Mayotte Hebdo n°1094

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LE MOT DE LA RÉDACTION

LES OBLIGATIONS DE L'ÉTAT

« L'État nous doit-il quelque chose ? » C’est l’un des sujets qui a été proposé aux élèves de terminale au bac de philosophie. Un thème qui rappelle l’actualité du moment. Quelles sont les obligations de l’État envers ses citoyens ? Les réponses sont multiples, mais une chose est sûre, l’État nous doit la sécurité. Du moins en théorie, car dans la pratique, cela n’est pas toujours le cas. Que l’on soit en Métropole ou à Mayotte, l’insécurité augmente. Encore cette semaine, une adolescente de 12 ans été violée en Métropole par des jeunes du même âge qu’elle. À Mayotte, ces derniers jours, une vidéo circule sur les réseaux sociaux montrant une femme se faire dépouiller par des délinquants dans sa voiture. Encore une fois. Les Français doivent-ils faire une croix sur leur sécurité ? Il s’agit du sujet de prédilection de quasiment tous les candidats aux élections législatives anticipées dans le 101ème département. Certains lient insécurité et immigration pour remporter le plus de voix. Et ça marche. On oublierait même qui est le véritable coupable de cette situation. Dans la mesure où la sécurité du peuple n’est pas assurée, peut-on considérer que l’État a failli à ses obligations ? Voilà une question qui mérite réflexion. Bonne lecture à tous,

Raïnat Aliloiffa

TOUTE L’ACTUALITÉ DE MAYOTTE AU QUOTIDIEN

premier

de Mayotte

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quotidien deMayotte diffusé surabonne 0269 61 20 04 secretariat@ mayottehebdo.com Rien à déclaReR pouR cet habitant de chiRongui Amén les 82 chambRes de l’hôtel bis style livRées sApeurs-pompiers le RetouR de nos héRos  quotidien deMayotte diffusé surabonne 0269 61 20 04 secretariat@ mayottehebdo.com Agression tRois jeunes condamnés, dont un cousin de la maRiée Quinze aRtistes attendus suR scène pendant tRois jouR AménAgement le stade de tsoundzou 1, une pieRRe pouR l’aveniR les appel à pRojets couvRe-feu environnement le lagon au patRimoine mondial de l'unesco ?  quoti deMayotte iffuM 0269 61 20 04 ash-infos@wanad  quotidien deMayotte diffusé surabonne 0269 61 20 04 secretariat@ mayottehebdo.com les juRidictions RenfoRcées paR sept nouvelles aRRivées tewaRds dans le yachting, une foRmation en deveniR urbAnisme la solution aux pénuRies d’eau Pour vous abonner, il suffit de nous transmettre ce bon de commande, accompagné du règlement. OUI, je m’abonne + abonnement gratuit à Vous pouvez également vous abonner en ligne en vous rendant sur notre site internet à l’adresse www.mayottehebdo.com/abonnements pour la version numérique. Pour toute demande, contactez-nous : contact@mayottehebdo.com 180 € par an g 4100% numérique Bulletin d’abonnement Nom : …………………………….…..…….………Prénom : ………………………..……..………………….…………. Société - Service : ……………………………………………….……….……………..….….….….……...…..…………. Adresse : ……………………………………………………….………….……………….….….….….….…..…………. Code postal : ……………….….….….….… Ville - Pays : ……………….………….……………….…….....…………. N° de téléphone : ………………….………………..E-mail :…………..….….….….…....………….……….……………..
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Le quotidien

tchaks

UN CONCERT GRATUIT À PASSAMAÏNTY POUR LA FÊTE DE LA MUSIQUE

À l’occasion de la Fête de la musique, ce vendredi 21 juin, Pass 1’2’ground et la Ville de Mamoudzou organisent un concert gratuit de 19h30 à minuit, dans la salle des fêtes de la médiathèque de Passamaïnty. Des artistes comme Naid ou encore Chaf Masta se produiront lors de ce Pass’1’2 Underground United Vol.2, ainsi que celles et ceux qui se seront inscrits pour la scène ouverte.

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LE CHU DE NANTES OUVRE UNE ANTENNE DE L'ÉCOLE D'INFIRMIER DE BLOC OPÉRATOIRE À MAYOTTE

A partir du 16 septembre, huit étudiants mahorais pourront suivre une formation d'infirmier de bloc opératoire grâce au centre hospitalier universitaire de Nantes. C’est la bonne nouvelle que l’établissement de santé de LoireAtlantique a communiquée, ce vendredi. Au sein du centre hospitalier de Mayotte (CHM), le cursus sera suivi « soit en présentiel, soit en distanciel avec leurs collègues nantais » « L'enthousiasme est à son comble alors que les équipes travaillent d'arrache-pied de part et d'autre pour préparer cette rentrée inédite. Un immense merci à tous ceux qui participent à cette belle aventure au service de la population mahoraise », indique le CHU nantais.

LE FORUM DE LA MOBILITÉ DÉMARRE

LE 5 JUILLET

L’association Émanciper Mayotte lance la huitième édition du Forum de la mobilité. Alors que la poursuite d’études supérieures n’est pas simple pour la jeunesse mahoraise, c'est pour « donner le plus d'outils et de conseils pratiques possible aux futurs étudiants et lycéens » que l'équipe d’Émanciper Mayotte et ses partenaires vont sillonner les villages de Mayotte. Le forum débute le 5 juillet à KaniKéli. Il fera étape dans une grande partie des communes de territoire tout au long du mois de juillet et s’achèvera le 2 août à Ouangani.

OUANGANI CHERCHE SA PROCHAINE MISS KOKO

Le CCAS de Ouangani recherche des candidates pour sa deuxième édition de l’élection « Miss Koko Ouangani ». Trois critères sont à remplir, il faut habiter l’un des cinq villages de la commune de Ouangani (Barakani, Ouangani, Hapandzo, Coconi, Kahani), être âgée de 54 ans ou plus, ainsi qu’avoir une pièce d'identité française ou un titre de séjour de dix ans. Les postulantes peuvent candidater en appelant le 06 36 69 83 82 ou par mail (ccas@mairiedeounagani.fr).

LU DANS LA PRESSE

Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale

PR ANTOINE FLAHAULT : « L’ÉPIDÉMIE DE CHOLÉRA À MAYOTTE SERAIT DÉJÀ JUGULÉE SI LE

GOUVERNEMENT LE

VOULAIT »

Publié par Antoine Beau, sur L’Express, le 18/06/2024

Santé. Contrairement à ce qui a été affirmé par l’exécutif, la bactérie continue de faire des victimes à Mayotte. En cause : un manque de volonté de la part de l’Etat, selon l’épidémiologiste Antoine Flahault.

Le 10 mai, le ministre de la Santé, Frédéric Valletoux, annonçait que l’épidémie de choléra à Mayotte était "circonscrite", "sous contrôle" Un mois plus tard, le bilan s’est pourtant aggravé. Les cas recensés dans le département français d’outre-mer ont quasiment triplé, passant d’une soixantaine à 166 au dernier décompte officiel, le 11 juin. Deux personnes sont décédées de la bactérie depuis cette prise de parole.

Comment expliquer une telle déconvenue ? Il y a plus d’un siècle, les dernières épidémies du genre avaient été jugulées en quelques semaines, rappelle le Pr Antoine Flahault, grand spécialiste de la diffusion des maladies à l’Institut de santé globale à Genève (Suisse). La science n’était pourtant pas aussi avancée que maintenant. Si les victimes s’accumulent à Mayotte, c’est à cause d’un manque de volonté politique, dénonce le scientifique.

L'Express : L’épidémie est-elle "sous contrôle", selon vous ?

Pr Antoine Flahault : On parle d’épidémie "sous contrôle" au minimum lorsque le nombre de nouveaux cas baisse significativement et durablement. Ce n’est pas le cas à Mayotte. Et pourtant, si le gouvernement français le voulait vraiment, il pourrait en l’espace de quelques semaines seulement juguler entièrement cette épidémie. On aurait déjà pu mettre un terme à l’épidémie, vraiment ? On l’a pourtant bien vu avec le Covid-19, les crises sanitaires sont souvent incertaines…

Oui, mais le Covid, c’est une toute autre histoire. Malgré les vaccins, on ne sait pas comment s’en débarrasser. Pas plus que la grippe d’ailleurs. Il y a des maladies qui nous résistent. Mais le choléra n’en fait pas partie.

A part en France, où la bactérie revient de manière très localisée, à Mayotte, les pays riches ont réussi à l’éliminer. Il n’y a plus un seul cas autochtone rapporté dans aucun pays développé depuis des décennies. Pour la simple et bonne raison que l’on sait comment éliminer cette maladie. La bactérie ne circule que dans les pays qui ne bénéficient pas d’une eau potable disponible pour tous leurs habitants.

Que devrions-nous faire, selon vous pour arrêter la propagation ?

Certains de quartiers de Mayotte sont de véritables bidonvilles. Leurs habitants ne bénéficient pas d’eau potable, ni d’assainissement des eaux usées. La population envoie ses déjections dans les rivières et puise la même eau pour se laver, boire et manger. Si l’on veut que l’épidémie s’arrête enfin, il faut offrir les mêmes standards d’hygiène aux habitants du département de Mayotte que dans le reste du territoire national. Il suffirait pour cela de fournir en eau potable tous les habitants de l’île de Mayotte, quel que soit leur statut de résidence, légal ou non. Les autorités françaises savent très bien comment mettre en place ces raccordements. C’est déjà le cas ailleurs en France. Et comme la population de Mayotte n’est pas si nombreuse, cet objectif n’est pas hors de portée, loin de là.

Pourquoi, alors, cela n’est-il pas fait ?

Par manque de détermination et de volonté. L’Express a révélé que l’Etat n’avait pas ajouté de raccordement en eau avant l’explosion des cas dans les deux premiers foyers de propagation. Comment jugez-vous cette décision ?

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Des raccordements en eau auraient dû être installés dès la prise de conscience du risque de diffusion du choléra. Et même bien avant, en réalité. Vouloir être présent dans des régions ultra-périphériques offre certes des droits internationaux, comme l’accès à une vaste zone maritime et de pêche. Mais cela confère aussi des devoirs et des obligations, notamment ceux de respecter les droits humains pour tous les résidents qui y séjournent. Le droit à l’eau potable est un droit humain qui semble élémentaire aujourd’hui à tous les métropolitains, quelles que soient leurs origines et leurs conditions sociales ou économiques. Il devrait en être de même pour Mayotte.

Qui est responsable de ces manquements selon vous ?

Au-delà de l’ARS [NDLR : l'Agence régionale de santé], qui est surtout responsable du secteur de la santé sur l’île, et notamment de l’hôpital, la gestion de cette épidémie est du fait de la préfecture, et donc de l’Etat français. A partir du moment où un cas autochtone de choléra avait été rapporté sur l’île, il aurait fallu, je le répète, redoubler d’efforts pour la conduite des travaux d’adduction et d’assainissement de l’eau qui étaient en route sur toute l’île. L’Etat français semble ne pas avoir pris toute la mesure des conséquences de sa procrastination en la matière dans ce cas.

