Abidjan Soir N°338

Page 1


VINCENT TOH BI : AU COMBAT

CÔTE D’IVOIRE : CE

QUE L’

ON SAIT DES NOUVELLES ARRESTATIONS DE VDP À

LA FRONTIÈRE

Deux Volontaires pour la défense de la patrie burkinabè ont été arrêtés fin avril par l’armée ivoirienne après avoir franchi la frontière et pénétré dans le département de Bouna. Ils ont depuis été relâchés.

Fin avril, deux Volontaires pour la défense de la patrie (VDP, supplétifs civils de l’armée burkinabè) ont été interpellés dans le département de Bouna, dans le nord-est de la Côte d’Ivoire, alors qu’ils venaient de franchirlafrontière.

Selon nos informations, les deux hommes ont été détenus pendant 48 heures avant d’être remis à leur commandement par les autorités ivoiriennes. Une libération rapide, qui a permis d’éviter un nouvel incident diplomatique entre deux pays qui entretiennent des relations très tendues depuis l’arrivée au pouvoir au Burkina Faso du capitaine IbrahimTraoré,enseptembre2022.

En 2023, deux gendarmes ivoiriens à la poursuite d’un groupe d’orpailleurs clandestins avaient été arrêtés en territoire burkinabè et détenus pendant un an à Ouagadougou avant qu’un accord pour leur libération ne soit trouvé. Celui-ci, conclu à la fin de 2024, comprenait un échange entre les deux gendarmes et un militaire burkinabè ainsi qu’un VDP détenus à Abidjan. Ils avaient été interpellés dans le département deTéhini,danslenord-estdelaCôted’Ivoire.

Ibrahim Traoré accuse régulièrement la Côte d’Ivoire de « déstabilisation » Franchissementintempestifdelafrontière,installations

dans les campements ivoiriens, incivilités contre les populationslocales,volsdebétails…

Accusés d’exactions dans leur pays, les VDP multiplient les provocations le long de cette frontière poreuselonguede600kilomètres.

Les autorités ivoiriennes sont par ailleurs très vigilantes quant aux tentatives de recrutements en Côte d’Ivoire. Dans la nuit du 10 au 11 mars, trois jeunes militaires ivoiriens (deux adjudants et un caporal appartenant au Groupement tactique interarmes, GTIA) en poste à Bouna se sont volatilisés de leur caserne avant de prendre la direction du Burkina Faso. Dans cette zone où pullulent les VDP, la piste d’un enrôlement est avancée par Abidjan. Un ralliement qui pourrait avoir été motivé par « l’appât dugain».

Ces incidents interviennent dans un contexte de grande tension entre Abidjan et Ouagadougou, où Ibrahim Traoré, allié des juntes au pouvoir au Mali et au Niger au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES), accuse régulièrement son voisin de « tentatives de déstabilisation ». Fin avril, le Burkina Faso a même assuré avoir déjoué un « grand complot » orchestré depuis la Côte d’Ivoire. Des accusations répétées mais jamaisétayéesettoujoursdémentiesparAbidjan.

Jeune Afrique

Directeur de Publication : Israël Guébo

Secrétaire de rédaction : Jemima Kessié

Direction Artistique : Félix Ancien

Rédacteurs : Sultane Cissé, Kledjeni Tayou, Tchimou Berenger, Bainguié Jean-François, Koffi Étile, Teiko Célestin, Vincent Gnamessou, Joël Koné
Abidjan soir est édité par l’Institut Africain des Médias (IAM)

PRÉSIDENTIELLE 2025 : VINCENT TOH BI IRIÉ ENTRE OFFICIELLEMENT

DANS LA COURSE

L’ancien préfet d’Abidjan, Vincent Toh Bi Irié, a annoncé ce mardi 13 mai sa candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2025. C’est par une vidéo solennelle diffusée sur sa page Facebook que l’ancien haut fonctionnaire a officialisé son entrée dans la course à la magistrature suprême.

« Je viens par ce message vous annoncer que je suis candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2025 », a-t-il déclaré, confirmant ainsi une ambition longtemps murmurée. Déjà en 2020, alors qu’il avait brièvement envisagé de se présenter, il confiait : « Notre temps n’est peut-être pas venu de servir au niveau suprême, mais ce sont des aspirations. »

Une candidature fondée sur trois axes

Dans son allocution, Vincent Toh Bi a exposé les motivations qui sous-tendent sa décision. Trois priorités se dégagent de son discours. D’abord, la transformation des institutions et des modes de gestion. Le candidat plaide pour une nouvelle gouvernance, plus moderne, plus transparente et davantage orientée vers les résultats. « Il nous faut apporter une nouvelle perspective à tous les compartiments de notre vie nationale », a-t-il souligné.

