OUTRE-MER grandeur Nature n°15 _ mars-avril 2023

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SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON | l ’ invasion surveillée du crabe vert

GUYANE | le Maroni se Meurt : interview de Pierre-Yves le bail

N.-CALÉDONIE | les agriculteurs face au changeMent cliMatique

SOMMAIRE 2 édito 3 actu outre-mer 7 Saint-Pierre-et-Miquelon 8 Saint-Martin 9 Saint-Barthélemy 12 Martinique 16 Guadeloupe 20 Guyane 26 Île de La Réunion 30 Mayotte 36 TAAF 40 Polynésie française 44 Nouvelle-Calédonie 48 Wallis-et-Futuna OcéIndia grandeur Nature OUTRE-MER UNE n°15 L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT MARS | AVRIL 2023 ÎLE DE LA RÉUNION | LE DÉCLIN DU GECKO VERT DE MANAPANY

ÉDITO

TRIBUNE DE MESDAMES GISÈLE JOURDA ET VIVIANE MALET, CO-RAPPORTEURES DU RAPPORT

« LES DÉCHETS DANS LES OUTRE-MER : LA COTE D’ALERTE » AU NOM DE LA DÉLÉGATION SÉNATORIALE AUX OUTRE-MER

Urgence. Oui, il y a urgence à répondre au défi des déchets dans les outre-mer français.

Les conclusions de nos travaux au nom de la Délégation sénatoriale aux outre-mer sont claires. Sans des plans territoriaux forts, le rattrapage sera lent et compliqué, alors même que les déchets sont un service public de base, sans lequel il ne peut y avoir un développement harmonieux et digne.

Un indicateur offre un aperçu du rattrapage nécessaire : au niveau national, 15 % des déchets ménagers sont enfouis, 85 % étant valorisés. En outre-mer, le rapport est inversé.

À l’exception de la Martinique qui a enfoui, en 2020, 40 % de ses déchets ménagers et de Saint-Barthélemy qui incinère la totalité des déchets non triés, tous les autres territoires affichent des taux d’enfouissement de 70 à 80 %, voire pratiquement 100 % à Mayotte ou en Guyane.

Toutefois, ce constat statistique ne suffit pas à rendre compte de la réalité de certains de ces territoires qui sont confrontés à une vague de déchets qui ne cesse d’enfler. Les dépôts et les décharges sauvages se multiplient. La cote d’alerte est atteinte et plonge ces territoires face à une double urgence : une urgence environnementale et une urgence sanitaire.

Mayotte et la Guyane ont notamment besoin de plans Marshall XXL pour simplement mettre un terme à des situations inadmissibles dans la République française : des enfants jouant au milieu d’une décharge sauvage d’un bidonville comme nous l’avons constaté sur les hauteurs de Mamoudzou.

Enjeu environnemental, enjeu sanitaire, la gestion des déchets revêt aussi un enjeu économique. Le développement touristique ne peut réussir si les plages sont polluées, les routes bordées d’épaves et le paysage abîmé.

Nos travaux ont donc dressé un état des lieux par territoire, avec leurs faiblesses et leurs points forts. 26 propositions précises ont été faites dans tous les domaines pour redresser la situation : financements, coûts, gouvernance, ingénierie, coopération régionale, filières REP, modes de collecte et de traitement…

Ces propositions doivent permettre de relever un double défi : gérer l’urgence, qui suppose des actions rapides, et s’engager sur la voie de l’économie circulaire, qui est souvent un chemin plus long, bien que plus durable.

Pour y parvenir, quatre axes sont prioritaires :

- redonner des marges financières, avec un plan de 250 millions d’euros sur cinq ans et une exonération de la taxe générale sur les activités polluantes ;

- mettre les éco-organismes face à leurs responsabilités ;

- concentrer les moyens en ingénierie sur les projets structurants : déchetteries, centres de tri, unités de valorisation énergétique ;

- développer au maximum les filières locales de valorisation.

C’est cet équilibre, réaliste et ambitieux, que nous devons porter pour les outre-mer.

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Gisèle Jourda et Viviane Malet, sénatrices

UN PROGRAMME DE RECHERCHE POUR MIEUX CONNAÎTRE LES GÉNOMES DES ESPÈCES MARINES

Le CNRS et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) copilotent le projet ATLASea, doté de plus de 41 millions d’euros. Ce programme de recherche exploratoire vise à étudier le génome de la biodiversité sous-marine dans l’espace maritime français qui est, rappelons-le, à plus de 97 % ultramarin. Cette « cartographie génétique » aidera à mieux comprendre, protéger et étudier les formes du vivant.

Le programme, d’une durée de huit ans, comporte une première phase de prélèvement au large et en profondeur des échantillons de poissons, mammifères, algues, organismes unicellulaires… Une phase de séquençage des échantillons permettra d’obtenir des génomes complets, qui seront ensuite annotés informatiquement pour y repérer les gènes. Ces informations seront enfin stockées dans une base de données, qui retracera les évolutions des processus biologiques et les variations génétiques, et sera ouverte à la communauté internationale.

D’après Hugues Roest Crollius, biologiste spécialisé dans l’étude du génome et directeur du programme pour le CNRS, « avoir accès à cette information pour un grand nombre d’espèces sera vital à l’avenir de la biologie ». En outre-mer, les prélèvements auront lieu dans les trois océans, sur des sites localisés à Mayotte, en Polynésie française, en NouvelleCalédonie et dans les Antilles françaises.

L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN FAVEUR D’UN MORATOIRE SUR L’EXPLOITATION MINIÈRE DES FONDS MARINS

Le 18 janvier, l’Assemblée nationale a adopté une résolution invitant le Gouvernement à défendre un moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins.

Avec près de 11 millions de km², l’espace maritime français couvre environ 8 % des espaces maritimes de la planète et se situe très largement en outre-mer, comme indiqué précédemment (à plus de 97 %).

Porté par le député Nicolas Thierry, le moratoire soutient l’interdiction de l’exploitation minière des fonds marins en haute mer « tant qu’il n’aura pas été démontré […] de manière certaine que cette activité extractive peut être entreprise sans dégrader les écosystèmes marins et sans perte de la biodiversité marine ».

L’Assemblée nationale estime par ailleurs qu’une évolution du cadre réglementaire français est souhaitable et doit être réalisée en association avec les représentants des départements et collectivités d’outre-mer.

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OUTRE-MER
+ d’info ici : Projet ATLASea Photos de la page : © Pixabay
+ d’info ici : Résolution de l’Assemblée nationale

MARTINIQUE : RÉPARTIR L’OFFRE DE DÉCOUVERTE EN MANGROVE

Le Conservatoire du littoral s’est vu affecter la quasitotalité des mangroves de Martinique entre 2015 et 2017 et leur gestion a été confiée au Parc naturel régional de Martinique et à l’Office national des forêts. Un comité de gestion regroupe l’ensemble des acteurs du territoire concernés par la protection de ces écosystèmes qui rendent de très nombreux services à la population. Après une première étude consacrée à l’état de santé des mangroves, le comité de gestion a souhaité mettre en cohérence les nombreux projets d’aménagements de découverte dont elles font l’objet, en évitant les redondances et en valorisant au mieux leur diversité écologique et paysagère. C’est ainsi qu’un schéma directeur de l’accueil du public dans les mangroves martiniquaises a été élaboré et finalisé fin 2022. Il permet de définir des orientations et principes d’aménagement différenciés sur chaque site pour mieux répondre aux attentes des différents publics, répartir l’offre sur le territoire et prendre en compte les atouts spécifiques à chaque mangrove.

GUADELOUPE : DÉSARTIFICIALISATION DE LA PLAGE DE L’HÔTEL PIERRE ET VACANCES

L’hôtel Pierre et Vacances à Sainte-Anne exploite depuis les années 1990 des terrains du domaine public maritime attenants à l’hôtel. Le Conservatoire du littoral a souhaité engager avec cet exploitant une démarche de désartificialisation progressive de la plage pour lutter contre l’érosion et permettre le retour d’une végétation littorale. C’est ainsi qu’un muret et un cheminement en béton ont été démolis fin 2022, avec le soutien financier du plan de relance. L’opération va se poursuivre par la végétalisation du haut de plage par la commune de

SAINT-MARTIN : RESTAURATION ÉCOLOGIQUE ET PAYSAGÈRE D’UN PARKING

La plupart des étangs de Saint-Martin ont fait l’objet de remblais importants durant la seconde moitié du XX ème siècle lors de l’urbanisation rapide et parfois peu maîtrisée du territoire. Le parking d’une résidence collective a ainsi été construit dans les années 1980 en remblayant, sans autorisation, une partie de l’étang de Chevrise. Le Conservatoire du littoral a engagé en 2021 une phase de négociation avec les copropriétaires de cette résidence pour aboutir à une réduction de la moitié de l’emprise du parking située sur le domaine public. La restauration écologique et paysagère de cette emprise libérée a débuté en février 2023 dans le cadre du plan de relance. Elle consistera à une évacuation du remblai et une remise en eau partielle, des plantations et des aménagements paysagers pour permettre au public de venir profiter de la quiétude retrouvée du site et observer les nombreux oiseaux qui peuplent l’étang.

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SUR L’ÉTANG DE CHEVRISE
Sainte-Anne (plantations et mise en défens), en partenariat avec l’OFB et la CDC Biodiversité. Proposition d’aménagement de la « mangrove rose » du Diamant. À Saint-Martin, situation initiale (2021) et travaux en cours (2023).
Photographies de la double page : © Conservatoire
L’hôtel avant et après l’opération du Conservatoire du littoral.
du littoral
+ d’info ici : Le projet

GUYANE : AMÉNAGEMENT D’UN

SENTIER ACCESSIBLE AUX PERSONNES À MOBILITÉ RÉDUITE AUX PRIPRIS DE YIYI

Les « pripris » de Yiyi sont un vaste marais littoral situé sur la commune de Sinnamary en Guyane. Labellisés au titre de la convention de Ramsar, ils abritent une biodiversité aquatique particulièrement riche, dont la découverte est facilitée par des sentiers terrestres et un sentier nautique directement accessibles au départ de la Maison de la Nature gérée par la commune de Sinnamary et l’Office de Tourisme des Savanes. Depuis fin 2022, cette offre de découverte s’est enrichie d’un sentier accessible aux personnes à mobilité réduite aménagé par le Conservatoire du littoral dans le cadre du plan de relance.

RÉUNION : PLANTATIONS D’ARBRES

ENDÉMIQUES SUR L’ANCIEN CHAMP DE TIR DE LA GRANDE CHALOUPE

Le 9 décembre 2022, Agnès Vince, directrice du Conservatoire du littoral, Jérôme Filipini, préfet de La Réunion, et de nombreux services et établissements publics de l’État (Forces armées, Parc national de La Réunion, ONF, DEAL, DIE…) ont célébré l’affectation au Conservatoire d’un ancien champ de tir militaire de 117 hectares sur le site de la Grande Chaloupe en plantant symboliquement une quarantaine de végétaux endémiques caractéristiques des forêts sèches de La Réunion à l’emplacement de l’ancien pas de tir démoli un an plus tôt. Le domaine protégé par le Conservatoire sur ce site atteint ainsi presque 1 000 hectares et protège définitivement le corridor écolo-

MAYOTTE : LA CCSUD ET LE CONSERVATOIRE DU LITTORAL ENGAGÉS POUR LA RESTAURATION DE L’ÎLOT BANDRÉLÉ

En juin 2022, le Conservatoire du littoral confiait à la Communauté de communes du Sud de Mayotte la gestion de l’îlot Bandrélé, joyau de la biodiversité marine et terrestre de Mayotte soumis à de fortes pressions de fréquentation. Pour concrétiser ce partenariat, un chantier participatif a été organisé en deux temps : une première journée d’élimination des espèces exotiques envahissantes et de préparation du sol en novembre 2022, suivie d’une journée de plantation de 200 plants d’espèces indigènes mi-février 2023 pour laquelle 30 personnes se sont mobilisées : agents et élus de la collectivité, services et établissements publics de l’État. Ce premier temps fort de la prise en gestion a permis de conforter la bonne dynamique du partenariat et de dresser des perspectives sur les actions de gestion à venir sur l’îlot, notamment sur l’accueil du public.

gique s’étendant du littoral jusqu’à 3 000 mètres d’altitude. Cette opération illustre l’intérêt du partenariat mis en place depuis 2006 entre le Conservatoire du littoral et le ministère des Armées pour la conservation des espaces naturels situés sur d’anciens terrains militaires sur le littoral.

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L’aménagement du sentier aux Pripris de Yiyi en Guyane. Repiquage de 200 plants sur l’îlot Bandrélé, en février 2023. Célébration de l’affectation de l’ancien champ de tir au Conservatoire.

LE CEREMA RENFORCE SA PRÉSENCE

EN OUTRE-MER

Implanté en outre-mer depuis 2021, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) a créé au 1 er janvier 2023 une direction territoriale dédiée à l’outre-mer français.

Localisée à Mayotte, en Guyane et à La Réunion, la toute jeune direction territoriale va s’impliquer aux côtés des collectivités pour les accompagner dans les domaines de l’aménagement des territoires, de l’environnement, de la mobilité, des risques naturels ou des infrastructures, dans un contexte d’adaptation au changement climatique.

Établissement public à pilotage partagé par l’État et les collectivités territoriales, le CEREMA accompagne d’ores et déjà différents projets en outre-mer tels que : le diagnostic de l’impact de l’éclairage urbain sur la biodiversité à La Réunion ; l’installation d’un houlographe pour caractériser les conséquences du changement climatique à Saint-Pierre-et-Miquelon ; le projet de transport collectif en site propre du Grand Nouméa en Nouvelle-Calédonie ; ou encore la conception du projet de résorption de la décharge littorale de l’Anse Charpentier en Martinique.

15 MILLIONS D’EUROS

80 % de la diversité écologique française se situe dans les territoires ultramarins, particulièrement soumis aux aléas climatiques et à l’érosion de la biodiversité.

Pour construire des réponses adaptées aux interactions entre activités humaines, biodiversité et climat, le gouvernement lance un programme prioritaire de recherche (PPR) de 15 millions d’euros portant sur les enjeux environnement spécifiques à l’outre-mer.

