Pas 3 : Dans un monde découragé

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Avis Juridique

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Cité du Vatican - 3 décembre 2019 (Révision mars 2023)

Saint-François-Xavier - 175 ans de l'Apostolat de la Prière

CHERS AMIS DANS LE SEIGNEUR

Le Chemin du Cœur est l'itinéraire spirituel proposé par le Réseau Mondial de Prière du Pape C'est la boussole de notre mission, une mission de compassion pour le monde Il s'inscrit dans la démarche initiée par le pape François avec Evangelii Gaudium, "La joie de l'Évangile"

C'est le résultat d'un long processus impulsé par le père Adolfo Nicolás, alors supérieur général de la Compagnie de Jésus Au tout début, avec une équipe internationale dirigée par le père Claudio Barriga SJ, une ébauche avait été rédigée, appelée ici « Cadre de référence » Nous avons présenté cet itinéraire au pape François qui l’a approuvé en août 2014 ; puis nous l’avons publié dans un document intitulé : « Un chemin avec Jésus, en disponibilité apostolique » (décembre 2014) Ce document présentait une nouvelle manière de comprendre la mission de l'Apostolat de la Prière, dans une dynamique de disponibilité apostolique, comme c’était le cas au commencement

Le Chemin du Cœur est essentiel pour la recréation de ce service ecclésial, aujourd’hui Réseau Mondial de Prière du Pape Il s 'agit d'un approfondissement de la tradition spirituelle de l'Apostolat de la Prière pour aujourd'hui, et il articule de manière originale les éléments essentiels de ce trésor spirituel avec la dévotion au Cœur de Jésus Il peut être considéré comme une adaptation des Exercices Spirituels de saint Ignace Le Chemin du Cœur est la clé d'interprétation de notre mission Le commentaire écrit en 2017 souhaitait aider les équipes nationales du Réseau de Prière du Pape à approfondir chaque pas du Chemin du Cœur et à entrer dans sa dynamique interne, afin qu 'elles puissent proposer, avec leur propre créativité, des matériaux adaptés à leur contexte local Nous trouvons ce texte dans chaque livre sous le titre "Dynamique interne du pas "

Nous avons vite compris qu’il était important d’aider les équipes nationales à approfondir davantage Le Chemin du Cœur, sans lequel il serait difficile d’avancer dans le processus de recréation de cette œuvre pontificale C’est pourquoi nous avons commencé à écrire en 2018, avec une équipe internationale, 11 livres Cette équipe était coordonnée par Bettina Raed, aujourd’hui Coordinatrice Internationale du Chemin du Cœur C'est depuis la terre du pape François, avec le soutien de plusieurs compagnons jésuites et des laïcs, que nous avons mené à bien ce labeur En 2020 nous avons publié ce travail en espagnol, sous forme de site internet avec 86 vidéos, 86 podcasts et plusieurs centaines de fiches de présentation: wwwcaminodelcorazonchurch

Vous trouverez ici la traduction française des livres du Chemin du Cœur Une traduction est toujours limitée, et nous laissons à vos soins de l’adapter localement Nous espérons que ce matériel vous aidera à proposer cette mission de compassion pour le monde avec créativité (retraites spirituelles, sessions de formation, réunions du Premier vendredi du mois, etc ) C'est le fondement de notre mission Notre façon propre d'entrer dans la dynamique du Cœur de Jésus.

Original espagnol

P Frédéric Fornos, S J

Directeur International

Boussole pour orienter ce PAS

Mot-clé : DÉCOUVRIR

Objectif : Contempler les différentes dynamiques du monde et comment j’y participe

Attitude clé : Collaborer à un processus d’humanisation / incarnation Qu’est-ce que j’ai fait pour le Christ ? Qu’est-ce que je fais pour le Christ ? Que dois-je faire pour le Christ ?

Ce que nous recherchons – la grâce demandée : devenir humain, sortir de soi Dynamique interne du PAS : passer de «la complicité inconsciente» à «l’humilité, qui sort de soi» et qui s ’ ouvre aux autres

Cadre de référence

Nous contemplons avec admiration la beauté de notre monde et les grandes prouesses accomplies par l’intelligence humaine tout au long de l’histoire Malheureusement, le monde que nous habitons est également blessé par de douloureuses contradictions qui causent la mort et la destruction La vie et l’amour sont souvent étouffés par la violence et l’égoïsme Les plus faibles, et les plus vulnérables souffrent l’agression des puissants Les ressources naturelles sont pillées, engendrant tristesse et solitude Nous nous sommes écartés des chemins de l’amour de Dieu et de son projet pour l’humanité

Dynamique interne du PAS

Les défis de notre monde sont nombreux, notamment les défis économiques, climatiques et sociaux, ainsi que les fondamentalismes religieux, et bien d’autres encore Face à tous ces défis, au lieu de l’espérance, on trouve souvent un désenchantement L’homme occidental est hanté par la fin du monde, de son monde Il n ’ y a qu’à voir le nombre de films qui traitent de ce sujet et qui révèlent les peurs face au progrès des sciences, de la robotique et de l’intelligence artificielle (Terminator, Matrix), de la biotechnologie ou des virus et mutations (l’Armée des 12 singes, Doomsday, World War Z, Contagion, les Fils de l’homme, Prometheus), des météorites (Armageddon, Deep Impact) ou extraterrestres qui viennent détruire l’humanité (La Guerre des mondes, Edge of Tomorrow, Oblivion, etc.), sans compter les films post-cataclysme (Divergent, Hunger Games, etc.). La fin du monde y est presque toujours représentée comme une quasi-annihilation, voire une destruction de l’espèce humaine. Aujourd’hui, une autre fin du monde semble, au contraire, plus

plausible : il s ’agit du réchauffement climatique (Le Jour d’après, 2012) On prévoit un changement global qui va entraîner des conséquences irréversibles à l’échelle d’une ou deux générations

Bien que cela fasse moins de bruit, il y a aussi de l’espérance dans notre monde, beaucoup d’hommes et femmes solidaires et généreux, loin des caméras et des interviews, qui pourtant apportent la lumière Nous en connaissons tous

Le dessein de Dieu pour l’humanité est un dessein d’Amour « depuis la fondation du monde ». Non seulement l’humanité est engendrée au long des siècles par l’Esprit du Seigneur, mais comme le dit Saint Paul, la Création tout entière, l’univers lui-même «attend avec impatience la révélation des fils (et filles) de Dieu (…). La création tout entière gémit maintenant encore dans les douleurs de l’enfantement » et « nous aussi nous attendons l’adoption, la délivrance pour notre corps » (Romains, chap 8, 19-23) Nous participons à ce long travail d’engendrement de toute l’histoire, qui transforme non seulement l’humanité mais le cosmos entier

Avec la Résurrection rien ne peut faire obstacle à l’Amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ ! Cet Amour, vulnérable et fragile, mais plus fort que la mort même, révèle un avenir nouveau pour l’humanité Par son Esprit, qui est Amour, il nous engendre à une vie nouvelle, et nous rend comme lui L’Amour ne peut être compris qu ’ en regardant et écoutant Jésus, en suivant son itinéraire jusqu’à son terme Mettons notre confiance en Lui Entrons avec lui dans ce processus d’humanisation auquel il nous invite

➔ Pour approfondir. Ressources. Annexe 4. «La broderie de Dieu. Grandir en sagesse».

Entrée depuis la perspective biblique

L’ambiguïté qui habite dans le cœur humain se manifeste également dans le monde que nous habitons La beauté du monde est incommensurable, avec l’immensité et les merveilles dont la nature regorge Des mers aux rivières, des plaines aux forêts, de la diversité des animaux aux hommes et femmes de différents peuples et ethnies, couleurs et cultures, chacun doté de dons et de talents uniques Même les plus petites et apparemment insignifiantes expressions de beauté, comme les parfums, les saveurs, ou encore les insectes ou la couleur des fleurs, contribuent à la richesse de ce monde Décrire la beauté culturelle que l'homme a créée avec sa créativité et son ingéniosité nécessiterait des pages entières Le bien, la bonté et la beauté ont conquis la terre de manière imposante et germinale. Le bien est omniprésent. « Car la grandeur et la beauté des créatures conduisent par analogie à contempler leur Créateur» (Livre de la Sagesse, chapitre 13, verset 5). Dieu nous a offert ce monde pour que nous l'habitions, nous puissions en bénéficier et en fassions notre maison commune « En effet, depuis la création du monde, ses perfections invisibles, éternelle puissance et divinité, sont visibles dans ses œuvres pour l’intelligence » (Lettre aux Romains, chapitre 1, verset 20) « Dieu vit tout ce qu'il avait fait. Voilà, c’était très bon » (Livre de la Genèse, chapitre 1, verset 31)

Cependant, dès que nous regardons autour de nous, les symptômes de maladies nous sautent aux yeux, que ce soit dans le sol, dans l'eau ou dans l'air De nombreuses espèces sont en voie d'extinction, des forêts sont abattues sans espoir de reboisement Nous assistons impuissants à des inondations, à la pollution des mers, et des dizaines de milliers d'hommes et de femmes vivent dans le monde tels des survivants sans dignité, comme si la terre n ’appartenait qu’à quelques personnes ayant décidé que des centaines de milliers d'autres ne devraient vivre que de mendicité. Des maladies incurables se propagent, des enfants ne voient pas la lumière du jour, d'autres meurent sans goûter la beauté incomparable qu'il y a à habiter ce monde de manière digne et humaine. Et en même temps, des centaines de milliers de personnes donnent généreusement leur vie chaque jour, sans mesurer les efforts personnels pour continuer à embellir le monde et atténuer les dommages et la douleur de leur prochain, sans rien attendre en retour, mais confiantes que l'amour et la miséricorde auront le dernier mot Faire le tour du monde à travers les réseaux sociaux et la communication virtuelle ne suffit pas à prendre la mesure de ces multiples situations de vie et de mort, fruit de l'ambiguïté qui habite le cœur des hommes et des femmes de tous les temps

La Bible peut nous aider à comprendre ce mystère du mal et du bien coexistant dans le monde, ainsi le Seigneur réprimande ses enfants: « Oui, il est double, le méfait

commis par mon peuple : ils m’abandonnent, moi, la source d’eau vive, pour se creuser des citernes, des citernes fissurées qui ne retiennent pas l’eau ! » (Livre du Prophète Jérémie chap 2, 13)

Le monde souffre des conséquences illusoires liées à la volonté d’appropriation, une tendance qui guette toute l'humanité, alors que nous pourrions agir librement en nous considérant comme les administrateurs d'un monde offert à tous les hommes, et non seulement à quelques-uns, pour le faire grandir, embellir et atteindre la plénitude. « S’il se trouve devant toi sur ton chemin, n’importe où sur un arbre ou par terre, un nid avec des oisillons ou des œufs, tu ne prendras pas la mère avec ses petits » (Livre du Deutéronome chap. 22, 6). « On ira titubant d’une mer à l’autre, errant du nord à l’est, pour chercher la parole du Seigneur, et on ne la trouvera pas !» (Livre du Prophète Amos chap 8, 12 )

