Paperjam Plus Green Economy

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D ÉC E M B R E 2019

GREEN ECONOMY

M O O B E L LA E D ANCE N I F TE R E V Le Luxembourg, précurseur et leader durable 18

Vers une économie qui tourne rond

34

RSE, plus facile à dire qu’à faire ? 40

L’éolien a le vent en poupe

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Sustainable Finance The tide is changing in the financial world and sustainable finance is emerging as the future of the industry. Dive in today, thrive tomorrow. It’s decision time

Visit: kpmginfo.lu/DiveInToday

www.kpmg.lu

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SOMMAIRE SOMMAIRE

ÉDITO

Passer aux actes

M O O B LE LA DE ANCE FIN TE R E V

L

e temps des promesses est terminé. L’heure est désormais à l’action. Forte, cohérente et sans supercheries. Pour le climat et l’environnement, de manière générale, la période de chauffe a assez duré. Le traité de Rio a près de 30 ans, le protocole de Kyoto, plus de 20 ans. Or, où en est-on aujourd’hui par rapport au sauvetage de la planète ? Bien sûr, des projets ont été réalisés et portent déjà leurs fruits. Des prouesses technologiques ont vu le jour pour réduire, notamment, les émissions de CO2. Mais, avouons-le, il reste de nombreux paliers à franchir, et l’intégration des innovations dans la vie de tous les jours reste bien trop lente. La conférence de Paris de 2015 sur le climat a clairement mis en avant l’importance des besoins financiers colossaux pour assurer une transition rapide vers un monde aux émissions polluantes d’origine humaine drastiquement réduites. Sur ce terrain, le Luxembourg doit tirer son épingle du jeu. Des investisseurs de tous bords souhaitent que leur argent puisse jouer un rôle moteur dans cette transition. Le sujet est connu. Mais, dans les faits, l’offre des fonds d’investissement estampillés verts reste encore confidentielle. Le nombre de conférences sur le sujet est impressionnant, signe des temps qui changent. Il faut désormais que l’offre des produits le soit tout autant.

Jean-Michel Lalieu journaliste

PHOTO Maison Moderne (Archives)

La conversation continue en ligne :  @paperJam_lu

Paperjam

Paperjam Entreprise

Le Luxembourg, précurseur et leader durable

les banques s’y mettent

18

26

L’accélérateur de consciences

la BEI joue la carte du climat

30

32

Vers une économie qui tourne rond

RSE, plus facile à dire qu’à faire ?

L’éolien a le vent en poupe

34

40

46

12

11 % d’énergie propre en 2020, c’est encore possible ? 50

Maison Moderne ™ www.maisonmoderne.com, téléphone (+352) 20 70 70, e-mail publishing@maisonmoderne.com, courrier BP 728, L-2017 Luxembourg, bureaux 10, rue des Gaulois, Luxembourg-Bonnevoie, fondateur Mike Koedinger, CEO Richard Karacian, directeur administratif et financier Etienne Velasti, RÉDACTION téléphone (+352) 20 70 70-100, fax (+352) 29 66 19, e-mail press@paperjam.lu, courrier BP 728, L-2017 Luxembourg, directeur de la publication Richard Karacian, directeur éditorial Matthieu Croissandeau (M. C.), rédacteur en chef Thierry Raizer (T. R.), rédacteur en chef adjoint Nicolas Léonard (N. L.), secrétaire de rédaction Jennifer Coghé (J. C.), free-lances Anne-Sophie Bedel, Quentin Deuxant (Q. D.), Sébastien Lambotte (S. L.), Michaël Peiffer (M. P.), Jeanne Renauld (J. R.), photographes Nader Ghavami, Matic Zorman correction Lisa Cacciatore, Sarah Lambolez, Manon Méral, Elena Sebastiani, Laura Zorloni, AGENCE GRAPHIQUE directeur de l’agence Mathieu Mathelin , directeur de la création Jeremy Leslie, head of production Stéphanie Poras-Schwickerath, head of art direction Vinzenz Hölzl, graphisme / layout Maison Moderne, directeur artistique Sascha Timplan, head of production assistant Myriam Morbé, mise en page Julie Kotulski (coordination), RÉGIE PUBLICITAIRE téléphone (+352) 20 70 70-300, fax (+352) 26 29 66 20, e-mail regie@maisonmoderne. com, courrier BP 728, L-2017 Luxembourg, directeur associé Francis Gasparotto, chargés de clientèle seniors Laurent Goffin, Mélanie Juredieu

Please recycle. Vous avez fini de lire ce magazine ? Archivez-le, transmettez-le ou bien faites-le recycler ! Tous droits réservés. Toute reproduction, ou traduction, intégrale ou partielle, est strictement interdite sans l’autorisation écrite délivrée au préalable par l’éditeur. © MM Publishing and Media SA. (Luxem­b ourg) Maison Moderne ™ is used under licence by MM Publishing and Media SA. — ISSN 2354-4619

Décembre 2019 — Green economy —

­—3


SUR LE RADAR

LE MAUVAIS ÉLÈVE DE L’EUROPE UNE LOURDE EMPREINTE CARBONE Tonnes d’équivalent CO2 par habitant

20,0 17,2 16,0 13,3

8,8 UE (28 pays)

Liechtenstein

Suède

Malte

Roumanie

Lettonie

Suisse

Croatie

Hongrie

6,7 6,6 6,2 6,2 6,1 5,9 5,5 5,5 5,1

Turquie

Portugal

France

Lituanie

Italie

Royaume-Uni

Espagne

8,0 7,7 7,7 7,3 7,3 7,2 7,2

Slovaquie

Slovénie

Danemark

Bulgarie

9,2 8,8 8,8 8,5

Grèce

9,6

Autriche

Norvège

Finlande

10,5 10,4 10,3

Belgique

Pologne

Allemagne

Chypre

Pays-Bas

Tchéquie

Irlande

Estonie

Islande

LUXEMBOURG

12,3 12,0 11,6 11,3 11,0

SOURCE European Environment Agency (EEA, 2017)

UNE ADDICTION À LA VOITURE Nombre de voitures particulières pour 1.000 habitants

47.929 Le nombre de nouvelles immatriculations de voitures particulières et voitures à usage mixte neuves en SOURCE SNCT

RECYCLAGE : ENCORE DES EFFORTS À FAIRE Taux de recyclage des déchets en plastique des États membres de l’UE

LUXEMBOURG 670

Grèce 487

Italie 625

Pays-Bas 487

Lituanie 74,2

Finlande 617

Lituanie 483

Bulgarie 64,8

Malte 613

Suède 479

Chypre 609

France 478

Pologne 593

Royaume-Uni 471

Allemagne

Chypre 62,3 Slovénie 60,4 Rép. Tchèque

58,9

Slovaquie 52,4

561

Irlande 444

Pays-Bas 50,4

Autriche 555

Danemark 438

Suède 48,4

Estonie 550

Slovaquie 408

Allemagne 48,0

Slovénie 541

Bulgarie 393

Tchéquie 522

Croatie 389

Belgique 508

Lettonie 356

Belgique 44,5

Espagne 504

Hongrie 355

Italie 42,4

Portugal 492

Roumanie 261

UE 41,9

SOURCE Eurostat

Espagne 47,9 Roumanie 46,5 RU 46,2

Grèce 41,4 Danemark 38,5 Croatie 37,3 Lettonie 36,6

LE NOMBRE DE VÉHICULES PARTICULIERS NE BAISSE PAS

Portugal 34,9 Pologne 34,6 LUXEMBOURG 33,4

250.000

Autriche 33,4

200.000

Hongrie 32,0

150.000

Irlande 30,5

100.000

Estonie 26,5

50.000

France 26,5 Finlande 26,5 Malte 23,5

1936 1950 1970 1990 2000 2010 2011

2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

SOURCE Statec

4—

­— Green economy­— Décembre 2019

SOURCE Eurostat


Pour notre gamme d’ETF Leaders, nous nous appuyons sur l’expertise reconnue de MSCI qui permet d’identifier non seulement les sociétés qui bénéficient d’une notation élevée selon des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, mais aussi celles qui affichent une progression de ces scores. Cette méthodologie Leaders permet de favoriser les entreprises qui s’engagent en faveur du changement.

Gamme d’ETF ESG de Lyxor Pionniers du changement depuis 2007* www.lyxoretf.com

A l’attention des investisseurs professionnels. *Lyxor International Asset Management a lancé un ETF sur l’eau en 2007. Source : Lyxor International Asset Management au 31/10/2019. Les ETF présentent un risque de perte en capital. Lyxor International Asset Management (Lyxor ETF), Société par actions simplifiée, Tours Société Générale, 17 cours Valmy, 92800 Puteaux (France), RCS 419 223 375 Nanterre, est une société de gestion de portefeuille agréée par l’Autorité des marchés financiers sous le numéro GP0424.


EN BREF

Les Places actives dans la finance durable

Formation Découvrir la finance durable

Développé par Z/Yen et Finance Watch, le Global Green Finance Index 4 (GGFI) a pour ambition de positionner les centres financiers en matière de finance durable. Pénétration des financements verts et qualité de l’offre dans le domaine sont analysées afin d’attribuer une note globale à chaque Place et établir un classement des plus durables d’entre elles.

950

1. Amsterdam

944

2. Londres

925

3. Zurich

924

4. Luxembourg

921

5. Copenhague

918

6. Stockholm

917

7. Paris

916

8. Hambourg

880

9. Munich

875

10. Montréal

Depuis le mois de juillet, la House of Training, l’ABBL et Forethix proposent une formation en finance durable à destination des professionnels de la Place : banques, sociétés d’asset management, compagnies d’assurances, etc. Dispensée à la Chambre de commerce, cette session de quatre heures offre une première approche de la finance durable, avec pour objectif d’acquérir les connaissances fondamentales en la matière. Alliant théorie et pratique, la formation présente l’écosystème de la finance durable et le cadre réglementaire qui y est lié. Les derniers chiffres et tendances du secteur sont également abordés,

afin de mieux cerner son importance et sa pertinence dans le monde financier d’aujourd’hui et demain. Enfin, les participants ont l’occasion de se pencher sur des cas concrets d’acteurs majeurs en Europe ayant développé une offre de finance durable. D’autres modules, plus avancés, doivent voir le jour prochainement. Ils permettront d’approfondir le sujet, autour notamment des enjeux de labellisation, de la mise en place d’une stratégie de portefeuille selon les critères ESG et de la gestion du risque. La prochaine session ­Sustainable Finance (Foundation) se déroulera le 22 janvier 2020.

3 QUESTIONS À CAROLE DIESCHBOURG Ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable

En quoi le développement de l’économie verte est-il essentiel pour le Luxembourg ? Alors que nous disposons d’un territoire et de ressources limités, nous possédons au Luxembourg une empreinte carbone forte. Dans ce contexte, et face à la crise climatique, le système économique dans lequel nous évoluons n’est plus durable. En recréant le lien entre les Hommes et en respectant les limites planétaires, l’économie verte offre, elle, de nouvelles opportunités. Elle doit permettre un développement raisonnable et la création d’emplois durables. Quels sont les outils qui existent pour encourager les acteurs de la Place à évoluer

vers de tels modèles économiques ? De nombreuses initiatives ont déjà été mises sur pied. Nous souhaitons être un accélérateur de cette transition, en encourageant par exemple l’innovation dans le secteur financier, à travers la création de fonds durables. Parallèlement, nous croyons en la nécessité et l’intérêt de mettre tous les acteurs autour de la table. C’est pourquoi nous développons des clusters, des hot spots qui doivent permettre d’échanger sur ces thématiques, de s’inspirer mutuellement. Enfin, il est essentiel de créer un cadre légal propice à cette transition. Nous avons fait l’effort de retravailler des lois en intégrant davantage la

arvenir « Nous devons p igme à sortir du parad sance de la seule crois monétaire. » protection de l’environnement et des ressources naturelles. Les nouvelles directives en préparation doivent également permettre de développer une économie plus verte et circulaire. Comment parvenir à une telle économie plus durable ? Nous devons sortir du paradigme de la seule croissance monétaire et nous diriger vers un paradigme de bien-être, de qualité de vie et de développement durable. L’économie verte, en offrant de nombreuses possibilités de créer et de se réinventer, est une chance pour notre pays.

SOURCE Global Green Finance Index 4

Les brèves du secteur  Aujourd’hui, 158 fonds, pour un total de 64,5 milliards d’actifs sous gestion, sont labellisés LuxFlag (Luxembourg Finance Labelling Agency). Créée en 2006, l’asbl indépendante et internationale certifie les véhicules d’investissement responsables et durables (microfinance, environnement, ESG, financement climatique et obligations vertes).  Mandaté par le ministère de l’Économie, +Impakt a étudié, entre juin 2018 et mai 2019, les opportunités de l’économie circulaire pour le secteur hôtelier, et plus spécifiquement pour l’aménagement, l’équipement et la rénovation des chambres. L’étude Circular Hotel Interiors a notamment permis de développer un projet pilote au sein de l’école EHTL (École d’hôtellerie et de tourisme du Luxembourg), située à Diekirch. L’objectif est d’y mettre en œuvre les mesures Avec un objectif de réduction des émissions de 50 à 55 % et d’efficacité énergétique de 40 à 44 % et solutions circulaires recommandées.   d’ici 2030, le Luxembourg fait partie, avec la Suède, des pays les plus ambitieux de l’UE en matière de protection du climat.

6—

­— Green economy­— Décembre 2019

PHOTO Patrick Galbats TEXTE Jeanne Renauld

TOP 10


ET SI VOUS PENSIEZ À TRIER VOS INVESTISSEMENTS ? Chez Candriam, nous pensons que notre avenir dépend des entreprises qui développent des solutions pour la transition énergétique et l’atténuation des conséquences du changement climatique. Devenez acteur du changement avec Candriam SRI Equity Climate Action. CANDRIAM. INVESTING FOR TOMORROW.

