« Le nord du Nigeria est actuellement confronté à une grave crise nutritionnelle »
De janvier à juin 2025, près de 70 000 enfants souffrant de malnutrition ont reçu des soins médicaux de la part de nos équipes dans l’État de Katsina, parmi lesquels près de 10 000 ont été hospitalisés dans un état grave. Cela représente une augmentation d’environ un tiers par rapport à l’année dernière. Le nombre d’enfants souffrant de malnutrition et présentant un œdème nutritionnel, la forme la plus grave et la plus mortelle de malnutrition, a quant à lui augmenté de 208 % par rapport à la même période en 2024. Signe inquiétant de la gravité de cette urgence sanitaire, les adultes sont également touchés par la malnutrition, en particulier les femmes, y compris celles qui sont enceintes et allaitantes. Sur l’ensemble de leurs projets situés dans le nord du pays, nos équipes font le même constat.
Or, nous assistons actuellement à des coupes budgétaires massives, notamment de la part des États-Unis, du Royaume-Uni et de certains pays européens, qui ont un impact direct sur le traitement des enfants souffrant de malnutrition. Pour réduire le risque de mort immédiate due à la malnutrition, il est urgent de garantir aux familles l’accès à la nourriture par le biais d’une distribution à grande échelle de nourriture ou de compléments nutritionnels ou encore d’argent liquide lorsque cela est possible, comme nous le faisons actuellement dans la région de Mashi. Une mobilisation immédiate est nécessaire pour répondre aux besoins colossaux de prévention et de traitement de la malnutrition dans le nord du Nigeria.“
SOMMAIRE
FOCUS Malawi : soigner les femmes touchées par le cancer du col de l’utérus
GRAND ANGLE Haïti : les soignants face à la violence extrême
REGARD Gisma, 30 ans, déplacée au Tchad après avoir fui le Soudan
EN LUMIÈRE Emad, de Gaza à Marseille
EN APARTÉ Défi solidaire
EN QUESTION Gel de l’aide internationale américaine : entre craintes et
Présidente de Médecins Sans Frontières
Malawi
:
soigner les femmes touchées par le cancer du col de l’utérus
Le Malawi est l’un des pays où l’incidence et la mortalité du cancer du col de l’utérus sont les plus élevées. Cette forme de la maladie représente près de 40% des cas de cancer chez les femmes dans le pays et plus de 2 300 décès par an. Depuis 2018, nos équipes sont investies dans la prévention et la prise en charge de ce cancer dans le district de Blantyre.
Prévenir et dépister
« Le cancer est l’une des principales causes de mortalité dans le monde, mais avec de grandes disparités : 70 % des décès liés à la maladie surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Sur le continent africain des cancers pourraient être prévenus ou guéris, s’ils étaient dépistés à temps. » Alice Authier, responsable d’unité médicoopérationnelle d’oncologie pour MSF à Blantyre.
Au Malawi, nos équipes mènent des activités de dépistage du cancer du col de l’utérus, dans dix centres de santé dans les districts de Chiradzulu et de Blantyre.
6 000 femmes ont bénéficié d’un test HPV dans le cadre de l’étude PAVE, un projet mené en collaboration entre MSF, La Fondation MSF et le National Cancer Institute (NCI), visant à évaluer l’apport de l’intelligence artificielle dans le dépistage des lésions précancéreuses. Un dépistage précoce permet une prise en charge plus rapide, augmentant les chances de survie de la patiente.
Adapter les soins à chaque patiente
Forte de plusieurs années d’expérience, nos équipes proposent un parcours personnalisé pour chaque femme de l’Hôpital Queen Elizabeth de Blantyre. Les options thérapeutiques incluent la chirurgie, la chimiothérapie et la radiothérapie. Avant que le traitement par radiothérapie soit disponible au Malawi, nos équipes ont organisé le référencement de certaines patientes au Kenya, pour bénéficier d’une prise en charge complémentaire.
EN UNE ANNÉE* À BLANTYRE,
· 10 000 femmes ont été dépistées
Plus de 500 patientes ont été opérées
· 81 patientes ont bénéficié de soins palliatifs en ambulatoire et 13 à domicile
· Plus de 490 nouvelles patientes ont bénéficié de séances de kinésithérapie
Lorsque la maladie est détectée à un stade trop avancé, nos équipes offrent un parcours de soins palliatifs à l’hôpital ou à domicile, y compris dans les régions les plus éloignées de Blantyre.
