Mayotte Hebdo n° 1058

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LE MOT DE LA RÉDACTION

DE L'EAU !

Il devient de plus en plus difficile de vivre convenablement à Mayotte, à cause de la crise de l’eau. Il se murmure même que certains préparent leur départ. Le soleil, la plage, et la convivialité des Mahorais n’arrivent plus à les retenir. Mais peut-on réellement leur jeter la première pierre ? Pas vraiment. Le département qui a déjà traversé de nombreuses crises n’a pas besoin de cette mauvaise publicité. Pourtant, tous les médias ne parlent que de cela. L’attractivité du territoire est mise à mal. Encore une fois. Tous les candidats aux sénatoriales promettent de régler le problème, mais les Mahorais sont lassés des promesses que les élus ne tiennent pas. Quoi qu’il en soit, ce dimanche on connaîtra les deux nouveaux sénateurs. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils sont attendus au tournant.

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Raïnat Aliloiffa

tchaks

600 000 litres d’eau potable envoyés à Mayotte

Un bateau provenant de l’île de La Réunion est arrivé à Mayotte ce mercredi 20 septembre. À son bord, 400 000 bouteilles contenant 600 000 litres d’eau potable. Mais toute la population ne pourra en bénéficier. Ce premier convoi est destiné à la population fragile recensée par les centres communaux d’action sociale. Elles seraient environ 50 000. Cela comprend les personnes de plus de 65 ans, les femmes enceintes, et les enfants de moins de deux ans. Il est prévu deux litres par jour pour les adultes et un litre par jour pour les enfants. Mais cette quantité d’eau ne suffira pas à tenir jusqu’à la prochaine saison des pluies. En réalité, les personnes concernées ne pourront tenir qu’une semaine avec. Un autre bateau devrait arriver en octobre. Il transportera 800 000 bouteilles d’eau pour 1,2 millions de litres.

Le ministre Philipphe Vigier à Mayotte la semaine prochaine

Aux grands maux les grands moyens. Le ministre délégué aux Outre-mer, Philippe Vigier, sera à Mayotte la semaine prochaine. Pour l'instant, ni le ministère, ni la préfecture n'ont annoncé de dates précises. Mais le calendrier n’est pas choisi au hasard puisque le ministre sera sur le territoire afin d’assister à la distribution des bouteilles d’eau qui sont importées de La Réunion.

Crise de l’eau : Deuxième manifestation le 27 septembre

La première mobilisation organisée pour dénoncer la crise de l’eau n’a pas été un franc succès. Environ deux cents personnes ont répondu à l’appel. Mais les organisateurs de ce mouvement n’en démordent pas. Une deuxième manifestation est prévue le 27 septembre à partir de 8h, sur la place de la République à Mamoudzou. Les habitants sont invités à se rendre en masse afin de dénoncer les conditions précaires dans lesquelles ils vivent depuis le début des coupures d’eau.

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La fête de maoulida la semaine prochaine

La célébration de la naissance du prophète Mohamed est un jour important pour les musulmans de Mayotte. Tous se rassemblent dans les mosquées pour prier, manger, et passer un moment de convivialité ensemble. Et le lendemain est un jour férié dans le département. Cette année, ce sera le 28 septembre selon le calendrier lunaire.

Vers une baisse du taux de natalité à Mayotte

Mayotte est connue pour être la première maternité de France et d’Europe. En 2022, on a frôlé les 11 000 naissances. Un record pour le territoire. Cette année, le nombre de naissances sur le territoire est en baisse selon l’Institut national de la statistique et des études économiques de Mayotte. Entre les mois de janvier et juillet 2023, on constate une diminution de 2,5%. Malgré ce chiffre, les nouveaux nés sont nombreux à Mayotte, bien plus qu’ailleurs en France.

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LU DANS LA PRESSE

Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale

À MAYOTTE, DES COUPURES D’EAU DEUX JOURS SUR TROIS, LA SÉCHERESSE ESTELLE LA SEULE COUPABLE ?

MAYOTTE - Cela fait maintenant plus de dix jours que les Mahorais et Mahoraises vivent à un rythme inédit de coupures d’eau. Déjà rationnée de longue date sur l’île, l’eau courante n’est désormais disponible qu’un jour sur trois, selon un roulement entre les communes établi depuis le début du mois par la préfecture.

Face à l’urgence et à la colère des habitantes et des habitants, le gouvernement a annoncé la distribution, à partir du 25 septembre, de bouteilles d’eau aux personnes les plus fragiles, ainsi que l’installation d’urgence de citernes d’eau potabilisée. Un porte-conteneurs affrété par l’État transportant 600 000 litres d’eau potable est également parti dans la nuit de vendredi à samedi de La Réunion ; il devrait atteindre Mayotte le 20 septembre. Mais comment les autorités en sont-elles arrivées à prendre la décision de couper l’eau deux jours sur trois dans un département français ? « La saison des pluies 2022-2023 est la plus sèche de l’histoire de Mayotte après celle de 1997 » , répond la préfecture sur son site officiel (1). Entre décembre et avril, il a plu en moyenne 25 % de moins que la normale.

Sécheresse historique

Un réel problème, puisque l’île dépend principalement de cette pluie pour s’approvisionner en eau potable. En effet, l’eau qui arrive au robinet des Mahorais vient à 60 % des eaux de surface et à 30 % des eaux souterraines. La pluie agit directement sur ces deux ressources, que ce soit pour alimenter les rivières, les retenues collinaires ou les aquifères (nappes d’eau souterraine).

« La sécheresse exceptionnelle que vit Mayotte est aggravée par le changement climatique, qui raccourcit la saison des pluies et diminue son intensité » , indique au HuffPost l’hydrogéologue indépendant Emmanuel Soncourt. Pour autant, les experts soulignent que le manque de pluie est loin d’être la seule explication de cette crise. En effet, sécheresse

ou pas, à Mayotte, l’essentiel de la pluie tombe sur une très courte période, entre décembre à mars. Le relief de l’île conduit cette eau à ruisseler, au lieu de pénétrer dans les sols. Il faut donc s’organiser pour la stocker et structurer sa gestion pour en fournir aux habitantes et habitants tout au long de l’année.

Méconnaissance des réserves d’eau

Pour gérer l’eau, il est nécessaire de suivre l’évolution des réserves, comme c’est le cas dans chaque département français à l’aide des données du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières, le service géologique national français) et des agences de l’eau, organismes publics chargés de la gestion de la ressource.

Problème : « Mayotte ne dispose pas, contrairement aux autres départements ultramarins, d’un office de l’eau » , pointe du doigt, dans son dernier avis, la mission régionale d’autorité environnementale de Mayotte (MRAE), qui émane du ministère de la Transition écologique. L’hydrogéologue Jean-Lambert Join, professeur à l’université de La Réunion, remarque ainsi « qu’aucune donnée sérieuse n’est disponible pour le département » « Dans le SDAGE 2022 (document public de référence sur la gestion de l’eau du territoire), je lis qu’entre 2016 et 2021 “ les premières pierres d’un futur observatoire de l’eau ” ont été posées. Pourtant, aujourd’hui, il n’y a toujours rien » , relève le chercheur.

De son côté, le BRGM dispose de 17 points d’évaluation du niveau d’eau souterrain sur l’île et travaille à collecter des données depuis 1992. Pour autant, « en raison de la complexité du milieu volcanique, on ne connaît pas précisément les réserves en eau souterraines de Mayotte » , concède Jean-Marc Mompelat, directeur des actions territoriales délégué à l’Outre-mer au BRGM. « Nous pourrions aller plus loin dans la valorisation de la ressource en eau souterraine, ce

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Par Maëlle Roudaut pour Huffington Post. Publié le 16/09/2023-Crédits photo : Philippe Lopez/AFP
L’accès à l’eau courante est restreint sur l’île depuis le début du mois de septembre. La sécheresse n’explique pas tout, soulignent les hydrogéologues contactés par « Le HuffPost ».

qui permettrait de diminuer la vulnérabilité de l’île aux périodes de sécheresse » , estime-t-il.

Infrastructures insuffisantes et réseau vétuste Une vulnérabilité qui ne date pas de la sécheresse enregistrée au cours des derniers mois. En temps normal, 30 % de sa population n’a pas accès à l’eau courante. Et ces cinq dernières années, la distribution en eau potable a été interrompue « une à deux fois par semaine sur toute l’île en fin de saison sèche et en début de saison des pluies » , rapporte la chaîne Outre-mer La 1re. Par le passé, l’île a déjà connu des « crises de l’eau » en 1997, en 2017 et en 2020.

À chaque épisode de sécheresse, des réponses ont certes été apportées par les pouvoirs publics : création d’une usine de dessalement en 1998, réalisation des deux retenues collinaires en 1999 et 2001, généralisation des « tours d’eau » en 2017… Mais à nouveau, la MRAE de Mayotte note que « ces actions ont chaque fois été engagées dans l’urgence » et leurs mises en œuvre ont été « plus ou moins rapides et surtout plus ou moins abouties »

L’usine de dessalement inaugurée en 1998 (qui fournit 8 % de l’alimentation en eau de l’île) n’a jamais tourné à plein régime, la faute à des problèmes de conception. Pire, les travaux d’extension décidés en 2017 ne sont toujours pas achevés. Une campagne

de forage doit être entamée cette année, après 10 ans sans travaux de ce type.

Plus encore, « le réseau en eau de l’île connaît 30 à 35 % de fuites » , relève l’hydrogéologue Emmanuel Soncourt, là ou un réseau d’eau optimisé connaît environ 10 à 20 % de fuites. « Réduire d’au moins de 10 % ces fuites ferait une différence sans équivoque face à la crise dans laquelle se trouve le département, d’autant plus que sa population ne cesse d’augmenter et, avec elle, la demande en eau potable » , estime le spécialiste. Chaque année depuis 2012, la population de l’île augmente de 3,8 % selon l’Insee.

Déforestation et changement climatique n’arrangent rien

Au-delà de l’état des infrastructures, un autre facteur de crise est pointé du doigt par les experts : la déforestation, qui réduit la capacité des sols à absorber l’eau de pluie – et nuit donc à l’état des réserves souterraines. « En 2017, une étude de l’ONF indiquait qu’une centaine d’hectares de forêt permettrait de mettre à disposition 400 000 m3 d’eau par an en saison sèche, soit une dizaine de jours de consommation de l’île » , rappelle l’Association des naturalistes de Mayotte dans un communiqué publié le 8 septembre dernier, avant de constater qu’ « aucune action de grande envergure contre la déforestation n’a cependant été menée depuis »

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DOSSIER

Sénatoriales 2023

Dix à rêver du Palais du Luxembourg

ILS SONT DIX. DIX CANDIDATS SE PRÉSENTENT AUX ÉLECTIONS SÉNATORIALES CETTE ANNÉE. MAIS SEULEMENT DEUX D’ENTRE EUX SERONT CHOISIS PAR LES GRANDS ÉLECTEURS POUR REPRÉSENTER MAYOTTE AU SÉNAT. LA CAMPAGNE EST RUDE, ET TOUS PROMETTENT MONTS ET MERVEILLES POUR SORTIR LE DÉPARTEMENT DES CRISES DANS LESQUELLES IL SUBMERGE DEPUIS DES ANNÉES. NOUS LES AVONS RENCONTRÉS ET ILS NOUS ONT CONFIÉ LEURS ESPOIRS ET LEURS PROMESSES POUR LE TERRITOIRE.

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ELECTIONS SÉNATORIALES 2023

QUELS ENJEUX POUR LES ÉLECTIONS SÉNATORIALES À MAYOTTE ?

LES DIX CANDIDATS MAHORAIS AUX POSTES DE SÉNATEURS ONT CHACUN UN PROGRAMME AMBITIEUX. INSÉCURITÉ, IMMIGRATION, CRISE DE L’EAU, TOUS LES SUJETS SONT ABORDÉS. ILS NE POUVAIENT FAIRE AUTREMENT, DANS UN TERRITOIRE CONSTAMMENT EN TENSION. UNE FOIS DÉSIGNÉS, LES PARLEMENTAIRES DEVRONT MENER À BOUT DE BRAS LES ENJEUX DE L’ÎLE AVEC LES AUTRES ÉLUS DE MAYOTTE.

Choisis par les grands électeurs, les sénateurs semblent éloignés de la population. Pourtant leur rôle est tout aussi important que celui des députés. « Le sénateur est aussi un législateur. Il participe à la conception de la loi, qu’elle soit de portée générale ou territoriale. Il le fait au même titre que les députés, tout en ayant un regard beaucoup plus marqué sur les territoires », explique Issihaka Abdillah, ancien conseiller départemental et chroniqueur de la vie politique. Et pour cause, les occupants du Palais du Luxembourg sont les élus des élus. L’une de leurs principales missions est de « représenter les intérêts des collectivités de leur territoire », précise le spécialiste. Et ceux de Mayotte sont nombreux, à commencer par la résorption de la crise de l’eau. Elle figure en haut de la liste des combats qui devront être menés par les sénateurs. « C’est primordial. Mais la crise de l’eau doit être gérée par tout le monde. J’entends par là, les communes, le conseil départemental, tous les parlementaires, et l’État, chacun dans sa compétence afin de trouver des solutions pérennes » , continue Issihaka Abdillah. Ce dernier estime que l’éducation est également une priorité à traiter rapidement. « On ne peut pas continuer à scolariser nos enfants dans des conditions aussi médiocres que celles que nous avons aujourd’hui », assène-t-il.

LES JEUX SONT-ILS FAITS ?

DES ENJEUX SUR LE LONG TERME Résoudre les problèmes rapidement est une chose, mais il ne faut pas oublier que Mayotte doit se construire durant les prochaines années et c’est tout l’enjeux de ces élections. Parmi eux, le projet de loi Mayotte. « Il faut définitivement clore ce sujet dans les dix prochains mois et adopter la loi avec des mesures claires. On ne peut pas parler de cette loi tous les six mois. C’est une perte de temps alors que nous avons besoin d’avancer et de développer ce territoire », insiste l’ancien conseiller départemental. L’île aux parfums ne peut plus vivre au rythme des crises et des mesures d’urgence. Une politique de rattrapage dans tous les domaines est donc nécessaire. « Pour cela, il faut établir un calendrier définitif pour que l’ont n’ait pas à y revenir tous les ans au grès des différents gouvernements. Il faut que l’on ait des bases pour travailler. Et cette demande doit être faite par nos élus, y compris les sénateurs. » Mais encore faut-il qu’ils soient unis et parlent tous d’une même voix pour mieux se faire entendre à Paris. Cependant, « le problème ici c’est qu’on n’a pas cela, les élus ne se concertent pas entre eux », regrette Issihaka Abdillah. Réussir à se mettre d’accord pour le bien de Mayotte et des Mahorais, c’est peut-être ça le réel enjeu de ces élections.

« Les jeux ne sont pas faits. Certains candidats sont soutenus par les grandes formations politiques, et d’autres sont connus mais ne sont pas engagés dans un parti. Mais ils ont tous besoin d’aller sur le terrain pour collecter le suffrage des grands électeurs et se faire connaitre. Quoi qu’il en soit, ceux qui seront élus le seront avec des voix pluri colores car il y aura forcément des alliances. Un parti ne peut pas gagner tout seul. », selon Issihaka Abdiillah.

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Aliloiffa
Raïnat

SÉNATORIALES 3 2 2

540 GRANDS ÉLECTEURS À MAYOTTE

510

DÉLÉGUÉS DES CONSEILS MUNICIPAUX

4 PARLEMENTAIRES

26

CONSEILLERS DÉPARTEMENTAUX

1er TOUR

51% ou plus

Un candidat est élu dès le premier tour s’il a la majorité absolue SCRUTIN

Le candidat et son suppléant doivent être de sexe différent

2ème TOUR

En cas de deuxième tour, c’est la majorité relative qui l’emporte

HISTORIQUE DES SÉNATEURS À MAYOTTE

2017 à 2023

Thani Mohamed Soilihi (LREM) et Abdallah Hassani (MDM)

2011 à 2017

Thani Mohamed Soilihi (PS) et Abdourahamane « Lajo » Soilihi (UMP)

2004 à 2011

Soibahadine Ibrahim Ramadani (UMP) et Adrien Giraud (MDM)

1977 à 2004

Marcel Henry (MDM)

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MAJORITAIRE COMPOSITION ACTUELLE DU SÉNAT
348 CRCE : 15 sièges EST : 12 sièges SOCR : 64 sièges RDSE : 14 sièges RASNAG : 3 sièges RDPI : 24 sièges LIRT : 13 sièges UC : 57 sièges LR : 146 sièges

DOSSIER

ELECTIONS SÉNATORIALES 2023

ENTRETIEN CROISÉ DE SALIM NAHOUDA ET SAÏD OMAR OILI

POUR MIEUX SERVIR

LES COLLECTIVITÉS

MAHORAISES

DEUX PARCOURS DIAMÉTRALEMENT OPPOSÉS, MAIS DEUX HOMMES BIEN CONNUS DU PUBLIC MAHORAIS. SALIM NAHOUDA, LE SYNDICALISTE CHEVRONNÉ ET SAÏD OMAR OILI, LE POLITIQUE AVISÉ. POPULAIRES

AUPRÈS DES MAHORAIS, CHACUN DES DEUX SE VEUT PORTEUR D’ESPOIR POUR LES HABITANTS DE L’ÎLE. ADEPTES D’UN CERTAIN FRANC-PARLER, LEUR PARCOURS EN POLITIQUE EST DIVERGEANT, MAIS ILS ASPIRENT TOUS LES DEUX À REPRÉSENTER LES COLLECTIVITÉS LOCALES AU SÉNAT.