Le compartiment Equity Climate Action est un compartiment de la Sicav « Candriam SRI », une SICAV domiciliée au Luxembourg et gérée par Candriam Luxembourg. Le fonds cherche à atteindre une croissance de son capital en investissant dans les actions de sociétés à capitalisation moyenne ou importante du monde entier qui ont pour objectif de devenir les futurs leaders de la lutte contre les changements climatiques. Pour bien comprendre le profil de risque du fonds, nous conseillons aux investisseurs de lire avec attention le prospectus officiel et la description des risques sous-jacents : risque de perte en capital, risque actions, risque de change, risque lié aux instruments dérivés, risque de concentration, risque de liquidité, risque lié à des facteurs externes, risque de contrepartie. La valeur de l’investissement peut baisser en raison notamment de l’exposition du fonds aux risques mentionnés dans le prospectus du fonds et dans le document intitulé « Informations clés pour l’investisseur ». Ce document est publié à titre purement informatif, il ne constitue pas une offre d’achat ou de vente d’instruments financiers, ni un conseil en investissement, et ne confirme aucune transaction, sauf convention contraire expresse. Candriam recommande aux investisseurs de consulter sur son site www.candriam.com les informations clés pour l’investisseur, le prospectus et toute autre information pertinente avant d’investir dans un de ses fonds, y compris la valeur liquidative des fonds. Ces informations sont disponibles en anglais ou dans une langue nationale pour chaque pays où le fonds est autorisé à la commercialisation.


LE JOUR OÙ...

Quand j’ai fait mon coming out écolo

«

’est en 2013, à la demande de Camille C Gira, bourgmestre de Beckerich, que je me suis lancée dans la campagne électorale pour les législatives avec Déi Gréng. Il s’agissait pour moi d’un réel coming out, dans la mesure où j’ai toujours été écologiste. Ces valeurs sont inscrites dans ma famille depuis plusieurs générations. Ma grand-mère a t­ oujours cuisiné bio et m’a fait comprendre que si l’on voulait bien travailler, il fallait commencer par bien manger. J’ai toujours appris qu’on pouvait trouver de l’énergie partout et qu’il fallait pouvoir l’exploiter, là où elle se trouvait, sans la gaspiller. J’ai développé mon entreprise au sein d’une commune particulièrement écologiste, avec la conviction que l’on ne pouvait pas dissocier écologie d’économie. Beaucoup ont été surpris de mon engagement politique. Certains n’ont pas compris qu’une entrepreneuse qui vend du carburant, à la tête d’un commerce qui traite avec les plus grandes marques mondiales, s’engage avec les écologistes. Je pense cependant que ce n’est pas incompatible, bien au contraire. Il faut pouvoir distinguer les moyens de la fin. Nous avons une opportunité immense, ici, à proximité de la frontière, de développer des entreprises commerciales comme la mienne. Quand, en 1982, j’ai eu l’opportunité d’avoir enfin mon propre commerce, je n’ai pas hésité.

8—

­— Green economy­— Décembre 2019

À mes yeux, l’important n’est pas tant ce que ces firmes, je ne me laisse pas marcher sur je vends, mais plutôt ce que je fais avec la valeur les pieds ou influencer. Les bonus que je peux que je parviens à créer. Or, les moyens géné- aujourd’hui négocier avec eux, par exemple, rés par mon commerce sont investis dans les doivent me permettre d’offrir une meilleure gens qui travaillent avec moi, dans des projets place à des producteurs et à des artisans locaux de réduction de la consommation de l’énergie au cœur de nos étals, de faire évoluer l’offre de de nos infrastructures et de limitation de la produits avec un souci permanent de q­ ualité. production des déchets, mais aussi dans beau- Récemment, nous avons fait le choix de ne procoup d’autres démarches à visée écologique. poser qu’une marque de banane, bio et issue En outre, je ne pense pas qu’il faille être du commerce équitable. Cette sélection, en hypocrite. En zone rurale, les gens ne vont pas n’optant que pour un fournisseur, nous p­ ermet abandonner leur voiture du jour au lendemain. de profiter d’un meilleur prix que si nous en Il y a une transition à accompagner. Et nous avions deux ou trois, et de procherchons, chaque jour, à travers les décisions poser un produit de qualité, que nous prenons, à y contribuer. respectueux des gens et Au début, Camille Gira et moi nous sommes de la planète. Nous applipris la tête. Puis, nous avons décidé de faire cause quons cette démarche en commune, nous retrouvant autour de valeurs permanence, dans tous nos que nous partagions, même si la manière choix, en utilisant l’économie ­d’atteindre nos objectifs pouvait différer. comme un moyen mis au En tant qu’élue, j’ai rapidement jeté service d’une finalité l’éponge et abandonné la politique. Le temps écologique. »  de la décision, à ce niveau, ne me correspondait pas. J’ai besoin de plus d’action, de voir rtant n’est o p m ’i  L « bouger les choses. Mon engagement avec les que Verts a toutefois permis de clarifier ma posi- pas tant ce lutôt tion et ma démarche vis-à-vis de très nombreux nds, mais p e v je acteurs. Aujourd’hui, il est plus facile pour moi fais avec de défendre mes valeurs. Bien sûr, je continue ce que je ue à travailler avec Total ou encore Coca-Cola. la valeur q  » Mais dans les rapports que j’entretiens avec ns à créer.

je parvie

PHOTO Patricia Pitsch (Maison Moderne), PHOTOMONTAGE Sascha Timplan (Maison Moderne)

En 2013, Christianne Wickler, la patronne du groupe Pall Center, s’engageait avec les Verts dans la campagne législative. L’entrepreneuse affirmait de cette manière sa volonté de mettre l’économie au service de l’écologie.


bosscom.lu

LA COMMUNICATION PAR L’OBJET ÉCO-RESPONSABLE

coming soon...

Enter the eco experience green-united.lu


BRAND VOICE

FONDS D’INVESTISSEMENT

PHOTO Patricia Pitsch (Maison Moderne)

Convertir les asset managers à l’investissement durable

Anne Contreras et Stéphane Badey, Arendt

10 —

— Green economy — Décembre 2019


BRAND VOICE

Poussée par les investisseurs et par la réglementation, la finance évolue pour soutenir un monde plus durable. Dans ce contexte, les acteurs de l’industrie des fonds doivent se doter d’une stratégie adaptée pour mettre en place des fonds contribuant à cette économie verte. CONTENU SPONSORISÉ PAR ARENDT

prend indéniablement un tourLaujourd’hui  anantfinance durable. Les investisseurs se montrent plus soucieux de l’impact de leurs investissements sur l’environnement. Les autorités, d’autre part, en adoptant de nouvelles réglementations, semblent décidées à orienter les investissements vers des activités plus durables.

MOBILISER L’INVESTISSEMENT PRIVÉ

« Les défis auxquels nos sociétés sont confrontées sont conséquents. Et les objectifs fixés en matière de préservation du climat ne pourront être atteints sans une mobilisation de l’investissement privé », souligne Anne Contreras, Of Counsel d’Arendt & Medernach, spécialisée dans la création, structuration et distribution de fonds dans le domaine de la micro-finance et des projets à impact social. Le financement des Objectifs de Développement Durable (ODD) exige la mobilisation de plusieurs milliards de dollars d’investissement par an. « Dans ce contexte, tous les gestionnaires d’actifs doivent s’interroger sur l’intégration de ces considérations au cœur de leurs démarches », commente Stéphane Badey, Partner d’Arendt Regulatory & Consulting, qui délivre des services de consultance autour des enjeux réglementaires.

SUPPORTER LA MISE EN PLACE DE FONDS DURABLES

Dans ce contexte, le groupe Arendt entend apporter un conseil de qualité autour de la mise en place de fonds destinés à supporter une économie plus verte. « Plusieurs catégories d’asset managers nous font part de leur volonté de mettre en place des programmes verts. On distingue principalement les acteurs des fonds traditionnels et les acteurs qui émanent davantage de l’impact investing. Les premiers recourent aux filtres ESG actuellement disponibles mais gardent pour objectif premier la performance financière. Les seconds, quant à eux, recherchent d’abord la maximisation

des retombées sociales et environnementales, plus que le rendements même si celui-ci est au rendez-vous », commente Anne Contreras.

50 NUANCES DE VERT

L’enjeu n’est cependant pas d’évaluer si les uns font mieux que les autres. « Mais bien de convertir un maximum d’acteurs à la finance durable et de garantir la réussite de cette conversion », précise Stéphane Badey. Chaque contribution est bonne à prendre, pour peu qu’elle constitue un levier effectif vers un monde plus durable. « On peut soutenir le développement de cette économie verte suivant une multitude de stratégies d’investissement, poursuit Stéphane Badey. Il est possible d’investir dans les technologies vertes, comme on peut décider de soutenir les efforts d’un industriel, émetteur de CO2, dans sa transition vers un modèle plus durable. En la matière, il existe plus de 50 nuances de vert. Et chaque stratégie est valable, pour peu qu’elle soit clairement définie au départ et que la transparence vis-à-vis des investisseurs soit au rendez-vous. »

S’ENGAGER POUR APPRENDRE

La difficulté actuelle réside dans la définition de ces stratégies, des critères d’investissement et l’obtention de la donnée permettant de les évaluer correctement. « Les réglementations actuellement discutées devraient soutenir les acteurs dans leurs analyses et évaluations, apportant de la cohérence autour de critères mieux établis », ajoute Stéphane Badey. « Cependant, le meilleur moyen d’avancer dans cette voie est de s’y engager effectivement, dès à présent, poursuit Anne Contreras. On peut commencer sur un périmètre limité, en étant bien accompagné, pour apprendre et progressivement gagner en maturité, développer des compétences, structurer la démarche et les processus. De cette manière, chacun peut mieux aller à la rencontre des opportunités d’investissement que représente cette économie verte. » 

730

révisions apportées Selon les Principles for Responsible Investments (PRI), dans les 50 plus grandes économies du monde, plus de 730 révisions ont été apportées à environ 500 instruments de réglementation contraignante et non contraignante qui soutiennent, encouragent ou obligent les investisseurs à prendre en compte les facteurs de valeur à long terme, y compris les facteurs ESG. La réglementation de la finance durable est un phénomène du 21e siècle. 97 % des révisions identifiées par les PRI ont été élaborées après l'an 2000. Le rythme ne cesse de s'accroître – les PRI ont déjà identifié plus de 80 instruments réglementaires nouveaux ou révisés en 2019. PRI, Taking Stock: Sustainable Finance Policy Engagement and Policy Influence, 2019

180

milliards d'euros

C'est le montant d'investissements supplémentaires par an qui seront nécessaires pour que l'UE puisse atteindre les objectifs pour 2030 fixés lors du sommet de Paris, comprenant une réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre.

413

funds / subfunds C'est le nombre de funds/ subfunds domiciliés au Luxembourg qui se revendiquent ESG funds/subfunds. Monterey Report 2019

, ir plus n savo  : e Pour e le sit visitez t.com arend

Décembre 2019 — Green economy —

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EN COUVERTURE RÉVOLUTION

M O O B LE LA E D ANCE N I F TE R E V PHOTO Shutterstock

i te s d s n o i t oblig a bles, s a e r d u d e s sant. s s s f i i i t g o c r a ’ a c s ccès Q u’ i l u t re s u a ’ s d n u u s » o ontre c n e r « verte nd, r te o e f v êter. e r e r d c a ’ e n s c a e n la fin rè s d enda t p e s n a u p p ar mble e s Po r té e n ment e v u o le m

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­— Green economy­— Décembre 2019


«

L

es capitaux des grandes banques ne sont pas plus des institutions de bienfaisance que ne le sont les fusils et les canons », écrivait le sociologue allemand Max Weber dans La Bourse, ouvrage datant de la toute fin du 19e siècle. La bourse, pour celui qui est considéré comme l’un des fondateurs de la sociologie et qui a énormément travaillé sur le sujet, est le symbole le plus tangible du capitalisme, son temple. Et sa vocation n’est pas philanthropique puisque, selon l’expression du même auteur, elle contribue à construire cette « carapace d’acier » qui fixe chaque individu, chaque investisseur, à une place qu’il n’a pas forcément choisie. Un monde de différences sépare le moment où ces lignes ont été écrites, où cette pensée s’est formée, de notre époque contemporaine. En 1894, lorsque Weber commence la rédaction de La Bourse, la révolution industrielle a tout au plus un siècle. On a davantage tendance à s’émerveiller des progrès que permettent les « nouvelles » énergies et technologies, rendant tout plus rapide, plus simple, que d’en dénoncer les effets sur l’environnement. Certes, les conséquences de l’industrialisation sur les travailleurs préoccupent de nombreux penseurs. Oui, les dérèglements boursiers jettent quelquefois l’opprobre sur le capitalisme. Mais le climat et la durabilité des pratiques sont des considérations qui relèvent encore de l’abstraction complète. Et pour cause : à cette époque, les températures mondiales n’ont pas encore entamé leur course à la hausse, le plastique ne s’accumule pas encore partout, des sommets des montagnes au fond des océans, les espèces animales n’ont pas encore perdu une grande partie de leur diversité. Aujourd’hui, en revanche, nul n’ignore les cris d’alarme lancés par la communauté scientifique, les transformations profondes causées à l’écosystème global par l’action humaine. Tout le monde a vu ces images de glaciers fondus, a vécu ces vagues de chaleur, a expérimenté la dramatique diminution du nombre d’insectes, au cœur de l’été. Chacun a aussi pu voir, dans sa ville ou par écran interposé, les marches visant à dénoncer l’inaction des gouvernements par rapport à ces problématiques urgentes. Et si, face à l’apathie politique, c’est l’économie capitaliste en elle-même qui prenait le taureau par les cornes ? Et si les capitaux, à l’encontre de l’opinion de Weber, devenaient des institutions de bienfaisance, finançant les solutions qui permettront d’infléchir la dangereuse trajectoire du changement climatique ?