Mais ce désir d’appropriation a causé des ravages, et ainsi, dans une dynamique perverse, le monde qui nous est offert a un prix, il s 'achète et il se vend, et quelques-uns, s ’estimant en être les propriétaires, soumettent les autres à vivre « en payant » pour habiter le monde Nous avons perdu de vue la main qui nous l’offre et nous nous sommes restés attachés au monde, le désirant de manière désordonnée, en le chosifiant entièrement, qu’il s ’agisse de la terre, de l’eau, des végétaux, des animaux, ou même des personnes, afin de pouvoir les soumettre et en disposer à notre gré

Nous subissons tous les dégâts de cette dynamique, car le monde se dénature et nous le réduisons à néant, en détruisant notre maison commune. « Réveille-toi, pourquoi dors-tu, Seigneur ? Sors de ton sommeil, ne rejette pas sans fin ! Pourquoi caches-tu ta face et oublies-tu notre malheur et notre oppression ? » (Psaume 44 [43], 24-25). « Le Seigneur vit que la méchanceté de l’homme se multipliait sur la terre» (Livre de la Genèse chap. 6, 5). Dans le livre du Lévitique, nous constatons qu ’ au sein du peuple d’Israël certaines règles d’administration des biens, en faveur des frères, existaient déjà : « Quand vous moissonnerez vos terres, tu ne moissonneras pas ton champ jusqu’au bord et tu ne ramasseras pas la glanure de ta moisson, tu ne grappilleras pas non plus ta vigne et tu n’y ramasseras pas les fruits tombés ; tu les abandonneras au pauvre et à l’immigré. C’est moi, le Seigneur votre Dieu. » (Livre du Lévitique chap 19, 9-10)

Saint Paul, dans son Épître aux Romains, nous dit combien la création blessée souffre et espère que des hommes et des femmes humanisent le monde en collaborant au bien et à la beauté: « Car la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu : livrée au pouvoir du néant – non de son propre gré, mais par l’autorité de celui

qui l’a livrée –, elle garde l’espérance, car elle aussi sera libérée de l’esclavage de la corruption, pour avoir part à la liberté et à la gloire des enfants de Dieu. Nous le savons en effet : la création tout entière gémit maintenant encore dans les douleurs de l’enfantement. Elle n’est pas la seule : nous aussi, qui possédons les prémices de l’Esprit, nous gémissons intérieurement, attendant l’adoption, la délivrance pour notre corps. » (Lettre aux Romains chap 8, 19-23)

Nous sommes appelés à regarder et à nous déterminer quant au chemin à suivre, à décider si nous serons complices des dynamiques de mort présentes dans le monde ou collaborateurs du Règne de Dieu, générateurs de vie ou de mort: « Vois : je mets aujourd’hui devant toi la vie et le bonheur, la mort et le malheur, moi qui te commande aujourd’hui d’aimer le Seigneur ton Dieu (…). Alors, tu vivras, tu deviendras nombreux ( ) Mais si ton cœur se détourne, si tu n’écoutes pas, si tu te laisses entraîner ( ), je vous le déclare aujourd’hui : vous disparaîtrez totalement, vous ne prolongerez pas vos jours. » (Livre du Deutéronome chap 30, 15-18)

« Oui, il est double, le méfait commis par mon peuple : ils m 'abandonnent, moi, la source d'eau vive, pour se creuser des citernes, des citernes fissurées qui ne retiennent pas l'eau! »

(Jérémie 2, 13)

● « On ira titubant d'une mer à l'autre, errant du nord à l’est, pour chercher la parole du Seigneur, et on ne la trouvera pas » (Amos 8:12)

● « Réveille-toi, pourquoi dors-tu, Seigneur ? Sors de ton sommeil, ne rejette pas sans fin ! Pourquoi caches-tu ta face et oublies-tu notre malheur et notre oppression ? »

(Psaume 44 [43], 24-25)

● « Il est venu dans son propre bien, et les siens ne l’ont pas accueilli » (Jean 1, 11)

➔ Pour approfondir. Ressources. Annexe 2. « Apprendre à vivre ».

Entrée depuis la perspective de la foi

« Dieu vit tout ce qu'il avait fait. Voilà, c'était très bon. » (Genèse 1, 31)

Aujourd’hui, dans un monde où des milliers de vies sont dévastées par des catastrophes naturelles, où des millions de personnes vivent dans des situations de guerre, où des milliards naissent, vivent et meurent dans des états indignes de pauvreté, il est très probable que nous nous demandions ce que Dieu voyait lorsque, après avoir achevé la création, il a déclaré que tout était très bon

La réponse est simple : Dieu regardait la création et nous, les êtres humains, créés à son image et à sa ressemblance, en nous couronnant de la directive suivante : «Remplissez la terre et dominez-la » (Livre de la Genèse chap 1, 28) En tant qu’image de Dieu, nous sommes des êtres libres capables d’aimer et, en utilisant ces précieux dons par lesquels Dieu nous a créés, nous sommes co-créateurs de l’univers Teilhard de Chardin SJ disait que l’apparition de l’homme avait marqué le début du processus d’humanisation de l’univers, car les êtres humains donnent un sens à ce qui existe

Tout au long de nos vies, en tant qu’êtres humains, nous découvrons que le libre arbitre nous confronte à une alternative cruciale : il ne s ’agit pas simplement de choisir entre le bien et le mal sur un même plan. La véritable alternative à laquelle nous sommes confrontés dans nos décisions est de saisir ou non l’opportunité d’une approche plus enrichissante, qui englobe la créativité, le détachement et l’amour, et qui conduirait à une transformation plus profonde de notre humanité En d’autres termes, la véritable alternative consiste à être plus libres dans nos actions et à devenir des collaborateurs de l’amour, ou à ne pas l’être du tout Le mal n ’est jamais choisi en tant que tel La personne ne choisit jamais ce qu ’elle perçoit comme mauvais, mais elle le choisit comme étant bon, en raison d’une perception erronée

Choisir « le mal », en réalité, consiste à laisser échapper des opportunités exigeantes, demandant un plus grand engagement, où comme le dirait saint Ignace, « des offrandes de plus grande valeur et de plus grande importance », pour suivre au contraire des chemins habituels qui manquent d’énergie, qui sont simplistes, moralement ou mentalement « à bon marché » Ces chemins nous font régresser sur le chemin d’humanisation de l’univers. En d’autres termes, cela revient à rejeter ou à déformer les possibilités d’une plus grande richesse d’amour, d’un amour qui respecte chaque être tel qu’il est.

L’amour, cette force divine et humanisante en l’homme, demande toujours de résoudre la tension entre ce qui est connu et l’exploration de nouveaux espaces de

créativité Il s ’agit de choisir entre les caricatures de l’amour (les chemins connus) et un amour créatif et dévoué à un bien toujours plus grand

Les guerres meurtrières, la pauvreté déshumanisante, les abus infligés par les uns aux autres, la consommation excessive qui réduit les individus à de simples objets, les réactions violentes face à ce qui nous déplaît, l’attachement à notre confort, et ainsi de suite, ne sont rien d’autre que le résultat de choix qui négligent des alternatives riches en amour et en humanité Ces choix privilégient notre propre confort et cèdent aux peurs profondes qui rendent difficile la perception de la présence de Dieu dans la création.

Notre manque de foi et de confiance en Dieu, qui habite en nous, nous pousse à emprunter des chemins habituels, pauvres en amour et en créativité Bien que nous ne croyions pas en ces chemins et que nous ne souhaitons pas les choisir, nous y collaborons, consciemment ou non, devenant ainsi complices du "mal"

Chaque fois que nous portons un jugement sur les comportements des autres avec peu d'amour, en nous centrant sur nous-mêmes et en négligeant notre responsabilité en tant que co-créateurs avec Dieu, nous limitons involontairement nos possibilités de choisir la créativité et l'amour Nos choix quotidiens sont déterminants pour la quantité d'amour présente dans l'univers, car chacun d'entre nous contribue à façonner le monde dans lequel nous vivons

Dieu est présent, ce qui nous permet d'affirmer aujourd'hui et maintenant, sans crainte de nous tromper, que tout ce qui a été créé est très bon (Livre de la Genèse, chapitre 1, verset 31), car cela reflète Sa manifestation. Nos choix déterminent si Dieu se manifeste ou non dans notre réalité concrète, dans notre quotidien, à travers la vie que nous avons créée. ➔ Pour approfondir. Ressources. Annexe 5. « La conquête la plus importante ».

Entrée depuis la perspective spirituelle

Le cœur et le monde : des champs de bataille

En ce qui concerne le combat spirituel, de nombreux auteurs spirituels ont longuement discuté sur ce sujet. Mais de quoi parle-t-on réellement lorsqu'on aborde le combat spirituel ? Y a-t-il véritablement quelque chose à combattre ?

Celui qui se décide à prendre sa vie spirituelle au sérieux doit comprendre qu'il doit se forger un cœur combatif pour lutter contre tous les obstacles qui l’empêcheraient de se laisser aimer par le Seigneur Avec l'aide divine, il pourra découvrir les ruses et les stratagèmes de « l'ennemi de la nature humaine » qui tenteraient de l'éloigner de l'Amour du Seigneur

Dans la tradition chrétienne, le mal revêt différentes figures, telles que celle de « Satan », qui signifie « adversaire » en hébreu, ou « diábolos » en grec, c 'est-à-dire celui qui divise et sème la discorde Dans la tradition biblique et spirituelle, il est également désigné comme le «séducteur du monde», le « père du mensonge » ou encore « Lucifer », celui qui se présente comme un ange de lumière et sous des apparences de bien, tout en induisant à la tromperie.

