ARKUCHI#35 AVRIL/MAI 23

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art culture architecture #35 gratuit AVR. I MAI 23

Obey ©

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Dans le Rétro... Dans le Viseur

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C DANS L'AIR

• Le style unique de Shepard Fairey

• Littérature Live Festival

.08 Expos

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FOKUS

Fanchon Bilbille

« Je fais de la photo comme je vis »

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Bêtes de Scènes

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Live en stock

The Datsuns

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Festivals & Larsen

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Lettres & Ratures

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Le Street Musée du mois

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Popote(s) & Jugeote

LENIN MONEY, 2003

Marc Riboud : sculpteur de lumière Ça se trame au Rize – À pleins poumons...

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FORME & FONCTION

La Duch’ et l’urbanisme des Trente Glorieuses

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Success Story

utoPistes : les retrouvailles

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Tête d’affiche

Le tg STAN (se) la joue collectif

Emmanuel Daumas, Julie Berès, Fanny de Chaillé, Philippe Decouflé, RAMDAM, les 10 ans de la Comédie Odéon, Eric Massé, etc.

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7 E ART

De sacrées héroïnes !

contact.arkuchi@orange.fr

Mensuel gratuit

Diffusion : plus de 400 lieux

Lyon, Métropole & Rhône‑Alpes

Édité par La Plume d’icKar S.A.S. au capital de 1 000 € ‑ 18 rue Belfort 69004 Lyon

Direction de la publication ‑ Rédaction en chef

Anne Huguet ‑ 06 13 07 06 97

Secrétariat de rédaction : Emmanuelle Babe Ont participé à ce numéro

Martin Barnier, Guillaume Bouvy, Blandine Dauvilaire, Ponia DuMont, Fooddenou, Graphull, Émiland Griès, Marco Jéru, Valérie Legrain

Doussau, Trina Mounier, Irène Rigaldiès, Florence Roux, Gallia Valette Pilenko, Laurent Zine

Illustration de couverture : Fanchon Bilbille

Publicité : mag.arkuchi@gmail.com 06 13 07 06 97

Conception et mise en page

Impression : FOT

ANTONINA

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À la Moulinette

Alexandre Tharaud

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Portrait Wax Tailor

Tirage : 12 000 ex.

Dépôt légal à parution – ISSN : 2646‑8387

Larédactionn’estpasresponsabledestextesetphotos publiésquiengagentlaseuleresponsabilitédeleurs auteurs.Tousdroitsdereproductionréservés.

ABONNEMENT

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ArKuchi

N
N°35
35
ARKUCHI #35 AVRIL | MAI 23
Hype Film 2022 ©

ÇA JOUE

LA GERMINATION – D’AUTRES MONDES POSSIBLES (ÉP. 1)

02 > 10 MAI

TNG

LES ATELIERS

A chaud

PAS UNE RIDE Les peurs de l’enfance, le difficile passage d’un âge à l’autre. La pièce de Joël Pommerat fête ses vingt ans. Sa relecture poétique du Petit chaperon rouge fait toujours mouche. Sold out.

25 > 28 AVR. TNP

ENTRE DEUX MONDES Après Pina Bausch (rappelez-vous Smashed), les jongleurs fortiches de Gandini Juggling se collètent à la danse classique. Un pas de deux virtuose qui invente de nouvelles architectures de l’imaginaire.

27 AVR. Salle Polyvalente Bougoin Jallieu (38)

28 AVR. Le Toboggan

TRANSHUMANISME Rurale et futuriste, Pig Boy 19862358 est l’une des pièces les plus originales de Gwendoline Soublin. Philippe Mangenot et le collectif Le Bruit des Cloches en montent deux versions très différentes.

04 & 05 MAI Théâtre de la Renaissance

17 > 19 MAI Théâtre de l’Élysée

ÉPOPÉE AU FÉMININ La vraie histoire de la première équipe de foot féminin racontée par Pauline Bureau. Féminines narre l’aventure de ces copines prêtes à tout pour vivre leur rêve et s’émanciper. Ça dribble fort.

09 MAI Radiant Bellevue

OSER Comment se frayer un chemin amoureux quand deux continents, deux cultures séparent ? Dans Chasser les fantômes d’Hakim Bay, Sophie Cattani nous interpelle et émeut.

10 > 13 MAI Théâtre du Point du Jour

EN BEAUTÉ Le Théâtre de la Renaissance clôture avec la manière la saison de ses 40 ans avec Nos Mélodies du bonheur. Une comédie musicale participative (80 amateurs) signée à deux mains par Jean Lacornerie et Gérard Lecointe.

27 & 28 MAI Théâtre de la Renaissance

upcycling, acte II

Des objets du quotidien customisés : AiRT DE FAMILLE installe ses scénographies immersives dans les 2000 m² du Musée des Tissus. Du beau monde avec Charlotte Pilat, Da Collages, Myet, Shab... 29 AVR. > 30 JUIL.

RAIL TRIP

Les soubresauts d’une histoire d’amour en six ans et une heure dix chrono. Au rythme des tortillards de Marc Lainé qui animent Nos paysages mineurs. Une mise en scène aux petits oignons sur fond de lutte des classes et des sexes. Vu à La Renaissance.

ca bombe

LA VILLE DE BOURGOIN-JALLIEU SE MET AU STREET ART. APRÈS LES FRESQUES DE VINIE ET IMPACKT EN 2022, PLACE À SEES, ARTEZ OU AKHINE CE PRINTEMPS.

15 AVR. > 14 JUIN

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DANS LE RÉTRO...
Tony Noël © PAR ÉMILAND GRIÈS, ANNE HUGUET, TRINA MOUNIER, IRÈNE RIGALDIÈS FESTIVAL AIRT DE FAMILLE 2022

À PIC !

REGARD FAÇON DOCU SUR UN INTELLECTUEL INFILTRÉ EN USINE. SA MISSION : RAVIVER LE FEU RÉVOLUTIONNAIRE AU SOIR DE MAI 68. LA GRÈVE VAINCRA-T-ELLE ? À VOUS DE VOIR DANS L’ÉTABLI DE MATHIAS GOKALP (2023). EN SALLE DEPUIS LE 05 AVRIL

Foldingue

Le gros coup de cœur d’ArKuchi ! Black March par Sylvie Orcier avec sa tribu d'artistes surdoués. Chronique de la folie avec son étrangeté, sa violence, ses douleurs. Bluffant en bi frontal à la Célestine.

ARTS VISUELS

Construire 2.0

Des idées pour sauver la planète ? Visitez l’expo Portraits de mains pour découvrir des humains qui façonnent vertueusement notre territoire et passer de l’individuel au collectif.

Archipel Librairie

21 place des Terreaux, Lyon 1

> 21 MAI

copinage

Des foulards en soie, mais pas ceux de Mamie ?! Pleins feux sur la collection de printemps d’Ames Sœurs dans le Vieux Lyon. Vernissage le 27 avril.

29 rue Saint-Georges Lyon 5

ROCK LEGEND

THE SISTERS OF MERCY AU TRANSBORDEUR.

DANS L’AGENDAI

17 OCT.I

ANNIV'

Happy birthday au GRAME pour ses 40 ans dédiés à la création et à la musique contemporaine et au Radiant-Bellevue pour ses

10 ans de programmations folles.

dans les oreilles

SAIGON VELOUR PT. II

Hus Kingpin / Tricky

Ghostface Killah

5 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 ... DANS LE VISEUR
MAKE WAY Protomartyr
V. Descotils ©

SHEPARD FAIREY

Étend’art

LA PLUS GRANDE RÉTROSPECTIVE JAMAIS CONSACRÉE À SHEPARD FAIREY, ALIAS OBEY, SE DÉPLOIE AU MUSÉE GUIMET. AVEC PLUS DE 1 000 ŒUVRES COUVRANT 33 ANS DE CARRIÈRE, L’EXPOSITION RÉVÈLE TOUTES LES FACETTES DU TRAVAIL MILITANT DE CE STREET ARTISTE.

UN ÉVÉNEMENT ORGANISÉ PAR LA GALERIE SPACEJUNK, DONT NOUS PARLE JÉRÔME CATZ, SON DIRECTEUR.

En quoi cette exposition est-elle un événement ?

JÉRÔME CATZ Shepard Fairey est l’un des street artistes les plus connus au monde après Banksy, mais lui œuvre à visage découvert et assume son engagement politique. L’exposition retrace son évolution graphique et esthétique, elle montre les sujets qui l’ont passionné, les causes qu’il a défendues, sa manière de faire de l’art. Cette exposition prouve qu’il est possible de défendre des valeurs pendant plus de trente ans sans se perdre en chemin.

Vous présentez notamment des pièces rares…

JC Toutes les œuvres d’avant 1999 sont des pièces rares, et il y en a beaucoup dans l’exposition. Il y a aussi des œuvres originales, comme le poster de campagne de Barack Obama, ou l’œuvre Liberté, Égalité, Fraternité faite par Shepard Fairey en hommage aux victimes du Bataclan. Autres raretés, les sérigraphies uniques réalisées sur bois ou métal, et les fameux HPM (Hand Painted Multiple) qui sont des sérigraphies peintes à la main sur des papiers tous différents.

Pensez-vous que le street art a le pouvoir de faire changer le monde ?

JC J’en suis persuadé puisque la plupart de ces œuvres prennent place dans l’espace public, ça va du graffiti sauvage à la fresque monumentale. Le street art participe à une sorte d’éveil des consciences, de plus en plus d’artistes s’attachent à faire passer des messages dans leur travail, Shepard Fairey en est l’exemple. Les institutions culturelles ont du mal à renouveler leurs publics et à attirer les jeunes, or le street art réussit ça depuis ses débuts. Cette rencontre avec le public garantit la pérennité et la postérité de ce mouvement artistique qui va entrer dans l’histoire, c’est certain.

6 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 C DANS L'AIR
PAR BLANDINE DAUVILAIRE I VISUELS OBEY 1001 REASONS TO (DIS)OBEY > 09 JUIL. Musée Guimet Lyon 6 1001obey.com obeygiant.com PISTOLS SUBVERT, 2001

Le monde en dialogue

La Villa Gillet persiste et signe en mai son troisième Littérature Live Festival. Au programme : des conversations avec une quarantaine d’écrivains du monde entier, connus ou à découvrir, des lectures et des ateliers d’écritures ou de traduction… Et des lives radio.

Prendre le pouls du monde avec celles et ceux qui l’écrivent : tel est bien l’un des enjeux du Littérature Live Festival. Dans la suite des Assises internationales du roman, le principe reste le même : rencontrer des écrivains vivants, français et étrangers. Mais le style diffère, le festival cultivant un esprit plus participatif – il associe libraires, bibliothécaires, étudiants, lycéens... –et résolument curieux.