CROISSANCE À TOUS LES ÉTAGES

Cette métamorphose de la finance, qui se calquerait ainsi sur l’évolution de fond que connaît la société, n’est plus de l’ordre de

l’utopie portée par quelques activistes extrêmes. Elle porte un nom générique – la finance verte ou durable – et a connu une évolution exponentielle au cours des dernières années. Qu’il s’agisse d’obligations ou d’autres classes d’actifs, les chiffres démontrent en effet l’extraordinaire développement de ce type d’investissements. Au niveau comptable, ce sont les obligations vertes qui mènent la danse à l’échelle mondiale. Émises par des entreprises, des municipalités, des agences gouvernementales, mais aussi des États souverains et des organismes supranationaux, ces « emprunts » cotés en bourse permettent notamment de financer la transition énergétique de leurs émetteurs. Elles peuvent aussi servir à mener des projets sociaux ou durables, c’est-à-dire qui s’attachent à des enjeux à la fois sociaux et environnementaux. Au niveau global, pas moins de 1.000 milliards de dollars de ces obligations vertes sont aujourd’hui en circulation. La croissance de cette classe d’actifs s’est considérablement accélérée au cours des dernières années : alors que 103 mois ont été nécessaires pour atteindre un montant de 100 milliards de dollars, la barre des 1.000 milliards a été atteinte seulement cinq mois plus tard. « En 2019, des obligations durables pour un montant de 200 milliards ont déjà été émises », précise Julie Becker, fondatrice du Luxembourg Green Exchange, première plate-forme boursière exclusivement dédiée aux investissements verts et durables. Quant aux autres formes d’investissement durable, elles sont suivies de près par la Global Sustainable Investment Alliance (GSIA). Et les résultats de leurs études bisannuelles vont dans le même sens. Ainsi, selon le dernier rapport de l’institution, près de 30,7 milliards de dollars ont été investis dans des actifs verts ou durables en 2018 sur les cinq plus importants marchés mondiaux : l’Europe (14 milliards, soit près de la moitié du montant global), les États-Unis (près de 12 milliards), le Japon (2 milliards), le Canada (1,7 milliard) et l’Australie / Nouvelle-Zélande (0,7 milliard). Ce chiffre représente une croissance de 34 % par rapport à celui figurant dans le dernier rapport, datant de 2016 (22,8 milliards). Ces montants sont placés dans des fonds qui investissent dans des projets particuliers, par exemple les énergies renouvelables, le climat au sens large, le traitement de l’eau, etc.

SE FIER AUX BONS LABELS On peut être très intéressé par les placements verts. Mais comment les reconnaître ? Tout d’abord, il faut être bien au fait des différences entre une obligation verte, un fonds ESG et un fonds d’impact. Cela permettra d’éviter toute désillusion. Ensuite, épluchez les prospectus qui vous sont fournis lorsque vous souhaitez investir. Dans certains cas, il est fait mention des projets ou des sociétés qui seront financés grâce à votre investissement. Dans l’attente de la production de textes légaux, européens, puis nationaux, la meilleure solution pour identifier un fonds vert ou durable est de se fier aux labels existants. « Même si je prêche ici pour ma propre chapelle, on ne peut pas nier qu’il s’agit actuellement de la façon la plus simple de savoir si un fonds correspond à ses attentes en matière environnementale ou durable », explique Sachin Vankalas, directeur général de Luxflag. Cette agence luxembourgeoise labélise ainsi 158 produits d’investissement représentant 65 milliards d’actifs : 21 obligations vertes, 9 fonds environnementaux, 3 fonds climatiques, 84 fonds ESG, 32 fonds microfinance et 9 Applicant Fund Status. Luxflag a enregistré une croissance de 37 % du nombre de produits d’investissement labélisés depuis juin 2019.

sement. Aujourd’hui, 256 obligations vertes sont listées au Luxembourg Green Exchange, créé en 2016. Les fonds d’investissement y sont beaucoup moins représentés, puisque seuls 25 fonds durables y sont cotés. Avec cet ensemble d’actifs, le Luxembourg figure dans le haut du panier des places financières européennes. Ainsi, si l’on ne se base que sur les obligations vertes, Luxembourg est la preLE LUXEMBOURG EN POLE POSITION mière place européenne, avec 121,2 milliards Dans ce tableau global, le Luxembourg de dollars émis à la fin 2018, soit 2,5 fois plus occupe une place de choix. Historiquement, que Paris et près de 5 fois plus que Francfort. le pays fait également figure de pionnier. À l’échelle mondiale aussi, la Place luxemEn 2007, c’est à la Bourse de Luxembourg bourgeoise s’en sort très bien. « Le Luxemqu’a été cotée la première obligation verte, bourg n’est pas seulement le leader du secteur émise par la Banque européenne d’investis- en Europe. Selon le Global Green Finance Décembre 2019 — Green economy —

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RÉVOLUTION Index, réalisé par Z/Yen et Finance Watch et publié au mois de septembre dernier, le Grand-Duché se place à la quatrième position des places boursières les plus vertes. Ce classement tient compte à la fois de la qualité de l’offre et du niveau de pénétration de la finance verte sur les marchés respectifs des différentes places », indique Sachin Vankalas, general manager de Luxflag, l’agence luxembourgeoise de labellisation des obligations et fonds durables. « On peut également s’apercevoir de la place de Luxembourg dans ce domaine en relevant que notre bourse cote 50 % des fonds obligataires verts dans le monde », ajoute Nicolas Mackel, CEO de Luxembourg for Finance, à ce tableau déjà exceptionnel.

UNE MÉTAMORPHOSE EXISTENTIELLE

Le bilan chiffré est donc sans appel. Reste à en comprendre les raisons. L’intérêt – voire l’inquiétude – par rapport au changement climatique et aux enjeux environnementaux suffit-il à expliquer cette véritable explosion de la finance verte au cours des dernières années ? « Tout le monde a intérêt à faire quelque chose contre le changement climatique, explique

JUSQU’À 10 % DE RENDEMENT Les rendements proposés par la finance verte sont loin d’être ridicules. « Des études ont été réalisées sur des périodes assez longues, notamment entre 1990 et 2016, et il ressort que les rendements de produits d’investissement verts ou durables étaient de l’ordre de 10,4 %, pour 10,9 % sur la même période pour des investissements traditionnels, précise Nicolas Mackel. Récemment, une étude menée par Amundi a montré que les rendements sur une période plus courte – entre 2014 et aujourd’hui – s’élevaient quant à eux à 6,6 %. Les supposés rendements inférieurs de ces produits constituent donc un mythe. » Évidemment, comme pour tout investissement boursier, vous pourrez choisir de maximiser votre rendement en prenant plus de risques. Les conseils d’un gestionnaire d’actifs expérimenté pourront, à ce niveau, s’avérer précieux.

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Nicolas Mackel. Il s’agit d’un défi existentiel, qui a été perçu avec plus de clarté suite à la COP21, qui a eu lieu à Paris en 2015. Cet événement a vraiment constitué un déclic, faisant prendre conscience aux différents acteurs que des sommes importantes allaient devoir être mobilisées pour financer les projets environnementaux nécessaires pour lutter contre le changement climatique. » Si la perspective d’avoir un impact positif sur l’environnement et le changement climatique présente certainement un certain attrait pour les investisseurs – particulièrement les plus jeunes –, il ne faut pas perdre de vue que ces investissements ne se font pas en dehors du modèle capitaliste. Autrement dit, ils exigent un certain rendement. Alors, la finance verte aurait-elle les moyens de prendre les investisseurs autant par le portefeuille que par les sentiments ? C’est de plus en plus le cas, selon les différents acteurs du secteur, et cette constatation constitue une autre explication très crédible du succès de la finance verte ou durable. « Qu’on parle de finance verte ou non, l’exigence de rentabilité reste en effet la même pour l’investisseur, reconnaît Nicolas Mackel. Or, le financement des nombreux projets nécessaires à la transition énergétique, par exemple, représente à cet égard une opportunité intéressante. Sur une période suffisamment longue, les rendements peuvent en effet être les mêmes pour ces actifs que pour des placements traditionnels. »

UNE FINANCE PLUS TRANSPARENTE

De là à croire que la finance verte n’est qu’un nouvel outil de greenwashing, qui va être mis à profit sans vergogne par les plus grands acteurs du marché spéculatif, il n’y a qu’un pas. Toutefois, le franchir reviendrait à nier la réelle volonté de transparence affichée par l’ensemble des acteurs impliqués dans ce domaine. Même si cette forme d’investissement rapporte à ceux qui y placent leur argent, la finance verte dispose également de toutes les armes pour produire réellement des effets. De quoi résoudre enfin l’équation qui, jusqu’ici, opposait bien souvent rentabilité et impact positif sur l’environnement ? « En ce qui concerne les fonds d’investissement verts ou durables, un prospectus est fourni à l’investisseur pour lui détailler la stratégie d’investissement qui est mise en place, les projets ou secteurs qui sont financés, poursuit Nicolas Mackel. Une partie du travail de la compliance est de vérifier que ce que le fonds a promis de faire a bien été réalisé. » Au niveau des obligations vertes, une plate-forme comme le Luxembourg Green Exchange a également mis en place plusieurs mécanismes pour s’assurer que les investissements mobilisés sont bien utilisés conformément à ce qui a été annoncé dans

la documentation. Des vérifications sont par exemple régulièrement effectuées pour s’assurer de la bonne utilisation de ces fonds. « L’investisseur, dans ce secteur, veut avoir des garanties sur l’utilisation de ses fonds. Et c’est aux différents acteurs de les lui apporter », ajoute Nicolas Mackel. C’est d’ailleurs dans ce but que différents labels et standards cohabitent aujourd’hui pour permettre à chacun d’identifier les fonds et les obligations qui sont réellement verts ou durables (à lire en encadré p. 13).

LA RÉGLEMENTATION, UN ATOUT

On peut toutefois regretter qu’aucun cadre légal ne définisse encore le périmètre de ce qui peut être considéré comme vert ou durable dans le secteur financier. Ceci permettrait de garantir plus encore la bonne utilisation de ces investissements. En Europe, cette situation pourrait cependant bientôt changer. La Commission européenne a en effet lancé un plan d’action constitué de nombreuses mesures législatives et non législatives destinées notamment à mieux établir la taxinomie des fonds verts ou durables. C’est sur cette base que les différents États membres pourront ensuite étoffer leur réglementation, mieux encadrer la finance verte et rassurer les investisseurs qui douteraient encore de ses impacts réels. Dans ce secteur, le libéralisme économique professant un contrôle minimum de l’État sur les activités économiques n’est pas forcément la bonne solution pour attirer l’investisseur. La législation pourrait en outre servir d’incitant pour « verdir » les portefeuilles des investisseurs. « Pour moi, le fait que le monde politique cherche à réglementer le secteur explique, même en partie, le succès croissant de la finance verte au cours des dernières années, estime Sachin Vankalas. On l’a vu avec le plan d’action de la Commission européenne, qui met aussi la pression sur les asset managers en leur demandant d’intégrer des fonds ESG – environnementaux, sociaux et de gouvernance – à leurs portefeuilles. » Le but, derrière ces impératifs légaux, est de rendre la société progressivement plus respectueuse de l’environnement par l’entremise des investissements boursiers. « C’est un véritable travail collectif, auquel tous les acteurs peuvent participer, sur toutes les places financières du monde, enchaîne Nicolas Mackel. Même si je me félicite de la place de Luxembourg dans ce secteur particulier, il faut bien garder en tête le véritable enjeu, qui est de parvenir à atteindre les objectifs énoncés lors de la COP21 de Paris. On ne doit donc pas chercher à tout prix à supplanter les autres dans ce secteur, mais bien à travailler tous ensemble pour rendre plus vert l’ensemble de l’activité financière. »


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entièrement tournée vers un projet à impact positif pour l’environnement. Certains estiment que ce dernier type de fonds est plus en ligne avec les attentes de la nouvelle génération et, à ce titre, constitue le futur de la finance verte. Au Luxembourg, différentes initiatives, comme l’International Climate Finance Accelerator, permettent de développer cette approche. Des fonds d’impact ont également vu le jour et témoignent de cette nouvelle évolution. Parmi eux, on peut citer le Forestry and Climate Change Fund (FCCF), l’un des