Accompagner et soutenir
Les femmes accueillies par nos équipes témoignent d’un parcours difficile. Elles sont souvent stigmatisées à l’annonce de la maladie, parfois rejetées par l’entourage familial. Elles subissent souvent une perte d‘autonomie physique et financière. C’est pourquoi chaque patiente peut disposer de services d’éducation thérapeutique, d’accompagnement, de soutien financier et de kinésithérapie tout au long de son parcours, pour mieux vivre avec ses traitements et la maladie. Ces activités sont menées en partenariat avec des associations de patientes.
Nos
équipes mènent également un projet de prise en charge des cancers du sein et du col de l’utérus au Mali. En une année, 13 700 femmes ont été dépistées et plus de 260 autres y ont été prises en charge.
Haïti : les soignants face à la violence extrême
Depuis plusieurs années, Haïti est ravagé par une violence d’une intensité inouïe, causée par des affrontements entre des gangs, qui contrôlent 80 % de la capitale Port-au-Prince, les forces de police et des groupes d’auto-défense. Fusillades, meurtres, exécutions, violences sexuelles, kidnapping : les civils sont les premières victimes. L’économie du pays est à bout de souffle, la situation sanitaire en détérioration constante et l’accès aux soins de plus en plus réduit. C’est dans ce contexte que nos équipes tentent de maintenir leurs projets dans le pays.
Kenol Coman a été pris en charge à l’hôpital de traumatologie de Carrefour pour de graves brûlures, des suites de l’explosion d’un camion citerne en septembre 2024.
L«a situation s’est détériorée de manière drastique en Haïti. Aujourd’hui, les gangs contrôlent une grande partie de Port-au-Prince ainsi que les grands axes routiers. On ne peut pas dire qu’il y ait un endroit où l’on se sente en sécurité aujourd’hui en Haïti », explique Xavier Kernissan, chirurgien traumatologue à l’hôpital situé dans le quartier de Tabarre à Port-au-Prince.
DES BESOINS MÉDICAUX
CROISSANTS
Selon l’OMS, moins d’un quart des hôpitaux sont encore fonc-
tionnels en Haïti. « Les gangs détruisent les centres de santé, les incendient, les pillent. Les autres structures ont fermé en raison de la violence », explique Mumuza Muhindo, chef de mission en Haïti. Les violences provoquent un grand nombre de victimes, mais aussi des déplacements massifs de population. On estime aujourd’hui à plus d’un million le
« Les gangs détruisent les centres de santé, les incendient, les pillent. Les autres structures ont fermé en raison de la violence. »
Jimmy, 32 ans, a été blessé par balle lors d’affrontements entre les groupes armés et les forces de police dans le quartier de Cité Soleil. Nos équipes lui prodiguent des soins de physiothérapie.
nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays. « Ces déplacés ont d’immenses besoins en eau potable, hygiène et assainissement d’autant plus qu’il y a une épidémie de choléra en cours. Parmi eux, beaucoup ont dû abandonner leur traitement pour des maladies chroniques, des cancers, le VIH ou la tuberculose. C’est une situation très inquiétante », ajoute Mumuza Muhindo.
MSF est présente en Haïti depuis plus de 30 ans, répondant aux grandes crises qui ont frappé le pays - séismes, ouragans, épidémies de choléra - et continue de soutenir la population face à la violence. Nos équipes gèrent notamment l’un des deux centres de traumatologie encore fonctionnels à Port-au-Prince. Disposant de cinq blocs opératoires et d’une centaine de lits, celui-ci est saturé depuis le mois de février et accueille un nombre croissant de blessés. 40 % d’entre eux sont des femmes et des enfants. C’est également la seule structure du pays en mesure de prendre en charge les brûlés.