De Coe à Brown

On pourra ainsi s’entretenir avec Nathacha Appanah, dont les Lyonnais ont pu voir l’automne dernier aux Célestins une adaptation du brûlant Tropique de la violence, déjà porté à l’écran en 2021. Ou prendre des nouvelles d’outre-Manche avec Jonathan Coe (déjà venu plusieurs fois à la Villa), lors d’une conversation sur Le royaume désuni, son dernier roman qui traverse joyeusement, parfois à l’acide, 75 ans d’histoire british. « Mais nous travaillons aussi à repérer des auteurs moins connus, qui n’ont encore qu’une ou deux traductions en France », explique Léa Danilewsky de la Villa Gillet. Les conversations qui associent des écrivains francophones et non francophones sont idéales pour découvrir ces nouvelles voix, comme celle de la géniale autrice britannique Natasha Brown, dont le roman Assemblage vient de paraître en France. Elle dialoguera, notamment, sur le racisme et le mépris de classe avec Maryline Desbiolles, qui a écrit, entre autres, Charbons Ardents sur la marche de 1983 contre le racisme, et avec Jakuta Alikavazovic, sa traductrice, également autrice.

Au-delà de la découverte, le défi du festival réside bien aussi dans la « comparaison sur des sujets qui nous touchent », comme celui de l’engagement auquel est consacrée la soirée des écrivains sentinelles, avec la Syrienne Samar Yazbek (19 femmes, La demeure du vent), l’essayiste Justine Augier (Croire. Sur les pouvoirs de la littérature) et le traducteur Olivier Mannoni, auteur de l’essai Traduire Hitler. Enfin, le dernier soir offre un temps fort avec un live d’Arte Radio autour de La dernière nuit d’Anne Bony, passionnant podcast qui raconte la vie de cette pirate du XVIIIe siècle… Still alive.

7 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 C DANS L’AIR
09 > 14 MAI Villa Gillet + Divers lieux Lyon villagillet.net SNOOP D-O DOUBLE G, 2022 LOVE UNITES 2008 PARADISE LOST 2022
PAR FLORENCE ROUX

de lumière de lumière Sculpteur de lumière

À L’OCCASION DU CENTENAIRE DE LA NAISSANCE DE MARC RIBOUD, LE MUSÉE DES CONFLUENCES EXPOSE 100 PHOTOS EMBLÉMATIQUES DE L’ARTISTE. EMPLIES DE BEAUTÉ, D’HUMANITÉ ET D’HUMOUR, ELLES ONT ÉTÉ RÉALISÉES PAR THOMAS CONSANI, SON TIREUR EXCLUSIF. RENCONTRE.

Quel est l’objet de cette exposition ?

THOMAS CONSANI Ce n’est pas une rétrospective mais un gâteau d’anniversaire avec des surprises. Il y a quelques photos classiques comme Le Peintre de la tour Eiffel dont la construction géométrique est assez incroyable, ou La jeune fille à la fleur qui a révélé Marc Riboud au monde entier. Il y a également des inédits comme la Cappadoce en Turquie (1955) ou Les Rameurs au Ghana (1960).

La photo du Plongeur prise à Dubrovnik en 1953 paraît invraisemblable…

TC L’homme semble en effet plonger près des enfants qui l’observent dans 25 cm d’eau. On se dit qu’il va se fracasser sur le fond. Mais c’est une illusion d’optique car Marc est en contre-plongée, il donne une sensation de profondeur. Je suppute aussi qu’il y avait une piscine artificielle dans la mer, comme c’était souvent le cas, et que Marc a décadré en bas, donc on ne la voit pas.

Outre l’humour et la poésie, quelle est la particularité de ce photographe ?

TC Pour ses tirages il n’aimait pas les noirs bouchés, ni les blancs « blancs ». Il voulait voir du détail, ce qui pour certaines photos est assez complexe à réaliser, car il y a de grands écarts de densité. Cela nécessite de faire un maquillage de l’image.

8 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 EXPOS PAR BLANDINE DAUVILAIRE
FENÊTRES D’ANTIQUAIRE PÉKIN, 1965 Marc Riboud / Fonds Marc Riboud au MNAAG ©
Marc Riboud / Fonds Marc Riboud au MNAAG ©
PLONGEUR DUBROVNIK, 1953

Est-ce le cas de la photo Fenêtres d’antiquaire prise à Pékin en 1965, qui montre la rue depuis l’intérieur du magasin ?

TC Pour le chambranle de la porte et des fenêtres, Marc voulait qu’on voit le détail de la poignée et les brillances sur le bois. Il a exposé l’intérieur du magasin et donc surexposé la rue avec les gens assis et les passants. Tous les visages, les vêtements, le sol et les idéogrammes sont très blancs. J’ai dû les griser pour y mettre du détail en faisant un maquillage au niveau de l’agrandisseur.

Les gens sur cette photo semblent entrer dans le cadre comme des personnages de cinéma !

TC Comme toutes ses photos, celle-ci est très géométrique, très calculée, chaque petite fenêtre est une photo en ellemême. Un peu comme chez [le peintre flamand] Bruegel. Il a rassemblé plusieurs générations, car sa force c’est aussi de s’intéresser à l’humain, à la vie et à la famille.

C’est ma photo préférée, je ne m’en lasse pas car je découvre à chaque fois d’autres détails. C’est une énorme responsabilité de faire vivre l’œuvre de Marc, je n’ai pas le droit de le trahir, c’est pourquoi j’ai la même technique aujourd’hui que de son vivant. Je l’écoutais toujours avant de tirer pour lui, je voulais qu’il me raconte sa photo, comment et pourquoi il l’avait faite, pour être en osmose avec lui, et c’est encore le cas.

au fil du temps

EMMANUELLE BABE

L’aventure textile : le sous-titre de la passionnante exposition que présente Le Rize résume parfaitement son objet. L’histoire de Villeurbanne, un « gros bourg un peu dispersé » qui se transforme en une véritable ville sous l’essor du textile au mitan du XIXe siècle.

L’exposition explore cette épopée industrielle en montrant comment elle a façonné le territoire et ses habitants, des grandes usines de teinture aux petits ateliers de tullerie et dentellerie, les spécialités villeurbannaises. Par un jeu de photos avant/après, le visiteur est invité à deviner puis découvrir les traces laissées ici et là par ce patrimoine pas si ancien. Spécificité du Rize, l’approche mémorielle est le fil rouge de l’exposition, qui propose un corpus riche et varié (cartes, témoignages audio, archives privées), issu majoritairement des archives municipales. Puisqu’il faut bien choisir, les sites historiques emblématiques sont mis en exergue, avec quelques pièces phare (bleu de travail Lafont, dentelle de Dognin, tapisseries des Ateliers Jouffre…), sans jamais oublier les nouveaux-venus qui font vivre le secteur aujourd’hui et toujours localement. Les machines n’étant rien sans les hommes – la découverte immersive de l’évolution des savoir-faire est très réussie –, un dernier espace rend hommage aux patrons et aux ouvriers, au travail comme en lutte. Des visages et parfois des voix pour incarner cette grande « aventure ».

9 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 EXPOS
100 PHOTOGRAPHIES POUR 100 ANS > 31 DÉC. museedesconfluences.fr
PAR
ÇA SE TRAME À VILLEURBANNE > 30 SEPT. Le Rize Villeurbanne lerize.villeurbanne.fr
Edouard Demarly ©

Grand bol d’air

DÉTOURNEMENT

L’imagination est galopante chez Pilar Albajar et Antonio Altarriba. Le binôme espagnol accueilli à la galerie Vrais Rêves se partage la création des œuvres : Pilar photographie l’image qu’Antonio a mise en scène. Leur travail aux airs surréalistes mais bien ancré dans l’époque est exécuté jusque dans les moindres détails (cherchez les visages cachés dans la végétation d’À table !). Les séries Les Guignols – de troublants portraits de marionnettes détournées – et Les petits théâtres – tout un monde d’humour et de poésie – valent particulièrement le détour. EB

HUMOUR PRINTANIER

> 22 AVR.

Galerie Vrais Rêves Lyon 4

SURIMPRESSIONS

Émilie Tolot travaille inlassablement la terre, se passionnant pour la représentation du corps humain en mouvement. Comment rendre l’illusion de la vie avec de la terre ? En décomposant les gestes de danseurs comme Mourad Merzouki et en fixant chaque étape sur la pellicule. Travail de fourmi ou de titan qu’elle enrichit encore d’un zootrope spectaculaire et de superpositions insolites et touchantes qui font danser ensemble artiste et sculpture. TM

La Fondation Bullukian propose une formidable déambulation entre les œuvres de douze artistes, concernés peu ou prou par le thème du souffle. Parmi nos coups de cœur, le travail de Nicolas Dhervillers, à mi-chemin entre la photo et le dessin, donne naissance à des paysages vaporeux. De son côté, Élise Grenois a inventé un procédé qui lui permet de transformer le corps des poissons et des crabes en cristal, fascinant ! Sur le mur du fond, Jean-Baptise Caron a installé une multitude de miroirs, sur lesquels il suffit de souffler de la buée pour faire apparaître un message gravé, magique ! Il a aussi tenté de capturer le mouvement des courants d’air dans de la cire… entreprise poétique en diable. Véritable star dans son pays, le Brésilien Jonathas de Andrade détourne et met en scène le rituel de la pêche au filet, dans une vidéo qui intrigue. D’une beauté puissante, les photos d’Arguiñe Escandón & Yann Gross évoquent des paradis perdus chargés de spiritualité. Dans le second espace, Deborah Fischer expose des sculptures particulièrement touchantes, où le verre fusionne avec des objets récupérés dans la rue. Enfin, l’étrange installation sonore de Vahan Soghomonian interagit avec les visiteurs. Cette exposition passionnante prend encore plus de sens grâce aux explications des médiateurs, et aux visites guidées. C’est gratuit, courez-y !

SCULPTURE EN LIBERTÉ

> 12 MAI

UCLY Place des Archives, Lyon 2

RÉSISTANCE

La petite expo que propose actuellement le CHRD est épatante. On y découvre Madeleine Riffaud, personnage hors du commun qui va fêter ses 100 ans. Résistante dès son adolescence, elle participe à la libération de Paris, avant de devenir correspondante de guerre au Vietnam puis en Algérie, portant la voix de l’anticolonialisme toute sa vie durant. En bande dessinée, Jean-David Morvan, Dominique Bertail et Madeleine Riffaud racontent cette vie rocambolesque marquée par la lutte à toute oppression.

