Séminaire « Repenser la métropolisation » / Article - Semestre 7 - Audren Jerez
Le modèle de la ville compacte en question « Dans une situation de baisse démographique, la maximisation des fonctions urbaines est devenue une priorité cruciale. La ville compacte en est le mot-clé » Mainichi Shimbun (journal quotidien japonais national, édition du 12 novembre 2016). Le Japon, face au déclin généralisé de sa population, applique depuis plus d’une dizaine d’années une politique de « ville compacte ». Mais pourquoi avoir choisi cette politique ? En quoi consiste-t-elle ? Avant de la définir, il est important de préciser pourquoi, quand et comment elle a vu le jour. En effet, il est intéressant de noter qu’elle n’avait absolument pas la vocation à lutter contre un déclin démographique à l’origine. Dans les faits, la ville compacte est très fortement inscrite dans le modèle urbain de « ville durable ». Françoise Choay nous donne sa définition d'un "modèle urbain" dès 1965 : une projection, une image de la ville, exemplaire et reproductible. Ce qu’on peut traduire par un « objectif » ou « idéal utopique », comme l’utilise Frédéric Héran (2015) pour définir la ville durable.
1. De la ville moderne à la ville durable Après la guerre, la reconstruction fut synonyme de vitesse. Il fallait tout sectoriser, zoner de manière efficace, traiter tous les éléments de manière singulière, grâce à des experts omniscients. La vitesse fut privilégiée pour améliorer l’accessibilité à court terme, favorisant l’automobile (Héran ; 2011). L’application de cette politique fonctionna : cela permit d’ouvrir de nouveaux territoires, d’écarter les nuisances sonores des usines, ramener toute la nourriture dans de grands centres commerciaux, favoriser l’accès aux entreprises des travailleurs. Les transports publics, le vélo, la marche, furent alors écartés (Poulit, 1971). Dès les années 1970 apparaissent des préoccupations écologiques, qui prendront le nom de développement durable en 1987 (Rapport Brundtland, Rapport de la commission mondiale) : un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Cette définition s’accompagne de trois piliers à l’origine, suivi d’un quatrième qui est venu se greffer dans les années 2000. Le pilier de l’environnement a pour objectif de limiter les impacts écologiques et la consommation de ressources fossiles polluantes. Celui de l’économie vise à conserver une logique économique viable lors du développement (éviter les faillites ou déséquilibres financiers). Le pilier social, cherche à conserver une qualité de vie équitable, agréable et raisonnable pour le maximum de personnes. Enfin, le pilier culturel, rajouté en 2000, a pour but de valoriser l’expression des habitants, l’identité d’un lieu, afin de le rendre le plus vivable possible. Les prémices de la ville durable apparaissent aux Pays-Bas dès 1970, car les conditions géographiques le leur imposaient. Ce modèle adopte une approche systémique et non sectorielle, une relation entre les différents organismes qui composent la ville à petite échelle, ainsi qu’un système de transport écologique associant marche, vélo, transport en commun, voiture partagée. 1