C'est là le véritable combat : que Dieu gagne notre cœur et que nous ne nous laissions pas tromper par ce qui se présente avec éclat et apparence de vie mais mène à la mort C'est le combat contre l'ennemi de la nature humaine, le diable [celui qui divise], le père du mensonge, l'accusateur, le tentateur qui ne veut pas que nous nous rapprochions du Cœur de Jésus Dans ce combat, c 'est le Seigneur qui prend l'initiative et nous soutient dans la lutte, c 'est Lui qui a vaincu la mort Ainsi, c 'est à nous de demander Sa grâce et Son soutien dans ce combat pour reconnaître les signes de vie et les signes de mort, accueillir les premiers et rejeter les seconds

Saint Paul, dans sa lettre aux chrétiens d'Éphèse, nous présente à travers une analogie en quoi consiste le combat spirituel et comment nous préparer pour celui-ci: les armes de Jésus-Christ seront nos armes « Pour finir, armez-vous de force dans le Seigneur, de sa force toute-puissante. Revêtez l’armure de Dieu pour être en état de tenir face aux manœuvres du diable. Ce n’est pas à l’homme que nous sommes affrontés, mais aux Autorités, aux Pouvoirs, aux Dominateurs de ce monde de ténèbres, aux esprits du mal qui sont dans les cieux. Saisissez donc l’armure de Dieu, afin qu’au jour mauvais, vous puissiez résister et demeurer debout, ayant tout mis en œuvre. Debout donc ! À la taille, la vérité pour ceinturon, avec la justice pour cuirasse et, comme chaussures aux pieds, l’élan pour annoncer l’Évangile de la paix

Prenez surtout le bouclier de la foi, il vous permettra d’éteindre tous les projectiles enflammés du Malin. Recevez enfin le casque du salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la parole de Dieu. Que l’Esprit suscite votre prière sous toutes ses formes, vos requêtes, en toutes circonstances ; employez vos veilles à une infatigable intercession pour tous les saints. » (Éphésiens 6, 10-18)

C'est que dans le cœur de l'homme résident des forces qui se font sentir Ce sont des pensées, des sentiments, des mouvements intérieurs qui nous tirent dans des directions différentes, parfois opposées. Ces forces intérieures nous tirent d’un côté ou de l’autre, nous embrouillent et nous agitent. Sous l'effet de leurs mouvements, elles nous conduisent dans une direction ou dans une autre. Il est important de savoir reconnaître ces forces, de les "sentir" en nous et de comprendre où elles nous conduisent

Afin de connaître ces pensées, ces désirs, ces émotions qui nous traversent, nous devons apprendre à regarder en nous, prendre le temps d’entrer en contact avec ces forces, les sentir à l’œuvre, et comprendre vers où elles nous conduisent Nous ne devons pas prendre leur parti, mais il faut simplement que nous les regardions, sans les juger ni les rejeter Il s ’agit dans ce premier temps de méditer, d’entrer en silence, et patiemment apprendre à écouter intérieurement Et c 'est une grâce que nous devons demander avec insistance dans la prière

Le discernement dans le combat spirituel est un don du Seigneur Ce chemin ne se parcourt pas en un clin d’œil, ni s ’acquiert subitement Il nécessite un processus graduel pour se familiariser avec notre monde intérieur, ainsi qu ’ une attitude de supplication pour recevoir cette lumière et cette grâce du Seigneur.

En observant, nous apprenons à accepter les forces qui nous habitent et à les reconnaître, ce qui nous permet de distinguer ce qui nous aide à nous laisser aimer par le Seigneur et choisir la vie Afin de mieux comprendre le discernement, consultez l'entrée spirituelle de l'étape 2 : « Connaître les mouvements de notre intériorité »

Si nous voulons vraiment que le Seigneur demeure dans notre cœur, nous devons faire en sorte que les forces, qui nous dirigent vers Lui et qu'Il soutient, coulent en nous Pour cela, il est nécessaire que ses armes soient celles qui battent dans notre cœur

Et quelles sont ces armes ? L’épître de saint Paul donne une bonne orientation pour reconnaître les critères de Dieu :

● La force vient du Seigneur qui vient au secours de notre faiblesse Le mal est plus grand que nos forces, et c ’est pourquoi nous devons prendre appui sur le Seigneur

● Nous sommes habités par Jésus, et la semence du Royaume, avec tout son potentiel de justice et de compassion lutte pour prévaloir en nous

● La foi qui nous sauve consiste à croire en Lui, en ce qu’Il nous promet et en son désir de demeurer dans notre cœur Jésus a la victoire entre ses mains et cette croyance ferme nos donne sécurité, au-delà de tous nos combats.

● La prière simple et engagée, en nous laissant saisir par Lui, est notre arme puissante. La prière n ’est rien d’autre que cette disponibilité par laquelle nous cherchons à être là, pour le Seigneur, en sa Présence, afin qu’Il puisse conquérir notre cœur et nous capturer

Chaque personne est une unité aimée par Dieu, dotée de forces intérieures qui ne disparaîtront pas, car la vie spirituelle est toujours un combat pour choisir la vie La victoire est atteinte lorsque nous laissons de l'espace au Seigneur pour qu'Il règne dans notre cœur

Le monde est également un lieu de lutte, entre ces forces que nous reconnaissons dans le cœur de l'être humain, que Jésus souhaite remporter pour Lui et Son Royaume Aucune transformation du monde ne sera possible si cette vie spirituelle ne commence d’abord dans notre propre cœur, ainsi que dans celui de chaque personne La paix et le bien que nous désirons dans le monde, nous devons d'abord les accueillir en nous, dans le combat intérieur, en laissant Jésus nous transformer à Son image. Nos comportements, nos attitudes envers les autres, nos décisions peuvent soit nous rendre complices du mal que nous voyons, soit accompagner les forces de Vie qui émergent dans le monde.

Apprendre à discerner ces forces, à observer et à distinguer en nous ce qui nous pousse à agir, nous aidera avec la grâce du Seigneur à choisir ce qui nous ouvre à la Vie C'est pourquoi nous disons que le monde est le lieu où le combat intérieur prend vie concrètement, où nous pouvons nous associer à la mission de compassion de Jésus pour le monde ou bien nous rendre complices des forces qui le détruisent La décision est entre nos mains

Ainsi, le Pape François, dans l’Exhortation apostolique Gaudete et Exultate, nous donne quelques pistes pour ce combat spirituel:

La vie chrétienne est un combat permanent Il faut de la force et du courage pour

résister aux tentations du diable et annoncer l’Évangile Cette lutte est très belle, car elle nous permet de célébrer chaque fois le Seigneur vainqueur dans notre vie Il ne s ’agit pas seulement d’un combat contre le monde et la mentalité mondaine qui nous trompe, nous abrutit et fait de nous des médiocres dépourvus d’engagement et sans joie Il ne se réduit pas non plus à une lutte contre notre propre fragilité et nos inclinations (chacun a la sienne: la paresse, la luxure, l’envie, la jalousie, entre autres) C’est aussi une lutte permanente contre le diable qui est le prince du mal Jésus lui-même fête nos victoires Il se réjouissait quand ses disciples arrivaient à progresser dans l’annonce de l’Évangile, en surmontant les obstacles du Malin, et il s ’exclamait: « Je voyais Satan tomber du ciel comme l’éclair » " (Saint Luc, chap. 10, 18) Nos 158/159

«La Parole de Dieu nous invite clairement à « tenir face aux manœuvres du diable » (Épître aux Éphésiens chap 6, 11) et à éteindre « tous les projectiles enflammés du Malin » (Ep 6, 16) Ce ne sont pas des paroles romantiques, car notre chemin vers la sainteté est aussi une lutte constante Celui qui ne veut pas le reconnaître se trouvera exposé à l’échec ou à la médiocrité Nous avons pour combattre les armes puissantes que le Seigneur nous donne : la foi qui s ’exprime dans la prière, la méditation de la parole de Dieu, la célébration de la Messe, l’adoration eucharistique, la réconciliation sacramentelle, les œuvres de charité, la vie communautaire et l’engagement missionnaire Si nous n ’ y prêtons pas attention les fausses promesses du mal nous séduiront facilement Comme le disait le saint prêtre Brochero : « Qu’importe que Lucifer promette de nous libérer et même nous comble de tous ses biens, si ce sont des biens trompeurs, si ce sont des biens envenimés ?» Sur ce chemin, le progrès du bien, la maturation spirituelle et la croissance de l’amour sont les meilleurs contrepoids au mal Personne ne résiste s’il reste au point mort s’il reste au point mort, s’il se contente de peu, s’il cesse de rêver de faire au Seigneur un don de soi plus généreux. Encore moins, s’il tombe dans un esprit de défaite, car «celui qui commence sans confiance a perdu d’avance la moitié de la bataille et enfoui ses talents […] le triomphe chrétien est toujours une croix, mais une croix qui en même temps est un étendard de victoire, qu ’ on porte avec une tendresse combative contre les assauts du mal » Nos 162/163

Comment savoir si une chose vient de l’Esprit Saint ou si elle a son origine dans l’esprit du monde ou dans l’esprit du diable ? Le seul moyen, c ’est le discernement qui ne requiert pas seulement une bonne capacité à raisonner, ou bien du sens commun C’est aussi un don qu’il faut demander Si nous le demandons avec confiance au Saint Esprit, et que nous nous efforçons en même temps de le développer par la prière, la réflexion, la lecture et le bon conseil, nous pourrons sûrement grandir dans cette capacité spirituelle Nº 166

En résumé : Qu’est-ce que le discernement spirituel ?

Le discernement est l'art d'interpréter dans quelle direction nous conduisent les désirs du cœur, sans se laisser séduire par ce qui pourrait nous emmener là où nous n 'aurions jamais souhaité aller C’est le terme générique pour la pratique de prise de décision dans toute situation concrète de notre vie, afin de rechercher la volonté de Dieu

Voici six choses que vous devez savoir à propos du discernement spirituel :

1. Qu’il nous faut reconnaître l’existence de deux forces en nous : le bon esprit et le mauvais esprit.

2 Que nous devons reconnaître où nous conduisent les mouvements intérieurs (sentiments et pensées)

3 Que chacune de ces forces nous pousse dans sa propre direction ; certaines nous ouvrent à la Vie, tandis que d’autres nous enferment et nous entraînent sur des chemins mortifères

4 Que les influences extérieures trouvent une connivence en nous et nous les identifions comme venant de l’action du bon et du mauvais esprit, selon « où elles nous conduisent »

5 Que le bon esprit nous pousse vers la liberté et l’Amour de Dieu et des frères, tandis que le mauvais esprit nous pousse vers l’esclavage

6 Que, pour bien choisir, il est indispensable d’apprendre à distinguer entre ces forces et être libre intérieurement

➔ Pour approfondir. Ressources. Annexe 7 Les paroles du Pape : « Attention aux ‘démons bien élevés’ qui portent à l’esprit de la mondanité ».

