tephles donc, dans la grande maison familiale, Gaïa vient de mourir. May, sa petite-fille, qui a grandi en France, décide d’y passer quelques mois avant sa mise en vente. C’est l’heure des legs et des dommages. Malgré la sensualité des lieux de l’enfance. ■ C.F.
HAJAR AZELL, L’Envers de l’été, Gallimard, 176 pages, 16 €
VOYAGE LUMINEUX DANS L’ISLAM
Réédité en format poche, cet ouvrage éclaire avec la plus grande liberté une religion par trop souvent méconnue. « L’ISLAM EST AMOUR, mais l’islam dont je parle ici n’est pas seulement un territoire, une communauté ou un dogme, il est aussi un univers, une langue, un esprit. » Publié en 2004, ce dictionnaire s’inscrit dans le plaidoyer plus que jamais vivant de Malek Chebel (1953-2016), anthropologue algérien des religions et spécialiste du monde arabe, pour un islam libéral et moderne. Dans un langage simple et efficace, l’ouvrage s’impose comme une clé pour comprendre le vécu de cette religion et la sensibilité orientale. Plus encore, il aspire à relier musulmans et non-musulmans, dans une visée de tolérance et de discernement. Face au détournement de l’islam par ceux qui ont alimenté sa dérive sectaire et djihadiste, la liberté et la finesse d’esprit de cet humaniste érudit et éclairé ouvrent le champ des possibles. ■ C.F. MALEK CHEBEL, Dictionnaire amoureux de l’islam, Plon, 752 pages, 14 €.
PREMIER ROMAN
POCHE
MUSIQUE
ROGÉR FAKHR
OLDIES BUT GOODIES
Encore une réédition indispensable du label Habibi Funk : le trésor FOLK PSYCHÉ du musicien libanais, enregistré en plein âge d’or des seventies.
VIDÉO
MARCEL MOUSSA DIOUF, L’AUTODIDACTE
Cet étudiant sénégalais a remporté le GRAND PRIX AFRICA pour son court-métrage, Je suis Liberté, lors de l’édition panafricaine du Mobile Film Festival.
C’EST UN FESTIVAL AU CONCEPT UNIQUE : réaliser un film d’une minute avec un téléphone. Une contrainte de format dont Marcel Moussa Diouf a tiré parti avec talent pour aborder un sujet qui le préoccupe : la dépendance au smartphone. Sa première réalisation, Je suis Liberté (à voir sur YouTube), est une métaphore percutante sur les dangers de leur usage excessif. « Ma génération est trop connectée, elle passe son temps sur son téléphone. Cela modifie nos comportements, nos priorités, et nuit à notre liberté », alerte ce cinéaste en herbe, qui a pensé son film seconde par seconde, avec une attention rigoureuse à chaque détail, visuel et sonore. Né en 1998, ce passionné de cinéma depuis l’adolescence a étudié à l’École de bibliothécaires, archivistes et documentalistes de Dakar. Fasciné par les œuvres de Quentin Tarantino, Alain Gomis, Ousmane Sembène ou encore Mati Diop, il assouvit sa curiosité en puisant ses connaissances sur le Web et apprend en autodidacte. Grâce au prix remporté au Mobile Film Festival Africa, il compte réaliser son prochain court-métrage, qui s’intéressera aux enfants des rues : « J’aime le cinéma militant, qui éveille les consciences. » Un regard mature qui ne manquera pas de faire mouche à nouveau. ■ Astrid Krivian
DEPUIS QUELQUES ANNÉES, le cocréateur du label berlinois Habibi Funk, Jannis Stürtz, ne cesse de rechercher des trésors sonores du monde arabe tombés dans l’oubli. On lui doit, entre autres, la réédition de Mouasalat Ila Jacad El Ard, du Libanais Issam Hajali – lequel avait vécu en colocation à Paris avec un certain Rogér Fakhr… La nouvelle pioche de Habibi Funk, c’est justement l’album de ce musicien libanais vivant désormais aux États-Unis : Fine Anyway. Enregistré au milieu des seventies entre Beyrouth et Paris, distribué via 200 cassettes, ce disque anglophone sonne comme un classique instantané, une merveille de folk psyché mâtinée de pop, de rock californien et de soul. Quelque part entre Simon and Garfunkel, Stevie Wonder, Neil Young et Fleetwood Mac, Fine Anyway groove sec sans perdre de vue l’émotion que peut ressentir n’importe quel exilé… ■ S.R. ROGÉR FAKHR, Fine Anyway, Habibi Funk.