Nos équipes travaillent aussi dans le bidonville de Cité Soleil, où la violence extrême persiste. Elles y maintiennent une salle d’urgence, un service de consultations et
ont renforcé leurs capacités pour répondre à l’augmentation des violences sexuelles. Au total, nos équipes ont pris en charge 4 463 survivantes de violences sexuelles en 2024. « Lors d’épisodes de violences dans la zone, elles peuvent accueillir entre 40 et 50 nouvelles personnes par jour. La violence sur le corps des femmes est systématique » ajoute Mumuza Muhindo.
LA MISSION MÉDICALE MENACÉE
Nos équipes médicales se retrouvent en première ligne, les actes de violence à l’encontre de patients et soignants se répètent et sont de plus en plus graves, rendant les suspensions de projets également de plus en plus fréquentes. En novembre 2024, par exemple, des patients blessés ont été exécutés après que l’ambulance de MSF dans laquelle ils se trouvaient a été arrêtée par des membres d’une brigade de vigilance et la police. Puis en mars 2025, des véhicules clairement identifiés MSF ont été délibérément pris pour cible et ont essuyé 15 tirs par au moins un homme armé, cagoulé et en uniforme, lors de l’évacuation de
« Malgré tous les obstacles, nous mettons tout en œuvre pour poursuivre nos activités médicales dans la capitale. Nous sommes constamment sur un mode urgentiste avec une adaptation permanente de nos activités pour répondre aux besoins de la population victime de la violence. » EN UNE ANNÉE*, À L’HÔPITAL DE TABARRE :
nos équipes du centre de Turgeau vers l’hôpital traumatologique de la commune de Carrefour.
« Dans ces conditions, il devient malheureusement impossible de maintenir nos activités à Carrefour, où plus de 15 000 patients ont été pris en charge en une année. Nous sommes donc contraints de nous retirer. C’est une décision extrêmement douloureuse, alors que les besoins médicaux vitaux de la population ne cessent d’augmenter », déclarait Benoît Vasseur, chef de mission MSF en Haïti, en avril dernier.
2 168 passages aux urgences
3 287 interventions chirurgicales pour des victimes de blessure 254 admissions de personnes brûlées
4 845 séances de physiothérapie dispensées à des personnes brûlées
PIERRE-MARIE*
EST UN PATIENT DE L’HÔPITAL DE MSF À TABARRE. IL A ÉTÉ BLESSÉ PAR BALLE.
«Soudain, des bandits ont envahi la zone et ont commencé à tirer sans poser de questions. C’est à ce moment-là que j’ai été touché par des balles. Malheureusement personne n’était en mesure de m’aider car tout le monde cherchait à se cacher, les hommes armés rentraient dans la zone. Je perdais beaucoup de sang et je me sentais presque mourir. Les gens ont alors trouvé une autre solution pour m’emmener à l’hôpital. La situation est tellement compliquée que même à l’intérieur de votre maison, vous ne vous sentez pas en sécurité. Ma mère est décédée dans des circonstances similaires, alors qu’elle se trouvait à la maison et qu’elle a été touchée par une balle.»
*Le nom a été modifié pour protéger son identité.
RÉADAPTER NOTRE RÉPONSE
TOUT EN MINIMISANT LES RISQUES POUR NOS ÉQUIPES
« Malgré tous les obstacles, nous mettons tout en œuvre pour poursuivre nos activités médicales dans la capitale. Nous sommes constamment sur un mode urgentiste avec une adaptation permanente de nos activités pour répondre aux besoins de la population victime de la violence. C’est pour cela que nous avons, par exemple, augmenté nos capacités d’accueil pour les personnes survivantes de violences sexuelles à Cité Soleil dès 2024. Depuis quelque temps, nous recevons aussi de plus en plus de cas de tuberculose parce que la violence empêche les patients de se rendre à l’hôpital pour récupérer leur traitement. Nous avons donc organisé une réponse temporaire
« En tant que chirurgien, il faut trouver la balance pour faire au mieux son travail mais c’est difficile de se dire qu’on pourrait être la prochaine victime de la personne qu’on est en train de soigner. »
le temps que la situation s’apaise. Il faut sans cesse se réinventer », explique Sarah Chateau, responsable des programmes MSF en Haïti. L’approvisionnement représente également un défi majeur pour MSF avec les nombreuses routes contrôlées par les gangs et les fermetures fréquentes de l’aéroport. « Il nous est très difficile de faire entrer les médicaments. En ce moment, nous avons de grosses ruptures d’anesthésiants pour notre projet à Tabarre. Il faut sans cesse chercher de nouvelles alternatives, ce qui oblige nos équipes médicales et logistiques à faire preuve de beaucoup de flexibilité et de créativité pour s’adapter à chaque situation », ajoute Sarah Chateau.
