Abidjan Soir N°324

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THIAM, LE SONDAGE ET L’ART D’ÊTRE MALADROIT

Dans une Côte d’Ivoire où chaque mot en politique est pesé, analysé, disséqué, la parole du leader n’est jamais neutre. Elle éclaire, rassemble ou divise. C’est cette réalité que Tidjane Thiam, fraîchement désigné candidat du PDCI-RDA à la présidentielle de 2025, semble avoir quelque peu ignorée dans sa réaction à sa radiation des listes électorales.

À peine l’annonce de sa radiation rendue publique ce mardi 22 avril, le président du PDCI a contre-attaqué… Par sondage interposé. Un chiffre choc : 57 % face à 41 % pour le président Ouattara dans un hypothétique second tour. Mieux encore, il se dit largement en tête devant Laurent Gbagbo, dans un duel des “leaders populaires”. Une démonstration de force ? Peut-être. Un mauvais calcul politique ? Assurément.

Quand le fond se heurte à la forme

Qu’un candidat veuille montrer sa popularité, rien de plus légitime Mais qu’il le fasse au moment où son éligibilité est juridiquement contestée, en invoquant une enquête d’opinion dont il détient seul les résultats, cela interroge

Au lieu de rassembler l’opposition autour d’un combat pour des élections justes et inclusives, Tidjane Thiam donne l’image d’un homme obsédé par le score, même imaginaire, et prompt à désigner ses adversaires, y compris ceux de son propre camp

Gbagbo, une figure qu'on ne compare pas à la légère

Il y a surtout dans cette sortie une erreur d’analyse culturelle et symbolique. Laurent Gbagbo n’est pas un simple “rival politique”. Il est une figure emblématique de la Côte d’Ivoire contemporaine. Son nom est inscrit dans l’histoire récente du pays, ses combats, ses douleurs, ses réconciliations.

Il est, sans conteste, plus connu, plus ancré dans l’imaginaire collectif que Tidjane Thiam, dont la notoriété repose encore largement sur sa carrière internationale.

Le comparer froidement, dans une logique de chiffres, c’est ignorer ce que représente Gbagbo pour des millions d’Ivoiriens. Et c’est aussi prendre le risque d’un faux pas stratégique vis-à-vis de ceux qui pourraient être demain des alliés.

Le PPA-CI, fausse cible, vraie réaction

Le mal est fait. La réaction du PPA-CI ne s’est pas fait attendre. Fabrice Lago, l’un de ses cadres, a déclaré :

« Je trouve maladroite cette sortie de Thiam, dans laquelle il cite le président Gbagbo en se basant sur un obscur sondage dont lui seul détient les résultats. Sauf s’il se trompe sur la personne qui a radié son nom de la liste électorale »

Une critique qui fait écho à un malaise plus profond : au lieu de s’attaquer aux fondements juridiques de sa radiation, Tidjane Thiam semble avoir privilégié une posture de victime sur fond d’auto-promotion, en brouillant ses rapports avec les autres composantes de l’opposition

L’obsession du score contre l’exigence de clarté

L’épisode révèle aussi une chose : Tidjane Thiam, dont le style technocratique séduit une frange de la jeunesse et de la diaspora, doit encore apprendre la temporalité politique ivoirienne Il ne suffit pas de brandir des courbes de sondage pour consolider une légitimité, surtout dans un pays où la crédibilité se construit dans la durée, sur le terrain, dans la cohérence des alliances. Les Ivoiriens n’attendent pas un champion des sondages. Ils veulent un homme d’État capable de fédérer, de porter une parole juste, et d’incarner une alternative crédible dans la tempête. En cela, la communication de Thiam, aussi brillante soit-elle sur le fond, a manqué de finesse sur la forme.

Par Israël GUÉBO. Directeur des Rédactions

INÉLIGIBILITÉ DE TIDJANE THIAM : LE PDCI APPELLE À DES MARCHES DEVANT LES TRIBUNAUX

Cette mobilisation du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) fait suite à la radiation de la liste électorale, le 22 avril, de son chef Tidjane Thiam, à six mois de l’élection présidentielle à laquelle il veut se porter candidat.