Entrée à partir des paroles du Pape

« L’humanité vit en ce moment un tournant historique que nous pouvons observer par les progrès acquis dans différents domaines On doit louer les succès qui contribuent au bien-être des personnes, par exemple dans le cadre de la santé, de l’éducation et de la communication Nous ne pouvons cependant pas oublier que la plus grande partie des hommes et des femmes de notre temps vivent une précarité quotidienne, aux conséquences funestes Certaines pathologies augmentent La crainte et la désespérance s ’emparent du cœur de nombreuses personnes, jusque dans les pays dits riches Fréquemment, la joie de vivre s’éteint, le manque de respect et la violence augmentent, la disparité sociale devient toujours plus évidente Il faut lutter pour vivre et, souvent, pour vivre avec peu de dignité. Ce changement d’époque a été causé par d’énormes bonds qui, en qualité, quantité, rapidité et accumulation, se vérifient dans le progrès scientifique, dans les innovations technologiques et dans leurs rapides applications aux divers domaines de la nature et de la vie. Nous sommes à l’ère de la connaissance et de l’information, sources de nouvelles formes d’un pouvoir très souvent anonyme

De même que le commandement de ‘ ne pas tuer’ pose une limite claire pour assurer la valeur de la vie humaine, aujourd’hui, nous devons dire ‘ non à une économie de l’exclusion et de la disparité sociale’ Une telle économie tue Il est insupportable qu ’ une personne âgée, réduite à vivre dans la rue, meure de froid mais ne soit pas une nouvelle, tandis que la baisse de deux points en bourse en soit une ! Voilà l’exclusion Il est également intolérable que la nourriture se jette, quand il y a des personnes qui souffrent de la faim ! C’est la disparité sociale ! Aujourd’hui, tout entre dans le jeu de la compétitivité et de la loi du plus fort, où le puissant mange le plus faible Comme conséquence de cette situation, de grandes masses de population se voient exclues et marginalisées : sans travail, sans perspective, sans voie de sortie. On considère l’être humain en lui-même comme un bien de consommation, qu ’ on peut utiliser et ensuite jeter. Nous avons mis en route la culture du ‘déchet’ qui est même promue. Il ne s ’agit plus simplement du phénomène de l’exploitation et de l’oppression, mais de quelque chose de nouveau : avec l’exclusion reste touchée, dans sa racine même, l’appartenance à la société dans laquelle on vit, du moment qu ’ en elle on ne se situe plus dans les bas-fonds, dans la périphérie, ou sans pouvoir, mais on est dehors Les exclus ne sont pas des ‘exploités’, mais devenus des déchets, ‘des restes’ » (Evangelii Gaudium nos 52-53)

➔ Pour approfondir. Ressources. Annexe 6. « Les paroles du Pape : Quelques défis du monde actuel ».

Entrée depuis la perspective de la prière

Ammirare

« Mon âme exalte le Seigneur, et mon esprit s’est rempli d’allégresse à cause de Dieu, mon Sauveur, parce qu’il a porté son regard sur son humble servante. Oui, désormais, toutes les générations me proclameront bienheureuse. » Évangile de Luc ch 1, 46-48

Admirer est une pratique quotidienne, une attitude simple qui reste invisible aux yeux d'autrui puisqu'elle se déroule en nous-même. Certains disent que c 'est la qualité des saints qui savaient apprécier les choses, comme le faisait Marie, la mère de Jésus, qui les conservait dans son cœur. En effet, la « sagesse », qui a sa racine dans le verbe «savourer», évoque celui qui goûte les choses intérieurement. Ceux qui admirent et goûtent les évènements de leur vie intérieure peuvent transcender les frontières de la connaissance pour s ’unir mystiquement à Dieu

De quoi dépend l’admiration ? De la capacité à regarder les événements de notre vie avec une disposition intérieure empreinte de gratitude et de l’envie d’apprendre C’est une forme de réceptivité active qui nous permet de comprendre comment les faits, les événements et les situations qui nous entourent résonnent en nous L’admiration permet à la vie de tous les jours de résonner en nous avec une clarté nouvelle Elle nous fait saisir l’influence de notre environnement sur nous et comment cela nous affecte Cette « nouvelle intelligence » qui en découle nous éclaire sur la manière dont nous réagissons face aux événements de notre quotidien En quelque sorte, elle perce la coquille de la réalité, jusque-là dissimulée à notre regard, pour nous révéler le degré d’implication que nous avons dans ce que nous percevons et observons.

Il existe autour de nous autant de dynamiques de vie que de mort. Autant de personnes animées par l’Esprit de Dieu et désireuses de collaborer au projet du Royaume, que d’autres semblant, au contraire, œuvrer à la dégradation et à la destruction de l’être humain Et vous, où vous situez-vous face à cette réalité ? L’amour présent dans le monde nous appelle à agir pour réaliser le bien, il nous attire et nous sollicite, mais d’autres forces peuvent également prendre possession de notre cœur et nous pousser vers la mort

L’attitude admirative nous aide à nous positionner au cœur d’une des grandes batailles de notre existence : vivre conformément au projet de Dieu ou succomber à la dégradation de l’être humain C’est là une bataille spirituelle qui se joue dans le monde Le monde souffre des mêmes maladies que le cœur humain, car nos désordres intérieurs rendent le monde malade Ainsi, l’envie est l’une des forces les

plus destructrices et néfastes pour l’être humain et pour le Royaume de Dieu

L’envie, cette maladie de l’âme telle qu ’elle est connue dans la tradition monastique est une forme dégénérée de l’admiration Ainsi, selon l’évangile de saint Matthieu, Jésus déclare : « La lampe du corps, c’est l’œil. Donc, si ton œil est sain, ton corps tout entier sera dans la lumière. Mais si ton œil est malade, ton corps tout entier sera dans les ténèbres. Si donc la lumière qui est en toi est ténèbres, quelles ténèbres ! » (Évangile selon saint Matthieu chap 6, 22-23 )

L’envieux souffre d’une maladie qui assombrit son âme. De même que la personne qui sait admirer est émerveillée devant la grandeur, la majesté et la beauté de ce qu ’elle contemple, l’envieux reste captivé, mais en souffre profondément. Incapable de dépasser sa vision étriquée, il ne voit en réalité que son propre reflet, l'empêchant d'apprécier la valeur réelle de ce qui se trouve devant lui sans ressentir le besoin de le posséder L'envieux est un narcissique qui juge le monde à travers le prisme étriqué de son égo Pour lui, rien n 'est valable s'il n ' en est pas le centre L'envie corrompt l'âme au point d'en altérer la joie de vivre C'est un sentiment amer qui, hélas, « prend racine dès l'enfance, souvent au sein des dynamiques familiales, et notamment entre frères et sœurs La Bible nous donne plusieurs exemples : Caïn jaloux d'Abel (cf Genèse 4, 3-5), les fils de Jacob envieux de leur frère Joseph (cf Genèse 37, 5-8) L'envieux perçoit le bonheur d'autrui comme une offense personnelle Prisonnier de cette affliction, il regarde avec aigreur (le mot envie vient de in-videre) les succès, les biens et les vertus des autres, au point de dénaturer leur image et leur réalité, concentrant toute son envie sur ce que les autres possèdent Finalement, qu ’est-ce que l’envie sinon la contradiction du commandement : « Tu n’auras de visées sur rien qui appartienne à ton prochain" »1 (cf. Livre de l’Exode 20, 17 ; Livre du Deutéronome chap. 5, 21) ; (ENZ0 BIANCHI, Lucha por la vida, Santander, Sal Terrae, 2012, p.157)

De nombreux sociologues disent que “l’envie” est le mal social du temps présent, le plus répandu

Une autre dynamique du monde qui rend malade et dégrade l’être humain et le projet du Royaume de Dieu est la tristesse La tristesse – définie par Évagre le Pontique comme le « ver du cœur » – s’insinue dans le cœur de l’homme et corrompt lentement toute sa vie, comme la mite ronge le vêtement (cf Livre des Proverbes chap 25, 20) : si elle n ’est pas combattue, elle finit par s’établir en nous comme un locataire permanent et de plus en plus difficile à déloger Oui, la tristesse est le «non-plaisir» par excellence : elle « dépouille de tout plaisir et dessèche le cœur » Elle est à la racine de la dépression nerveuse, car elle mène au sentiment de

1 Traduction Réseau Mondial de Prière du Pape.

l’absurdité de la vie, à un état léthargique où la vie semble sans lumière et sans espérance : en un mot, la vie devient invivable Il est significatif que deux psaumes répètent comme refrain le verset « pourquoi te replier, mon âme, et gémir sur moi ? » (Livre des Psaumes, chap 42 [41], 6 12 ; 43 [42], 5) Pourquoi la tristesse demeure-t-elle comme une ombre au plus profond de nous, comme un bourdonnement incessant qui nous tourmente ? Parfois, ce sont les souffrances subies injustement, les contradictions réelles de notre vie, le constat de la frustration de nos désirs, même les plus nobles et les plus justes, qui engendrent en nous la tristesse (ENZO BIANCHI, Une lutte pour la vie, Médiaspaul, 2012, p. 150)2

Comment lutter contre la tristesse ? La vie et la réalité nous contredisent certainement à bien des égards, mais malheur à celui qui croit pouvoir vivre dans un monde doré et exempt de frustrations ! Malheur à celui qui se nourrit de nostalgies imaginaires ou d’attentes impossibles ! Au contraire, si nous nous exerçons à accepter les contradictions quotidiennes, si malgré nos souffrances nous savons accueillir nos blessures, alors nous pourrons également nous ouvrir à cette consolation qui vient de Dieu et de la communion avec nos frères Il faut en outre se rappeler que pour les chrétiens, la joie n ’est pas le fruit d’une disposition intérieure de type psychique ou émotionnel, mais qu ’elle se conjugue en impératif, c ’est un mandat apostolique: «Réjouissez-vous, soyez toujours dans la joie. » (Deuxième Lettre aux Corinthiens chap 13, 11 ; Lettre aux Philippiens chap 2, 18 ; 3, 1 ; 4, 4 ; Première Lettre aux Thessaloniciens chap 5, 16 ; Lettre aux Romains chap 12, 12-15 ; Première Lettre aux Corinthiens chap 12, 26 ) Il ne s ’agit donc pas d’un sentiment vague et spontané, mais plutôt d’un état qui doit être recherché avec effort et persévérance C’est une joie «dans le Seigneur » (Lettre aux Philippiens, chap. 4, 4-10), en premier lieu, comme une joie du Seigneur, du Dieu qui se réjouit et communique sa joie à ceux qu’il aime.

Pour le chrétien, cette joie naît du fait de « vivre en Christ », de savoir que Christ vit en lui (cf. Lettre aux Galates chap. 2, 20).