En parallèle, MSF travaille sur des aménagements pour protéger ses équipes et réduire au maximum leur prise de risque. « J’étais obligée de traverser deux fois par jour des zones contrôlées par les gangs. MSF a installé un dortoir à proximité de l’hôpital pour les personnes comme moi qui ont dû fuir leur quartier ou qui ne peuvent pas se déplacer tous les jours », explique Nadège Carestil, responsable Administration et Ressources Humaines pour MSF en Haïti. MSF prévoit également l’ouverture d’un dortoir similaire à Cité Soleil et la mise en place de navettes qui feraient les trajets entre les domiciles des membres de notre personnel et l’hôpital pour minimiser les risques liés aux déplacements pendant les épisodes de violence intense.
L’IMPARTIALITÉ, INDISPENSABLE AU DIALOGUE AVEC LES ACTEURS
Le pilier sur lequel repose l’intervention de MSF en Haïti est son impartialité. Ses projets sont à la fois situés dans les zones sous contrôle gouvernemental et dans celles contrôlées par les gangs. « Cette situation géographique égalitaire est essentielle pour MSF, à la fois pour discuter avec tous les acteurs du terrain et répondre aux besoins de toute la population civile, les policiers, les gangs… Les portes ne sont pas fermées à MSF qui reste un acteur incontournable en Haïti et c’est un aspect très positif. Je peux discuter avec chaque groupe et négocier notre espace de travail », explique Mumuza Muhindo. Cependant cette position reste délicate pour nos équipes, ellesaussi, victimes de la violence. « En tant que chirurgien, il faut trouver la balance pour faire au mieux son travail mais c’est difficile de se dire qu’on pourrait être la prochaine victime de la personne qu’on est en train de soigner. Il faut prendre de la distance. Quand le patient est sur la table d’opération, pour moi, c’est un bras, une jambe, une cuisse, je m’attache juste au fait que l’opération soit réussie. On s’accroche à notre travail et à la reconnaissance dont les patients nous font part », explique Xavier Kernissan.
Un patient blessé par balle au pied lors d’affrontements entre les groupes armés et les forces de police reçoit des soins au bloc opératoire de l’hôpital MSF de Tabarre.
Philippines
Dans le bidonville de Tondo, à Manille, capitale des Philippines, nos équipes ont mis en place une technologie pour tenter d’améliorer le diagnostic de la tuberculose. Cette dernière est basée sur l’Intelligence Artificielle et aide les radiologues à interpréter les radiographies du thorax. Nos équipes peuvent ainsi dépister entre 120 et 150 patients par jour. Une détection précoce permet de commencer le traitement le plus tôt possible. Pour les patients, cela signifie une plus grande chance de guérison, moins de soins hospitaliers et une meilleure qualité de vie avec la maladie.
PANORAMA
Drépanocytose
Maladie génétique héréditaire la plus fréquente dans le monde, la drépanocytose touche plus de cinq millions de personnes. Chaque année, des milliers d’enfants souffrant des formes graves de la maladie sont pris en charge par nos équipes dans les hôpitaux d’Afrique subsaharienne. Une poignée est aujourd’hui traitée avec de l’hydroxyurée. Ce médicament permet de prévenir les crises sévères chez les personnes les plus affectées mais il reste encore trop peu disponible dans la région en partie à cause de son coût sur la durée et des examens qui doivent encadrer le traitement.
600 c’est le nombre de patients pris en charge en seulement 4 jours dans notre unité de traitement du choléra, mise en place pour répondre à une épidémie à Lomera, en République démocratique du Congo (RDC).