SALIM NAHOUDA, 56 ANS, ACTUELLEMENT SANS RESPONSABILITÉS POLITIQUES NI SYNDICALES, ASSUME NÉANMOINS DES MANDATS SYNDICAUX AU NIVEAU LOCAL ET NATIONAL, SIÈGE À LA CAISSE D’ASSURANCE MALADIE DES INDUSTRIES ÉLECTRIQUES ET GAZIÈRES DEPUIS 2015. IL EST ADMINISTRATEUR DE TOUS LES SALARIÉS DES INDUSTRIES ÉLECTRIQUES ET GAZIÈRES DE FRANCE (MÉTROPOLE ET DOM). MEMBRE DE LA COMMISSION NATIONALE DU MÊME NOM POUR DÉFENDRE TOUJOURS LES DROITS DES SALARIÉS DE CETTE BRANCHE PROFESSIONNELLE, SALARIÉ ET CADRE D’EDM. « A CEUX QUI ONT DES DOUTES SUR MES ENGAGEMENTS, JE LEUR DIRAI QU’IL AURAIT FALLU L’AVOIR LORSQUE J’AVAIS 24 À 50 ANS. CE N’EST PAS À PRÉSENT QUE J’AI 56 ANS QUE JE VAIS CHANGER, JE RESTERAI TOUJOURS MOI-MÊME, COMBATIF, POUR LES INTÉRÊTS DE MAYOTTE ET DES MAHORAIS »

SAÏD OMAR OILI, 66 ANS, PROFESSEUR JUSQU‘EN 2022, IL VIENT DE DEMANDER SA RETRAITE POUR SE METTRE, À 100%, AU SERVICE DE SES CONCITOYENS DURANT SON MANDAT DE SÉNATEUR, S’IL A LA CHANCE D’ÊTRE ÉLU.

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Propos recueillis par SIAK

Mayotte Hebdo : Qu’est-ce qui vous a poussé à être candidat ?

Salim Nahouda : Je dirai les très nombreuses années d’action dans le mouvement syndical et social, l’expérience que j’ai acquis durant 10 ans à la tête de la Caisse de sécurité sociale de Mayotte. A travers ces expériences, j’ai compris qu’il reste encore beaucoup à faire pour assurer l’évolution de notre territoire, en matière de droits, de lois, de moyens à donner aux collectivités locales. Après le mouvement de 2018, ma réflexion m’a conduit à me positionner en vue d’une candidature à ces sénatoriales de 2023. Tout au long de ces 5 années, j’ai continué à assumer les fonctions de la CSSM, j’ai été secrétaire général d’une organisation syndicale respectée dans l’île et à mon grand étonnement, j’ai essuyé des refus systématiques à chacun de mes demandes des rendez-vous avec les ministères à Paris. Pourtant cela ne s’était jamais produit avant ces événements de 2018, j’avais la possibilité d’aller négocier et traiter directement les dossiers de Mayotte. Autre chose, sur le plan local, à l’occasion de la visite du chef de l’Etat dans l’île, à Mamoudzou où il devait prononcer un discours dans un endroit précis, l’accès m’en a été interdit en même temps que Estelle Youssouffa, l’actuelle députée. Alors même que j’étais le Président de la Caisse de sécurité sociale du département. J’ai compris que tout cela avait savamment été préparé localement dans le but d’étouffer toute expression en faveur de Mayotte et de l’intérêt d’une grande majorité de sa population. Sur cette même place, un congrès avait réuni un certain nombre d’élus et un parlementaire a déclaré dans son intervention que nous devrions d’abord obtenir la légitimité des urnes si nous voulons être écoutés. Ma réponse aujourd’hui est que le message est bien passé, je suis résolu à poursuivre mon engagement de 25 ans au service de ce territoire et de l’intérêt général, à travers l’action syndicale et les 10 ans passés aux commandes de la CCM.

Saïd Omar Oili : Je dirai qu’élu conseiller général dans le canton de Dzaoudzi-Labattoir en 2001, j’ai eu la chance et le privilège de siéger avec le Président Younoussa Bamana, en qualité de 3ème vice-président en charge de l’aménagement du territoire. Elu Président du Conseil général de Mayotte en 2004, je suis le 1 er de la génération à avoir assumé la succession du Younoussa Bamana resté inamovible à ce poste 24 années durant, avec comme premier challenge la mise en place de la décentralisation. J’ai eu donc à connaître toutes les différentes catégories de difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités locales, étant en plus, maire et Président d’une intercommunalité. En ma qualité d’élu local, je n’ai pas la possibilité d’agir sur les leviers que sont les lois, d’où ma candidature. Et, en étant sénateur, ces barrières, ces freins, qui sont les nôtres seront ma bataille au quotidien, en faveur de l’ensemble des élus mahorais. Je rappelle qu’au terme de l’article 24 de la Constitution française, le Sénat assure la représentation des collectivités

territoriales. Avec bien sûr l’Assemblée nationale, il vote la loi, contrôle l’action du gouvernement et évalue les politiques publiques. Je citerai tout simplement un adage de chez nous à Mayotte « gnoumba kwayi laliya kouji vahanou yi voujawo » . Ayant connaissance de toutes ces difficultés, je me suis dit que peut-être je serai mieux armé que d’autres pour défendre les intérêts des collectivités mahoraises qui sont nombreuses.

MH : En quoi vous serez un bon sénateur ?

S.N : Premièrement, n’étant pas issu d’un appareil politique je n’aurai pas à me limiter à des orientations dictées par d’autres, j’aurai une totale liberté dans ma démarche et la défense des intérêts de Mayotte. On le voit bien avec Estelle Youssouffa qui démontre le contraire à Paris où certains l'imaginent isolée. Pour ma part j’ai déjà commencé à travailler depuis quelque temps avec un groupe centriste au Sénat, cela me permettra d’agir à l’avenir sur toutes les questions qui se posent sur notre île. L’expérience que j’ai acquise en matière de négociation me permettra de mieux défendre les dossiers relatifs à l’évolution des budgets des collectivités locales. Il faudra beaucoup de lobbying, de ténacité pour atteindre ces nombreux objectifs. En parallèle, sur le territoire, je ne comprendrai pas que certaines organisations soient mieux loties que d’autres ou encore qu’une organisation en particulier transforme Mayotte au fur et à mesure en un territoire d’action humanitaire. Ce n’est pas avec cela que nous construirons l’avenir de cette île. C’est une démarche soutenue au niveau local par un parlementaire et je me prononce clairement contre cela, il faut mettre un terme à toutes ces gratuités qui encouragent l’appel d’air. Dans mon action de sénateur, je m'associe aux 17 maires qui concentrent sur eux toutes les demandes de nos concitoyens, ils ont besoin de moyens conséquents en investissements, action sociale et accompagnement fort des CCAS. Ce sont eux qui disposent d’une meilleure connaissance des populations qu’ils administrent. Il y a aussi les centres sociaux qui ont besoin de moyens financiers et humains sachant que le système actuel ne peut pas perdurer, jour après jour et années après années. La violence que nous vivons actuellement n’est pas tombée du ciel, elle résulte d’une organisation politique défaillante imposée depuis très longtemps et qui nous place le dos au mur aujourd’hui.

SOO : Dans la mesure où le sénateur est le défenseur des collectivités, je constate aujourd’hui toute l’ampleur des problèmes auxquels sont confrontées celles-ci, que j’ai énumérés et que j’ai présidés. La première problématique visible localement c’est leur situation financière qui demeure très préoccupantes pour les années à venir avec des charges structurelles appelées à croître, notamment à cause de la démographie, de l’alignement des points d’indice que nous impose sans notre avis, l’augmentation du SMIG, les participations aux différents syndicats … Face à cela comment élaborer des PPI (plans pluriannuels d’investissement) si on

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DOSSIER

ne connaît pas le niveau de nos ressources ? La fiscalité directe locale est 4 fois plus faible à Mayotte que dans les autres DOM à cause d’un cadastre toujours pas à jour. Par conséquent, j’avais le choix entre rester Maire ou me porter candidat au Sénat pour essayer de porter des solutions face à ce problème de ressources. Soit on continue à improviser des successions de rustines au fur et à mesure que les problèmes sont identifiés et qu’ils se traduisent en instabilité budgétaire et une insécurité pour les propriétaires. Ou, acter que le système est défaillant, ce que je dis, et amener les services de l’Etat à raisonner en termes de compensation aux collectivités. Une étude a été faite par le cabinet de M. Likonoff et on a estimé que si on prend l’exemple de la CADEMA c’est 50 millions d’euros qui feraient défaut aujourd’hui parce que le problème foncier n’a pas été résolu. Si on prend les DGF (dotations globales de fonctionnement) des collectivités, il faudra les repenser pour prendre en compte le manque de ressources fiscales directes. Dans le Figaro du mercredi 23 août 2023, qui n’est pas mon journal de prédilection, il est dit dans la page 12 que le budget de 2024 s’annonce difficile à avaler et qu’il risque de voir une hausse des taxes. Le Président du Sénat Gérard Larcher évoque même une période à risque d’accidentologie pour l’exécutif. Un tour de vis pour les dépenses publiques va arriver pour le budget 2024. Donc déjà, nous avons des difficultés avec les PEC qu’on nous complètement diminué alors que Mayotte forme la population la plus vulnérable de la République et les dotations de la politique de la ville ne sont pas à la hauteur. Cela signifie que le budget qui est en cours de négociation impose une économie de 14 milliards d’euros au gouvernement actuel. C’est une première depuis 10 ans alors que jusque-là on a plutôt connu des augmentations ! Cela est une autre raison parmi celles qui ont animé ma réflexion et mes interrogations sur le besoin ou non de rester dans ma mairie ou bien je me porte candidat pour essayer de défendre les besoins de collectivités locales en moyens financiers. Permettezvous de vous donner des exemples sur les dotations totales par habitant pour bien illustrer mon propos. La Guadeloupe compte 1572 euros contre 1566 euros en Martinique, 1427 à La Réunion, 1159 euros en Guyane et seulement 708 euros à Mayotte. Cela est tout simplement incroyable pour une population reconnue comme la plus pauvre de France et l’Union européenne. Évidemment, de par

les différents mandats électifs que j’ai occupés, je pense disposer de tous les ingrédients nécessaires pour défendre les collectivités locales mahoraises. Ce qui m’étonne dans cette affaire c’est que toutes ces informations sont connues depuis longtemps, comment se fait-il qu’il ne s’est rien passé depuis, et personne n’a osé demander pourquoi ces problèmes n’ont pas été réglés. Autre raison de ma candidature, il faut reconnaître que Mayotte est en revendications sociales de manière permanente. Toutes les grèves portent un seul slogan, l’égalité sociale. Effectivement quand on regarde le niveau du RSA (Revenu de solidarité Active) à Mayotte est de 303 euros pour une femme isolée alors qu’il est de 911 euros à La Réunion. Résultat des courses nos familles quittent notre territoire et vont s’installer à La Réunion, vivent parfois dans des conditions très difficiles mais s’imposent cela pour simplement avoir cette petite dignité. Comment sortir les collectivités locales de cette situation ? L’eau est, une fois de plus, source de grandes préoccupations quotidiennes pour les Mahorais. « Il y a un défi, celui de l’eau, je veux avec vous le relever, nous avons besoin d’un vrai plan d’investissement pour permettre des rétentions collinaires, pour permettre de répondre à ce défi de l’eau partout dans l’île. C’est indispensable et je m’y engage » , je cite là Emmanuel Macron, page de son discours à Mayotte. Je suis étonné que le nouveau ministre des Outre-mer vienne en visite à dans l’île sous la motivation de la crise de l’eau qui bat son plein mais pour ne rester que seulement quelques heures. A quand une réelle considération du gouvernement de cette situation catastrophique que nous vivons ? Cette crise de l’eau ne touche pas que l’être humain, elle impacte tous les secteurs économiques, en particulier le BTP qui est l’un des principaux moteurs de l’économie locale et de l’emploi mais aussi toutes les filières agricoles, notamment l’élevage. Une vache a besoin de boire 1000 litres d’eau par jour, comment un éleveur ne disposant pas de point d’eau sur son exploitation peut alimenter son bétail au quotidien ? Cela veut dire que ses animaux vont maigrir ou sont voués à une mort certaine, soit l’échec de cette filière. Je suis très inquiet de l’avenir économique et social de notre île, à commencer par les 6 prochains mois. Au regard des engagements pris ici et là, de la réalité des choses aujourd’hui, je suis catastrophé. Il est urgent de mettre en place un plan Marshall de l’eau pour que la population, le monde économique et

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l’éducation retrouve un fonctionnement normal. L’eau c’est la vie…

MH : Quels sujets aimeriez-vous défendre au sénat ?

S.N : Actuellement nous subissons le problème de l’eau ; tout le monde en parle. Dans les autres territoires, c’est une prérogative qui relève de la commune mais ici on a fait le choix de confier cette mission à un syndicat représentatif des 17 communes. L’organisation mise en place a montré ses limites et se trouve défaillante, par conséquent j’accompagnerai ces collectivités locales sur la position qu’elles auront choisie pour remédier la situation. Le préfet a déclaré prendre les choses en main ce qui suppose que l’Etat mobilise davantage de moyens financiers afin que les Mahorais n'aient plus à revivre la situation actuelle. Les maires affirment avoir un contact avec une entreprise en mesure de construire rapidement des usines permettant aux Mahorais d’avoir de l’eau. Je les accompagnerai sur l’ensemble de ces projets pour faire émerger ces usines le plus rapidement possible. En attendant il y a les urgences, la députée Estelle Youssouffa et l’Union des CCAS de Mayotte ont fait des demandes pour une distribution gratuite de bouteilles d’eau aux personnes malades, les enfants et les personnes âgées. Cette démarche est enclenchée immédiatement par le déblocage de moyens adéquats pour y faire face. Autre sujet qui me tient à cœur, la question de la circulation. La mobilité intérieure a causé énormément de problèmes, le tracé des routes n’a pas été fait, il est resté dans des armoires pour des temps indéfinis, et en même temps le PADD n’avait pas prévu la construction de nouvelles routes. Ma démarche tend vers un développement des transports en commun englobant l’ensemble du territoire. Il appartiendra au département et aux intercommunalités de développer les transports en commun dans l’île. Les transports scolaires actuels devront être fondus dans ce dispositif avec la mise en circulation d’un nombre conséquents d’autocars de calibre différent en fonction de la taille du réseau pour desservir l’ensemble de Mayotte, avec des horaires bien précises et la mise en place de moyens de paiement adaptés au contexte actuel pour favoriser le développement. Pour alléger la facture énergétique des Mahoraises et des Mahorais, je propose la création d’un syndicat départemental de l’énergie qui se chargera des orientations énergétiques et du développement de l’électrification rurale. C’est-à-dire qu’il reviendra à des élus locaux de définir le montant des factures du consommateur mahorais et non plus à une sociétée détenue en majorité par le département. Le secteur de la santé est préoccupant, notamment avec la compagnie aérienne de Mme Dominique Voynet destinée à favoriser les évacuations sanitaires sur La Réunion. La majorité des Mahorais critique ce dispositif qui profite à 80 % à des non assurés sociaux. Je le dis et je le répéterai : Mayotte n’a nullement besoin de ça et l’argent public à Mayotte ne doit pas être affecté à cela. L’argent de la sécurité

sociale doit être dirigé vers les assurés sociaux et s’il en prend à l’Etat l’envie de poursuivre son action humanitaire, alors qu’il se trouve d’autres financements. Au moment de la mise en place du système de santé actuel en 2004, je m’étais opposé à la gratuité des soins, mais les décideurs en ont décidé autrement. Désormais, cela fait partie de mon combat car le Mahorais doit accéder à des soins de qualités comme tout autre Français. Autre combat et non des moindres, les ressources financières des collectivités locales. Celles-ci veulent investir, accompagner leurs populations en matière d’actions sociales. Il leur faut des fonds propres lesquels proviennent soit des taxes sur les entreprises soit de l’octroi de mer. Le débat actuellement en vogue dans certaines collectivités ultramarines porte sur la suppression de cet octroi de mer. Dans la mesure où la quasi-totalité des communes mahoraises sont rurales, il convient d’interroger les pouvoirs publics sur la compensation qui leur sera accordée afin qu’elles puissent disposer de fonds propres à affecter au financement de leurs projets. Il y aussi la demande du monde économique en faveur de la transformation de Mayotte en zone franche globale. Qui dit cela sous-entend qu’il n’y a plus de cotisations sociales ni fiscales. Le retrait de ces 2 éléments constitue une suppression de ressources et fonds propres des communes et du département qui abritent ces entreprises. Quelle organisation mettre en place pour permettre à ces collectivités de faire face à cette nouvelle donne ? Prenons le cas de Mamoudzou, très dynamique en matière de grands investissements, comment fera-t-elle pour poursuivre ses chantiers si elle ne dispose plus de fonds propres ? En qualité de sénateur, je vais devoir réunir l’ensemble des acteurs, politiques, économiques et sociaux pour débattre de cette question de la transformation de Mayotte en zone franche globale, mesurer les différents impacts pour ensuite aboutir à un document cohérent sans avoir à satisfaire une partie, les acteurs économiques, contre une autre, les salariés. Quand on parle d’une convergence, il faut des cotisations sociales ; et s’il y a des cotisations insuffisantes on va dire aux Mahorais qu’ils ne peuvent pas bénéficier des mêmes droits que les autres Français. Ce n’est pas tout, il ne faudrait pas que cette zone franche globale profite en priorité à des entreprises réunionnaises ou d’ailleurs comme on le voit actuellement dans la zone industrielle de Kawéni qui pompent la richesse de Mayotte pour la transférer vers d’autres territoires. Il faut que cette zone franche globale profite avant tout aux Mahorais.