Le songwriter (à gauche) avait à l’époque distribué 200 cassettes.
DANSE
TRAVERSÉES
Face à la situation sanitaire rendant les représentations impossibles, un film de danse à voir en ligne, inspiré du solo de la KÉNYANE
WANJIRU
KAMUYU, An Immigrant’s Story.
TEL UN FAUVE LÂCHÉ dans l’arène des mezzanines et du forum art déco du Palais de la Porte dorée, Wanjiru Kamuyu danse une histoire. Celle de l’humanité tout entière, qui va, vient, circule, cherche. Esseulé, presque désarticulé, son corps habité, forme mouvante déployée en un cri primal, navigue au milieu des fresques, des bas-reliefs, des parquets géométriques – autant de témoignages emblématiques de l’histoire coloniale et de l’immigration. Ce voyage, entre déplacement et altérité, est au cœur du travail chorégraphique de la Kényane cosmopolite, dont l’engagement pour la cause des réfugiées est fondamental. Conçue par le dramaturge Dirk Korell et le réalisateur Tommy Pascal, la retranscription filmée de son solo s’en fait l’écho, mettant l’accent sur l’éloquence du détail. Le langage de ses mains, de ses expressions, irradie. Et explore les soubresauts d’identités malmenées, d’émotions contraintes. Puis, libérées. Comme une peau en lambeaux qui tombe enfin. ■ C.F.
LA VISITE, d’après des éléments du spectacle de Wanjiru Kamuyu, An Immigrant’s Story. À voir sur caminaktion.eu/lavisite.
Extrait de La Visite
IAMISIGO
La rencontre avec le spirituel
Plus que des collections, un manifeste : cette marque nigériane repense la mode à travers le PRISME DES CULTURES, des histoires et des traditions africaines.
« LAND OF GODS », la terre des dieux. La designeuse derrière Iamisigo, Bubu Ogisi, n’a pas choisi le nom de sa dernière collection au hasard. Cette artiste éclectique qui gravite entre Lagos, Accra, Abidjan et Nairobi travaille toujours ses pièces à partir d’un concept créatif qui va bien au-delà d’une simple idée visuelle. Dans ses collections, entièrement réalisées par des artisans éparpillés sur le continent et à partir de matières premières locales, elle revendique et met à l’honneur les philosophies, les tissus et les techniques d’Afrique. Après avoir creusé le sujet de l’exploitation de la République démocratique du Congo avec « Chasing Evil », en 2020, elle s’inspire, pour les 16 modèles de cette nouvelle ligne, de la mythologie Yoruba et Edo et explore le concept de divinité. Le corps est un temple, un paysage spirituel et vital en mouvement constant, et il communique en s’habillant. Ses créations rendent donc hommage à la tradition du adaigho, l’habit porté par les hauts prêtres et prêtresses. Chaque
motif de la collection rappelle un élément votif ou cérémoniel, pensé pour lier le corps et l’esprit à travers une prière contemporaine. Et chaque couleur envoie un message précis : le rouge représente le sang, le feu, la provocation, le sacrifice et la violence, le noir renvoie au sentiment de honte, et le blanc à la joie et à la pureté.
Lorsqu’elle crée une robe, Bubu Ogisi, qui aime travailler avec des matières non conventionnelles, emploie des couches chiffonnées en polyester recyclé, afin de symboliser l’abondance spirituelle. Pour une veste, il s’agit de plastique recyclé aux reflets miroitants, comme un plan d’eau, qui invite à entrer en transe et à se connecter avec l’au-delà. En accessoires, elle reconstitue avec des perles un symbole Edo, le Igha-ede, une croix accompagnée de cercles aux significations multiples, du partage du temps à la transmission d’un message spirituel. Et pour la touche finale, les chaussures, elle a signé un partenariat avec le Nigérian Kkerele, qui utilise du cuir écoresponsable de manière artisanale. ■ L.N.