Vous citez souvent l’exemple de la dernière épidémie à Londres, en 1854. Pourquoi ? En 1854, on ne connaissait pas l’origine bactérienne du choléra. Toutes les grandes métropoles européennes étaient en proie à des épidémies de cette maladie. Le Dr John Snow, médecin de la reine Victoria en Angleterre, l’un des premiers épidémiologistes de l’époque contemporaine, a alors réussi à obtenir des autorités britanniques qu’ils coupent l’accès à la pompe de Broad Street, dans le quartier de Soho à Londres, invitant, de fait, les habitants du quartier à ne plus boire cette eau contaminée issue de la Tamise. Les Parisiens quant à eux buvaient l’eau de la Seine non filtrée et non traitée en la puisant à la Samaritaine à la même époque. Les Berlinois celle de la Sprée. En quelques semaines, l’épidémie a pu être complètement jugulée à Londres, signant par là même que la seule intervention qui consistait à ne plus boire de l’eau contaminée par les déjections humaines permettait de contrôler très efficacement l’épidémie. On sait tout cela depuis 1854 ! Depuis, tous les pays développés ont consacré des investissements massifs pour la potabilisation de l’eau de boisson et l’assainissement des eaux usées.

On dispose en plus aujourd'hui de vaccins… Ne faut-il pas compter sur eux, plutôt que sur le réseau d’eau ?

Il existe plusieurs vaccins contre le choléra, en effet. Le plus utilisé s’administre par voie orale. Il permet de réduire grandement le risque d’être malade en cas d’exposition. Il réduit aussi le portage de la bactérie et donc la contagion. Mais ces effets-là s’estompent avec le temps. A Paris, à Berlin, à Londres, personne ne craint le retour du choléra, et ce n’est pas grâce à l’accès au vaccin, qui est peu utilisé en réalité. C’est bien l’eau filtrée, traitée et potable, accessible à tous. C’est cela qui nous protège du choléra. Jusqu’à récemment, l’Organisation mondiale de la santé ne vaccinait même pas ses personnels lorsqu’ils se

déplaçaient pour investiguer des épidémies de choléra. C’est dire si la stratégie d’assainissement de l’eau est importante. L’organisation disait à son staff qu’il ne risquait pas de contracter le vibrion cholérique, l’agent bactérien responsable, s’il suivait correctement les préconisations d’hygiène de base : le lavage des mains avec une eau non contaminée, le recours exclusif à l’eau potable, pour la boisson mais aussi pour l’alimentation, notamment le lavage des fruits et des légumes.

Vous dites que la France devrait songer à coopérer avec les Comores, le plus proche pays voisin. En quoi ?

Des kwassa-kwassa, ces embarcations frêles qui relient quotidiennement les Comores à Mayotte, souvent clandestinement, ont apporté le vibrion cholérique à Mayotte. Au-delà des questions de frontières, qui arrêtent rarement les virus et les bactéries, la France aurait tout à gagner à aider ce pays en proie à une lourde épidémie de choléra à s’équiper en matière d’adduction d’eau et d’assainissement des eaux usées. Elle pourrait également aider l’archipel médicalement. Fournir des doses de vaccins par exemple. Envoyer des contingents sanitaires n’est pas exceptionnel. Alors pourquoi pas ? Lorsque l’on aura compris que la prévention est un investissement rentable et non un coût, on sera tous gagnants. En termes de santé, mais aussi en termes économiques, social et politique. Ce qu’il se passe à Mayotte montre que traiter différemment étrangers et nationaux sur son territoire peut aller à l’encontre de la sécurité sanitaire. Craignez-vous la multiplication de ce type de situation avec la xénophobie actuelle ?

La France connaît des afflux massifs d’arrivées de personnes venant de l’étranger. Et pas seulement des migrants, mais aussi des touristes et des passagers de toutes origines et destinations. Plus de 100 millions de personnes visitent le pays chaque année. Le vibrion débarque régulièrement dans plusieurs aéroports métropolitains, et cela chaque jour depuis des décennies, sans jamais avoir causé de chaînes de transmission locales ou sinon très réduites. La question n’est donc pas de voir dans les étrangers visitant ou s’établissant en France une menace pour la sécurité sanitaire, mais c’est plutôt de comprendre que les maladies ne sont pas seulement l’affaire des médecins et des soignants mais aussi et avant tout celle du développement et des infrastructures conditionnant l’hygiène et le niveau de vie. Si nous donnions de l’eau potable aux Comores et à Mayotte, nous n’entendrions définitivement plus parler de choléra autochtone là-bas. C’est la même chose pour le paludisme et bon nombre d’autres maladies de la grande pauvreté. Peu importe le mode de propagation, elles se résument souvent au sous-développement dans lequel nous laissons une partie des habitants de la planète. Il nous faudrait plus de courage politique, et une ambition au niveau international. C’est comme ça qu’on a éradiqué la variole. C’est aussi comme ça qu’on est en train de chasser la poliomyélite. Mais pour le choléra et le paludisme, il n’y a pas beaucoup de consciences qui s’élèvent pour dire aux gouvernants du G7 ou de l’OCDE : "Réveillez-vous, ayez un peu d’audace, terminez donc le job, pour le bien de toute l’humanité !" C’est pourtant crucial.

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DOSSIER

Législatives : Les projets des candidats ? (Partie 1)

LE 30 JUIN ET 7 JUILLET PROCHAINS, LES FRANÇAIS DEVRONT À NOUVEAU ÉLIRE LEURS DÉPUTÉS DE MANIÈRE ANTICIPÉE, SUITE À LA DISSOLUTION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE PAR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE. ALORS QU’AU NIVEAU NATIONAL, CERTAINS PARTIS DÉCIDENT DE S’UNIR ET D’AUTRE SE DÉCHIRENT, À MAYOTTE, CHACUN RESTE FIDÈLE À SA FAMILLE POLITIQUE. DANS LE 101E DÉPARTEMENT, DOUZE CANDIDATS BRIGUENT LES DEUX SIÈGES DE DÉPUTÉ : QUATRE DANS LA CIRCONSCRIPTION DU NORD ET HUIT DANS CELLE DU SUD. NOUS VOUS PROPOSONS DE DÉCOUVRIR LES PROGRAMMES DE SIX D’ENTRE EUX DANS CE NUMÉRO.

Une bataille plus rude au sud avec huit candidats contre quatre au nord

ILS SONT FINALEMENT DOUZE À S’ÊTRE INSCRITS AUPRÈS DE LA PRÉFECTURE DE MAYOTTE, LA SEMAINE DERNIÈRE, POUR SE PRÉSENTER DEVANT LES ÉLECTEURS MAHORAIS, LES 30 JUIN ET 7 JUILLET. QUATRE DANS LA PREMIÈRE CIRCONSCRIPTION ET HUIT DANS LA DEUXIÈME. A TREIZE JOURS DU PREMIER TOUR, SIX ENJEUX ENTOURENT CE RETOUR AUX URNES ANTICIPÉ.

La campagne de ces élections législatives anticipées se fait au pas de course. Il ne reste que treize jours, ce mardi.

FORCES VIVES

RASSEMBLEMENT NATIONAL

Le score de la liste de Jordan Bardella aux élections européennes (52,4%) invite les représentants mahorais du Rassemblement national à l’optimisme. Il s’agit du pourcentage le plus élevé à l’échelle nationale. Mais estce que cela va se traduire par un bon score aux élections législatives ? C’est moins sûr. L’implantation locale du parti de Marine Le Pen reste difficile. Saïdali Boina Hamissi, seul candidat RN en 2022, n’avait pu obtenir que 2,6% des voix, soit le septième score au premier tour dans la deuxième circonscription. Cette fois-ci, il s’impliquera en tant que directeur de campagne d’Anchya Bamana, la présidente de Maore solidaire. Cinquième des dernières élections sénatoriales, la fille de Younoussa Bamana compte bien rejoindre les bancs de l’Assemblée nationale pour y représenter le sud de Mayotte..

De quel côté penchent les collectifs mahorais dans le nord de Mayotte ? Suppléant d’Estelle Youssouffa en 2022, Saïd Kambi s’estime avoir été lésé ensuite. Les divergences entre l’exprésidente du collectif des citoyens de Mayotte et ce dernier se sont faites encore plus visibles lors des barrages de février. Celui qui est un des leaders des Forces vives a été un des rares à ne pas appeler à leur levée. Alors que depuis Paris, Estelle Youssouffa appelait à l’apaisement pendant que le gouvernement essayait d’apporter des garanties concernant la loi Mayotte, Saïd Kambi préférait laisser les barragistes stopper ou non leur mouvement d’eux-mêmes.

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SADA

Les yeux seront forcément tournés vers Sada, le soir du premier tour, où un trio local aspire à la même fonction. Dans la commune du sud, deux ex-maires, Anchya Bamana (RN) et Mansour Kamardine, s’y affrontent en compagnie du conseiller départemental du canton, Soula Saïd-Souffou. Le député sortant était sorti large vainqueur en 2022 du duel contre Issa Issa Abdou (59,2% contre 41,8%), et ce, malgré une large coalition contre lui. Il repart dans la bataille avec une légère incertitude dans son camp, puisque Les Républicains se déchirent depuis qu’Éric Ciotti a choisi de s’allier avec le Rassemblement national. Il retrouve également dans sa ville un conseiller départemental qui l’a battu par deux fois en 2022 (à Sada lors des législatives et dans le canton quelques mois plus tard) en la personne de Soula Saïd Souffou.

MAJORITÉ PRÉSIDENTIELLE

Avec deux élus au Sénat en 2023 (Thani Mohamed Soilihi et Saïd Omar Oili), le camp présidentiel dispose déjà de deux parlementaires mahorais. Est-ce qu’il pourra en compter un troisième ? Ce n’est pas arrivé depuis 2022 et la large défaite de la députée sortante Ramlati Ali (7,2%) dès le premier scrutin. Ce ne sera pas dans la première circonscription de Mayotte, où cette fois, personne de la majorité présidentielle n’a voulu s’y aventurer. Et dans le sud, elle s’est compliqué la tâche avec deux candidats. En effet, Renaissance a décidé de soutenir à nouveau Madi-Boinamani Madi Mari, qui a fait une belle campagne en 2022 en arrivant troisième (19%) au premier tour. Le directeur général des services de Chiconi devrait à nouveau faire un gros score dans sa ville. Il y a deux ans, lors du premier tour, il y avait récolté 57,6% des suffrages. Résigné lors des dernières élections à jouer l’alliance, Daniel Martial Henry, le président du Modem mahorais, a aussi décidé de défendre crânement ses chances.