À découvrir dare-dare ! GV-P

MADELEINE RIFFAUD, RÉSISTANTE

> 11 JUIN

CHRD Lyon 7

10 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23
Nicolas Dhervillers © NICOLAS DHERVILLERS - CROSSFADE 4, 2022
EXPOS PAR BLANDINE DAUVILAIRE
PLEINS POUMONS > 15 JUIL. Fondation Bullukian Lyon 2 bullukian.com TELEXxxxxxxx
À
PAR EMMANUELLE BABE, TRINA MOUNIER, GALLIA VALETTE-PILENKO

QUARTIER LOINTAIN

Perchée sur la trop méconnue « troisième colline » de Lyon, coincée entre autoroute et périphérique nord, " La Duch’ " est, dans l’imaginaire des Lyonnais, synonyme d’urbanisme brutal. Au début des années 1960, elle est imaginée par le maire Louis Pradel, chantre du tout béton/tout automobile. L’édile, bien de son temps, ne fait pas dans la dentelle ! Pour preuve : un autre de ses projets, heureusement avorté grâce à la mobilisation de quelques habitants éclairés, est l’éventration du Vieux-Lyon par une voie express ! Le quartier de La Duchère émerge ex nihilo, bénéficiant de la disponibilité d’immenses terrains libérés par l’armée. Exit également le château qui occupe le site depuis le XIVe siècle. On ne s’embarrasse pas à l’époque, semble-t-il, de tergiversations ni précautions patrimoniales. Place nette est donc faite pour expérimenter la ville moderne, constituée de hautes barres sans fin, aux façades à l’implacable trame géométrique, plantées au milieu d’espaces verts en devenir. Notre regard contemporain est, sur le sujet, sévère. Il ne faut néanmoins pas jeter bébé avec l’eau du bain : les logements y sont confortables, lumineux et ventilés, offrant des vues dégagées, changeant en cela radicalement la vie de leurs occupants, extraits de l’insalubrité de la ville ancienne. De plus, de petites pépites artistiques (sculptures, par exemple) et des églises contemporaines parsèment le grand ensemble. Enfin, la Duchère offre également à Lyon son premier gratte-ciel, livré quatre ans avant la tour du Crédit Lyonnais et dont l’épiderme hérissé de loggias triangulaires élance ses 91 mètres de haut et ses 26 étages dans le ciel. En 1975, lorsque le quartier

arrive au terme de son projet initial, les chiffres sont vertigineux : ce ne sont pas moins de 8 000 logements sur 120 hectares, occupés par 20 000 habitants ! La Duchère cumule pourtant les handicaps : isolement d’un quartier enclavé et mal desservi, mono-fonctionnalité résidentielle constituée à 80 % de logements sociaux, absence d’activités économiques sur place et peu d’équipements ou de commerces. L’appauvrissement croissant de ses habitants, de plus en plus issus de l’immigration, bientôt durement touchés par le chômage de masse, parachève son déclassement.

Repéré au début des années 1980 comme l’un des vingt quartiers les plus en difficulté en France, État et collectivités locales se penchent pendant plus de vingt ans au chevet de ce grand malade, à coup de

12 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 FORME & FONCTION
GRIÈS LA RÉCENTE SORTIE DU LIVRE LA DUCHÈRE, UNE HISTOIRE AU FUTUR PAR L’ÉDITEUR LYONNAIS LIBEL* OFFRE L’OCCASION DE REVENIR SUR L’HISTOIRE À REBONDISSEMENTS DE CE QUARTIER EMBLÉMATIQUE DES TRENTE GLORIEUSES.
PAR ÉMILAND
*
Édition indépendante fondée en 2008 à Lyon, spécialisée dans les livres « avec des images dedans ».
Pierre Verrier ©

rénovations, tant architecturales que sociales, tentant de désarmorcer ainsi la bombe à retardement du combo ghettoïsation-violence. La plus médiatique de ces tentatives est la mission Banlieues 89, lancée sous présidence mitterrandienne, avec à sa tête l’architecte Roland Castro, tout récemment disparu. Les remèdes successivement administrés font hélas long feu. Avec l’idée qu’on n’obtient pas de grands changements par doses homéopathiques, sept milliards d’euros sont mis sur la table au milieu des années 2000. La Duchère passe alors à marche forcée d’un urbanisme de la verticalité à une forme de ville plus horizontale et traditionnelle, avec retour à la notion de rues et d’îlots bâtis, requalification des espaces extérieurs aux statuts jusque-là peu définis, mise en valeur du riche patrimoine végétal existant et désenclavement

visuel comme fonctionnel du site. Cette refonte totale entraîne de spectaculaires démolitions de barres frappées d’obsolescence – mais également la labellisation « Patrimoine du XXe siècle » des quelques bâtiments remarquables conservés – pour laisser place à un nouveau tissu urbain riche en diversité. Le livre qui retrace cette épopée urbaine avec force détails et archives graphiques, mais également un large reportage photographique inédit, débroussaille un sujet étonnamment peu traité. Donnant la parole à l’architecte Bernard Paris et à l’urbaniste-paysagiste Alain Marguerit, maîtres d’œuvre de cette révolution, il rappelle que La Duchère, initialement conçue « comme un coup de poing dans le paysage », devient peu à peu, mais définitivement, un quartier ordinaire de Lyon.

LA DUCHÈRE, UNE HISTOIRE AU FUTUR Philippe Dufieux et Pierre Gras Éditions Libel (nov. 2022) editions libel.fr gpvlyonduchere.org

13 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 FORME & FONCTION
QUARTIER DU PLATEAU DEPUIS LA TOUR PANORAMIQUE

Retrouvailles

FESTIVAL UTOPISTES

23 MAI > 17 JUIN

14 lieux

Lyon & Métropole festival utopistes.fr

Les 4 points cardinaux [...]

23 MAI

La Mouche

Saint Genis Laval

25 & 26 MAI

Théâtre de la Croix Rousse

Terces

30 MAI > 04 JUIN

Parc de Parilly Vénissieux

Le Périmètre de Denver

31 MAI & 01 JUIN

Maison de la Danse

MATHURIN BOLZE ET MARION FLORAS PORTENT HAUT ET FORT LE FESTIVAL UTOPISTES, PROJET AUTOUR DES ARTS DU CIRQUE CREUSANT DANS LES FORMES, LES GESTES ET LES PENSÉES. APRÈS CINQ

ANNÉES DE SILENCE, RETOUR GAGNANT AVEC UNE PROGRAMMATION TOUJOURS SINGULIÈRE ET ENGAGÉE QUI CÉLÈBRE LE MEILLEUR DU CIRQUE D’AUJOURD’HUI.

Ici, c’est un cirque exigeant qui attend le spectateur avec « des circassiens qui se posent, s’opposent et contre-proposent leur rapport au temps, à l’espace, à l’autre ». 17 formes artistiques dont 7 spectacles gratuits rythmeront cette sixième édition, où se mélangent créations et premières œuvres, pièces du répertoire (on pense au petit bijou qu’est Ali), commande in situ (en piste les trublions du Galactik Ensemble et leur acrobatie de situation) et travaux en cours des artistes de demain – pour certains à peine sortis des écoles (CNAC, Lido…). Dans les nouveautés, certains spectacles jouent sous chapiteau du côté de Parilly. Ainsi de Balestra, le spectacle de fin d’études de la 34e promotion du CNAC avec Marie Molliens et quatorze Pierrots lunaires qui interrogent les codes circassiens traditionnels (corde lisse, roue Cyr, cerceau, jonglage…) à travers le prisme de leur génération.

14 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 SUCCESS
STORY
PAR ANNE HUGUET
JC Leblanc ©
LES QUATRE POINTS CARDINAUX SONT TROIS : LE NORD ET LE SUD

Souvenir ébloui

Le spectacle vivant est l’art de l’éphémère. Pourtant, Ali, créé en 2008 et l’un des premiers spectacles de Mathurin Bolze, connaît une incroyable longévité. Troublant.

Chorégraphié et interprété par Mathurin Bolze et Hèdi Thabet, Ali est un choc : car l’un des deux a perdu une jambe. Les deux artistes jouent de la métaphore poétique : qui est cet être à trois jambes et deux têtes ? Ganesh ou Gorgone, dieu ou monstre ? Qui poursuit l’autre ? Qui porte l’autre ? Dans cette ronde effrénée qui joue sur les ruptures d’équilibre, le propos est sensible. Il parle avec une infinie pudeur de la force, du courage, de l’amitié, de la beauté des corps. C’est un spectacle léger comme une bulle de savon qu’on n’oublie pas. TM

ALI

TNP Villeurbanne

Quelques jours plus tôt, c’est Johann le Guillerm qui vient bousculer nos croyances. Terces est un seul-en-scène inclassable d’une heure trente pour explorer la matière et ses obsessions (le vivant, l’inerte, l’équilibre, l’instabilité, le grain de sable…) et requestionner les lois connues et les repères inventoriés. Le « Leonard de Vinci du cirque contemporain », peut-on lire, ça vous donne une idée de l’homme ! Il est inquiétant – regard laser qui vous transperce, visage taillé à la serpe, corps glabre et musculeux, présence animale –, ne parle pas et expérimente sans relâche pour repousser ses limites au milieu de machinessculptures et de mikados géants. Ça perturbe, il faut lâcher prise pour entrer dans son cirque mental : déstabilisant, mais follement poétique.

Avec la géniale touche-à-tout Vimala Pons – actrice, elle a joué avec Mandico, Garrel ou Verhoeven, performeuse, metteuse en scène, tenniswoman… –, on devrait être servi côté démesure et physicalité intense. La circassienne experte en portés d’objets sur la tête (et même une voiture ?) ose tout. Sorte de Cluedo dingue, Le Périmètre de Denver interroge notre rapport au mensonge et notre identité réelle dans une réflexion existentielle. Une manière « de questionner le déséquilibre dans sa propre vie » mais une performance ouverte où chacun prendra ce qu’il veut. Assez sidérant, dixit ceux qui l’ont vue.

On l’avoue, la plupart des pièces font envie ! Que ce soient Andrés Labarca et Sylvain Decure en prise avec leur maison hantée et ses mystères, Alice Barraud en proie à sa douleur pour se reconstruire, Basile Forest en duo acrobatique… avec violon, ou encore la contorsionniste Anahi de Las Cuevas qui démarre un travail documentaire autour d’Eva Perón. Autre Première Piste avec À tout rompre : on se demande ce que le duo Sacha Ribeiro et Alice Vannier va encore inventer dans ce mano a mano entre théâtre et voltige ! Ça démarre le 23 mai et ça promet de belles soirées avec des artistes qui « émeuvent, nous choquent ou font rêver ».

15 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 SUCCESS STORY
23 > 26 MAI

LE NOM MÊME QUE S’EST CHOISI LE COLLECTIF BELGE D’ANVERS EN DIT LONG : TG SIGNIFIE "COMPAGNIE D’ACTEURS" ET STAN, ACRONYME DE STOP THINKING ABOUT NAMES ("OUBLIEZ LES NOMS"), ENFONCE LE CLOU. LES TG STAN PRÉSENTENT EN MAI LEUR CERISAIE AUX CÉLESTINS.

Pouvez-vous présenter votre compagnie ?

JOLENTE DE KEERSMAEKER Nous sommes un collectif d’acteurs. Chez nous, depuis trente ans déjà, l’acteur est au centre de tout. Il est véritablement créateur. Nous travaillons sans metteur en scène. Nous faisons un très long travail à la table, quand on compare à d’autres compagnies. Le premier objectif de ce travail à la table est de trouver notre propre traduction. C’est un problème car, étant flamands, notre langue est très différente du néerlandais : si la grammaire est la même, nos cultures sont différentes, les mots aussi. Quand on parle de chaque mot, des personnages, on en arrive à inventer notre propre dramaturgie. On plonge dans le texte ensemble, on répartit les rôles et on apprend le texte au fur et à mesure. Les premières répétitions se font à la table. Le spectacle commence à vivre en présence du public, quand on sent le souffle des spectateurs.