Ses pièces sont réalisées par des artisans du continent et à partir de matières premières locales. DR
Chaque couleur utilisée par Bubu Ogisi envoie un message précis : le blanc renvoie à la joie et la pureté.
BANDE DESSINÉE
NAUFRAGÉS DU DÉSERT
Dans ce roman graphique, Jacques Ferrandez illustre l’un des textes les plus emblématiques de l’univers labyrinthique de l’auteur algérien Mohammed Dib. COMME DANS UN ROMAN À TIROIRS ou un conte philosophique, nous voici aspirés dans un voyage sans fin. Au centre d’une terre inconnue. Dans les méandres de l’énigme du monde. Une guerre vient de se terminer, deux hommes errent dans le désert. L’un, Hagg Bar, le potentat, l’autre, Siklist, son fidèle valet. Ils disent marcher vers une source, chercher les traces d’un campement où ils devraient trouver les restes d’une écriture mystérieuse à déchiffrer. Les deux personnages sont comme dans un temps blanc. Une parenthèse. Qu’attendent-ils en réalité ? « Nous n’avions déjà pas d’histoire. Nous vivions nos jours, les jours que le destin impartit à chacun, et nous passions. Une fois passés, nous n’avions pour ainsi dire jamais existé. » Dans ce dédale de la pensée, les héros de cette fable becketienne, aux faux airs de Don Quichotte et de Sancho Panza, questionnent interminablement nos enchevêtrements intérieurs. Et l’attrait des mirages. ■ C.F. MOHAMMED DIB ILLUSTRÉ PAR JACQUES FERRANDEZ, Le Désert sans détour, Actes Sud, 192 pages, 25 €.
CONFIDENCES
OUI, LA MUSIQUE !
Cinquante ans de tubes inoubliables, de fous rires et de coups de gueule dans ce beau livre de Nicoletta.
RAY CHARLES la considérait comme l’une des plus belles voix de la chanson française : « La seule Blanche avec une voix de chanteuse noire. » Une rencontre décisive pour l’interprète de « Mamy Blue » et d’« Il est mort le soleil », que l’artiste américain surnommait sa « soul sister ». Élevée dans la campagne savoyarde par une grand-mère mélomane, Nicoletta a non seulement le blues et le gospel dans la peau, mais aussi l’ardeur de celles et ceux qui entrent par la petite porte. 23 albums, plus de 3 000 concerts et une apparition au cinéma (Un aller simple, Laurent Heynemann, 2000) plus tard, ce tempérament de feu peut se targuer d’avoir su saisir sa chance. Jalonnée de rencontres marquées d’une pierre blanche – Eddie Barclay, Johnny Hallyday, Jimi Hendrix, mais aussi l’inénarrable Hervé Vilard –, sa carrière ne manque pas de piquant. À 77 ans, l’artiste au timbre reconnaissable entre tous nous livre confidences, anecdotes et souvenirs de scène dans un ouvrage illustré de photographies et de documents inédits. ■ C.F. NICOLETTA, Soul Sister : Cinquante ans de scène, Le Cherche-Midi, 152 pages, 28 €
PHOTOJOURNALISME
Une année sous le signe du virus
Le WORLD PRESS PHOTO, c’est le concours le plus prestigieux, une plongée à chaque édition dans le rythme, l’énergie et le chaos du monde, à t ravers la focale des reporters d’images
POUR L’ÉDITION 2021, 4 315 photographes venus de 130 pays auront soumis plus de 74 470 images. Le jury aura sélectionné 45 d’entre elles. Le prestigieux prix World Press Photo of the Year (Photo de l’année) a été attribué au Danois Mads Nissen, déjà vainqueur en 2015 (avec un reportage sur l’homophobie en Russie). C’est une image forte, sous le sceau du Covid-19, intitulée The First Embrace. Celle d’une première étreinte entre une infirmière d’une maison de retraite de São Paulo, au Brésil, et une résidente octogénaire. Au moment de la photo, en août 2020, Rosa Luzia Lunardi, 85 ans, profitait de son premier contact avec un autre être humain depuis le début de la pandémie en… mars. Un moment d’émotion,
dans l’un des pays les plus violemment impactés par l’épidémie, un moment particulier, à travers une protection en plastique, comme un symbole de la fragilité de notre monde, mais aussi de la force de nos émotions.