Le « vieux parti » passe à l’action. Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) a appelé mercredi à des « marches » jeudi 24 avril devant les tribunaux du pays afin de protester contre l’éviction de son candidat, Tidjane Thiam, de l’élection présidentielle d’octobre.

« Demain, partout sur l’étendue du territoire, chaque Ivoirien là où il se trouve va marcher devant le palais de justice de sa région, de sa ville », a déclaré Simon Doho, chef des députés du PDCI, depuis la permanence du parti du quartier du Plateau, à Abidjan.

Il s’agit du premier appel à la mobilisation depuis la radiation de Tidjane Thiam de la liste électorale, mardi 22 avril. Cette décision n’est pas susceptible de recours et ferme la porte à sa candidature.

« Titi président »

En face de Simon Doho, une centaine de militants ont entonné l’hymne national et crié « Titi président », surnom de leur candidat. Selon Simon Doho, c’est « un appel à tous nos frères et sœurs, de toute ethnie, de toute religion, qui croient à la Côte d’Ivoire, qui refusent la dictature » de l’actuel président Alassane Ouattara.

À Abidjan, la marche est prévue jeudi à 9 heures (locale et GMT), de la permanence du parti du Plateau jusqu’au tribunal de la même commune

Les manifestations, qui peuvent avoir lieu avec une autorisation de la police, sont presque systématiquement refusées. Simon Doho a pourtant affirmé que « le directeur général de la police s’est engagé à assurer la protection des députés et des populations qui vont venir » aux marches.

Cette mobilisation survient alors que jeudi également, un tribunal d’Abidjan doit rendre une décision qui pourrait démettre Tidjane Thiam de ses fonctions de président du parti. Valérie Yapo, militante proche de Jean-Louis Billon, demande en effet sa suspension de la présidence du PDCI et celle de tous les organes de la formation

En signe de désapprobation face à la radiation des listes de Tidjane Thiam, les députés du PDCI et du parti de l’ex-président Laurent Gbagbo ont « quitté une séance plénière de l’Assemblée nationale » mercredi, a affirmé le porte-parole du PDCI, Soumaïla Bredoumy. « Nous l’avons fait par protestation de la décision de justice d’exclure Tidjane Thiam de la liste électorale », a-t-il dit.

Jeune Afrique

Directeur de Publication : Israël Guébo

Secrétaire de rédaction : Jémima Késsié

Direction Artistique : Félix Ancien

Rédacteurs : Sultane Cissé, Kledjeni Tayou, Tchimou Berenger, Bainguié Jean-François, Koffi Étile, Teiko Célestin, Vincent Gnamessou, Joël Koné
Abidjan soir est édité par l’Institut Africain des Médias (IAM)

DRAMES EN CASCADE À L’ORÉE DE LA PRÉSIDENTIELLE : PULCHÉRIE GBALET INTERPELLE

Depuis le début de l’année 2025, une série de drames secoue la Côte d’Ivoire, semant l’inquiétude au sein de la population. Après la noyade tragique de douze enfants à Tiaha, c’est un accident de tricycle survenu à Offoumpo, coûtant la vie à plusieurs mineurs, qui vient alourdir une atmosphère déjà pesante. Face à cette succession macabre, la société civile commence à hausser le ton. Pour elle, ce climat de peur n’est ni anodin, ni acceptable.

Le 22 avril dernier, Pulchérie Gbalet, présidente de l’organisation Alternative Citoyenne Ivoirienne, a pris la parole lors de son traditionnel direct du mardi, diffusé en live sur ses réseaux sociaux et massivement relayé Elle y a dressé un tableau sombre de la situation sécuritaire actuelle, dénonçant des faits inquiétants sur l’ensemble du territoire.