Ce chemin, qui aurait sans doute surpris Max Weber, les bourses et les gestionnaires d’actifs du monde entier ont commencé à l’emprunter. « La croissance du volume d’actifs verts est indéniable. Même si elles utilisent des méthodologies différentes, les diverses études consacrées au sujet le prouvent, rappelle Sachin Vankalas. Plus encore que les montants investis, il faut retenir le changement de mentalité qu’on constate chez les gestionnaires d’actifs. Alors que c’était peut-être encore le cas il y a trois ou cinq ans, plus aucun gestionnaire ne peut se permettre, aujourd’hui, de ne pas proposer de produits verts ou durables à ses clients. » « Même des leaders du marché comme Black Rock s’y mettent, ajoute Nicolas Mackel. Nous ne sommes donc pas dans un effet de mode passager, mais dans une tendance de fond. » Cette modification des mentalités est clairement liée à la transformation que connaît l’ensemble de la société. « Les investisseurs institutionnels, qualifiés, veulent aujourd’hui absolument avoir dans leur portefeuille d’actifs des fonds ESG, poursuit Sachin Vankalas. Sachin Vankalas Quant aux particuliers ou aux investisseurs General manager, Luxflag de demain, ils interrogeront un jour le secteur sur ce qu’il a fait ou ce qu’il n’a pas fait pour la planète… La finance doit donc nécessai- deux sous-fonds de la sicav Investing for rement présenter des solutions d’investisse- Development, qui est également derrière le ment qui répondent à ces besoins. » Luxembourg Microfinance and Development Fund. « Notre but est de gérer durablement FONDS ESG VS FONDS D’IMPACT et de valoriser les forêts dites secondaires Les fonds ESG doivent toutefois être bien dis- ou dégradées présentes dans des milieux tingués des fonds dits « d’impact ». Les premiers tropicaux. Il s’agit de forêts qui ont subi nommés, qui sont majoritaires, n’ont en réa- des catastrophes naturelles ou une défolité pas vocation à produire par eux-mêmes un restation importante, mais qui ont tout effet positif sur l’environnement. Ils se limitent de même la capacité de se régénérer petit à garantir que les projets ou les sociétés qu’ils à petit, explique Kaspar Wansleben, direcfinancent respectent certains critères envi- teur exécutif du Forestry and Climate Change ronnementaux, sociaux et de gouvernance. Fund. Nous savons que ces forêts sont à la Ils affecteront donc le moins possible l’envi- fois cruciales pour le climat de l’ensemble ronnement, sans pour autant l’améliorer, et de la région, pour l’environnement proche pourront servir à financer des projets dans et pour le bien-être des populations locales, des secteurs très divers (industriel, immobi- qui ont besoin d’une source de revenus. Dans lier, assurance, etc.). Cela dit, les fonds ESG chacun de nos projets, nous nous efforçons ont également un impact positif, peut-être plus donc d’avoir un impact à la fois environneindirectement perceptible. « On constate que mental, en protégeant la forêt, et social, en plus de 50 % des grandes sociétés présentes générant de l’emploi sur place. Évidemment, à l’échelle mondiale délivrent des rapports nous devons aussi nous assurer de dégager réguliers sur leurs performances en termes de du profit pour les investisseurs. » durabilité, explique Sachin Vankalas. Tout le monde s’accorde aujourd’hui à dire, au sein VOIR L’IMPACT DE SON INVESTISSEMENT de ces entreprises, que de mauvaises pratiques Pour lancer son activité, le FCCF a jeté son environnementales ou sociales engendrent dévolu sur des pays d’Amérique centrale un risque sur l’image ou la réputation trop comme le Costa Rica, le Nicaragua et le Guagrand pour continuer à les reproduire. Les temala. Le premier cité, réputé pour son implientreprises pourraient en effet se voir privées cation en faveur de l’environnement, est devenu de certaines sources de financement. » un partenaire privilégié du fonds. « Nous pouLes fonds d’impact, eux, se consacrent à vons y travailler en collaboration rapprochée une stratégie d’investissement particulière, avec les pouvoirs publics et les ONG locales.

« Plus aucun gestionnaire ne peut se permettre, aujourd’hui, de ne pas proposer de produits verts ou durables »

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Sur place, nous avons pu développer une production industrielle, notamment de parquet. Le tout sans perdre de vue notre logique de gestion durable des forêts : quand nous quittons une forêt, elle doit s’être entièrement régénérée. » Kaspar Wansleben se rend sur place régulièrement pour convaincre de nouveaux petits propriétaires de forêts de collaborer avec le FCCF. « Cela demande beaucoup de discussions préalables et, une fois la décision prise, le travail de régénération d’une forêt peut s’avérer très long. C’est particulièrement le cas dans des pays où la déforestation fait rage, comme le Nicaragua ou le Guatemala. » Créé il y a deux ans, le FCCF a sans doute choisi la fenêtre temporelle idéale pour lancer son fonds d’impact. « Il est clair que tout le monde parle de ce genre de fonds aujourd’hui. Mais ce n’était pas le cas il y a deux ans. Nous nous lancions vraiment dans une niche, estime Kaspar Wansleben. Aujourd’hui, les choses sont différentes. Nous offrons quelque chose que les fonds ESG ne peuvent pas expliquer aussi clairement, c’est-à-dire le lien entre l’investissement consenti et son effet concret sur le terrain. Le FCCF, au contraire, peut exposer dans le détail quel a été l’impact des investissements, projet par projet. » Le Forestry and Climate Change Fund reste encore un fonds d’investissement d’envergure réduite. Soutenu par les ministères des Finances et de l’Environnement, la Bil, la Spuerkeess et des investisseurs privés, il pèse aujourd’hui 15 millions de dollars. Mais il pourrait prendre rapidement de l’ampleur. « Nous sommes fiers de faire partie des fonds pionniers dans ce secteur. Nous avons déjà réussi à planter le drapeau luxembourgeois dans la sphère internationale, poursuit Kaspar Wansleben. Mais notre volonté est de nous ouvrir prochainement à de nouveaux investisseurs, pour intensifier notre travail en faveur de l’environnement et des populations locales. » La proposition, comme d’autres portées par des fonds d’impact, pourrait certainement séduire un public grandissant, notamment parmi les nouvelles générations, qui souhaitent que leur investissement permette de répondre concrètement à certaines problématiques. Certes, les rendements de 3 à 4 % annoncés par Kaspar Wansleben pour les investissements dans le FCCF n’atteignent pas des sommets. Mais ils restent intéressants pour un investisseur lambda, d’autant que les risques sont limités. « Il est clair que les investisseurs qui nous feront confiance auront toujours, avant tout, une sensibilité pour les sujets sur lesquels nous travaillons », rappelle le directeur exécutif du FCCF. Et certainement l’envie de faire enfin de leurs capitaux un véritable instrument de bienfaisance…  Q. D.


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Le Luxembourg, précurseur et leader durable En 2007, c’est à la Bourse de Luxembourg qu’a été cotée la première obligation verte, émise par la Banque européenne d’investissement. Depuis, le Grand-Duché a maintenu son leadership dans le domaine, et un important écosystème s’est développé dans le pays autour de la finance verte. Le Luxembourg Green Exchange en est l’un des éléments les plus remarquables. e n’est que lorsque le Luxembourg Green C Exchange (LGX) a été porté sur les fonts baptismaux, en 2016, que la face verte de

Luxembourg a construit un riche écosystème dédié à la finance verte. On peut ainsi citer, pêle-mêle, la Climate Finance Task Force lanla planète financière luxembourgeoise s’est cée par l’État luxembourgeois et des acteurs réellement révélée aux yeux du monde. Il est privés, Luxflag, l’agence luxembourgeoise de vrai qu’avec cet outil, la Bourse de Luxem- labellisation qui propose des standards adapbourg se dotait de la première plate-forme tés à la finance verte, la Climate Finance Platmondiale exclusivement dédiée à la cotation form, fruit d’un partenariat entre la Banque d’obligations vertes ou durables. Elle le fai- européenne d’investissement et le gouversait également sans demi-mesure, puisque le nement luxembourgeois, le Climate Finance Luxembourg Green Exchange n’acceptait de Accelerator, le Forestry and Climate Change rassembler, dès son lancement, que les émet- Fund, etc. teurs qui consacrent l’entièreté des fonds levés à des investissements verts. DES OBLIGATIONS EN CONSTANTE ÉVOLUTION Toutefois, ce médiatique lancement ne Depuis l’année 2007, l’obligation verte a constitue que la face émergée de l’iceberg. déjà connu bien des évolutions. « Au départ, En effet, en dehors du Green Exchange, le durant les années 2007-2008, toutes les

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obligations vertes étaient émises par des institutions supranationales et servaient strictement à financer des projets environnementaux, poursuit Julie Becker. Depuis lors, les choses ont bien évolué. En ce qui concerne les émetteurs, tout d’abord, des agences gouvernementales ont commencé à en émettre, puis des États souverains, des municipalités américaines, des institutions financières, des entreprises… » La nature de l’obligation a elle aussi évolué au fil des années. Aux obligations vertes du début, qui devaient servir nécessairement à financer des projets environnementaux, se sont ensuite ajoutées des obligations « sociales ». « Celles-ci sont plus difficiles à définir, selon Julie Becker. Il s’agit, par exemple,


de financer des projets de construction de logements sociaux, des programmes de vaccination, etc. » Un nouveau type d’obligation, cohabitant avec les autres, a encore vu le jour plus récemment : l’obligation « durable », qui mélange des enjeux sociaux et environnementaux. « Parfois, une obligation sociale peut devenir durable. Ainsi, on peut lancer une obligation pour financer des logements sociaux, et ceux-ci peuvent ensuite être conçus comme des bâtiments passifs, verts. L’obligation de départ, conçue comme sociale, devient donc aussi verte », précise Julie Becker. Notons enfin que, dernièrement, les green loans (prêts verts) sont également apparus sur le marché, tout comme les sustainability-­ linked loans, des prêts soumis à certains objectifs et pour lesquels les émetteurs sont pénalisés si les objectifs n’ont pas été atteints. Les produits financiers « verts » qui sont aujourd’hui à la disposition des investisseurs se sont donc considérablement diversifiés au fil des années. Aujourd’hui, le choix est pléthorique.

Francfort. « Toutefois, il ne faut pas se leurrer, toutes les places financières souhaitent aujourd’hui être les leaders de la finance verte. Nos concurrents, ce sont toutes les capitales européennes, avertit Julie Becker. Parmi celles-ci, on peut certainement pointer Londres comme l’un de nos plus sérieux concurrents. Le poids politique du pays, son important corps diplomatique aussi, le rend très attractif. Par ailleurs, les pays émergents se positionnent aussi pour faire la différence. Ils sont souvent les plus touchés par les changements climatiques, et ce type d’investissement a donc beaucoup de sens pour eux. »

DE LA PHILANTHROPIE RENTABLE

Pour la cofondatrice du Luxembourg Green Exchange, au-delà de l’intérêt financier de ces investissements, il ne faut pas mettre de côté le mouvement sociétal général qui est à l’origine de l’essor de la green finance. « Il est vrai qu’une partie des investisseurs voit l’intérêt que représentent ces produits stables, aux bons rendements, surtout dans le contexte de méfiance qui a suivi les dernières crises financières. Mais je pense que de nombreuses personnes sont simplement en recherche de plus de sens, dans tous les aspects de leur vie : leur travail, leur logement, leur mode de consommation, et donc également leur façon d’investir leur argent. »

SOURCE Climate Bonds Initiatives (2018 estimate)

On ne peut que se féliciter de voir le monde L’EXIGENCE DE LA TRANSPARENCE de la finance investir dans des projets qui, en Faire en sorte que son argent ait un impact toute logique, devraient profiter à l’ensemble positif pour l’environnement ou la société. de la société, et même à toute la planète. Cela Voilà une facette de l’investissement qui n’était dit, si les investisseurs se ruent aujourd’hui autrefois considérée que de très loin par les sur les obligations vertes, ce n’est certaine- gestionnaires de fonds, braqués sur l’équiment pas – uniquement, du moins – par pure librage parfait entre rendement et mitigation philanthropie. « Nous n’avons plus aucun des risques. Cela signifie donc que la finance mal, aujourd’hui, à convaincre que les ren- verte, au Luxembourg ou ailleurs, fait entrer dements offerts par les obligations vertes ce secteur dans une nouvelle dimension, celle BIEN PLACÉ, MAIS CONCURRENCÉ peuvent être aussi séduisants que ceux qu’on de l’idéalisme. Or, pour un idéaliste, rien n’est Malgré les évolutions, le Luxembourg est peut espérer avec des produits traditionnels. pire que de voir ses idéaux trahis. Si un invesresté un domicile particulièrement privi- En outre, étant donné que les projets finan- tisseur réalise que les fonds qu’il a investis légié pour les obligations vertes au niveau cés courent souvent sur le long terme, ces dans une obligation verte n’ont pas été utilimondial. La croissance du nombre d’obliga- investissements s’avèrent également plus sés pour réaliser des projets durables ou verts, tions qui y sont cotées a certes été lente, mais stables, notamment lorsque les marchés se les conséquences pourraient être dévastaexponentielle. Ainsi, après le lancement de la font volatils, analyse Julie Becker. Comme trices, non seulement pour l’émetteur, mais première obligation verte en 2007, il a fallu pour tout type d’obligation, il est également aussi pour le crédit de cette forme d’investispas moins de neuf années pour atteindre le possible d’obtenir de plus hauts rendements sement au sens large. cap des 100 obligations cotées à la Bourse en prenant plus de risques. C’est ici la quaPour tous les acteurs qui émettent des de Luxembourg. Trois ans plus tard, soit au lité de l’émetteur qui déterminera le niveau obligations, les cotent ou les labellisent, il 30 septembre 2019, plus de 500 obligations de risque que l’on prend. » est dès lors crucial de mettre en place les vertes, sociales ou durables y étaient cotées. La création du LGX y est certainement pour quelque chose, mais il s’agit également du résultat d’une prise de conscience globale. LA CROISSANCE EXPLOSIVE DES OBLIGATIONS VERTES En effet, le volume d’obligations vertes ou durables dans le monde a connu la même 250 évolution exponentielle. « Cette croissance, bien qu’impressionnante, n’est toutefois pas suffisante pour relever les défis environnementaux qui s’annoncent », indique Julie 200 Becker. Pour la membre du comité exécutif de la Bourse de Luxembourg, « le financement des solutions permettant de relever le 150 défi du changement climatique nécessiterait pas moins de 1.000 milliards de dollars… chaque année ». 100 Dans cette masse de nouvelles obligations, où se situe le Luxembourg, précurseur du secteur ? En réalité, le pays s’en sort 50 très bien. Avec un total de presque 200 milliards d’euros émis et affichés sur le Luxembourg Green Exchange en septembre 2019, 0 le Luxembourg est le premier pays d’Europe 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 en termes de montants émis. Il pèse 2,5 fois plus que Paris et cinq fois plus que Londres ou Décembre 2019 — Green economy —

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instruments permettant d’assurer la bonne utilisation des fonds mobilisés. À cet égard, le Luxembourg Green Exchange met un point d’honneur à ne proposer que des obligations et des fonds 100 % verts, sociaux ou durables. Des critères stricts sont utilisés pour vérifier l’éligibilité de ces produits, notamment les labels de Luxflag. Un mot d’ordre prévaut : la transparence. « Les émetteurs qui souhaitent travailler avec nous s’engagent à expliquer, dans la documentation additionnelle qu’ils fournissent, quels types de projets sont financés à travers leurs produits. Des vérifications sont en outre réalisées tout au long du processus. Par exemple, 12 mois après l’émission d’une obligation, l’émetteur doit fournir un rapport d’évaluation d’impact ou d’utilisation des fonds qui établit avec précision ce qui a été fait des fonds investis, détaille la fondatrice du Luxembourg Green Exchange. Selon moi, finance durable est synonyme de finance transparente. Il est essentiel de donner une information précise aux investisseurs et de permettre à l’émetteur de rendre régulièrement des comptes par rapport aux investissements réalisés. Étant donné que ce qui est vert aujourd’hui pourrait ne plus l’être demain, il faut aussi permettre aux investisseurs de se désengager si les projets financés ne leur conviennent plus. »