Méditerranée centrale
Dans un nouveau rapport paru en juin 2025 et intitulé « Deadly Manoeuvres : Obstruction and Violence in the Central Mediterranean », notre organisation dénonce la violence des politiques européennes d’obstruction aux interventions de sauvetage en Méditerranée centrale. Le rapport revient sur deux années d’opérations menées dans un contexte de politiques italiennes très restrictives et conclut que le blocage des navires de recherche et de sauvetage, comme le Geo Barents, notre navire, réduit considérablement les chances de survie des personnes fuyant les violences en Libye.
Gaza
En juillet 2025, nos équipes ont constaté une augmentation soudaine et conséquente des taux de malnutrition aiguë chez les patients de leur clinique d’Al-Mawasi, dans le sud de la bande, et celle de Gaza City, dans le nord. Plus de 700 femmes enceintes ou allaitantes et près de 500 enfants souffrant de malnutrition sévère ou modérée étaient suivis à ce moment-là dans les centres ambulatoires des deux cliniques. À Gaza City, le nombre de patients a quadruplé en moins de deux mois, passant de 293 en mai à 983 au début du mois de juillet.
NIGERIA
À L’HÔPITAL GÉNÉRAL DE JAHUN, DANS LE NORD DU PAYS, NOS ÉQUIPES OFFRENT DES SOINS EN CHIRURGIE RÉPARATRICE, SANTÉ MENTALE, ET RÉÉDUCATION À DES FEMMES ATTEINTES DE FISTULES OBSTÉTRICALES. CONSÉQUENCES D’ACCOUCHEMENTS AVEC COMPLICATION, LES FISTULES CONSISTENT EN UNE PERFORATION ENTRE LE VAGIN ET LA VESSIE ET/OU LE RECTUM. ELLES CRÉENT UNE INCONTINENCE PERMANENTE, HANDICAPENT LOURDEMENT LES PATIENTES ET ENTRAÎNENT LE PLUS SOUVENT LEUR EXCLUSION DE LA COMMUNAUTÉ. CHAQUE ANNÉE, ENVIRON 300 FEMMES SONT ACCUEILLIES AU SEIN DE NOTRE STRUCTURE POUR UNE DURÉE D’HOSPITALISATION ENTRE DEUX ET TROIS MOIS.
REGARD
«Je souffre de problèmes psychologiques, j’ai besoin de comprimés pour dormir. Depuis le bombardement du camp de Zamzam, je ne sais pas où se trouve mon mari. Mon fils aîné souffre d’insuffisance rénale et je n’ai pas les moyens de subvenir aux besoins de mes quatre enfants. Sur la route, lorsque nous avons fui, des hommes armés ont pris mes couvertures, mon argent et quelques vêtements. Maintenant, je ne peux qu’espérer un soutien de la part de la communauté.»
Gisma, 30 ans, a fui le bombardement du camp de déplacés de Zamzam au Soudan, en avril 2025. Elle vit dans le camp de transit de Tine au Tchad avec ses enfants.
Suivez-nous sur
« Même si nous avions imaginé le pire, ce qui s’est réellement passé dépasse l’imagination. Des familles entières ont été rayées des registres d’état civil. Dans certains cas, du grand-père au plus jeune, tout le monde a disparu. Complètement. Personne n’aurait pu imaginer une telle chose. Nous dormions dans la peur, en nous demandant : vais-je me réveiller demain et retrouver mes enfants encore en vie ?
Notre maison abritait environ 60 à 70 personnes. Elle a été touchée en juillet 2024 par cinq obus. Personne ne savait qui était blessé, qui était mort. Vous êtes chez vous, les obus tombent, les murs s’effondrent. C’était horrible. Les enfants criaient, et honnêtement, j’avais peur moi aussi. Comment pouvez-vous calmer vos enfants dans un moment pareil ? Le lendemain matin, l’armée [israélienne] s’est retirée. Nous sommes retournés voir ceux qui étaient restés. Malheureusement, nous avons trouvé notre grandpère, notre grand-mère et notre oncle morts. Ils avaient des blessures par balles à la
Emad, de Gaza à Marseille
Emad, 36 ans, a été évacué avec sa famille de Gaza vers Marseille en mars 2025. Responsable des soins infirmiers, Emad a travaillé pour notre organisation durant ces neuf dernières années dans la bande de Gaza. Sa petite fille Sila, 7 ans, souffre d’une maladie cardiaque congénitale, à l’origine de leur évacuation vers la France, où elle est désormais suivie régulièrement.
poitrine et à la tête. C’est ainsi qu’a commencé notre périple forcé, d’un endroit à l’autre dans le nord, puis dans le sud. C’était très difficile pour les enfants de comprendre quoi que ce soit. Chaque coup de feu était suivi des cris des enfants. Nous n’avions pas le choix, nous devions partir pour sauver nos vies.