Il faut obéir résolument au commandement de la joie et s ’ exercer à vivre en plénitude le moment présent, de façon à faire l’expérience que ni le passé ni l’avenir ne peuvent déterminer notre vie, mais seulement l’aujourd’hui de Dieu Vraiment, le chrétien devrait ouvrir et commencer chaque journée avec les paroles du Psalmiste «Aujourd’hui, pourvu que vous obéissiez à sa voix ! » (cf Livre des Psaumes 95 [94], 7), tout en se disposant à rendre grâce à Dieu d’avoir été créé (ENZO BIANCHI, Une lutte pour la vie, Médiaspaul, 2012, p 150)3

Existe-t-il un antidote à contre l’envie ? Oui et c ’est la gratitude ! Elle signifie savoir dire

2 Traduction Réseau Mondial de Prière du Pape

3 Traduction Réseau Mondial de Prière du Pape

merci, être capable de s’émerveiller du bien, quel qu ’ en soit l’auteur et savoir regarder avec bienveillance tout ce qui fleurit autour de nous Seul celui qui sait reconnaître et être reconnaissant du bien accompli par les autres, est capable de « faire lui-même le bien », de purifier son action, d’élever son action de grâce à Dieu pour tout ce qu’Il réalise dans l’histoire et dans la vie de chaque être humain Celui qui sait dire : « Tout le bien que j’ai pu faire, je l’ai fait grâce aux autres qui sont avec moi : sans mes frères, sans êtres chers, je n ’aurais pas réussi à faire le peu de bien que j’ai fait » a anéanti le sentiment d’envie en lui 4

L’avarice est une autre maladie de l’âme qui hante la vie des personnes et détruit le projet d’amour envers autrui. Le consumérisme est l’une des manifestations de l’avarice. Il s ’agit d’un désordre qui transforme une personne en un être avide d’acquérir des choses et d’accumuler autant que possible C’est une personne qui vit « engloutie » et insensible aux besoins d’autrui Elle n ’ a pas la capacité de savourer ou de jouir de ce qu ’elle obtient, elle est sans cesse à la recherche de « quelque chose de plus à engloutir » Elle vit dans la crainte que ce qu ’elle amasse lui échappe et que ses coffres se vident, c ’est pourquoi elle est incapable de partager ce qu ’elle a L’avarice est une maladie de l’âme qui se manifeste par l’avidité à posséder des biens matériels, mais elle est également présente dans le désir d’acquérir des « biens spirituels » dans le seul but d’obtenir du prestige auprès d’autrui L’avare « spirituel » va dans la vie en cherchant à être considéré comme un saint ! Il se croit une personne sûre, mais en réalité, elle est très fragile et vulnérable, cherchant du soutien dans ce qu ’elle possède

L'homme et la femme matérialistes dépouillent le monde de son âme. Ils se privent de ce qu'ils ont de plus merveilleux. Le monde est le lieu créé par Dieu pour expérimenter, savourer et profiter des biens avec les autres. C'est un endroit pour apprendre ce que signifie « aimer ». Celui qui craint de perdre ce qu'il possède a décidé de donner aux choses un pouvoir sur lui-même. Il est esclave de ses possessions, un être possédé par les choses L'avare « spirituel » peut paraître austère en apparence, mais il exige en réalité d'être considéré comme « spécial » Il estime qu'il doit être traité différemment des autres en raison des richesses spirituelles qu'il accumule en lui L'avare « spirituel » s 'appuie sur les flatteries et les égards des autres pour se sentir en sécurité

L’avarice, qu ’elle soit matérielle ou spirituelle, est l’une des servitudes les plus communes L’avare est un homme misérable déguisé en richesses Un riche-pauvre

C’est une personne qui se perçoit fragile et qui a besoin de recourir au pouvoir que lui confèrent ses possessions Il a de lui-même une image corrodée et noircie, c ’est

4 Traduction Réseau Mondial de Prière du Pape.

pourquoi il cache sa laideur derrière ses conquêtes

Ces trois maladies (l’envie, la tristesse et l’avarice), parmi les neuf qui existent dans la tradition monastique, sont, selon le père du désert Évagre le Pontique, celles qui endommagent nos relations, nos liens, notre environnement, et en définitive, le monde Les reconnaître en nous et dans le monde nous aide à nous déterminer pour les écarter et choisir les dynamiques de vie qui apportent la véritable allégresse et la vraie joie spirituelle qui sont propres à Dieu et à ses anges [Livre des Exercices spirituels nº 329].

➔ Pour approfondir. Ressources.

Annexe 1. « Apprendre à désapprendre ».

Annexe 3 « Apprendre la Sagesse »

Exercice - Pratique de la relecture

Approfondissement du troisième temps de la relecture Contempler le monde – Considérer demain.

Dans les Exercices Spirituels, Saint Ignace de Loyola nous présente DIEU contemplant le monde : comment « les trois Personnes divines » observant la surface de la terre couverte d’êtres humains qui se précipitent en enfer, décrètent, dans leur éternité, que la seconde Personne de l’auguste Trinité se fasse homme pour sauver le genre humain ; et comment ce mystère s ’accomplit, lorsque dans la plénitude des temps l’Archange Gabriel fut envoyé à Marie »

« Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Évangile selon saint Jean, chap. 1, 14).

Nous aussi, sommes invités à contempler notre monde avec ses défis, ses joies et ses souffrances, ses peurs et ses espérances, et à le porter dans nos prières

Devant la croix, comme l’a fait Saint Ignace, nous pouvons nous demander et méditer : «Qu’ai-je fait pour le Christ ? Que fais-je pour le Christ ? Que dois-je faire pour le Christ ? »

Pratique

de la relecture thématique

Recherches, désirs et avenir

Nous vous proposons un exercice de relecture afin d’orienter vos recherches et vos bonnes résolutions Ce sera un moment de prière tourné vers l’avenir proche

Cherche un endroit calme et apaise ton cœur et tes pensées Respire lentement

Laisse le Seigneur te regarder, tu es en sa présence Remercie-le de t'accompagner dans ce moment de prière

Y a-t-il quelque chose pour lequel tu souhaites remercier ?

Ecoute ton cœur et laisse résonner en lui cette question de Jésus : « Que cherches-tu? » Pose-toi cette question en considérant les personnes, lieux, et activités qui remplissent ta journée. Laisse-la résonner dans ton cœur.

Et puis, parle au Seigneur de tes désirs et aspirations pour ta famille, tes amis, tes études, le travail, tes loisirs Fais de la place et laisse le temps au Seigneur pour t'offrir une parole sur ce que tu lui as confié dans ta prière

À la lumière de cette relecture, confie au Seigneur la journée de demain, avec les décisions que tu désires prendre pour vivre davantage selon son esprit

Remercie pour ce moment, prend note de ce qui est resté dans ton cœur et termine ta prière.

➔ Pour approfondir. Ressources. Annexe 8. « Comment faire une relecture ».

Ressources

Annexe 1

La broderie de Dieu. Grandir en sagesse

« Le Royaume des cieux est comparable à un trésor qui était caché dans un champ et qu’un homme a découvert ; il le cache de nouveau et, dans sa joie, il s’en va, met en vente tout ce qu’il a et il achète ce champ. Le Royaume des cieux est encore comparable à un marchand qui cherchait des perles fines. Ayant trouvé une perle de grande prix, il s’en est allé vendre tout ce qu’il avait et il l’a achetée. Le Royaume des cieux est encore comparable à un filet qu’on jette en mer et qui ramène toutes sortes de poissons. Quand il est plein, on le tire sur le rivage, puis on s’assied, on ramasse dans des paniers ce qui est bon et l’on rejette ce qui ne vaut rien. Ainsi en sera-t-il à la fin du monde : les anges surviendront et sépareront les mauvais d’avec les justes, et ils les jetteront dans la fournaise de feu ; là seront les pleurs et les grincements de dents. Avez-vous compris tout cela ? » ― « Oui », lui répondent-ils. Et Jésus leur dit : « Ainsi donc, tout scribe instruit du Royaume des cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et du vieux » (Évangile selon saint Matthieu chap 13, 44-52)

« Quand j’étais petit, j’aimais m ’asseoir aux pieds de ma mère et la regarder broder Un jour, je lui ai dit que je ne comprenais pas sa couture, pleine de fils de couleurs différentes qui semblaient se mélanger les uns les autres de façon désordonnée Alors, elle m’invita à m ’asseoir sur ses genoux Je fus surpris et ému en voyant une belle fleur sur la broderie Et ma mère me dit : « Mon fils, d’en bas, tout te semble être confus et désordonné, mais tu ne te rendais pas compte qu’il y avait un plan en haut

» Plusieurs fois, au cours des années, j’ai regardé le ciel et j’ai dit : « Mon Père, que fais-tu ? » Et il répondait : « Je suis en train de broder ta vie Un jour, je t’amènerai au ciel, je te ferai asseoir sur mes genoux et tu verras le plan d’ici. Alors, tu comprendras…»5 .

Annexe 2

Apprendre la sagesse

Nous vivons une époque où nous avons de plus en plus de connaissances sur tout. Les spécialistes en toutes les matières sont de plus en plus nombreux, si bien que

5 Traduction RMPP

nous pouvons découvrir beaucoup de choses, sur différents sujets, mais rarement de façon approfondie Comme jamais auparavant, je crois, nous avons à notre disposition beaucoup plus d'informations, plus de « savoirs », plus de données, qu 'auparavant Notre culture rend les informations nombreuses et disponibles mais avec très peu de profondeur dans la réflexion Nos jugements et nos raisonnements sont superficiels Nous réfléchissons peu et nous nous prononçons très vite sur tout et « à propos » de tout

Face à cette réalité, il y a quelque chose que nous ne devons pas oublier : les savoirs, contenus dans les rapports, dans les données et dans les analyses que nous faisons, sont quasi strictement scientifiques. Ils sont transmissibles, nous les enseignons dans nos écoles et nos universités. Cependant, l'information ne rend pas une personne sage Chacun de nous, et l’humanité entière, devons apprendre de nos expériences pour être des hommes et des femmes sages Qu’est-ce qui rend sage un être humain?

« La sagesse – souligne ainsi José Antonio García-Monge – c ’est la lucidité et la force pour vivre la réalité ; être soi-même, savoir entrer en relation avec les autres, comprendre et surtout se comprendre au plus profond de soi, d’une manière authentique et profonde Une source très importante de la sagesse est notre propre expérience : si nous savons l’écouter, et si nous réussissons à apprendre de nos propres erreurs, l’expérience sera une source lumineuse de sagesse La sagesse nous éclaire, en nous éveillant à un changement cohérent de notre itinéraire vital, mais elle implique une conversion vers l’ÊTRE La sagesse est lumière pour apprendre à voir et à contempler. En définitive, pour apprendre à vivre »6 .

Comment donc la sagesse émerge-t-elle en nous si elle ne peut être enseignée ? Comment la faire « prendre » afin de la faire « a-pprendre » ? Surtout, qu ’ « à ce stade de notre vie », nous avons dans notre vécu autant de réussites que d’échecs, autant de victoires que d’erreurs et autant de buts atteints que de chemins abandonnés Qu’avons-nous retiré de tout cela ? Avons-nous pu réfléchir à nos succès, à nos réalisations, nos erreurs et nos échecs ?

