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Une vie, une mission | Monica Nève

À Nativitas, c’est Noël tous les jours

Je voulais vivre personnellement le message de l’Évangile / Monica Nève.

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© Nativitas

Bien avant les exhortations du Pape François, Monica Nève a eu l’intuition d’aller « vers les périphéries », qui se trouvaient paradoxalement en plein centre de Bruxelles. C’est ainsi qu’est né Nativitas, un réseau bénévole de service social à destination des personnes les plus démunies, visant à recréer les liens brisés par la marginalisation. En 2008, Monica a été reçue Docteur Honoris Causa à l’UCL.

PROPOS RECUEILLIS PAR ARMELLE GRIFFON

Que mettez-vous derrière le mot « mission » ?

Pour moi la mission, c’est l’enthousiasme, la joie de passer un message merveilleux. Dans la mission c’est Jésus qui « éclate ». Lorsque j’étais jeune, je voulais être missionnaire. Un jour, à la messe, l’homélie du prêtre m’a bouleversée. Je suis allée lui faire part de mon désir et il m’a encouragée à être une laïque engagée.

Quelle est votre mission ?

Ma mission c’est de témoigner parce que je ne peux pas me taire. Témoigner partout dans les familles, les homes, les prisons. J’ai beaucoup de défauts mais je suis fidèle. Ma vocation vient d’abord de mes parents. Tous les soirs nous priions en famille.

Ma mission c’est de témoigner, parce que je ne peux pas me taire.

Mes parents ont prêché par l’exemple. Ils étaient ancrés dans Jésus et dans la Trinité. J’ai reçu beaucoup de signes, en particulier à Noël. Bébé, j’ai failli mourir et j’en garde un souvenir de « monter et de descendre », comme si je devais rester sur terre pour accomplir quelque chose, comme si j’avais une mission. A six ans, j’entre à l’école de la Vierge Fidèle où l’on m’a proposé de faire ma première communion avec mes camarades – j’ai refusé car je voulais faire une communion privée en famille, à Noël. Mon mari, Emmanuel (que l’on appelait Noël) est né un 24 décembre et nous nous sommes mariés le jour de l’Épiphanie. Adolescente, j’ai organisé un cortège de Noël avec mes frères et sœurs ; cela a inspiré les cortèges que j’ai organisés par la suite, notamment avec les prêtres responsables de communautés d’origine étrangère de Bruxelles. C’était vraiment une action missionnaire associant toute personne dans le milieu où il était. Il s’agissait pour moi de vivre personnellement le message évangélique, de restaurer l’esprit de Noël avec ses dimensions de beau, de vrai, de bien, de joie.

Comment a démarré votre mission ?

Ma première mission a été de m’occuper de mes 5 enfants. J’ai attendu vingt ans pour lancer Nativitas dans la maison du sacristain de ND de la Chapelle. Dans ce quartier des Marolles où j’avais été catéchiste à l’âge de 18 ans, j’avais découvert la vie des sans-abris et des personnes isolées. Mon mariage a mis en « standby » les projets qui ont alors germé dans mon cœur. Dès que j’ai été plus disponible, je suis revenue vers ND de la Chapelle. La paroisse à mis à ma disposition la maison du sacristain que j’ai retapée avec l’aide des jeunes et des enfants du quartier pour en faire une maison d’accueil. « La Bicoque » a ouvert ses portes en 1975, offrant aux démunis et marginaux un lieu de rencontre convivial autour d’un café, d’une tarte, et d’un piano électronique. J’ai aussi mis en place « des repas sur roues » avec les Petites Sœurs des Pauvres. Pour financer tout cela, j’organisais des concerts quasi professionnels, des messes chantées. Je voulais que la musique soit au cœur de la vie des habitués de la Bicoque. D’où l’idée d’organiser un cortège de Noël international ainsi qu’une chorale de musique populaire où chacun serait bienvenu. Nous associons le spirituel, le social, la culture et l’art (musique).

Aujourd’hui, Nativitas c’est plus que La Bicoque…

Je n’ai pas tardé à prendre la mesure des immenses attentes et besoins de nos visiteurs, et en premier lieu celui de retrouver leur dignité et de se sentir utiles. Voilà pourquoi l’équipe a mis sur pied des permanences d’accueil et d’action sociale, un vestiaire, un restaurant social, des colis alimentaires, des services de douche et de coiffure, ainsi qu’un accompagnement à la formation. Aujourd’hui nous avons un logement de transit d’une vingtaine de places. Les personnes hébergées peuvent y rester 4 mois ; 80% trouvent un travail.

Le courage et la persévérance suffisent-ils pour mener un tel projet à bien ?

Nous ne pourrions pas assurer ce service sans la centaine de bénévoles qui y consacrent une part de leur temps. Certains, croyants ou non, ont déjà la vocation de se tourner vers les autres. Ici dans l’équipe, nous avons des gens de toutes opinions et croyances, bien que la base de l’action reste chrétienne et clairement reliée à l’Église. Nous avons la vocation de transmettre la joie, cette grâce qui agit dans le cœur de chacun et que nous ne pouvons garder. Je me réfère sans cesse à l’Évangile : « Va et, toi aussi, fais de même ». Un texte d’Évangile qui m’inspire ? Le Bon Samaritain. Il n’est pas nécessaire d’avoir un talent extraordinaire pour aider son prochain.

Nativitas offre aux démunis et aux marginaux un lieu de rencontre convivial.

© Annie Nève

POUR EN SAVOIR PLUS « L ’étoile de Nativitas », aux éditions Fidélité, raconte l’aventure de Nativitas. Le livre est accompagné d’un CD de chants de Noël de tous les pays interprétés par l’ensemble vocal et instrumental Nativitas.

Disponible auprès de : nativitas.asbl@gmail.com Ou des Éditions Jésuites : www.editionsjesuites.com

L’épidémie du Covid-19 a sûrement affecté votre action et vos habitués…

Nous distribuons tous les jours une centaine de repas gratuits, sauf le week-end (contrairement au resto social quand il fonctionne). Une centaine de repas sont ainsi distribués tous les jours. Nous avons du suspendre diverses activités : cours de langues, de cuisine, tous les vendredis partage de l’Évangile et eucharistie. Mais nos avons maintenu la distributin de colis alimentaires et vestimentaires.

Y aura-t-il une relève ?

J’ai l’âge que j’ai – 89 ans – et je vais passer le relais. Nativitas peut déjà compter sur deux permanentes : Véronique qui s’occupe du restaurant social et Xuan, chargée du service social et des animations. Nous projetons d’engager une 3e personne à temps plein.

Quel message voulez-vous adresser aux générations futures ?

Chez nous, c’est Noël toute l’année. C’est donc un message d’espérance : croyez dans la joie qui vient de l’amour. Chaque être humain est unique aux yeux de Dieu et peut apporter quelque chose ; il faut creuser en soi pour savoir ce qu’on peut donner.

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