NOUVEAU

FRONT POPULAIRE

Dès l’annonce de la dissolution, les leaders des partis de gauche ont choisi de s’allier pour former le Nouveau Front populaire. Cette union de la gauche a même déjà défini un programme. Plusieurs points y concernent Mayotte. Il y est promis de « cesser de faire de Mayotte un territoire de seconde zone de la République, d’étendre l’aide médicale d’État, aligner les niveaux du RSA et du Smic sur le reste du pays et scolariser systématiquement tous les enfants ». Sur l’immigration, il y est proposé d’« améliorer les conditions d’accueil des exilés à Mayotte et supprimer les conditions empêchant le déplacement entre Mayotte et le reste du territoire ». Localement, Kira Bacar Adacolo (Union pour la sécurité de Mayotte) s’en réclame dans la deuxième circonscription de Mayotte, même si le Nouveau Front populaire n’a pas encore investi ses candidats ultramarins à ce jour.

RECONQUÊTE

Sans candidat en 2022, pour sa première année d’existence, le parti d’Éric Zemmour en présente cette fois-ci dans chacune des circonscriptions de Mayotte. C’est le seul dans ce cas. Aurélia Maillard, sa déléguée départementale, est candidate dans le nord, et Marion Moreno dans le sud. Au cours des élections européennes du 9 juin, la formation d’extrême-droite était arrivée à la cinquième place avec 4,9% des voix à Mayotte. Ahumad Salime (divers droite) et Mikhaël Saïfy (Lutte ouvrière) partageront avec ces deux candidates les rôles d’outsiders, mais pas de primo-candidats. En effet, le premier s’est déjà présenté aux élections de législatives de 2002, 2007 et 2022. Lors de la dernière, il avait terminé à la dernière place dans la deuxième circonscription de Mayotte avec 0,38% des suffrages.

LA LISTE DES PRÉTENDANTS

Circonscription nord :

- Estelle Youssouffa (Sans étiquette), remplaçante

Fatourani Mohamadi

- Saïd Kambi (Sans étiquette), Yasmina Aboudou

- Mikhaël Saïfy (Lutte ouvrière), Arzade Saïdali

- Aurélia Maillard (Reconquête), Serge Bensoussan

Circonscription sud :

- Mansour Kamardine (Les Républicains*), Fazianti

Djoumoi Tsimpou

- Soula Saïd Souffou (MDM), Zouhouria Foundi Chebani

- Madi-Boinamani Madi Mari (Renaissance), Toiyfati Saïd

- Kira Bacar Adacolo (USM/Front populaire), Kamaria Ali

- Anchya Bamanda (Rassemblement national),

Mahamoud Hamada Sidi Moukou

- Daniel Martial Henry (Modem), Jeanne Bébé

- Manon Moreno (Reconquête), James Gerges

- Ahumad Salime (divers droite), Boinariziki Abdallah

Assani

*Une scission s’est formée au sein du parti Les Républicains. Mansour Kamardine ne fait pas partie des candidats adoubés par Éric Ciotti, le président contesté de la formation politique.

THÉOPHANE « GUITO » NARAYANIN

PAS CANDIDAT

Battu par Estelle Youssouffa en 2022, au second tour des élections législatives, Théophane « Guito » Narayanin a indiqué par un communiqué qu’il ne sera pas candidat cette fois-ci. Se disant sollicité, le patron d’IBS avance comme argument que « le calendrier imposé ne [lui] permettra pas d’être candidat à cette élection, étant pour [sa] part actuellement en déplacement à l’étranger dans le cadre d’une opération humanitaire [qu’il a] personnellement initié ». En outre, sa suppléante, Cris Kordjee « ne peut se libérer du fait d’impératifs professionnels ». « Croyez bien que mon amour, mon engagement et mon attachement pour Mayotte restent sans faille, et que je serai toujours présent pour faire entendre la voix des Mahoraises et des Mahorais », ajoute-il. L’ex-candidat de la première circonscription de Mayotte ne donne, pour le moment, aucune consigne de vote à deux semaines du scrutin. « J’invite l’ensemble de la population à élire des représentants intègres et indépendants qui travailleront sincèrement pour Mayotte, sans arrogance ni népotisme, avec toute la conviction et la transparence qui s’imposent, et qui sauront mettre de côté leurs intérêts personnels au profit de l’intérêt général », fait-valoir, avant de signer : « Votre bien dévoué. Rohoni ya wamaoré paka cho ! ».

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Circonscription sud

Anchya Bamana « J’espère que Jordan Bardella sera Premier ministre et qu’on aura une majorité pour faire passer nos idées »

ANCHYA BAMANA EST LA SEULE CANDIDATE INVESTIE PAR LE RASSEMBLEMENT NATIONAL À MAYOTTE, POUR LES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES ANTICIPÉES. L’ANCIENNE MAIRE DE SADA SE PRÉSENTE AVEC SON SUPPLÉANT MAHAMOUD HAMADA SIDI MOUKOU DANS L’ESPOIR D’OCCUPER CE SIÈGE TANT CONVOITÉ. AUTREFOIS MEMBRE DES RÉPUBLICAINS, ELLE A FINI PAR EMBRASSER LES IDÉES DU CLAN LE PEN-BARDELLA.

Si vous étiez député, qu’est-ce que vous feriez pour…

Limiter l’immigration irrégulière ?

« Le parti qui m’a investie a un programme très clair sur le contrôle des frontières et de l’immigration illégale. Les représentants de l’Etat à Mayotte, en l’occurence le préfet Jean-François Colombet, a fait un lien direct entre les conséquences de l’immigration illégale et la montée des violences et de l’insécurité à Mayotte. Le programme de Marine Le Pen est un contrôle des frontières en mettant les moyens en pleine mer avec des bateaux de la marine nationale. Par ailleurs, ça ne sera plus à la préfecture de

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DOSSIER
L’appel lancé par Anchya Bamana pour être investie par le Rassemblement national pour les élections législatives, a été entendu.

Mayotte d’attribuer des visas, mais aux ambassades de France dans les pays tels que les Comores, Madagascar ou ceux d’Afrique. Sur la question du droit du sol, Marine Le Pen a le projet de faire un référendum national et elle est pour la suppression du droit du sol en France, et la fermeté envers l’Etat comorien. »

Renforcer la sécurité ?

« Il faut arrêter l’hémorragie parce que c’est une course sans fin. Une fois que l’on aura arrêté l’hémorragie sur le terrain, on pourra mener des actions de prévention en aidant les communes, par exemple, dans leur mission de prévention pour aider les forces de l’ordre et signer des partenariats. »

Garantir une eau quotidienne ?

« Il faut mettre en place les infrastructures parce qu’on sait qu’on a une forte poussée démographique. Il y a une inadéquation entre le nombre d’habitants et les infrastructures qui existent actuellement. Il va falloir accélérer la construction de la retenue collinaire et l’usine de dessalement. Il faut aussi mettre en place un plan de rénovation de l’existant pour permettre à la population d’avoir de l’eau. Il faut également fixer un tarif social à l’accès à l’eau, car on sait que la vie est chère à Mayotte, afin que les personnes vulnérables puissent accéder à l’eau. Et puis il faut mettre en place un office de l’eau comme c’est le cas dans les départements d’Outre-mer, et non pas un syndicat. »

Faire aboutir une loi Mayotte ?

« Compte tenu des réflexions menées depuis 2021, le contenu est déjà là. Les quatre parlementaires de Mayotte peuvent aussi travailler sur un texte et le soumettre aux votes du Parlement. C’est une proposition que je ferai au député de la circonscription une et aux deux sénateurs. Pour l'instant, les parlementaires ont discuté avec le président de la République et les membres du gouvernement, mais il n’y a pas de texte. Ça sera un travail qu’on devra faire pour prendre notre destin en main. Et j’espère que Jordan Bardella sera Premier ministre et qu’on aura une majorité pour faire passer nos idées. »

Améliorer l’attractivité du territoire ?

« Que ce soit dans le domaine du tourisme ou professionnel tel que la santé ou le développement économique avec des investisseurs, les gens viendront à Mayotte s’il y a de la sécurité. On doit pouvoir vivre en sécurité. Concernant le tourisme, il faut que l’on développe le schéma déjà existant au département. Il faut aussi avoir les financements pour construire des hôtels. On devra également travailler sur les visas de la clientèle assez riche qui souhaite

Ils sont aussi candidats dans la circonscription sud de Mayotte : Mansour Kamardine (Les Républicains), Soula Saïd Souffou (MDM), MadiBoinamani Madi Mari (Renaissance), Kira Bacar Adacolo (USM/Front populaire), Ahumad Salime (divers droite), Daniel Martial Henry (Modem), Manon Moreno (Reconquête).

venir à Mayotte. Concernant la santé, il y a la formation mais il faut aussi répondre au besoin immédiat de soins des Mahorais. La question des Evasan est essentielle. Le décret de 2004, qui est actuellement en cours, doit être modifié et c’est un texte réglementaire qui n’a pas besoin de passer au Parlement. La députée que je serai rectifiera rapidement ce décret pour qu’il puisse répondre au besoin des soins des Mahorais. »

Préserver l’environnement ?

« Le Sidevam est un partenaire incontournable en ce qui concerne les déchets. Je travaillerai avec ce syndicat pour lui donner les moyens nécessaires pour construire les déchetteries, développer une politique d’économie circulaire. Il faut aussi se pencher sur la question de la déforestation, car à cause de cela on a moins de ressource en eau. Il faut de manière générale développer des politiques pour protéger notre environnement. »

Développer quelles infrastructures ?

« Dans le cadre de la loi Mayotte, il faut avoir les financements nécessaires. Cette loi Mayotte doit être une loi de programmation pour tous les investissements qui doivent être réalisés. Je pense notamment à la piste longue, aux hôpitaux, aux hôtels. On doit avoir une prévision pour l’avenir, une programmation, un échéancier des financements dédiés pour réaliser ces infrastructures et développer Mayotte. Les promesses qui ont été faites n’ont pas été tenues par les gouvernements d’Emmanuel Macron, ni par François Hollande depuis 2012. La deuxième mission d’un parlementaire consiste à contrôler l’action de l’Etat, donc je veillerai à ce que tout ce qui est dit soit réellement fait. Il faut aussi installer un comité de pilotage et de suivi de la départementalisation au niveau national et local. »

Arriver à la convergence sociale ?

« Je ne parle même pas de convergence sociale, mais plutôt de l’alignement social. Nous aspirons aux mesures du droit commun. Il faut lutter contre les exceptions qui nous pénalisent. La question sociale est chère à Marine Le Pen. Actuellement, les Mahorais sont discriminés parce qu’il y a des prestations sociales qui existent à taux inférieur, si l’on compare aux autres départements. Certaines n’existent absolument pas chez nous. En tant que député, je verrai avec le gouvernement du Rassemblement national pour que les Mahorais bénéficient des mêmes prestations sociales au même taux que les autres citoyens de la Nation. » n

Anchya Bamana en quelques mots

Agée de 53 ans, Anchya Bamana n’est plus novice en politique. Elle est née dedans puisque son père n’est autre que l’ancien politicien et président du Conseil général de Mayotte, Younoussa Bamana. La candidate du Rassemblement national a occupé la fonction de maire de Sada de 2014 à 2020. Anciennement rattachée au parti des Républicains, elle est exclue et décide alors de créer son propre mouvement appelé « Maoré Solidaire » à la fin de l’année 2020.