S.O.O : Il faut aider les collectivités locales à sortir de la crise sociale actuelle malgré leur manque de ressources. Si l’Etat a décidé à l’époque que la fiscalité pouvait être mise en place à Mayotte c’est que Bercy estimait que tout était prêt. Le souci c’est que le cadastre n'est pas être opérationnel tant que la régularisation foncière n’est pas terminée, que les propriétaires ne sont pas tous connus, reconnus et leurs locaux et terrains enregistrés dans le cadastre avec le nom des propriétaires, la

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surface et l’adresse. Il faut savoir que nous avons actuellement beaucoup de propriétaires de terrains et de maisons qui ne sont répertoriés nulle part et qui échappent à l’impôt. La conséquence est que nous avons les impôts les plus élevés de France parce que nous avons en plus les valeurs locatives réelles contre des valeurs locatives datant des années 1990 en métropole. Il est temps de mettre fin à ce désordre financier. Ce terme n’est pas de moi, il nous vient de la Cour des comptes qui relève la présence d’un désordre foncier à Mayotte auquel il convient de mettre fin. La CUF a été mise en place mais faute de moyens il a produit des résultats insuffisants. Il faut trouver autre chose. Je propose la mise en place ici d’une Commission de Révision du Foncier à l’image de ce qui a été fait durant 5 ans pour l’état-civil. Une commission qui serait composée du cadi, du maire de la commune, du Président de l’intercommunalité, les grands sages qui pourrait témoigner sur l’occupation de tel foncier par un tel depuis 30 ans …

A partir de là on donne le titre foncier ! La réalité est qu’il y a trop d’indivisions sur le territoire et que même quand les gens ont la volonté de régulariser leurs situations, ils butent sur les frais notariaux. Il faudrait qu’aujourd’hui nous demandions à l’Etat de prendre en charge les frais du notaire pendant pour permettre à Mayotte d’en finir enfin avec ce problème. Nous sommes Français depuis 1841, avec seulement 374 Km² de territoire, sincèrement, ce n’est pas la mer à boire ! J’ai entendu dire qu’il y aurait une proposition de loi visant à ramener l’année d’occupation de 30 à 10 ans. Je suis absolument contre ça car beaucoup de Mahorais risquent de perdre leurs terrains. Il y a 10 ans Mayotte ne connaissait pas une immigration de si grande ampleur, et quand on sait que dans les communes nombreux sont les étrangers qui squattent les terrains d’autrui, va-t-on leur attribuer des titres de propriété sur cette base ? Il y a une loi qui s’appelle les « 3 DS » , décentralisation, déconcentration et différenciation, laquelle permettrait la création d’une commission locale ici en vue de régler cette situation en prenant appui sur les cadis, les sages, les Maires et les Présidents des intercommunalités. C’est ainsi que l’on donnera à nos communes les moyens et l’autonomie financière dont elles ont tant besoin pour investir. Ailleurs, 75 % des investissements faits dans un pays viennent des collectivités locales or ici à Mayotte nous avons un problème dans

la mesure où la recette qui nous permet d’investir vient des impôts. Que fait-on lorsque celle-ci s’avère insuffisante ? Nous augmentons les taux ! Il arrivera un moment où la population va finir par se révolter, c’est déjà un le cas actuellement. Le problème doit donc être réglé.

M.H : A quel groupe politique souhaiteriez-vous vous rattacher ?

S.N : Au Sénat, il existe un groupe centriste qui regroupe tous les élus non affiliés à des appareils politiques de droite ou de gauche, il réunit même des indépendants en son sein. Il travaille avec Estelle Youssouffa qui a choisi le groupe LIOT à l’Assemblée nationale. J’ai eu déjà l’occasion de rencontrer et d'échanger avec son Président Hervé Marseille. Il est en attente du résultat des élections sénatoriales, espérant ma réussite.

S.O.O: En toute franchise, je ne le sais pas encore. Il faut d’abord attendre le résultat des élections.

M.H : Comment procéder pour imposer les athlètes mahorais aux jeux des îles de l’Océan Indien sans ces humiliations de privation de drapeau et d’hymne nationale ?

S.N : Pour commencer c’est à notre État d’assumer la pleine citoyenneté française des Mahorais, l’affirmer et l’imposer là où nécessité il y a. Il finance beaucoup ces instances de la COI, et à travers lui le contribuable mahorais aussi. Par conséquent, la France doit imposer son point de vue et cesser d’être passive sur cette question du statut de nos athlètes aux Jeux des îles de l’océan indien. Cela est également valable pour la limitation de notre espace maritime ou zone économique exclusive. Nous autres sur ce territoire avons aussi notre part de responsabilité à assumer. Il nous faut mettre un terme à nos querelles sans intérêts, nous unir lorsqu’il s’agit de défendre les intérêts supérieurs de Mayotte. Lorsque Estelle Youssouffa demande à la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale de conditionner le déblocage des financements des programmes de la COI à l’évolution de sa charte et à l’intégration de Mayotte en son sein, si elle avait obtenu le soutien unanime de nos autres parlementaires, je suis convaincus que les lignes auraient bougé et que nous aurons obtenu des avancées significatives. Malheureusement pour nos concitoyens, certains sont inféodés à des

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appareils politiques qui ont des visions contraires à celle de la majorité des Mahorais.

S.O.O: Permettez-moi d’abord de faire part de mon étonnement. Nous sommes département d’outremer depuis plus de 10 ans, nous sommes une région ultrapériphérique de l’Union européenne, et nous participons à ces jeux en tant que ressortissants Français. Nous avons les mêmes droits qu’en Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion. Je ne peux pas comprendre qu’aux Jeux des îles de l’Océan indien une partie des athlètes français soit privée de la bannière tricolore et de la Marseillaise en cas de victoire. Cela est inacceptable à mes yeux, c’est humiliant pour Mayotte, ça nous donne le sentiment d’être les enfants bâtards de la République, ce que nous ne sommes pas bien sûr bien sûr. Nous sommes Français et fiers de l’être ! Le Président de la République l’a maintes fois répété au cours des 2 visites qu’il a effectué sur notre territoire, « Maoré na Farantsa paka tcho. » Tout est question de volonté politique, soit la France nous dit qu’elle ne veut pas fâcher les Comoriens et les choses demeurent en l’état, ou bien elle met tout en œuvre pour que cette injustice soit réparée au travers d’une modification de la charte des jeux. Je signale au passage ici que la charte parle de jeux des îles et non des Etats de l’Océan indien. Nous élus de Mayotte devons tous faire bloc derrière le gouvernement dans cette démarche. Je peux comprendre que peutêtre pour les Comores, plusieurs fois secouées par une poussée séparatiste d’Anjouan et de Mohéli, craignent que celles-ci demandent un jour à y participer distinctement, mais c’est leur problème, pas le nôtre ! Ici à Mayotte, nous avons fait un choix indéfectible de rester Français, c’est le choix du cœur comme a dit Emmanuel Macron, nous ferons tout pour protéger notre île, ses habitants et sa jeunesse. En tant que sénateur, j’œuvrerai en faveur de l’épanouissement de nos jeunes et faire modifier cette charte des jeux des îles en engageant des discussions franches avec nos voisins, notamment les Réunionnais, les Mauriciens et les Malgaches pour qu’ils nous aident à sortir de cette impasse. Ce sont des partenaires importants, il ne faut pas les négliger. Mayotte aide énormément les Comores aujourd’hui, leurs autorités doivent tirer une croix sur leurs prétentions territoriales sur nous, et se dire que de toutes les façons les Mahorais ont librement choisi un autre destin. Cela est irréversible, Mayotte ne retournera jamais sous le giron comorien, ils doivent l’accepter pour que nous puissions tous avancer vers un avenir serein ! Si je suis élu sénateur, je ferai tout pour faire aboutir ce dossier, et surtout faire en sorte que les prochains jeux aient lieu ici. Vous vous imaginez le côté grotesque d’une telle éventualité, Mayotte hôte de ces jeux mais ne pouvant ni hisser ses couleurs, ni entonner son hymne ??? Ce serait un comble ! Les jeux à Mayotte relèvent d’une volonté politique, à condition que ce ne soit pas une politique politicienne puisqu’il est question de l’épanouissement de la jeunesse mahoraise.

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ELECTIONS SÉNATORIALES 2023

ENTRETIEN CROISÉ D’ANCHYA BAMANA ET THANI MOHAMED SOILIHI

ACTEURS DE LA LOI MAYOTTE

LES PROCHAINES ÉLECTIONS SÉNATORIALES AURONT LIEU LE DIMANCHE 24 SEPTEMBRE. LES DEUX MANDATS DÉVOLUS À MAYOTTE SONT AINSI REMIS EN JEU ET SOUMIS AU VOTE DES 540 GRANDS ÉLECTEURS DU TERRITOIRE (LES 26 CONSEILLERS DÉPARTEMENTAUX, LES 4 PARLEMENTAIRES ET 510 DÉLÉGUÉS DES CONSEILS MUNICIPAUX). AVANT L’ÉCHÉANCE, NOUS AVONS VOULU SAVOIR QUI ÉTAIENT LES CANDIDATS ET LES AVONS INVITÉS À RÉPONDRE À UNE QUESTION D’ACTUALITÉ. ANCHYA BAMANA ET THANI MOHAMED SOILIHI SONT LES PREMIERS À SE PRÊTER AU JEU DE L’INTERVIEW CROISÉE. L’UN EST SÉNATEUR DEPUIS UNE DOUZAINE D’ANNÉES, TANDIS QUE LA FILLE DE YOUNOUSSA BAMANA EST PRÉSIDENTE DE MAORE SOLIDAIRE ET ANCIENNE MAIRE DE SADA DE 2014 À 2020. LES DEUX ONT ÉTÉ AMENÉS À SE PRONONCER SUR LA CRISE DE L’EAU.

ANCHYA BAMANA

NÉE À SADA IL Y A 52 ANS, CETTE MÈRE D’UN PETIT GARÇON DE 12 ANS A LA FIBRE DU SOIGNANT, D’UNE PERSONNE QUI PREND SOIN DES AUTRES. INFIRMIÈRE DIPLÔMÉE D’ETAT, ELLE A SU S’IMPOSER DANS LE PAYSAGE POLITIQUE MAHORAIS EN DÉPASSANT L’USAGE SIMPLE DE SON NOM LORSQU’ELLE A SU MENER SON ACTION PUBLIQUE COMME CE FUT LE CAS DANS LA COMMUNE DE SADA. ELLE EST ACTUELLEMENT FONCTIONNAIRE DE L’ÉTAT, INSPECTRICE DE L’ACTION SANITAIRE ET SOCIALE. L’ALIGNEMENT DES DROITS SOCIAUX EST UN DOMAINE QU’ELLE MAÎTRISE BIEN ET QU’ELLE ENTEND FAIRE UN COMBAT PARCE QU’ELLE ESTIME QUE LES DOMAINES DE LA SANTÉ, LE SOCIAL ET LE MÉDICOSOCIAL CONSTITUENT UNE PRIORITÉ POUR MAYOTTE. ANCIENNE MAIRE QUI CONNAÎT LES PROBLÉMATIQUES DU TERRITOIRE, ANCIENNE VICEPRÉSIDENTE DE L’INTERCOMMUNALITÉ DU CENTRE-OUEST, ANCIENNE PRÉSIDENTE DE L'UNION DÉPARTEMENTALE DES CCAS, ELLE A FAIT PARTIE DES ÉLUS QUI ONT ŒUVRÉ EN 2018 POUR LA MISE EN PLACE À MAYOTTE DE CETTE DERNIÈRE INSTANCE. PRÉSIDENTE DU COMITÉ DE L’EAU ET DE LA BIODIVERSITÉ DE 2018 À 2020, ELLE S’INTÉRESSE ÉNORMÉMENT AUX SUJETS LIÉS À L’ENVIRONNEMENT.

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Propos recueillis par SIAK

Mayotte Hebdo : Qu’est-ce qui vous a poussé à être candidat(e) ?

THANI MOHAMED SOILIHI

A 51 ANS, IL EXERCE LE MÉTIER D’AVOCAT AU BARREAU DE MAYOTTE. IL SE DÉFINIT LUI-MÊME COMME UN ENFANT DE MAYOTTE, PUISQU’IL EST NÉ ET A GRANDI SUR CE TERRITOIRE. AU MILIEU DE SON ADOLESCENCE, IL EST PARTI VIVRE DOUZE ANS EN MÉTROPOLE, UNE PARTICULARITÉ GRÂCE À LAQUELLE IL DISPOSE À TOUT MOMENT D’ÉLÉMENT DE COMPARAISON ENTRE CE QUI SE FAIT DANS LE 101ÈME DÉPARTEMENT ET CE QUI SE FAIT DANS L’HEXAGONE. « ALORS QUE J’ÉTAIS TRANQUILLE EN TRAIN D’EXERCER MON MÉTIER D’AVOCAT, J’AI EU UN APPEL DU PAYS QUI EST VENU ET JE N’AI PAS PU M’EMPÊCHER DE TOMBER LES DEUX PIEDS DANS LA POLITIQUE ET DE ME PASSIONNER POUR ÇA. PARCE QUE J’AI À CŒUR, AVEC CE PARCOURS ET MA MODESTE EXPÉRIENCE D’AVOCAT D’IMAGINER, DE TROUVER DES SOLUTIONS POUR APPORTER MON CONCOURS AU DÉVELOPPEMENT DE CETTE ÎLE ET AU BIEN-ÊTRE DE SA POPULATION. »

Anchya Bamana : Je me suis porté candidate parce que j’estime que les préoccupations des collectivités locales, département-région, communes et intercommunalités ne sont pas suffisamment représentées au niveau de Paris, au Sénat en l’occurrence. Pourquoi je dis cela ? Je suis agent de l’État depuis 25 ans (N.D.L.R. Elle travaille à l’Agence régionale de santé) et je vois régulièrement des textes réglementaires, décrets, circulaires, ordonnances qui sortent sans Mayotte. Je me pose la question, comment cela se fait-il alors que les sujets qui sont réglementés concernent aussi nos collectivités ? Je vais prendre deux exemples concrets. En 2020, nous avons connu la crise Covid, un décret est sorti pour les départements d’Outre-mer des Antilles qui leur permet de renforcer leur système de santé en matière de professionnels de santé, médecins, sagesfemmes, chirurgiens-dentistes, pharmaciens, etc. Force est de constater que ce décret ne s’applique pas à Mayotte alors que notre département est un désert médical. C’est une injustice, une discrimination. Une autre sortie en 2022 concerne les conséquences du réchauffement climatique qui touche le monde entier. Mayotte, petite île, n’est pas épargnée. Avec l’affaissement de l’île dû au volcan sousmarin, les 16 communes mahoraises sur 17 qui se situent sur le littoral sont parfaitement concernées par ce décret qui donne la possibilité aux communes d’être aménagées, prises en compte en vue de sécuriser les populations qui habitent dans ces communes et villes en bordure de mer. Deuxième raison pour laquelle je déclare que les problèmes de Mayotte ne sont pas suffisamment relayés au niveau des ministères, nous savons que la mission d’un sénateur c’est de faire la loi, et il y a deux façons de le faire, au Parlement via les navettes Assemblées nationale-Sénat, et la deuxième façon, ce sont les textes réglementaires qui sont d’ailleurs assez rapidement pris dans les ministères. Trop peu de décrets concernent Mayotte.