SUICIDAIRE GREEN WASHING

La place financière luxembourgeoise, qui tire jusqu’ici très bien profit de l’émergence de la finance verte, a donc bien compris le caractère crucial d’une gestion transparente au cœur de ce nouveau territoire boursier. Cela veut-il dire que personne ne tentera de corrompre les nobles intentions de la finance verte ? « Je pense que, pour un émetteur de fonds ou d’obligation verte, toute tentative de triche entraîne un tel risque au niveau de sa réputation qu’il est suicidaire de se livrer à quelque chose de ce genre, estime Julie Becker. L’intégrité est cruciale, en tout cas sur une plate-forme comme le Luxembourg Green Exchange. Nous encourageons la production de standards et de labels qui permettent de garantir le caractère réellement durable des investissements réalisés grâce aux obligations ou fonds verts. Par ailleurs, je pense vraiment que tous les acteurs ont de plus en plus conscience de faire cause commune à travers ce type de produits financiers. Tout le monde est exposé aux conséquences du changement climatique, et personne ne pense donc à détourner les instruments qui nous permettent d’y remédier. » Mieux vaut toutefois prévenir que guérir. Dès 2016, la Commission européenne a décidé de créer un groupe de travail afin de donner un cadre légal à cette nouvelle forme de finance. Le Luxembourg Green Exchange, 20 —

« Nous avons besoin d’un langage commun. » en tant que précurseur et leader de la finance verte en Europe, y a participé. « On peut se féliciter de constater que ce groupe de travail a eu des effets concrets et assez rapides, explique Julie Becker. Nous avons remis un rapport à la Commission, contenant une série de conseils. Et rapidement, des propositions législatives ont été formulées en retour. À travers elles, il s’agit par exemple d’obliger les asset managers à révéler comment ils intègrent les critères ESG dans leur politique de gestion. »

VERS UN EFFACEMENT DE LA DISTINCTION DURABLE / NON DURABLE

Ce mouvement vers une plus grande transparence de la gestion financière des fonds et obligations, mais aussi des sociétés ellesmêmes, devrait s’accélérer au cours des prochaines années. « Cela peut déjà se voir dans le monde de l’entreprise, avec des rapports annuels qui ne sont plus seulement financiers, illustre Julie Becker. De plus en plus souvent, les entreprises émettent également des rapports sur la durabilité de leurs pratiques, sur la responsabilité sociétale. Je pense qu’un jour, ces différents rapports ne feront plus qu’un. La distinction entre ce qui est durable et ce qui ne l’est pas s’effacera complètement. Les risques non financiers, dès aujourd’hui, sont d’ailleurs déjà pris en compte comme un élément essentiel par les investisseurs. » L’Histoire retiendra-t-elle la finance verte, dont le Luxembourg a été l’un des détonateurs, comme l’indispensable bras financier qui aura permis de lutter contre le changement climatique ? C’est bien là son ambition. « On peut en tout cas affirmer qu’en servant les intérêts de l’économie réelle, elle renoue avec l’origine de la finance et a vraiment la faculté d’avoir un impact positif sur la société. On le voit avec l’apparition, aujourd’hui, d’obligations dites ‘de transition énergétique’, émises par des grandes sociétés de production de gaz ou de pétrole. Celles-ci leur permettent d’amorcer la transition de leur business vers des énergies renouvelables, par exemple. En ce sens, la green finance, qu’elle soit cotée au Luxembourg ou ailleurs, peut en effet avoir un impact positif sur la problématique environnementale et climatique », conclut Julie Becker.  Q.D.

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PHOTO Matic Zarwan

ÉCOSYSTÈME

TROIS QUESTIONS À... Natasha Deloge deputy head of innovation, payments, market infrastructures and governance department, CSSF

Existe-t-il, à l’heure actuelle, une réglementation spécifique pour les fonds et obligations verts ou durables ? Au Luxembourg, il n’existe encore aucune réglementation spécifique pour ce type de placements. Toutefois, il faut relever que la Commission européenne a mis au point un plan d’action pour la finance durable qui vise à mettre en place un arsenal de mesures à la fois législatives et non législatives par rapport à ce type d’investissements. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce plan d’action européen ? Il est notamment question de clarifier ce qu’on peut qualifier de « durable » ou non dans le secteur financier. C’est important, car tous les acteurs en Europe ont besoin de parler un langage commun pour travailler ensemble sur le sujet. De nombreux outils législatifs sont en outre prévus pour diriger le flux de capitaux drainé par la finance vers des activités plus durables. Le cadre réglementaire ainsi créé permettra aux différents États membres de mieux articuler leurs initiatives dans le domaine de la finance durable. Êtes-vous régulièrement sollicités par rapport à la finance durable ou verte ? L’une de nos missions est de sensibiliser les acteurs quand une nouvelle opportunité se présente sur le marché. Nous le faisons donc régulièrement, d’initiative ou quand on fait appel à nous. La finance verte représente une vraie nécessité pour financer la transition écologique, et elle constitue un réel instrument de rentabilité à long terme.


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SUSTAINABILITY

La durabilité, nouvel enjeu des entreprises Dans un monde toujours plus marqué par le changement climatique et l’épuisement des ressources, les entreprises ont plus que jamais un rôle à jouer en matière de durabilité. Le point avec Nathalie Dogniez et Valérie Arnold, Partners chez PwC Luxembourg. CONTENU SPONSORISÉ PWC LUXEMBOURG

pouvoirs publics prennent des initiatives pour inciter la société civile, mais aussi les entreprises, à s’impliquer et à adopter un modèle plus durable. Au niveau mondial, l’Organisation des Nations Unies a établi en 2015 une liste de 17 Objectifs de développement durable (ODD) et de 169 cibles à atteindre à l’horizon 2030 pour « parvenir à un avenir meilleur et plus durable pour tous ». L’objectif est de répondre aux défis mondiaux auxquels le monde est confronté, notamment ceux liés à la pauvreté, aux inégalités, au climat, à la dégradation de l’environnement, à la prospérité, à la paix et à la justice. La Conférence de Paris sur les changements climatiques qui s’est tenue en 2015 et a réuni 195 pays a elle aussi fixé des objectifs à atteindre à l’horizon 2030, notamment une réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre. De son côté, l’Union européenne estime à 180 milliards d’euros le montant des investissements annuels nécessaires pour qu’elle puisse atteindre ses objectifs en matière de développement durable. Dans ce contexte, la Commis22 —

— Green economy — Décembre 2019

sion européenne a présenté un plan d’action sur la finance durable visant à financer une économie performante intégrant les objectifs environnementaux et sociaux et à faire en sorte que le secteur financier soutienne la transition vers une économie durable. Consciente que l’action des seuls pouvoirs publics ne pourra pas à elle seule contrer le changement climatique et remplir les ODD élaborés par les Nations Unies, la Commission européenne est en train de finaliser un ensemble de mesures législatives visant à encadrer l’intégration de la durabilité à la finance. Si les

nouveaux textes ne seront applicables qu’à partir de 2021, les investisseurs ont d’ores et déjà commencé à intégrer de façon systématique les questions environnementales à leur démarche d’investissement. La finance durable représente donc une opportunité, voire une démarche incontournable, pour les acteurs du secteur financier.

UNE OPPORTUNITÉ D’INVESTISSEMENT

Aujourd’hui, les investisseurs cherchent de plus en plus à investir dans des sociétés qui démontrent de bonnes pratiques ESG (envi-

« À terme, les critères ESG vont devenir la norme en matière de gestion financière. » Nathalie Dogniez EMEA ESG Leader et Partner, PwC Luxembourg

ILLUSTRATION Maison Moderne

lors que le monde est de plus en plus A conscient des effets du changement climatique et de l’épuisement des ressources, les


DÉFINITIONS

ABC

PHOTO PwC Luxembourg

La finance durable désigne des pratiques de la finance qui prennent en compte des critères extrafinanciers comme l’environnement ou le social. Elle consiste à combiner un objectif de durabilité sur le long terme à un objectif de performance financière sur le court terme et permet ainsi une transition de l’économie vers une économie plus durable. Il y a autant de définitions que d’acteurs dans le secteur car chaque société va définir les axes les plus importants pour elle en termes de perspectives à long terme. Certains acteurs intègrent également des approches d’exclusion (exclure certains secteurs considérés comme non durable) ou d’engagement (mettre en place un dialogue avec les sociétés investies afin d’améliorer leurs pratiques ESG).

ronnementales, sociales et de gouvernance) et disposent d’un bon scoring en la matière. « Les investisseurs souhaitent de plus en plus obtenir des données complètes et suffisamment fiables lorsqu’ils investissent dans une société, d’où l’importance du reporting, explique Nathalie Dogniez, EMEA ESG Leader et Partner chez PwC Luxembourg. L’ESG est à considérer comme une opportunité d’investissement incontournable. Dans ce contexte, il est important pour les acteurs du secteur financier de mettre en place une stratégie de finance durable, mais aussi de développer de nouveaux produits qui intègrent cette stratégie, de mettre en place les processus nécessaires, et d’élaborer un reporting en la matière. À terme, les critères ESG vont devenir la norme en matière de gestion financière. Ils représentent à la fois une opportunité d’investissement, une réponse à la demande croissante des investisseurs, mais bientôt aussi une obligation réglementaire. En effet, les nouvelles législations vont représenter un changement fondamental pour l’ensemble du secteur financier luxembourgeois, rendant obligatoires la prise en compte des risques ESG et l’alignement des dimensions ESG des

Les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) constituent les trois piliers de l’analyse extrafinancière. Ils permettent d’évaluer la responsabilité des entreprises par rapport à l’environnement (réduction des émissions de gaz à effet de serre, gestion des déchets, etc.), le social (formation du personnel, droit des employés, etc.), la gouvernance (indépendance du conseil d’administration, etc.) ou avec leurs parties prenantes.

produits financiers avec les préférences ESG des investisseurs. Nous aidons nos clients à s’y préparer. »

UNE STRATÉGIE GLOBALE

Mais l’enjeu de la durabilité ne se limite pas à l’aspect purement financier. De manière plus générale, les entreprises sont vivement encouragées à adopter une stratégie globale en la matière. « Dans une période marquée par une perte de confiance, les inégalités sociales et économiques n’ont jamais été si préoccupantes, et notre planète a atteint ses limites. Un nouveau système doit émerger, un

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3 QUESTIONS À

Valérie Arnold CR & Sustainability Leader et Partner, PwC Luxembourg

Quel(s) objectif(s) en matière de durabilité PwC s’est-il fixé(s) ? « Building trust in society and solving important problems » (Instaurer de la confiance dans la société et résoudre des problèmes importants), tel est l’objectif que nous nous sommes fixé dans notre agenda corporate. Pour y parvenir, nous avons identifié, dès 2016, en étroite collaboration avec nos parties prenantes (clients, gouvernement, syndicats, collaborateurs anciens et actuels, ONG, etc.), une liste de 15 sujets de durabilité et 7 défis prioritaires auxquels nous souhaitons nous attacher pour y parvenir et en vue de rester une société légitime aux yeux de nos clients, de nos collaborateurs et de la société dans son ensemble. Quels sont ces défis ? En premier lieu, nous réfléchissons à notre impact social, aux besoins de la société, et voyons comment nous pouvons adapter notre offre de services. Ensuite, la satisfaction de nos clients reste une de nos principales priorités, de même que notre indépendance, notre légitimité et notre éthique. Les trois derniers défis concernent nos collaborateurs, sans qui nous ne pourrions pas exister : l’employee journey, c’est-à-dire notre capacité à attirer et à retenir des talents, la santé et la formation continue. Avez-vous pris en compte les Objectifs de développement durable pour définir vos propres défis de durabilité ? Nous avons commencé à définir nos challenges avant que les ODD ne soient publiés et nous nous sommes ensuite adaptés à ce cadre. Nous avons fait cela en deux temps. Tout d’abord, nous avons aligné nos défis de durabilité aux ODD, en utilisant le cadre des ODD pour redéfinir nos priorités. Ensuite, nous avons passé en revue tous les ODD et les 169 cibles et avons pour objectif un exercice de self-assessment pour étendre nos priorités aux ODD que nous n’aurions pas pris en considération. À l’avenir, nos priorités sont à lire à travers le prisme des ODD.

Décembre 2019 — Green economy —

— 23


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1

LES INITIATIVES EN MATIÈRE DE FINANCE DURABLE AU LUXEMBOURG 14.0

SEVEN PRIORITIES

PwC a défini une liste de 7 priorités pour parvenir à son objectif « building trust in society and solving important problems ».

13.0 12.0 11.0

Legitimacy & ethics Conflict of interest & independence Societal impact Health

10.0 9.0

Continuous learning

Transparency

Client satisfaction

8.0

Adaptability

7.0

Community engagement 6.0 5.0

Attractiveness

Diversity

Greenhouse gas emissions Responsible procurement

Affordability

4.0

Accessibility

Source: PwC, annual review 2019

Importance for stakeholders

CFTF

MATERIALITY MATRIX

15.0

Climate Finance Task Force (CFTF): lancé en 2015, ce groupe de travail dédié à la finance climatique rassemble le gouvernement luxembourgeois et son secteur des services financiers.