Cette année sous le signe du virus se retrouve aussi dans cette image de Ralph Pace (1er prix Environnement), prise au large de la Californie, où un lion de mer, surpris, croise un masque FFP2 entre deux eaux. Un raccourci graphique où se rencontrent la pandémie et la lutte pour le développement durable. L’ensemble du palmarès et du travail des reporters est à découvrir sur le remarquable site Web de l’organisation (worldpressphoto.org). ■ Zyad Limam
RALPH PACE, California Sea Lion Plays with Mask, 1er prix Environnement.
MADS NISSEN (POLITIKEN/PANOS PICTURES), The First Embrace, Photo de l’année.
ET SI L’ON REVENAIT AUX BASIQUES ?
Ces deux restaurants nous font (re)découvrir des CLASSIQUES dont on ne se lasse pas.
IL Y A UN PEU PLUS D’UN AN, une étonnante table gastronomique panafricaine a ouvert dans le quartier chinois du 13e arrondissement, à Paris : le Moonlight. Le chef et gérant ivoiro-camerounais, Tillard Cadevall Diomande, y sert des assiettes généreuses, comme à la maison. Dans le top 5 de ses plats préférés, on retrouve le Choukouya de Côte d’Ivoire (une épaule d’agneau émincée, accompagnée de frites de patates douces et de plantains), le mafé de bœuf du Sénégal, le sauté de bœuf au gombo,
Le Coq Noir, à Clichy-la-Garenne, est une véritable institutio n ouverte depuis près de quinze ans (ci-dessous).
ou encore l’indémodable poulet braisé. En ces temps de pandémie, le Moonlight compte sur les livraisons, avec des menus pensés pour se faire plaisir, même au bureau, ainsi que sur la remise de 20 % sur le click and collect pour attirer les nouveaux clients. Parce qu’une fois qu’on découvre ce restaurant, on l’adopte ! D’une nouvelle table à une historique : Le Coq Noir est une véritable institution située à Clichyla-Garenne, aux portes de Paris. Ouvert depuis près de quinze ans,
le restaurant peut compter sur une clientèle fidèle. Avec sa cuisine raffinée, délicate et parfumée, la cheffe franco-camerounaise Marie Christine Riou a su séduire ses habitués et les curieux qui découvrent les saveurs africaines. La carte fait la part belle aux grands classiques camerounais, comme le Ndolé (viande de bœuf, crevettes ou encore mixte). À ne pas rater du côté des entrées : le Soya de bœuf (des brochettes marinées aux épices du Cameroun) fait toujours des heureux. ■ L.N. moon-light.restaurant / lecoqnoir.fr
Le Choukouya de Côte d’Ivoire du Moonlignt (ci-contre).
David Adjaye décolonise l’art
Le célèbre architecte britannico-ghanéen connecte présent et passé dans la conception de l’EDO MUSEUM OF WEST AFRICAN ART, au Nigeria.
LE FUTUR MUSÉE d’Edo pour l’art ouest-africain ouvrira dans cinq ans à Bénin City, au Nigeria, mais le projet fait déjà couler beaucoup d’encre. En effet, c’est le dernier grand chantier africain du starchitecte britannico-ghanéen Sir David Adjaye. Destiné à mettre en avant l’art et les restes archéologiques de l’ancien royaume du Bénin, il est le symbole de la coopération entre le Nigeria et le British Museum sur le terrain de la revalorisation de la culture africaine. Un partenariat qui vise à créer une institution mondialement reconnue autour d’une collection d’objets pillés par les colonisateurs. Comme les bronzes du Bénin, une série de sculptures en métal et en ivoire, corail et bois, dont le Nigeria demande le retour. Le projet du musée, qui surgira
sur une zone de fouilles, prévoit de connecter présent et passé à travers les restes archéologiques, mariant harmonieusement le nouveau bâtiment et les anciennes ruines avec le paysage. À l’intérieur, le visiteur se promènera entre jardins ombragés, galeries flottantes au-dessus de la végétation et pavillons s’inspirant de maisons historiques des Edos. Tout est fait pour remettre les artefacts dans leur contexte précolonial et « déconstruire l’objectification telle qu’elle s’est construite en Occident ». L’architecture elle-même assume une fonction fondamentale dans la fruition des œuvres, leur restituant le sens qui leur a été volé. adjaye.com ■ L.N.