T.M.S. : Je donnerai deux raisons. La première, c’est que j’ai encore de l’énergie et la volonté de travailler encore pour Mayotte. C’est important à souligner parce que ce sont des tâches très énergivores et très chronophages. Mon engagement depuis 2011 n’a jamais failli et je ressens l’énergie de pouvoir continuer. Et puis la deuxième raison, ce sont les travaux que je pense être le plus à même de continuer. Sur le foncier, je donnerai un exemple tout simple, le 14 février 2023, suite aux travaux de la commission d’urgence foncière (CUF) et à mes travaux propres, le

ministère de la Justice a sorti un décret (appliqué depuis le 1er mars) que je qualifierai de « rattrapage » permettant à toutes les personnes qui n’avaient pas pu le faire auparavant, de régulariser leurs anciens actes sous seing privé ou actes cadiaux. Par exemple, je vous ai vendu un terrain en 1987, par négligence je n’ai pas fait les formalités pour que vous soyez propriétaire, vous savez que depuis 2008, ces actes ne sont plus valables et qu’il faut passer par le notaire avec toutes les difficultés que cela suppose. Désormais avec ce décret, vous pouvez m’assigner en justice dans le cadre d’une procédure là aussi très simplifiée devant le juge. Celui-ci va prendre une décision de justice qui vaut titre de propriété. Concrètement, c’est très technique, l’assistance d’avocat n’est pas obligatoire, mais je ne vois pas un citoyen lambda qui n’est pas juriste capable de faire ça. Or, l’une des motivations de cette procédure, c’est la gratuité, pour que ça ne coûte pas un bras aux personnes qui ont raté le coche en 2018.

Autre sujet qui me tient à cœur et que j’aimerais poursuivre, c’est l’adoption d’un mode d’élection régionale. Il faut qu’on arrête avec ces pratiques qui font perdre du temps à Mayotte. Un candidat à la présidence du conseil départementalrégional devrait faire comme aux municipales, monter une liste avec un programme, des femmes et des hommes qui seront connus d’avance pour assurer la gouvernance et aller devant les électeurs munis de leurs programmes. Le corollaire de ça, c’est d’avoir un nombre de conseillers qui augmente, car les 26 actuels ne peuvent pas s’occuper de toutes les tâches départementales et régionales. Pour cela, leur nombre par canton doit passer de deux à quatre pour être en mesure de s’occuper de tout cela. Et d’ailleurs, je motive cette volonté de continuation par ce fameux projet de loi Mayotte. Il a été remis sur la table, et l’avant-projet doit être prêt d’ici la fin de l’année. Je pense très modestement qu’ayant énormément contribué à ces travaux, je serai l’un des acteurs majeurs pour les continuer.

MH : En quoi vous serez un(e) bon(ne) sénateur (rice) ?

A.B. : J’ai l’avantage de connaître les problématiques du territoire, celle des collectivités, parce que j’ai eu la chance d’en gérer une (N.D.L.R. Elle a été maire de Sada de 2014 à 2020). Cela me donne une proximité avec les élus des communes, ceux du Département. Je ne vois pas comment avec cette expérience et toutes les difficultés que j’ai connues dans la commune je pourrais oublier les communes

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mahoraises une fois élue sénatrice ? Au contraire, je serai très proche des collectivités parce que je connais leurs difficultés. Je rappelle qu’en 2014 le gouvernement de François Hollande nous a imposé la mise en place des rythmes scolaires. Force est de constater que les communes ont eu beaucoup de difficultés à décliner cette réforme. En 2014-2015, j’ai personnellement saisi les sénateurs de l’époque pour leur dire que les communes n’avaient pas les moyens, ne disposaient pas des prérequis pour décliner efficacement cette réforme, très bénéfique par ailleurs. Ils ne nous ont absolument pas accompagnés malgré notre saisine. Je me suis débrouillée toute seule en tant que maire au niveau du ministère de l’Éducation nationale, pour que le ministère de tutelle nous donne une dérogation. Pareil pour un projet de rénovation des écoles de Sada. Le gouvernement a fini par plier et nous donner la dérogation exclusivement à notre commune, parce qu’il avait bien compris que nous donner raison, c’est être obligé de financer les 17 communes et cela allait coûter très cher. Cette expérience nous montre bien que les problématiques des collectivités ne sont pas prises en compte par les sénateurs.

T.M.S. : Ce n’est pas à moi de dire si je serai un bon sénateur ou pas. Moi, je mettrai juste en avant mes travaux qui font, par exemple, que je suis placé parmi les trente sénateurs les plus travailleurs de France sur un total de 348. Du coup, j’ai envie de répondre que mes modestes réalisations, mes travaux, mon bilan me donnent la faiblesse de croire que je ne pourrai que me bonifier.

MH : Quels sujets aimeriez-vous défendre au Sénat ?

A.B. : Le grand dossier pour moi en tant que future sénatrice est de contrôler l’action de l’État. Nous avons toujours tendance à dire : « Ah, l’ARS, c’est une mission de l’État. Ah, le rectorat c’est une mission de l’État. Ah, le préfet de Mayotte fait ce qu’il veut parce que c’est une mission de l’État, non ! ». Tous les élus doivent contrôler l’action de l’État et orienter la mise en œuvre des politiques des services déconcentrés ici à Mayotte. Donc, le projet que je soutiens en premier est de faire en sorte que les vraies problématiques de l’île soient prises en compte dans la future loi Mayotte, pour éviter que ce projet soit de nouveau rejeté comme en janvier 2022. Il faut accélérer l’alignement des projets de textes qui régissent notre collectivité unique de Mayotte sur ceux des DROM, accompagner le transfert progressif des compétences et des ressources aux collectivités. Nous savons que celles de notre île sont sous dotées, nous avons la problématique du recensement avec une sous-évaluation de la population alors que c’est la base de l’octroi des financements. La question de la régularisation foncière est

essentielle parce que c’était un préalable à la départementalisation, au même titre que l’état-civil, lequel a été doté de beaucoup de moyens pendant dix ans pour préparer la départementalisation, donner un nom et un prénom à chaque Mahorais. Force est de constater que la question de la régularisation du cadastre a été complètement oubliée. Du coup, en 2014, on a dit aux collectivités locales de mettre en place la fiscalité locale, mais ce dossier a été complètement sous géré. Il y a la CUF qui est là actuellement mais qui n’a absolument pas les moyens de la CREC. C’est un dossier prioritaire pour que l’État puisse mettre en place les moyens afin d’aider les collectivités à régulariser le foncier, que les titres fonciers soient donnés à la population, aux collectivités, communes et Département, pour qu’on puisse vraiment prélever l’impôt de manière juste. Pour donner l’exemple, actuellement pour cent personnes disposant d’un foncier à Sada, 30 % sont réellement connus au niveau du fisc, au niveau du cadastre. Et ces 30 % paient pour le compte des 70 autres qui ne sont pas recensés. Donc les moyens doivent être donnés à la DRFIP pour soutenir les communes dans leurs projets d’adressage, de mise à jour du cadastre. Au niveau de l’aspect institutionnel, les questions qui doivent figurer dans le projet de loi Mayotte, c’est intégrer notre île dans la Commission de l’océan Indien (COI). Nous sommes un département à part entière, nous devons lutter contre ces injustices de voir nos jeunes. Il faut aussi territorialiser la délivrance des passeports et des cartes nationales d’identité au niveau de Mayotte. Pour moi, c’est une régression qu’on attache Mayotte à La Réunion alors que nous devons achever notre décentralisation. Je lutte aussi pour que le fameux titre de séjour territorialisé soit abrogé, pour qu’on entre dans le dispositif du droit commun en matière de circulation des personnes. Autre dossier important, il y la formation et les équipements pour nos jeunes ici sur place pour lutter contre le turnover qui pénalise le fonctionnement des services. Celui-ci atteint l’État, mais aussi nos services et pénalisent le développement du territoire. Je n’oublie pas mon ambition de faire de Mayotte une île écologique.

T.M.S. : Au risque de me répéter. Pour moi, le sujet du foncier demeure fondamental pour l’avenir de notre île, puisque son découpage va permettre à nos concitoyens de pouvoir construire leurs habitations. Il faut savoir que 70 % des parcelles ne sont pas immatriculées donc ne permettent pas d’élargir l’assiette fiscale du foncier. Or, ils constituent des ressources supplémentaires pour les collectivités locales aujourd’hui en grande difficulté. Imaginez ce que représentent pour elles 70 % de ressources supplémentaires. Et en même temps, cette augmentation des personnes assujetties à

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l’impôt foncier conduira à une baisse conséquente des montants qu’elles auront à s’acquitter. Je mettrai l’accent sur la continuation de ce travail pour persévérer. Je pense également que la régionalisation est une priorité pour Mayotte parce qu’elle va nous permettre d’avoir un cap et un projet partagé, ce qui n’est pas le cas actuellement. En plus, elle va nous permettre de bénéficier de ressources nouvelles à travers la DGF régionale. Beaucoup parlent d’augmenter la DGF et effectivement il faut le faire. Elle n’a cessé d’évoluer depuis 2014 s’agissant des collectivités, départements et communes confondus. Mais la DGF régionale nous fait défaut. Donc, pour moi, l’accent sera particulièrement mis sur ces deux sujets. Et puis, un de mes sujets de prédilection est celui de la jeunesse. C’est quand même extraordinaire que lorsqu’on parle de jeunesse, la catégorie qu’on évoque c’est celle qui nous empoisonne la vie. Les 90 à 95 % qui restent sont là. Il faudra imaginer une accélération de leurs formations, une accélération pour créer des emplois et les occuper. J’aimerais beaucoup m’atteler à cet autre cheval de bataille qui est le foncier agricole. Mon dernier rapport de cette législature porte sur ce sujet en Outre-mer. Avec une de mes collègues, nous avons imaginé un certain nombre de préconisations pour tendre vers la souveraineté alimentaire. J’aurais à cœur de me concentrer sur ces préconisations parce qu’elles contiennent en plus tout un volet sur la protection de l’environnement et la préservation de la nature, notamment l’eau. Vous l’avez compris, c’est surtout cela que j’aimerais mettre l’accent car s’il est vrai que ces travaux ont commencé à apporter des résultats tangibles, être là pour veiller à leur continuation est tout aussi important !

MH : A quel groupe politique souhaiteriez-vous vous rattacher ?

T.M.S. : Je suis membre du groupe Renaissance (N.D.L.R. le groupe de sénateurs qui soutient Emmanuel Macron forme le troisième du Sénat) et je n’ai nullement l’intention de le quitter. Et d’ailleurs, pourquoi changerais-je de groupe alors qu’il m’a permis à ce jour, mon mandat n’étant pas complètement terminé, d’être parmi les huit sénateurs (sur 348) à siéger au comité de déontologie du Sénat ? Ce groupe m’a permis d’être aujourd’hui, l’un des vice-présidents de la commission des lois, de même qu’il m’a permis d’avoir été vice-président du Sénat, quelque chose qui n’était pas arrivé à un ultramarin depuis cinquante ans, depuis la cessation des fonctions de Gaston Monnerville. A Mayotte, c’était inédit. C’est un groupe qui m’a énormément apporté et je ne compte pas l’échanger, sauf si vous me dites qu’il y a un meilleur groupe qui défend les intérêts de Mayotte et de la France.

A.B. : Là, tout de suite, je dirais que j’ai des discussions avec certaines personnes, je ne dirais pas avec quel groupe. Je me positionne en tant que sans étiquette pour avoir cette liberté d’expression. Forcément, quand j’irai là-bas, je m’affilierai en termes de collaboration de travail pour pouvoir défendre les dossiers et les intérêts de Mayotte, ce qui prime pour moi. Je prends la position de nos anciens, de nos Chatouilleuses qui se sont battues pour que cette île devienne un territoire français. Alors, j’adopte leur démarche, c’est-à-dire, c’est de travailler ! Et je travaillerai avec tous les gouvernements de Paris, comme je l’ai fait lorsque j’étais maire de Sada. Élue en 2014 maire Les Républicains, j’ai travaillé avec le gouvernement Hollande, avec lequel j’ai géré le dossier

des rythmes scolaires. En 2017, lors du premier mandat d’Emmanuel Macron, j’étais encore maire, j’ai travaillé avec le préfet délégué du gouvernement ici à Mayotte sans aucune difficulté. Donc, tout ça pour dire que ce n’est pas une question d’étiquette politique, c’est une question de travail.

MH : Pour coller à l’actualité du moment à Mayotte, nous allons parler de l’eau qui manque. Selon vous, qu’est-ce qui a été raté et comment y remédier ?

T.M.S. : Je pense que collectivement, nous avons raté la problématique de l’eau et que les crises successives ne nous ont pas suffisamment servi de leçon. Quand il y a eu des crises, tout le monde s’est mis en ordre de bataille et dès que l’eau est revenue nous avons relâché notre vigilance. Je forme le vœu que même après une prochaine saison de pluies abondantes, nous ne relâchons pas la pression pour avoir absolument notre troisième retenue collinaire. C’est également le cas pour des solutions de traitement de l’eau, l’assainissement, ou des solutions de traitement qui pourraient servir de soupapes de sécurité dans l’hypothèse où nous aurions dans l’avenir des années aussi critiques que celles-ci. Malheureusement, lorsqu’on écoute les spécialistes, nous ne sommes pas à l’abri de cela, c’est tout le contraire. Nous avons collectivement manqué de vigilance, je pense aussi que nous devons nous améliorer dans la gestion des outils de gestion de l’eau.

A.B. : Actuellement, nous sommes dans une situation d’urgence vitale et sanitaire. Nous le vivons déjà ! Les élus doivent prendre en main ce dossier et pousser l’État à nous donner des réponses en urgence. Pour moi, là tout de suite, l’urgence c’est de réaliser l’usine de dessalement, terminer les travaux de prolongement de l’usine PetiteTerre et faire les ou la nouvelle(s) usine(s) programmée(s) en Grande-Terre. J’ai vu que c’est programmé dans l’une des premières mesures du CIOM, pour approvisionner les populations en eau. C’est possible ! J’ai personnellement écrit au ministre Gérald Darmanin, il y a quatre mois, pour lui dire qu’il y avait urgence à agir là-dessus. Un mois plus tard, j’ai écrit au préfet actuel pour lui dire qu’on ne peut pas attendre 2026 parce que le syndicat des Eaux de Mayotte avait été questionné suite à ma saisine du ministre. Le syndicat avait répondu qu’on ne pouvait pas construire une nouvelle usine en urgence et que l’on verrait en 2026. Suite à cette réponse, j’ai écrit au préfet pour lui dire que la France dispose d’une expertise affirmée en matière de dessalement d’eau, que les prestataires sont là, notamment un certain nombre de startups qui se sont développées et qui déploient cette technologie pas très loin. L’une d’entre elles, une française, a construit une usine à Rodrigues et à Madagascar, donc l’expérience est faite dans la région. La France a cette expertise pour faire le travail en moins de deux ans. Cela a d’ailleurs été dit que nous aurons une nouvelle usine en 2024. Pour moi, c’est une urgence ! L’autre urgence à mes yeux, c’est le réchauffement climatique qui n’épargne pas Mayotte. Il y a une telle dégradation aussi de notre environnement, on coupe les arbres, les rivières sont occupées, saccagées. On voit à l’œil nu les rivières qui s’assèchent. Il y a donc une urgence écologique, une autre politique à mener là-dessus parce que s’il n’y a pas d’eau dans nos rivières, je ne vois pas trop comment on peut remplir nos retenues collinaires.

21 • Mayotte Hebdo • N°1058 • 22/09/20 23

DOSSIER

ELECTIONS SÉNATORIALES 2023

ENTRETIEN CROISÉ DE ABDOUL DOUKAINI ET NADJIM AHAMADA

AU NOM DES PARTIS

ILS APPARTIENNENT TOUS LES DEUX À LA JEUNE GÉNÉRATION DE RESPONSABLES POLITIQUES MAHORAIS, ILS CONNAISSENT BIEN LES PROBLÉMATIQUES SPÉCIFIQUES DES COLLECTIVITÉS LOCALES ET AMBITIONNENT DE RELEVER LES NOMBREUX DÉFIS QUI SE POSENT À MAYOTTE AUJOURD’HUI. ENTRETIEN CROISÉ DES CANDIDATS ABDOUL DOUKAINI (LR) ET NADJIM AHAMADA (MDM) POUR LES SÉNATORIALES DU DIMANCHE 24 SEPTEMBRE. LA CRISE DE L’EAU ET LES AUTRES PROBLÈMES QU’ELLE ENGENDRE EN AVAL, L’INSÉCURITÉ, LES DOTATIONS POUR LE DÉVELOPPEMENT DES COMMUNES, AUTANT DE SUJETS QU’ILS ABORDENT AVEC SÉRÉNITÉ ET CONVICTION.