Parmi les zones qu’elle qualifie de « criminogènes », Aboisso figure en bonne place. Selon diverses sources locales, plus d’une vingtaine d’assassinats y auraient été enregistrés depuis janvier. La militante a également évoqué le suicide d’un jeune homme dans la commune de Cocody, découvert par ses parents à leur retour de l’église, le jour de la Pâques, ainsi que la mort suspecte d’un autre jeune retrouvé dans la voiture d’une personnalité publique à Anyama. Confie-t-elle

Pulchérie n’a pas manqué d’évoquer les récents drames de KaKa et Ofompo, qui ont causé au total une quinzaine de morts, plusieurs blessés et des traumatismes durables chez les survivants.

Pulchérie Gbalet appelle les autorités à réagir urgemment, soulignant l’urgence d’instaurer un climat de sérénité à l’approche de l’élection présidentielle d’octobre 2025.

Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes relient ces tragédies à un phénomène tristement familier : l’intensification des morts suspectes et des faits divers à mesure que les scrutins approchent. Pour certains, ces drames pourraient être liés à des pratiques occultes, à des fins de gain politique ou de pouvoir Si rien n’a jamais été formellement prouvé, le doute s’installe, comme à chaque cycle électoral.

Ces coïncidences troublantes, devenues presque cycliques à l’approche de chaque élection, ravivent les soupçons d’un sombre rituel politique. Si aucune preuve formelle n’a jusqu’ici été établie, le constat reste le même : les périodes préélectorales en Côte d’Ivoire sont souvent marquées par une recrudescence de drames, de disparitions et de morts suspectes

Puis, comme par enchantement, tout semble s’évanouir après le scrutin. Une constante qui interroge, alarme, et impose aux autorités un devoir de vérité pour restaurer la confiance des citoyens.

ABIDJAN EN CHANTIER : LA SOTRA RÉORGANISE SES LIGNES POUR MAINTENIR LA MOBILITÉ

La capitale économique continue sa transformation urbaine, et avec elle, le quotidien des usagers des transports évolue. Pour faire face aux importants travaux de voirie engagés dans plusieurs zones stratégiques, la SOTRA (Société des Transports Abidjanais) a annoncé la modification temporaire des itinéraires de 14 lignes à compter de ce mardi.

Ces ajustements concernent notamment les lignes 06, 18, 19, 21, 23, 29, 58, 59, 67, 623, 721, 731, 770 et 775, et sont directement liés aux travaux en cours sur l’axe Gare de Bassam –Rond-Point du CHU de Treichville, un des nœuds névralgiques du réseau abidjanais

"La déviation vise à garantir la sécurité des passagers et la fluidité du trafic pendant toute la durée des travaux", explique la SOTRA dans son communiqué.

Un itinéraire repensé pour contourner les embouteillages

Selon la société, les bus concernés emprunteront désormais l’itinéraire suivant : Bernabé – RondPoint CHU Treichville – Voie arrière du Palais des Sports – Carrefour SAMSUNG – Boulevard FHB (ex-VGE), avant de reprendre leur parcours habituel.

Une solution pensée pour contourner les points de blocage tout en assurant la continuité du service public, dans un contexte où la pression sur la circulation est forte

Déjà d'autres lignes impactées à Faya

Cette réorganisation s’inscrit dans une série de réaménagements plus larges engagés par la SOTRA

Il y a quelques jours, des modifications avaient déjà été opérées dans le secteur de Faya, suite à la construction de l’échangeur de la Riviera Palmeraie vers le Camp Militaire d’Akouedo

Les lignes 773, 710, 610, 616 et 87 ont ainsi vu leur trajet modifié, avec un passage désormais par :

Carrefour Palmeraie – Rond-Point Akouedo –Carrefour Bon Prix – AB Center – Nouveau Goudron – Féh Kessé. À noter que la ligne 616 reprend son itinéraire dès AB Center, sans passer par Féh Kessé.

Des perturbations… mais une ville qui bouge

Ces changements, bien qu’occasionnant des désagréments pour les usagers, s’inscrivent dans une logique d’adaptation face à la modernisation des infrastructures routières à Abidjan.

La SOTRA appelle à la patience et remercie les usagers pour leur compréhension pendant cette période de transition. Les itinéraires alternatifs resteront en vigueur jusqu’à nouvel ordre.

Philomène Tourey

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