3.0 2.0 1.0 0.0 0.0

1.0

2.0

3.0

4.0

5.0

6.0

7.0

8.0

9.0

10.0

11.0

12.0

13.0

14.0

15.0

Importance for PwC

« Un nouveau système doit émerger, un système qui remette le monde des affaires, l’économie et la société au même niveau. » Valérie Arnold CR & Sustainability Leader et Partner, PwC Luxembourg

24 —

— Green economy — Décembre 2019

système qui remette le monde des affaires, l’économie et la société au même niveau , explique Valérie Arnold, CR & Sustainability Leader et Partner chez PwC Luxembourg. Nous ne pourrons pas y parvenir si les sociétés n’adoptent pas une stratégie globale en matière de durabilité. » « La durabilité correspond à la capacité à gérer un agenda à court terme avec une vision à long terme. Cette stratégie aide les sociétés à comprendre leurs risques et opportunités, ce qui leur permettra de continuer à opérer et de gagner en légitimité, poursuit Valérie Arnold. Les entreprises ont ainsi tout intérêt à mettre en place un agenda de durabilité qui leur permettra d’expliquer à leurs parties prenantes leur légitimité dans la société. Ces informations, qui peuvent être reprises dans un reporting non financier, offrent une grille de lecture aux parties prenantes. » Depuis 2014, en effet, la législation européenne impose aux grandes entreprises de publier un reporting non financier où elles informent sur leurs politiques, les

risques encourus et les résultats obtenus en ce qui concerne les questions environnementales, les questions sociales liées au personnel, le respect des droits de l’Homme et la lutte contre la corruption. En plus d’avoir mis lui-même en place un agenda de durabilité, PwC Luxembourg aide ses clients à réfléchir et élaborer leur reporting non financier dans le contexte des ODD. Comment les clients opèrent-ils dans le cadre du réchauffement climatique ? Tel est par exemple l’un des points sur lesquels le cabinet d’audit travaille avec ses clients. « Ce qui était vertueux par le passé, la croissance, a été vrai tant qu’il y avait un alignement avec les valeurs sociétales et qu’on ne détruisait pas la planète. Aujourd’hui, nous avons dépassé ce modèle et assistons à un changement de paradigme. Ne pas contribuer à ce nouvel écosystème, c’est encourir des risques. Les sociétés doivent créer de la valeur partagée pour leurs parties prenantes, c’est là tout l’enjeu de la durabilité », conclut Valérie Arnold. 


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2

LGX

Luxembourg Green Exchange (LGX): cette plateforme lancée par la Bourse de Luxembourg en 2016 est la première dédiée aux valeurs vertes, socialement responsables et durables.

3

LUXFLAG

EN CHIFFRES

LA FINANCE DURABLE AU LUXEMBOURG Le Luxembourg est une plate-forme internationale de premier plan en matière de finance durable et fournit un environnement propice à l’établissement de fonds de la finance climatique. Le Grand-Duché concentre :

39% de parts de marché des fonds d’investissement responsables en Europe

61% des actifs mondiaux sous gestion en microfinance

PHOTO PwC Luxembourg

45% des actifs sous gestion dans des fonds européens de stratégie environnementale

4 QUESTIONS À

Nathalie Dogniez EMEA ESG Leader et Partner, PwC Luxembourg

Comment sont nés les critères ESG ? L’intégration de facteurs ESG existe depuis plusieurs décennies, principalement en Europe continentale (France, Benelux, pays nordiques). Aujourd’hui, l’ESG s’inscrit dans une dimension globale, suscitant un intérêt croissant aux États-Unis et en Asie. Comment mettre en place une stratégie ESG ? Tout d’abord, il faut définir la stratégie poursuivie : l’intégration de facteurs ESG va-t-elle concerner certains types d’actifs ou produits, ou l’ensemble des portefeuilles gérés ? Il s’agit ensuite de définir les types de produits proposés, mettre en place des processus adéquats (analyse ESG, qualité des données, intégration dans les processus de gestion et de risque) et définir une approche de reporting aux investisseurs. Il est en effet fondamental de communiquer auprès des investisseurs pour s’assurer que la stratégie de l’entreprise concorde avec les attentes des investisseurs. Pour prouver leurs efforts en matière d’ESG, les sociétés peuvent également obtenir la labellisation de leurs produits (comme LuxFlag, par exemple, délivré par l’agence gouvernementale spécialisée dans la labellisation des fonds). Quel est l’impact de l’ESG sur la performance des sociétés ? L’analyse des facteurs ESG permet de mieux appréhender (et par conséquent

LuxFLAG est un système de labellisation des investissements. Son but est de rassurer les investisseurs sur le fait qu’un produit investit bien dans un secteur responsable.

intégrer dans les décisions d’investissements) les risques environnementaux ou sociaux auxquels les sociétés sont confrontées. Est-ce que la société est bien armée en termes d’adaptation au changement climatique ? Est-ce qu’elle prend en compte les aspects de santé, sociaux, de réduction des émissions de CO2 ? Ces questions fondamentales influencent de plus en plus les perspectives des sociétés cibles et leur performance financière. L’approche ESG est donc un critère de performance pour le secteur financier, puisqu’elle permet aux asset managers de mieux appréhender les risques financiers liés aux enjeux climatiques, notamment. Quels est l’intérêt de mettre en place une approche ESG ? Aujourd’hui, l’ESG est en train de devenir un must. Tout d'abord, l’intégration des risques ESG permet de mieux évaluer et gérer les risques environnementaux et sociaux. Ensuite, une stratégie de finance durable permet d’identifier de nouvelles opportunités d’investissement (activités durables). Enfin, les produits définis comme ESG ou « responsables » répondent à une demande croissante des investisseurs. Par ailleurs, les textes en voie de finalisation au niveau européen vont accélérer cette tendance, changeant le paysage financier européen et rendant obligatoires la prise en compte des risques ESG, la catégorisation des produits financiers en fonction des préférences ESG des investisseurs, ainsi qu’un reporting régulier sur les caractéristiques et l’impact environnemental ou social des produits financiers vendus comme durables.

tions forma nuel n ’i d n Plus port a le rap mbourg : s n a e d C Lux de Pw cbQU /2WZ o .t c pw

Décembre 2019 — Green economy —

— 25


EN COUVERTURE TRANSFORMATION

les banques s’y mettent Poussée par leurs clients, leurs collaborateurs et la réglementation, les banques s’engagent en faveur d’une économie plus durable. L’enjeu de demain sera de parvenir à créer de la valeur en contribuant à la préservation de la planète et à un monde plus juste. our le développement d’une économie P verte, la banque est appelée à jouer un rôle prépondérant. « Par les décisions qu’elle

Le métier de banquier s’apprêterait donc à menée conjointement avec PwC Luxembourg, connaître d’importants changements. « Et ces ont été dévoilés en mai dernier. transformations sont à la fois passionnantes On y découvre que la totalité des réponprend, les financements qu’elle octroie, les et engageantes. Elles redonnent du sens à dants considère que la finance durable relève conseils en investissement qu’elle donne, la notre profession de banquier », précise-t-il. d’une tendance importante pour le secteur banque peut considérablement contribuer Demain, l’enjeu pour la banque ne sera bancaire – 72 % des répondants ont d’ailleurs au développement d’activités durables, au plus uniquement de faciliter la création de pris des mesures en faveur d’un développeservice de la préservation des ressources, de valeur financière, mais aussi de contribuer ment plus durable. Ils ne sont que 6 % à penla transition énergétique, de la lutte contre à un monde plus juste, plus respectueux de ser que le développement d’une telle activité le réchauffement climatique ou encore de la l’environnement et de chacun. « La nouvelle ne serait pas profitable. Pour la plupart des préservation énergétique », explique Anne-­ génération de banquiers aura en effet un répondants, la finance durable constitue d’ailSophie Dufresne, membre du comité exécutif rôle majeur à jouer pour sauver la planète, leurs une belle opportunité de développede BGL BNP Paribas et directrice de la Banque assure Fabio Mandorino, conseiller au sein ment pour l’activité bancaire, permettant des entreprises. de l’Association des banques et banquiers, d’allier diversification des risques, retour sur Luxembourg. Leur mission, à l’avenir, sera investissement et impacts positifs sur l’enviLA RESPONSABILITÉ AU CŒUR DU MÉTIER de trouver les moyens d’aider les familles ronnement, la société, les gouvernements. Alors que les banques développent des et les entrepreneurs à créer de la valeur de « Les banquiers ont surtout compris qu’il démarches de responsabilité sociétale et envi- manière durable. » s’agissait aussi d’un moyen d’améliorer les ronnementale depuis plusieurs années, leur relations qu’ils ont avec leurs clients, comimpact ne s’étendait que rarement au-delà NOUVELLE APPROCHE DE LA BANQUE mente Fabio Mandorino. Quand on discute du périmètre de l’organisation. Aujourd’hui, Plus facile à dire qu’à faire, cependant. Parve- de finance durable, on évoque avec le client la banque doit voir plus grand au service de nir à générer un impact positif sur la société, ses valeurs et ses convictions au-delà du seul l’environnement et de la société. « Désormais, l’environnement et l’économie implique un portefeuille et des rendements espérés. » c’est à travers notre métier, dans le conseil changement de paradigme majeur pour les en investissement proposé ou au niveau du acteurs de la banque. Comment les banques NOUVEAUX CLIENTS, NOUVELLES EXIGENCES financement de l’économie, que nous sommes luxembourgeoises appréhendent-elles ces Car le client est l’un des premiers moteurs invités à agir et à soutenir le développe- enjeux ? Au début de cette année, l’ABBL a de cette transformation. De plus en plus, les ment d’une économie durable, assure Olivier sollicité l’avis de 98 CEO pour le savoir, dont conseillers en investissement sont solliciGoemans, head of investment services & 70 ont répondu au questionnaire qui leur était tés sur des questions qui se rapportent à des innovation au sein de la Bil. L’effet de levier, à soumis. Les résultats de cette étude, intitulée aspects non financiers des sociétés dans lesce niveau, s’avère beaucoup plus important. » ABBL Sustainable Finance Market Study et quelles ils proposent d’investir. Sur le bilan 26 —

­— Green economy­— Décembre 2019


carbone des sociétés, sur leurs engagements environnementaux ou leur responsabilité vis-à-vis de leurs collaborateurs notamment. « C’est particulièrement perceptible auprès de la jeune génération, qui développe un réel souci d’investir en contribuant à la préservation de l’environnement, assure Olivier Goemans. Cette tendance devrait se renforcer dans les années à venir. Nous devons nous préparer à répondre à un raz-de-marée générationnel autour de ces préoccupations, et l’on peut s’en réjouir. » Toutefois, apporter des réponses à ces questions n’a rien d’évident. L’information en la matière n’est pas forcément disponible, ni rapportée, ni normalisée. Et c’est en cela que le système bancaire doit s’adapter. Pour cela, il peut compter sur l’aide des autorités.

ÉVALUER L’IMPACT

Autres vecteurs de changement : les collaborateurs des banques, qui eux aussi développent une réelle appétence pour ces sujets, et la réglementation. Au niveau européen, plusieurs projets réglementaires sont actuellement en gestation, dont la mise en place d’une taxonomie des activités durables. L’idée défendue par l’Union européenne est de mettre les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) au cœur des préoccupations des marchés financiers, de manière harmonisée. « Aujourd’hui, chacun a la possibilité de déterminer ses propres critères de ce qu’il considère être vert ou non. Les labels se multiplient et appliquent des critères variés, explique Rudi Belli, chef du département Secrétariat général de la Banque et caisse d’épargne de l’État (BCEE /  Spuerkeess). Afin d’apporter cohérence, transparence et harmonie dans ce contexte, la future taxonomie au niveau européen aura l’avantage de représenter un référentiel commun pour l’intégralité des acteurs, permettant d’évaluer l’impact d’une activité sur l’environnement au départ de six critères (voir encadré p. 28) et de contribuer ainsi à l’établissement d’un level playing field. »

ILLUSTRATION Ellen Withersova

NOUVEAUX RISQUES

« Du côté de la banque, les référentiels d’acceptation des risques liés aux critères ESG devront être pris en compte, assure Rudi Belli. On peut en effet considérer qu’un investissement dans une activité qui ne s’inscrit pas dans une approche durable est plus risqué qu’un autre sur le long terme. Le développement de nouvelles politiques environnementales, par exemple, pourrait entraîner une pression renforcée sur les acteurs économiques, avec une augmentation de la fiscalité sur les émissions de CO2 par exemple. » De nouveaux risques émergent et doivent être mieux considérés. Dans un monde qui

change, une exploitation pétrolière représente aujourd’hui un actif qui pourrait à terme se dévaloriser, son propriétaire devant se soumettre à des obligations de respect de l’environnement accrues, notamment au niveau de la dépollution. Des consommateurs pourraient aussi plus facilement se détourner d’entreprises qui, de fait, ne font pas les efforts requis pour réduire l’impact de leur activité sur l’environnement. « Dans le métier du conseil en investissement, ces critères seront obligatoirement pris en compte au moment de l’établissement du profil de l’investisseur. La refonte réglementaire acquise à ce niveau autour de Mifid II et IDD pour les contrats d’assurance fait que le profil investisseur intégrera à l’avenir les préférences des clients en matière de durabilité », ajoute Olivier Goemans.

