I De Nice à Lille
U
n matin de février 1883, exactement le 13, un vieux prêtre, presque septuagénaire, cassé par les ans et par les infirmités, entrait en France par la porte du soleil, par Nice. Chaque hiver depuis 1875, il faisait sa petite incursion sur la Côte d’Azur, poussant parfois jusqu’à Marseille et même jusqu’à Toulouse. Aux riches de la terre, à ceux qui, de novembre à avril, accouraient savourer sur ces rives les délices du paradis terrestre, ce vieillard tendait la main sans honte pour ses enfants, cette jeunesse populaire, laissée pour compte par le bonheur, mais adoptée par sa tendresse. Avec le Livre sacré, il pensait que la charité peut parfois couvrir la multitude des péchés. Il venait d’audelà des Alpes, de Turin, pas loin de la frontière, il s’appelait don Bosco, et déjà la vénération publique le comparait à saint Vincent de Paul. Cette année-ci, son dessein était hardi. En dépit de sa santé chancelante, il voulait atteindre Paris. Un matin de décembre, dans sa pauvre chambrette, il avait songé : « Je me noie ; les dettes m’écrasent. Le pape, en m’imposant la construction de 1