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Circonscription sud

Soula Saïd Souffou

«

Je ne suis pas entré en politique par opportunisme mais par conviction »

SOULA SAÏD SOUFFOU, CONSEILLER DÉPARTEMENTAL DU CANTON DE SADACHIRONGUI, SE PRÉSENTE AUX ÉLECTIONS LÉGISLATIVES ANTICIPÉES AVEC SA SUPPLÉANTE ZOUHOURIA FOUNDI CHEBANI. IL ÉTAIT DÉJÀ CANDIDAT EN 2022, ET AVAIT OBTENU 14% DES VOIX EXPRIMÉES.

Si vous étiez député, qu’est-ce que vous feriez pour…

Limiter l’immigration irrégulière ?

Soula Saïd Souffou : Je mettrais en place, sur les frontières de Mayotte, des navires de la marine nationale, avec l’aide de l’agence Frontex, pour boucler notre frontière qui est beaucoup trop poreuse.

Renforcer la sécurité ?

S.S.S. : La première chose à faire pour renforcer la sécurité est d’aider les polices municipales à se professionnaliser et à renforcer leurs effectifs parce qu’en réalité, la police de proximité est défaillante, faute de moyens. À Mayotte, il manque à peu près 1.200 policiers municipaux, et il faut commencer par là. La sécurité du quotidien se travaille avec les maires. Il faut également construire des commissariats là où il faut. La troisième chose est d’aider les

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DOSSIER
Soula Saïd Souffou se présente pour la deuxième fois aux élections législatives sous l’étiquette du Mouvement pour le développement de Mayotte, le MDM.

jeunes Mahorais affectés en métropole à rentrer parce qu’ils connaissent la culture locale, la langue et les recoins de notre territoire. Enfin, le quatrième point est d’éviter les opérations éphémères et mettre à Mayotte un dispositif permanent pour assurer la sécurité au lieu de mener des opérations de communication comme Place nette ou Wuambushu.

Garantir une eau quotidienne ?

S.S.S. : Je travaillerais avec les services de l’État et l’ensemble des collectivités pour renforcer le syndicat Les Eaux de Mayotte, car nous avons un problème d’investissement dans les infrastructures. Ce n’est plus un problème de ressource car les retenues collinaires sont pleines, mais le syndicat des eaux est défaillant et il ne faut pas le laisser seul.

Faire aboutir une loi Mayotte ?

S.S.S. : J’éviterais les positionnements partisans à Paris, comme on a pu le voir, afin de pouvoir discuter avec l’ensemble des partis politiques et avec le gouvernement qui sera nommé, quel qu’il soit.

Améliorer l’attractivité du territoire ?

S.S.S. : La première chose qu’il y a à faire pour améliorer notre attractivité est de lutter contre l’insécurité, les ingérences étrangères que nous avons ici, la violence qui est devenue endémique et la terreur qui s’est installée. Je suis enseignant et j’ai des collègues qui quittent notre territoire à cause des violences. Ce n’est pas acceptable. Il faut que l’État prenne ses responsabilités régaliennes pour assurer la sécurité. Ce ne sont pas les élus qui doivent le faire, mais bien l’État et nous travaillerons avec lui pour trouver des solutions. L’autre priorité doit être portée sur le développement économique et la jeunesse.

Préserver l’environnement ?

S.S.S. : La première chose est de donner les moyens aux collectivités pour qu’elles puissent s’occuper de ces questions puisqu’elles ont une compétence forte dans ce domaine. Il faut aussi accompagner toutes les associations qui œuvrent dans ce domaine, car elles font un travail formidable mais sans moyens. Il faut

Ils sont aussi candidats dans la deuxième circonscription de Mayotte :

Mansour Kamardine (Les Républicains), Madi-Boinamani Madi Mari (divers centre), Kira Bacar Adacolo (USM/Front populaire), Anchya Bamana (Rassemblement national), Daniel Martial Henry (Modem), Manon Moreno (Reconquête), Ahumad Salime (divers droite).

aussi sensibiliser les plus jeunes depuis la maternelle jusqu’au lycée. Il faut que chaque personne sache que notre environnement est notre trésor à tous. On doit le préserver pour qu’il puisse être valorisé dans le cadre du développement touristique, qui je pense est l’une des pistes pour le développement économique de Mayotte.

Développer quelles infrastructures ?

S.S.S. : Le premier sujet important est la question de la santé. L’hôpital de Mayotte est le premier malade de notre département. Il faut le soigner, faire face au désert médical qu’il y a ici, et s’assurer que le deuxième hôpital soit construit. C’est la priorité des priorités car le système de santé ne tient plus la route. La deuxième chose est le désenclavement de notre territoire. Les routes que nous avons sont héritées des années 70 et 80. Il faut désengorger Mayotte car les Mahorais sont en train de laisser leur santé sur la route. Enfin, il faut que le département, dans ses compétences régionales, puisse accompagner le rectorat et l’université pour que les jeunes mahorais qui souhaitent rester étudier ici puissent le faire. Il faut donc accompagner la création d’un campus, et d’un second site de l’université de Mayotte.

Arriver à la convergence sociale ?

S.S.S. : Il faut d’abord que nous fassions un travail avec les acteurs économiques locaux pour pouvoir avancer ensemble. Il est hors de question que nous mettions en danger le tissu économique local, sans que l’État mette aussi la main à la poche. Jusqu’à maintenant, il refuse de le faire. Nous devons travailler de façon progressive pour que l’on ait un horizon raisonnable et tenable pour les acteurs économiques et les Mahorais. n

Biographie de

Soula Saïd Souffou

Soula Saïd Souffou est enseignant de formation. Il est professeur d’histoiregéographie au lycée Younoussa-Bamana. Il est aujourd’hui âgé de 44 ans, mais il baigne dans la politique depuis sa tendre enfance. Il se souvient suivre sa mère dans les meetings et il a côtoyé les grands hommes politiques de Mayotte. Toute sa famille était engagée dans le Mouvement populaire mahorais (MPM) qui est devenu le Mouvement pour le développement de Mayotte (MDM). C’est en 2001, à l’âge de 21 ans qu’il s’engage officiellement en politique lors des élections municipales à Sada. « Je ne suis pas entré en politique par opportunisme, mais par conviction », assure-t-il.

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Circonscription sud

Daniel Martial Henry « Cette loi Mayotte n’aura de sens que si elle contribue au développement du territoire »

PRÉSIDENT DU MODEM

MAHORAIS, DANIEL MARTIAL HENRY A CHOISI DE SE

PRÉSENTER AUX ÉLECTIONS LÉGISLATIVES ANTICIPÉES DES 30 JUIN ET 7 JUILLET. EN COMPAGNIE DE JEANNE BÉBÉ, IL VISE LA DEUXIÈME

CIRCONSCRIPTION DE MAYOTTE ET AXE SA CAMPAGNE SUR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DU TERRITOIRE.

Si vous étiez député, qu’est-ce que vous feriez pour…

Limiter l’immigration irrégulière ?

Daniel Martial Henry : Nous avons investi deux élus en 2022 avec l’un qui disait qu’il serait « la voix de Mayotte » et une autre qu’elle serait la plus à même de mettre fin à l’immigration. Et la situation a dégénéré, on se retrouve avec un camp de migrants qui n’existait pas il y a deux ans. Sur ce terrain-là, il ne faut pas être démagogique, mais pragmatique. La solution est double. C’est d’abord un combat juridique avec un démantèlement des lois et des dispositifs incitatifs à l’immigration. Le droit d’asile est applicable à Mayotte depuis 2001, par exemple. Avant, on ne connaissait pas d’immigrés au titre du droit d’asile, d’où la corrélation entre les lois qui nous sont

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DOSSIER
Daniel Martial Henry est candidat dans la deuxième circonscription de Mayotte. Même s’il n’est pas investi par le camp présidentiel regroupé sous la bannière Ensemble. Il affiche les couleurs du parti dont il est le président local, le Modem.

appliquées et l’immigration. Il ne faut pas non plus d’avantages sociaux, ni d’allègement des conditions d’obtention des visas. Enfin, il faut passer par le co-développement régional. Nous avons beaucoup de Comoriens avec la nationalité française qui sont entreprenants. Pourquoi ne pas imaginer un dispositif de soutien financier pour un accompagnement à la création d’entreprises à Anjouan dans des secteurs de production intéressants pour Mayotte ? Cela leur permettra de créer des emplois chez eux. L’avantage est que les Comoriens comprendront que nous ne les haïssons pas, mais que nous sommes fatigués. Car l’immigration amène de la violence.

Renforcer la sécurité ?

D.M.H. : A court terme, la réalité nous fait se rendre à l’évidence, il faut des mesures coercitives, arrêter avec l’angélisme à la française. On considère que ces enfants sont des anges, des petits toutous qu’on ne doit pas toucher. Il faut appliquer le code pénal, même sévèrement, et peu importe l’âge. Nous n’avons pas non plus les infrastructures de formation qualifiante dans des secteurs d’avenir. Il faut donc conditionner les peines au suivi de formation en métropole. Soit l’enfant fait trois mois de prison, soit il passe deux ans de formation en métropole. Pour ceux qui ne sont pas « rattrapables » , la privation de liberté devrait se faire sous forme d’emprisonnement en métropole, loin des familles et dans des conditions climatiques différentes. On peut espérer comme ça qu’ils reprennent leurs esprits. A moyen et long terme, il faut renouer avec un développement économique réel. C’est là où le Modem serait le plus efficace. Nous nous engageons à accompagner le territoire pour ce développement et mettre en place une stratégie d’industrialisation de produits consommés localement. Je pense à la filière volailles, aux produits manufacturés, au mobilier d’équipements, à la farine de manioc, etc… Ce sont des secteurs générateurs d’emplois pour la jeunesse car ils nécessitent peu de temps de formation.

Garantir une eau quotidienne ?

D.M.H. : Il faut la retenue collinaire, car les osmoseurs nécessitent des entretiens permanents, souvent coûteux. La politique de l’eau, c’est une politique du long terme, sur cinquante ans, voire cent. Une civilisation qui n’arrive pas à maîtriser les enjeux liés à l'eau, c’est une civilisation qui est vouée à sa belle mort. Il faut aider les Mahorais sous forme de subventions à l’équipement de matériels de récupération et de stockage d’eau de pluies. Si cela coûte 3.000 euros par foyer en achat de matériel et son installation, cela sera moins cher que les osmoseurs, même si je ne dis pas qu’ils sont inutiles.

Faire aboutir une loi Mayotte ?