Financé dans le cadre du plan d’investissements France 2030, ce programme sera piloté par l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et s’intéressera à des thématiques telles que les effets potentiels des risques sur les écosystèmes et la santé des populations, les déséquilibres sociaux provoqués, ou encore les potentiels de restauration des milieux pollués. Ces recherches permettront ainsi d’élaborer des pratiques écologiquement soutenables et socialement équitables d’exploitation des ressources naturelles.

Pour Frédéric Ménard, chercheur spécialiste des écosystèmes marins et conseiller scientifique Outre-mer à l’IRD, « ce PPR engage les organismes nationaux, les universités locales et les acteurs des territoires ultramarins dans la coconstruction de projets interdisciplinaires et de solutions durables à certains défis sociétaux. »

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+ d’info ici : Direction territoriale Outre-mer Ci-dessus : Dzaoudzi à Mayotte. © Yane Mainard | Pixabay
POUR LA RECHERCHE EN OUTRE-MER + d’info ici : Le nouveau PPR pour l’outre-mer

SAINT-PIERREET-MIQUELON

L’INVASION DU CRABE VERT SOUS HAUTE SURVEILLANCE

R epé R é pou R la p R emiè R e fois en 2013 su R le te RR itoi R e de s aint - p ie RR e - et - m iquelon , le c R abe ve R t est une espèce exotique envahissante qui p R olifè R e R apidement . a u dét R iment des espèces locales et de la biodive R sité de l ’ a R chipel .

Si les premiers crabes verts ont été aperçus en 2009, c’est à partir de 2013 que la DTAM 1 mandate l’Ifremer, qui fait appel à l’ARDA – Association de recherche et de développement pour la filière pêche et aquaculture de Miquelon-Langlade – pour réaliser un programme de détection. Car ces crabes, originaires des côtes de l’Atlantique Est et probablement arrivés sous forme de larves dans les eaux de Saint-Pierre-et-Miquelon, sont particulièrement prolifiques et menacent la biodiversité locale.

Ainsi, après quelques rares observations les années précédentes, les données de 2022 affichent un peu plus de 1 000 crabes verts au compteur, avec un pic de plus de 100 individus en 24 heures sur une seule zone. Or les femelles Carcinus maenas peuvent porter jusqu’à 185 000 œufs par an et on ne leur connaît pas de prédateurs de l’autre côté de l’Atlantique. L’espèce privilégie les espace protégés des vagues et les zones sablo-vaseuses riches en herbes marines du genre zostère. « Le crabe vert affectionne particulièrement les lagunes marines tels le Grand Étang de Miquelon ou le Grand Barachois. Deux sites riches en herbiers à zostère qui constituent de véritables nurseries pour de nombreuses espèces et sont aussi une source alimentaire pour d’autres espèces », indique Frank Urtizberea, technicien en charge de la biodiversité à la DTAM. Le crabe vert modifie ainsi le fonctionnement même de l’écosystème et les services rendus. Très agressif, il peut enfin s’attaquer aux larves de homards, aux mollusques et, de surcroît, déterrer les herbiers marins, qui sont à la base de la chaîne alimentaire.

SEULE SOLUTION, LIMITER L’INVASION PAR LE TRAPPAGE

Pour lutter contre cette invasion, la seule mesure consiste à pêcher un maximum d’individus chaque année. L’objectif de la DTAM est d’intensifier la technique du trappage qui a porté ses fruits dans plusieurs zones de la « région » avoisinante. Des casiers sont donc installés dans différentes zones sensibles afin de piéger ces crabes, mais l’effort doit encore être accru pour tenter d’enrayer l’invasion du territoire. La DTAM poursuit son effort de détection, effort qui devra être renforcé par une phase de trappage intensif. L’objectif aujourd’hui est de fédérer les efforts pour être efficace dans cette lutte. Une chose est sûre, il va falloir que tous les acteurs du territoire s’impliquent pour limiter cette invasion, préserver la biodiversité de Saint-Pierre-et-Miquelon et ses ressources marines.

Rédaction : Mariane Aimar

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DTAM975 SAAEB
Casier utilisé pour capturer le crabe vert. © Le crabe vert est originaire des côtes européennes et nord africaines. Apparu au début du XXème siècle en Amérique du Nord, son aire de répartition croît rapidement avec le trafic maritime et sa capacité d’adaptation aux différents milieux. © DTAM975 SAAEB 1 Direction des territoires, de l’alimentation et de la mer, émanation locale du ministère de la Transition écologique.

SAINT-MARTIN

RECENSER LES OISEAUX POUR MIEUX LES PRÉSERVER

d ébutée en novemb R e de R nie R su R l ’ île de s aint - m a Rtin , la mission de te RR ain Z ico vise à défini R des Z ones impo Rtantes pou R la conse Rvation des oiseaux e lle est menée pa R un p R estatai R e de la l igue pou R la p R otection des oiseaux ( lpo ) en pa Rtena R iat avec la R ése Rve natu R elle de s aint - m a Rtin , dans le cad R e du p R og R amme eu R opéen l ife biodiv ’ om .

Si l’île de Saint-Martin est réputée pour abriter de nombreux oiseaux en raison de la présence de multiples lagunes et salines, peu de données existent sur la diversité des espèces dans l’ensemble de la partie française et sur leurs effectifs. Et c’est bien là l’objectif de cette mission de terrain qui s’est déroulée de novembre 2022 à février 2023. Recenser les espèces existantes, évaluer leur abondance, leur répartition afin de proposer des zones à préserver.

Si Aude Berger, chef du projet Life BIODIV’OM à la Réserve naturelle de Saint-Martin, gère le programme dans sa globalité depuis ses débuts, elle a reçu le renfort de Vincent Lemoine, expert ornithologue indépendant mandaté par la LPO durant quatre mois. Sur terre, Vincent Lemoine est donc parti chaque jour réaliser des comptages selon le protocole EPOC (Estimation des populations d’oiseaux communs) qui vise à évaluer la taille de la population des espèces. Concrètement, il effectue des points d’écoute de cinq minutes, puis note les espèces vues et entendues.

Le jour de notre rencontre, la mission se déroulait en mer, sur le navire de la Réserve, le long des falaises des Terres Basses sur des transects de 500 mètres. L’occasion d’observer des frégates superbes, quelques pélicans bruns, mais surtout des phaétons, ou « pailles-enqueue », des oiseaux marins possédant deux longues plumes caudales. Deux espèces sont présentes ici, à bec rouge ou bec jaune, qui nichent dans les aspérités des falaises. « L’heure idéale pour les observer est l’après-midi », indique Vincent Lemoine. « Nous suivons le protocole de l’île voisine de Saba où des suivis ont démontré que les plus grands nombres d’individus étaient observés de 15h à 17h30 ». Cette mission de terrain vient en complément des recensements déjà effectués par la Réserve. « Nous suivons les oiseaux marins notamment pendant la saison de reproduction, sur trois sites», souligne Aude Berger. Grâce à la mission en cours, Saint-Martin disposera de données plus globales à l’échelle du territoire français. Et face à l’urbanisation galopante qui frappe Saint-Martin, la définition de zones de conservation permettra d’assurer la protection de ces nombreux oiseaux qui participent à la biodiversité exceptionnelle de l’île.

V INCENT LEMOINE, L’HOMME QUI PARLE AUX OISEAUX

Après des études en océanographie, Vincent Lemoine travaille en Camargue à la Tour du Valat (Institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes). C’est là qu’il découvre l’univers des oiseaux et se passionne pour le sujet. Il reprend alors des études au Canada pour suivre un master de recherche sur la grande oie des neiges. Puis, la vie le conduit en Martinique où il développe ses connaissances sur les oiseaux de la Caraïbe. De retour dans l’Hexagone, il continue ses missions pour les Antilles grâce à son expertise poussée sur les espèces des îles.

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Aude Berger et Vincent Lemoine lors de la mission. © Mariane Aimar d’un phaéton à bec rouge. © Vincent Lemoine Rédaction : Mariane Aimar
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SAINTBARTHÉLEMY

AGIR SUR TERRE ET PROTÉGER LA MER

’ association c o R al R esto R ation s t - b a Rth œuv R e depuis huit ans à la p R ése Rvation de l ’ île s u R te RR e comme sous l ’ eau , les bénévoles s ’ investissent pou R nettoye R le R ivage , sensibilise R et R elance R la biodive R sité ma R ine .

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Didier Laplace et David Blanchard sont à l’initiative de Coral Restoration St-Barth, une organisation pour la préservation de l’environnement qui s’implique sur ce petit bout de terre prisé du tourisme de luxe. Ici comme dans de nombreuses îles de la Caraïbe, les fonds marins subissent de plein fouet les effets du dérèglement climatique et les massifs coralliens sont aujourd’hui menacés.

L’association s’emploie donc à cultiver des coraux, principalement de l’espèce corne de cerf, sur des structures porteuses qui accueillent durant leur croissance des centaines de boutures. Ensuite, elles seront réimplantées en mer sur des sites dégradés. Une manière de redynamiser les fonds marins et de préserver des espèces devenues rares dans les eaux antillaises. L’association a ainsi replanté de jeunes coraux autour des Petits Saints, trois îlets qui ont été classés récemment par la Collectivité de SaintBarthélemy en aire marine éducative.

Cette année, c’est le site de Toiny qui accueillera de nouvelles boutures, un lieu aux eaux particulièrement claires et peu touché par les sargasses. Mais pour David Blanchard, il faut aller plus loin : « Notre projet est de développer un programme “J’adopte un corail”, qui permettra de faire un don en ligne pour nous aider à financer nos actions. Chaque corail replanté sera identifié, photographié et les donateurs pourront suivre la croissance de leur petit protégé ».

Coral Restoration St Barth lutte également contre la prolifération des déchets marins en installant sur différentes plages de l’île des bacs à marée.

Les usagers des sites sont ainsi invités à ramasser tout ce que la mer a abandonné sur les plages – morceaux de filets de pêche, plastiques, bouées – et à déposer leurs récoltes dans les bacs qui seront ensuite vidés par les membres de l’association. Des nettoyages de plages organisés régulièrement complètent ce programme, dans l’objectif de préserver la biodiversité de l’île. « Notre travail est soutenu par l’Agence territoriale de l’environnement de Saint-Barth, mais aussi par des dons des hôtels dont le Barthélemy, qui a souhaité s’impliquer concrètement auprès de notre association », se félicite David Blanchard.

Rédaction : Mariane Aimar

L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT
Opération de nettoyage de plage. © Coral Restoration Saint-Barth
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Dômes portant des boutures de corail. © Coral Restoration Saint-Barth

UN RECUEIL RICHE EN PROPOSITIONS POUR

RÉPONDRE À L’ENJEU DU FONCIER ULTRAMARIN

il y a un an, l ’ association inteRco’

Au-delà du constat d’un amour quasi « envoûtant » de la terre, le foncier apparaît dans les territoires d’outremer comme une cause fondamentale sous bien d’autres aspects – culturels, sociaux, économiques, juridiques, environnementaux… – et s’y rattachent de nombreux sujets qu’il convient d’aborder avec objectivité.

Les conflits d’usage – entre acteurs sociaux économiques et environnementaux, collectivités et population – sur un foncier rare et de plus en plus sujet à la spéculation freinent considérablement l’aménagement et le développement des outre-mer et amènent à s’interroger sur les possibles et réalistes solutions dont nos territoires auraient besoin afin de mettre en œuvre leurs politiques publiques et répondre aux besoins de la population de manière efficace.

Dans cette perspective et au regard de la diversité des territoires, l’élaboration de ce recueil était nécessaire en tenant compte de différents indicateurs propres à chacun d’entre eux : démographie, contraintes climatiques et risques naturels, fonctionnement et gouvernance des institutions de l’État, droit coutumier et droit civil, fiscalité, situations cadastrales, relation des collectivités locales entre elles et leur implication sur le sujet foncier et la planification

d’aménagement, ouvertures possibles à l’urbanisation et/ou préservation, consommation des espaces, enjeux sociaux-économiques, observation foncière, artificialisation, etc. Ces particularités, qu’il serait trop long d’énumérer de manière exhaustive, justifient l’engagement de politiques adaptées aux réalités propres de chacun des territoires.

Ce recueil s’est développé par et avec les proposions des élus, dans un cadre de libre expression, l’ambition première étant que ce recueil devienne l’expression même des élus locaux d’outre-mer. Il leur revient donc d’être force de décisions et propositions sur le sujet foncier, en y associant également tous les acteurs concernés de près ou de loin. Ainsi des réunions d’échanges et de propositions ont eu lieu dans chacun des cinq territoires. Lors de celles-ci – politiques et techniques – l’expression de chaque intercommunalité a été encouragée.

Ce projet a été politiquement validé par l’ensemble des intercommunalités à la fin de l’année 2022, puis remis aux pouvoirs publics locaux et nationaux et rendu publique.

+ d’info ici : L’enjeu foncier en outre-mer

Les 44 observations, alertes et propositions des élus

grandeur Nature OUTRE-MER 10 PUBLI-COMMUNIQUÉ
outRe-meR s ’ empaRait de l ’ enjeu foncieR en outRe-meR à tRaveRs la cRéation d ’ un Recueil dédié. cet outil a peRmis aux élus des difféRentes inteRcommunalités ultRamaRines de soumettRe leuRs obseRvations et pRopositions dans ce domaine si cRucial pouR les teRRitoiRes le point suR quelques pistes avancées Bourg de Tonnégrande en Guyane. | Cédric Vevaud97px

EUGÈNE LARCHER, VICE-PRÉSIDENT DE LA COMMUNAUTÉ D’AGGLOMÉRATION DE L’ESPACE SUD MARTINIQUE (CAESM)

« Cette proposition des élus exprimée sur le recueil d’Interco’Outre-mermeparaîtcapitale:“Construirede meilleures conditions de dialogue État-collectivités locales”. En effet, les conditions de ce dialogue sont complexes. Les services de l’État, qui font ici la pluie et le beau temps, oublient souvent qu’on ne peut pas toujours appliquer en Martinique les mêmes règles qu’en France hexagonale. Nous avons des contraintes foncières fortes dues aux reliefs, qui rendent une partie de l’île inconstructible. À cela s’ajoutent sur le littoral les 50 pas géométriques : si vous retirez 50 pas de chaque côté sur un espace exigu comme le nôtre, nous avons alors d’énormes difficultés à construire. Ces contraintes, acceptables dans un territoire aussi grand que l’Hexagone, n’intègrent malheureusement pas les spécificités de nos petits pays d’outre-mer. »

SERGE SMOCK, PRÉSIDENT DE LA COMMUNAUTÉ

D’AGGLOMÉRATION DU CENTRE

LITTORAL (CACL) EN GUYANE

« L’une des spécificités de la Guyane est que l’État gère environ 95% de sa superficie foncière – contre, par exemple, environ 13 % en Martinique et 37 % à La Réunion. En parallèle, de nombreux problèmes d’habitat illicite. Pour développer nos territoires, la maîtrise du foncier est fondamentale. Sur le recueil d’Interco’ Outre-mer, nous rappelons que “les Accords de Guyane de 2017 prévoient le transfert de 250000 hectares à la Collectivité territoriale de Guyane et aux communes et de 400000 hectares aux peuples autochtones de Guyane. Sur le volet foncier, ces accords ne sont pas mis en œuvre. (...) Les élus appellent à renforcer les échanges (...) à ce sujet au sein du forum des élus et avec l’État.” »

« Parmi les 44 observations, alertes et propositions formulées par les élus via le recueil d’Interco’ Outremer, celle qui à mes yeux a une acuité particulière à Mayotte est celle intitulée “Encourager la constitution de réserves foncières”. En effet, la maîtrise du foncier est un préalable à tout projet d’aménagement sur l’île. C’est une question essentielle, omniprésente. Il faut encourager les collectivités à acquérir des terrains ou bâtiments, afin d’anticiper les besoins d’intérêt général, en termes d’établissements de service public, parcs, complexes sportifs, culturels...