ABDOUL DOUKAINI

NÉ À OUANGANI, LE CADRE DE LA MAIRIE DE TSINGONI DE 43 ANS A GRANDI EN PARTIE À SADA D’OÙ EST ORIGINAIRE SON PÈRE. IL A ÉTUDIÉ LES LANGUES ET LE DROIT ADMINISTRATIF, LES SCIENCES POLITIQUES TRÈS RAPIDEMENT. ATTACHÉ TERRITORIAL CADRE A AU SEIN D’UNE COLLECTIVITÉ TERRITORIALE DEPUIS UNE QUINZAINE D’ANNÉES, IL FAIT PARTIE DU BUREAU DU PARTI LES RÉPUBLICAINS À MAYOTTE. IL EST LE PÈRE DE QUATRE ENFANTS.

NADJIM AHAMADA

A 42 ANS, IL EST AVOCAT DEPUIS 2008 ET PRATIQUE À MAYOTTE OÙ IL DÉFEND LES PARTICULIERS ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES. IL A ÉTÉ BÂTONNIER DE L’ORDRE DES AVOCATS DE MAYOTTE EN 2015 À 2016, AVANT DE DÉMISSIONNER EN RAISON DE SA PREMIÈRE CAMPAGNE POUR LES SÉNATORIALES EN 2017. IL EST VICE-PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE RÉGIONALE DE DISCIPLINE DES AVOCATS DE MAYOTTE ET LA RÉUNION. IL EST LE SEUL CANDIDAT MDM INVESTI DEPUIS QU’ABDALLAH HASSANI, LE SÉNATEUR SORTANT, A ANNONCÉ QU’IL NE SE REPRÉSENTERAIT PAS.

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Propos recueillis par SIAK

Mayotte Hebdo : Qu’est-ce qui vous a poussé à être candidat ?

Abdoul Doukaini : Je suis dans la politique depuis une vingtaine d’années déjà, je me suis engagé dans une formation à l’époque, l’UMP, devenue aujourd’hui Les Républicains. J’ai fait un constat sur la vie, la société, le fonctionnement des choses et je vois que rien ou une bonne partie des choses n’avance pas. Qu’est-ce que je peux faire, comment puis-je être utile à la société et à ce territoire ? Il y a plusieurs façons de s’engager, j’ai choisi la politique parce que c’est là que se prenne les décisions. Pour moi, il s’agit vraiment d’essayer de changer le cours des choses. Lorsqu’on s’engage en politique, je considère le rôle de l’acteur public, ce n’est pas de subir les événements mais plutôt de les anticiper. Je considère aujourd’hui qu’il y a tellement de crises, dans la santé, l’éducation, le logement, le social avec des taux de chômage record, l’eau, le manque de confiance envers les élus qui est à mes yeux quelque chose de très grave, la démographie qui est la cause de toutes les autres crises, les infrastructures… Pourquoi n’at-on pas anticipé ? Il y a vingt ans, lorsque j’étais encore au collège au début des années 90, on faisait des projections sur la démographie de Mayotte. On savait qu’à l’an 2000, la population serait de 150.000 habitants et 350.000 en 2020. On peut ne pas être d’accord avec ces chiffres de recensement officiel, mais à mon sens, le problème ne se situe pas là, c’est un autre débat. Les autorités savaient ce qui allait arriver dans dix ans, dans vingt ans. Qu’estce qui a été fait ? C’est pour cela que je dis qu’on ne doit pas subir les événements, mais qu’on doit les anticiper. Donc, je me suis engagé dans ces élections afin de faire en sorte que nous ne puissions pas commettre les mêmes erreurs. Je vais probablement vous surprendre, mais je vous dis que la vraie crise n’a pas encore commencé. Pour le moment, il ne s’agit que des prémices d’une catastrophe annoncée. Faut-il attendre vingt ans encore pour agir ? Je dis que non ! J’ai le courage, la détermination, la volonté, de faire en sorte que demain on puisse voir l’avenir comme étant une opportunité et non pas comme une menace. Hier et avant-hier, nos parents voyaient notre avenir à nous comme étant une opportunité. Le rôle d’un politique n’est pas d’interpréter le monde ou les choses, c’est de les changer, changer la vie quotidienne des gens et c’est là, mon ambition.

Nadjim Ahamada : Je suis effectivement candidat aux élections sénatoriales avec comme suppléante, Tayza Abdallah, qui est conseillère municipale à la mairie de Koungou et conseillère communautaire à l’intercommunalité du Grand Nord. J’exerce le métier d’avocat depuis quinze ans, période durant laquelle je défends les Mahorais, en particulier les collectivités locales puisque je suis l’avocat d’un certain nombre de communes et j’ai été celui du Département pendant un moment. J’ai défendu de grandes causes sur ce territoire notamment l’affaire de la tête de cochon qui avait été jetée dans une mosquée à Labattoir, un combat que j’ai mené jusqu’à Paris et Bruxelles où j’ai rencontré des députés européens et Manuel Valls qui était le ministre de l’Intérieur et des cultes de l’époque. J’étais accompagné du Grand Cadi de Mayotte. J’ai pris part au combat contre la vie chère où j’ai accompagné un certain nombre de compatriotes, notamment la famille du jeune homme décédé sur la

place de l’Ancien marché, et j’ai participé à tous les autres combats de ces dix dernières années sur le territoire. J’ai été conseiller municipal à la mairie de Mamoudzou de 2014 à 2020 et je suis membre d’un parti politique qui s’est toujours battu pour l’ancrage de Mayotte dans la France et l’Europe. Fort de ces combats, et de mon investissement social, j’ai été investi candidat unique par mon parti, le MDM, pour aller défendre les couleurs et les intérêts de Mayotte au Sénat. Je suis candidat pour aller poursuivre le combat du MDM, de nos aïeux qui se sont battus pour être libres, notre liberté, première devise de la République, à côté de l’égalité et de la fraternité. Le combat que devons porter, nous, la nouvelle génération, c’est celui de l’égalité qui sera la colonne vertébrale du prochain mandat du sénateur, l’égalité sociale, l’égalité dans la sécurité, dans l’accès à l’eau, l’égalité dans le développement, l’égalité dans tout parce que c’est la continuité de notre combat au sein du MDM. Et pour finir sur ce point-là, je dirai que nous avons une dette morale à l’égard de ces personnes qui méritent une retraite digne et des droits sociaux pour leurs propres enfants devenus aujourd’hui Français grâce à leur combat.

MH : En quoi vous serez un bon sénateur ?

A.D. : J’ai coutume de dire que vous pouvez être le meilleur médecin du monde, mais si vous ne connaissez pas le dossier de votre patient, sa maladie, sa pathologie, soyez-en certain qu’il aura moins de chance de guérir. Si on lui présente un malade à soigner dans de pareilles conditions, il va se demander le soigner sur la base de quoi ? De même que si vous êtes le meilleur avocat du monde, mais que vous ignorez tout du dossier de votre client, vous n’arriverez pas à le défendre devant un tribunal et vous courrez droit à l’échec. Justement, je disais que je suis cadre A au sein d’une collectivité territoriale (N.D.L.R. à la mairie de Tsingoni), je suis attaché, je connais les difficultés des communes, des groupements de communes, les difficultés du département de Mayotte. Anrifiya Saïdina (N.D.L.R. sa suppléante), elle aussi connaît ces difficultés, nous maîtrisons ces dossiers, nous savons là où il y a des insuffisances, des problèmes. Il est donc normal que je trouve notre duo le mieux placé pour défendre les dossiers de ce territoire et de ses collectivités locales au Sénat.

N.A. : Je pense que tous les candidats qui sont en lice dans cette campagne aiment profondément cette île et veulent s’investir pour ce territoire. Je n’ai donc pas la prétention de dire que je serai le meilleur d’entre eux, mais je considère qu’il faut amener une nouvelle mode de travail et c’est ce qui me différencie de mes autres challengers. Je m’explique, on a tendance à dire qu’une fois élus les sénateurs, mais aussi les parlementaires en général, tournent le dos aux personnes qu’ils représentent. Moi, je préconise de cultiver une autre manière de travailler basée sur quatre points :

– la permanence du parlementaire sur le territoire doit être effectivement occupée et comme son nom l’indique, être un lieu ouvert pour que les personnes qu’on représente puissent avoir un interlocuteur quand nous nous sommes à Paris et exposer leurs difficultés, présenter leurs doléances et avoir un rendez-vous avec le sénateur.

– je considère également qu’il faut créer une grande conférence des élus réunissant les quatre parlementaires

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et les présidents du conseil départemental et de l’association des maires pour faire ce que les Mahorais désirent ardemment le « cogno moja », c’est-à-dire travailler ensemble. Et c’est au travers de cette organisation qu’il sera possible de rencontrer l’ensemble des hauts responsables de ce territoire dans l’hémicycle Younoussa Bamana pour que les élus locaux qu’on représente soient également présents pour accéder directement à leurs parlementaires pour, à la fois, exposer leurs problématiques et parler des grands sujets de Mayotte, piste longue, développement, économie et insécurité. Cette messe devrait se tenir tous les ans.

– le premier rôle d’un sénateur étant de représenter les collectivités, dans ce cadre–là, il doit être au plus près des personnes qu’il représente à travers des tournées dans tous les conseils municipaux une fois tous les six mois. Il faut que les élus municipaux et les maires puissent avoir la possibilité d’interpeler directement le sénateur sur les projets communaux et ceux de Mayotte en règle générale. C’est comme ça que moi je voie les choses. Et dernier point sur comment je peux faire mieux que les autres candidats, je considère que les quatre parlementaires doivent se mettre d’accord pour se partager les grands sujets de Mayotte. Actuellement, il y a l’eau, l’insécurité, le chômage de masse, le développement, les dotations, et il faudrait que les quatre se disent que chacun ne peut se battre tout seul de son côté sur ces chantiers. Il est nécessaire de se partager les tâches, chacun prenant un domaine de prédilection et le mener à bien pendant la durée de son mandat, demander le concours des autres en cas de difficulté.

MH : Quels sujets aimerez-vous défendre au Sénat ?

A.D. : Vous savez, les choses sont définies, chacun ses compétences, l’article 24 de la constitution nous dit que le Sénat assure la représentation nationale des collectivités territoriales de la République. Cela veut dire que mon rôle, ma mission première, sera de faire en sorte que nous puissions rapidement doter les collectivités mahoraises de ressources nécessaires pour pouvoir agir, être efficaces, répondre aux attentes et aux aspirations de nos populations. Figurez-vous que nous avons actuellement des institutions que je considère comme étant fragiles. Il suffit juste d’une petite crise ailleurs pour que nous soyons impactés et fragilisés. Regardez comment la guerre qui oppose l’Ukraine à la Russie a des répercussions jusqu’ici. Autre exemple, la crise sanitaire qu’on a connu en 2020 et qu’on connait encore aujourd’hui a énormément fragilisé nos collectivités territoriales.

Mayotte n’est rien d’autre qu’un ensemble de collectivités locales, de communes, si nous arrivons à mieux les protéger ces institutions vont pouvoir directement agir en faveur des citoyens. Je reste donc persuadé que nous aurons des acteurs publics qui pourront agir efficacement. Je suis attaché territorial cadre A au sein d’une collectivité territoriale depuis quinze ans, ma suppléante est une élue, conseillère municipale dans la commune de M’tsamboro, vice-présidente dans la communauté d’agglomération du Grand Nord, également déléguée au Sidevam. Voyez-vous, lorsque l’article 24 de la constitution dit que le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales, il parle d’agents et d’élus. Si vous enlevez l’un de ces deux composants vous n’avez pas de collectivités. Notre duo a les deux pieds bien posés sur la terre de sorte à ce que nous puissions inverser les choses. L’agent est celui qui prépare les dossiers tandis que l’élu est celui qui décide. Nous avons ces deux pieds et pensons être suffisamment armés sur les dossiers de Mayotte, les difficultés, les insuffisances afin de pouvoir changer les choses.

N.A. : La problématique de l’eau est un sujet auquel on ne peut pas y échapper car elle est la première préoccupation des Mahorais actuellement. Tout le monde en souffre. Derrière, il y a en réalité trois problèmes concrets, une crise sanitaire qui s’annonce étant donné que l’eau qui sort du robinet est impropre à la consommation. Souvent, elle sort avec une couleur marron et celle qui sort claire on nous dit qu’il faut la bouillir avant de la consommer. Le centre hospitalier de Mayotte (CHM) nous dira qu’un certain nombre de personnes qu’il accueille souffrent de diarrhée, de problèmes dus à la consommation de cette eau. Il y a aussi une crise économique puisqu’on entend ici et là que le secteur du bâtiment va arrêter de fonctionner puisqu’il consomme de l’eau. Les écoles commencent à fermer ainsi que certaines administrations. La restauration ne peut pas non plus stocker l’eau pour la réutiliser dans le nettoyage des aliments. Donc, on va vraiment vers de grandes difficultés et il faut se battre. Je pense que dès le 24 septembre, une fois élu, la mandature démarre exactement le 2 octobre 2023, il faut demander au gouvernement de mettre en place un fonds de solidarité pour venir au chevet des Mahorais pour que tout le monde puisse avoir accès à l’eau. Pour y parvenir, il faut distribuer de l’eau aux populations, ce qui est en cours via des citernes et des bouteilles d’eau, mettre en place des unités mobiles de dessalement pour que chaque village puisse disposer de sa propre machine pour capter l’eau de mer et la distribuer aux administrés. Il y a un autre problème plus profond et grave également, c’est l’insécurité. Il faut s’attaquer

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à ce fléau pour ramener la paix sur ce territoire. On ne pourra le faire qu’en s’y mettant tous, on ne peut pas dire que c’est seulement le travail du gouvernement et de l’État, il faut prendre à bras le corps le problème de l’insécurité parce qu’on ne peut plus vivre sur ce territoire dans cet état d’anxiété, à se demander si on va rentrer chez soi sain et sauf après le travail ? Est-ce que les enfants vont rentrer sains et saufs de l’école ? Est-ce que je ne vais pas me faire agresser sur mon lieu de travail ?

MH : A quel groupe politique souhaiterez-vous vous rattacher ?

A.D. : Je suis investi par un mouvement politique, Les Républicains, j’ai donc une étiquette politique et je ne sais me dérober, je ne me cache jamais derrière mon petit doigt, j’assume mes convictions et mes idées. Figurezvous aussi que je ne fais jamais de concession sur mes convictions dès lors que je suis certain que ce sont les bonnes. Maintenant, il y a d’un côté les étiquettes et de l’autre les intérêts. Il est donc naturel que je siège dans le groupe Les Républicains. Mais il y a une nuance, cela ne veut pas forcément dire que je dois accepter tout ce qui se dire au sein ou autour de ce groupe, même si cela allait à l’encontre des intérêts de mon territoire et de ses collectivités locales qui m’ont accordé leur confiance. Défendre quelqu’un, c’est être son porte–parole, son porte–voix, c’est faire entendre ses doléances. Je m’inscrirai donc toujours dans cette voie de la défense des intérêts de Mayotte et de ses collectivités pour qu’enfin, je l’espère de tout cœur, que les gens puissent espérer de nouveau sur cette île, puissent y croire car cela est important. Lorsqu’une personne ne croit plus en rien, n’espère plus rien, c’est la porte ouverte à beaucoup de choses. En revanche, si vous avez de l’espoir devant vous, vous y croyez et cela vous donne une force, une énergie, une motivation que vous allez puiser au fond de vousmême et qui vous guide. Donc, nous devons créer ici un modèle social qui doit être basé sur la réussite, donner la possibilité de réussir à chaque Mahorais résidant sur ce territoire, d’où qu’il vienne, à condition que cette réussite ne soit pas un cadeau qu’on ira chercher en faisant la queue devant un guichet. Cette réussite doit être une récompense de la sueur de son front pour avoir travaillé dur, parce qu’on lui aura donné la possibilité de se former, d’aller à l’école et les infrastructures nécessaires, raison pour laquelle je parle d’espoir.

N.A. : Il faut faire attention aux groupes parce que qui dit groupe dit généralement un mélange de personnes aux horizons politiques différents. Souvent, les groupes sont formés par des partis politiques. Nous, au MDM ,nous avons la chance d’appartenir à une formation politique locale alors que lorsqu’on est apparenté à un groupe, on a des comptes à rendre aux formations politiques nationales et on est assujetti à une discipline et à des consignes de parti qui font qu’on peut prendre des décisions contraires aux aspirations et aux intérêts des Mahorais. Cela s’est déjà vérifié, un député mahorais dont je ne citerai pas le nom est passé devant l’Assemblée nationale pour dire que le gouvernement s’oppose aux titres de séjour non territorialisés. Il existe un groupe centriste au Sénat qui permet à différentes tendances

de s’exprimer et d’apporter un soutien en cas de besoin, ce qui permet de ne rendre des comptes qu’aux seuls électeurs mahorais.