D.M.H. : Cette loi n’aura de sens que si elle contribue au développement du territoire. Avant de parler de loi Mayotte, on doit définir les axes de développement, étudier les marges de manœuvre

et déréglementer en adaptant la loi à nos objectifs. Nous ne concevons pas la loi Mayotte comme une baguette magique qui va faire de Mayotte une île merveilleuse, mais plutôt un moyen qui accompagne notre stratégie de développement. Cette loi, ce n’est pas au gouvernement de la faire, mais c’est nous, les Mahorais, qui devons dire ce qu’il faut mettre dedans. Pour l’instant, ils ont juste dit : « On a faim, il faut du pain » . Non, il faut dire qu’on ait tous les ingrédients et que le gouvernement nous apporte simplement la levure.

Améliorer

l’attractivité

du territoire ?

D.M.H. : On sera attractifs avec une politique cohérente de développement. Tout le monde sait que la pauvreté, le chômage ou le décrochage scolaire sont tous des maux qui génèrent de l’insécurité. Si nous avons une politique qui permet de convaincre que Mayotte peut renouer avec le développement, nous pouvons dans un premier temps encourager les investisseurs à venir sur le territoire. Il y a eu des pays qui ont été dans un marasme pire que chez nous. Madagascar, par exemple, s’est enfoncé dans la violence dans les années 2000. La première des choses qu’a fait le président Marc Ravalomanana est de vouloir relancer le développement économique de son pays en confiant un plan à un cabinet américain d’Harvard. Les études ont abouti au Madagascar action plan, qui a permis aux bailleurs de fonds de venir sur le territoire. Il y a encore des problèmes, bien sûr, mais cela montre qu’il faut passer par ce développement économique.

Préserver l’environnement ?

D.M.H. : Il faut accompagner le conseil départemental de Mayotte dans un premier temps. Il faut redéployer ses effectifs vers des services liés à l’environnement. Il faut mettre l’accent sur le reboisement et la garde forestière. Il faut créer des emplois spécifiques pour ce sujet. Cela va permettre à l’horizon de quinze ans de favoriser le ruissellement dans les nappes phréatiques et refaire vivre les cours d’eau. Il faut appliquer localement le principe du pollueur-payeur et créer une taxe spécifique pour les entreprises qui génèrent des dégradations. Il faut développer des unités de recyclage sur le territoire.

Développer quelles

infrastructures ?

D.M.H. : L’infrastructure numéro 1 est la construction d’un second bâtiment du Département à Combani et d’une sous-préfecture. Le village deviendrait ainsi un pôle administratif et économique du versant ouest de Mayotte. Cela permettrait d’y déployer le personnel du Département habitant dans l’ouest pour éviter une convergence vers Mamoudzou, source d’embouteillages. L’activité économique est très impactée par ces bouchons. Bien sûr, il faudra aussi faire sortir de terre des projets déjà ciblés, le second hôpital de Combani, les nouvelles brigades de gendarmerie ou la seconde prison. Mon deuxième projet est la construction d’hôtels avec la

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création d’un établissement public. Il faut une agence d’investissement avec une politique de partenariat public-privé pour convaincre des investisseurs extérieurs. Car, pour l’instant, les grands groupes ne veulent pas s’implanter à Mayotte du fait de nos difficultés. Il faut également une compagnie aérienne mahoraise dans laquelle les collectivités seraient les premiers actionnaires, puis au bout de huit à dix ans, la compagnie deviendrait 100% privée. Il faut aussi une banque de développement local qui pourrait apporter des financements de quasifonds propres à des entreprises-clés. Elle se ferait rembourser au fur et à mesure. A l’horizon de quinze ou vingt ans, elle deviendrait privée.

Arriver à la convergence sociale ?

D.M.H. : Elle se présente à mes yeux sous deux façons. Sur la solidarité nationale, conformément au pacte de la départementalisation de 2009, le rattrapage se ferait au gré de l’évolution

économique de Mayotte. On doit donc se développer pour financer notre action sociale. On ne peut pas faire de rattrapage social à Mayotte si on ne développe pas notre économie. Sinon, les aides sociales qui sont une exception en métropole seront généralisées à Mayotte. Deuxièmement, nous devons être en capacité de définir nous-même comment accompagner notre population vulnérable en prenant en compte nos dimensions sociale et culturelle. La population mahoraise est une population débrouillarde, il y a celles et ceux qui font les brochettes, la pêche, l’agriculture vivrière, le marché de la rue. Ces gens-là doivent être accompagnés pour une insertion économique. Il serait judicieux de mettre un financement collectif ou individuel adapté à la réalité locale. L’exemple du shikowa (tontine) est parlant. Beaucoup de Mahoraises arrivent à s’équiper grâce à ce système. On pourrait l’institutionnaliser ou le bancariser. n

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DOSSIER

Ils sont aussi candidats dans la deuxième circonscription de Mayotte :

Mansour Kamardine (Les Républicains), Madi-Boinamani Madi Mari (divers centre), Kira Bacar Adacolo (USM/Front populaire), Anchya Bamana (Rassemblement national), Soula Saïd Souffou (MDM), Manon Moreno (Reconquête) et Ahumad Salime (divers droite).

Biographie

de Daniel Martial Henry

Président ou pas président du Modem ? Daniel Martial Henry l’assure, le chef d’entreprise de 52 ans garde sa fonction au sein du parti de François Bayrou, ce dernier étant l’un des composants de l’alliance Ensemble avec Renaissance et Horizons. Le doute a subsisté quand le fils du docteur Martial Henry a présenté sa démission à la direction du parti afin « d’être plus en phase avec la population ». « L’état-major m’a appelé pour que je reste et m’a assuré qu’il n’y aurait pas d’investiture Ensemble dans ma circonscription », raconte celui qui se présente finalement avec les couleurs du Modem. De fait, l’un de ses concurrents, Madi-Boinamani Madi Mari, a le soutien de Renaissance au niveau local, sans avoir non plus l’investiture Ensemble.

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Circonscription sud

Ahumad Salime

« Il ne faut pas traiter le problème de l'immigration avec passion, mais avec intelligence »

AHUMAD SALIME EST CANDIDAT DIVERS DROITE DANS LA DEUXIÈME CIRCONSCRIPTION DE MAYOTTE AUX ÉLECTIONS LÉGISLATIVES QUI AURONT LIEU LES DIMANCHE 30 JUIN ET 7 JUILLET. SOUS LA BANNIÈRE DU FRONT DES PATRIOTES DE MAYOTTE, CELUI QUI A LONGTEMPS DÉFENDU POLITIQUEMENT LA CAUSE ENVIRONNEMENTALE EN S’ENGAGEANT POUR LES VERTS, AVANT UN REVIREMENT AUPRÈS DU PARTI SOLIDARITÉ ET PROGRÈS, A DÉCIDÉ DE SE PRÉSENTER AUX ÉLECTEURS SANS ÉTIQUETTE, NOTAMMENT MOTIVÉ PAR LA LUTTE CONTRE L’INSÉCURITÉ.

Si vous étiez député, qu’est-ce que vous feriez pour… Limiter l’immigration irrégulière ?

Ahumad Salime : C'est très simple. Je propose qu'on régularise tous les étrangers qui sont à Mayotte, ceux qui sont déjà là. Car il y a des gens qui méritent d'être régularisés. Il y en a, ça fait quarante ans qu'ils sont là, qu'ils ont apporté des choses à Mayotte, de la valeur positive pour Mayotte. Donc, on ferme les frontières et on régularise tous ceux qui sont dedans. Après, les nouveaux arrivants, eux, on leur

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DOSSIER
Ahumad Salime (divers droite) se présente aux élections législatives avec Boinariziki Abdallah Assani (à droite) comme suppléant.

demande de rentrer avec un visa. Face à un robinet qui coule, il ne faut pas essuyer l'eau, mais fermer le robinet d'abord. Il faudrait donc fermer les frontières pendant deux ans, on régularise ceux qui sont là, certains sont même nés ici et sont bloqués. Le « rideau de fer » déployé actuellement, ce n'est pas assez pour fermer les frontières. Il faut responsabiliser et donner les moyens aux maires qui habitent dans les zones où les gens rentrent de contrôler les entrées. Sans pour autant utiliser une méthode musclée. Il faut les moyens humains de dissuader. Et une autre solution à long terme, c'est de réellement sanctionner l'État comorien et développer les Comores. Si les gens viennent ici, c'est pour deux choses : l'éducation et les soins, notamment pour les femmes enceintes. Il faut que les écoles, les dispensaires et les hôpitaux se développent là-bas, et on réduira de deux tiers l'immigration ici. Il ne faut pas traiter le problème de l'immigration avec passion, mais avec intelligence.

Renforcer la sécurité ?

A.S. : Il faut passer par l'application des lois. Pour régler le problème de l'insécurité, il y a les sanctions. Les jeunes ne sont pas sanctionnés. Il va falloir aller à Paris et demander à la rigueur qu'il y ait une loi spécifique pour permettre aux jeunes qui n'ont pas été formés, qui sont en oisiveté, d'être sanctionnés. Il n'y a pas de sanction, c'est pour cela que la délinquance est là. Aujourd'hui, il n'y a pas de liberté de circulation à cause de la peur de circuler, notamment de nuit, il faut trouver des solutions, former ces jeunes. Certains disent que cette violence vient de l'immigration. Je ne veux pas qu'on rentre dans l'excès, il y a deux types d'immigrés : il y a les immigrés légaux, car un pays ne peut pas vivre en autarcie, Mayotte ne peut pas vivre sans la région et les étrangers. Il faut une immigration positive et choisie. Mais maintenant, je suis pour la fermeté à l'encontre des descendants d'immigrés qui sont là et qui sabotent Mayotte. Pour l'instant, je trouve que la législation est trop laxiste. Il faut former les jeunes qui veulent être formés, je pense que c'est important. Je n'ai pas le remède miracle, mais il est temps que nous expliquions que trop, c'est trop. Nous avons envie de vivre dans une île en paix.

Garantir une eau quotidienne ?

A.S. : Le problème de l'eau, c'est un problème très facile à régler. Il suffit, et je le propose depuis longtemps, qu'on crée deux sortes de robinets. Des robinets bleus, d'eau potable, et des robinets d'une autre couleur, d'eau non potable. Quand les Mahorais veulent laver leur voiture, faire la vaisselle, la lessive, ça ne sert à rien d'utiliser l'eau potable. Il faut donc refaire les canalisations partout. Une chasse d'eau, c'est dix litres pour une personne, ça ne sert à rien d'utiliser de l'eau potable et de la jeter dans les toilettes. Il faut prendre de l'eau inutile, comme celle salée de l'usine de dessalement. Puis aussi, il faut qu'il y ait au moins trois retenues collinaires. Il faut renforcer celles existantes, et en construire

une autre au Sud. Il faut aussi un retour à la nature, c'est-à-dire ne plus déboiser les zones au bord des rivières. Il faudrait faire des bassins en parallèle pour stocker l'eau. Parce que là on vient de faire quatre mois intenses de pluie, mais ça n'a pas été gardé. On va encore avoir des coupures d'eau. Il suffit de faire des bassins en plus des retenues collinaires.

