Giw 71 - avril

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La mouette Tchekov

Petit guide des festivals de l'été L’année est presque terminée, et vous n’avez rien de prévu pour cet été ? No worries, le Gem in way vous conseille ! En cette période estivale, requinquez-vous en vous rendant à un de nos festivals préférés ! Hellfest Deux mots : DEEP PURPLE. Non vraiment, ils sont vieux et Jon Lord est mort mais rien que pour apercevoir leur silhouette ça vaut le coup. Et puis observer la faune du festival au Leclerc du coin, transformé en paradis de la bière pendant trois jours, c’est rigolo. Pour ceux qui se sentent toujours l’âme d’un ado haineux, vous pourrez même aller rager sur Linkin Park, grosse soirée throwback en perspective. Plus sérieusement, la programmation est très lourde, notamment en metal prog et stoner, avec pleins de groupes pas très connus mais qui gagneraient à l’être ! Jazz in Marciac Festival très tranquille avec de la super musique, des gens de tous les âges et généralement super intéressants, c’est clairement un des festivals les plus sympas de l’été. Peacock society Festival des cultures électronique, ce rassemblement de hipsters et de petits bobos parisiens est the place to be seen in si vous êtes du genre à suivre le Bonbon et à participer à des petits happenings chébrans. Montreux Jazz Festival Le plus mythique des festivals, dans la ville qui inspira Smoke on the water au fabuleux Roger Glover et fut le havre de paix de Freddy Mercury ! Une programmation hétéroclite et franchement impressionnante, de Brian Wilson à Grace Jones, dans un décor paradisiaque et chargé d’histoire. Les Femmes s’en mêlent Pour sa vingtième édition, les artistes féminines sont encore une fois à l’honneur, dans plusieurs villes de France. Du rock à l’électro, il n’y a pas vraiment de cohérence sur le plan des styles de musiques, mais le talent est toujours au rendez-vous ! Les Déferlantes Sud de France Bienvenue à Argelès, le paradis des beaufs, dans un cadre idyllique transformé en cauchemar de béton et de casino sur le sable ! L’espace d’un weekend, Argelès accueille un festival bien sympa plutôt rock indé, avec pour cette édition des artistes vraiment tops. Sting, Renaud, Iggy Pop, Airbourne ou Die Antwoord, une programmation variée et extrêmement stylée.

Claire Maraval

D

ans ce numéro, parlons de théâtre, de Tchékhov, et de sa mouette. La mouette, c’est Nina, jeune fille malheureuse, soumise à des contraintes familiales rigides et pleine de penchants idéalistes. Dès lors, il semble difficile de rattacher la jeune actrice à la symbolique de l’oiseau rieur. En réalité, la pièce souffre de la traduction en français. En russe, le mot « tchaïka » (la mouette) contient le verbe « tchaïat’ » qui signifie « espérer vaguement quelque chose, plutôt en vain ». Comme l’écrit André Markowicz dans ses notes de traduction, la mouette symbolise davantage pour Tchékhov l’illusion, le fait d’être tourné vers le futur et d’attendre l’irréel, ou de regarder vers le passé et d’attendre que ce passé découvre un espoir d’y voir une réconciliation possible. La traduction du titre est donc un échec, et ne peut se comprendre que si on considère la mouette comme un oiseau exilé sur les rives d’un lac, comme c’est le cas pour Nina dans la pièce. A l’instar de Nina, tous les personnages de la pièce semblent poursuivre des rêves inaccessibles (la reconnaissance du public ou celle de ses pairs, l’amour de quelqu’un qui ne vous aime pas, le mode de vie opposé à celui que l’on pratique, etc.).

Au-delà de cette dramatique comédie de mœurs, Tchékhov aborde la thématique de l’artiste et la problématique de la création artistique. Dans la pièce, l’artiste vit sa vocation comme une fatalité, un poids accablant qui lui interdit tout bonheur. Créer est une tâche douloureuse, pénible, qui confine à la torture comme l’affirme le personnage Trigorine. Cette vision de l’artiste, sinon maudit du moins torturé, reflète les perpétuelles inquiétudes de l’auteur lui-même qui, après avoir écrit La Mouette, n’hésite pas à affirmer avec amertume: « je constate une fois de plus que je ne suis pas du tout dramaturge ». A l’intersection des courants symboliste et réaliste, représentés respectivement par les personnages de Tréplev et de Trigorine, Tchékhov nous donne à lire une pièce résolument moderne et contrastée, en combinant souci d’objectivité et impressionnisme. A priori banale, cette pièce est en réalité riche d’interprétations et révèle de nombreux niveaux de lecture en à peine cent pages. Pleine de lyrisme et de réflexions existentialistes, elle se pose selon moi en témoin de la beauté de la création artistique

Warren Bonnard

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