Le foncier peut être soit propriété de l’État, du Département ou du privé. En fonction des projets, nous arrivons en Petite-Terre à acquérir certains espaces du domaine public, mais il est primordial aussi de négocier aveclesprivés.Quandnouslançonsunprojet,comme la rénovation du quartier de la Vigie, nous ne voulons pas aller jusqu’à l’expropriation de parcelles privées. Au contraire, nous allons au contact des riverains, et débute alors un travail de fond pour leur expliquer les projets. Certains propriétaires comprennent l’importance de participer à la vie de la commune. Ils réalisent que la cession d’une partie de leur patrimoine foncier – dont France Domaine fixe le prix – va permettre la création de nouveaux équipements utiles à leurs propres familles, à leurs enfants. Pour convaincre ces propriétaires de céder une partie de leurs biens, nous pouvons par exemple leur proposer de viabiliser ces derniers, ce qui va leur donner de la valeur.

Nous devons ainsi prévoir du foncier pour répondre aux défis de notre territoire. Et impliquer au maximum la population dans les projets de l’intercommunalité. »

L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT 11
TÉMOIGNAGES
DE
À MAYOTTE
MIKIDACHE HOUMADI, VICE-PRÉSIDENT DE LA COMMUNAUTÉ DE COMMUNES
PETITE-TERRE

MARTINIQUE

UN AIR PLUS SAIN AVEC MADININAIR

d epuis 1998, l ’ association m adininai R , basée à f o Rt - de - f R ance , su Rveille la qualité de l ’ ai R en m a Rtinique , en exté R ieu R comme en inté R ieu R , afin d ’ assu R e R à tous un ai R plus sain .

L’oxyde d’azote, le dioxyde de soufre, les particules fines, les composés organiques volatils ou encore l’hydrogène sulfuré sont autant de polluants de l’air martiniquais pouvant porter atteinte à la santé de la population.

En tant qu’observatoire de la qualité de l’air agréé par le ministère de la Transition écologique, l’association Madininair a pour mission de mesurer les polluants

atmosphériques (émis par le trafic automobile, les activités industrielles, les revêtements et peintures, et plus périodiquement les sargasses) ; de réaliser des modélisations prospectives ; d’informer, sensibiliser et alerter la population ; de conseiller et aider à la décision dans le cadre de projets d’aménagement ; d’approfondir la connaissance des polluants et de leur impact sur la qualité de l’air. Démonstration avec quatre actions emblématiques en Martinique.

MON CHARIOT ÉCOLO

Après leur passage en caisse, les clients de grandes surfaces sont invités à découvrir l’impact de leur consommation sur la qualité de l’air. Cela va de la pollution atmosphérique générée par l’importation de produits et l’incinération des déchets de suremballage, à la dégradation de l’air intérieur par les composés issus des produits ménagers industriels. En partenariat avec l’association Zéro Déchet, les clients reçoivent alors des conseils très pratiques pour améliorer leur impact environnemental et la qualité de l’air qu’ils respirent.

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Dispositif portatif de mesure des particules fines dans l’air. Madininair évalue la concentration des polluants et alerte sur le temps d’exposition afin de permettre de s’extraire de la pollution dans les meilleurs délais. Un indice atmo est diffusé chaque jour dans les médias. À gauche et ci-dessus : stations fixes de mesure de la qualité de l’air déployées en Martinique par l’association Madininair.

LES ALGUES SARGASSES SOUS SURVEILLANCE

Élaboré par Madininair et financé par l’ARS Martinique, un réseau de surveillance mesure en continu les taux d’ammoniac et d’hydrogène sulfuré émis par la décomposition des algues sargasses échouées sur les côtes de la Martinique. En complément, l’association participe à la gestion d’un réseau de caméras conçu pour visualiser les arrivages d’algues.

Ces deux réseaux permettent d’informer les habitants et de prioriser les actions de ramassage pour limiter l’exposition de la population aux gaz émis.

POUR UNE MEILLEURE QUALITÉ DE L’AIR INTÉRIEUR

Diagnostics de qualité de l’air intérieur, évaluation des moyens d’aération et de ventilation, mesure des polluants réglementés, plan d’action préventif ou correctif : Madininair accompagne les gestionnaires d’établissements dans la surveillance de la qualité de l’air intérieur, pour garantir la santé et le confort des occupants. Il peut s’agir d’établissements recevant du jeune public – crèches, écoles, collèges, lycées... – qui doivent se conformer à la réglementation en vigueur ; ou d’entreprises souhaitant améliorer l’air de leurs locaux, pour le bien-être de leurs équipes.

MICRO-CAPTEURS CITOYENS

Expérimenté en 2022, ce projet a permis d’équiper 40 Martiniquais d’un dispositif portatif de mesure des particules fines présentes dans l’air qu’ils respirent au quotidien. Cette opération a suscité une prise de conscience de l’exposition à la pollution à l’échelle individuelle, ainsi qu’un échange de bonnes pratiques pour limiter cette exposition. De nouveaux microcapteurs citoyens seront prochainement déployés.

Rédaction : Axelle Dorville

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Grâce à son expertise acquise sur le sujet depuis 2011, Madininar conseille et accompagne par ailleurs certains pays de la Caraïbe dans l’implantation de leur propres réseaux de surveillance des algues sargasses. Madininair sensibilise au lien entre air, climat, énergie et santé, à travers diverses opérations de proximité, ainsi que la production de supports adaptés en partenariat avec les professionnels de santé. Plus de 170 interventions en milieu scolaire ont été organisées en 2022.

L’OFFICE FRANÇAIS DE LA BIODIVERSITÉ EN APPUI

AUX ACTEURS DE LA BIODIVERSITÉ ULTRAMARINE

l ’ une des missions de l ’ ofb est de donne R aux acteu R s et aux te RR itoi R es l ’ envie d ’ agi R en faveuR de la biodiveRsité, de se mobiliseR et de cRéeR les conditions du changement nécessaiRe pou R l ’ aveni R u n R ôle de « cœu R » de R éseaux qui se t R aduit notamment pa R diffé R ents dispositifs de soutien et d ’ accompagnement des po Rteu R s de p R ojets en out R e - me R

AIRES ÉDUCATIVES : MOBILISER

LES SCOLAIRES POUR LA GESTION

D’UN PETIT ESPACE NATUREL

Une aire éducative (AE) est un petit territoire naturel géré de manière participative par les élèves d’une école ou d’un collège. Encadrés par leurs enseignants et une structure référente d’éducation à l’environnement, les élèves se réunissent sous la forme d’un « conseil des enfants » et prennent toutes les décisions concernant leur AE. L’OFB lance chaque année un appel à projets dédié. On compte actuellement plus de 160 aires éducatives en outre-mer !

Dépôt des candidatures : de mars à mai pour les projets déjà lancés et en août 2023 pour les nouvelles AE. Montant maximal de l’aide : inférieur à 4 000 euros. Budget 2023 : 600 000 euros.

COMPAGNONNAGE : DES FORMATIONS PRATIQUES ET PRAGMATIQUES

Le compagnonnage permet aux acteurs de la biodiversité ultramarine de se former de manière concrète au contact de pairs en séjournant durant une ou deux semaines aux côtés d’un autre organisme, dans un autre territoire ultramarin, dans l’Hexagone ou même à l’étranger. Les candidatures sont à déposer dans le cadre d’un appel à projets annuel porté par le programme Te Me Um de l’OFB.

Dépôt des candidatures : de mars à mai 2023. Montant maximal de l’aide : 5 000 euros.

Budget 2023 : 40 000 euros.

+ d’info ici : Vidéo sur le compagnonnage Te Me Um Lancement de l’appel à compagnonnages 2023

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Sortie scolaire en Guadeloupe, dans le cadre d’un microprojet Te Me Um visant à remettre en état et valoriser la biodiversité de la Poudrière à Montauban. Il est prévu sur ce site un projet d’aire marine éducative. © Ville du Gosier Compagnonnage visant à améliorer les techniques de soins aux tortues marines. L’assocation Les enfants du lagons à Wallis-et-Futuna a ainsi bénéficié du soutien de son homologue polynésienne Te mana o te moana. © Cécile Gaspard

MICRO-PROJETS : POUR UN EFFET LEVIER

Depuis plus de 10 ans, le programme Terres et Mers Ultramarines (Te Me Um) soutient les petits porteurs de projet d’outre-mer dans leurs initiatives locales. L’objectif est de permettre aux jeunes associations de lancer un premier projet, ou encore à des structures déjà en place de poser une première pierre à un projet de plus grande ampleur. Ces micro-projets doivent durer un an au plus et avoir une portée opérationnelle.

Dépôt des candidatures : de mars à mai 2023. Montant maximal de l’aide : 20 000 euros.

Budget 2023 : 300 000 euros.

+ d’info ici : Appels à projets Te Me Um

BIODIV’ECO : DES PROJETS DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE POUR ET PAR LA BIODIVERSITÉ

L’OFB accompagne des projets d’activités économiques favorables à la biodiversité des outre-mer. L’équipe, basée en Guyane, se positionne en aide à l’ingénierie de projets, un appui qui doit permettre le passage de l’idée à l’action. L’année 2023 sera consacrée au suivi des 21 lauréats des appels à projets 2021 et 2022, et à la structuration de l’écosystème de partenaires sur chaque territoire.

Dépôt des candidatures : prévu en 2024.

Montant maximal de l’aide : 50 000 euros en 2022.

Budget : 400 000 euros en 2022 (peut évoluer d’ici l’année 2024).

+ d’info ici : L’équipe basée en Guyane

ABC : CONNAÎTRE ET VALORISER LA BIODIVERSITÉ COMMUNALE

Un Atlas de la biodiversité communale (ABC) est une démarche initiée au niveau communal ou intercommunal. Plus qu’un inventaire de la faune et la flore locale, l’ABC permet de cartographier les enjeux, de mobiliser l’ensemble des acteurs locaux (citoyens, entreprises, élus, scolaires…) et constitue une aide à la décision pour les collectivités. L’OFB lance annuellement un appel à projets dédié. Un dispositif déjà bien installé en outre-mer, où l’on dénombre une vingtaine d’ABC.

Dépôt des candidatures : du 16 janvier au 22 mars 2023. Montant maximal de l’aide : 250 000 euros.

Budget 2023 : trois millions d’euros.

+ d’info ici : Appels à projets ABC

ENVELOPPE BIODIVERSITÉ OUTRE-MER : UN BUDGET POUR ACCOMPAGNER

DES PROJETS AU FIL DE L’EAU

Dans le cadre du programme d’intervention 20222025, la Direction des outre-mer de l’OFB réserve un budget de quatre millions d’euros par an pour soutenir des projets en faveur de la biodiversité ultramarine. Ces subventions sont octroyées au fil de l’eau : les porteurs de projets sont invités à prendre directement contact avec le délégué territorial OFB de leur territoire.

Dépôt des candidatures : toute l’année. Montant maximal de l’aide : non défini (projets <100 000 euros attendus).

Budget 2023 : quatre millions d’euros.

D’AUTRES FONDS COORDONNÉS PAR L’OFB :

- Sur la période 2022-2030, l’OFB est associé à l’UICN pour la gestion du programme BESTLIFE2030, qui permet l’octroi de petites subventions (max. 100 000 euros) pour la biodiversité dans les RUP et les PTOM. Le premier appel à projets devrait être lancé en octobre 2023.

- Dans le domaine agricole, le plan Ecophyto prévoit des appels à projets annuels pour réduire l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et limiter les risques et impacts qui y sont liés.

- Côté assainissement et eau potable, l’établissement subventionne des projets structurants portés par les collectivités.

+ d’info ici : Actualités des dispositifs d’accompagnement

L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT 15
La granatelle de Pelzeln, un oiseau très rare en Guyane, découvert à Papaïchton dans le cadre de l’ABC. © Quentin Uriot
Visionnez
webinaire
27
accessibles outre-mer.
ICI le replay du
du
février sur les leviers de financements de l’OFB

GUADELOUPE

SAINT-FRANÇOIS SOIGNE SA BIODIVERSITÉ

à l ’ ext R émité o R ientale de la g R ande - t e RR e , la commune de s aint - f R ançois ab R ite la p ointe des c hâteaux , le site natu R el le plus visité de g uadeloupe . l a commune s ’ emploie depuis plusieu R s années à aménage R ce lieu exceptionnel p R otégé pa R le c onse R vatoi R e du litto R al , en vue de son classement en g R and s ite de f R ance 1 .

Avec ses salines peuplées d’oiseaux marins, sa végétation endémique et ses nombreux sentiers menant à un point de vue imprenable sur l’océan Atlantique et la mer des Caraïbes, la Pointe des Châteaux est un site incontournable de l’île. Tant et si bien qu’il accueille plus de 500 000 visiteurs par an.

Si le projet de classement en Grand Site de France a débuté timidement en 1997, il s’est accéléré en 2018 avec l’accueil d’un stagiaire de Master 2, Jérémy Delolme, qui a été chargé de mettre en place un plan de conservation pour relancer l’opération Grand Site. S’en est suivie une embauche pour trois ans dans le cadre d’un financement FEDER où le jeune scientifique occupe désormais le poste de coordinateur du plan de conservation de la Pointe des Châteaux.