Sila, la fille d’Emad, âgée de sept ans est née avec une malformation cardiaque congénitale. Elle était sur liste d’attente pour être opérée à l’étranger mais la guerre a tout bloqué. Ce n’est qu’en mars 2025 que la famille d’Emad a finalement été évacuée vers Marseille, juste après la rupture du cessez-le-feu.
Ma priorité était simplement que Sila soit soignée et que ma famille soit en sécurité. On se demandait sans cesse : « Va-t-on pouvoir les protéger ou non ? » Je suis sûr que c’est ce que ressentait chaque habitant de Gaza. Chaque famille avait des enfants, des personnes qu’elle aimait, qu’elle voulait protéger, ce qu’elle ne pouvait pas faire à cause de tout ce qui se passait. C’est pourquoi la douleur dont les gens ont été témoins était énorme, trop difficile à supporter. Parce qu’on ne pouvait rien faire. Les évacuations médicales sont devenues indispensables pendant cette période de guerre, car le système de santé s’était complètement effondré. Il fallait choisir : soit une chance de survivre grâce à un traitement, soit la mort certaine à Gaza. Il n’y avait pas de juste milieu.
Honnêtement, ce que je veux maintenant, c’est un cessez-lefeu. Je veux que cette guerre se termine. Je veux qu’elle s’arrête. Pour qu’au moins, nous et nos familles puissions avoir l’esprit tranquille, savoir que nos proches vont bien, qu’ils ne mourront pas
en attendant l’aide dont ils ont désespérément besoin, ou qu’ils ne seront pas tués par une bombe alors qu’ils marchent dans la rue. »
Depuis son arrivée en France, Sila est suivie pour sa maladie cardiaque et consulte régulièrement son médecin. Son traitement lui permet d’éviter une opération chirurgicale. Au moins 12 000 patients, dont des milliers d’enfants comme Sila, doivent être évacués d’urgence hors de Gaza pour accéder à des soins médicaux vitaux. Nous continuons d’appeler les États, dont la France, à en permettre l’accueil sur leur territoire.
Emad et ses filles dans un bateau à Marseille.
Serena, 5 ans, et Sila, 7 ans, sont les deux filles d’Emad.
Legs et donations
3 questions à Catherine Béchereau, responsable relations testateurs de MSF
En quoi consiste votre activité ?
En premier lieu, mon équipe et moi menons des actions de communication auprès des donateurs MSF et du grand public pour leur faire découvrir la possibilité de soutenir nos actions sur le terrain par des legs, des donations ou encore via tout ou partie d’une assurance-vie.
Nous les invitons à nous contacter pour les accompagner dans leur projet de transmission de patrimoine et tenons à leur disposition une brochure et un guide de succession selon l’état d’avancement de leur réflexion. Quel accompagnement leur proposez-vous ?
Avec l’appui de notre service juridique legs, nous leur proposons d’échanger avec nous pour qu’ils nous expriment leurs souhaits par téléphone, en visioconférence, lors de rencontres dans nos locaux ou en nous rendant à domicile si leur projet le nécessite.
Cette opportunité d’échange de leurs attentes propres nous permet de les accompagner dans la formalisation de leur projet en apportant un regard ou un conseil en amont ainsi que nos recommandations pour garantir l’acceptation de leur projet de transmission en faveur de Médecins Sans Frontières.
Quelles recommandations leur donnez-vous ?
D’abord, nous leur rappelons que leur projet doit tenir compte de la législation en matière de droit successoral. Ainsi en France, vous ne pouvez pas déshériter vos héritiers réservataires.
Défi solidaire !
Nous les invitons à s’assurer des conditions de fin de vie confortables et de prendre soin d’eux et de leurs proches avant tout.