ACCOMPAGNER LA TRANSITION

« Dans cette logique, les banquiers auront aussi un rôle important à jouer dans l’accompagnement de la transition des acteurs économiques. Ils doivent pouvoir ouvrir les yeux de celles et ceux qui font une demande de financement sur les enjeux et l’évolution des business models. La banque retrouve son rôle de moteur du changement et doit accompagner les sociétés dans la transition sociale et environnementale aujourd’hui nécessaire, ajoute Fabio Mandorino. Représentant de nombreux investisseurs-actionnaires, les banques pourraient aussi faire davantage entendre leur voix pour infléchir des politiques de développement qui, à leurs yeux, n’iraient pas dans la bonne direction. Dans ce contexte, le banquier doit mieux appré-

hender l’avenir, en considérant les évolutions à l’œuvre. Cela implique une remise en question permanente des modèles, car ce qui est vert aujourd’hui ne le sera plus forcément demain. »

DE LA PRÉPARATION À L’ACTION

Dès à présent, cependant, les banques doivent se préparer à jouer ce rôle et à assumer ces nouvelles missions. Actuellement, dans une phase d’évaluation des opportunités et des risques, la plupart des acteurs voient augmenter le nombre de produits financiers durables, comme les prêts ou les obligations vertes, et n’hésitent d’ailleurs pas à les proposer à leurs clients. Cependant, si l’on s’en réfère à l’étude de l’ABBL, un tiers des acteurs n’a pas encore de vision claire sur le potentiel des offres de produits sur ce segment. Au-delà de la simple opportunité, c’est au niveau stratégique que les acteurs du secteur bancaire vont devoir appréhender ces changements, en les plaçant au cœur de leur développement futur. « Nos clients attendent de nous que nous anticipions et que nous proposions des investissements qui font sens, non seulement en termes de rentabilité ou de productivité, mais aussi en matière de lutte contre les inégalités sociales et les risques environnementaux, assure Anne-Sophie Dufresne. Pour certains secteurs, notre groupe a par exemple défini des politiques imposant la prise en compte d’exigences ESG, en plus des critères de performance économique, dans ses décisions de financement et d’investissement. En tout, neuf secteurs sensibles ont été identifiés : pétrole et gaz, agriculture, industrie du tabac, huile de palme,

Décembre 2019 — Green economy —

­ — 27


TRANSFORMATION charbon, industrie minière, défense, nucléaire, pâte à papier. Le groupe a même pris la décision courageuse de cesser ses relations avec les acteurs du secteur du tabac. »

TRANSITION INCLUSIVE

L’enjeu, pour la banque, est de parvenir à entraîner l’ensemble des parties prenantes – les épargnants et investisseurs comme les organisations – dans une spirale positive. « Nous sommes aujourd’hui convaincus qu’il y a de belles opportunités dans cette démarche durable. Il faut cependant pouvoir appréhender la transition suivant des logiques inclusives, en emmenant le maximum de gens dans la bonne direction. Cela prend du temps et implique d’adapter la culture comme les procédures, commente Olivier Goemans. Aujourd’hui, la banque évalue les diverses possibilités de s’engager au service d’une économie plus durable. Si l’ambition de la Bil n’est pas de devenir une banque écologique, nous entendons jouer pleinement notre rôle pour répondre aux enjeux environnementaux et sociaux. Au-delà des réponses que nous pouvons apporter à ce segment grandissant de notre clientèle qui se soucie de l’environnement, en anticipant les changements réglementaires, il s’agit de bien appréhender les opportunités liées à cette transformation durable. Notre objectif est d’accompagner au mieux le mouvement sociétal de grande ampleur qui est aujourd’hui engagé. »

DES ENGAGEMENTS FORTS

Toutes les banques seront amenées à s’inscrire dans cette voie, qu’elles soient luxembourgeoises, européennes ou évoluant dans d’autres coins du globe. Le 22 septembre dernier, d’ailleurs, l’Initiative de collaboration du programme des Nations unies pour l’environnement avec le secteur financier (UNEP FI) lançait officiellement des principes pour une banque responsable, invitant l’ensemble des acteurs bancaires de par le monde à y souscrire. Au moment d’écrire ces lignes, 138 banques issues de 45 pays s’étaient engagées à respecter ces principes. Ce chiffre devrait progressivement s’élever. De nombreux groupes internationaux présents au Luxembourg y ont adhéré. C’est le cas de BNP Paribas, ING, Crédit Agricole, Société Générale, pour n’en citer que quelques-uns. Un certain nombre d’acteurs attendent davantage d’éléments avant de s’engager dans une procédure qui implique de faire preuve de transparence et de rendre des comptes. Si l’on considère les acteurs à l’échelle du Luxembourg uniquement, seule la BCEE / Spuerkeess n’a pas hésité jusqu’à présent à s’engager dans cette voie aux côtés de l’ABBL. Les principes pour une banque responsable s’articulent autour de six pôles. Le 28 —

premier vise un alignement de la stratégie d’entreprise sur les objectifs fixés en matière de développement durable par les Nations unies ou encore l’accord de Paris. Le deuxième vise l’accroissement de l’impact favorable de l’entreprise sur la société tout en réduisant son impact défavorable et en gérant les risques pour les personnes et l’environnement. Et c’est déjà tout un programme. « Dans un premier temps, nous déterminerons une roadmap claire visant à renforcer notre rôle en faveur d’une économie durable, commente Rudi Belli. Il nous revient de déterminer les objectifs principaux à poursuivre. Ensuite, nous devons mesurer les impacts positifs et négatifs engendrés au regard de chacun des objectifs. Le chantier est complexe, surtout en raison des réglementations qui résulteront de l’adoption définitive du plan d’action européen pour la finance durable et qui exigent notamment une inclusion des risques climatiques dans le modèle d’évaluation des risques des institutions financières. Aujourd’hui, nous n’avons pas la capacité de mesurer les émissions de CO2 liées aux activités développées à l’aide des crédits que nous octroyons, par exemple. »

ADAPTATIONS PROFONDES

Le troisième principe exige l’adoption d’un comportement responsable à l’égard des clients, qui favorisera une prospérité partagée pour les générations futures. Le quatrième implique la consultation et l’engagement des parties prenantes en vue d’atteindre les objectifs que s’est fixés la société. Le cinquième vise à garantir l’application desdits principes par le biais de la gouvernance, des objectifs et d’une culture de banque responsable. Enfin, le dernier principe impose transparence et responsabilité. « La Spuerkeess a manifesté sa volonté de transparence envers la société en adoptant le standard de la Global Reporting Initiative dès 2017 au niveau de la publication de son rapport non financier. L’adhésion aux Principles for Responsible Banking n’a été que la conséquence logique de ce premier pas engagé en 2017. Une fois que l’on y a adhéré, on a quatre ans pour s’aligner sur les six principes », explique Rudi Belli. Le chantier n’est pas mince. « Il implique de repenser le fonctionnement de la banque au cœur de son environnement, en emmenant avec nous l’ensemble des parties prenantes de notre écosystème, poursuit le responsable. Dans le cas de la Spuerkeess, considérant notre caractère étatique, nos clients, nos fournisseurs, nos collaborateurs, cela touche à toutes les sphères de la société luxembourgeoise. Il faut en outre revoir les offres de services, l’approche relationnelle avec les clients ou encore les processus opérationnels pour y intégrer, par exemple, de nouveaux critères de risque

­— Green economy­— Décembre 2019

6 CRITÈRES POUR ÊTRE RECONNU DURABLE La taxonomie de l’Union européenne constituera un outil permettant aux marchés d’identifier et de saisir les opportunités d’investissements contribuant aux objectifs de la politique environnementale. Pour qu’une activité soit reconnue comme durable dans le contexte de la taxonomie, elle devra démontrer qu’elle apporte une contribution substantielle à l’un des six objectifs environnementaux de l’UE suivants (sans avoir d’impact préjudiciable sur aucun des cinq autres) : atténuation des changements climatiques ; adaptation aux changements climatiques ; utilisation durable et protection des ressources hydrologiques et marines ; transition vers une économie circulaire ; prévention et contrôle de la pollution ; protection et restauration de la biodiversité et des écosystèmes. La Commission européenne vise ainsi à développer une compréhension partagée, tant par les scientifiques que par les gouvernements, les industriels et les individus, de ce qui est écologiquement durable. Les acteurs seront donc, à terme, invités à partager des informations précises sur l’impact environnemental de leur activité – ou obligés de le faire – s’ils veulent bénéficier de financements. Un des défis sera de faire évoluer la taxonomie dans le temps. Elle devra, par exemple, tenir compte de l’émergence de technologies vertes, mais aussi de l’état de connaissance des impacts. S’il s’annonce complexe à mettre en œuvre, un tel outil devrait cependant contribuer à mieux nous engager vers une économie plus durable.

au cœur de nos évaluations. » À l’heure où la banque travaille à l’établissement de son plan stratégique, voyant par ailleurs les nouvelles réglementations en la matière approcher, il lui a semblé opportun de s’engager pleinement dans cette direction sans attendre. « Aujourd’hui, nous espérons que beaucoup d’autres acteurs vont nous suivre dans cette voie », invite Rudi Belli. Le chemin vers une banque plus durable est encore long et impliquera d’importantes adaptations stratégiques des acteurs du secteur. Cependant, la direction est aujourd’hui donnée. Et les acteurs luxembourgeois de la banque ont déjà pu démontrer, à maintes reprises, qu’ils étaient en mesure de s’adapter rapidement pour tirer avantage des évolutions en cours.  Q.D.


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PUBLIREPORTAGE

LE PPA 100% VERT Un modèle d’approvisionnement en énergie renouvelable sur mesure pour les entreprises. CLAUDE SIMON – HEAD OF ENERGY SALES LUXEMBOURG ANOUK HILGER – HEAD OF RENEWABLE ENERGIES LUXEMBOURG

Une des clés de la transition énergétique et du développement durable est l’augmentation de la part d’énergies renouvelables aux niveaux national et européen. Quelles sont les initiatives d’Enovos dans le cadre de cette transition énergétique ? Anouk Hilger : En tant que principal fournisseur d’électricité et de gaz naturel, il est primordial pour Enovos de contribuer activement à cette transition. C’est pourquoi nous nous engageons pour l’efficacité énergétique sous toutes ses formes et pour le développement des énergies renouvelables. Au niveau national par exemple, notre département déploie actuellement de nombreux projets photovoltaïques avec des partenaires locaux pour augmenter la quote-part d’énergie renouvelable produite au Grand-Duché. La demande en énergies renouvelables est croissante. Comment les entreprises peuvent-elles en profiter ? Claude Simon : L’approvisionnement continu en énergies renouvelables n’est pas toujours une évidence pour les entreprises, notamment pour celles qui consomment beaucoup, comme dans l’industrie par exemple. C’est pourquoi Enovos développe actuellement de nouveaux modèles d’approvisionnement sous forme de Power Purchase Agreements (PPA) à partir de sources de production renouvelables. Cet instrument relativement récent permet d’intégrer encore mieux les énergies renouvelables dans les marchés de l’énergie et de répondre à la demande en alliant les sources planifiables (hydro) et volatiles (comme l’énergie éolienne ou photovoltaïque).

Quels sont les avantages de ce type de contrat pour les entreprises ? C.S. : Le modèle PPA garantit la fourniture directe en énergie depuis des centrales de production contractuellement définies. Il permet au client de bénéficier, selon ses besoins et habitudes de consommation, d’une durée et de prix fixes avec une sécurité d’approvisionnement continu et à 100 % en énergie renouvelable et de renforcer ainsi son engagement RSE en réduisant son empreinte carbone. Nous avons la chance d’avoir pu mettre en place plusieurs PPA de grande envergure en Allemagne avec nos experts d’Enovos Deutschland et souhaitons promouvoir ce modèle encore davantage au Grand-Duché. Le succès de ce modèle dans le cadre de la fourniture en énergie verte du réseau Chargy pour les années à venir témoigne du fort potentiel de ce type de contrat. Cela a-t-il d’autres répercussions ? A.H. : L’essor des PPA d’origine renouvelable crée une forte dynamique autour de l’urgence de changer les sources d’approvisionnement électrique et permet d’augmenter fortement le nombre d’installations de production d’électricité à base de technologies vertes. Sans ce modèle d’approvisionnement, ces nouvelles centrales n’auraient pas encore vu le jour. Ainsi, les PPA garantissent la production d’une énergie durable tout en répondant aux besoins de consommation des entreprises.

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LUXEMBOURG ENERGY PROVIDER


EN COUVERTURE INITIATIVE

L’accélérateur de consciences Créé en 2017 afin de soutenir le financement de la lutte contre le changement climatique, l’International Climate Finance Accelerator accompagne le lancement de fonds d’investissement à impact positif pour l’environnement. Après un an et demi d’activité, les premiers projets se concrétisent et les candidatures se multiplient. luxembourgeois et la Banque européenne d’investissement (Luxembourg-EIB ­Climate Finance Platform), la création d’un label nement, du Climat et du Développement LuxFlag dédié ainsi que du Luxembourg durable, l’International Climate Finance Green Exchange, l’accélérateur est la 4e Accelerator (ICFA) est le fruit des discussions initiative menée dans ce contexte. Elle doit menées dès 2015 dans le cadre de la Climate permettre de mettre en valeur les compéFinance Task Force, dont le but était de pro- tences et l’expertise présentes à Luxembourg mouvoir des idées innovatrices et des alliances en matière de véhicules d’investissement à stratégiques en matière de financement de la impact environnemental et social, et de dévelutte contre le changement climatique. « L’idée lopper et financer des projets innovateurs était de créer un accélérateur afin d’aider les à impact élevé et mesurable en termes de gestionnaires dans la phase de lancement mitigation ou d’adaptation pour faire face de nouveaux fonds à impact positif pour aux effets du changement climatique, et ce ­l’environnement, confie Lennart Duschin- à la fois dans les pays développés et dans les ger, ­agent de l’ICFA. Mettre en place de tels pays en développement. fonds exige du temps, de l’argent et beaucoup En mai 2018, les quatre premiers candidats d’énergie. Il faut notamment compter un an retenus étaient présentés lors du Luxembourg et demi à deux ans pour voir un tel projet se Sustainable Finance Forum. L’un d’entre eux, concrétiser. Mais aujourd’hui, nous com- Empower New Energy, société d’investissemençons à ressentir les premiers résultats ment offrant des solutions de financement de notre action. » d’énergie propre dans les pays en développement, vient de ­clôturer une première levée de PREMIÈRE LEVÉE DE FONDS RÉUSSIE fonds pour un montant de 8 millions d’euros. Après la mise en place d’une plate-forme Les ­premiers investissements sont lancés au d’investissement entre le gouvernement Kenya et au Rwanda. L’équipe prévoit une 30 —

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­ euxième clôture mi-2020 pour 50 millions, d et une autre en 2021 pour 150 millions. U ­ beris Capital, dont l’action se concentre sur des projets à fort impact en Asie du Sud-Est, clôturera, elle aussi, un premier tour de table d’ici la fin de l’année. « En parallèle, The Lightsmith Group, société d’investissement spécialisée dans les technologies environnementales qui a reçu le titre d ­ ’ambassadeur ICFA en 2018, profite du soutien de la Luxembourg-EIB ­Climate Finance Platform, autre initiative en faveur de la finance verte », poursuit ­Lennart Duschinger. The Lightsmith Group recevra prochainement un investissement de 30 millions, dont 5 millions provenant de l’État luxembourgeois et 25 millions de la BEI, à la condition de réunir 30 autres ­millions en provenance de portefeuilles privés. « Un objectif sur le point d’être atteint », rassure notre consultant.