C’est un processus de fidélité et de renouvellement… JDK Sur La Cerisaie, nous sommes nombreux et intégrons une nouvelle génération avec cinq jeunes tout juste sortis du Conservatoire. Et aussi Evgenia Brendes, qui est russe. Nous jouons Tchekhov depuis longtemps et dans différentes langues. Mais ça change tout le temps, parce que nos vies

personnelles changent. Nous partons toujours de notre vécu, de ce que nous sommes et de ce qui nous touche dans le rôle. Lioubov doit dire au revoir à cette Cerisaie car elle est à une période de sa vie où tout change avec une nouvelle génération qui arrive, dans la pièce comme dans la troupe, avec ses propres rêves. La pièce parle de la nécessité de dire au revoir à des choses. Il faut savoir ne pas se montrer obstiné et ne pas rester attaché à des vieilleries. Il y a tant d’interprétations possibles… La lutte entre Lopakhine et Lioubov recouvre des oppositions très profondes entre le désir de beauté et les lois de l’argent. C’est une œuvre qu’on peut jouer pendant des années et qui garde tout son mystère…

Vous avez la réputation de tordre les textes. JDK Mais ce n’est pas vrai, pas du tout ! Tout le monde pense ça, alors que nous sommes très stricts, nous n’improvisons pas. Oui, nous sommes ouverts au public, nous nous permettons quelques petites adresses vers lui, mais c’est notre manière de jouer qui est authentique, très personnelle. Le travail à la table est très intime. C’est seulement après qu’on se met debout et on transpose cette intimité sur la scène. Chaque acteur ose souffrir, devenir transparent, c’est comme une osmose entre l’acteur et le personnage.

16 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 TÊTE D’AFFICHE
PAR TRINA MOUNIER
LA CERISAIE 03 > 07 MAI Théâtre des Célestins Lyon 2 theatredescelestins.com LA CERISAIE
collectif Jeu
Koen Broos ©

LE MONDE SELON FANCHON

« Je suis photographe. » C’est une évidence. Son métier, sa passion, sa vie. « Je fais de la photo comme je vis, elle m’accompagne partout. » Fanchon Bilbille est annécienne, 43 ans, 3 enfants et une approche au feeling de la photographie, dans laquelle elle tombe jeune. « Mon père avait un labo. Il y a toujours eu des photos à la maison. Premier appareil ? Un vieil Hasselblad, ce gros appareil très lourd, tellement lourd et physique que les gens prennent la pose. Autre souvenir : l’odeur des produits chimiques, le révélateur, le bain d’arrêt… »

Fanchon aurait pu, aurait dû, être comédienne – elle a fait plusieurs écoles, dont le Conservatoire national de Bruxelles –, mais devenue mère plus vite que prévu, elle abandonne les feux de la rampe pour se cacher derrière son boitier. « Quand j’étais comédienne, "Disparaître" est un mot que

FOKUS
PAR ANNE HUGUET PHOTOS FANCHON BILBILLE
Je cherche la beauté dans tout ce que je regarde

j’ai prononcé maintes fois silencieusement, comme une prière. Photographe est peut-être la meilleure solution que j’ai trouvée pour y arriver. » Aujourd’hui, elle shoote et capture – presque au sens bouddhique du terme – des mains, des pieds, des regards intenses, des silhouettes en pointillés, des paysages, des bouts de spectacles, des éclats de vie et surtout des instants de quotidien saisis sur le vif. « Je fais de la photo comme je vis », sourit-elle, cherchant la beauté dans tout ce que je regarde. » Des clichés en noir et blanc, beaucoup, ou couleur, mais avec quelque chose de dark, peut-être cette tonalité sombre qui habite nombre de ses images. Elle avoue avoir des milliers de photos et il suffit d’aller surfer sur sa page Facebook pour voir que tout est photo pour elle. « Je veux faire de la photo populaire qui n’exclue personne et qui parle à tout le monde », tel est son mantra. Les manifs, les clowns, la scène (elle a démarré avec des photos de scène, sa « base » comme elle dit), les paysages, les ruelles d’Annecy (« Le confinement : un moment de grâce pour moi. J’ai adoré redécouvrir les détails, les lumières de la ville, vide. »), le catch, la nature, les petits, les gros, les gueules… Il y a quelque chose d’impalpable dans sa photo, le style Fanchon Bilbille. Et pourtant, la photographe a du mal à analyser son esthétique, sa manière de travailler. Très artisanal, c’est sûr, et à l’arraché. Elle shoote souvent rapidement et sans beaucoup de préparation. Elle reconnait qu’elle adore l’accident. Elle aime aussi expérimenter. Et prendre son temps lorsqu’elle traite ses images (pas avec Photoshop mais avec un logiciel de développement). « Je développe les photos comme on suit une odeur. C’est une histoire entre moi et la matière. » Elle tâtonne longtemps, « salopant parfois une photo ratée à fond, jusqu’à ce qu’il se passe quelque chose ». Onirique, baroque, poétique, étrange, voilà autant d’adjectifs qui collent à son monde habité. Quelque part « entre l’endroit et l’envers du décor. Comme un témoin des deux versants... » Belle invitation à s’échapper de la réalité. À découvrir en avril à la Croix-Rousse.

ELLE AIME

fanchonbilbille.photodeck.com

fanchon_bilbille fanchonbilbillephotographies

22 AVR. > 23 MAI Bistrot fait sa Broc Lyon 4
Robert Frank, Tom Waits, Aki Kaurismäki, Brigitte Fontaine, Harvey Keitel, Blondie, Le Tampographe Sardon, Pippo Delbono, Didier Super…

Roses de combat

APRÈS LE BOULEVERSANT MUJER VERTICAL, OPUS FÉMINISTE AUTOUR DU DESTIN DE QUATRE ACTIVISTES COLOMBIENNES, LE PRIX DES ROSES DONNE DE LEURS NOUVELLES AUX CÔTÉS DE JULIETTE, INCARNÉE PAR ÉRIC MASSÉ, SON METTEUR EN SCÈNE. IL NOUS EN DIT DAVANTAGE.

Pourquoi ce titre : Le Prix des Roses ?

PAR FLORENCE ROUX

Pourquoi reprendre Mujer Vertical ?

ÉRIC MASSÉ Mujer Vertical racontait la vie et les combats de ces quatre femmes : l’une a été FARC, l’autre enrôlée par les paramilitaire et la troisième victime d’une milice ; la dernière est la star de telenovelas et figure de proue LGBTQI, Alejandra Borrero. Nous reprenons le spectacle en donnant de leurs nouvelles. Leurs vies ont changé, en partie grâce au spectacle. Elles travaillent ou étudient. Elles militent pour les droits des femmes et des Afro-Colombiennes. Mais elles sont aussi plus exposées, parfois menacées jusqu’à devoir vivre sous un faux nom, se déplacer avec un garde du corps. Elles sont sorties des combats physiques pour une lutte plus politique, qui n’échappe pas aux menaces.

ÉM D’abord cela rappelle que la Colombie est l’un des premiers exportateurs de roses du monde, marché qui emploie surtout des femmes. Puis les roses sont un hommage à Rosa Elvira Cely, victime d’un féminicide en 2012, et dont le nom est lié à une loi anti-féminicide de 2015, qui a permis de condamner son meurtrier. Enfin, la rose fait référence au festival Ni con el Pétalo de una Rosa (« Pas même avec un pétale de rose ») créé par Alejandra Borrero pour lutter contre les violences faites aux femmes.

Comment avez-vous travaillé ?

ÉM Nous avons échangé régulièrement et récemment travaillé en visio. À partir de leurs témoignages de vie, j’écris en français et en espagnol, puis je leur propose les textes, elles réagissent. Nous gardons à peu près la même forme, mais allons probablement enlever certains textes de référence, sur l’avortement par exemple, et en ajouter des nouveaux, un de Giulia Foïs en particulier.

20 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23
BÊTES DE SCÈNES
24 > 26 AVR. Théâtre du Point du Jour Lyon 5 pointdujourtheatre.fr MUJER VERTICAL Jean Louis Fernandez ©

Joyeux bordel

Decouflé, on ne présente plus ! Le chorégraphe trublion a marqué à jamais les esprits en 1992 aux JO d’Albertville, réinventant magistralement le genre avec ces (ses) costumes fous et ces tourbillons féériques. On se souvient aussi de Triton, Shazam ! ou Sombrero. Entre autres. Toujours multiactif, il a créé l’été dernier, à Montpellier Danse, Stéréo, pièce hybride, à son image, entre danse et concert. Avec un vrai trio rock emmené par un certain Arthur Satàn (oui, celui des foutraques JC Satàn) et cinq danseurs au plateau qui se métamorphosent sans cesse, jouant de multiples personnages et sur tous les registres. À coups de saynètes qui s’enchaînent, la pièce va crescendo avec « une danse qui bondit et rebondit, qui fuse et qui jaillit, jusqu’à l’essoufflement ». Des acrobaties viennent compléter la danse pour « une autre corporalité, plus contemporaine ». Plus proche d’un show rock, en fait ! Mais débordant de joie et d’explosivité. Ça démarre sec avec une bande-son qui pétarade entre reprises (Roxy Music, Queen Of The Stone Age…) et créations originales et ça part en tous sens avec des danseurs-performeurs remontés comme des coucous. Jamais venu aux Nuits de Fourvière, Philippe Decouflé ouvrira le bal avec Stéréo Deluxe – une version « revue, corrigée et enrichie » avec 7 danseurs et 7 musiciens – pour la dernière édition de Dominique Delorme. Let’s dance !

postscriptum

Koltès superstar

Trois pièces du grand Koltès, si lucide et désabusé, par des grands noms du théâtre : voilà de quoi se régaler ! Jean-Christophe Folly est un vibrant exclu de La Nuit juste avant les forêts signé Matthieu Cruciani. Mathieu Boisliveau et son collectif Kobal’t offrent un Combat de nègres et de chiens intense pour cet homme noir qui réclame le corps de son frère dans une Afrique tenue par des « Blancs ». Enfin le décor tourmenté d’Enki Bilal sublime Dans la solitude des champs de coton de Kristian Frédric et ce duel farouche entre le Client (Xavier Gallais) et le Dealer (Ivan Morane). Prudent de réserver. TM

COMBAT DE NÈGRES (…)

25 > 29 AVR.

Théâtre des Célestins

Lyon 2

DANS LA SOLITUDE (…)

25 & 26 AVR.

Espace des Arts

Chalon sur Saône (71)

STÉRÉO DELUXE

31 MAI > 03 JUIN Nuits de Fourvière Théâtre antique Lyon 5 nuitsdefourviere.com

Récit intime

LA NUIT (…)

28 & 29 AVR.