Nous leur conseillons de faire enregistrer au Fichier central des Dispositions des Dernières Volontés leur testament par un notaire, seul habilité à effectuer cette démarche et qui validera le contenu final de leur testament et en garantira le respect le moment venu.
Pour plus d’informations, contactez le Service Relations Testateurs au 01 40 21 29 09 ou par mail : relations.testateurs@paris.msf.org
Prêt à relever un défi hors du commun en parcourant les 42,195 km du Marathon de Paris ?
C’est possible grâce aux dossards
solidaires MSF !
Pour 95 € de frais d’inscription à tarif réduit, venez prendre part à une aventure engagée, en collectant 420 € avant le grand départ, soit 10 € par kilomètre parcouru le Jour J. Et vous donnerez encore plus de sens à votre course : tous les dons versés sur votre page seront intégralement reversés à MSF.
Inscrivez-vous dès maintenant sur marathon-paris.dossards-solidaires.org
À VENIR…
Votez
pour la photo de l’année !
Dans quelques semaines, nous vous contacterons par email pour vous proposer de voter pour la photo de l’année 2025. Vous découvrirez celle qui a recueilli le plus de suffrages dans votre MSF Infos du mois de décembre.
Alors restez attentifs !
Stéphane Doyon, responsable de programmes
EN QUESTION
Gel de l’aide internationale américaine
:
entre craintes et incertitudes
Au cours de la première semaine suivant son entrée en fonction en janvier 2025, l’administration Trump a suspendu des milliers de programmes d’aide financés par les États-Unis à travers le monde. Depuis, les annonces de nouvelles suspensions, les rumeurs et les démenties se sont succédés, souvent de façon chaotique. Retour sur les conséquences de cette situation avec Stéphane Doyon, responsable de programmes.
Quel était l’ampleur de l’aide américaine avant le gel annoncé en janvier 2025 et le démantèlement de l’agence américaine pour le développement international (USAID) ?
Stéphane Doyon : L’aide américaine par son volume, 14,4 milliards de dollars en 2024, représentait un pilier central de l’action humanitaire mondiale. Le montant total de l’aide humanitaire internationale était estimé à 35,8 milliards de dollars, soit environ un tiers du montant total. Avant le gel de l’aide américaine, la moitié du budget des agences onusiennes d’aide aux réfugiés et déplacés internes, l’IOM et le HCR, était financé par les américains. Plus de la moitié des rations alimentaires ou des produits thérapeutiques distribués dans le monde l’étaient également. Près de la moitié des plans de réponses humanitaires organisés par les Nations Unis dans une trentaine de pays dépendait pour plus de la moitié des financements américains. Il faut malheureusement replacer cette décision dans une tendance plus large de baisse des financements en faveur de l’aide internationale que l’on observe aussi chez d’autres bailleurs de fonds comme les pays européens. Mais la particularité du gel des fonds américains c’est sa brutalité - cette décision a été prise du jour au lendemain sans préavis ou préparation -, et son volume, qui est sans commune mesure avec les donations d’autres pays.
Quel est aujourd’hui l’impact de ce gel ?
S.D. : Le vide que laisse le gouvernement américain est conséquent et va être difficile à combler notamment dans certains secteurs : santé sexuelle et reproductive, qui est une des thématiques les plus visées ; nutrition, avec une chute d’au moins 25 % à 30 % du nombre d’enfants pris en charge ; paludisme, avec des programmes de prévention et traitement qui se sont arrêtés dans certains pays ; lutte contre le VIH dont le financement est incertain ; tuberculose, pour laquelle la plupart des recherches étaient financées par les fonds américains ;
ou encore des systèmes de santé entiers dans des pays comme l’Afghanistan, où des centaines de centre de santé ne reçoivent plus de support pour le salaire de leurs personnels ou de médicaments pour les patients… Le caractère soudain de cette décision a complètement déstabilisé les organisations et les gouvernements qui bénéficiaient de cette aide et/ou qui la distribuaient, les contraignant à définir de nouvelles priorités en urgence et à fermer certains projets. Une organisation travaillant près d’un de nos projets au Nigeria a par exemple fermé du jour au lendemain son hôpital et transféré ses patients vers une autre structure. Ce sont des centaines de milliers de personnes vulnérables qui subissent aujourd’hui les effets de cette décision à travers le monde.