Ensuite, l’ouverture de l’espace politique à une plus grande diversité sociale. Selon lui, la vie publique ne devrait plus être l’apanage d’une élite politique professionnelle. Il appelle à une participation élargie des citoyens dans la gestion des affaires de l’État.

Enfin, la réconciliation et l’unité nationale constituent le troisième pilier de sa vision. Dans un contexte politique marqué par des tensions récurrentes, Vincent Toh Bi propose une approche axée sur l’apaisement, la cohésion et le dialogue.

« Pour la Côte d’Ivoire, pour le peuple, pour l’unité, pour contribuer au développement, pour rassurer et pour réconcilier, je suis candidat », a-t-il déclaré pour conclure son annonce.

Une nouvelle figure dans un paysage déjà chargé

Avec cette déclaration, Vincent Toh Bi rejoint une liste de personnalités déjà en lice ou pressenties : l’ancien président Laurent Gbagbo, l’ex-ministre Charles Blé Goudé, l’ex-Premier ministre Guillaume Soro et Tidjane Thiam, ancien ministre et ex-patron du Crédit Suisse.

De son côté, le président sortant Alassane Ouattara ne s’est pas encore prononcé sur une éventuelle candidature à un quatrième mandat. Le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) tiendra son congrès les 21 et 22 juin à Abidjan, une étape qui pourrait clarifier la position du chef de l’État.

VINCENT TOH BI : CHRONIQUE D’UN RENDEZ-VOUS (PRESQUE) MANQUÉ Il fut préfet, communicateur hors norme, écrivain discret et spécialiste électoral international. Aujourd’hui, à 55 ans, Vincent Toh Bi Irié se lance officiellement dans la course à la présidence de la République de Côte d’Ivoire. Une candidature qui intrigue autant qu’elle fascine, tant l’homme a su construire, au fil des ans, une image d’exception dans un paysage politique souvent figé.

NéàDaboudansunefamillemodeste,VincentToh Bi incarne l’idéal du mérite républicain. Étudiant brillant, formé en Lettres modernes puis à l’École nationale d’administration (ENA), il entre dans le corpspréfectoralà31ans,maispréfères’enretirer pour se former davantage. Il choisit l’Afrique. Et le terrain.

Pendant plus d’une décennie, il sillonne le continent au service de grandes institutions internationales : EISA, ONU, NDI, Union africaine, CEDEAO,USAID…

Il accompagne les transitions démocratiques, supervise des élections, forme des citoyens. Son expertise en gestion de crise est recherchée. Sa méthode : allier rigueur, écoute et communication directe.

En 2018, lorsqu’il est nommé préfet d’Abidjan, il bouscule les habitudes. Son style tranche : messages Facebook quotidiens, vidéos de terrain, réponsesauxcitoyens.

Pendant la crise du Covid-19, il devient la figure la plus visible de l’administration. Trop visible, diront certains.

Un jour à Yopougon pour calmer des manifestants, un autre dans un quartier sensible, discutant sans protocole avec des jeunes, Toh Bi agace les autorités. On lui reproche une "communication incontrôlée", une "posture personnelle".

Mais les populations, elles, lui reconnaissent une rarecapacitéd’écouteetuneproximitésincère. 2020 : l’ombre d’une candidature, le goût d’un rendez-vousmanqué

Le 31 août 2020, alors que la Commission électorale indépendante (CEI) s’apprête à clore les dépôts de candidatures pour l’élection présidentielle,uneétrangescènesejoue.

Des jeunes arborant des t-shirts à l’effigie de Vincent Toh Bi s’amènent avec un dossier de candidature… aunomdel’ancienpréfet. >>>>>

>>>>> Problème : le dossier est incomplet, non signé, déposé par un tiers un certain Daniel Ninsemon sans mandat officiel. Un "acte symbolique", dira-t-il. Mais la nouvelle fait le tour du pays. Toh Bi, lui, se mure dans le silence, puis publie une vidéo depuis son village natal.

Il affirme n’avoir rien orchestré, mais avoue : « Notre temps n’est peut-être pas venu de servir au niveau suprême, mais ce sont des aspirations. ». Le mal est fait. Ou plutôt, le signal est lancé.