Espace des Arts

Chalon sur Saône (71)

03 > 06 MAI

Comédie de Saint Étienne (42)

10 > 12 MAI

Comédie de Valence (26)

On a découvert son travail la saison dernière : au Théâtre de la Croix-Rousse avec Julia, version très personnelle de Mademoiselle Julie de Strindberg, puis avec Entre chien et loup au TNP, une adaptation du célèbre Dogville de Lars von Trier. Christiane Jatahy revient avec le dernier volet de sa « trilogie des horreurs » : Depois do Silêncio (« Après le silence »), créé en partie au Brésil et fortement inspiré par Torto Arado du géographe Itamar Vieira Junior, entrelace théâtre et cinéma, fiction et réalité, passé et présent, politique et poésie. Si recourir à la caméra est devenu courant au théâtre, elle a une façon bien singulière de l’utiliser qui tranche avec ses contemporains et mérite le détour ! GV-P

23 > 26 MAI

TNP Villeurbanne

BÊTES DE SCÈNES
Roméo
© STÉRÉO
Ricard
DELUXE

L’âge de déraison 10 ans

On ne donnait pas cher de ce nouveau théâtre, non ?

JULIEN PONCET En fait il existait un espace pour une scène ouverte au spectacle populaire de qualité issu du secteur privé, mais il fallait dépasser les stéréotypes : le théâtre non subventionné ne se limite pas au boulevard. Je me suis dit qu’il fallait prendre ce risque, pour programmer ces jeunes artistes dont Lyon regorge et qui sont en souffrance. Parallèlement, le public était de moins en moins nombreux, il était nécessaire de

Liszt, es-tu là ?

désacraliser le théâtre pour lui offrir des émotions qui lui ressemblent sans que ce soit trop imposant pour lui.

Avez-vous le sentiment d’avoir réussi votre pari ?

J.P. C’est ma fierté. La Comédie Odéon a bâti un projet d’intérêt général : par exemple, l’accueil de 600 000 spectateurs, dont 4 000 scolaires venus de 55 établissements. Ce théâtre est désormais un outil de rayonnement qui participe à de nombreux (grands) festivals.

Alors, cette fête ? Mettez-nous l’eau à la bouche…

J.P. Elle sera à notre image, une semaine de retrouvailles festives entre comédiens et spectateurs. Avec une table ronde sur la fonction du théâtre vivant, des chansons, des surprises et bien sûr la reprise du Porteur d’histoires, le premier spectacle qui nous a mis en pleine lumière et de Tout ça pour l’amour !. Un temps volontairement désorganisé et riche d’événements, comme on aime…

Voilà un spectacle très surprenant, à l’image de son autrice, Maya Boquet. La dramaturge explore, enquête, collecte matériaux sonores et visuels, témoignages à partir desquels elle compose des performances scéniques ou radiophoniques entre fiction et documentaire. Cette fois, elle s’attache à Rosemary Brown, une femme ordinaire mais médium ! Là commence L’Énigme Rosemary Brown : la copiste née en 1916 dans la banlieue de Londres conversait avec Liszt, Schubert, Beethoven et d’autres, et écrivait de la musique sous leur dictée. Pendant trente ans, elle a consacré sa vie à retransmettre 1200 partitions inédites de compositeurs très connus. C’est cette dimension essentielle du travail, la ténacité de cette artiste « malgré elle » qui fascine Maya Boquet : elle se reconnaît dans son personnage comme dans un miroir. Ce spectacle musical nous plonge dans une enquête sur un mystère qui a vraiment existé et questionne notre rapport aux fantômes. Et c’est là que ça commence à être intéressant ! TM

22 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 BÊTES
SCÈNES
DE
PAR TRINA MOUNIER LE THÉÂTRE COMÉDIE ODÉON A DIX ANS ! CELA VAUT BIEN UNE FÊTE. JULIEN PONCET, SON DIRECTEUR, LÈVE LE VOILE.
LES 10 ANS DU THÉÂTRE COMÉDIE ODÉON 25 > 30 AVR. comedieodeon.com
Paul Bourdrel ©
L’ÉNIGME ROSEMARY BROWN 26 > 28 AVR. Les Subsistances Lyon 1 les subs.com

Un théâtre libre

FOCUS

10

23 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 BÊTES DE SCÈNES
Marc Domage © PAR GALLIA VALETTE-PILENKO
FANNY DE CHAILLÉ
Fanny de Chaillé a toujours creusé les relations entre voix et mouvement ainsi que la langue, aussi bien dans le champ de la danse (d’où elle vient) que dans celui du théâtre et de la performance. On se souvient, en 2019, de son élégante mise en scène (et en voix) du discours inaugural de Michel Foucault au Collège de France. Guillaume Bailliart tenait le rôle de l’éminent philosophe dans le grand l’amphithéâtre de l’Université Lyon 2, avec odeur de vieux bois et parquets qui craquent en prime. Tout récemment, le festival Sens Dessus Dessous a programmé Le Chœur, où la chorégraphe tricote avec dix jeunes gens issus du dispositif Talents Adami une chorale tout à fait singulière et plurielle. Pour ce coup de projecteur sur une artiste à la fois protéiforme et monomaniaque, le TNG présente ses deux derniers spectacles. Ces deux propositions sont très différentes : l’une va chercher du côté du rock et l’autre, du théâtre. Transformé est ainsi un concert atypique dans lequel Fanny de Chaillé et Sarah Murcia interprètent à leur façon Transformer, l’album mythique de Lou Reed. Seuls restent le squelette, une voix et une contrebasse, dans une version minimaliste, mais pas que. Tandis qu’Une autre histoire du théâtre, créé cet automne avec quatre artistes rencontrés sur le projet Talents Adami, embarque dans une mise en abyme joyeuse et intelligente. Une histoire vue de l’intime, qui raconte l’importance du théâtre, justement ! > 27 MAI Les Ateliers Presqu’île tng lyon.fr
UNE AUTRE HISTOIRE DU THÉÂTRE

Boys boys boys !

JULIE BERÈS SIGNE LE DEUXIÈME VOLET DE DÉSOBÉIR QUI AVAIT IMPRESSIONNÉ PAR LA PERTINENCE DU PROPOS, LA PUISSANCE DE SA MISE EN SCÈNE ET LA JUSTESSE DE SES JEUNES INTERPRÈTES. LA TENDRESSE APPORTE UN CONTREPOINT QUI PROMET, LUI AUSSI, DE TOUCHER AU BUT.

Comment avez-vous conçu ce diptyque ?

JULIE BERÈS On avait travaillé sur la construction du féminin, notamment pour des jeunes filles qui se font tirer vers le bas par des assignations sociales et culturelles. Il m’a paru important de questionner l’autre tribu, l’autre genre, d’autant plus que notre société décrie beaucoup les hommes (à juste titre souvent), pour les aider à se construire dans le masculin. Car ils subissent aussi des injonctions contradictoires.

Comment avez-vous choisi ces jeunes ?

J.B. Nous avons interrogé de jeunes

Entre-deux

hommes très différents par leurs origines et leur parcours, notamment dans les écoles de théâtre. Ils ont tous envie de se démarquer de leur père et de leur grandpère sans savoir comment y parvenir. Nous avons travaillé sans tabou, évoquant les questions de violence, de courage, de force mais aussi le viol, le désir ou l’homophobie.

Pouvez-vous me parler du processus d’écriture ?

J.B. Avec Alice Zeniter, Lisa Guez et Kevin Keiss, on est parti du réservoir de textes fournis par les interviews, avant de les tester lors de laboratoires en questionnant

beaucoup les acteurs. Au fur et à mesure des répétitions, on a intégré des anecdotes, des souvenirs, des éléments biographiques, de sorte que le plateau soit le lieu qui interroge les stéréotypes, qui donne corps aux combats intérieurs de chacun. L’idée étant de faire croire que tout serait improvisé sous les yeux des spectateurs et que ce serait une parole orale. Alors qu’il s’agit d’une parole écrite. C’est le rythme et la musique qui permettent d’alterner forme chorale, solos et petits groupes pour qu’ils s’enrichissent l’un l’autre.

Si l’envie vous prend de découvrir le travail de Maguy Marin autrement, c’est le moment d’aller faire un tour à RAMDAM, un centre d’art du côté de Sainte-Foy-lès-Lyon. Ancienne menuiserie rachetée par la chorégraphe à la fin des années 1990, RAMDAM est devenu au fil des années une sorte de havre pour les artistes en recherche. C’est également le siège de la compagnie depuis son retour en terres lyonnaises. En mai, RAMDAM montre des films réalisés par David Mambouch – auteur, cinéaste, comédien et fils de Maguy Marin – qui donnent à voir plusieurs de ses pièces : May B, Umwelt, Nocturnes et Y aller voir de plus près. En aucun cas des captations, ces films tentent de « proposer une inspiration poétique nouvelle animée par un souffle puissant de bouleversement des formes préexistantes – celles du théâtre et de la danse –, pour en faire émerger une dramaturgie singulière ». L’occasion de plonger dans l’œuvre unique de la chorégraphe, et figure incontournables de la danse française depuis plus de quarante ans, de manière inaccoutumée… Comme un jeu de miroirs à l’image d’Umwelt ! GV-P

04 & 05 MAI

RAMDAM un centre d’art Sainte Foy lès Lyon ramdamcda.org

24 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 BÊTES DE SCÈNES
MOUNIER
PAR TRINA
09 > 13 MAI
Théâtre de la Croix Rousse Lyon 4 croix rousse.com Axelle de Russé © LA TENDRESSE

Sans foi ni loi

C’est toujours une fête pour le public lyonnais d’accueillir Emmanuel Daumas. Il arrive cette fois avec un Dom Juan pour la Comédie-Française, commandé par Éric Ruf dans le cadre de l’année Molière. Avec une contrainte : faire le Molière le plus léger de la saison, sans décor ni costumes. Défi très difficile car cette pièce est sans doute celle qui en exige le plus. Mais le paradoxe, loin d’effrayer le metteur en scène, l’émoustille, lui qui aime tant le travail des acteurs. Ils seront cinq comédiens avec perruques et maquillages.

Emmanuel Daumas se détourne de la lecture traditionnelle de l’œuvre qui fait la part belle à la bataille entre le mécréant et la puissance divine.

« Dom Juan est une réponse genre Charlie Hebdo à des types qui ont censuré Tartuffe avant. Je me battrais en duel pour ça : Molière a écrit Dom Juan pour amuser les aristos de la Cour, comme en témoigne la première tirade en hommage au tabac. Pour moi, c’est pamphlétaire, et comique bien sûr. Le sulfureux vient des fanatiques qui sont face à lui. »

Il a choisi pour le rôle-titre Laurent Lafitte, un acteur élégant, l’esprit incarné. Face à lui et à Sganarelle, un chœur de trois comédiens représente les fâcheux, ceux qui lui font la morale et se transforment à la fin en inquisiteurs. Emmanuel Daumas entend partager son enthousiasme : « Ma visite au Prado et la rencontre avec Goya, quelque temps avant la création, ont imprégné l’esthétique du spectacle. J’ai adoré faire ça ; j’ai découvert un monde… »

17 > 27 MAI

Théâtre des Célestins Lyon 2 theatredescelestins.com

25 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23
PAR TRINA MOUNIER Christophe Raynaud de Lage © DOM JUAN

Elles crèvent l’écran !