6 Traduction RMPP

Annexe 3

Apprendre à vivre

La réalité que nous devons vivre est complexe, et elle s 'accentue parfois, lorsqu'elle se combine avec notre propre histoire ou expérience de vie, la rendant encore plus difficile Vivre en chrétien signifie être pèlerin avec tout ce que nous sommes, en ouvrant des espaces dans notre vie afin de concilier l'humanité faible et la grâce de Dieu toujours présente Ce n 'est que si nous cessons d'attendre que toutes les conditions soient réunies que nous commencerons à marcher, sinon, nous resterons résignés à attendre qu ' un « ange descende » pour changer notre vie. Nous devons apprendre à vivre avec tout ce qui est en nous, avec nos blessures et nos échecs. Peu importe si notre vie a été dure comme la pierre, froide comme le marbre ou fragile comme l'argile, ce qui compte c 'est ce que nous déciderons d'en faire

Donner de la valeur à notre propre vie signifie avoir confiance que Dieu réalisera son incarnation en nous, à savoir cette conjonction des extrémités opposées en une seule personne Nous devons nous libérer des illusions trompeuses que nous nous forgeons sur la manière dont « la vie devrait être » Notre valeur nous vient de la reconnaissance de notre dignité d’être forgés à l’image du Fils bien-aimé de Dieu C'est un commandement de Jésus, aimer son prochain comme soi-même et cela signifie se réconcilier avec sa propre histoire de vie

Annexe 4

Apprendre à désapprendre

Le changement ou la maturité, d dans la dimension qui se réalise, ne consiste pas seulement à acquérir de nouvelles connaissances, informations ou idées, mais à remplacer le modèle d’apprentissage fait d’expériences cognitives, affectives ou vitales, désormais inutilisables, en dimensions personnelles adaptées à la nouvelle, et plus adéquate, perception de la réalité Nous avons besoin, comme Jésus l'a recommandé à Nicodème, de naître de nouveau : « En vérité, en vérité, je te le dis : nul, s’il ne naît d’eau et d’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu ( ) Ne t’étonne pas si je t’ai dit : "Il vous faut naître d’en haut" » (Évangile de Jean chap 3, 5-7) Nous naissons tous de parents humains, mais seuls les enfants de Dieu naissent de l’Esprit

Cette dynamique du changement dans l’apprentissage engendre des conflits entre l’ancien et le nouveau, le « toujours » et l’actuel Ce conflit n ’est pas seulement généré par la mode (ce serait banal, frivole et même jetable), mais par l’adaptation, l’efficacité, la survie, la libération et la justice avec la réalité

Il faut apprendre à désapprendre, si nous voulons nous adapter, évoluer, grandir et nous ouvrir correctement à la réalité Certaines vérités provisoires peuvent être utiles durant une partie de notre vie, des vérités qui sont certainement emboîtées (et il est important de ne pas oublier de faire attention à leur date d’expiration), et afin de préserver le dynamisme de la vérité, nous devons apprendre à tirer notre révérence, si nous voulons rester profondément fidèles à la réalité dans toutes ses dimensions. Dire au revoir, signifie quitter, désapprendre. En d’autres termes, nous détacher du modèle de connaissance que nous avions, que représentaient nos propres pensées, afin d’accueillir la voix et la Parole de Dieu qui nous révèle une perspective différente de notre vie, que nous n ’avions pas envisagée auparavant

Cette attitude ouverte est coûteuse et ne doit jamais nous conduire à une relativisation universelle Avant, nous apprenions pour toute la vie, maintenant, nous vivons pour apprendre, alors que ce que nous avons appris, nous donne la vie Cela ne signifie pas tomber dans un pragmatisme superficiel : la vérité n ’est pas ce qui sert, mais ce qui rend justice à la vocation de l’humain

Il y a des gens qui gardent tout Il leur est extrêmement difficile de se défaire de quelque chose qu'ils n 'utiliseront jamais Alors que d’autres se détachent rapidement de presque tout ce qu ’elles ont : c ’est la société du jetable. Il en va de même avec ce que nous apprenons : nos idées, nos comportements, nos émotions, nos informations, nos interprétations, etc... Et c ’est un signe de manque de maturité fréquente que de considérer quelque chose comme inutilisable simplement parce que la mode ou la précipitation l’ont décidé ainsi. L’important est de connaître, d’évaluer, de distinguer et de discerner ce qui n ’est plus valable et de laisser la place au flux de la vie vécue de manière responsable

Annexe 5

La plus grande conquête

Il y a longtemps, en profitant d’une bonne lecture, je suis tombé sur le proverbe latin qui dit : « Qui veut un cheval sans défaut doit aller à pied » J’ai trouvé cela simplement merveilleux

Pour certaines personnes, le chemin de la vie spirituelle consiste à éliminer leurs défauts, à arracher l’ivraie ou à être parfaits, non pas dans la miséricorde et la compassion comme l’est Dieu, mais pour se sentir meilleurs que les autres et reprocher avec « autorité » les défauts d’autrui Nous devons reconnaître que personne ne naît sans défauts, et que la vie spirituelle ne consiste pas à les éliminer ou à contrecarrer nos vices mais à cultiver l’amour, la miséricorde, la compassion, et en définitive, à nous revêtir des sentiments de Jésus, car si nous cherchons d’abord le Royaume et la Justice de Dieu, tout le reste sera donné par surcroît (cf Évangile selon saint Matthieu chap. 6, 33).

Nous devons être humbles et raisonnables, et reconnaître que nous pourrions peut-être même éliminer certains défauts de notre vie et de notre façon de procéder, mais que difficilement nous pourrons les arracher complètement de notre âme, ou du moins nous ne pourrons pas y arriver si nous sommes obsédés par eux

Malheureusement, il y a ceux qui croient que la sainteté est le résultat de la conquête de vertus personnelles et de moments héroïques, indépendamment de l'amour et du service envers les plus pauvres et les plus nécessiteux Ils s 'efforcent d'être meilleurs, mais ne sortent pas d'eux-mêmes Ils vivent centrés sur leurs défauts et péchés, faisant de leurs misères le centre de leur vie spirituelle Le centre de la vie spirituelle ne doit pas être occupé par nos défauts, mais par Jésus-Christ

Il y a aussi des personnes qui se réfugient et se "protègent" derrière de très fins raisonnements pour camoufler la médiocrité et le manque d'autocritique, si nécessaire pour mûrir sainement. Les personnes qui agissent de cette manière acquièrent une plus grande connaissance de leurs misères, mais ne grandissent ni humainement ni spirituellement.

Nos défauts, limitations, faiblesses ne sont des menaces que lorsqu'ils nous empêchent de cultiver l'amour Ne te concentre pas sur eux Centre ta vie sur Jésus, et souviens-toi de ce que le Seigneur a répondu à saint Paul quand il lui a demandé de le libérer de cette faiblesse qui l'affligeait : « Ma grâce te suffit ; ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. » (Deuxième lettre aux Corinthiens chap 12, 9) C'est pourquoi, réponds comme l'Apôtre : « Aussi mettrai-je ma fierté bien plutôt dans mes faiblesses, afin que repose sur moi la puissance du Christ. » (Deuxième lettre aux Corinthiens chap. 12, 9)

Le grand défi dans notre vie spirituelle est de faire nôtres les sentiments de Jésus, d'adopter son style de vie comme le nôtre C'est reconnaître que ce qui nous rend véritablement humains et héritiers du royaume est la capacité d'aimer dans son

double aspect, nous-mêmes et les autres, parce que c 'est le résultat du commandement « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ta pensée » (Évangile de Luc chap 10, 27)

Annexe 6

Les paroles du Pape.

Quelques défis du monde actuel

Pape François, Evangelii Gaudium nos 54-60

« Dans ce contexte, certains défendent encore les théories de la ‘rechute favorable’, qui supposent que chaque croissance économique, favorisée par le libre marché, réussit à produire en soi une plus grande équité et inclusion sociale dans le monde

Cette opinion, qui n ’ a jamais été confirmée par les faits, exprime une confiance grossière et naïve dans la bonté de ceux qui détiennent le pouvoir économique et dans les mécanismes sacralisés du système économique dominant En même temps, les exclus continuent à attendre Pour pouvoir soutenir un style de vie qui exclut les autres, ou pour pouvoir s ’enthousiasmer avec cet idéal égoïste, on a développé une mondialisation de l’indifférence Presque sans nous en apercevoir, nous devenons incapables d’éprouver de la compassion devant le cri de douleur des autres, nous ne pleurons plus devant le drame des autres, leur prêter attention ne nous intéresse pas, comme si tout nous était une responsabilité étrangère qui n ’est pas de notre ressort. La culture du bien-être nous anesthésie et nous perdons notre calme si le marché offre quelque chose que nous n ’ avons pas encore acheté, tandis que toutes ces vies brisées par manque de possibilités nous semblent un simple spectacle qui ne nous trouble en aucune façon.

Une des causes de cette situation se trouve dans la relation que nous avons établie avec l’argent, puisque nous acceptons paisiblement sa prédominance sur nous et sur nos sociétés La crise financière que nous traversons nous fait oublier qu ’elle a à son origine une crise anthropologique profonde : la négation du primat de l’être humain ! Nous avons créé de nouvelles idoles L’adoration de l’antique veau d’or (cf Ex 32, 1-35) a trouvé une nouvelle et impitoyable version dans le fétichisme de l’argent et dans la dictature de l’économie sans visage et sans un but véritablement humain La crise mondiale qui investit la finance et l’économie manifeste ses propres déséquilibres et, par-dessus tout, l’absence grave d’une orientation anthropologique qui réduit l’être humain à un seul de ses besoins : la consommation

Alors que les gains d’un petit nombre s ’accroissent exponentiellement, ceux de la majorité se situent d’une façon toujours plus éloignée du bien-être de cette heureuse minorité Ce déséquilibre procède d’idéologies qui défendent l’autonomie absolue des marchés et la spéculation financière Par conséquent, ils nient le droit de contrôle des États chargés de veiller à la préservation du bien commun Une nouvelle tyrannie invisible s’instaure, parfois virtuelle, qui impose ses lois et ses règles, de façon unilatérale et implacable De plus, la dette et ses intérêts éloignent les pays des possibilités praticables par leur économie et les citoyens de leur pouvoir d’achat réel

S’ajoutent à tout cela une corruption ramifiée et une évasion fiscale égoïste qui ont atteint des dimensions mondiales. L’appétit du pouvoir et de l’avoir ne connaît pas de limites. Dans ce système, qui tend à tout phagocyter dans le but d’accroître les bénéfices, tout ce qui est fragile, comme l’environnement, reste sans défense par rapport aux intérêts du marché divinisé, transformés en règle absolue

Derrière ce comportement se cachent le refus de l’éthique et le refus de Dieu

Habituellement, on regarde l’éthique avec un certain mépris narquois On la considère contreproductive, trop humaine, parce qu ’elle relativise l’argent et le pouvoir On la perçoit comme une menace, puisqu’elle condamne la manipulation et la dégradation de la personne En définitive, l’éthique renvoie à un Dieu qui attend une réponse exigeante, qui se situe hors des catégories du marché Pour celles-ci, si elles sont absolutisées, Dieu est incontrôlable, non-manipulable, voire dangereux, parce qu’il appelle l’être humain à sa pleine réalisation et à l’indépendance de toute sorte d’esclavage L’éthique – une éthique non idéologisée – permet de créer un équilibre et un ordre social plus humain En ce sens, j’exhorte les experts financiers et les gouvernants des différents pays à considérer les paroles d’un sage de l’antiquité : « Ne pas faire participer les pauvres à ses propres biens, c ’est les voler et leur enlever la vie. Ce ne sont pas nos biens que nous détenons, mais les leurs » (Saint Jean Chrysostome)