À l’intérieur, les visiteurs se promèneront sous des répliques de s maisons des Edos. Ici, un toit faisant référence à la royauté.
HOMMAGE
Ci-dessus, à gauche, Cuba Si, 1961.
Ci-dessus, à droite, Procession, les ailes du désir, 1985.
FARID
BELKAHIA, POUR UNE AUTRE MODERNITÉ, Éditions du Centre Pompidou, 160 pages, 24 €
À LA QUÊTE DU MONDE
Considéré comme l’un des fondateurs de la modernité artistique marocaine, et plus largement arabe, FARID BELKAHIA fait l’objet d’une rétrospective au Centre Pompidou.
IL EST CONNU pour ses œuvres peintes sur du cuir avec des pigments naturels. Un choix esthétique et intime entérinant sa rupture avec la peinture occidentale : « J’ai délibérément opté pour un matériau hautement inscrit dans la tradition artisanale du Maroc. » La peau devenant ainsi médium central de son art et support métaphorique. Par cette démarche, Farid Belkahia (1934-2014) rappelle que la modernité est multiple et que la création est avant tout acte de liberté, où la mémoire, le réel et l’imaginaire se combinent. L’exposition qui lui est consacrée au Centre Pompidou s’articule autour de la période pragoise et expressionniste de l’artiste à partir de 1959, puis de son retour à Casablanca en 1962, avec une salle spécifiquement consacrée à ses cuivres. Elle se clôt par un ensemble d’œuvres réalisées à partir de peaux de chèvres : un dialogue entre avant-garde et culture traditionnelle. Dédié à l’événement, le catalogue Farid Belkahia, pour une autre modernité invite à une première visite. Immobile. En attendant la réouverture des musées. ■ C.F. « FARID BELKAHIA », Centre Pompidou, Paris (France), jusqu’au 19 juillet 2021 (les dates peuvent évoluer en fonction de l’actualité). centrepompidou.fr
INTERVIEW
Dalila Kerchouche enquête sur le plaisir féminin
Après Espionnes (2016), la journaliste et autrice française publie Sexploratrices. Elle y rencontre des femmes émancipées, résilientes, qui se réapproprient leur puissance sexuelle, leur désir, en brisant les normes patriarcales.
AM : Qui sont les « sexploratrices » de votre livre ?
Dalila Kerchouche : Ces femmes inspirantes, de milieux sociaux et âges différents, sont dans une quête d’émancipation, explorant avec leur corps et leur esprit leur sexualité. Selon moi, devenir une « sexploratrice » – synonyme de panache, d’audace, de liberté –, c’est mettre sa sexualité en mouvement, sonder ses zones de fragilité, blessées, se questionner sur notre héritage… Notamment sur notre « arbre gynécologique », notion de la gynécologue Danièle Flaumenbaum, qui s’intéresse à quels schémas sexuels nous sont transmis à travers les femmes de notre lignée. C’est important d’en avoir conscience. On sous-estime l’impact de la sexualité dans la construction psychique d’un individu. Or, aujourd’hui, à l’adolescence, elle se réalise dans une solitude, pétrie de non-dits, de tabous, un demi-siècle après la révolution sexuelle des années 1970 ! La clé est de remettre de la réflexion, de l’introspection, de la poésie, de la relation, de l’émotion dans sa sexualité. C’est primordial pour se sentir complète. Il faut rompre avec ces féminités amputées, amoindries, contrôlées, afin de retrouver sa puissance intime et prendre toute sa place dans la société. C’est aussi une quête existentielle et identitaire. L’enjeu, à la fois intime et sociétal, est colossal. Vous parlez d’un sexe féminin universellement meurtri…
dans une ignorance dangereuse de leur corps. Et non, elles ne sont pas des réceptacles passifs pour le plaisir masculin. La plupart de celles que j’ai rencontrées se sont construites par rapport au regard de l’homme, lequel les « validerait ». Mais le corps des femmes n’est pas un bien public que chacun aurait le droit de juger ! Un contrôle social s’exerce fortement sur elles, encore aujourd’hui, et définit les limites de la morale et de la pudeur. S’émanciper, c’est déconstruire ces normes qui entravent la quête de notre plaisir, la construction et l’expression d’une sexualité singulière, individuelle. C’est un livre sur les sexualités féminines. Les affranchies sexuellement sont encore stigmatisées, car la peur millénaire du plaisir féminin persiste. Une femme qui jouit, qui assume sa libido est puissante, libre, indépendante, insoumise, à l’écoute de ses désirs. C’est dangereux pour l’ordre social. Qu’avez-vous découvert à ce sujet ?