MH : La crise de l’eau demeure d’actualité à Mayotte, comment sortir de ce bourbier ?

A.D : Vous posez une question simple, mais qui demande une réponse difficile, parce que je veux bien qu’on impute la responsabilité de cette crise à ceux qui sont aux affaires aujourd’hui, peut-être même ceux d’hier, mais je disais tout à l’heure, il y a dix ans, vingt ans, tout le monde savait ce qui allait nous arriver aujourd’hui. Qu’avons-nous fait pour anticiper cela ? Rien ! Nous nous retrouvons à devoir gérer une multitude de crises car cette crise de l’eau n’est que l’arbre qui cache la forêt, c’est la partie visible de l’iceberg. Comment allons-nous faire ? Tous les scientifiques s’accordent à dire que plus nous allons avancer dans le temps, moins nous allons avoir des pluies. Je ne crois pas qu’il faille s’entêter à dire que nous devons construire une troisième retenue collinaire, pour moi, ce serait jeter de l’argent dans la nature car comment allons-nous la remplir s’il y a une baisse importante de pluviométrie ? Nous avons la chance d’être entourés d’eau puisque nous sommes sur une île. Il faut rapidement une usine de dessalement. J’ai vu que dans le comité interministériel des outre-mer (Ciom), il est mentionné un chiffre, 35 millions d’euros me semble-t-il, pour la construction d’une usine de dessalement. Il faut aller vite, veiller à ce que cet outil-là soit construit rapidement. Je dis également qu’il faut des chèques eau, comme il y a eu des chèques carburant et des chèques énergie, qui puissent bénéficier à l’ensemble des ménages mahorais sans exception aucune. Sur cette île, nous sommes doublement, voir triplement pénalisés parce que nous avons à payer des factures d’eau alors même qu’elle ne coule pas du robinet, ces factures sont très chères, assorties de taxes et des surtaxes pour des services qui ne sont pas au rendez-vous. Et derrière, au lieu que les institutions publiques pallient leurs insuffisances et manques d’anticipation, c’est aux ménages d’en payer les frais par des achats massifs de packs d’eau dans les magasins. C’est en cela que je dis que c’est triplement pénalisant pour les Mahorais. Le citoyen n’a pas à aller acheter des bouteilles d’eau par contrainte uniquement parce que le service public d’à côté ne remplit pas ses obligations. Ce chèque eau au profit des Mahorais ne coûtera rien au gouvernement en comparaison des chèques énergie et carburant qui ont concerné l’ensemble des Français. En tous les cas, son coût ne pourrait aucunement être quelque chose d’handicapant pour le fonctionnement de l’État. Sa mise en place est indispensable pour soulager le porte–monnaie des ménages. D’autres outils existent naturellement comme l’Office de l’eau qui doit absolument être mis en place, des recommandations en ce sens ont été formulées suite à une mission effectuée sur place en 2022, mais on ne voit toujours rien jusqu’à présent.

N.A. : Je pense avoir déjà répondu aisément à cette question de la crise de l’eau à Mayotte, précédemment. Je rajouterai simplement que la troisième retenue collinaire (N.D.L.R. à Ourouvéni) reste à construire, et en attendant qu’elle se réalise, il faudra multiplier les forages et les unités de dessalement d’eau de mer pour pallier les urgences.

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DOSSIER

ELECTIONS SÉNATORIALES 2023

ENTRETIEN CROISÉ DE AMINA HARITTI ET ZAÏDOU TAVANDAY

AU SERVICE DES ÉLUS

LOCAUX SANS PARTI PRIS

PREMIÈRE À PORTER LA VOIX D’EMMANUEL MACRON À MAYOTTE, AMINA HARITTI A CULTIVÉ LE SUSPENS AVANT D’OFFICIALISER EN MILIEU DE SEMAINE DERNIÈRE, SA CANDIDATURE AUX ÉLECTIONS SÉNATORIALES. ELLE A UN FRANC-PARLER ET N’HÉSITE PAS À METTRE LE PIED DANS LE PLAN SUR BON NOMBRE DE SUJETS. BIEN QU’IL FÛT L’UN DES PREMIERS À SE PORTER CANDIDAT, ZAÏDOU TAVANDAY A MIS DU TEMPS AVANT DE S’EXPRIMER PUBLIQUEMENT DANS LES MÉDIAS. UNE PRUDENCE QUI S’EXPLIQUE PAR LE FAIT QU’IL LUI FALLUT COMPOSER, AU-DELÀ DE SA FAMILLE POLITIQUE POUR S’ASSURER UNE ÉVENTUELLE VICTOIRE.

AMINA HARITTI

PARCOURS ATYPIQUE, JURISTE DE FORMATION AVEC 2 MASTERS EN DROIT (DROIT DES AFFAIRES ET ENTREPRISES, CARRIÈRES JUDICIAIRES ET SCIENCES CRIMINELLES). ELLE S’EST ENSUITE ORIENTÉE VERS LES MÉTIERS DE LA COMMUNICATION, RESPONSABLE DU SERVICE CULTUREL DU DÉPARTEMENT DE MAYOTTE, SA PREMIÈRE EMBAUCHE EN ARRIVANT DANS L’ÎLE APRÈS DE NOMBREUSES ANNÉES PASSÉES EN MÉTROPOLE OÙ ELLE A GRANDI. ELLE A EMBRASSÉ UNE CARRIÈRE DE JOURNALISTE, ENSUITE ENTREPRENEUR ET COACH DE DIRIGEANTS DEPUIS 2017 POLITIQUES ET D’ENTREPRISES. « TOUT UN PARCOURS QUI FAIT QU’AUJOURD’HUI J’AI RÉUSSI À REGROUPER TOUTES CES COMPÉTENCES ACQUISES AU COURS DE MON PARCOURS POUR POUVOIR ÊTRE CELLE QUE JE SUIS AUJOURD’HUI ».

ZAÏDOU TAVANDAY

52 ANS, DIRECTEUR DE CABINET DU PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL DE MAYOTTE, DIRECTEUR DE CABINET DU MAIRE DE MAMOUDZOU, CONSEILLER TECHNIQUE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL DE MAYOTTE CONSEILLER TECHNIQUE DU MAIRE DE MAMOUDZOU, DIRECTEUR GÉNÉRAL-ADJOINT DES SERVICES À LA POPULATION DE LA COMMUNE DE MAMOUDZOU PUR PRODUIT DE MAMOUDZOU, N’A VÉCU QU’À MAYOTTE, ANCIEN CONSEILLER GÉNÉRAL DU CANTON DE MAMOUDZOU (2008/2015), ÉLU DE L’OPPOSITION COMME DE LA MAJORITÉ, ENTIÈREMENT ENGAGÉ DANS LA VIE ASSOCIATIVE, ANCIEN PRÉSIDENT DE LA MISSION LOCALE, UN ANCIEN SPORTIF QUI A FINI PAR PRÉSIDER UN CLUB DE FOOTBALL À MTSAPÉRÉ ET CADRE DE L’ADMINISTRATION TERRITORIALE.

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Propos recueillis par SIAK

Mayotte Hebdo : Qu’est-ce qui vous a poussé à être candidat ?

Amina Haritti : Je suis arrivée en politique il y a 6 ans, en qualité de suppléante du sénateur sortant Thani Mohamed Soilihi et puis j’ai enchaîné avec la responsabilité du parti LRM à Mayotte pour représenter le Président de la République sur l’île au niveau de ce parti. J’ai poursuivi avec une candidature aux côtés M. Majani à la mairie de Mamoudzou, suite à cela j’ai été élue conseillère municipale, puis conseillère communautaire. Par là j’ai accédé au poste de viceprésidente chargée de l’eau potable à Mayotte et de la communication. C’est un parcours que j’ai effectué au fil des années avec une expérience accumulée de par mon statut de cheffe de parti j’ai eu fait accès à certaines sphères au niveau de Paris là où se prennent beaucoup de décisions et à travers cette fonction, j’ai su accompagner certains élus, certains projets, avec des résultats positifs à la clé. C’est dans ce sens-là que j’ai poursuivi mon action en me portant candidate à ces élections.

Zaïdou Tavanday : Je peux dire de manière très officielle que je suis candidat à ces sénatoriales parce que j’ai franchi le cap de dépôt de dossiers à la préfecture. Je porte en moi la passion d’être utile à ce territoire, la passion de donner à la future génération ce que j’ai de meilleur, les expériences acquises sur le terrain, 25 années d’état de service en gestion de collectivité, quasiment 25 ans en tant que cadre éminent de collectivité déjà, DGA, DG, membre de cabinet, collaborateur, directeur de cabinet de la plus grosse commune de Mayotte, puis au Département, mais aussi le bonheur d’être conseiller général durant 7 ans, élu de la majorité, de l’opposition, il y a eu des réussites, des succès mais également des échecs. Le cumul de tout cela ce sont des expériences, et les expériences ne valent que si elles sont partagées, profond de mon cœur, en termes de disposition psychologique, j’ai le sentiment de marcher parfois en zone de guerre. Des crises partout, crise de l’eau sans précédent, qui ne doit pas faire oublier la crise de l’immigration irrégulière qui est exceptionnelle, des services publics basiques non adaptés, même chose s’agissant des équipements structurants. Il n’y a pas que l’aéroport, il suffit de voir l’état des routes sur lesquelles nous circulons et les embouteillages qu’il y a ici. Je parlerai aussi de la misère, cette rupture d’égalité devant tous les droits sociaux. Pourquoi sommes-nous cantonnés à 50 % par rapport à la métropole ou les autres DOM ? Cette notion de convergence de droits est aussi urgente que les autres urgences, priorités et des défis monstres qui se dressent devant nous. Après 20 ans de vie en collectivité, je pense sincèrement avoir la lucidité pour apercevoir tout ça et je ne dois pas avoir beaucoup de difficultés non plus à les prioriser, puisque la plupart de ces enjeux, j’ai eu à les vivre ou aller dans des salles où des grands élus ont eu à les séquencer. J’ai en moi de l’expérience que j’ai envie de partager aujourd’hui d’autant plus que mon élection en tant que sénateur cela va me donner cette légitimité pour me permettre de continuer ce combat mais à un étage supérieur. Parce que tous ces responsabilités

que j’ai eu à assumer, très exaltantes en tant que conseiller général et collaborateur d’élus éminents car d’un niveau qui faisait de moi un bon capitaine .Pour prendre un terme militaire être sénateur c’est pour moi d’endosser l’uniforme d’un général pour conduire cet étage supérieur du combat.

MH : En quoi vous serez un bon sénateur ?

AH: Le projet que je propose c’est lequel ? Celui d’accompagner les collectivités locales, c’est l’un des rôles d’un sénateur, défendre les intérêts de ces collectivités. Aujourd’hui dans le cadre de mes activités et de mes fonctions électives, j’accompagne la mairie de Mamoudzou au sein de laquelle je travaille en étroite collaboration avec le premier magistrat. J’ai décidé d’être une élue de l’opposition mais une élue constructive. Je travaille également avec le Président de la CADEMA, nous avons été élus il y a 3 ans, je travaille aussi en étroite collaboration avec le Président du Syndicat des Eaux, je suis sa vice-présidente, ainsi qu’avec d’autres élus. Qu’est-ce qu’on demande à un sénateur si ce n’est d’apporter des solutions, des réponses positives aux collectivités locales. C’est ce que j’ai fait jusqu’à présent et je demande aux élus de me faire confiance et de me laisser plus loin pour les accompagner.

Z.T : D’abord c’est depuis 1979 que Mayotte élit un sénateur, Marcel Henry ayant été le premier avec ses 3 mandats successifs de 9 ans, une personnalité vraiment éminente. Et depuis 2004, deux sénateurs à chaque fois. Moi appartenant à une nouvelle génération, j’ai beaucoup appris d’eux ne serait-ce que par observation. Et en observant, j’en ai fait un axe majeur de notre campagne. Sénateur, les minutes qui suivent votre élection vous devenez un grand élu de la République. A côté de ce destin national il y a un pan local et à mon sens n’a pas toujours été bien animé, en tous cas ces dernières années. Un sénateur c’est l’élu des élus, il reçoit sa légitimité du vote des élus locaux. Je suis profondément convaincu qu’il doit être très très proche de ces derniers pour faire en sorte qu’ici à Mayotte, sur le territoire où on est élu, d’abord que les relations entre acteurs soient propices à la mise en œuvre de projets. Et puis aller à la rencontre de ces élus pour s’assurer que les dossiersue vous allez prendre en main au niveau national vis-à-vis des ministères sont bien compatibles avec les attentes de ceux qui bâtissent au jour le jour la vie des Mahorais. J’ai fait en sorte que mon entrée en campagne soit faite de manière très consensuelle, d’abord à Mamoudzou là où j’ai ma vie politique. Aux dernières municipales, 11 listes ont porté la contradiction, 9 têtes de liste sont bienveillantes à l’égard de ma démarche de candidature au-delà des sensibilités politiques. S’il n’y avait pas ce consensus autour du Maire de Mamoudzou pour coopter ma candidature, je me serais abstenu. Il y a un autre couplage avec ma famille politique les LR et le Président du département avec sa majorité et des éléments de l’opposition qui sont favorables à ma candidature. Cela nous a permis d’aller chercher jusqu’à 10 municipalités qui ne sont pas forcément de notre mouvance politique. J’ai exprès voulu prendre

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DOSSIER

le temps nécessaire pour comprendre si ma démarche était utile, inclure dans ma démarche tous ces élus locaux. C’est quelque chose qui va forcément m’engager, demain je ne pourrai pas être un homme de camp, un homme de clan, un élu clivant, je dois être un élu qui rassemblera et donnera envie aux élus locaux ici de se réunir, de parler d’une seule voix, une chose que les Mahorais appellent de leurs vœux et la tête de file est le Président du département. Je ne cherche pas un poste de sénateur pour affaiblir un quelconque exécutif.

MH : Quels sujets aimeriez-vous défendre au sénat ?

A.H : L’actualité et ma fonction actuelle m’obligent à positionner l’eau au-dessus de mes priorités. On sait que c’est dossier brûlant à Mayotte où l’on fait face à une situation qui perdure depuis de nombreuses années. Mon objectif est d’enfin pouvoir sortir notre île de cette problématique d’eau potable et de faire en sorte qu’on puisse avoir de l’eau de manière pérenne pour que ces choses-là soient réglées une bonne fois pour toute. Nos collectivités connaissent de très grandes difficultés, leurs dotations doivent être augmentées, elles doivent être travaillées avec des projets ficelés accompagnés par l’Etat. Il y a également la question de la jeunesse, très nombreuse, qui demande à avoir des perspectives d’avenir. La réalité de Mayotte aujourd’hui, c’est une moitié de notre population qui a moins de 18 ans, il va falloir s’occuper de ces jeunes car ce sont eux qui vont reprendre les rênes du territoire dans 10 à 20 ans. Alors comment allons-nous faire pour leur donner les moyens de leurs ambitions ? Il y a aussi le sujet des personnes âgées, elles sont vulnérables et très mal accompagnées ; cela nous amène à la convergence des droits qui est un élément très important. Des sujets il y en a tellement qu’effectivement il y a de quoi occuper toute une mandature, il faut donc se donner les moyens de nos ambitions. L’économie figure également dans mes priorités, le tissu entrepreneurial mahorais est constitué de beaucoup de PME auxquelles on doit proposer du travail. Cela passe obligatoirement par les investissements qui doivent être faits à travers des fonds à délivrer aux collectivités locales afin qu’elles puissent entamer des travaux qui bénéficieront aux entreprises qui se chargeront de les réaliser. Développer un pays c’est disposer des infrastructures nécessaires aux populations, on parle de la route de contournement de Mamoudzou et d’autres infrastructures qui font défaut à notre île.

Cela passe par de nombreux financements et l’objectif est d’aller chercher les moyens pour pouvoir investir à Mayotte.