« J’ai trois principaux objectifs dans le cadre de ma mission : la préservation du site, la sensibilisation du public et la sécurisation des sentiers », indique Jérémy.

Depuis 2020, plusieurs actions concrètes ont ainsi pu émerger, dont la création d’une plateforme de nidification pour les petites sternes qui, jusqu’alors, étaient dérangées par les visiteurs et ne nichaient plus sur place.

Grâce à cette plateforme, 42 poussins ont vu le jour en 2022 et la reproduction de cette espèce migratrice semble donc relancée.

En ce qui concerne les gravelots de Wilson, autre espèce d’oiseaux marins présente sur le site, c’est toute la zone de reproduction qui sera sécurisée d’avril à août pour en limiter l’accès aux randonneurs.

« Ces oiseaux ne pouvant se reproduire sur une plateforme, nous serons contraints de fermer les berges des Salines durant cinq mois de l’année. Pour cela, nous avons mis en place une signalisation afin d’expliquer notre démarche et de sensibiliser les visiteurs », souligne ce passionné d’oiseaux.

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https://www.grandsitedefrance.com/images/stories/docs/plaquette-gs-fr.pdf
Ci-dessus : la Pointe des Châteaux. © Mariane Aimar | 1 « Les Grands Sites de France ont en commun d’être des sites classés protégés par la loi et connus de tous pour la beauté de leurs paysages. » Source :

L UTTER CONTRE L’ÉROSION LITTORALE AVEC DES PLANTES DU BORD DE MER

Autre aspect important dans le plan de conservation de la Pointe des Châteaux : la lutte contre l’érosion littorale. Pour ce faire, Jérémy Delolme s’emploie à préserver la végétation du bord de mer qui, grâce à ses racines, retient le sable présent sur le littoral.

Des enclos de régénération ont été délimités et des panneaux installés, dans le but de sensibiliser les usagers du site. « En 2023, nous allons créer des parcours pédagogiques permettant de découvrir les écosystèmes présents, mais aussi l’histoire et la géologie du site », annonce Jérémy. Enfin, cette année, la croix située tout en haut de la Pointe des Châteaux bénéficiera d’aménagements pour sécuriser ce site surplombant d’immenses falaises tombant dans la mer.

OBJECTIF : DEVENIR UN TERRITOIRE ENGAGÉ POUR LA NATURE

Saint-François travaille également à l’obtention du label « Territoire engagé pour la Nature » délivré par l’Office français de la biodiversité (OFB). Dans ce cadre, un Atlas de la biodiversité communale (ABC) est en cours de finalisation. Il permettra notamment d’identifier les corridors écologiques afin de les renforcer pour que les espèces animales puissent circuler facilement d’un site à l’autre.

En parallèle, toujours dans un souci de sensibilisation des usagers, des inventaires participatifs sont réalisés tout au long de l’année. Une manière de faire découvrir aux Saint-Franciscains les espèces présentes, de leur apprendre à les identifier et à mieux respecter leur cadre de vie. « Ces sorties ont lieu de jour comme de nuit et connaissent un beau succès », se réjouit le coordinateur du plan de conservation.

Et pour aller encore plus loin dans cette démarche de sensibilisation du grand public, Jérémy a créé en 2019 le programme Plant’Aksyon destiné aux écoles impliquées dans des aires marines ou terrestres éducatives. Des pépinières ont ainsi été créées dans trois écoles de la commune et les élèves y cultivent depuis de nombreuses espèces végétales du bord de mer. Régulièrement, des opérations de

plantations de jeunes plants ont lieu et les classes de CM1 et CM2 de ces écoles ne ménagent pas leur peine pour végétaliser les bords de mer. En décembre dernier, plus de 400 plants ont ainsi été installés sur le littoral afin d’enrayer l’érosion des plages. Par ailleurs, ces plantations ont un autre objectif qui séduit particulièrement les enfants : la préservation des sites de ponte des tortues marines.

Enfin, d’ici le mois de juin, un observatoire des oiseaux qui fréquentent les salines de la Pointe des Châteaux sera érigé. Intégré dans un parcours pédagogique, cet observatoire proposera une approche en douceur de ces centaines d’oiseaux migrateurs qui font escale chaque année sur la pointe Est de la Guadeloupe.

L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT 17
Rédaction : Mariane Aimar
Une vingtaine d’espèces de limicoles a été observée à la Pointe des Châteaux, dont le chevalier à pattes jaunes. © Mariane Aimar | Ci-dessous : action de sensibilisation. © Jérémy Delolme

UN « FONDS VERT » POUR ACCÉLÉRER

LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES TERRITOIRES

un dispositif inédit consacRé à la tRansition écologique est mis en place paR le ministèRe de la tRansition écologique et de la cohésion des teRRitoiRes (mtect) : le « fonds veRt ». doté de deux milliaRds d ’ euRos, ce fonds financeRa des pRojets d ’ adaptation au changement climatique.

Pour répondre aux défis écologiques et climatiques majeurs, le Fonds vert a été pensé comme un outil à destination des collectivités territoriales pour permettre de décliner, à l’échelle locale, les objectifs nationaux fixés dans les domaines de la biodiversité, la mobilité, l’énergie, etc. : atteinte de la neutralité carbone, zéro artificialisation nette en 2050, protection forte de 10 % des espaces naturels...

Le Fonds vert constitue donc un signal fort d’accompagnement des collectivités et s’articule autour de trois axes principaux : l’amélioration du cadre de vie, l’adaptation au changement climatique et le renforcement de la performance environnementale des territoires. Dans un souci de proximité et pour assurer des financements ciblés et correspondant aux réalités territoriales, le Fonds vert bénéficie d’une gestion déconcentrée par les services de l’État chargés de sélectionner les projets des collectivités et de leurs partenaires publics ou privés.

Ces projets pourront s’inscrire dans 13 grandes thématiques, telles que : la prévention des inondations et des risques cycloniques, l’accompagnement de la stratégie nationale biodiversité 2030, le renouvellement de l’éclairage public ou encore le soutien à la valorisation des biodéchets.

Pour Sylvie Escande-Vilbois, directrice de projet et responsable de la Mission performance au sein de la Direction générale de l’Aménagement, du Logement et de la Nature (DGALN) du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires : « Dans les territoires ultramarins, le Fonds vert pourra notamment financer les projets des communes, des intercommunalités et de leurs partenaires pour accélérer les projets de recyclage foncier, de renaturation, de protection de la biodiversité des espaces terrestres ou marins ou de prévention des risques. C’est un dispositif géré localement pour s’adapter au mieux aux besoins et spécificités de chaque territoire ».

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Rivière de Vieux-Habitants : les maisons situées en bordure du littoral sont particulièrement menacées par les crues de rivière. © Lucie Labbouz | Scène d’inondation en Guadeloupe, à la suite du passage de la tempête tropicale Fiona en septembre 2022. © DEAL Guadeloupe

INTERVIEW

JEAN-FRANÇOIS BOYER, DIRECTEUR DE LA DEAL GUADELOUPE

• Quels sont selon vous les principaux enjeux de transition écologique en Guadeloupe ?

- La première chose à comprendre lorsqu’on parle de transition écologique, c’est que ce terme recouvre un grand nombre de sujets : l’environnement, l’énergie, ou la mobilité. Ce qu’on appelle « transition écologique » est en fait une transition de toute la société vers des modes de fonctionnement différents.

À l’échelle de la Guadeloupe, l’enjeu va être de décliner les grands principes nationaux, afin de les adapter à notre contexte particulier. Pour vous donner un exemple, l’archipel guadeloupéen compte quelque 620 kilomètres de côtes et est particulièrement sujet au phénomène de recul du trait de côte et aux autres conséquences directes du changement climatique. Notre transition écologique devra par conséquent veiller à bien prendre en compte les enjeux de protection contre les risques naturels.

• Quelle est la spécificité du Fonds vert par rapport à d’autres aides disponibles en Guadeloupe ?

- Le Fonds vert, c’est un outil de financement parmi toute une palette d’autres outils, qui doit servir à financer principalement les collectivités. Il représente 12,7 millions d’euros en Guadeloupe, dont près de la moitié sera consacrée à des projets portant sur la biodiversité. Ce fonds a néanmoins une caractéristique bien particulière : il doit permettre de financer des

projets pour lesquels le levier de transition écologique est important. C’est la raison pour laquelle la DEAL Guadeloupe prend une place prépondérante dans le pilotage du fonds.

• Quelle organisation va être mise en place sur le territoire guadeloupéen ?

- Les équipes de la DEAL sont d’ores et déjà mobilisées : j’ai désigné deux pilotes ainsi que 10 référents thématiques qui vont au-devant des porteurs de projets pour leur présenter les mesures du Fonds vert, détecter les projets matures et les accompagner jusqu’à leur réalisation. L’enjeu est de pouvoir engager ces fonds en 2023, pour accélérer au maximum la transition écologique de la Guadeloupe.

+ d’info ici : https://www.ecologie.gouv.fr/fonds-vert

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Falaise menacée par les glissements de terrain dans la commune de Petit-Bourg. © DEAL Guadeloupe Effondrement à Capesterre Belle-Eau dû à l’érosion littorale. © BRGM

GUYANE

LE MARONI SE MEURT…

le conseil scientifique du paRc amaZonien de guyane lance un cRi d ’ alaRme aupRès des autoRités publiques suR l’état de santé du maRoni, fleuve fRontalieR entRe la guyane et le suRiname. le point avec pieRRe-yves le bail, son pRésident, diRecteuR de RecheRche et chaRgé de mission-RetRaité pouR l’inRae

INTERVIEW

PIERRE-YVES LE BAIL, PRÉSIDENT DU CONSEIL SCIENTIFIQUE DU PARC AMAZONIEN DE GUYANE (PAG)

• Quel est l’état de santé du fleuve Maroni ?

- Généralement, pendant la saison des pluies, on constate que l’eau est plus porteuse de sédiments que durant la saison sèche, où elle est plus claire.

Aujourd’hui, ce différentiel n’existe plus. Durant la période sèche, la quantité de sédiments dans l’eau est 10 fois plus élevée que celle que l’on trouve normalement en saison des pluies et cette charge sédimentaire élevée se maintient tout au long de l’année. Les couches de boue qui se déposent ainsi sur les différents substrats du fond du fleuve – roches, sable, plantes aquatiques… – ne sont plus chassées durant les périodes d’eaux claires : il y a donc une asphyxie permanente de toute forme de vie inféodée à ces substrats sur la longueur du fleuve.

• Comment expliquer l’origine de cette pollution ?

- L’origine de ces boues provient des sites d’orpaillage légal et illégal situés sur l’ensemble du bassin versant, de part et d’autre de la frontière, en bordure immédiate du fleuve ou sur les affluents du Maroni. La part des rejets surinamais est majoritaire, car la réglementation environnementale y est quasiment inexistante.

Il faut également noter que l’activité d’orpaillage implique de la déforestation, ce qui aggrave les impacts plus généraux sur la biodiversité.

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La pollution bien visible du Maroni. © Arnaud Anselin | PAG Rédaction et interview : Sandrine Chopot

• Quelles conséquences pour les populations du fleuve et la survie biologique du Maroni ?

- Cette perte de biodiversité au niveau des substrats impacte toute la chaîne alimentaire qui en dépend dont les invertébrés, les poissons jusqu’aux oiseaux, mais aussi leurs possibilités de reproduction.

Les conséquences environnementales, sanitaires, sociales et de sécurité publique sont indissociables. Véritable centre de spéciation, le fleuve Maroni est une richesse patrimoniale. On dénombre pas loin de 350 espèces dont environ la moitié d’espèces endémiques. La dégradation de la santé de cette biodiversité est un des marqueurs de celle des humains. Les populations locales souffrent de cette dégradation des eaux, surtout sur le Haut Maroni. Ainsi l’état désastreux de ses eaux conduit à une extrême précarisation des relations qu’ont les communautés locales avec leur environnement aquatique, que ce soit en termes de ressources alimentaires issues de la pêche ou sur le plan sanitaire et de bien-être.

Les ressources halieutiques représentaient en 2014 plus de 7 000 prises pour trois tonnes de biomasse, actuellement elles déclinent. Certains villages amérindiens ne peuvent plus boire l’eau issue directement ou indirectement de la rivière et se tournent vers l’eau minérale conditionnée en bouteilles en plastique, ce qui accroît la pollution déjà criante sur le fleuve. Aujourd’hui, les populations locales se sentent abandonnées par les autorités françaises dont la mission est de garantir leur sécurité, leur santé, leur bien-être.

• Quelles solutions urgentes à mettre en place ?

- Depuis 2021, des fonds supplémentaires du ministère de la Transition écologique ont permis au PAG et ses partenaires de renforcer le recours aux moyens héliportés pour organiser des missions de lutte contre l’orpaillage illégal.

Aujourd’hui, même si des moyens ont été mis en œuvre pour diminuer l’orpaillage illégal sur la rive française, une coopération technique et politique entre la France et le Suriname s’impose. Les actions à l’initiative des autorités françaises, via possiblement la communauté européenne, doivent faire pression sur le Suriname qui consacre la plus grande part au monde de sa surface aux activités minières, avec plus de la moitié de celles-ci localisées sur le bassin versant du Maroni.

En France, nous avons des outils juridiques qui obligent l’État à agir en faveur de l’environnement et la santé de ses populations, ce qui n’est pas le cas au Suriname. Malgré tout, cette réglementation n’est pas suffisamment appliquée. Il est urgent de faire de la berge française une zone indemne de pollution, en continuant à lutter de manière renforcée contre l’orpaillage illégal pour le bien-être des populations, mais aussi en faveur de la préservation des affluents du fleuve Maroni, ce qui permettrait de disposer de zones refuges pour la faune, et envisager ainsi dans le futur la recolonisation de l’ensemble du fleuve quand la pollution aura cessé.

Enfin, chaque citoyen peut agir à son niveau, soit en ne s’impliquant pas dans les filières aurifères, soit en refusant d’acheter des bijoux en or qui représentent 50 à 60 % de sa destination afin de participer à une diminution de son cours, et ainsi contraindre les miniers à des comportements plus responsables.