DALILA KERCHOUCHE, Sexploratrices : À la conquête du plaisir, Flammarion, 320 pages, 19,90 €.
La sexualité féminine s’est construite sur des traumatismes, une civilisation du viol, rappelle la psychiatre Muriel Salmona. Le mouvement #MeToo a permis de mettre des mots sur ces atteintes à l’intégrité que les femmes ont toutes vécues, traversées, sans en avoir conscience ni oser le dire. Tourmenté depuis des siècles, le corps féminin fait l’objet de privation, d’instrumentalisation, d’objectification. Des clichés maintiennent les femmes
La sexualité est un univers très vaste, à l’opposé de la vision conventionnelle, normative, assez étriquée et pauvre que j’en avais – génitale, mécanique, physiologique. C’est un art, qui prend différentes formes d’expression. Les représentations classiques véhiculées par le cinéma ou la publicité sont très influencées par la pornographie, le consumérisme, la logique utilitariste : la course à l’orgasme, la jouissance à tout prix, utiliser l’autre pour son propre plaisir. Il manque la rencontre, la relation, la dimension émotionnelle, spirituelle, créative, lumineuse, joyeuse… Toutes ces dimensions sont explorées à travers ces témoignages. Une deuxième révolution sexuelle est en marche depuis quelques années. On voit se multiplier les conférences et ateliers dédiés au plaisir féminin, à l’épanouissement intime, les comptes Instagram autour du clitoris, de la vulve… Les jeunes femmes sont très mobilisées et engagées pour revendiquer cette réappropriation de leur plaisir et de leur sexualité. ■ Propos recueillis par Astrid Krivian
Jhonel
LE SLAMEUR ET POÈTE NIGÉRIEN, GRIOT 2.0,
a choisi le pouvoir de la parole pour revendiquer la justice sociale et éveiller les consciences. Armé de son phrasé éloquent et de ses images fortes, il égrène ses mots au rythme de sa révolte.
par
Astrid
Krivian
Les mots pour dire les maux. Cette célèbre formule figure bien l’art oratoire de Jhonel, qui scande en musique ses textes conscients, engagés, dénonçant les fléaux de la société. D’aucuns le considèrent slameur, lui se présente comme « fils de la parole », inspiré par la pratique des conteurs et des griots. « Dans notre culture, basée sur la littérature orale, la parole a une force. Hélas, cette tradition s’éteint à petit feu. On se dirige vers la marche du grand monde, mais en rompant avec nos valeurs, nos coutumes, notre identité », regrette l’artiste. À la différence des louanges et des hauts faits racontés par la tradition griotique, son verbe est un outil de révolte pour dépeindre les injustices sociales, éveiller les consciences, porter la voix des opprimés. Né en 1984 au Niger, cet « enfant du voyageur » a grandi entre son pays natal et la Côte d’Ivoire, où ses parents commerçants ont émigré. Dans son premier recueil de poésies Niamey, cour commune (L’Harmattan, 2014), celui qui, adolescent, slamait déjà avec ses amis, raconte son enfance au sein d’une famille élargie, levant le tabou sur la polygamie : « Je décris la tristesse de ces conditions de vie difficiles pour les femmes et les enfants, l’injustice permanente. »
Après un premier album, Assalam Aleykoum, réalisé au Mali en 2010, il met le cap sur la France en 2013 et crée un spectacle voix-percussions avec le batteur Jean-Luc Bernard. Avec sa verve éloquente, il sillonne l’Hexagone lors d’une tournée en 2016, puis les États-Unis, au sein d’universités, en 2017. Par ailleurs, Jhonel fonde Fish Goni, un festival de slam, d’humour et de colloques dédié aux enjeux de développement, à Niamey. L’édition 2019 était consacrée à l’inclusion des personnes en situation de handicap. Une question à laquelle le griot moderne est particulièrement sensible : enfant, il a profondément été marqué par les discriminations auxquelles sa tante, frappée de mutisme, devaient faire face. Que ce soit en français ou en zarma, l’une des langues du Niger, sa plume indignée manie habilement l’ironie. Dans « Ils ne sont que des pauvres », morceau pétri d’outrance et de sarcasme, et titre de son deuxième recueil, il singe un homme politique cynique, véreux. « Je veux que la société prenne conscience qu’elle est la main-forte du changement, si elle se lève, refuse de se laisser manipuler, combat sa pauvreté. » La clé pour une société plus égalitaire ? L’éducation. « C’est un droit. » Vent debout contre la corruption des puissants – « Ma conscience n’est pas à vendre », martèle-t-il –, il met également le citoyen face à ses contradictions, comme dans la chanson « 1 000 poèmes », où les mots sont les miroirs d’une vérité difficile à affronter. Son leitmotiv « La porte ne peut s’ouvrir de l’extérieur / Mais seulement de l’intérieur ! » invite à incarner soi-même le changement, avant de l’exiger du monde.