Z.T : J’ai la chance immédiate d’avoir une bonne équipe autour de moi. D’abord ma suppléante, Mme Marise Ali, qui est adjointe au maire à Kani kéli et puis ma direction de campagne qui est dirigée de main de maître par Abdoul Kamardine, conseiller départemental de Mtsamboro, entouré d’une équipe d’une douzaine de personnes et puis j’ai un comité de soutien présidée par le maire de Kani kéli qui n’est pas LR du tout mais qui a fait le choix de s’inscrire dans cette dynamique, à la tête d’un groupe de 100 individus qui sillonnent Mayotte pour mobiliser au maximum. On a un document qui repose sur 9 points, rassemblement des Mahorais, la défense des valeurs républicaines, l’avenir de nos collectivités locales qu’il faut travailler, l’évolution institutionnelle, l’égalité sociale réelle, pleine et entière pour 2026 au plus tard, un agenda concerté et clair, accompagné d’une planification budgétaire des grandes infrastructures, la maîtrise des frontières maritimes, la sécurité des biens et des personnes , l’éducation, la formation, la recherche et l’emploi, de même que l’agriculture, la pêche et la sécurité alimentaire. L’immigration clandestine est le cancer de tous les maux qui frappent Mayotte ces dernières années. Tout ce paysage étant brossé, pour moi la mère de bataille que j’ai bien identifiée restera l’argent qu’il faudra trouver pour ces projets car c’est le nerf de la guerre. La fiscalité locale est un outil sur lequel nous avions tous placé un espoir, au lendemain de la départementalisation, pour construire notre autonomie financière, leur libre administration en se donnant des moyens propres. Dix ans après, le bilan est très mitigé. Parmi les 17 communes de Mayotte, aucune ne dépasse, en termes d'assiette fiscale, les 30 %. Sans parler d’échec, là il y a bien une panne. Avec la conjoncture actuelle, ce chantier est pour moi, prochain sénateur, la priorité des priorités. Il y a les enjeux de la jeunesse, avec 2 axes majeurs, l’éducation d’une manière générale qui sera l’outil pour élever l’humanité de nos jeunes, la vraie richesse de Mayotte. Et à la pointe de cette démarche, la vraie richesse que la France nous a donnée ici depuis 150 ans, l’université de Dembéni. Nous devons passer à un cap supérieur avec une université de plein exercice parce que le contexte l’exige parce qu’il va nous falloir chaque année produire des jeunes formés capables de porter les vrais enjeux du territoire. Force est de constater que c’est encore loin d’être le cas à Mayotte.

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MH : A quel groupe politique souhaiteriez-vous vous rattacher ?

A.H : Moi je parle de manière générale, actuellement on a un gouvernement et un Président de la République, Emmanuel Macron, qui est à son 2ème mandat, encore une fois c’est aller frapper à toutes les portes. Lorsqu’on parle de sénateur, il n’exerce pas ses fonctions qu’au niveau du Sénat, il a également un travail de lobbying à faire. Prenons l’exemple de nos voisins réunionnais, ils ont accès à certaines sphères et cela leur permet de défendre les dossiers et amener les élus locaux à s’inscrire dans une démarche collective, à avoir une même vision, une même direction pour faire aboutir leurs projets. Ma démarche sera celle-là, accompagner nos élus, être à leur écoute et définir ensemble les sujets préoccupants, les sujets principaux, les priorités qu’on va défendre auprès de Paris. Le sénateur fait la loi, mais il ne fait pas que ça, il a à sa disposition toute une batterie de moyens pour défendre les intérêts des territoires, notamment les ordonnances qui peuvent être demandées au niveau du gouvernement. Il y a plein de choses qui vont devoir être traitées.

Z.T : Cette élection est fortement soumise aux pressions locales, pour la remporter je dois rencontrer un à un les 540 grands électeurs de l’île, sachant que les LR on les évalue à 138, ce nombre est insuffisant pour gagner l’élection. Certes on a besoin que tous les éléments LR resserrent les rangs mais il y a un travail de surpassement de soi à réaliser. Une fois élu en ce qui me concerne il n’y aura aucune ambiguïté, j’irai siéger aux côtés des élus de ce parti, qui d’après les simulations, ce sera la droite et le centre qui composeront la majorité au Sénat au soir du 24 septembre 2023. Il y a des endroits où ça peut beuguer un peu, des petits accidents ici et là, mais globalement il ne devrait pas y avoir de grandes surprises. En politique les amis servent à quelque chose, mais ce qui s'impose à moi, c’est est-ce que j’aurai assez de caractère pour faire comprendre aux amis que le texte qui est sur la table n’est pas à la hauteur des enjeux de mon territoire ? Et au-delà de ce périmètre, je pense que je ne manquerai pas de caractère parce que j’ai un vécu quand même, avec les années d’expérience que j’ai cité un peu plus haut, et ce jeu politique majorité/opposition, je l’ai déjà expérimenté au sein de l’hémicycle du Conseil départemental de Mayotte, il n’y a pas de raison à ce qu’il m’impressionne au Sénat, même s’il s’agit d’une assemblée beaucoup plus grande.

MH : La crise de l’eau demeure d’actualité à Mayotte, comment sortir de ce bourbier ?

A.H: Pour vous répondre, je voudrais rappeler que lorsqu’on est venu aux affaires, en 2004 nous l’équipe de Fahardine Ahamada, nous avons trouvé quand même un déficit avoisinant les 40 millions d’euros. Vous vous imaginez bien que débuter un mandat dans ces circonstances c’est quand même assez compliqué, comment engager des projets ? Comment on va devant les entreprises pour leur demander d’engager des projets si on n’a pas les moyens de les payer. Il a d’abord

fallu travailler sur cette affaire de budget, assainir les finances du syndicat et ensuite aller chercher les moyens d’engager de nouveaux projets et en tout cas poursuivre ceux qui avaient déjà été entamés. Cette question de finances ne se pose plus aujourd’hui, nous faisons face à des problématiques de production, insuffisante, de stockage, il faudrait envisager le double des quantités disponibles actuellement, de distribution avec des canalisations désuètes. Toutes ces démarches doivent être entamées, ce sont des projets à court, moyen et long terme qui devront être réalisés. Une nouvelle urgence s’est rajoutée depuis quelques mois au cours de l’année dernière avec cette crise de l’eau conséquence d’un manque de pluies. On est obligé d’envisager d’autres solutions. C’est vraiment une question qui doit être réglée à plusieurs niveaux. Au niveau de l’urgence pour sortir Mayotte de cette crise car il n’est pas envisageable ni tolérable de faire supporter ces coupures comme aujourd’hui mais on y est obligé. Maintenant comment faire pour qu’une fois la crise passée on puisse faire les investissements nécessaires pour qu’on ne se retrouve plus confrontés à ce genre de problèmes.

Z.T : D’abord je voudrais préciser que je ne suis pas candidat au poste de Président du Syndicat des eaux, ni de DGS, donc il ne s’agit pas ici d’accabler ni l’un ni l’autre. Je constate sur le plan local que j’ai eu raison de faire campagne que je mène actuellement. L’eau est une compétence des communes transférée à un syndicat. Je vois une crise sans précédent, très évidente qui ressort, un président de syndicat qui est isolé et quasiment 16 maires avec la population qui souffrent et qui n’ont pas d’information. Je me dis là qu’en termes d’organisation et d’harmonisation, de savoir travailler ensemble, cette crise met en évidence un fait, on n’a pas su travailler sur ça. A un moment donné les maires devraient tous être au chevet du Président du Syndicat des Eaux et comme un seul homme faire corps commun face à l’Etat à l’échelle locale et nationale pour trouver une solution. Si les 16 maires avaient entouré le président du SIEAM, le gouvernement n’aurait jamais pris le temps de gérer cette crise comme il l’a fait, avec des mesures prises au fil de l’eau pour essayer d’atténuer la crise alors qu’on a affaire ici à un élément qui relève du patrimoine nationale. Cela veut dire qu’il est inacceptable que les Mahorais aient soif pendant que les citoyens d’autres régions de France aient l’eau qui coule tous les jours. Du coup, le quoi qu’il en coûte, cette expression gouvernementale, devrait pleinement nous bénéficier sur le territoire dès les premiers moments de la crise.

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ELECTIONS SÉNATORIALES 2023

ENTRETIEN AVEC SIAKA MAHAMOUDOU

IL VEUT ACCOMPAGNER

LA JEUNESSE MAHORAISE

JEUNE MILITANT AU PARTI SOCIALISTE À BESANÇON, SIAKA

MAHAMOUDOU FAIT PARTIE DES CANDIDATS QUI BRIGUENT LES DEUX SIÈGES DE SÉNATEURS DE MAYOTTE AU PALAIS DU LUXEMBOURG CE DIMANCHE 24 SEPTEMBRE 2023. AGENT DE LA MISSION LOCALE À MAMOUDZOU, IL SE VEUT PROCHE DE LA JEUNESSE MAHORAISE DONT IL VEUT ÊTRE L’ARDENT DÉFENSEUR S’IL RÉUSSIT À SE FAIRE ÉLIRE.

SIAKA MAHAMOUDOU

34 ANS

NATIF DU VILLAGE DE CHÉMBÉNIOUMBA DANS LE NORD DE MAYOTTE, A PASSÉ TOUTE SON ENFANCE DANS LE VILLAGE DE M’ROIWALÉ DANS LA COMMUNE DE TSINGONI. IL A FRÉQUENTÉ LE COLLÈGE DE CHICONI ET LE LYCÉE DE SADA OÙ IL A DÉCROCHÉ UN BAC ECONOMIE ET SOCIAL (ES). IL POURSUIT SES ÉTUDES DANS L’HEXAGONE À BESANÇON OÙ IL OBTIENT UNE LICENCE ET ENSUITE UN MASTER DE SCIENCES POLITIQUES À TOULOUSE. IL S’EST IMPLIQUÉ DANS LA POLITIQUE DÈS SON ARRIVÉE EN MÉTROPOLE AU SEIN DU PARTI SOCIALISTE ET REGRETTE AUJOURD’HUI SA DÉSAGRÉGATION QUASI COMPLÈTE. DÈS LORS, IL S’EST FORGÉ L’IDÉE DE DEVENIR UN ACTEUR POLITIQUE ET A CHOISI DE REVENIR SERVIR SON ÎLE DANS L’IDÉE DE COMPRENDRE CE QU’EST LA POLITIQUE MAHORAISE. IL DÉPLORE QUE LE PS LOCAL AIT ÉTÉ CADENASSÉ PAR DES PERSONNALITÉS QUI N’ONT LAISSÉ AUCUNE CHANCE D’EXPRESSION AUX JEUNES MILITANTS. IL TRAVAILLE À LA MISSION LOCALE À CAVANI DANS L’INSERTION DES JEUNES.

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Propos recueillis par SIAK

Mayotte Hebdo : Qu’est-ce qui vous a poussé à être candidat ?

Siaka Mahamoudou : La politique m’a toujours paru comme étant un des meilleurs moyens d’assurer le développement d’un territoire. Je m’en suis intéressé dès mon jeune âge, et lorsque je me suis retrouvé étudiant en métropole il y a quelques années j’ai milité au sein du parti socialiste (PS), à Besançon puis à Nantes. A la fin de mes études j’ai décidé de m’investir en faveur de mon territoire d’origine. Je considère aujourd’hui que j’ai une expérience suffisante dans ce domaine pour aller de l’avant dans la défense des intérêts des Mahorais.

MH : En quoi vous serez un bon sénateur ?

S.M : Très clairement, je dirai que nous avons de très bons candidats pour ces élections sénatoriales-ci, le seul élément qui me différencie par rapport aux autres c’est l’amour que j’ai pour cette île et ses habitants. J’ai un grand dessin pour eux, la réussite de tout un chacun afin que tous les Mahorais puissent s’en sortir professionnellement et socialement quels que soient leurs choix de vie. Cela rentre dans ma vision globale du développement économique et social de ce territoire. Je n’ai pas la prétention de me considérer comme un étant le candidat parfait pour ce scrutin toutefois, je sollicite la confiance des grands électeurs de Mayotte pour qu’ils fassent de moi un des deux prochains sénateurs de cette île. Nous sommes majoritairement une population jeune qui a besoin d’actions dans tous les domaines, le sport, l’éducation, l’économie, l'entrepreneuriat et la création d’emplois, etc. J’aimerai que cette jeunesse arrive à s’épanouir dans l’effort et la créativité, qu’elle puisse aller encore plus loin dans ce qu’elle a déjà entrepris ou qu’elle envisage d’entreprendre, afin qu’elle devienne professionnelle dans tous les domaines d’activité qu’elle se sera choisi. Je souhaite l’encourager et l’accompagner dans toutes ses initiatives et projets.

MH : Quels sujets aimeriez-vous défendre au sénat ?

S.M : Je voudrais préciser que le responsable politique que j’entends être n’accepte pas la notion de priorité dans les chantiers importants à ouvrir pour Mayotte. Dans la mesure où tout le monde s’accorde sur le fait que l’île cumule des retards considérables dans tous les domaines, il me paraît de bon sens de parler plutôt de choix à faire puisqu’il est impossible de s’atteler à tout en même temps. Pour ma part je retiendrai 3 sujets majeurs à défendre : l’économie, la sécurité et le sport. Nul ne peut contester le fait que les clubs mahorais sont les meilleurs en matière de sport collectif, toutes disciplines confondues, dans l’Océan indien. Nos jeunes désirent persévérer dans ce sens, aussi je souhaite contribuer à dégager des canaux pouvant les conduire à des niveaux professionnels au niveau national. Le sénateur que j’espère devenir aura à travailler avec le ministère des sports pour que ces voies soient mises en place dès que possible, en évitant bien sûr la contrainte de devoir transiter par La Réunion, un gros problème auquel sont actuellement confrontés nos sportifs. En dehors des sports collectifs,

il existe d’autres disciplines en pleine expansion, on a vu récemment que des athlètes mahorais ont pu prendre part à d’autres compétitions nationales grâce aux performances qu’ils ont réalisées pendant les Jeux des Iles de l’Océan Indien à Madagascar, en particulier dans le relai. Je serai là pour les booster, les aider à s’exprimer et montrer leurs compétences.

Sur le plan économique Mayotte est sujette à beaucoup de problèmes en ce moment. Notre territoire a traversé une première crise qui est celle de la Covid 19, laquelle a engendré beaucoup de soucis, à peine commençait-elle à remonter la pente, que la voilà confrontée à la crise de l’eau, une crise d’une ampleur sans précédent qui impacte tout le monde économique mahorais. Je pense que la meilleure des solutions est de proposer une zone franche afin de protéger nos entreprises et leur permettre de se refaire une santé. Cela dure 5 ans et va nous permettre de vérifier leurs capacités réelles de résistance. Il faut aider les plus petites d’entre elles et les plus fragiles. Il est bien connu que nos jeunes sont très nombreux à vouloir créer leurs propres activités professionnelles, il leur manque principalement les moyens de le faire et un emplacement pour s’installer. C’est important de se pencher sur ces 2 questions car en s’installant durablement ces petites et moyennes entreprises (PME) vont pouvoir embaucher. Par ce moyen, la société mahoraise sortira de l’idée selon laquelle pour trouver du travail il faut exclusivement postuler auprès des administrations locales et structures publiques. Pour nos jeunes ce sera l'occasion de se sentir libres d’aller au bout de leurs efforts et donner le meilleur d’eux-mêmes. L’économie c’est aussi le tourisme, malheureusement on va se heurter à un préalable qui est la disponibilité en eau car sans eau il sera difficile de développer un tourisme. Toutefois, je ne désespère pas que nous puissions sortir rapidement de cette situation de pénurie d’eau, ce qui m’amène à faire remarquer que cette crise actuelle ne nous empêche nullement de réfléchir à quel type de tourisme nous voulons concrètement dans cette île. Là-dessus également il va nous falloir faire des choix car les cas de certains pays nous montrent ô combien le tourisme de masse est une contrainte. L’abondance de tourisme ne signifie pas forcément une bonne santé économique et une bonne qualité de vie sociale. Elle peut aussi être vecteurs de dangers dont il faut en tenir compte dès à présent, s’organiser suffisamment pour les éviter.

S’agissant de la sécurité, je vais en parler de manière globale. J’admets que l’Etat a beaucoup fait ces derniers mois, en dépêchant des forces de l’ordre sur l’ensemble du territoire. Mais je suis contraint de poser 2 questions, va-t-il en être ainsi pour toujours ou s’agit-il d’une solution purement temporaire ? Nous savons tous que ce personnel est installé dans des hôtels ici et là et non dans des casernes prévues à cet effet. Il faut donc trouver une solution pour le long terme. Sans vouloir polémiquer, il est quasi impossible de dissocier l’insécurité de la question de l’immigration clandestine, bien qu’elle soit suffisamment importante pour être traitée entièrement à part. Pour commencer je proposerai que tout étranger irrégulier faisant

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l’objet d’une condamnation pénale soit reconduit définitivement dans son pays d’origine une fois sa peine effectuée. Il est nécessaire à mes yeux que tous les immigrés disposant d’un titre de séjour puissent circuler librement dans l’espace national et ultramarin et se fixer sur le territoire de leur choix. Continuer à parquer autant de monde sur un aussi petit territoire de 374 Km² ne peut qu’engendrer des problèmes en cascades. Au bout d’un moment ça va exploser et les autorités ont une obligation d’éviter qu’une telle tragédie ne se produise. Une autre question qui se pose, la situation de tous ces jeunes clandestins livrés à eux-mêmes, ils traînent sur la route ne sachant pas où aller dans les villes et villages. L’Etat doit décider s’il y a lieu de les reloger et de s'occuper d’eux (ou pas) car ce n’est pas avec les 30 € mensuels qu’ils perçoivent qu’ils vont pouvoir vivre dignement, mais c’est un autre débat. Dans l’immédiat, moi je pense à leur propre sécurité. Je pense personnellement que

nous ne devons pas attendre que les choses s’enveniment, dans la mesure où ils sont sans papiers, ils doivent être renvoyés vers leurs pays d’origine.