Une candidature enfin assumée Cinq ans plus tard, le masque tombe. Ce 13 mai 2025, dans une déclaration sobre publiée sur sa page Facebook, Vincent Toh Bi annonce sa candidature à la présidence.

Trois piliers guident son engagement : Réformer profondément la gouvernance pour une efficacité publique moderne ; Ouvrir la vie politique à de nouveaux visages et à une vraie diversité sociale ; Rebâtir la cohésion nationale, par une politique d’apaisement et de réconciliation.

Son ambition : replacer le citoyen au centre, loin des jeux d’appareils.

Sans parti, sans parrain politique affiché, Vincent Toh Bi entre dans l’arène avec sa réputation et son expérience pour seuls étendards. Il n’a ni la structure du RHDP, ni les foules militantes du PPACI, ni la base historique du PDCI. Mais il porte une promesse : celle de faire de la politique autrement.

Reste à savoir si la Côte d’Ivoire de 2025 est prête à suivre un homme qui a souvent préféré la vérité au confort, le terrain aux salons, et les mots aux postures.

Ce qui est sûr, c’est que l’enfant de cour commune, devenu haut fonctionnaire, puis figure populaire, entre enfin dans la lumière. Avec, en tête, cette phrase devenue prophétique : « Ce sont des aspirations. »

Arthur Debi

VINCENT TOH BI, LE RETOUR… MAIS POUR QUOI FAIRE ?

Parmi les candidatures déclarées pour l’élection présidentielle de 2025, celle de Vincent Toh Bi Irié ne passe pas inaperçue. Respecté pour son sérieux, apprécié pour sa rigueur, et connu pour sa proximité avec les populations, l’ancien préfet d’Abidjan reste, aux yeux de beaucoup, un haut fonctionnaire compétent et sincère. Mais est-il encore l’alternative espérée que certains voyaient en lui en 2020 ? Rien n’est moins sûr.

Il fut l’homme de la pandémie. Le préfet au ton calme et aux vidéos pédagogiques. Le haut cadre qui n’hésitait pas à descendre dans les quartiers, à dialoguer avec les jeunes, à contourner le protocole pour écouter, agir, désamorcer.

Mais dans la mémoire politique des Ivoiriens, une scène pèse lourd : celle du 31 août 2020, dernier jour du dépôt des candidatures à la CEI

Ce jour-là, un dossier de candidature est déposé en son nom. Incomplet. Non signé. Porté par des anonymes en tee-shirts à son effigie. Le slogan est clair : « Osons le changement. Vincent Toh Bi, un choix, une vision, une nation. »

Et pourtant, quelques heures plus tard, lui-même se désolidarise fermement de cette initiative. Il n’est, dit-il, « pas au courant ». Il parle d’un "acte symbolique" de jeunes militants.

Depuis ce jour, une suspicion douce, mais persistante, s’est installée dans l’opinion : reculade stratégique ?

Peur d’aller jusqu’au bout ? Ou simple initiative mal encadrée ?

Qu’importe. Dans l’imaginaire collectif, Vincent Toh Bi a manqué un rendez-vous.

Une annonce qui relance… mais sans secouer Cinq ans plus tard, il revient. Cette fois, officiellement candidat.

Le ton est posé, le discours structuré, les intentions claires : gouvernance réformée, inclusion citoyenne, réconciliation nationale.

Mais malgré la pertinence de son propos, l’effet de surprise n’y est pas. Le souffle de l’alternative semble déjà ailleurs.

Car pendant que Vincent Toh Bi se faisait discret, un autre visage, lui aussi issu des rangs non-traditionnels, prenait de l’élan dans l’opinion : Assalé Tiémoko Antoine.

Le député-journaliste, devenu porte-voix d’une autre Côte d’Ivoire, s’est imposé dans le paysage comme une figure de rupture radicale. Son verbe franc, ses alertes contre les abus du système, sa proximité avec les couches populaires, et surtout sa constance dans l’engagement ont fini par lui donner ce que Vincent Toh Bi avait un temps frôlé : la crédibilité de l’opposant citoyen.

Assalé n’a pas attendu que l’espace lui soit offert. Il l’a conquis, pas à pas, discours après discours, mobilisation après mobilisation.

Aujourd’hui, dans le cœur des indécis, Assalé a pris une longueur d’avance. Encore faudrait-il que ce dernier annonce sa candidature. Un pas réclamé par les militants de son Mouvement politique ADCI et par de nombreux ivoiriens. A.D

Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.