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Un épais dépôt de sédiments photographié en 2022 sur une berge du Maroni. © Hadrien Lalagüe Chantier d’orpaillage illégal situé le long du fleuve, dans le Suriname voisin. © Hadrien Lalagüe
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Orpaillage sur une berge surinamaise du Maroni. © Arnaud Anselin | PAG

DES BANANIERS ET DES ARBRES

Ci-dessus : lorsque les feuilles des légumineuses arborées tombent au sol, leur dégradation fournit de l’azote aux plantes de la parcelle et enrichit le sol de façon naturelle. Les légumineuses sont ainsi considérées comme une usine à engrais, d’où leur utilité dans les systèmes agroforestiers. | © Cirad

Ci-contre, à gauche : l’agroforesterie rend un certain nombre de services aux systèmes agricoles. Elle contribue à une meilleure régulation des ravageurs, au stockage du carbone dans le sol, à la fertilisation naturelle des sols et participe également à lutter contre l’érosion. | © Jérôme Sainte-Rose | Cirad

a ssocie R a R b R es et cultu R es , tel est le p R incipe de l ’ ag R ofo R este R ie . e n m a Rtinique et en guadeloupe, le ciRad cheRche à développeR l ’ agRofoResteRie en bananeRaie entRe 2018 et 2022, à tRaveRs les pRojets banabio (en maRtinique) et inga (en guadeloupe), le ciRad a étudié l’intéRêt des systèmes agRofoRestieRs pouR la pRoduction de bananes dans le Respect de la chaRte ab (agRicultuRe biologique). explications avec les cheRcheuRs mathieu coulis et élodie doRey.

MATHIEU COULIS, CHERCHEUR EN ÉCOLOGIE DES POPULATIONS ET ÉCOLOGIE FONCTIONNELLE

AU CIRAD DE MARTINIQUE

« Sur un site expérimental, nous avons associé des bananiers à une culture de diversification – des cacaoyers – et à des arbres de services : des pois doux.

Les bananiers apportent ainsi de l’ombre aux cacaoyers tandis que les légumineuses aident à fertiliser le sol, grâce à leur capacité à fixer l’azote de l’air et à le restituer par le biais de symbioses entre leurs nodules racinaires et des bactéries.

grandeur Nature OUTRE-MER 24 PUBLI-COMMUNIQUÉ
+ d’info ici : www.cirad.fr

Parallèlement, dans le cadre du projet Rebios, dont un des objectifs est de mobiliser les ressources du sol pour une agriculture plus durable, nous avons étudié une large gamme d’arbres, en collaboration avec le Conservatoire botanique national de Martinique. Au total, 27 arbres de la biodiversité commune ont été cultivés sur des parcelles dites de collection, afin de les caractériser – nombre de feuilles, teneur en azote et phosphore, capacité d’ombrage, résistance à la taille, type de pousse – et d’évaluer leur potentiel pour l’agroforesterie. Un screening permettra d’identifier cinq à six espèces intéressantes pour les agriculteurs,

en fonction de leurs besoins et de leurs cultures. Sur ce sujet, nous travaillons directement en concertation avec les agriculteurs, notamment par le biais de parcelles de démonstration gérées avec un centre de formation agricole.

Nous cherchons ainsi à la fois à générer des connaissances par la recherche fondamentale, interagir avec les agriculteurs et mettre en pratique nos résultats. Une question prospective que l’on va prochainement traiter est de savoir comment les arbres et les cultures se partagent les ressources... »

ÉLODIE DOREY, CHERCHEUSE EN AGRONOMIE, MODÉLISATION ET CONCEPTION DE SYSTÈMES

DE CULTURE DURABLES

AU CIRAD DE GUADELOUPE

« Dans les hauteurs du sud de la Basse-Terre, il est compliqué de cultiver de la banane sans pesticides, du fait de l’importante pluviométrie, de pentes non mécanisables et de la forte pression de la cercosporiose noire 1 qui impacte la qualité des fruits.

Pour permettre aux agriculteurs de produire sans pesticides, nous avons coconstruit des parcelles en agroforesterie de cinq hectares certifiés en agriculture biologique, dans le cadre du projet Inga financé par le Feader. L’objectif était de proposer des assemblages d’espèces végétales dans l’espace et dans le temps, pour créer des systèmes productifs en agroécologie, permettant aux agriculteurs de mieux vivre de leur activité.

Au-delà des atouts agronomiques de l’association de bananiers aux cacaoyers et aux pois doux, on constate un intérêt économique pour l’agriculteur, qui peut s’assurer un revenu par la production de bananes, dans l’attente de la croissance, plus longue, des cacaoyers. L’agroforesterie peut ainsi être un moyen de relancer des filières orphelines sur le territoire, comme le café qui nécessite de l’ombrage et pourrait être associé aux bananiers. Ces parcelles permettent de tester et de prendre des risques, ce que ne peuvent s’autoriser les agriculteurs. Ainsi, ces parcelles servent aussi de support de formation. Par exemple, une quinzaine de producteurs a pu se former à la taille des cacaoyers. En partenariat avec l’Assofwi, de nouveaux systèmes associant agrumes, bananiers et pois d’angole sont testés, pour développer la production biologique d’agrumes tout en contenant la maladie du HLB, conduisant au jaunissement mortel des fruits. »

L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT 25
Le Cirad de Guadeloupe s’est associé à un chocolatier du territoire pour se fournir en cacao bio issu de sa parcelle expérimentale. Une meilleure traçabilité, une plus grande qualité et une pousse accélérée des cacaoyers sont les atouts pour les agrotransformateurs.| Cirad 1 Cette maladie devient difficilement contrôlable sans l’application de pesticides, dont la réglementation a fortement contraint l’usage.

ÎLE DE LA RÉUNION

AU SECOURS DU GECKO VERT DE MANAPANY

Reptile endémique de la Réunion, le gecko veRt de manapany est classé en dangeR cRitique d ’ extinction pouR mieux assuReR sa conse Rvation , le p R ojet c R eme 1 de l ’univeRsité de la Réunion s ’ attache à développe R une meilleu R e connaissance de cette espèce R ema R quable .

• Quel est l’état actuel des populations de geckos verts de Manapany ?

- On ne retrouve aujourd’hui cette espèce diurne (vivant le jour), arboricole (vivant dans les arbres) et omnivore (alimentation végétale et animale) que sur une petite bande littorale de 11 kilomètres de long, dans le sud de l’île. Ce gecko reconnaissable à sa robe vert pomme, ses taches rouges et le vert bleuté de son museau ne parvient pas à recoloniser de nouveaux habitats et les causes de son déclin ne sont pas clairement identifiées. Il s’agit possiblement d’un ensemble de facteurs, parmi lesquels la prédation, la prolifération d’espèces invasives, les pollutions environnementales et la fragmentation des habitats entraînant une déconnexion entre les populations.

INTERVIEW

ALICIA BONANNO ET MICKAËL

SANCHEZ, INGÉNIEURS D’ÉTUDES

• Comment le projet CREME contribue-t-il à la conservation du gecko de Manapany ?

- Inscrit dans le Plan national d’actions 2020-2029 pour les geckos verts de La Réunion, ce projet vise à améliorer la connaissance de l’espèce, à travers trois objectifs.

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Ci-dessus : mesurant une dizaine de centimètres, au corps vert parsemé de taches rouges, le gecko vert de Manapany (Phelsuma inexpectata) ne vit que dans un espace limité du sud de l’île.| 1 CREME, pour Conservation et restauration des espèces et milieux endémiques.
DU PROJET CREME SUR LE GECKO VERT DE MANAPANY

- Le premier objectif consistait à effectuer une mise à jour de la répartition de l’espèce sur le territoire. À cette occasion, afin d’évaluer la présence, le maintien ou la disparition des populations, nous sommes repassés dans tous les lieux où des individus avaient pu être observés lors de la dernière étude réalisée entre 2008 et 2010, ainsi que dans des zones où des données de présence sporadique ont été récoltées sur le terrain jusqu’en 2020.

Élaborer un panel complet des populations de geckos verts de Manapany du territoire était le deuxième objectif du projet CREME. Pour cela, nous avons suivi pendant une année 10 populations présentes dans des habitats différents, afin d’obtenir des données sur le nombre d’individus et les densités dans chaque population, ou encore sur la reproduction, selon les gradients d’anthropisation.

Le troisième objectif portait enfin sur la connaissance génétique. En effet, une de nos hypothèses était que l’effondrement démographique pourrait être dû à un problème de structuration génétique ou à de la consanguinité. Des prélèvements d’échantillons ont

été effectués sur 450 geckos appartenant à 18 populations connues de l’île, pour déterminer la diversité génétique au sein et entre les populations.

• Quels sont les premiers résultats de vos études ?

- Le gecko vert de Manapany est malheureusement en déclin et sa population ne fait que décliner depuis les premières études menées en 1995, et ce malgré la mise en place d’actions de conservation. Le gecko vert de Manapany possède aujourd’hui la répartition la plus faible de tous les vertébrés indigènes de La Réunion, qui est estimée à moins de 1,5 km ²

Il est donc indispensable de poursuivre le suivi de l’espèce sur le moyen à long terme, après « l’état zéro » de l’effectif qui a pu être établi à travers ce projet.

La prochaine étape consiste maintenant à publier nos résultats portant sur la génétique et la répartition, ainsi qu’à mettre à disposition des gestionnaires la connaissance, afin qu’ils puissent se l’approprier et concevoir des actions de conservation.

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Rédaction et interview : Axelle Dorville
: © Équipe CREME
Photos de la double page
Ce gecko se nourrit de pulpe de fruits, du nectar et du pollen de fleurs, ou encore d’invertébrés, comme les abeilles ou papillons.

UNE ÉTUDE ACOUSTIQUE ENVIRONNEMENTALE

INÉDITE POUR LE GRAND PORT MARITIME

en confiant une étude à l ’ expeRt acousticien phps, le gRand poRt maRitime de la Réunion souhaite inscRiRe son développement dans le Respect de l ’ enviRonnement sonoRe et dans la limitation de l ’ exposition de ses salaRiés au bRuit ce tRavail peRmettRa aussi d ’ analyseR et tRaiteR les demandes de R ive R ains R elatives à des nuisances sono R es dans sa ci R consc R iption

Il y a un an, le bureau d’études acoustiques PHPS a été missionné par le Grand Port Maritime de La Réunion (GPMDLR) pour établir un diagnostic global de la problématique acoustique dans une zone terrestre englobant les installations du GPMDLR, les logements les plus proches et les voies de liaison, et qui s’étend à l’Est pour prendre en compte les lotissements des Hauts de La Possession. Cette étude 1 couvre ainsi un périmètre relativement étendu et complexe, où de nombreuses activités sont présentes, de façon permanente ou intermittente.

Au-delà du diagnostic global précité, l’étude de PHPS intégrera une réflexion prospective sur des projets de développement à moyen terme, comme l’aménagement futur de la zone arrière portuaire. Seront également formulées des recommandations de bonnes pratiques en matière de bruit, et un suivi acoustique de la zone aura lieu en des points clés sur une période de trois ans.

Pour mener à bien sa mission, le bureau d’études PHPS a proposé au Grand Port Maritime une démarche structurée, avec un accent mis sur le travail préparatoire. La connaissance de la zone étudiée est en effet un préalable nécessaire avant d’engager des mesures purement techniques et des calculs. Cela a consisté à définir le contexte, les activités ciblées, les limites et à s’assurer notamment que les bases en acoustique nécessaires à la bonne compréhension des aspects techniques de l’étude soient acquises par tous. Pour cela, une vingtaine d’agents du GPMDLR a été formée par le bureau PHPS à quelques notions élémentaires en acoustique.

Cette étude poussée – dont les premiers résultats indiquent que globalement l’empreinte acoustique du site reste assez limitée – traduit la volonté du GPMDLR de prendre en considération les éventuelles nuisances sonores que ses installations peuvent générer, dans le cadre de sa démarche environnementale.

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Ci-dessus : appareils de mesure acoustique mis en place pour l’étude, au sein du Grand Port Maritime de La Réunion. © PHPS 1 Cette étude est intégrée au projet d’Augmentation des Capacités de Stockage et d’Adaptation aux Conséquences du Changement Climatique (2AC), qui bénéficie du soutien du Mécanisme pour l’Interconnexion en Europe (MIE) sur la période 2019-2023.

INTERVIEW

PHILIPPE PINTEAU, EXPERT ACOUSTICIEN DU BUREAU D’ÉTUDES PHPS À LA RÉUNION

• Comment s’est déroulé le diagnostic que vous avez réalisé pour le Grand Port Maritime ?

- Ce travail a compris tout d’abord un volet qualitatif, afin de cibler la problématique acoustique à travers une série d’entretiens avec les usagers du port, les riverains, les collectivités… On s’est alors intéressé à la perception des enjeux relatifs au bruit par ces acteurs. Une visite des lieux a permis de visualiser les installations techniques et on a cherché notamment à identifier les sources de bruits. Ce premier volet du diagnostic a été rendu possible grâce à l’implication des usagers des installations portuaires, dont des agents du GPMDLR des terminaux container, céréalier et sucrier, du quai vrac... de même que de la capitainerie et des services techniques qui ont accueilli les appareils de mesure acoustique. Parmi les principaux résultats, l’existence de plaintes de riverains dans des lotisse-

ments des Hauts, qui motive en partie cette étude du GPMDLR, apparaît à ce jour comme un facteur relativement modéré, sous réserve de nouveaux éléments. Néanmoins, les perspectives d’évolution de la zone permettent d’envisager l’éventualité de nuisances sonores, en particulier sur les nouveaux bâtiments d’habitation et en cas d’intensification du travail de nuit. Tout ceci justifie donc pleinement une analyse détaillée du contexte acoustique du port.

Puis un diagnostic quantitatif a été fait à partir de campagnes de mesures acoustiques et de modélisations numériques, pour évaluer et interpréter les émissions sonores, en étudier l’impact et les origines. À l’aide de modèles numériques, on génère des cartes de bruit colorées, comme ci-dessous, qui aident à visualiser la répartition des niveaux sonores sur la zone d’étude.

• Quels types de bruits avez-vous essentiellement enregistrés ?

- Les principales sources de bruit sont liées aux navires ainsi qu’aux opérations de manutention et transport de marchandises associées. Les installations industrielles du périmètre étudié peuvent aussi être ponctuellement des sources de bruit conséquentes. Le bruit routier apparaît comme très important, en particulier sur les parcours des camions assurant les flux du port Est, mais aussi de façon périodique pour des campagnes particulières (clinker, dragage…).