Une réforme financière qui n’ignore pas l’éthique demanderait un changement vigoureux d’attitude de la part des dirigeants politiques, que j’exhorte à affronter ce défi avec détermination et avec clairvoyance, sans ignorer, naturellement, la spécificité de chaque contexte L’argent doit servir et non pas gouverner ! Le Pape aime tout le monde, riches et pauvres, mais il a le devoir, au nom du Christ, de rappeler que les riches doivent aider les pauvres, les respecter et les promouvoir Je vous exhorte à la solidarité désintéressée et à un retour de l’économie et de la finance à une éthique en faveur de l’être humain

De nos jours, de toutes parts on demande une plus grande sécurité Mais, tant que ne s’éliminent pas l’exclusion sociale et la disparité sociale, dans la société et entre les divers peuples, il sera impossible d’éradiquer la violence On accuse les pauvres et les

populations les plus pauvres de la violence, mais, sans égalité de chances, les différentes formes d’agression et de guerre trouveront un terrain fertile qui tôt ou tard provoquera l’explosion Quand la société – locale, nationale ou mondiale – abandonne dans la périphérie une partie d’elle-même, il n ’ y a ni programmes politiques, ni forces de l’ordre ou d’intelligence qui puissent assurer sans fin la tranquillité Cela n ’arrive pas seulement parce que la disparité sociale provoque la réaction violente de ceux qui sont exclus du système, mais parce que le système social et économique est injuste à sa racine De même que le bien tend à se communiquer, de même le mal auquel on consent, c ’est-à-dire l’injustice, tend à répandre sa force nuisible et à démolir silencieusement les bases de tout système politique et social, quelle que soit sa solidité. Si toute action a des conséquences, un mal niché dans les structures d’une société comporte toujours un potentiel de dissolution et de mort. C’est le mal cristallisé dans les structures sociales injustes, dont on ne peut pas attendre un avenir meilleur Nous sommes loin de ce qu ’ on appelle la “fin de l’histoire”, puisque les conditions d’un développement durable et pacifique ne sont pas encore adéquatement implantées et réalisées

Les mécanismes de l’économie actuelle promeuvent une exagération de la consommation, mais il résulte que l’esprit de consommation effréné, uni à la disparité sociale, dégrade doublement le tissu social De cette manière, la disparité sociale engendre tôt ou tard une violence que la course aux armements ne résout ni résoudra jamais Elle sert seulement à chercher à tromper ceux qui réclament une plus grande sécurité, comme si aujourd’hui nous ne savions pas que les armes et la répression violente, au lieu d’apporter des solutions, créent des conflits nouveaux et pires. Certains se satisfont simplement en accusant les pauvres et les pays pauvres de leurs maux, avec des généralisations indues, et prétendent trouver la solution dans une “éducation” qui les rassure et les transforme en êtres apprivoisés et inoffensifs. Cela devient encore plus irritant si ceux qui sont exclus voient croître ce cancer social qui est la corruption profondément enracinée dans de nombreux pays –dans les gouvernements, dans l’entreprise et dans les institutions – quelle que soit l’idéologie politique des gouvernants

Pape François, Evangelii Gaudium nos 99-101

Le monde est déchiré par les guerres et par la violence, ou blessé par un individualisme diffus qui divise les êtres humains et les met l’un contre l’autre dans la poursuite de leur propre bien-être En plusieurs pays ressurgissent des conflits et de vieilles divisions que l’on croyait en partie dépassées Je désire demander spécialement aux chrétiens de toutes les communautés du monde un témoignage de communion fraternelle qui devienne attrayant et lumineux Que tous puissent

admirer comment vous prenez soin les uns des autres, comment vous vous encouragez mutuellement et comment vous vous accompagnez : « À ceci tous vous reconnaîtront pour mes disciples : à l’amour que vous aurez les uns pour les autres » (Jn 13, 35) C’est ce que Jésus a demandé au Père dans une intense prière : « Que tous soient un (…) en nous, afin que le monde croie que tu m’as envoyé » (Jn 17, 21)

Attention à la tentation de l’envie ! Nous sommes sur la même barque et nous allons vers le même port ! Demandons la grâce de nous réjouir des fruits des autres, qui sont ceux de tous

À ceux qui sont blessés par d’anciennes divisions il semble difficile d’accepter que nous les exhortions au pardon et à la réconciliation, parce qu’ils pensent que nous ignorons leur souffrance ou que nous prétendons leur faire perdre leur mémoire et leurs idéaux Mais s’ils voient le témoignage de communautés authentiquement fraternelles et réconciliées, cela est toujours une lumière qui attire Par conséquent, cela me fait très mal de voir comment, dans certaines communautés chrétiennes, et même entre personnes consacrées, on donne de la place à diverses formes de haine, de division, de calomnie, de diffamation, de vengeance, de jalousie, de désir d’imposer ses propres idées à n’importe quel prix, jusqu’à des persécutions qui ressemblent à une implacable chasse aux sorcières Qui voulons-nous évangéliser avec de tels comportements ?

Demandons au Seigneur de nous faire comprendre la loi de l’amour Qu’il est bon de posséder cette loi ! Comme cela nous fait du bien de nous aimer les uns les autres au-delà de tout ! Oui, au-delà de tout ! À chacun de nous est adressée l’exhortation paulinienne : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien » (Rm 12, 21). Et aussi : « Faisons le bien sans défaillance » (Ga 6, 9). Nous avons tous des sympathies et des antipathies, et peut-être justement en ce moment sommes-nous fâchés contre quelqu’un. Disons au moins au Seigneur : “Seigneur, je suis fâché contre celui-ci ou celle-là. Je te prie pour lui et pour elle”. Prier pour la personne contre laquelle nous sommes irrités c ’est un beau pas vers l’amour, et c ’est un acte d’évangélisation Faisons-le aujourd’hui ! Ne nous laissons pas voler l’idéal de l’amour fraternel !

Pape François, Evangelii Gaudium nos 54-60 et 99-101

Annexe 7

Les paroles du Pape.

Attention aux « démons bien élevés » qui portent à l’esprit de mondanité

Le Pape François exhorte à veiller surtout sur les « démons bien élevés », qui entrent dans notre âme sans que nous puissions nous en rendre compte L’essence du démon est de détruire, soit de façon directe, par les vices ou les guerres, soit de manière plus éduquée, en instillant l’esprit de la mondanité

Lorsque le démon prend possession du cœur d’une personne, il y demeure, comme s’il était chez lui et il n ’ a aucune intention de s ’ en aller Lorsque Jésus chasse les démons, ceux-ci essaient de détruire la personne, de lui faire du mal « même physiquement ». Plusieurs fois, le Seigneur a chassé les démons, ses véritables ennemis et les nôtres. « La lutte entre le bien et le mal semble parfois trop abstraite ». La véritable lutte est le premier combat entre Dieu et l’ancien serpent, entre Jésus et le diable, relatée dans la Genèse.

Et cette lutte se déroule en chacun de nous Peut-être sans que nous le sachions, mais nous sommes en lutte

L’essence du démon est de détruire la vocation de chacun, c ’est-à-dire de détruire précisément l’œuvre de Dieu Certains fidèles doutent pourtant de son existence, et pensent qu’il n ’est qu ’ une invention forgée par les prêtres Mais il existe bel et bien Le démon détruit, et lorsqu’il ne peut pas le faire ouvertement, parce qu’il a face à lui une force de Dieu qui défend la personne, alors, étant extrêmement rusé, il tente d’user de moyens détournés pour parvenir à ses fins

« Lorsque l’esprit impur est sorti d’un homme, il parcourt des régions arides en quête de repos ; comme il n’en trouve pas, il se dit : " Je vais retourner dans mon logis, d’où je suis sorti." » (Évangile de Luc chap. 11, 24-25.)

Même lorsqu’il parle, il se présente poliment, en disant « je suis sorti », alors qu ’ en réalité il a été expulsé. Et puis, « quand le diable ne peut pas s’imposer par la force, ne peut pas détruire une personne par des vices évidents, ne peut pas détruire un peuple par les guerres, les persécutions, il pense à une autre stratégie et c ’est la stratégie qu’il utilise avec nous tous » En effet, « nous sommes chrétiens, catholiques, nous allons à la Messe, nous prions : tout semble en ordre, nous avons nos défauts, nos petits péchés, mais tout semble en ordre » Alors le diable « fait le bien élevé » : il part, il voit, il cherche un beau groupe, il frappe à la porte – « je peux ? Je peux entrer? » – il sonne et ces démons bien élevés sont pires que les premiers, parce que

tu ne t’aperçois pas que tu les as chez toi » « C’est l’esprit mondain » ( ), l’esprit du monde

Le diable détruit directement par des vices, par des guerres et par des injustices, ou bien il détruit de façon bien élevée, de façon très « diplomatique », comme nous le dit Jésus Ils ne font pas de bruit, ils se font amis, ils vous persuadent – ‘Non, allez, n ’ en fait pas tant, non, mais jusqu’ici c ’est bien' –, ils vous conduisent sur la route de la médiocrité et vous devenez des ‘tièdes' sur la route de la mondanité

« Nous devons être avertis du danger de tomber dans cette médiocrité spirituelle, dans cet esprit du monde, qui nous corrompt de l’intérieur. Nous devons avoir plus peur de ces démons ‘éduqués’ que des premiers, quand ils nous disent : « Nous avons besoin d’une exorciste parce qu ’ une personne est possédée par le diable », je ne suis pas aussi préoccupé que quand je vois des gens qui ont ouvert la porte aux démons bien élevés, à ceux qui les ont persuadé de ne pas être des ennemis »

« Je me demande très souvent ce qui est pire dans la vie d’une personne : un péché évident ou vivre dans l’esprit du monde, de la mondanité ? Que le démon t’entraîne vers un péché – pas un, même vingt, trente péchés, mais évidents, dont tu as honte –ou que le démon soit à table avec toi et habite avec toi et que tout soit normal, mais qu’il s’insinue et te possède avec l’esprit de mondanité ? »

Enfin, « l’esprit de la mondanité est celui-ci : celui qu ’apportent les démons bien élevés » Souvenons-nous de la prière de Jésus lors de la dernière Cène : « défends-les de l’esprit du monde », tout en exhortant à la vigilance et au calme.

Devant ces démons bien élevés qui veulent entrer par la porte de la maison comme des invités à un mariage, nous disons : « vigilance et calme ». Ainsi « la vigilance est le message de Jésus, la vigilance chrétienne. Que se passe-t-il dans mon cœur ? Pourquoi suis-je si médiocre ? Pourquoi suis-je si tiède ? Combien de démons “bien élevés” logent chez moi sans payer le loyer ? »

Source Vatican News (12/10/2018) Homélie matinale du Pape à Santa Marta

Annexe

8

Comment faire une relecture ?