Partisan du panafricanisme, il plaide pour une Afrique unie et forte. « Nos dirigeants doivent répondre à ces questions : comment faire profiter aux populations des richesses du continent ? Transformer nos matières premières chez nous ? On peut échanger avec l’autre, mais selon un accord gagnant-gagnant. Ce n’est pas le cas actuellement, donc on ne peut pas se déclarer indépendants. » griotmoderne.com ■
«Je veux que la société prenne conscience qu’elle est la main-forte du changement.»
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PAR EMMANUELLE PONTIÉ
TERRES BRÛLÉES
La pandémie de Covid-19 aura relégué la question mondiale de l’environnement au second plan. Plus de manifestations, pas de COP en 2020. Certes, un des effets de cette longue période d’arrêt généralisé aura été, indirectement, la diminution des émissions de CO2. En avril 2020 par exemple, au plus fort de la fermeture internationale des échanges, on mesurait -75 % dans le secteur de l’aviation, -50 % dans le domaine des transports en général, et -15 % pour l’énergie. Très bien. Mais évidemment, la planète aspire à la reprise des activités, et la généralisation de la vaccination peut le laisser espérer pour bientôt. Donc il semble que nous allions droit dans le mur.
Une petite lueur positive s’est allumée aux États-Unis, les 22 et 23 avril, quand Joe Biden a organisé son sommet virtuel sur le climat, avec de belles annonces, qui montrent une rupture, enfin, avec les années Trump et le climat bashing américain. Les États-Unis promettent de réduire leurs vilaines émissions de gaz à effet de serre de 50 % d’ici 2030, l’Europe de 55 %, et la Chine assure qu’elle atteindra la neutralité carbone en 2060. C’est bien. Mais c’est loin. Et l’Afrique semble être la grande oubliée du système, elle qui n’émet que 4 % des gaz en question, mais se bat déjà au quotidien contre les effets du réchauffement, entre sécheresse galopante, inondations, cyclone et invasions de criquets. Alors, passons sur le fait que seuls cinq chefs d’État du continent noir, en tout, étaient conviés par Joe à son sommet…
Mais la question du financement archi-urgent dont nos pays ont besoin n’a jamais été résolue, de COP en COP. Les fonds verts de soutien se sont multipliés, ont été votés. Et ce, même avant l’accord de Copenhague de 2009. Fonds spécial pour les changements climatiques, Fonds d’adaptation, Fonds pour l’environnement mondial, etc. En gros, plus de 100 milliards de dollars par an… qui n’ont jamais vraiment été versés. Principalement pour des raisons techniques de mécanismes hyper compliqués, dont l’allègement sera d’ailleurs l’un des ordres du jour de la prochaine… COP, qui devrait (enfin) se tenir en novembre à Glasgow, sous la houlette conjointe des Britanniques et des Italiens. C’est top ! En attendant, l’Afrique brûle.
Et si ses dirigeants ne mettent pas la question verte au centre de leurs politiques d’une part, et ne tapent pas du poing sur la table internationale très fort d’autre part… le continent risque d’être englouti par les fléaux naturels et submergé par la famine. Et comme dit l’adage, c’est déjà demain. Alors, il faut vraiment bouger ! ■
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