• En quoi est-ce une étude acoustique inédite ?

- De manière générale, étudier l’acoustique d’un port est quelque chose de spécifique, un port étant un lieu très vivant, avec de multiples configurations possibles en fonction du moment : variations du nombre de bateaux, des arrivées de céréales, etc. Les bruits d’un port sont également particuliers : il faut prendre en compte les bruits de chocs dus notamment à la manutention de containers, ainsi que les bruits de basse fréquence, principalement liés aux moteurs diesel des navires. Au cours de la mission, on est allé très loin dans l’étude des sources industrielles, avec 52 sources analysées au total, contre quatre ou cinq habituellement. J’exerce depuis 2004 avec plus de 350 études et mesures acoustiques réalisées sur le territoire réunionnais, et je peux dire que le Grand Port Maritime est l’acteur de La Réunion qui s’est doté de l’étude acoustique la plus approfondie.

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Modélisation de zones de bruit (les plus fortes en bleu). © PHPS

MAYOTTE

UNE STALAGMITE EXTRAITE

D’UNE GROTTE SOUS-MARINE UNIQUE ET MULTIMILLÉNAIRE

le 18 janvieR, une équipe de cinq plongeuRs de l ’ association deep blue exploRation a pRélevé des pRofondeuRs une stalagmite de 50 kilos. ce pRécieux matéRiau géologique feRa l ’ objet d ’études appRofondies en euRope et livReRa des infoRmations clés suR l ’ histoiRe des climats à mayotte.

• Comment s’est déroulée l’expédition ?

INTERVIEW

GABRIEL BARATHIEU, PLONGEUR ET PHOTOGRAPHE, PRÉSIDENT DE L’ASSOCIATION DEEP BLUE EXPLORATION

• Comment avez-vous découvert cette stalagmite ?

- La grotte où elle se trouvait a d’abord été découverte par un plongeur en 2016. Un an plus tard, avec mon ami Olivier, nous avons exploré ce site sous-marin de 130 mètres de long. Au fond, nous avons entrevu une sorte de « salle » sans aucune lumière, qui abrite entre 30 et 40 stalagmites ! Au début de l’année, nous avons organisé une expédition pour en extraire une, afin qu’elle soit étudiée en métropole et en Allemagne.

- C’était la première fois qu’une équipe projetait d’extraire une stalagmite d’une grotte ennoyée à 70 mètres de profondeur. Puisque ça n’avait jamais été fait avant, j’ai dû effectuer quelques recherches pour employer la meilleure méthodologie. J’avais prévu d’utiliser une perceuse sans fil pour trouer la base de cette concrétion calcaire afin de la fragiliser et de la détacher de son socle. C’était la théorie et en pratique… et bien tout a fonctionné ! Elle mesurait 85 centimètres de hauteur et 35 de diamètre, était dure comme du marbre, c’est pourquoi on a passé quatre jours à réaliser une quarantaine de trous. Au bout d’une semaine, on a enfin pu désolidariser la stalagmite de 50 kilos et on a mis deux jours pour la remonter à la surface.

• Que représente selon vous une telle découverte sous-marine pour le patrimoine mahorais ?

- Beaucoup de choses. Cette grotte a été ennoyée il y a environ 14 000 ans. À l’époque, les stalagmites se sont créées quand le niveau marin était 120 mètres plus bas. Grâce à la stalagmite, on va pouvoir étudier le climat qui régnait à Mayotte il y a des millénaires. Les premiers éléments d’analyse sont attendus pour la fin de l’année et l’étude est dirigée par le Professeur Thomassin, océanographe et directeur de recherche honoraire au CNRS. D’après les scientifiques, il n’existe pas dans le monde d’autre découverte de grotte sous-marine comme celle-ci, formée par l’érosion karstique. Elle fait partie du patrimoine naturel de Mayotte, il faut qu’elle soit classée.

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La zone crépusculaire du lagon abrite de rares habitants, comme ici une raie pastenague et un requin-nourrice. © Gabriel Barathieu | DBE
Rédaction et interview : Marion Durand
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La « salle des stalagmites », à proximité de la barrière de corail qui ceinture le lagon de Mayotte. © Gabriel Barathieu | Deep Blue Exploration L’entrée de la grotte, découverte en 2016 par le plongeur Tom Marneff, à près de -50 mètres. © Gabriel Barathieu | Deep Blue Exploration
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Selon l’association Deep Blue Exploration, « L’objectif de la mission qui s’est déroulée les deux premières semaines de janvier 2023 fut d’extraire une stalagmite à 70 mètres de profondeur pour étudier le paléoclimat de Mayotte (...). À notre connaissance, l’extraction de cette

d’environ 80 centimètres de hauteur et pour un poids de 50 kilos est une première mondiale. Les résultats des études qui en découleront feront l’objet d’une publication scientifique à portée internationale ».

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stalagmite Photo : © Gabriel Barathieu | Deep Blue Exploration

L’AFD ACCOMPAGNE

LE PARC NATIONAL DE MOHÉLI AVEC UNE PERSPECTIVE DE COOPÉRATION RÉGIONALE

l ’ a gence f R ançaise de développement ( afd ) a financé un p R ojet d ’ accompagnement du p a R c national de m ohéli ( pnm ) , aux c omo R es . l a coopé R ation R égionale mise en œuv R e dans le cadRe du pRojet, notamment avec mayotte et l ’île de la Réunion, favoRise un ancRage te RR ito R ial fo Rt du pnm dans la sous - R égion

Première aire protégée des Comores créée en 2001, le Parc national de Mohéli s’étend sur plus de 600 km² et a pour objectif premier d’assurer la protection des écosystèmes terrestres, marins et côtiers de l’île. Le PNM accompagne au quotidien les communautés locales de Mohéli pour garantir une utilisation durable des ressources naturelles et engager la population dans la protection du Parc.

Depuis 2014, l’AFD apporte son soutien au Parc national de Mohéli dans ses missions de conservation

et développement local au travers d’un projet d’appui au développement du Parc. Ce projet, de trois millions d’euros, s’achèvera en 2023. Il a permis à la fois de renforcer la protection des écosystèmes de Mohéli, et de consolider la gouvernance du Parc.

L’AFD s’inscrit par ailleurs dans une approche de coopération régionale, et a œuvré à renforcer les liens entre le PNM et les acteurs de la biodiversité des îles voisines : Madagascar, les Seychelles, Mayotte, La Réunion...

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Ci-dessus (© PNM) : une vie sous-marine foisonnante.| Journée de l’Océan à Mohéli. | Une tortue verte après la ponte. | Nioumac houa.

INTERVIEW CROISÉE

TANGI POULIQUEN, CHARGÉ DE PROJET ENVIRONNEMENT

À L’AFD DE MORONI (COMORES), ET DANIEL LAILINA, DIRECTEUR EXÉCUTIF DU PARC NATIONAL DE MOHÉLI

• Quels ont été les principaux appuis apportés par l’AFD au Parc national de Mohéli au cours de ces neuf années de projet ?

Tangi Pouliquen - Au-delà du soutien financier, l’AFD a souhaité accompagner le Parc national de Mohéli vers une autonomisation technique et financière, et a ainsi assuré une montée en compétence des agents du Parc.

Des assistants techniques experts dans le domaine de la gestion des aires protégées ont donc appuyé l’équipe du PNM tout au long du projet.

Des formations ont été organisées, à la fois sur des aspects métiers techniques – suivi de la biodiversité, formations scientifiques, etc. – mais également sur des aspects plus administratifs : méthodologie organisationnelle, fonctionnement d’un établissement public, etc.

Nous avons aussi accompagné le PNM sur les thématiques de la surveillance et de la sensibilisation, pour faire face au braconnage important sur l’île au commencement du projet.

Enfin, au niveau de la gouvernance, un des objectifs était de pouvoir mettre en place un outil visant à assurer la pérennité financière du projet. Plusieurs assistants techniques ont ainsi également été dédiés à cette question du financement durable du Parc national de Mohéli.

• Comment le soutien l’AFD s’inscrit-il dans le cadre de la coopération régionale ?

Daniel Lailina - Le soutien de l’AFD nous a permis de restructurer le Parc national de Mohéli et nous

avons aujourd’hui des agents très bien formés qui arrivent à assurer leurs missions quotidiennes sur l’île. Ce soutien nous a également permis de nouer des partenariats avec les structures de la sous-région qui œuvrent dans le domaine de la conservation et du développement communautaire.

Nous avons notamment un partenariat très fort avec le Parc naturel marin de Mayotte avec qui nous entreprenons des projets communs, comme le suivi des populations de dugongs.

De plus, nous avons construit des relations avec d’autres organisations environnementales de Mayotte, pour mettre en place des protocoles de suivi des espèces qui soient harmonisés, ou encore avec des associations de La Réunion pour le suivi des tortues marines ou des mammifères marins.

Pour résumer, le soutien de l’AFD a permis au Parc national de Mohéli d’être reconnu à l’échelle de la sous-région pour les actions que nous menons, mais aussi pour notre bonne gouvernance. La communauté de communes du sud de Mayotte nous a d’ailleurs récemment contactés afin de pouvoir répliquer notre mode de gestion sur son territoire.

L’île de Mohéli a enfin été classée réserve de Biosphère en 2020 ! C’est une véritable reconnaissance pour le travail mené par les équipes du Parc national sur le terrain. C’est également un résultat qui illustre la qualité du soutien reçu de l’AFD au cours de ces dernières années.

+ d’info ici : https://www.afd.fr/fr/carte-desprojets/proteger-la-biodiversite-et-les-ressourcesdu-parc-national-de-moheli

+ d’info ici : https://mohelinationalpark.org/

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TAAF

L’ARMÉE FRANÇAISE AU PROFIT DE LA BIODIVERSITÉ !

paRmi les attendus des difféRentes missions attRibuées aux bâtiments de la maRine nationale, il y en a un moins connu que les autRes : celui de la pRéseRvation du patRimoine natuRel, dont le bâtiment de soutien et d ’ assistance out R e - me R ( bsaom ) champlain et le pat R ouilleu R polai R e ( pp ) l’astRolabe sont les fe R s de lance dans la Z one sud de l ’ océan i ndien

Les territoires ultramarins de la zone sud de l’océan Indien abritent une biodiversité exceptionnelle qu’il convient de préserver et gérer durablement.

Depuis le 11 février 2022, et l’annonce du président de la République de l’extension de la Réserve naturelle nationale des Terres australes françaises à l’ensemble des espaces maritimes des archipels Crozet et Kerguelen et des îles Saint-Paul et Amsterdam, cette zone est même devenue la plus grande aire maritime protégée française et la deuxième plus grande aire maritime protégée au monde.

« Nos océans ne peuvent plus attendre », avait alors lancé Emmanuel Macron à l’occasion du One Ocean Summit. En réponse aux enjeux écologiques identifiés, les acteurs contribuant à cette préservation peuvent s’appuyer sur la Marine nationale, garante du respect de la souveraineté de la France sur ses espaces maritimes ultramarins.

Aux côtés de la lutte contre les trafics illicites, de la surveillance du trafic commercial ou encore du sauvetage en mer, plusieurs missions sont plus directement orientées vers la connaissance et la préservation de l’environnement marin.

Pour conduire ces missions, les Forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (FAZSOI) s’appuient notamment sur deux outils efficaces et complémentaires : le BSAOM Champlain et le PP L’Astrolabe.

Le BSAOM Champlain mène régulièrement des missions de soutien logistique, notamment au profit d’opérations scientifiques. On peut citer comme exemple

son action de soutien apportée aux équipes en charge de la campagne « Évaluation de l’état de santé des récifs isolés de Mayotte et de l’archipel des Glorieuses » ou encore la séquence de raid nautique menée en juin dernier sur l’Île du Lys. Véritable outil d’engagement des forces, il a également pour mission la surveillance et la protection maritime, ainsi que la projection des forces.

Le PP L’Astrolabe, joue aussi un rôle majeur dans la préservation des territoires protégés. Propriété de l’administration des TAAF, et mis en œuvre et entretenu par la Marine, L’Astrolabe est un navire brise-glace né d’un partenariat conclu entre les TAAF, la Marine nationale et l’Institut polaire français PaulÉmile Victor (IPEV). Ses missions de surveillance de l’espace maritime des TAAF et de soutien à la logistique Antarctique sont autant d’outils concourant à la sécurité dans cette zone.

« Acteur incontournable du monde maritime, la Marine suit le schéma directeur environnement mis en place dès 2005 », indique le capitaine de frégate David, chef de la cellule « emploi mer » de l’état-major interarmées des FAZSOI, intégrant des exigences réglementaires, mais aussi des mesures volontaristes décidées par les plus hautes autorités militaires.

Le travail quotidien mené par ces bâtiments en partenariat avec d’autres acteurs tels que le CNRS, l’Ifremer ou l’Institut polaire français témoigne de la volonté de mutualiser les moyens de l’État afin de préserver le patrimoine naturel de cette zone.

Rédaction : Marion Gautheret

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Équipage du Champlain sur l’Île du Lys, aux Glorieuses.
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En haut : le Champlain, bâtiment de soutien et d’assistance outre-mer (BSAOM) ici au large des Glorieues, dans les TAAF. | En bas : L’Astrolabe, au mouillage sur la base française antarctique Dumont d’Urville, en compagnie de manchots Adélie. © Marine nationale

IDENTIFIER LES ÉCORÉGIONS DE LA MER DUMONT D’URVILLE À PARTIR DE

LA FAUNE BENTHIQUE

c heRcheuR au muséum national d’histoiRe natuRelle (mnhn) et RepRésentant de la fRance aup R ès du c omité scientifique de la ccaml R – c ommission pou R la conse Rvation de la faune et la flo R e ma R ines de l ’ a nta R ctique – le d octeu R m a R c é léaume t R availle depuis de nomb R euses années su R les milieux anta R ctiques . i l s ’ inté R esse notamment à la faune benthique – qui vit au fond de l ’ eau – en me R d umont d ’ u R ville .

La Fondation des mers australes a soutenu en 2019 l’organisation, au MNHN de Concarneau, des groupes de travail de la CCAMLR alors accueillis pour la première fois par la France. Marc Éléaume, chercheur au Muséum, en était l’organisateur. Rencontre avec ce Maître de conférences et spécialiste des crinoïdes, un groupe d’animaux marins appartenant aux échinodermes. Les travaux actuels du chercheur, en collaboration avec son doctorant Alexis Martin, visent à délimiter des « écorégions » dans la mer Dumont d’Urville, soit des étendues marines caractérisées par des communautés d’espèces et des conditions environnementales particulières.