Faire aboutir une loi Mayotte ?

A.S. : Il faut d'abord sensibiliser tous les députés de métropole et les autorités sur les vrais problèmes de Mayotte. Car là-bas, ils ne sont pas au courant des vrais problèmes de Mayotte. Je me rappelle, quand j'étais chez les Verts, je demandais cent affiches pour faire campagne à Mayotte. On m'a dit que cent, cela faisait beaucoup, et qu'on allait m'en donner une dizaine. Je répondais que non, Mayotte avait besoin de centaines d'affiches. Cela montre qu'en métropole, ils ne sont pas sensibilisés. Beaucoup de ministres arrivent ici, en vingt-quatre heures, ils ne voient pas Mayotte. Les Mahorais ont besoin de la métropole, et les métropolitains ont besoin de Mayotte, par exemple au niveau stratégique. Si la France perd Mayotte, la France n'est plus une puissance. Et Mayotte a besoin de l'administration, de la technologie française.

Améliorer l’attractivité du territoire ?

A.S. : Il faut développer le tourisme, c'est ça le plus important. Deuxième chose, réguler le problème d'insécurité. Puis développer l'économie. Mayotte ne peut pas vivre sous perfusion métropolitaine. Le tourisme peut apporter de l'argent à Mayotte. Il faut redorer l'image de Mayotte en montrant que Mayotte, ce n'est pas seulement la délinquance, ce n'est pas seulement la violence. Ce sont aussi les plages, c'est aussi l'ylang-ylang. Il y a un tourisme à développer. Par exemple, Mayotte est un des seuls territoires français musulmans. Pendant le mois de ramadan, on pourrait accueillir des touristes des pays environnants. Le tourisme ne peut pas venir que de métropole, car c'est loin, il faut aussi qu'il vienne de La Réunion, de la région. Les Qataris pourraient venir par exemple.

Préserver l’environnement ?

A.S. : Pour préserver l'environnement, il faut d'abord renforcer la forêt mahoraise, c'est-à-dire multiplier la reforestation de Mayotte. Je propose qu'on renforce chaque commune avec des bois, mais qu'on utilise des arbres médicinaux. Il pourrait même il y avoir un concours sur le modèle de Mayotte fleurie pour les arbres médicinaux. Chaque maire qui a fait beaucoup de reboisement, il faudrait qu'il ait des aides de la part de l'État, pour encourager la protection de l'environnement, la reforestation de Mayotte. Il faut aussi refaire des lois sur les sachets plastiques, car il y a déjà des lois, mais les gens partent ailleurs et en ramènent plein. Donc il faut des sanctions. Puis il faut développer le tourisme, mais le tourisme à la mauricienne, c'est-à-dire pas un tourisme de masse, car ce n'est pas bon pour la nature, mais des

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petites unités touristiques. Puis, il faut aussi renforcer la coopération. Mayotte ne peut pas s'en sortir toute seule, elle doit coopérer avec les Comores et avec Madagascar, par exemple pour la viande. Si Mayotte veut avoir une autosuffisance en viande, il va falloir déforester et utiliser beaucoup d'eau. Donc par exemple, il faut qu'on compense ça avec la coopération avec Madagascar.

Développer quelles infrastructures ?

A.S. : En priorité, c'est surtout les routes, les transports qu'il faut développer. C'est la première chose. Beaucoup d'élus voudraient qu'on fasse des autoroutes, comme à La Réunion. Mais je pense qu'il faudrait plutôt faire des barges-navettes. Il faut deux barges Petite-Terre aller-retour, même quatre, faire un petit port ou un petit stockage à Trévani, un à Dembéni, des barges-navettes pour circuler dans l'île, ça permettra de réguler la circulation. Les autoroutes, ça ne servirait à rien. Il faudrait aussi développer les bus, comme avec des bus à étage, cela réduirait les embouteillages. Mais il faut des bonnes routes. Puis je voudrais aussi développer l'énergie solaire. On va mendier du pétrole, alors qu'on peut avoir du solaire ici. Mayotte est tout le temps ensoleillée, 24h/24. Les mairies sont obligées de

donner de l'argent aux mosquées pour payer l'électricité. Il suffirait d'y mettre des panneaux solaires pour réduire de moitié le budget de la mairie. On pourrait aussi mettre des panneaux solaires sur la prison de Majicavo. Et on pourrait même faire de l'énergie marémotrice, et à Choungui, dans la commune de KaniKéli, on pourrait faire de l'éolien.

Arriver à la convergence sociale ?

A.S. : Une fois que je serai député, je vais me battre pour faire partie de la commission des affaires sociales. L'ancien député Mansour Kamardine y était, mais j'ai l'impression qu'il n'a pas poussé le dossier à fond. Les inégalités sociales doivent être réduites. Beaucoup de jeunes sont devenus délinquants à cause de ça. Je veux une égalité sociale totale avec la métropole. Et puis il y a un lobbying à faire. En métropole, ils ne connaissent pas Mayotte. Ce lobbying n'est pas fait. Il y a une incompétence politique actuellement, il n'y a pas le patriotisme de vouloir expliquer. Il y a même des élus à Mayotte qui ne sont pas fiers d'être français, beaucoup sont là uniquement en tant qu'élus gestionnaires, mais se fichent de la culture française. Ils ne sont pas amoureux de la France, c'est ça le problème. n

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DOSSIER

Ils sont aussi candidats dans la circonscription du Sud de Mayotte :

Mansour Kamardine (Les Républicains), Soula Saïd Souffou (MDM), MadiBoinamani Madi Mari (Renaissance), Kira Bacar Adacolo (USM/Front populaire), Anchya Bamana (Rassemblement national), Daniel Martial Henry (Modem), Manon Moreno (Reconquête).

Biographie

d’Ahumad Salime

Âgé de 59 ans, Ahumad Salime se présente sans étiquette, sous la bannière du Front des patriotes de Mayotte. Il ne s’alliera ni avec l’extrême-droite, ni avec l’extrêmegauche, et rejoindrait davantage le groupe « divers droite » à l’Assemblée nationale. Il lance les Verts à Mayotte dans les années 1990. En 2010, voyant que la protection de l’environnement ne provoque pas l’intérêt qu’il voudrait, notamment auprès de la jeunesse, il se retire de la vie politique jusqu’en 2017, année à partir de laquelle il s’affilie au parti Solidarité et Progrès de Jacques Cheminade. Il s’est présenté quatre fois à des élections législatives au cours de sa vie, dont aux dernières, en 2022, comme candidat Solidarité et Progrès. Depuis 1995, il est secrétaire administratif, et travaille aujourd’hui à la préfecture de Mayotte au service urbanisme et environnement.

23 • Mayotte Hebdo • N°1094 • 21/06/20 24

DOSSIER

Circonscription nord

Aurélia Maillard « Notre cheval de bataille, c’est la lutte contre l’immigration »

AURÉLIA MAILLARD EST LA CANDIDATE DU PARTI DANS LA PREMIÈRE CIRCONSCRIPTION DE MAYOTTE POUR LES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES ANTICIPÉES DES 30 JUIN ET 7 JUILLET. LA DÉLÉGUÉE DÉPARTEMENTALE DU PARTI D’ÉRIC ZEMMOUR CONNAÎT ICI SA PREMIÈRE CAMPAGNE DANS CE RÔLE.

Si vous étiez députée, qu’est-ce que vous feriez pour…

Limiter l’immigration irrégulière ?

Aurélia Maillard : A Reconquête, l’immigration est notre sujet principal que ce soit à Mayotte ou en France en général. Notre cheval de bataille, c’est la lutte contre l’immigration qu’elle soit régulière ou irrégulière. Il faut la limiter au strict minimum. Nous souhaitons le retrait du droit du sol, le retrait du regroupement familial, la déchéance de nationalité pour les criminels, délinquants binationaux et les fichés S. Les criminels et délinquants n’ont rien à faire sur le territoire national, par ailleurs, les prisons sont déjà surpeuplées. Pour les étrangers au chômage depuis plus de six mois et en possession d’un titre de séjour mais, on ne renouvelle pas leur document.

Renforcer la sécurité ?

A.M. : Si on applique les mesures que je viens de citer, on aura déjà réglé une bonne partie du problème. Pour les binationaux majeurs, si on enlève la binationalité des délinquants et criminels qui sont sur le territoire, il y aurait beaucoup moins de monde et cela ferait du tri. Face à la délinquance des jeunes,

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Aurélia Maillard est la candidate Reconquête dans la première circonscription de Mayotte. Selon elle, les principales difficultés de l’île sont liées « aux conséquences de l’immigration massive ».

il faut également créer des centres éducatifs fermés pour les mineurs.

Garantir une eau quotidienne ?

A.M. : Il faut absolument investir. Des projets sont en cours, il faut les poursuivre évidemment. La deuxième usine de désalinisation me paraît obligatoire. Encore une fois, tout est lié aux conséquences de l’immigration massive. Il faut s’adapter à la population que l’on a, mais si elle évolue sans cesse et qu’on ne dispose pas de projection à 5-10 ans, les projets ne suffiront jamais. L’eau ne manquait pas à Mayotte avant qu’il y ait cette surpopulation. Quand on a un réseau qui est prévu pour 300.000 personnes et que 500.000 personnes sont dessus (N.D.L.R. l’Insee estime que la population était de 321.000 habitants au 1er janvier 2024), forcément, ce n’est pas possible. En parallèle, il faut réadapter le réseau qui est obsolète et défectueux, c’est une évidence et une urgence.

Faire aboutir une loi Mayotte ?

A.M. : Nous, on avait déjà notre « loi Mayotte », nous n’avons pas attendu d’être en campagne pour faire des propositions. En mai 2023, le député européen Nicolas Bay était venu, on avait proposé la mise en place de l’état d’urgence migratoire. Il prévoit la suppression du droit du sol, du regroupement familial, mais aussi de mettre fin à l’accès à l’école gratuite pour les étrangers et d’arrêter de leur proposer des soins gratuits sauf pour les urgences vitales. Il faut arrêter toutes les pompes aspirantes. Ce projet est une équivalence à la loi Mayotte même si on va un peu plus loin dans les propositions. La loi Mayotte contient de très bonnes choses, même si on n’a pas eu le temps de connaître tout le contenu.

Améliorer l’attractivité du territoire ?

A.M. : Déjà, il faut rendre le territoire sécurisé. Tant qu’il ne l’est pas, il ne pourra pas être attractif. Et pourtant, il le mériterait, il y a tellement de choses à développer. Mayotte est un diamant brut. Il y a plein d’entreprises à développer, le tourisme également. Il faut d’abord régler le problème de l’immigration, de la sécurité et le reste en découlera. Aujourd’hui, tous ces problèmes là en découlent, on n’a plus de médecins, les professeurs s’en vont. Ces personnes pourraient faire abstraction de tout cela, mais on ne fait pas abstraction de sa propre sécurité et de celle de ses enfants.