ELLES S’APPELLENT ANTONINA, LYDIA, MAUREEN, ROSE : À LA FOIS BATTANTES ET VULNÉRABLES, CES HÉROÏNES OCCUPENT LE HAUT DE L’AFFICHE.

Des femmes avec leur part d’ombre et leurs fragilités mais fortes dans leur engagement, leur métier, leur rôle d’épouse ou de mère. Elles assument ce qu’elles sont, parfois jusqu’à la folie. Ainsi Antonina dans La Femme de Tchaïkovski de Kirill Serebrennikov. Pour mettre un terme aux rumeurs sur son homosexualité, Tchaïkovski épouse Antonina Milioukova en 1877. Un mariage voué à l’échec comme le suggèrent deux scènes prémonitoires : pendant la cérémonie religieuse, les cierges s’éteignent et sur la photo de mariage, les époux ne regardent pas dans la même direction. Serebrennikov fait d’Antonina, interprétée à l’écran par Alyona Mikhaïlova, un personnage de femme déterminée à rester l'épouse du compositeur, envers et contre tous. Un portrait réaliste et glaçant de la place des femmes dans cette Russie du XIXe siècle.

PAR MARTIN BARNIER ET VALÉRIE LEGRAIN-DOUSSAU

TÁR

Todd Field

Sortie : 25 jan. 2023

UN PETIT FRÈRE

Léonor Serraille

Sortie : 1er fév. 2023

LA FEMME DE TCHAÏKOVSKI

Kirill Serebrennikov

Sortie : 15 fév. 2023

LA SYNDICALISTE

Jean Paul Salomé

Sortie : 1er mars 2023

Au contraire d’Antonina, Lydia Tár – incarnée par une magistrale Cate Blanchett (prix d'interprétation à la Mostra de Venise) – a toute sa place dans la société. Elle connaît le prestige, le pouvoir et la reconnaissance. Brillante cheffe d’orchestre, elle voit pourtant sa vie se désagréger et basculer. Toute à sa passion pour la musique et prête à écraser les autres, elle laisse se suicider une jeune

assistante. Ce sera le début de sa fin. Avec la chute de son héroïne, Todd Field mène une réflexion sur le pouvoir despotique, qui peut s’effondrer tel un château de cartes. Autre femme, autre combat : La Syndicaliste de Jean-Paul Salomé est le portrait d’une déléguée syndicale plus vraie que nature. Jouée par une Isabelle Huppert à la blondeur et au chignon très hitchcockiens, Maureen, jusqu’alors engagée dans la défense des employés d’Areva, devient lanceuse d’alerte en dénonçant un accord secret avec les Chinois. En dépit de l’agression qu’elle subit, Maureen ne se comporte pas en victime et elle le paie très cher. Mais grâce à sa ténacité, les cartes vont se retourner en sa faveur. Dans Un petit frère de Léonor Serraille, Rose (lumineuse Annabelle Lengronne), tout juste arrivée de Côte d’Ivoire, défend sa liberté face à la pression communautaire. Elle résiste aussi à ses amoureux. Et met tout en œuvre pour que ses deux garçons réussissent au mieux leurs études. La construction du film suit l’évolution de cette cellule familiale monoparentale sur vingt ans, livrant le point de vue de Rose, puis de chacun de ses fils. Toutes ces héroïnes se battent pour rester elles-mêmes. Quels que soient l’époque et le lieu, personne ne peut leur dicter leur conduite. Des femmes puissantes.

26 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23
7 E ART
Guy Ferrandis Le Bureau Films © LA SYNDICALISTE

EN MODE MAJEUR

À L’AUDITORIUM AU PRINTEMPS, À FOURVIÈRE CET ÉTÉ : LE PIANISTE ALEXANDRE THARAUD VAGABONDE ENTRE CARTE BLANCHE ET COLLABORATION GRANDE CLASSE. MALGRÉ LE JET-LAG, IL RÉPOND AU PIED LEVÉ.

QUELLE MUSIQUE AVEZ-VOUS ÉCOUTÉE CE MATIN ?

AUCUNE. QUAND JE ME RÉVEILLE, JE MÉDITE. J’ÉVACUE LE BRUIT DU MONDE…

FINISSEZ LA PHRASE : « QUAND JE SUIS AU PIANO… »

… JE VIS.

LE PREMIER CONCERT AUQUEL VOUS AVEZ ASSISTÉ ?

CELUI QUI M’A LE PLUS ÉMU : RAYMOND TROUARD QUI JOUAIT BEETHOVEN AU THÉÂTRE DU CHÂTELET.

JE DEVAIS AVOIR 8 ANS.

SI VOUS ÉTIEZ UNE DANSE ?

L’AVANT-DEUX * .

VOTREPRÉFÉRÉEOCCUPATION ?

MANGER DU CHOCOLAT.

SI VOUS ÉTIEZ UN BRUIT ?

LES VAGUES SUR LES GALETS D’UNE PLAGE DE PERROS-GUIREC.

SI VOS MAINS POUVAIENT PARLER…

ELLES ME DIRAIENT :

« TU PEUX PAS NOUS LAISSER UN PEU TRANQUILLES ?! »

WEEK-END

ALEXANDRE

THARAUD

21 > 23 AVR.

Auditorium

Lyon 3

auditorium lyon.com

UNSTILL LIFE BENJAMIN MILLEPIED & ALEXANDRE

THARAUD

13 > 15 JUIN

Nuits de Fourvière nuitsdefourviere.com

alexandretharaud.com

VOTRE RENCONTRE AVEC MICHEL LEGRAND ?

DANS SON CHÂTEAU.

IL FAISAIT CUIRE DES MERGUEZ EN MAILLOT DE BAIN. IL RÂLAIT : IL PENSAIT QUE J’ÉTAIS EN RETARD…

VOTREPRÉFÉRÉCOMPOSITEUR ?

BACH.

UN PLAISIR COUPABLE EN MUSIQUE ?

CHANTAL GOYA.

QUEL PÉCHÉ

VOUS TENTE LE PLUS ? (SANS HÉSITER) LE SUCRE !

27 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23
À LA MOULINETTE
PAR EMMANUELLE BABE
Marco Borggreve ©
* Famille de danses traditionnelles bretonnes.

TAILLEUR DE SON (S)

25

06

AVEC PRÈS DE 800 CONCERTS À SON ACTIF, WAX TAILOR SIGNE UN NOUVEL ALBUM, FISHING FOR ACCIDENTS. SES MORCEAUX ENTREMÊLENT RYTHMES LANCINANTS, EXTRAITS DE VIEUX FILMS, ÉLECTRO, HIP HOP, VOCAUX... RENCONTRE AVEC UN ARTISTE ATTACHÉ À SA LIBERTÉ.

Que trouve-t-on de nouveau dans ce dernier album ?

WAX TAILOR Fishing For Accidents s’inscrit dans la continuité de The Shadow or Their Suns (2021). Je suis un peu un obsédé du contrôle. À partir du moment où on capture un accident dans la création musicale, cela devient une intention artistique. J’emprunte ce concept à Orson Welles : les accidents ne sont pas un processus, mais des éléments de la création.

Comment définiriez-vous son style ?

WT J’ai cessé de me battre avec les étiquettes. Et en même temps, c’est un mal nécessaire et ça rassure. Je définirais ma musique comme du hip-hop orchestral, avec une prédominance d’arrangements qui tendent du côté du vocal et du mélodieux. J’ai été biberonné par les Beatles, le rap et un peu de chanson française. Mon héritage vient du hip-hop et du sampling. Je découpe et retravaille tous mes morceaux sur vinyle. Je bricole, je fais des tentatives. Mon but est de toucher les gens, évoquer des images pour ouvrir des petites fenêtres. Cet album est plus lumineux, même si l’on retrouve toujours des accords mineurs.

Qu’est-ce qui est le plus important pour vous dans votre travail ?

WT La liberté est essentielle. Cela fait vingt-cinq ans que j’ai mon label indépendant. Dès que j’ai des comptes à rendre à quelqu’un, je ne sais pas faire. J’ai pourtant eu de nombreuses propositions de gros studios. Ce n’est pas un effet d’annonce, mais parfois, je me pose des questions : est-ce que ça va continuer comme ça ? La scène, c’est un peu comme une montagne avec une belle vue qu’on connaît. On sait qu’il y a trois heures de marche pour y aller, et c’est très escarpé. On se demande toujours : sera-t-on capable de recommencer ?

Quelle évolution avez-vous notée ces dernières années ?

WT Mon point de vue sur la société n’a pas bougé d’un iota. Les rapports sont biaisés par la reproduction sociale. C’est toujours David contre Goliath. Les armes sont inégales, les choses sont distribuées d’avance. Je savais tout cela quand j’ai commencé, mais ça reste violent, même aujourd’hui. La concurrence est encore plus importante. Maintenant c’est plus difficile, les gens sont sollicités de toute part. Les billets sont trop chers et je ne suis pas très Instacompatible… Ce n’est pas parce que les autres font n’importe quoi qu’on est obligé de s’aligner !