Sa zone d’étude : une portion de l’océan Austral de 400 kilomètres sur 200 bordant la Terre Adélie, et qui constitue l’une des trois zones d’un projet d’aires marines protégées dans l’Antarctique de l’Est devant être examiné par la CCAMLR. En effet, l’océan Austral abrite une biodiversité unique nécessitant protection et gestion, d’autant que les environnements extrêmes des régions polaires sont les plus sensibles aux effets du changement climatique. Affiner le savoir sur l’abondance et la distribution des communautés marines antarctiques aidera ainsi à comprendre comment le climat affecte les écosystèmes de la région.

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La faune benthique – benthos signifie « profondeur » en grec – peut être fixée au substrat, ou mobile au fond de l’eau. © AAD-MNHN Communauté benthique dominée par les ascidies (qui ressemblent à des champignons blancs), les bryozoaires (toutes petites formes jaunes), avec au centre une belle éponge siliceuse en forme de ballon. © AAD-MNHN | Ci-dessus : Marc Éléaume © Lenaïg Hemery | IPEV

« Nous souhaitons améliorer l’état de ces connaissances en vue in fine de faciliter la mise en place par la CCAMLR d’une aire marine protégée dans l’Antarctique de l’Est, futur outil de protection et de gestion de ces milieux marins. Dans ce cadre, nous allons essayer de publier cette année l’écorégionalisation de la mer Dumont d’Urville. Pour cela, nous combinons des données taxonomiques, mais aussi environnementales à travers 17 paramètres, dont : la salinité, la température de l’eau au fond de l’océan, la vitesse et la direction du courant au fond, la couleur de l’eau, la concentration de glace, ou encore les types de sédiments. Ces paramètres permettent de détailler l’enveloppe environnementale des animaux benthiques connus et décrits par la science, soit 400 taxons, c’est-à-dire espèces ou groupes d’espèces. Dans notre zone d’étude, nous avons ainsi identifié six écorégions », annonce Marc Éléaume.

Dans chaque écorégion, les cohortes d’espèces et les conditions environnementales ont donc tendance à se différencier des espaces voisins. Cependant, la zone retenue par l’étude étant assez restreinte à l’échelle de l’océan Austral, les variations entre les six écorégions s’avèrent relativement subtiles. « Nous avons mis en évidence par exemple des écorégions sous l’influence des icebergs vêlés par les glaciers de la zone, comme le Mertz et l’Astrolabe. Ces icebergs, qui dépassent parfois 500 mètres sous la surface de l’eau, sont des laboureurs naturels du plateau continental. En détruisant une partie du fond, ils favorisent aussi le recrutement d’espèces

pionnières, autrement dit capables de coloniser en premier un milieu, dans des conditions peu propices aux autres espèces. Plus l’iceberg est passé il y a longtemps, plus les communautés benthiques ont eu le temps de se structurer, de se développer et de se transformer... et ces successions vont déterminer des communautés particulières. D’autres écorégions sont sous l’influence, non pas des icebergs, mais de la glace de mer ou banquise, et là c’est notamment la sédimentation par des algues qui poussent sous la glace ou dans les anfractuosités de la banquise qui va structurer les communautés », explique le chercheur.

Ces travaux sont le fruit de la récolte de milliers de spécimens benthiques (éponges, étoiles de mer, poissons, mollusques, crinoïdes...) pendant la campagne océanographique CEAMARC – à laquelle avait participé L’Astrolabe – conduite par la France, l’Australie et le Japon lors de l’Année polaire internationale de 20072008. L’objectif était de mieux connaître l’Antarctique, y compris sa faune benthique. « L’effort entrepris visait à mettre en place une connaissance de base suffisante en prévision d’une future aire marine protégée », rappelle Marc Éléaume, dont le travail d’écorégionalisation benthique prend en compte « seulement » les espèces décrites par la science. Or « de très nombreuses espèces dites cryptiques ont, durant cette expédition exceptionnelle, été recueillies. Ce sont des espèces potentiellement nouvelles, semblables aux espèces connues d’un point de vue morphologique, mais qui sont génétiquement très différentes ». Un autre immense panel de connaissances encore à explorer...

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Autre paysage de la mer Dumont d’Urville dévoilant une communauté benthique dominée par des cnidaires (animaux aquatiques invertébrés couverts de cellules urticantes, comme la méduse) et des crinoïdes (échinoderme, comme l’étoile de mer) nageurs. © AAD | MNHN

POLYNÉSIE FRANÇAISE

LE LABEL BIO PASIFIKA SENSIBILISE PRODUCTEURS ET CONSOMMATEURS À L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE

L’équipe de Bio Fetia, « l’association qui garantit et fait la promotion des produits agricoles bio du Fenua ». + d’info ici : https://biofetia.pf/

c R éé en 2008 à l ’ échelle de l ’ o céanie , le label b io p asifika ga R antit aux consommateu R s des p R oduits ag R icoles sans pesticides ou eng R ais . e n p olynésie f R ançaise , c ’ est le système pa R ticipatif de ga R antie ( spg ) b io f etia qui se cha R ge de labellise R les p R oducteu R s qui en font la demande , et de sensibilise R les consommateu R s à l ’ ag R icultu R e biologique

La Norme océanienne d’agriculture biologique (NOAB) a été créée en 2008 par la Communauté du Pacifique Sud. Cette norme régionale – ainsi que le label Bio Pasifika qui en découle – traite de la production et de la transformation de produits biologiques. Elle est adaptée aux contextes particuliers des territoires insulaires océaniens et tient compte des grandes références internationales en matière d’agriculture biologique. La NOAB a été approuvée comme norme de référence pour la Polynésie française en 2011 par le gouvernement local.

La même année, le système participatif de garantie Bio Fetia est né à l’initiative d’un groupe de producteurs animés par le bio. Sa mission : arpenter la Polynésie agricole et labelliser les producteurs qui en font la demande. Pour cela, Bio Fetia forme ses adhérents, des producteurs et des consommateurs, à l’inspection des candidats, selon les critères du label. Association ouverte à tous, le SPG Bio Fetia se consacre également à la sensibilisation des consommateurs sur les marchés communaux bio, les expositions, les foires, les événements culturels et les grandes surfaces.

Pour obtenir ce précieux label, « il est interdit d’utiliser des produits chimiques de synthèse, mais cette garantie va au-delà puisque nous sommes par ailleurs attentifs à la gestion de l’eau, à la présence de biodiversité sur la ferme ou au respect du bien-être animal », explique la directrice du SPG Bio Fetia, Poeti Lo.

Et attention, une fois obtenu, les producteurs sont tenus de conserver la qualité de leurs produits, en tenant à jour « un cahier de culture qui nous permet de vérifier leurs pratiques. Il est déjà arrivé qu’une exploitation perde son label et doive repasser par une période de conversion car elle n’avait pas respecté tous les critères », ajoute Poeti Lo.

Aujourd’hui, on compte plus de 70 fermes labellisées Bio Pasifika sur l’ensemble de la Polynésie française, et le SPG Bio Fetia continue de grossir ses rangs, à la fois d’adhérents et comités locaux.

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Diverses productions locales sont garanties Bio Pasifika : fruits, légumes, tubercules, aromates, miel, oeufs et produits transformés comestibles.

TÉMOIGNAGES

« Ingénieur agronome de formation, j’ai toujours été sensibilisée à la préservation de l’environnement. Je gère le budget de l’association, la ressource humaine et les relations avec nos partenaires institutionnels. Je m’assure que l’association fonctionne bien et s’améliore en continu. J’accompagne les animateurs dans la gestion des dossiers de certification et dans l’interprétation de la Norme océanienne d’agriculture biologique et je développe des projets pour améliorer la visibilité du bio et accompagner au mieux les producteurs. En 2022, une vingtaine de nouveaux producteurs a obtenu le label Bio Pasifika, ce qui élève le nombre de fermes certifiées à plus de 70. C’est très encourageant pour la filière bio. Les consommateurs sont de plus en plus demandeurs de produits locaux, de qualité et bons pour leur santé.

Nous avons une chargée de communication dont le rôle est d’augmenter la visibilité du label notamment auprès des consommateurs, pour qu’ils sachent facilement reconnaître et identifier les produits bio. Chaque année, nous organisons des journées portes ouvertes des fa’a’apu bio et les fermes reçoivent beaucoup de visiteurs. Enfin, pour que Bio Fetia soit garante du label Bio Pasifika, nous avons dû faire une demande de reconnaissance auprès de la Pacific Organic & Ethical Trade Community (POETCom) qui assure la gestion de la NOAB. Chaque année, nous leur remettons un rapport sur notre fonctionnement et les certifications que nous avons octroyées. »

« J’ai étudié au lycée agricole d’Opunohu d’où je suis sorti avec un BTS agricole en poche et où nous avons été sensibilisés à l’agriculture biologique. Mon métier s’inscrit ainsi dans la continuité de mon parcours scolaire. De plus, j’aime beaucoup le contact et l’échange avec les agriculteurs. La principale mission d’un animateur est d’accompagner les producteurs dans la certification biologique de leurs productions. De plus, nous sensibilisons le public à l’agriculture biologique et établissons un lien direct entre les consommateurs et les producteurs. Nous apportons enfin un suivi technique pour améliorer les pratiques culturales des agriculteurs-éleveurs.

Je dirai qu’une partie de la population est vraiment soucieuse de ce qu’elle mange et prête à consacrer une part un peu plus élevée de son revenu dans l’alimentation pour avoir la garantie que ce fruit, ce légume ou cet œuf est sans produits chimiques, sans OGM, respecte la biodiversité et le bien-être animal. Quant aux producteurs, le bio est avant tout une conviction personnelle et il faut que ça vienne du cœur. Toute la profession est soucieuse de la pollution environnementale causée par l’utilisation de produits chimiques, mais c’était le modèle agricole qu’on leur avait enseigné et on ne peut les blâmer pour ça, car ce sont eux qui nourrissent encore en grande partie la population ! Aujourd’hui, ils veulent se convertir au bio et notre rôle est de justement les inciter à le faire pour que le bio devienne la norme. »

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POETI LO, DIRECTRICE DE BIO FETIA MATAIVA CHAVE, ANIMATEUR DE BIO FETIA Rédaction et interviews : Jean Faatau
Le
Guadeloupe Guyane Martinique Saint-Pierre-et-Miquelon La Réunion Mayotte Nouvelle-Calédonie Polynésie française Wallis-et-Futuna • • • • • • • • Pour tout savoir sur les Outre-mer 24h/24 Rendez-vous sur la1ere.fr grandeur Nature OUTRE-MER 42
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PLANÈTE OUTRE-MER

LES TERRITOIRES FRANÇAIS DU PACIFIQUE RENONCENT À L’EXPLOITATION MINIÈRE DE LEURS FONDS MARINS

l a f R ance a R enoncé à l ’ exploitation des fonds ma R ins aussi bien dans les eaux inte R nationales que dans les sols et sous - sols de son espace ma R itime. l a f R ance, comme chaque pays qui a une façade ma R itime, exe Rce sa souve R aineté su R un espace ma R itime qui peut alle R jusqu ’à 200 milles nautiques , soit envi R on 370 kilomèt R es au la Rge. c ’ est ce qu ’ on appelle la Zone économique exclusive, la Z ee.

97 % de l’espace maritime français est en outre-mer, dont près de 60 % dans les territoires du Pacifique, compétents en matière de droit minier. Les ZEE des territoires du Pacifique sont très riches en métaux, mais juste après l’annonce d’Emmanuel Macron, la Nouvelle-Calédonie a également annoncé un moratoire sur l’exploitation de ses fonds marins.

Anne Caillaud, chargée du Programme Outre-mer au Comité français de l’UICN, l’Union internationale pour la conservation de la nature : « La NouvelleCalédonie a surpris tout le monde fin novembre, puisqu’elle a fait passer en Conseil des ministres un avant-projet de loi pour adopter un moratoire sur les activités d’exploration et d’exploitation des grands fonds marins au sein de sa ZEE sur 10 ans. Ce n’est pas encore adopté, parce qu’il y a tout un processus législatif à suivre et donc on saura à peu près en avril si c’est adopté ou non. Mais en tout cas, cela envoie

un très fort signal sur la volonté de ce pays de vraiment interdire cette activité au sein de sa zone. » Une décision qui serait exclusivement motivée pour préserver les richesses de ces écosystèmes marins. « Je suis convaincue que la Nouvelle-Calédonie souhaite protéger les richesses de ses fonds marins et de ses récifs coralliens extraordinaires. Ils sont parmi les récifs coralliens les mieux protégés au monde et les plus résilients. Je pense que la Nouvelle-Calédonie a conscience de cela. Elle a un parc marin sur l’ensemble de sa ZEE et je pense qu’elle a compris que le fait d’avoir un parc marin et de vouloir protéger sa biodiversité, était incompatible avec le démarrage d‘une extraction minière au sein de ses eaux. »

Le 8 décembre 2022, la Polynésie française a également renoncé à exploiter ses fonds marins, jusqu’à ce que les impacts environnementaux de l’extraction minière des grands fonds soient mieux maîtrisés.

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Ce texte est issu de la chronique radio « Planète Outre-mer » présentée par Caroline Marie à écouter sur La1ere.fr , l’offre numérique Outre-mer de France Télévisions
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Coucher
de soleil depuis
Motu Uta à Papeete. © Julien Meillon97px

NOUVELLECALÉDONIE

LES AGRICULTEURS

CALÉDONIENS FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE

l ’ année 2022 a été la plus a RR osée et la plus chaude jamais obse Rvée , impactant du R ement les ag R iculteu R s qui assistent , impuissants , aux conséquences du changement climatique . p ou R les accompagne R et t R ouve R des solutions , l ’ i nstitut ag R onomique néo - calédonien ( iac ) insc R it un volet « a daptation au changement climatique » à ses g R andes p R io R ités pou R les cinq ans à veni R .

mations du monde rural. Nous terminons en ce moment la nouvelle programmation scientifique prévue pour les cinq années à venir, de 2023 à 2027.

Nous avons défini quatre grands défis : les questions d’agroécologie, de santé globale et d’alimentation ; la valorisation et la conservation de la biodiversité et des ressources naturelles ; l’aménagement du territoire et, enfin, l’adaptation au changement climatique. Même si cette dernière thématique était déjà abordée auparavant, elle apparaissait alors moins prioritaire.