Ils sont aussi candidats dans la première circonscription de Mayotte : Estelle Youssouffa (Sans étiquette), Saïd Kambi (Sans étiquette), Mikhaël Saïfy (Lutte ouvrière).

Préserver l’environnement ?

A.M. : Il faut investir absolument dans des usines de traitement et de recyclage des déchets, c’est une urgence. Les déchetteries sauvages poussent un peu partout sur l’île, les carcasses de voiture, c’est pareil. Cela devient très problématique. Surtout avec les problèmes d’eau que nous avons, il y a des bouteilles en plastique partout. Tous les déchets se déversent dans la mangrove, c’est une catastrophe. Encore une fois, c’est lié à la surpopulation et donc à l’immigration.

Développer quelles infrastructures ?

A.M. : Tant que la population ne cessera d’augmenter et qu’il y aura de l’immigration, il est difficile de savoir quels seront nos besoins. Des établissements scolaires sortent de terre, c’est très bien, il faut développer cela, par exemple l’université, les lycées professionnels. Par ailleurs, le projet en cours de développer les barges qui relieraient le nord et les barges qui relieraient le sud, c’est super. Car il faut désengorger les routes alors que les embouteillages sont énormes. Il faut aussi améliorer l’état des routes qui sont déplorables.

Arriver à la convergence sociale ?

A.M. : Avec le programme de Reconquête, on propose de supprimer toutes les allocations non contributives pour les étrangers, c’est-à-dire le revenu de solidarité active (RSA), les allocations familiales, les allocations logement. Cela ferait énormément d’économies et cela permettrait à tous les Français d’Outre-mer de bénéficier des mêmes droits que les Français métropolitains. Actuellement, c’est une injustice totale, quand on voit qu’un étranger en métropole touche des allocations et qu’un Mahorais qui est chez lui n’en touche pas, ce n’est pas normal. n

Biographie d’Aurélia Maillard

Policière de la police aux frontières, Aurélia Maillard a 42 ans et vit à Pamandzi. Elle est née à La Réunion mais a grandi à Toulouse. « En 2021, quand Éric Zemmour a créé son parti, je l’ai rejoint dans l’heure qui a suivi », souligne celle qui n’avait jamais milité ou adhéré à un parti auparavant. En mars 2023, elle a contribué à créer la fédération Reconquête de Mayotte et en a été nommée déléguée départementale.

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DOSSIER

Propos recueillis par Lisa Morisseau

Circonscription nord

Mikhaël Saify « La loi Mayotte

telle qu’elle est présentée ne combat pas le bon ennemi mais nous divise »

MIKHAËL SAIFY EST LE CANDIDAT LUTTE OUVRIÈRE DANS LA PREMIÈRE CIRCONSCRIPTION DE MAYOTTE POUR LES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES ANTICIPÉES DES 30 JUIN ET 7 JUILLET. LE JURISTE DE PROFESSION, MILITANT DEPUIS DIX ANS À LUTTE OUVRIÈRE, EST POUR LA PREMIÈRE FOIS CANDIDAT À UNE ÉLECTION.

Si vous étiez député, qu’est-ce que vous feriez pour… Limiter l’immigration irrégulière ?

Mikhaël Saify : Je ne limiterai pas l’immigration irrégulière, je suis pour la liberté de circulation absolue de tous, peu importe les zones du monde. C’est totalement anachronique et vain d’empêcher des gens qui sont dans des états de souffrance et de misère de quitter leur territoire. D’ailleurs, beaucoup d’entre eux sont prêts

à mourir. Entre Mayotte et les Comores, des milliers de personnes sont mortes depuis le visa Balladur. Malgré tout, les gens continuent à traverser. On peut mettre tous les barbelés possibles, les technologies militaires les plus innovantes pour repérer les traversées, les gens continueront à se déplacer. C’est logique parce que la production étant mondialisée, des îlots de prospérité au milieu d’un continent africain totalement ravagé, cela attire.

Renforcer la sécurité ?

M.S : Je pense que si des gens ont des comportements violents, c’est parce qu’ils évoluent eux-mêmes dans un environnement qui l’est. Moi je ne suis pas hors sol, j’habite à Mtsangadoua et je travaille à Mamoudzou. Je fais ce trajet tous les jours en scooter, parfois je suis en danger. J’ai été attaqué, mes proches aussi. Je pense que les personnes qui agressent, qui caillassent, qui peuvent tuer ont un terreau fertile à la violence. S’ils vivent dans des bidonvilles et qu’ils n'ont pas d’eau, pas de nourriture, s’ils se font traquer par la police, non pas pour ce qu’ils ont fait mais pour ce qu’ils sont, comment peuvent-ils être apaisés ?

Pour assurer la sécurité, une procédure pénale existe, c’est très simple à mettre en place mais cela nécessite des moyens. Comme dans les autres domaines, nous n’en avons pas. Notre sécurité est défaillante à Mayotte, au même titre que la qualité des services publics : école,

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Mikhaël Saify est le candidat de Lutte Ouvrière, il estime que l’immigration irrégulière ne disparaîtra pas malgré les moyens engagés: “On peut mettre tous les barbelés possibles, les technologies militaires les plus innovantes pour repérer les traversées, les gens continueront à se déplacer.”

santé, loisirs, nous n’avons rien. Tout cela est un terreau très fertile pour la violence.

Garantir une eau quotidienne ?

M.S : La problématique de l’eau à Mayotte ne date pas d’hier, depuis les années 1990, il en manque. La France sait produire de l’eau. Aucune région en France, à part dans les départements et régions d’outre-mer, manque d’eau. Ce qui pose problème pour l’eau, c’est que ce sont les grands groupes capitalistes qui font la pluie et le beau temps et qui n’en ont strictement rien à faire qu’on ait de l’eau ou pas. La Société mahoraise des Eaux (SMAE) qui est une filiale de Vinci a empoché. On a eu de l’eau 18 heures sur trois jours et on a eu des factures exorbitantes à plusieurs centaines d’euros pour 18 heures d’eau sur trois jours. Cela on ne peut pas l’accepter. La seule chose qui fait qu’on pourrait en avoir, c’est la mobilisation. Le fait qu’on se réveille et qu’on lutte. Les travailleurs qui produisent l’eau pourraient prendre le contrôle des entreprises.

Faire aboutir une loi Mayotte ?

M.S : Je comprends que la population ait beaucoup d’attentes et qu’ils veulent du changement. Je comprends que les Mahorais ne veulent pas dépenser 800 € dans le caddie pour leurs courses, alors que le salaire minimum est à 1.334 € brut. Je suis juriste et j’applique les Codes. Peu importe les codes qu’on utilise, il existe toujours des dérogations pour Mayotte et elles sont toujours en notre défaveur. Je suis très méfiant quand on parle d’une loi Mayotte. Par ailleurs, la mesure phare est là encore une dérogation, la dérogation au droit du sol. Une mesure qui va encore diviser la classe des travailleurs. Cela va permettre à certains de pointer du doigt un bouc émissaire, celui qui vient ici pour avoir la nationalité et qui prend toutes nos richesses. La loi Mayotte telle qu’elle est présentée, ne combat pas le bon ennemi. Elle nous divise, elle insulte notre intelligence, elle souille notre humanité, elle ne défend pas nos intérêts. Nos intérêts, c’est uniquement la lutte de classes.

Améliorer l’attractivité du territoire ?

M.S : Si les gens n’ont pas nécessairement envie de venir à Mayotte, c’est parce qu’il n’y a pas d’eau, c’est parce qu’on a du mal à scolariser la totalité des enfants. C’est parce que si on a un problème de santé, on va poireauter toute une journée au Centre hospitalier de Mayotte et peut-être qu’on ne sera pas pris en charge. Si on a un problème d’attractivité à Mayotte, c’est parce qu’on a un chômage endémique et on n’a pas le contrôle sur la production. À Mayotte, nous n’avons que notre force de travail et nous pouvons seulement la mettre au service des capitalistes qui nous exploitent. C’est

Ils sont aussi candidats dans la première circonscription de Mayotte : Estelle Youssouffa (Sans étiquette), Saïd Kambi (Sans étiquette), Aurélia Maillard (Reconquête)

contre tous ces gens qu’il faut se battre pour que le territoire soit plus attractif. Ce que l’on demande c’est que les gens vivent dignement de leur travail.

Préserver l’environnement ?

M.S : Mayotte est un endroit significatif pour les déchets parce qu’ils ne disparaissent pas, ils sont partout à nos pieds. On les voit sur la plage, dans les rues. Sur l’environnement, la problématique ce n’est pas l’être humain, ce n’est pas le consommateur, c’est le mode de production. Par exemple, un capitaliste peut vendre son Coca dans une bouteille en plastique plutôt qu’une bouteille en verre parce que cela lui coûte moins cher, peu importe si cela vient ensuite souiller les plages du tiers-monde. Tant qu’on ne mettra pas fin à cette logique capitaliste qui gaspille et qui pollue, il n’y aura pas de solution.

Développer quelles infrastructures ?

M.S : Il faut développer le réseau d’eau, développer les routes, les usines pour éliminer les déchets, construire suffisamment d’écoles. Il faudrait développer les infrastructures de loisirs. Il faut développer le logement parce que des personnes vivent dans des bidonvilles. Il faudrait tout développer, on est dans une situation de sous-développement qui ne peut pas avoir d’autres réponses que celle-là.

Arriver à la convergence sociale ?

M.S : À Mayotte, on est discriminés et méprisés au point que le salaire minimum est inférieur à la métropole alors que la vie est plus chère ici. Cela n’a été modifié par aucun gouvernement, ni aucun député. Cela se décline dans toutes les autres prestations À Mayotte, le revenu de solidarité active (RSA) est de 317 € contre 635 € en métropole. Les pensions sont aussi plus basses ici. La convergence est donc nécessaire mais elle est insuffisante. Nous, il faut qu’on lutte pour imposer une augmentation des pensions, des allocations et des salaires. Pour que l’on puisse vivre dignement, la moindre des choses serait de les indexer aux prix. n

Biographie de Mikhaël Saify

Mikhaël Saify, 36 ans,habite Mtsangadoua dans la commune d’Acoua, il milite depuis une dizaine d'années au sein de Lutte Ouvrière. “Je fais partie d’un parti qui n’attend pas les élections pour changer le sort des travailleurs. Je crois au militantisme sur le terrain là où tout se passe et notamment sur les lieux de travail”, explique-t-il. Né à Montpellier, il déménage à La Réunion pour ses études de droit avant de s’installer à Mayotte il y a quatre ans. Actuellement, juriste au rectorat, par le passé il a multiplié les petits boulots en tant que salarié pour McDonald’s ou comme manutentionnaire entre autres.

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LISEZ MAYOTTE MAYOTTE DE A À Z (II) PAR BRUNO DE VILLENEUVE

AGRÉGÉ DE LETTRES MODERNES ET DOCTEUR EN LITTÉRATURES FRANCOPHONES, CHRISTOPHE COSKER EST L’AUTEUR DE NOMBREUX OUVRAGES DE RÉFÉRENCE SUR LA LITTÉRATURE DE L’ÎLE AUX PARFUMS, NOTAMMENT UNE PETITE HISTOIRE DES LETTRES FRANCOPHONES À MAYOTTE (2015) DONT IL REPREND, APPROFONDIT ET ACTUALISE, DANS CETTE CHRONIQUE LITTÉRAIRE, LA MATIÈRE.