28 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 Super sonic PORTRAIT
PAR GUILLAUME BOUVY
WAX TAILOR
Ronan Siri ©
FISHING FOR ACCIDENTS Laboratoire (2023) MAI Transbordeur Villeurbanne transbordeur.fr AOÛT Forez’tival Trelins (42)

Super sonic

C’est toujours avec émotion que je vois renaître les barricades au printemps. Bon moyen s’il en est d’entretenir sa forme olympique ! Et à ce propos, question cure de jouvence, vous êtes plutôt Mudhoney ou Datsuns ? Grunge ou bien garage punk, motherfuckers ? Bain de boue ou d’huile de vidange ? Enfin, bref. Ah, The Datsuns, le retour ! Quatorze ans après leur dernière virée au feu Rail Théâtre, où s’était alors exilé Grrrnd Zero post Gerland. Un vrai groupe de scène, à même de vous scotcher au plafond dès les premiers accords, selon le précepte : guitares au vent, mur du son et feu de plancher. Et si leur dernier album Eye to Eye (2021) n’est pas au niveau des précédents, je ne doute pas que leur concert au Transbo devrait vous ravager les cervicales. D’où l’intérêt de bien s’occuper de son corps en amont. Mais si je vous cause de ces trublions aujourd’hui, c’est surtout un prétexte pour mettre en avant toute la nouvelle scène heavy rock australo-zélandaise – le 5e continent supersonique – qui sévit depuis l’an 2000. Quelques décennies après les Saints, ACDC, Rose Tattoo, Radio Birdman, Hard-Ons et consorts. Faites ainsi place à Eddy Current Suppression Ring, Amyl & the Sniffers, Stiff Richards, The Chats, Mini Skirt, Ausmuteants, Tropical Funk Storm, etc. Et bien sûr, The Datsuns. Un point commun ? Sûrement le back to basics couplé à l’envie de ressortir la tronçonneuse à 6 cordes, comme d’aller battre le fer voire le pavé. Façon tortue romaine derrière une banderole « Nanti social tu perds ton sang-froid » ! À bon entendeur…

22 AVR. Transbordeur Villeurbanne transbordeur.fr

29 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23
LIVE
STOCK
EN
PAR LAURENT ZINE

Maelstrom sonore Brassage de cultures

Avant de déménager au Technicentre SNCF de La Mulatière (dès 2024), Nuits Sonores investit une dernière fois les Usines Fagor pour sa grand-messe électro (une seule scène) et revisite pour ses vingt ans quelques lieux mythiques qui l’ont accueilli. Ainsi direction les SUBS pour quatre concerts-événements sous la verrière avec Nicolas Jaar et son super projet Darkside. C’est aussi les Days qui se réinstallent à la Sucrière. Avec quelque 150 artistes et pléthore d’esthétiques musicales à l’affiche, on retient quelques artistes qui font très envie. Du dub mythique avec la venue du Channel One Sound System emmené par Mikey Dread et Ras Kayleb (vieux souvenir ému, gros kif) ou le live d’Adrian Sherwood (fondateur légendaire du label On-U Sound, on a beaucoup écouté à une époque), le trio allemand Moderat et sa techno tout en contrastes. On coche aussi les Anglais expérimentaux de Plaid jamais venus aux NS. Côté techno culte à danser, on pioche Ritchie Hawtin, Marcel Dettmann et, bien sûr, la visionnaire Ellen Allien. Les guitares distordues de The Soft Moon (on est fan), les polyrythmies indus de Dame Area et l’ovni Ceyda Yagiz sont dans la boucle, bien sûr ! Last but not least, on ira jeter une oreille curieuse aux nouvelles têtes, les LSDXOXO, Sassyggirl, Lazuli, Holy Tongue ou Tzusing… Le cadeau des vingt ans ? Une expo photo itinérante dans l’espace public des vingt clichés les plus emblématiques du festival. Avec la crème des photographes de concert : Richard Bellia, Marion Bornaz, Romain Etienne, Julien Mignot, Tony Noël pour ne citer qu’eux. 20 ans sans dormir, c’est officiel !

30 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 FESTIVALS
NUITS SONORES 17 > 21 MAI nuits sonores.com
DAME AREA
DR ©
PAR ANNE HUGUET

La fête à la chanson

Téméraire

Aime Simone a le vent en poupe. Encore plus depuis que son single Shining Light a été repris dans une campagne de pub pour Leroy Merlin ! En tout cas, l’auteurcompositeur parisien trace sa voie dans un style unique qu’il qualifie de "post-pop", une « musique populaire » nourrie de punk, trap, techno, indie-rock voire même de reggaeton. Le chanteur tatoué, protégé de Pete Doherty (quand même), déchaîne les foules avec des lives incarnés et une musique à danser qui se déguste par couches. AH

02 MAI I 20H

Transbordeur Villeurbanne

Contagieux

Chaussez vos dancing shoes, Kamaal Williams débarque ! Jazzman talentueux – à la fois claviériste et batteur –, DJ et producteur phare de la scène outre-Manche, le prodige de trente-sept ans se pose à la croisée du broken-beat, du jazz-funk et du dubstep des clubs du South London. Après l’aventure Yussef Kamaal aux côtés de Yussef Dayes, Henry Wu de son vrai nom a signé deux albums solos dont le magistral Wu Hen (2020). Un groove libérateur ! EB

12 MAI I 20H30

L’Épicerie Moderne Feyzin

Vénères

CHANGEZ

D’AIR

Nom à coucher dehors pour ces furieux de Newcastle, Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs ou Pigsx7, qui naviguent à vue, depuis sept ans, entre psych-rock, stoner, doom et métal. Ça pilonne et ça bastonne sérieux avec force cavalcades, stridences, riffs plombés et hurlements terrifiants. Après Viscerals en 2020, ils ont remis le couvert en février avec un Land of Sleeper carrément flippant. Gros son, ça va faire des étincelles. AH

16 MAI I 21H

Le Périscope Lyon 2

31 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 FESTIVALS
PAR EMMANUELLE BABE
10
Francheville Saint Genis
Ollières PAROLES ET MUSIQUES 22 >
Et hop, 32e édition pour Paroles et Musiques ! Depuis 1992, au mois de mai, le festival stéphanois partage sans faiblir son amour pour la chanson francophone. Il se laisse conquérir, et nous avec, par des pépites prometteuses qu’il programme sans hésiter. En vieux briscard, il se permet aussi de convoquer les pointures du genre. L’affiche 2023 n’échappe pas à la règle. En vrac, côté super guests : Bertrand Belin, Dominique A, Charlie Winston, M ou encore Suzane sont de la partie. Sans oublier Riopy, pianiste français actuellement numéro 1 du Billboard américain, rien que ça ! Pour les plus curieux, plusieurs artistes méritent que l’on tende l’oreille, des filles notamment : le spleen malicieux de Laura Cahen, la poésie de Lisa Ducasse mêlant chants et spoken word, la voix pénétrante de l’intense Marcia Higelin, l’electronica subtile de Zaho de Sagazan. On a aussi envie d’explorer la sensibilité entre larmes et paillettes de Thx4Crying et le rap un brin torturé de Brique Argent. Et si la chanson française est votre kif, passez à Saint-Genis-lesOllières avant de filer à Saint-Étienne. Le festival Changez d’Air y accueille Mathieu Boggaerts pour un « florilège surprise » de son répertoire (un album est en préparation pour 2023). Marie-Flore ou encore Mehdi Cayenne, dont l’énergie devrait bien coller à la scène, feront aussi Escale. MAI Saint Etienne (42) festivalpm.com
> 13 MAI
les
28
BRIQUE ARGENT Elise Meunier © larsens
PAR EMMANUELLE BABE, ANNE HUGUET

éditeur de Mondes

Voleur de livres

JUSQU’OÙ IRA LE LIVRE ? ALORS QUE NAISSENT DE NOUVELLES FAÇONS DE DÉJOUER L’HABITUEL

PARALLÉLÉPIPÈDE, UNE PETITE MAISON D’ÉDITION, LE GRAND JE, SE FEND, POUR SA PREMIÈRE PUBLICATION, D’UNE FORME AUSSI RÉAC’ QUE RÉVOLUTIONNAIRE : UN ROMAN FORMAT DIPLO, IMPRIMÉ SUR QUATRE COLONNES, ÉCOLOÉCONOMIE OBLIGE. ÉTONNANT, NON ?

Hommage au Grand Jeu de René Daumal autant qu’aux grands feuilletonistes du XIXe, voici une nouvelle maison lyonnaise dont la préoccupation sera le style et « où je s’emploie à des récits montrant notre époque et ce qu’elle a fait de nous plutôt que de voir cette première personne se borner à des histoires personnelles ». Préoccupation (comprendre le monde), à laquelle répond admirablement la forme du journal, serait-il, à l’instar de Jean Genet, celui d’un voleur… « La seule confession dont je suis capable est celle d’un enfant enfermé entre deux siècles comme entre deux guerres, dans une génération qui commence par Tchernobyl et devrait se préparer à entrer en conflit avec un capitalisme triomphant. En attendant, c’est la rouille ! On connaît l’expression : l’ennui, l’ennui profond. Celui qu’on ne trompe qu’avec l’art, la drogue, l’alcool, la drague, le vol… » Il y a dans cet incipit d’Hadrien Timon Rouyard du feu follet, du dandy punk, du voyou lettré qui n’eût pas déplu à Jacques Rigaud, à Guy Debord et autres coquillards de Villon. Car il s’agit bien là d’une sorte de journal contant par le menu l’art de la chourave pour survivre – et surtout pour assouvir son goût des belles choses face à l’inanité du matérialisme porté par les classes bourgeoises de notre temps. « De même que l’amour et l’amitié sont des aventures humaines, le vol est une aventure sociale. » Rejet des normes et des

usages, exil de la vanité, distinction par le crime. De Lyon-Perrache à Lyon-Mermoz, en passant par Dakar et Paris, les pierreuses et l’héroïne, la peinture, les livres et l’alcool, notre gredin de narrateur dresse le portrait d’une génération désabusée, déniaisée de toute idéologie, pour laquelle il ne reste que la beauté et le désespoir, l’invention quotidienne d’une vie en marge. « Moi je n’ai jamais voulu du bonheur, strictement rien à foutre ! Je ne voulais que toucher à la beauté, inlassablement, et j’ai besoin de toute ma souffrance pour y arriver. Parce que la beauté c’est parvenir à rendre sa souffrance méconnaissable. » Derrière la pose rimbaldo-baudelairienne (Grand Je cherche Autre), qui est Hadrien Timon Rouyard ? Je ne sais. À tout le moins un jeune auteur stylé, culotté, qui, avec le Grand Je, a su trouver à son fond une forme. Et qui fait des débuts prometteurs pour que ce journal finisse, non pas par allumer un feu ou emballer des bibelots, mais dans une bibliothèque…

32 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23
LETTRES & RATURES
C’EST LA ROUILLE Hadrien Timon Rouyard Éditions Le Grand Je (2023) OÙ ? Bal des Ardents + Livres en Pentes Lyon 1 Vivement Dimanche Lyon 4 La Voie aux Chapitres Lyon 7 le_grand_je_edition PAR MARCO JÉRU
Hadrien Timon Rouyard ©

LE STREET MUSÉE

DU MOIS

33 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 STREET ART
PAR GRAPHULL
FOUCH GUATÉ MAO JALB KLIT'IN ONIRG MY STENCIL RAF URBAN GUATÉ MAO LES MURS ONT DES OREILLES

Tagliatellesde printemps

Partir tôt, rentrer tard… Le tas de linge grossit à vue d’œil, le frigo est vide, pas le temps de t’arrêter au supermarché. Il faut pourtant manger ! Un plat tout préparé à commander vite fait ? Non, non ne cède pas à la tentation ! Avec trois fois rien, cuisine plutôt un bon plat de pâtes à ta façon. Tu choisis ta casserole, un bon volume d’eau, une ou deux pincées de sel et tu fais bouillir. En attendant les premières bulles, tu rinces et tu coupes l’extrémité dure des asperges (+/4 cm). Tu réserves les pointes et tu envoies le reste barboter dans l’eau bouillante une dizaine de minutes. Tu ne perds pas de temps : dans une grande poêle, tu fais revenir l’ail pressé avec l’huile d’olive, sans oublier tes têtes d’asperges. Tu fais dorer 10 petites minutes. Ça commence à sentir bon, mais c’est pas fini. Mixe le citron, la crème, le parmesan et les asperges déjà tendres, que tu as passées à l’écumoire. Mmmm, cette crème onctueuse met l’eau à la bouche ! Tu la fais réduire avec les têtes d’asperges à feu doux. Il ne te reste qu’à plonger les tagliatelles fraîches dans l’eau encore frémissante des asperges. Enfin tu égouttes tes pâtes al dente que tu glisses dans la poêle toute crémeuse avant de mélanger. Par-là les assiettes, un petit coup de poivre et tu disposes tes tagliatelles fumantes.

