NOVO N°28

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Déshumanisation

Moutarde et pesto Pareil à un explorateur des lieux et des artistes du monde, Italiart ne cesse d’agrémenter sa feuille de route au fil des années. Pour sa 8e édition, le festival d’art contemporain va tenter de séduire, à l’italienne, certaines régions de France, Italie, Norvège, Chili et Corée du Sud, en plaçant ses artistes, leurs arts et les spectateurs au sein même de la création. Le départ du voyage est fixé du 7 au 31 mars à Dijon, où 24 jours durant, une énergie va être puisée à l’intérieur d’une puissance alternative : création et action alimenteront les artistes parmi la foule. L’art est pluriel, le programme y est donc éclectique, voguant entre représentations théâtrales et cinéma, lectures et concerts, d’une conférence à la chorale, de l’exposition photo aux bandesdessinées… Chaque représentation se réalisera dans un cadre propre, et toujours à proximité de l’auditoire, pour mieux se faire entendre et encore plus émouvoir. L’illustrateur Virginio Vona, pour sa part, arrive de Rome à la librairie Granger pour une séance de dédicaces de sa BD Fenice et une performance. Fenice est un personnage fantastique issu à la fois du comics et du manga, aux allures punk et à l’esprit underground. Il vit et se bat au sein d’un monde hypnotique, tourmenté entre rêve et réalité dont les traits abrupts des planches esquissent le songe d’une société aux violences glaciales, totalement contrôlée mais où les vices humains ont pris le pas sur la morale et sont poussés jusqu’à leur paroxysme… Un univers qui nous situe aux antipodes de celui dans lequel nous plonge généralement Italiart. La preuve d’une grande ouverture d’esprit. Par Jolan Thouvenot

ITALIART, festival du 7 au 31 mars à Dijon. www.malastranafestival.it

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La compagnie Longtemps je me suis couché de bonne heure présente Love and money, pièce représentative du mouvement inyer-face (« en pleine gueule ») des années 90. Joué dans un ordre antéchronologique, l’histoire de David et Jess est celle de deux individus qui s’aiment, une histoire d’amour comme on en voit souvent. Malheureusement. On découvre le récit d’une vie dans laquelle l’argent vient jouer le rôle de poison. L’histoire se déroule dans le contexte socio-économique du libéralisme triomphant qui a préparé la crise majeure que nous traversons. Incroyablement prémonitoire puisque la pièce écrite par Dennis Kelly fait dans l’une des scènes, une description virtuose de la crise des subprimes aux États-Unis, 3 ans avant que tout cela n’arrive. La consommation impulsive et banalisée de biens matériels, la recherche effrénée d’argent et de pouvoir ravage l’amour qui unissait David et Jess. On est loin du théâtre didactique, Love and Money, c’est simplement du théâtre d’acteurs qui part et parle de la vie, la nôtre, la vôtre. Avec une composition en sept tableaux, le texte de Dennis Kelly laisse une grande place à l’imaginaire, sans sombrer dans le jugement moral. Mais voilà, on finit par se poser de grandes questions philosophiques, sociales et politiques. Certains d’entre nous seront prêts à faire la révolution, d’autres voudront résilier leur abonnement à Internet, les plus dépensiers regretteront d’avoir fait les soldes, et les plus réalistes tenteront simplement de sauver l’amour qui leur reste. Par Gabrielle Awad — Photo : Franck Beloncle

LOVE AND MONEY, pièce de théâtre du 4 au 7 février au CDN de Besançon. www.cdn-besancon.fr


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