• Pourquoi l’adaptation au changement climatique est-elle aujourd’hui une priorité ?

INTERVIEW

LAURENT L’HUILLIER, DIRECTEUR

GÉNÉRAL DE L’INSTITUT

AGRONOMIQUE NÉO-CALÉDONIEN (IAC)

• Quel est le rôle de l’Institut agronomique néo-calédonien ?

- L’IAC est un institut local de recherche finalisée – ou appliquée – qui accompagne le développement du territoire dans les domaines de l’agriculture durable, de la prévention de l’environnement et des transfor-

- Les collectivités et les agriculteurs s’intéressent de plus en plus aux questions d’adaptation au changement climatique. Ils nous demandent de les aider dans ce sens. On constate, de manière visible, l’impact du changement climatique sur les îles du Pacifique et notamment en Nouvelle-Calédonie.

L’année dernière, nous avons en effet subi une année exceptionnelle, jamais vécue, marquée par une période de pluviométrie extrême, tout en battant des records de températures. Les agriculteurs ne peuvent plus cultiver leurs champs avant le mois de mai, voire de juin, car les sols sont détrempés. Cela ajoute de l’insécurité à notre système alimentaire alors que

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Une plante rare (Pseuderanthemum melanesicum) de la province des Îles Loyauté, photographiée à Maré et Lifou. © IAC | L. Terrier

nous sommes déjà très dépendants des importations, avec environ les trois quarts de nos produits alimentaires importés. On a du mal à maintenir ces 25 % de production locale et l’impact du changement climatique ajoute des difficultés.

• Quelles solutions envisagez-vous ?

- Nous concentrons nos études notamment autour d’espèces végétales et animales moins sensibles à ces changements. On développe ainsi un programme autour des plantes endémiques, indigènes ou introduites depuis longtemps, car on estime qu’elles sont plus adaptées au contexte environnemental.

Rédaction et interview : Marion Durand

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Ci-dessus (© IAC | Yawiya Ititiaty ) et en haut (© Province des Îles Loyauté) : les membres de l’IAC sur le terrain en Nouvelle-Calédonie.

UN NOUVEL OBSERVATOIRE SOUS-MARIN

AU LARGE DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE

aloRs que les effets du changement global affectent l’océan, plus que jamais les scientifiques doivent pou R suiv R e leu R s investigations au - delà de la su R face et explo R e R le milieu ma R in dans ses dimensions les plus p R ofondes

ont été retenus comme premier sujet d’étude. Deux types d’infrastructures vont être réalisées : des lignes de mouillage instrumentées immergées jusqu’à 1 200 mètres le long des pentes des monts sous-marins et des stations « benthiques » autonomes pour l’étude du fond de mer disposées au sommet.

« Équipés d’une panoplie de capteurs, ces observatoires permettront de mesurer la température, la salinité, les courants, la concentration d’oxygène et la turbidité de l’eau. Grâce à un échosondeur, nous pourrons évaluer la quantité de biomasse présente dans la colonne d’eau, et renseigner les migrations verticales des organismes méso-pélagiques qui la composent. De plus, des pièges à particules permettront d’estimer les flux verticaux de carbone et d’azote ainsi que de récolter des larves d’invertébrés benthiques susceptibles de coloniser les monts. Une première station de fond équipée notamment d’une caméra (Edokko du Jamstec) offrira la possibilité d’identifier et dénombrer la faune mobile comme les poissons et de comprendre les interactions entre espèces.

Initié et coordonné par l’Ifremer, le projet ScInObs 1 , dans sa composante Nouvelle-Calédonie, vise à concevoir et à déployer un système d’observatoires sous-marins multi-paramètres et innovant dans le Parc naturel de la mer de Corail (PNMC) couvrant l’ensemble de la ZEE de Nouvelle-Calédonie.

Ce projet, initié entre l’Ifremer et son homologue japonais Jamstec pour développer un observatoire dans le Sud-Ouest Pacifique, est réalisé avec des partenaires locaux ou présents depuis longtemps en Nouvelle-Calédonie : IRD 2 avec l’UMR Entropie 3 , MNHN 4, SGNC/DIMENC 5, Cresica 6 et PNMC 7

Les monts sous-marins, écosystèmes emblématiques et en cours de protection en Nouvelle-Calédonie,

Il est aussi envisagé de tester un préleveur d’ADN environnemental développé par le Jamstec pour compléter la caractérisation des organismes dans la colonne d’eau et leur dynamique », détaille Hélène Leau, ingénieure de l’unité « Recherches et développements technologiques » de l’Ifremer, en charge du pilotage de ScInObs.

Une première ligne de mouillage instrumentée et la station Edokko vont être déployées sur une pente de mont sous-marin à 100 milles au sud de la Grande Terre en mai 2023 depuis l’Antea (campagne Kaseaope-1). ScInObs comprend aussi un volet d’observation à Mayotte, pour l’étude des processus associés au volcan sous-marin apparu en 2018.

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1 ScInObs : Science, innovations et Observatoires sous-marins.| 2 Institut de recherche pour le développement. | 3 Unité mixte de recherche « Écologie marine tropicale des océans Pacifique et Indien ». | 4 Muséum national d’Histoire naturelle. | 5 Service géologique de la Direction de l’industrie des mines et de l’énergie de Nouvelle-Calédonie. | 6 Consortium pour la coopération en matière de recherche, d’enseignement supérieur et d’innovation en Nouvelle-Calédonie. | 7 Parc naturel de la mer de Corail. Éponges au pied du Mont Munida, situé à 1 090 mètres de profondeur. Campagne Kanadeep2 (2019). © MNHN | Ifremer

PREMIÈRE CAMPAGNE DE L’ANTEA

diRectRice de RecheRche à l’iRd, sophie cRavatte est océanogRaphe physicienne expeRte en dynamique équatoRiale et en vaRiabilité climatique dans le pacifique tRopical avec fRédéRic maRin, océanogRaphe physicien à l’iRd, ils oRganisent les missions swotalis suR l’antea, naviRe de la flotte océanogRaphique fRançaise opéRée paR l’ifRemeR, nouvellement déployé en nouvelle-calédonie

• Quels sont les objectifs de Swotalis et quels équipements vont être mis en œuvre à bord de l’Antea ?

INTERVIEW

SOPHIE CRAVATTE, CHEFFE DE MISSION DE SWOTALIS

• Que ressentez-vous en étant la première cheffe de mission de l’Antea en Nouvelle-Calédonie ?

- Je ressens une certaine fierté d’inaugurer une série de campagnes océanographiques sur ce navire qui succède à l’ Alis dans le Pacifique, mais surtout de l’appréhension. Nous sommes toute une équipe de scientifiques et d’ingénieurs à préparer cette mission depuis plusieurs années. Il y a eu beaucoup de travail, de moyens engagés et d’attentes. Or des aléas climatiques (c’est la saison cyclonique), des soucis techniques ou humains peuvent toujours mettre en péril les opérations prévues… Je me sentirai plus rassurée à la fin de l’année, quand nous aurons récupéré les instruments et engrangé des données à analyser pour les années à venir.

- Les campagnes Swotalis (il y en aura quatre cette année) ont lieu dans le cadre d’une collaboration internationale, en phase avec le lancement en décembre 2022 du satellite franco-américain SWOT. Celui-ci va observer le niveau de la mer avec des détails jusqu’alors inaccessibles. Plusieurs équipes à travers le monde organisent simultanément des campagnes en mer, sous les traces de ce satellite, pour mieux comprendre ce qui, sous la surface de l’océan, explique les variations à fine échelle spatiale de la hauteur de l’océan. Au sud de la Nouvelle-Calédonie, dans la région des monts sousmarins, ce sont en grande partie les « ondes de marée internes », des mouvements verticaux des couches de l’océan créés lorsque les courants de marée rencontrent un obstacle comme un mont sous-marin ou une dorsale océanique, que l’on va observer avec SWOT. Pour mieux les caractériser, nous allons déployer trois lignes de mouillages instrumentés du fond de l’océan jusqu’à -40 mètres. Ces mouillages, qui vont rester ancrés huit mois, jusqu’à leur récupération pendant Swotalis-4, vont enregistrer toutes les 20 minutes les variations de courants et de densité sur toute la colonne d’eau. Nous allons aussi utiliser des instruments novateurs : le RapidCast/ecoCTD, qui réalise des profils de densité de l’océan en continu pendant que le navire fait route à faible vitesse, associé à une nappe GPS qui, traînée derrière l’Antea, mesurera simultanément le niveau de la mer avec une grande précision. Nous allons également mesurer le mélange dans l’océan induit par ces ondes avec un profileur vertical de microstructures, et prélever de l’eau toutes les trois heures pour comprendre comment ces ondes impactent la présence de nutriments dans la couche de surface de l’océan, et le plancton dans cette région de grande biodiversité.

• Avec l’arrivée de l’Antea dans le Pacifique, que deviennent désormais les perspectives d’exploration sur ce territoire marin gigantesque ?

- L’arrivée de ce navire permet de ne pas interrompre la dynamique de campagnes organisées jusqu’alors sur l’Alis. L’Antea embarque neuf à 10 scientifiques et a des laboratoires plus grands, en vue, nous l’espérons, de campagnes en haute mer plus ambitieuses. Il permettra de continuer à explorer les compartiments physiques, chimiques et biologiques de l’océan Pacifique, autour de la Nouvelle-Calédonie, mais aussi en Polynésie Française, à l’équateur, ou au Vietnam…

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Sophie Cravatte devant l’ Antea à Nouméa. © IRD | Jean-Michel Boré

WALLISET-FUTUNA

UNE JOURNÉE MONDIALE

DES ZONES HUMIDES POUR

DÉCOUVRIR LA MANGROVE DE VAITUPU

d ans le cad R e du mois des Z ones humides , le s e Rvice te RR ito R ial de l ’ envi R onnement de w allis - et - f utuna et la s ociété calédonienne d ’ o R nithologie ont p R oposé une animation autou R de la mang R ove de v aitupu , dans le no R d - est de w allis .

L’île de Wallis comporte de nombreuses zones humides comme des lacs volcaniques ou des mangroves qui s’étendent sur un peu plus de 36 hectares.

Le Pôle-relais zones humides tropicales (PRZHT) a d’ailleurs développé, en étroite collaboration avec le Service territorial de l’environnement (STE) plusieurs visites virtuelles des zones humides de Wallis, afin de sensibiliser à la richesse de ces milieux.

Le Service territorial de l’environnement met aussi en œuvre de nombreuses actions de sensibilisation, au travers de collaborations avec des associations de villages, pour partager les connaissances sur ces milieux et sur l’importance de les protéger. Des opérations de restauration de mangroves sont également soutenues par le STE, afin d’atténuer l’impact de l’érosion littorale et du recul du trait de côte.

Dans le cadre de la 51ème Journée mondiale des zones humides 2023, placée sous le thème « Il est urgent de restaurer les zones humides ! », le Service territorial de l’environnement s’est associé à la Société calédonienne d’ornithologie (SCO) pour proposer une animation autour de la mangrove de Vaitupu. Un exposé sur l’importance et la richesse des zones humides a ainsi eu lieu en présence des chefs coutumiers des villages de Vaitupu et Mala’e. Les participants ont ensuite été invités à observer la mangrove et l’estran de Vaitupu et les nombreux oiseaux de rivage présents à marée basse.

Cette sortie a été l’occasion pour les participants de découvrir les espèces d’oiseaux migratrices ou résidentes des milieux marins et côtiers de Wallis.

Au cours des différents échanges, l’accent a été mis sur la nécessité de préserver et restaurer ces zones humides, en présentant des moyens et bonnes pratiques concrètes pour que chacun puisse, à son échelle, participer à la protection des zones humides du territoire.

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Rédaction : Lucie Labbouz De gauche à droite : pluvier fauve (« kiu » en wallisien), chevalier errant et tournepierre à collier (tous les deux nommés « polili » en wallisien) observés sur l’estran à Wallis. © Liliane Guisgant | SCO

Tous les ans, la Journée mondiale des zones humides, le 2 février, célèbre l’adoption de la convention de Ramsar sur les milieux humides, en 1971. Ci-dessus : « Les participants ont pu découvrir les performances migratoires des très connus kiu, polili ou foa uga, des oiseaux qui nichent dans les lointaines contrées de la Sibérie à l’Alaska avant de venir hiverner sur les rivages et dans les jardins de Wallis. » © Société calédonienne d’ornithologie (SCO) | Ci-dessous : palétuviers sur substrat sablo-vaseux, à Wallis-et-Futuna. © Chloé Desmots

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fédérer l ’ outre-Mer, favoriser les échanges, Mettre en luMière les acteurs de terrain, les initiatives Pour la Protection de la nature et le déveloPPeMent durable

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SUPPORT D’INFORMATION BIMESTRIEL GRATUIT ADRESSÉ AUX : décideurs publics acteurs ultramarins de l ’ environnement académies d ’ outre-mer internautes via de nombreux sites web et réseaux sociaux

page facebook « outRe-meR gRandeuR natuRe »

Un support proposé par aux Éditions Insulae

OcéIndia

7 chemin Léona Revest - 97417 La Montagne, île de la Réunion

Stéphanie Castre, directrice de publication | oceindia@icloud.com

Rédaction : Stéphanie Castre, Lucie Labbouz, Axelle Dorville, Romy Loublier, Mariane Aimar, Sandrine Chopot, Marion Durand, Alain Brondeau, Érick Buffier, Jean Faatau, Marion Gautheret, Caroline Marie Conception graphique : Océindia

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NOUVELLE-CALÉDONIE | ForMer à L’agroForesterie syntropique SOMMAIRE 2 édito 3 actu outre-mer 7 Saint-Pierre-et-Miquelon 12 Saint-Martin 13 Saint-Barthélemy 16 Martinique 22 Guadeloupe 26 Guyane 30 Île de La Réunion 38 Mayotte 42 Polynésie française 44 Nouvelle-Calédonie 46 Wallis-et-Futuna OcéIndia
ÉDITO | Louis Mussington, président de La CoLLeCtivité de st-Martin MARTINIQUE | déMarChe innovante dans La baie de Fort-de-FranCe
UNE n°14 L’E-MAG ULTRAMARIN DE L’ENVIRONNEMENT JAN. | FÉVRIER 2023 WALLIS-ET-FUTUNA | BIENTÔT UNE PREMIÈRE AIRE MARINE PROTÉGÉE
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