Quelques copeaux de parmesan et à table !

Horizontalement

1. N’est chauve que chez Ionesco ! 2. Ont-elles leur place chez les fous ?

3. Enchaînions les petits virages. 4. Fis silence. Bien fluettes. 5. "Le même" du Latin pressé ! Doublé, redouble la vitesse. Avocat raccourci. 6. Rigoristes à l’excès.

7. La belle phonétique de Pâris. À remettre, cette balle ! Tarde à trouver son unité.

8. Exciteras. 9. Celui dont on parle. Tâte en profondeur. 10. À utiliser, pour une petite fringale. Élément de questionnement.

Verticalement

A. Madrilène ou Toledana ? B. Font allusion… mais au XVIe siècle ! C. N’admis point. Sale manie ou mi-temps de pendule.

D. Semblable. Dévirilisa son amant en lui coupant… ses tresses. E. Aberrantes, pour certains. F. Hardiesses dangereuses. G. Elles sont nombreuses à le devenir, sans être consort ou douairières. Peut entretenir des liens étroits avec les précédentes ! H. Le père du Lettrisme. Épuisant. I. Un des lieuxcultes d’Hercule. Outil familier des boîtes à couture. J. Possédasses. Entrée asiatique.

34 ARKUCHI #35 AVR. | MAI 23 POPOTE(S) jugeote
4 PERSONNES 30 MINUTES 20 MINUTES 500 G D’ASPERGES VERTES 500 G DE TAGLIATELLES FRAÎCHES 30 G DE PARMESAN ET QUELQUES COPEAUX 150
CRÈME ½ JUS DE CITRON 2
ML DE
GOUSSES D’AIL HUILE D’OLIVE (2 CÀS), SEL, POIVRE
solutions arkuchi 34 E F F E U I L L E S C L A N S A E R A H O R T E N S E C E T I R E E S L L N E O A S I S O N E T N I E C E N O U E R A S O M N S N E T T R I A M E U T A I E N T S I S S L I C E E
PAR PONIA DUMONT

Annecy Bonlieu. Bourg-en-Bresse Musée du Brou. Tannerie. Théâtre de Bourg-en-Bresse. Bourgoin-Jailleu Les Abattoirs. Brignais Le Briscope. Bron Espace Albert Camus. Ciné Les Alizés. Ferme du Vinatier. Jack Jack. Pôle Pik. Médiathèque de Bron. Université Lyon II. Caluire-et-Cuire Cinéma Le Méliès. Médiathèque B. Pivot. Radiant-Bellevue. Chalon-sur-Saône Espace des Arts. Musée N. Niepce. Chassieu Karavan Théâtre. Chazelles-sur-Lyon Musée du Chapeau. Corbas Le Polaris. Dardilly L’Aqueduc. Décines Le Toboggan. Écully Écully Cinéma. Médiathèque. Feyzin L’Épicerie Moderne. Médiathèque. Francheville L’Iris. Givors Médiathèque Max Fouché. Théâtre de Givors. Irigny Le Sémaphore. La Mulatière Aquarium de Lyon. Aux Bons Sauvages. Lyon 1 À Chacun sa tasse. L’Atelier Item. À Thou bout d’chant. Archipel Librairie. Art Up Déco. Auprès de mon arbre. Bar 203. Bel Ami. BistrO d’à cÔté. Bloom. Boîte à café. Broc’Bar. Boulangerie des Chartreux. CAUE Rhône. Chasseurs d’influences. Cinéma Polycarpe. Clef de Voûte. Condition des Soies. Delicatessen. Diable!. DRAC Auvergne-Rhône-Alpes. Espace 44. Fluxus. Fromagerie BOF. Galerie Ceysson & Bénétière. Galerie C. Mainguy. Galerie Céline Moine. Galerie Nörka. Halles de la Martinière. Jarring Effects. Kachka. Kraspek Myzik. L’Âne sans queue. La BF15. La Bonne Gâche. La Salle de Bains. Le 3e Fleuve. Le Bal des Ardents. Le Bleu du Ciel. Le Livre en Pente. Le Morfal. Le Réverbère. Le Voxx. Les Grimpeurs. Les SUBS. Librairie À Soi.e. Librairie Ouvrir l’œil. Mangiabuono. Manifesta. Mapraa. Maison Nô. Médiatone. Mongi Guibane. Ô Tao Bom. Opéra de Lyon. Radio Canut. Rés. Villemanzy. Sans Contrefaçon. Sofffa Terreaux. Spacejunk. Théâtre des Clochards Célestes. Tikki Records. Traboule Kitchen. Yoga Korner. Lyon 2 Archives Municipales. Atelier Parfumé. Autour de l’Image. BM Lyon 2. Boulangerie Saint-Marc. Chez Camille. Cycles Marchi. Fondation Bullukian. Galerie Em’Arts. Galerie SLIKA. Galerie Tatiss. Hôtel 71/Heat. La Cloche. Librairie des Arts. Librairie Expérience. Librairie Gibert. Librairie Passages. Maison Pochat. Marché Gare. MJC Confluence. Musée des Confluences. Musée de l’Imprimerie. Omart. Ories Galerie. Périscope. Théâtre-Comédie Odéon. TNG – Les Ateliers. Théâtre des Célestins. Théâtre des Marronniers. Université catholique de Lyon. Lyon 3 Archives départementales. Auditorium de Lyon. De L’Autre côté du Pont. BM Part-Dieu. BM Marguerite Yourcenar. Café du Rhône. École E. Cohl. Gnome et Rhône. Hooper. Improvidence Théâtre. Librairie du Tramway. Métropole de Lyon. Pieds Compas. Poltred. Salle des Rancy. Lyon 4 1150 Vintage. Agend’arts. Aquarium Ciné Café. Aux Trois Cochons. BM Lyon 4. Bistrot fait sa Broc. Bistrot des Voraces. Bonnesœurs. Burning Cat. Cavavin. Cave Tabareau. Cave Valmy. Chez Robert. Chez Simone. Coop du Zèbre. Diable Rouge. Fromagerie Galland. Galerie Françoise Besson. Galerie Vrais Rêves. L’Assiette du vin. La Famille. La Valise d’Élise. Le Grain de Folie. Labelalyce. Maison Jolivet. Modern Art Café. Ô Fournil des Artistes. L’Oiseau perché. Paddy’s Corner. Sibilia. Théâtre de la Croix-Rousse. Un Grain dans le Grenier. Villa Gillet. Vivement Dimanche. Lyon 5 Acting’s Studio. BM du 5e. CRR de Lyon. École de Cirque Ménival. ENSATT. Espace Gerson. Galerie L’Œil Écoute. Librairie Virevolte. LUGDUNUM Musée. Lyon Particule. La Mi Graine. MJC du Vieux-Lyon. MJC Saint-Just. Musées Gadagne. Le Sonic. Théâtre du Point-du-Jour. Lyon 6 BM du 6e. MAC Lyon. Lyon 7 Arts en Scène. Bibliothèque Diderot. Café Pimpon. CHRD. Cinéma Comœdia. COREP. De L’Autre Côté du Pont. EAC Lyon. École de Condé. ENS. La Commune. Le Court-Circuit. Le Ptit Bouclard. Le Flâneur. Les Fauves. Galerie Tator. HO36 Montesquieu. IEP. Kargo Kult. Librairie La Madeleine. Librairie La Voix aux Chapitres. Librairie Rive Gauche. Librairie Terre des Livres. Livestation DIY. Mama Shelter. Mimo. Mowgli. Ninkasi Kafé. Sofffa Guillotière. TANDEM. Théâtre de L’Élysée. Lyon 8 Institut Lumière. Maison de la Danse. Médiathèque de Bachut. MJC Monplaisir. NTH8. Salle Genton. Lyon 9 Au Bonheur des Ogres. Cave Valmy. Ciné-Duchère. CNSMD. Fondation Renaud. L’Attrape-Couleurs. La 9e Bulle. Les Mangeurs d’Étoiles. Médiathèque de Vaise. Musée Jean Couty. TNG. Mâcon Cave à Musique. Le Théâtre, Scène nationale de Mâcon. Musée des Ursulines. Miribel L’Allégro. Mornant Espace Jean Carmet. Neuville-sur-Saône La Maison Jaune. Médiathèque. Oullins La Mémo. MJC d’Oullins. Le Syndrome Peter Pan. Théâtre de La Renaissance. Pierre-Bénite Maison du Peuple. Médiathèque E. Triolet. Portes-Lès-Valence Train-Théâtre. Rillieux-la-Pape CCNR. Espace culturel Marcel André. Médiathèque L’Échappée. MJC Ô Totem. Saint-Étienne Cité du Design. Comédie de Saint-Etienne. Le Fil. Le MAMC. Musée d’Art et d’Industrie. Musée de la Mine. Opéra de Saint-Étienne. Saint-Fons Médiathèque Roger Martin du Gard. Théâtre Jean Marais.  Saint-Genis-Laval La Mouche. Médiathèque B612.  Saint-Priest Cinéma Le Scénario. Médiathèque Fr. Mitterrand. Théâtre Théo Argence. Saint-Vallier Ciné-Galaure.  Sainte-Foy-lès-Lyon Bibliothèque. Ciné-Mourguet. Tassin-la-Demi-Lune Cinéma Le Lem. L’Atrium. Librairie Pleine Lune. Médiathèque. MJC Omega. Vaulx-en-Velin C.C. Charlie Chaplin. Cinéma Les Amphis. École d’architecture. ENTPE. Planétarium. Valence Comédie de Valence. Vénissieux Bizarre! C.A.P. Madeleine Lambert. Cinéma Gérard-Philipe. Médiathèque Lucie Aubrac. Théâtre de Vénissieux. Vienne Théâtre de Vienne. Villefontaine Le Vellein. Villefranche-sur-Saône Auditorium. Cinéma Les 400 Coups. Conservatoire. Galerie Le 116art. Librairie des Marais. Médiathèque Mendès-France. Musée Paul Dini. Office du Tourisme. Théâtre de Villefranche. Villeurbanne Bieristan. Campus de la Doua. CCO. CCVA. Cinéma Le Zola. Galerie Domus. ENMDAD. ENSSIB. Espace Info. Espace Tonkin. Institut d’art contemporain. IUFM. La MLIS. Le Rize. Le Totem. Pôle Emploi Scènes & Images. Pôle Pixel/Studio 24. Théâtre Astrée. Théâtre de l’Iris. TNP. Toï Toï Le Zinc. Transbordeur. URDLA... Et dans la plupart de vos mairies, bibliothèques, MJCs, hôtels, espaces de coworking...

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