Mayotte de A à Z (2011) est un ouvrage en deux volumes. Après le « Grand guide illustré, encyclopédique et culturel », on découvre un « Grand guide illustré, encyclopédique et touristique ». Par conséquent, l’auteur entend guider son lecteur dans l’île aux parfums. Dans ces deux guides, l’image est prioritaire, même si elle apparaît cantonnée à l’illustration, mais c’est sans doute davantage un moyen de dire, dès le titre, sa présence. L’image et le texte sont ensuite encyclopédiques, c’est-à-dire qu’ils prétendent faire le tour de Mayotte. Enfin, dans l’ouvrage précédent, ils étaient culturels, c’est-à-dire tournés vers

les Mahorais, ils sont à présents touristiques, c’est-à-dire tournés vers les non-Mahorais qui se rendent à Mayotte et souhaitent la découvrir.

Il nous semble important ici de dire un mot de l’histoire du tourisme, car il a longtemps été culturel avant de changer de paradigme avec la société de consommation et ses complexes hôteliers – mais est-ce à dire hospitaliers ? - qui ne laissent rien voir ou presque du pays dans lequel ils se situent. Le grand tour était, au XIXe siècle, le stade ultime de l’éducation et consistait, en Europe, à se rendre, par exemple, en Italie pour parfaire ses humanités classiques, de même que les Romains achevaient leur éducation en Grèce. Il nous semble que c’est à un tel tourisme culturel que Bruno de Villeneuve fait référence, un tourisme encyclopédique, le point de jonction entre les deux étant le thème du voyage qui forme. La devise change, mais dans la continuité : « Pour accroître le poids de vos connaissances ». Bruno de Villeneuve propose un nouveau tour de A à Z, ce qui indique sa volonté d’approfondissement, manifeste son originalité, mais ne va pas sans redondances. Nous voyons surgir deux types d’entrée, l’une que nous appellerions volontiers métropolitaine à la différence d’une autre que nous nommerions mahoraise. Prenons l’exemple de la dernière lettre de l’alphabet latin : « Z ». Bruno de Villeneuve y propose deux entrées : « Zébu » d’une part et « Zygomatique » de l’autre. La première entrée est digne d’une encyclopédie classique. Elle met en valeur le bovin emblématique de Mayotte. Quant à la seconde, elle relève plutôt de l’encyclopédie parodique, à la manière de Bouvard et Pécuchet. Les

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LITTÉRATURE

zygomatiques sont en effet les muscles du sourire. Toutefois, l’entrée parodique est peut-être la plus profonde, car c’est elle qui esquisse une méditation interculturelle inattendue manifestant l’originalité de la vision du monde de l’auteur : « Enfin, pour achever ce paragraphe, je ne résiste pas de vous offrir [sic] cette dernière définition, qui trouve pleinement sa place dans ce paragraphe du rire et de l’humour. S’il vous reste un peu de souffle après tous ces rires, il s’agit de définir le mot ‘tourisme’. Ce texte aurait pu être avec ce mot, à la lettre ‘T’, mais vu qu’il n’est pas très valorisant, il est préférable à cet emplacement, jugez plutôt : ‘Le tourisme est une activité consistant à transporter des gens qui seraient mieux chez eux, dans des endroits qui seraient mieux sans eux !’ Si la caricature est bien présente, il faut reconnaître qu’il n’y a, malheureusement, pas que du sarcasme, mais un soupçon de vérité par rapport à certains touristes rencontrés à Mayotte ! Qu’en pensez-vous ? C’est beau, non ? Alors, par pitié, ne ressemblez pas à ces personnes-là. Soyez responsables de vos actes. Respectez aussi bien les Mahorais que la nature. Un grand merci par avance pour notre île. » (p. 267)

Les ultima verba du livre sont une mise en garde écologique qui garde le sourire. Dans ce deuxième volume, c’est notamment l’effort étymologique qui retient notre attention. Nous sommes aussi requis par les notices qui nous donnent des connaissances sur la maison d’édition fondée par l’auteur. Lisons ainsi celle inititulée « Ylang images ». Elle répond à cinq questions :

- « Que vient faire une maison d’édition mahoraise dans cet ouvrage ? » (p. 258)

- « Depuis quand cette maison existe-t-elle ? » (p. 258)

- « Que représente son logo orangé ? » (p. 258)

- « Pourquoi l’édition est-elle si difficile à Mayotte ? » (p. 259)

- « L’édition se développera-t-elle dans les années à venir ? » (p. 259)

Citons la substantifique moelle de la réponse aux deux premières questions :

« Ylang images a relancé et diversifié l’édition locale avec de nouvelles cartes postales de grande qualité, des posters, une gamme importante de jeux de cartes illustrées avec cinq modèles, comprenant plus de deux ou trois cents photographies différentes, de beaux calendriers, etc., et surtout, depuis 2008 seulement, Ylang images édite régulièrement de beaux livres, livres et guides concernant Mayotte. […] Cette maison, fondée en 2002 à Mamoudzou, a débuté par la création publicitaire puis s’est lancée dans l’édition de luxe. » (p. 258)

Nous laissons le lecteur découvrir l’étendue des livres représentés par un logo où une lune s’enchâsse dans les pétales d’une fleur d’ylang-ylang.

Christophe Cosker

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A G E N D A

W E E K E N D

Vendredi 21

16h

Vendredi 21

18h

Vendredi 21

18h

Vendredi 21

19h30

Vendredi 21

19h30-00h

REJOIGNEZ NOUS SUR

Soirée Karaoké & Jeux

Sada | Entrée payante

Fête de la musique au Coco Lodge

M’tsamboro

NBL3B vous invite à la Fête de la musique plage des 3 baobabs

Fête de la musique au Cocobeach Hamjago

Pass’1'2'ground et la Ville de Mamoudzou vous invite à la Fête de la musique

Salle des fêtes / Passamaïnty

@mayottehebdo
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A G E N D A

W E E K E N D

Samedi 22

8h-13h

Samedi 22

8h30-12h30

Samedi 22

9h-15h

Samedi 22

14h

Samedi 22

14h

Samedi 22

14h-15h30

REJOIGNEZ NOUS SUR

Marché festif d’Hajangoua

Festival les arts dansés

Pôle d’Excellence Rurale de Coconi

Tournoi de beach foot

M’tsangamouji / Plage de Tanaraki

Kermesse

MJC de Kani- Kéli

Festival Hippocampus du spectacle vivant

Musical plage | Entrée payante

Atelier lecture et écriture d’extrait d’ouvrage

Médiathèque de Chirongui

@mayottehebdo
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W E E K E N D

Programme ciné du week-end

AU PÔLE CULTUREL DE CHIRONGUI

VENDREDI 21/06/2024 :

17H : BAD BOYS RIDE OR DIE

19H : FURIOSA : UNE SAGA MAD

MAX

SAMEDI 22/06/2024 :

11H : LES ENFANT QUI VOULAIT

ÊTRE UN OURS

17H : KOUNGOU

20H : BAD BOYS RIDE OR DIE

DIMANCHE 23/06/2024 :

11H : LES 4 ÂMES DU COYOTE

14H : KOUNGOU

17H : FURIOSA : UNE SAGA MAD

MAX

20H : CHIEN BLANC

REJOIGNEZ NOUS SUR

ALPA JOE

VENDREDI 21/06/2024 :

10H : UN P'TIT TRUC EN PLUS

13H : MYSTÈRE SUR LA COLLINE AUX

GÂTEAUX

16H : BAD BOYS RIDE OR DIE

19H : PARADIS PARIS

SAMEDI 22/06/2024 :

10H : TUNNEL TO SUMMER

13H : SALEM

16H : BAD BOYS RIDE OR DIE

19H : KOUNGOU

DIMANCHE 23/06/2024 :

10H : MYSTÈRE SUR LA COLLINE AUX

GÂTEAUX

13H : TUNNEL TO SUMMER

16H : BAD BOYS RIDE OR DIE

19H : THE BIKERIDERS

G E
A
N D A
@mayottehebdo
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Pouvoir adjudicateur

Communauté d’Agglomération du Grand Nord de Mayotte

Impasse Bouyouni Maternelle 97650 BANDRABOUA

E-mail : ben-bacar.bacar@cagnm.

AVIS DE MARCHÉ - FOURNITURES

fr

Objet du marché

Organisation de marchés paysans sur le territoire de la CAGNM

Caractéristiques

Type de procédure : Procédure adaptée - Ouverte.

Lots

LOT N° 1 :

Description succincte

Location de chapiteau

Quantité ou étendue

Voir le DCE

LOT N° 2 :

Description succincte

Location d’un système de

sonorisation

Quantité ou étendue

Voir le DCE

LOT N° 3 :

Description succincte

Services de loisirs multi-activités

Quantité ou étendue

Voir DCE

LOT N° 4 :

Description succincte

Location de poneys

Quantité ou étendue

Voir DCE

LOT N° 5 :

Description succincte

Location de trottinettes électriques

Quantité ou étendue

Voir DCE

Durée du marché

1 an renouvelable trois fois 1 an, soit une durée maximale de 4 ans

Modalités d'attribution

Voir le dossier de consultation (DCE)

Critères de sélection

Voir la DCE

Date limite

Date de clôture : Mercredi 10 juillet

2024 - 11:00

Date d'envoi du présent avis 19 juin 2024

TOUTE L’ACTUALITÉ DE MAYOTTE AU QUOTIDIEN

Diffusé du lundi au vendredi, Flash Infos a été créé en 1999 et s’est depuis hissé au rang de 1er quotidien de l’île.

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MAGAZINE D’INFORMATION

NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE

Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros

7, rue Salamani

Cavani M’tsapéré

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Tél. : 0269 61 20 04 redaction@somapresse.com

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Laurent Canavate canavate.laurent@somapresse.com

Directeur de la rédaction

Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com

Rédactrice en cheffe

Raïnat Aliloiffa

# 1094

Couverture : LÉGISLATIVES : LES PROJETS DES CANDIDATS (PART 1)

Journalistes

Raïnat Aliloiffa

Alexis Duclos

Saïd Issouf

Marine Gachet

Lisa Morisseau

Direction artistique

Franco di Sangro

Graphistes/Maquettistes

Olivier Baron, Franco di Sangro

Commerciaux

Cédric Denaud, Murielle Turlan

Comptabilité

Catherine Chiggiato comptabilite@somapresse.com

Première parution

Vendredi 31 mars 2000

ISSN 2402-6786 (en ligne)

RCS : n° 9757/2000

N° de Siret : 024 061 970 000 18

N°CPPAP : 0125 Y 95067

Site internet www.mayottehebdo.com

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