« Si, dans la vie, vous voulez bien gérer votre temps, peut-être que tout ce dont vous avez besoin est quelque chose d’aussi simple que de faire une pause » (Thomas MORE, Le soin de l’âme)7

Nous vivons à une époque qui offre les éléments nécessaires pour vivre distraits, comme si nous étions absents, le regard quelque peu perdu à l'horizon. Il est vrai que nous regardons un peu plus autour de nous, mais pas nécessairement parce que nous avons une plus grande conscience de la valeur des autres, bien que nous ne puissions nier qu'il y a beaucoup de personnes qui l'ont et avec un intérêt authentique d'aider et de servir les plus nécessiteux Cependant, bien souvent, notre regard sur les autres est motivé par la comparaison Nous admirons les autres, mais pas toujours avec l'intention de nous réjouir de leurs succès, mais plutôt avec envie et jalousie Il est aussi vrai que nous sommes davantage tournés « vers l'intérieur », mais pas forcément plus conscients de notre monde intérieur, mais plutôt immergés dans nos pensées, tournant en rond sur les mêmes sujets, enlisés, sans pouvoir trouver de sortie Bien qu'il existe des personnes qui ont découvert leur propre valeur personnelle et qui s 'efforcent de cultiver leur monde intérieur, qui est la source de la vie, il y a ceux qui ignorent encore qu'ils ont une âme

L'homme d’aujourd’hui aime ce qui est « plus rapide », « plus nouveau », « plus spectaculaire » Il pense qu'il aurait une vie meilleure que celle qu'il mène actuellement s'il parvenait à répondre à toutes ses attentes, mais il ne prend pas suffisamment conscience de ce qu'il a et n 'est pas tout à fait conscient de la manière dont il fait les choses.

Il y a des personnes qui semblent avoir peur du « vide dans l'agenda ». Elles sont occupées toute la journée, mais se plaignent en disant « je n 'ai pas assez de temps » Qu'avons-nous obtenu en vivant ainsi ? Une vie fondée sur la hâte, sur la réussite personnelle et la productivité à tout prix ?

À cause de nos occupations, nous sacrifions de nombreuses choses précieuses On dit « je n 'ai pas le temps » aux personnes qui sont les plus importantes pour nous et on consacre le meilleur de la journée à quelqu'un qui parfois ne nous connaît même

7 Traduction RMPP.

pas, tout cela parce qu ' on ne sait pas s 'arrêter pour faire une pause Voulez-vous continuer à vivre ainsi ? Êtes-vous prêt à payer le prix ?

La Pause est une invitation, comme le dit Terry Hershey, à « faire moins et être plus» Terry, citant Joseph Campbell dans "Le pouvoir du mythe", dit : « Tu dois avoir un endroit dans ton cœur, dans ton esprit, ou chez toi, où tu peux aller presque tous les jours, un endroit où tu ne dois rien à personne et personne ne te doit rien, un endroit qui permet simplement l'épanouissement de quelque chose de nouveau et d’encourageant »8 .

Nous pouvons dire qu'il existe deux temps dans la pause. Dans un premier temps, plus passif, je m 'arrête, je me décharge de mes soucis, je me calme, et j'expire. C'est le moment pour prendre conscience de la respiration En faisant cela, nous nous rendons compte que la respiration, qui est pourtant essentielle et vitale, la plupart du temps nous l’oublions Et ainsi, de nombreuses autres choses que la Pause t'aidera à découvrir

Dans un deuxième temps, plus actif, rends-toi attentif à tes sens, conscient du moment affectif dans lequel tu te trouves (prends le temps de le caractériser, par exemple, si tu es fatigué, accablé, inquiet, heureux, calme, détendu, etc ), et inspire

Saint Ignace a beaucoup insisté auprès de ses frères quant au fait de réaliser la pause ou l'examen Tant et si bien qu'à ses frères les plus occupés, il pouvait les dispenser de la prière quotidienne, mais jamais de l'examen ou de la pause du jour Saint Ignace accordait tant d'importance à la réalisation de la pause ou de l'examen qu'à la fin de sa vie, il examinait chaque heure et toutes ses activités tout au long de la journée, cherchant à découvrir comment Dieu lui parlait et comment Il s'était fait présent dans cette portion de temps et de tâche qu'il examinait.

Saint Ignace nous enseigne, avec la pause, à prendre conscience de Dieu, de son passage dans notre vie Cela suppose de « chercher et trouver Dieu en toutes choses

» Ce désir implique un esprit, une attitude et une méthode de discernement La Pause n 'est pas une balance qui nous informe à la fin de la journée du poids ou de la densité de ce que nous avons bien ou mal fait Ce n 'est pas non plus une occasion de tenir un registre de nos erreurs et de nous accuser pour ce que nous avons mal fait, ni de chercher la « perfection » névrotique de soi-même Si tu n ' es pas sûr de pouvoir éviter ces deux erreurs possibles concernant la pause, je recommande de ne pas la pratiquer Car rien n 'est plus contraire à l'objectif d'Ignace qu ' une méthode pour incuber des culpabilités et des névroses Cet outil des Exercices Spirituels invite à

8 Traduction RMPP.

cultiver et à accroître une relation proche et intime avec Dieu, en voyant comment Il agit en nous et comment nous adoptons Son style de vie dans notre quotidien

La pause fournit une énergie à nos consciences dans laquelle la connaissance des mouvements qui se produisent dans l'âme, et les choix que nous faisons, marque vraiment une différence

1. Conscients de Sa présence

● Trouve un lieu pour faire la pause. Tu peux le faire n'importe où, mais sûrement au début tu auras besoin d'un endroit où tu puisses être au calme.

● Détends-toi. Commence par respirer un moment tout en étant conscient de ce que tu fais Ensuite, fais le signe de croix de façon à sentir que tu commences une prière et que tu es en présence de Dieu Tu peux répéter, si cela t'aide, «Seigneur, tu es ici, avec moi, maintenant » Fais-le plusieurs fois tout en respirant

● Souviens-toi de quelque chose de très important Indépendamment de si tu aimes ou non l'état spirituel, affectif, physique ou psychologique dans lequel tu te trouves au moment de faire la pause, remercie pour cela Permets que tout ce que tu as vécu soit disponible à ta conscience, mais ne t'y plonge pas encore Pourquoi donner de l'espace aussi aux moments désagréables de la journée ? Parce que nous avons besoin d'apprendre à chercher et à trouver Dieu dans TOUTES les choses, et pas seulement là où nous voulons Le trouver

2. Remercier : prêter attention

● Repasser la journée. C’est un premier moment afin d’identifier l’état spirituel (affectif, physique ou psychologique) dans lequel tu te trouves.

1 - Commence par te demander comment te sens-tu maintenant et fais une pause tout en respirant Ensuite, tu peux te demander, « Avec quel mot j’identifierais ce que tu ressens ici et maintenant ? » Ne te presse pas de répondre aux questions Laisse la réponse émerger de ton intérieur Entre chaque question, fais une pause et respire

2 - Tu peux également te servir de ces autres questions : « Qu'ai-je fait aujourd'hui ? Avec qui étais-je ? Quelle conversation ai-je eue que je me souviens particulièrement ? Par quels endroits suis-je passé ? Quels imprévus ai-je eu ? Comment est-ce que je réagis lorsque je sens que je perds le contrôle ? » Souviens-toi de toujours faire une pause après chaque question,

de respirer et d'écouter Prête attention aux réponses qui viendront de ton intérieur Nous sommes sur le point de passer en revue ce qui a été vécu dans la journée et de remercier pour les divers moments, qu'ils aient été agréables ou non Ne fais pas de jugement moral (c'était bien ou mal) ; parcours simplement ce qui a été vécu Il faut que notre conscience soit disposée à reconsidérer ce que nous avons vécu durant la journée

● Identifier les pensées et les sentiments Notre vie quotidienne, tout comme la prière, a un début, un processus et une fin, et tout est matière à discernement pour découvrir par où Dieu nous conduit. C'est pourquoi il est important de se rappeler comment j'ai commencé la journée et comment je l'ai terminée.

Au début de la journée Avec quelles pensées et quels sentiments ai-je commencé la journée ? Fais une pause et respire Y a-t-il une résonnance affective du jour précédent ? Quelles pensées ou quels sentiments ont tourné toute la journée en moi ?

Pendant la journée. Prête attention aux pensées et aux sentiments Les pensées et les sentiments de la veille ont-ils influencé la journée d'aujourd'hui? Quelque chose de nouveau s 'est-il produit dans la journée qui t'a accompagné tout au long ? Perçois-tu un changement affectif significatif dans la journée ? Y a-t-il quelque chose qui a ensuite influencé tout ou presque tout ce que tu as fait ? Reconnais-tu une réaction « disproportionnée » par rapport à la réalité ? Peux-tu en reconnaître l'origine ? Qu’est-ce que cela a suscité en toi ? À la fin de la journée. Remarques-tu un changement en toi à ce moment de la pause ? Comment peux-tu décrire ce que tu ressens « ici et maintenant » ? À quoi est due la différence, si elle existe ? A-t-elle quelque chose à voir avec le processus de la pause ? Quel nom donnerais-tu à « ce » que tu ressens ? Souviens-toi de faire une pause et de respirer entre chaque question, en te donnant le temps d'écouter ce que te dicte le cœur.

3. Demande de pardon et avoir l’intention de s’amender.

● En arrivant à cette étape de la pause, tu te rendras compte que tu es davantage conscient de ce que tu as vécu Tout le parcours que tu as fait culmine dans une attitude, une motion, un état ou une sensation intérieure que tu pourrais résumer en te posant, par exemple, la question suivante De quoi Dieu m 'a-t-il rendu conscient lors de cette pause ? Quelqu'un a-t-il besoin que je lui demande pardon ? Y a-t-il quelque chose à amender demain ? Avec quelle attitude intérieure termines-tu pour commencer à vivre demain ? Avec

quelles pensées et sentiments termines-tu ? Si tu devais mettre un titre à la journée que tu as vécu, lequel serait-ce ?

4.- Clôturer la journée et remercier.

Remercie le Seigneur pour cette journée, pour les vécus, les expériences, les rencontres, les lieux, les personnes, etc La richesse de la vie réside dans la variété et la sagesse intérieure qui naissent du fait de savoir reconnaître le passage de Dieu dans sa propre vie. Souviens-toi de la consigne de Saint Ignace : « Ce n ’est pas d’en savoir beaucoup qui rassasie l’âme, mais de sentir et de goûter les choses intérieurement ».

v 03/2024

Suite au livre suivant : le PAS 4 du Chemin du Cœur « Le Père envoie son Fils pour nous sauver »

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