Quel est le constat de vos équipes sur le terrain ?
S.D. : Nos équipes font face aux conséquences directes et indirectes de ce gel sur leurs terrains d’intervention. Elles sont confrontées, par exemple, à des ruptures d’aliments thérapeutiques prêts à l’emploi pour traiter la malnutrition. Dans plusieurs pays, elles ont dû passer des commandes en urgence pour pouvoir soigner leurs patients. Il en est de même pour certains médicaments ou encore les kits destinés aux femmes victimes de violences sexuelles qui étaient obtenus gratuitement avant et qui doivent maintenant faire l’objet de commandes de notre part.
L’impact se ressent également sur nos opérations. En Haïti, par exemple, nous avons temporairement repris la distribution d’eau dans le bidonville où se situe notre hôpital car l’organisation qui la gérait a dû stopper son activité, faute de financement. Au Burkina Faso, nous avons monté une équipe de réponse aux urgences et fournissons désormais des biens de première nécessité ou des consultations dans des dispensaires mobiles pour répondre aux déplacements de population, un programme ouvert pour pallier la fermeture d’un projet. En Afghanistan, particulièrement
touché par les coupes américaines et où la majorité des centres de santé ont perdu leur financement, nos équipes reçoivent de plus en plus de patients au sein de leur structures médicales, dépassant largement nos capacités d’accueil.
Qu’en est-il de la lutte contre les maladies infectieuses ?
S.D. : Le gouvernement américain était de loin le plus gros acteur de la santé globale, avec plus de 10 milliards de financement en 2024. Rappelons que le fonds mondial de lutte contre le VIH, le paludisme et la tuberculose était financé à hauteur d’un tiers par les États-Unis. Aujourd’hui, par exemple, grâce au Plan d’urgence du président pour la lutte contre le Sida (PEPFAR), créé à l’initiative du président George W. Bush en 2003, 22 millions de personnes reçoivent un traitement quotidien. Si ce programme venait à être arrêté, cela mettrait en péril la prise en charge et donc la vie de tous ces patients.
Comment envisagez-vous l’année 2026 ?
S.D. : 2026 est une grande inconnue puisque nous craignons encore une baisse des financements américains et des autres bailleurs de fonds. La France vient, par exemple, d’annoncer une réduction de 700 millions d’euros de son aide internationale, après avoir déjà réduit celle-ci de 1,5 milliard l’année passée. Parallèlement, les stocks de médicaments, d’intrants nutritionnels, d’outils de diagnostic seront complètement épuisés, on ne commencera pas l’année avec des réserves de l’année passée comme en 2025. Et tout cela dans un contexte de besoins qui augmentent : multiplication des conflits, augmentation du nombre de déplacés, difficultés économiques, évolution démographique…
Face à cette situation, nous maintenons une veille permanente. Nous nous efforçons d’être en contact constant avec les autres acteurs qui interviennent sur nos terrains pour identifier les manques et les combler au mieux de nos capacités.
Pour que demain les plus fragiles aient toujours leurs médecins
Les jumelles Heba et Malath ont été soignées dans l’unité mère-enfant de l’hôpital Al Jamhouri que nous soutenons au Yémen. Les legs et assurances-vie nous permettent d’être aux côtés des plus fragiles, où qu’ils soient. Et grâce à votre générosité, nous pouvons, sans relâche, continuer de les soigner, comme nous le faisons depuis plus de 50 ans.
OBTENEZ UNE BROCHURE legs et assurance-vie gratuite et confidentielle en scannant ce code ou en renvoyant ce coupon, sans affranchir votre enveloppe, à Médecins Sans Frontières Libre réponse - Autorisation 10617 75884 - Paris Cedex 18
MES COORDONNÉES
Prénom :
Adresse :
Code postal :
E-mail :
Téléphone : Nom : Ville : M Mme 14-34 avenue Jean-Jaurès 75019 Paris leguez.msf.fr
Reconnue d’utilité publique, Médecins Sans Frontières est habilitée à recevoir des legs, donations, assurances-vie exonérés de droits de succession.
Catherine Béchereau, chargée des relations testateurs, répond à vos questions en toute discrétion.