MH : A quel groupe politique souhaiteriezvous vous rattacher ?

S.M : Moi, je me décris dans les divers droites, par conséquent cela ne me dérangera pas de siéger parmi les LR, je me voie plus avec eux qu’avec une autre famille politique. Voyez-vous, lorsqu’on se rattache à un groupe on a toujours des priorités à défendre, en l’occurrence les priorités des Mahorais qui doivent être prises en considération et défendues par le groupe auquel on a adhéré.

MH : Question d’actualité, le ministre comorien offre d’étendre au département de Mayotte, ile comorienne, certaines épreuves des JIOI en 2027, qu’en pensezvous ?

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S.M : On ne peut pas empêcher les autorités comoriennes de penser ce qu’elles veulent. Pas plus qu’elles ne peuvent empêcher les Mahorais de penser le contraire. Dans la Constitution française, Mayotte est désormais un département français d’Outremer et les Comoriens n’y changeront rien quoi qu’ils disent. Le DOM de Mayotte désire ardemment organiser ces jeux sur son sol, en tant que sénateur, mon devoir sera de contribuer à matérialiser ce vœu de nos populations et par conséquent, je soutiens à 100 % ce projet. Par conséquent, je soutiens la rénovation d’équipements sportifs existants dans notre département et la construction de nouveaux à différents endroits adéquats. L’offre du gouvernement comorien est à mes yeux une déclaration sans intérêts aucune, si ce n’est d’engendrer une polémique de plus qui n'apporte rien aux deux parties. Mon devoir est de rassurer nos populations et de conseiller nos différents responsables à se focaliser sur notre propre projet d’accueillir un jour ces jeux sur notre territoire. Que les Comoriens nous croient incapables d’organiser ces jeux chez nous, c’est leur problème, nous n’avons pas à jouer leur jeu, c’est stérile, puérile et surtout illusoire. Quand bien même ils continueraient à demander une

aide internationale pour conquérir le sol mahorais, cela reste un jeu idiot dans lequel nous n’avons pas à prendre part parce que nous le savons dores et déjà irréalisable. Notre objectif reste l’émancipation de nos jeunes sur le plan sportif, éducatif, culturel et dans tous les domaines. A nous de faire en sorte de leur donner satisfaction et de nous investir en conséquence.

Malgré les multiples sollicitations et relances de la SOMAPRESSE, le candidat Mouslim Abdourahamane n’a pas souhaité s’exprimer dans les colonnes de nos différents titres (le quotidien Flash Info et l’hebdomadaire Mayotte Hebdo).

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LE VILLAGE NATURE NOMADE S’INSTALLE À LA CITÉ SCOLAIRE DE BANDRÉLÉ

En début d’année, les Naturalistes de Mayotte ont mis en place un Village nature nomade. Cette offre pédagogique est à destination des établissements scolaires du second degré. L’association sillonne le territoire pour s’implanter pendant plusieurs jours dans chaque collège et lycée de l’île. Cette semaine, le Village est à la cité scolaire de Bandrélé.

Organisée dans le cadre de la mission inter

Le projet du Village nature nomade, créé par les Naturalistes de Mayotte, tire sa force de l’expérience de l’association sur l’éducation à l’environnement et au développement durable. Par le passé, des actions étaient déjà menées, mais très « parcellaires ». Comme l’explique François Beudard, le directeur, c’est face à ce constat, que l’association s’est décidée à « essayer de regrouper un peu toutes nos expertises et nos animateurs et différentes

associations, pour essayer de se retrouver dans un village nature ». Un village qui rassemble donc les acteurs de l’éducation à l’environnement. « Et nomade, parce qu’il bouge d’établissement en établissement. »

Une culture commune

Biodiversité, développement durable, naissance de l’île, eau et la santé, érosion des sols ou encore étude du littoral sont les

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Agnès Jouanique
Les collégiens et lycéens ont pu en découvrir plus sur l’étude sur la création et l’évolution de l’île de Mayotte, ce mardi.

thématiques abordées par les différents stands présents au Village nature nomade. « On a mis en place un panel d’activités pédagogiques pour les élèves », note le directeur. Pendant environ trente minutes, les élèves écoutent les animateurs et posent leurs questions. L’objectif pour l’association est de sortir des traditionnelles maquettes. « L'idée, c'était de rassembler les élèves dans une culture commune autour des risques naturels, de la santé environnement et de la biodiversité », insiste ce dernier.

Stand après stand, les élèves peuvent donc profiter d’une vidéo retraçant la création de l’île, des maquettes portant sur les mangroves et la barrière de corail, l’érosion des sols, mais aussi découvrir un microscope. « Est-ce que vous savez ce qu’est une barrière naturelle ? Qu’est-ce que l’on peut apercevoir dans le lagon ? » Telles sont les questions posées aux jeunes. Afin de découvrir concrètement la biodiversité marine, les collégiens et lycéens peuvent profiter d’une séance d’immersion sous-marine. A l’aide d’un casque de

réalité virtuelle, ils peuvent profiter d’une vue subaquatique avec dauphins ou baleines. « On cherche vraiment à venir apporter des informations, par des outils pédagogiques innovants », argumente François Beudard.

Une action à pérenniser

Engagée sur deux années scolaires, entre 2022 et 2024, l’association essaie de mobiliser des fonds complémentaires afin de pérenniser l’action. Selon le directeur, le but serait de « pouvoir même inviter d’autres acteurs de l’éducation environnementale pour agrandir le village ». Cette évolution permettrait ainsi d’apporter davantage de connaissances et d'expertise auprès des élèves. D’ici à la fin de l’année 2024, les Naturalistes ambitionnent de mener une action du Village nature nomade dans la totalité des collèges et lycées de l’île. n

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Le littoral, les risques et les barrières naturelles sont étudiés par les élèves.

LISEZ MAYOTTE ABDOU SALAM BACO

AGRÉGÉ DE LETTRES MODERNES ET DOCTEUR EN LITTÉRATURES FRANCOPHONES, CHRISTOPHE COSKER EST L’AUTEUR DE NOMBREUX OUVRAGES DE RÉFÉRENCE SUR LA LITTÉRATURE DE L’ÎLE AUX PARFUMS, NOTAMMENT UNE PETITE HISTOIRE DES LETTRES FRANCOPHONES À MAYOTTE (2015) DONT IL REPREND, APPROFONDIT ET ACTUALISE, DANS CETTE CHRONIQUE LITTÉRAIRE, LA MATIÈRE.

En 1996, respectivement cinq et trois ans après ses deux premiers romans –Brûlante est ma terre (1991) et Dans un cri silencieux (1993), Abdou Salam Baco publie son premier recueil de nouvelles, aux éditions réunionnaises Grand Océan, sous le titre La Belle du jour. Il se compose de neuf textes respectivement intitulés :

• « Et Saint-Denis m’accueillera »

• « Un Black à Saint-Étienne »

• « Le Menteur »

• « Les Combattants de l’ignorance »

• « M’béki l’Africain »

• « Le Vrai-faux coupable »

• « Et Dieu fera la part des choses »

• « La Belle du jour »

• et « Le Temps des amants »

Comment relier ces textes ? Du point de vue du fond, on relève des lieux : SaintDenis de La Réunion, Saint-Étienne en Métropole et le continent africain. On devine des personnes : l’étudiant noir de Saint-Étienne, le menteur, l’instituteur de Mayotte, le rebelle africain et Bakari Koussou. Du point de vue de la forme, certains titres se limitent à un groupe nominal complété ou non ; on trouve aussi de brèves propositions lancées par la conjonction de coordination « et » Mais d’apparence, la nouvelle la plus importante paraît l’avant-dernière. Son titre coïncide avec celui l’ensemble du recueil. Elle vient presque en dernier et permet peut-être de réévaluer, rétrospectivement, ce qui précède. Qui est donc cette belle du jour ? Est-ce une personne ? S’agit-il d’une femme ? Oui et non.

La Belle du jour peut être une jolie femme mais ce référent n’épuise pas son sens. La belle du jour, c’est une expression synonyme de « miroir aux alouettes » , c’est quelque chose qui attire et qui trompe.

C’est une illusion qui abuse celui qui en est victime. Et chacune des nouvelles d’Abdou Salam Baco de mettre en scène une ou plusieurs belles du jour. La raison pour laquelle Mayotte n’apparaît qu’en filigrane, à tout le moins dans les titres, est que les nouvelles ne se passent pas à Mayotte, mais dans les ailleurs qui attirent les Mahorais, au premier rang desquels l’île indianocéanique sœur de La Réunion. La belle du jour est donc un concept proposé par l’auteur pour redéfinir l’exotisme. Généralement considéré, de façon hâtive, comme une attirance pour l’ailleurs, il est ici redéfini comme une attirance négative pour un endroit plus ou moins éloigné, une attirance négative pour un ailleurs qui déçoit. On peut se demander s’il s’agit d’une mauvaise définition de l’exotisme, une vision erronée ou la révélation du caractère négatif de l’exotisme comme fuite de chez soi et perte de ses racines. La question est d’autant plus légitime que la belle du jour n’est jamais démasquée car ceux qui ont un mauvais usage du monde et une expérience amère de l’ailleurs mentent et idéalisent leur séjour pour ne pas retourner chez eux déshonorés.

Dans cette nouvelle série, nous explorerons donc chacune des nouvelles du recueil pour y aborder le thème de la belle du jour sous chacune de ses formes mais nous serons également attentif à ce que ces textes nous permettent d’apprendre sur Mayotte ainsi que sur Abdou Salam Baco car ce thème est pour lui existentiel et constitue un fil conducteur de l’œuvre : « La Belle du jour est à l’origine une dénonciation de l’attirance dangereuse qu’exerce La Réunion sur un certain nombre de compatriotes ; puis je me suis rendu compte que cette attirance dangereuse n’était pas seulement le fait de La Réunion, il y avait également la Métropole, notamment Marseille au début. Cela ne veut

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Abdou Baco Mambo, La Mission civilisatrice, Paris, Menaibuc, 2011, p. 54.
LITTÉRATURE

pas dire que les Mahorais et les Mahoraises ne doivent jamais quitter leur île, bien sûr ; je voulais simplement faire comprendre que quitter son pays à la recherche d’une hypothétique vie meilleure ailleurs était une erreur dangereuse, qui aboutit souvent à une impasse. » 1*

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Christophe Cosker

UNE ÎLE EN TRAVAUX

LE FUTUR TERRE-PLEIN DE M’TSAPÉRÉ AU STADE DE LA CO-CONSTRUCTION

LA SEMAINE DERNIÈRE, UN GROUPE D’HABITANTS DE M’TSAPÉRÉ ÉTAIENT RASSEMBLÉS SUR LE TERRE-PLEIN QUI SÉPARE LE VILLAGE DE LA ROCADE. Y ONT ÉTÉ RAPIDEMENT ÉVOQUÉS LES FUTURS PROJETS DE LA VILLE DE MAMOUDZOU, UN PALAIS DES CONGRÈS, UN PARC, LA MAIRIE ANNEXE, LA DARSE NAUTIQUE, AVANT QUE LA PAROLE NE SOIT LAISSÉE AU PUBLIC POUR RECUEILLIR LES IDÉES.

« Il faut faire attention au niveau de la mer, il y a toujours un risque d’inondation. Il faut aussi prendre le littoral en considération, les jeunes ici sont toujours allés s’y baigner, encore aujourd’hui », donne comme conseil Dhinouraini Boina à Gjerj Miçari, l’architecteurbaniste du cabinet AEI. Celui qui a grandi à M’tsapéré sait de quoi il parle, il a vu le village se transformer avec l’arrivée du terre-plein, qui accueille une réunion publique, vendredi soir dernier. Il fait partie des nombreux intervenants qui ont assisté à la présentation du projet faite à la fois par le cabinet d’architecture et le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla. « On le fait avec vous », promet l’élu, qui est aussi là pour écouter les propositions. Pour rappel, en parallèle de la première ligne du Caribus (qui reliera Passamaïnty et les Hauts-Vallons), la Ville de Mamoudzou compte ajouter plusieurs éléments au terre-plein. Outre la mairie annexe à côté des locaux de la Dealm, la refonte de la darse nautique et la halle des pêcheurs

Une centaine de personnes a voulu en savoir plus sur les ambitions de la municipalité sur le terre-plein de M’tsapéré.

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Alexis Duclos

devraient former un nouvel ensemble dédié évidemment à la pêche. Tandis que tout au bout du terre-plein, à proximité du rond-point de Doujani, un palais des congrès entouré d’un parc doit aussi voir le jour.

Une caserne de pompiers

Le public présent a loué ces futurs équipements sur le rare foncier disponible à proximité du centre de Mamoudzou. Il n’a pas non plus oublié de faire des propositions. Une résidence pour personnes âgées, un parc, « on n’en a très peu », fait observer une participante à la réunion, ou une future caserne de pompiers ont été émis comme idées. Le lieu dispose encore d’espace disponible et nécessitera sans doute des aménagements, voire des arbitrages. Car la préfecture ne serait pas contre une future cité administrative sur le terre-plein. « Pour la caserne des pompiers, ça répond à la même logique que le poste de la police municipale (N.D.L.R. prévu en décembre). Ça réduirait le temps d’intervention au sud de Mamoudzou, notamment à Tsoundzou, Passamaïnty et Vahibé », note Dhinouraine M'Colo Mainti, le premier adjoint au maire. L’aspect économique n’est pas non plus oublié. Djadid Abdourraquib a rappelé l’importance de ce type de projet pour les entrepreneurs locaux et demandé qu’une partie des appels d’offres prenne en compte leurs services. « Rien ne se fera sans eux », avertit-il.

Ambdilwahedou Soumaïla, le maire de Mamoudzou, a recueilli les propositions. Cependant, le futur palais des congrès fait déjà partie des inévitables.

L’architecte-urbaniste, Gjergj Miraçi, présente rapidement les futurs projets sur le terre-plein. Son cabinet AEI est chargé de d’imaginer un ensemble cohérent en prenant en compte les idées des habitants.

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Pouvoir adjudicateur

Communauté d'Agglomération de Dembéni-Mamoudzou (976), Le Président Rachadi SAINDOU, Hôtel de Ville de Mamoudzou, BP 01Rue du Commerce, 97600 Mamoudzou , FRANCE. Tel : +33 269639100. E-mail : bm.ahmed@ cadema.yt.

Principale(s) Activité(s) du pouvoir adjudicateur : Services généraux des administrations publiques.

Références de l'avis initial paru au BOAMP

Parution numéro : 2023_220 DIFFAnnonce n° du 2023-08-08

Description du marché

Objet du marché

Le marché a pour objet l'analyse qualitative du site, le recensement exhaustif des machineries et autres équipements et l'analyse «sanitaire» des bâtiments, ouvrages, murs et cheminées des ruines de l'usine sucrière

Classification CPV (vocabulaire commun pour les marchés publics)

71621000

Lieu d'exécution

LA CADEMA ville de Hajangua Caractéristiques principales Type de marché

Services : Services d'architecture; services d'ingénierie et services intégrés d'ingénierie ; services d'aménagement urbain et d'architecture paysagère ; services connexes de consultations scientifiques et techniques ; services d'essais et d'analyses techniques

Type de procédure

Procédure adaptée

Informations sur l'attribution du marché

Critères d'attribution retenus : Aucun critère.

Attribution : Marché totalement infructueux. Autres renseignements le marché est déclaré infructueux par cause de non réception des offres à la date limite de clôture de remise

des offres.

Procédures de recours

Instance chargée des procédures de recours Le Greffier du Tribunal Administratif de Mamoudzou , Jardin les Haut du Collège , 97600 Mamoudzou , FRANCE.

Service auprès duquel des renseignements peuvent être obtenus concernant l'introduction des recours Tribunal Administratif de Mamoudzou, Jardin les Haut du Collège, 97600 Mamoudzou, FRANCE.

Date d'envoi du présent avis : 08 septembre 2023

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TOUTE L’ACTUALITÉ DE MAYOTTE AU QUOTIDIEN UltimatUm oU véritable l’institUtion répond x critiq ConSeil départeMental pas de changement sUr l’octroi de mer  quoti DE Ayott iffuEME 0269 61 20 04 flash-infos@wanadoo.fr € ique edmond bébé s a q itté violence port de lonGoni la dsp sUr la sellette  quoti DE Ayott iffuEME 0269 61 20 04 flash-infos@wanadoo.fr es appel à projets coUvre-feU enVironneMent le lagon aU patrimoine mondial de l Unesco ?  quoti DE Ayott iffuEME 0269 61 20 04 flash-infos@wanadoo.fr des propositions mais demandez Marine le pen qUel accUeil se prépare poUr la présidente dU fn ?  quoti DE yottE iffu0269 61 20 04 flash-infos@wanadoo.fr

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# 1058

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ISSN : 1288 - 1716

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