TOUJOURS PLUS DE CANDIDATS

En juin 2019, une nouvelle cohorte de quatre nouveaux projets a été retenue pour rejoindre l’ICFA parmi 32 manifestations d’intérêts. « Ces nouveaux projets en sont à des stades

PHOTO ICFA

portée par neuf entités privées du secteur financier ainsi que par le ministère Idesnitiative Finances et le ministère de l’Environ­


différents. Add Value, dont le but est d’investir dans les cultures et techniques agricoles afin de permettre aux petits exploitants d’Amérique latine de mieux s’adapter au changement climatique, mène actuellement des recherches sur le terrain afin de définir sa stratégie d’investissement et de déterminer les indicateurs-clés pour mesurer l’impact de leurs investissements », raconte Lennart Duschinger. Le plus avancé est Spark+ Africa, fonds d’investissement à impact créé par Sima et la Clean Cooking Alliance, la principale organisation faîtière qui s’emploie à mettre en place une industrie de la cuisson propre et inclusive à grande échelle. Il a obtenu le soutien de la Banque africaine de développement et devrait concrétiser son action au début de l’année prochaine. « Ce Fonds veut faciliter l’accès aux solutions énergétiques de cuisson propres et efficaces pour les communautés rurales, périurbaines et urbaines en Afrique subsaharienne », détaille l’agent de l’ICFA. Maintenant que les premiers résultats concrets font leur apparition, une 3e cohorte de candidats sera dévoilée d’ici la fin de l’année par l’ICFA. « Notre volonté est de sélectionner deux cohortes par an, composées de quatre à cinq gestionnaires de fonds sélectionnés par notre comité indépendant, sur base de la qualité des profils. Un effort particulier est également mené pour assurer une représentation équitable des différentes stratégies ainsi que des pays et régions dans lesquels les projets des gestionnaires contribueront à la lutte contre le réchauffement climatique », précise Lennart Duschinger.

UNE AIDE FINANCIÈRE APPRÉCIABLE

Destiné à créer les structures nécessaires qui appuient le financement climatique, l’International Climate Finance Accelerator offre son support à des gestionnaires de fonds d’investissement, naissants et innovateurs, qui souhaitent investir dans des projets efficaces avec un impact mesurable dans la lutte contre le changement climatique. « Chaque candidat sélectionné reçoit un préfinancement sous forme d’une enveloppe de 80.000 euros afin de procéder au lancement du fonds. Il est libre d’utiliser cette somme auprès de nos partenaires privés pour tout ce qui concerne la mise en place du fonds, que ce soit du point de vue juridique, de la compliance, du risk management, de l’évaluation de l’impact ou de la gestion proprement dite, etc. », précise Lennart Duschinger. Les candidats ont ensuite accès à un ­crédit de 200.000 euros, accordé en partenariat avec la BCEE et entièrement garanti par l’État. « Ce prêt est dédié à couvrir le ­working capital, les salaires de l’équipe, les loyers, les voyages… L’un des principaux freins à

« Nous sommes convaincus que les fonds d’impact sont l’avenir de la finance. » Lennart Duschinger Consultant, International Climate Finance Accelerator

la mise en place de tels fonds reste en effet ­l’accès au financement, témoigne le consultant de l’ICFA. Or, dans la phase de lancement, qui peut durer entre 18 et 24 mois, il faut de l’argent pour construire des bases solides et partir à la recherche des investisseurs. » Au-delà de cette manne financière, l’accélérateur aide les gestionnaires sélectionnés à trouver un coach, qui va les accompagner à toutes les étapes de leur projet. « Il peut s’agir d’avocats spécialisés en finance durable ou d’experts en fonds d’investissement, des personnes qui comprennent le secteur et qui sont prêtes à consacrer du temps pour aider chaque fonds à se développer. Nous mettons également des bureaux à la disposition des gestionnaires, de façon gratuite. Ils peuvent y rencontrer partenaires et potentiels investisseurs. » Un workshop organisé sur cinq jours permet également aux gestionnaires de se familiariser aux différentes thématiques qu’ils seront amenés à gérer dans le futur. « Cette formation, donnée par nos différents partenaires privés, est d’une aide précieuse pour les gestionnaires. Nous abordons ­différentes questions, comme la mise en place d’une stratégie d’investissement d’impact, du début à la fin du projet, ou encore la définition de l’impact souhaité, dans toutes ses dimensions », ajoute Lennart Duschinger. L’ICFA et ses conseillers apportent par ailleurs leur support dans l’étape cruciale de la collecte des fonds.

nus par l’ICFA – des candidats qui viennent d’horizons différents et doivent convaincre de l’impact de leur projet sur l’environnement tout en assurant une rentabilité aux personnes prêtes à les suivre. « Les gestionnaires qui nous envoient leur candidature, toujours plus nombreux au fil des mois, ont des profils très variés. Certains ont travaillé dans le secteur bancaire et veulent changer leur façon d’investir, témoigne Lennart Duschinger. D’autres sont des scientifiques, des ingénieurs, des gens qui ont travaillé dans l’industrie, qui détiennent un savoirfaire et cherchent un partenaire pour monter un fonds. Nous sommes très attachés à cette notion d’impact. Avant que le fonds ne soit en place, nos gestionnaires savent quel résultat ils veulent atteindre dans le pays ou la région visé(e), le nombre d’emplois qu’ils vont créer, les émissions de CO2 qu’ils réduisent, etc. » Dans tous les cas, derrière ces fonds d’investissement se cachent de belles histoires, vécues sur le terrain, au plus près des Hommes et de leur quotidien. Surtout, ces solutions alternatives sont aujourd’hui absolument nécessaires. « Nous devons trouver, tous ensemble, 100 milliards par an pour financer la transition énergétique afin de créer une économie à faible émission de carbone. Des initiatives voient le jour, mais on est loin de cet objectif. Nous sommes toutefois convaincus que les fonds d’impact sont l’avenir de la finance. La conscience écologique des nouvelles générations est bien plus développée que celle de IMPACTER L’AVENIR nos parents. Le monde financier va devoir DES FONDS D’INVESTISSEMENT s’adapter et l’ICFA, initiative innovatrice Trouver des investisseurs, voilà bien le prin- et unique au monde, fait les premiers pas cipal défi que se lancent les candidats rete- dans ce sens. »  M.P. Décembre 2019 — Green economy —

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EN COUVERTURE EUROPE

la BEI joue la carte du climat Fortement engagée depuis plusieurs années, la Banque européenne d’investissement souhaite intensifier ses efforts en matière de transition énergétique et de lutte contre le réchauffement climatique, d’ici à 2030. Premier objectif dès l’an prochain : mettre fin aux projets liés aux énergies fossiles. ici à 2030, la Banque européenne d’inD’ vestissement entend investir 1.100 milliards de dollars en faveur de la lutte contre

financement avec les objectifs de l’accord de Paris sur le c­ limat. Pour atteindre ce but, la BEI propose que la moitié de ses investissements le changement climatique. L’ambitieux pro- soit d­ irigée vers des projets liés au changement jet a été annoncé par son président Werner climatique et à l’environnement durable d’ici Hoyer fin septembre à New York : « Nous avons à 2025. L’an passé, cette proportion était légè­l’intention d’intensifier nos ambitions et de rement inférieure à 30 %, alors que les s­ tatuts renforcer le rôle de la BEI en tant que banque de la banque fixent un minimum de 25 %. de l’Union européenne dédiée au climat. » Le bailleur de fonds de l’Union, basé au Pour mener à bien ce projet, le bailleur Luxembourg, investira lui-même environ de fonds de l’Union européenne s’est ainsi 30 milliards d’euros par an dans la transition écologique, contre 17 milliards en 2018. La différence, environ 70 milliards par an, doit être apportée par d’autres investisseurs, publics ou privés.

« Nous allons positionner la BEI comme un incubateur pour la finance et l’expertise climatique. »

VERS LA FIN DES ÉNERGIES FOSSILES

La banque est engagée pour le climat depuis de nombreuses années. En 2017, elle a notamment lancé la plate-forme de financement climatique Luxembourg-BEI, en étroite collaboration avec le gouvernement. Les investissements soutenus sont centrés sur des projets à impact majeur sur le climat dans les pays en développement et au sein de l’Union européenne. Malgré ces actions, la BEI est régulièrement pointée du doigt par les ONG environnemenWerner Hoyer tales. Celles-ci dénoncent notamment ses invesPrésident, BEI tissements dans les énergies fossiles allant à l’encontre de ses engagements pour le climat. fixé des objectifs dont la première échéance est Des accusations qui pourraient bientôt ne dans à peine un an. D’ici la fin de l’année 2020, plus être d’actualité. Début septembre, la BEI la banque installée au Luxembourg souhaite a en effet organisé les premiers débats de sa en effet aligner l’ensemble de ses activités de future politique de prêt dans le secteur de 32 —

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l’énergie. En ressort sa volonté de renforcer sa contribution dans la décarbonation, l’efficacité énergétique et l’innovation. Elle s’est également engagée à délaisser progressivement les projets de production d’énergie reposant sur les seuls combustibles fossiles jusqu’à mettre fin, d’ici 2020, à tous les investissements dans les nouveaux projets liés à ces énergies.

UN INCUBATEUR DE L’EXPERTISE CLIMATIQUE

Et ses ambitions ne s’arrêtent pas là. Le grand créancier souhaite asseoir son autorité en la matière : « Nous allons positionner la BEI comme un incubateur pour la finance et l­ ’expertise climatique afin d­ ’aider nos sociétés et économies à se transformer, pour un ­avenir sans ­carbone », explique Werner Hoyer. Preuve de cet engagement sans précédent : le 24 octobre dernier, lors de la conférence Our Ocean à Oslo, la BEI a notamment lancé sa stratégie pour des océans durables (Blue SOS) qui vise à rendre les océans plus sains, à aménager des littoraux plus résistants et résilients et à renforcer la durabilité des activités liées aux océans. En tant que banque de l’UE, la BEI s’engage à plus que doubler ses prêts aux projets ayant trait aux océans durables pour porter l’enveloppe globale à 2,5 milliards d’euros au cours des cinq prochaines années. Ce financement devrait mobiliser au moins 5 milliards d­ ’euros d’investissements en faveur de l’économie bleue durable.  A. -S. B. & M. P.


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ANTI-GASPI

Pour répondre aux défis sociétaux, économiques et environnementaux actuels et futurs, le Luxembourg mise fortement sur le développement de l’économie circulaire. Si de telles ambitions sont louables, d’aucuns se demandent si elles sont bien réalistes et pertinentes. Décryptage. 34 —

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ILLUSTRATION Ellen Withersova

Vers une économie qui tourne rond


epuis plusieurs années, le Luxembourg D s’attache à évoluer vers un modèle économique plus circulaire. En 2014 déjà, le

ministère de l’Économie menait une étude portant sur les opportunités de son déploiement dans le pays. « Le potentiel de l’économie circulaire au Luxembourg est jugé substantiel pour accroître davantage la compétitivité [des entreprises], développer l’emploi, réduire les coûts et améliorer l’incidence des impacts environnementaux, déclarait Francine Closener, alors secrétaire d’État à l’Économie. D’après les auteurs de l’étude, l’implémentation rigoureuse de l’économie circulaire générera à moyen terme des économies entre 300 millions et un milliard d’euros par an en coûts d’approvisionnement pour les entreprises luxembourgeoises. Un modèle circulaire à grande échelle pourrait créer plus de 2.200 emplois dans les prochaines années. » L’étude stratégique autour de la troisième révolution industrielle, dont les résultats avaient été présentés fin 2016, place également l’économie circulaire au centre du développement futur du pays, en faisant un pilier transversal dans tous les secteurs : énergie, alimentation, mobilité, construction, industrie et finance. Depuis, plusieurs initiatives ont été menées sur le territoire grand-ducal pour encourager cette transition, à la fois par le gouvernement, les entreprises, des associations, ou encore la société civile. On peut notamment citer le Benu Village à Esch-sur-Alzette, le Circular Hotspot à Wiltz, le projet urbain Neischmelz à D ­ udelange, ou encore le programme Fit 4 Circularity (voir encadré p.36). Des projets pilotes ont été menés dans différents secteurs, des groupes de travail se sont constitués pour échanger autour des possibilités offertes par ce nouveau système économique. Plusieurs sociétés se sont aussi engagées dans cette voie, telles que l’entreprise de construction Astron, Kronospan – active dans l’industrie du bois – ou encore la menuiserie Bamolux.

FORMER UNE BOUCLE

Ces derniers mois, la volonté du Grand-Duché de déployer encore plus largement l’économie circulaire s’est renforcée. « L’accord de coalition pour la période 2018-2023 contient en effet 27 points relatifs à l’économie circulaire dans des domaines aussi divers et variés que l’agriculture, le développement durable, l’économie, la fiscalité, le logement et les travaux publics, souligne Hoai Thu Nguyen Doan, attachée aux Affaires économiques à la Chambre de commerce. À travers cet accord, le Luxembourg vise à atteindre un modèle économique plus circulaire et plus durable. » Actuellement, l’économie luxembourgeoise fonctionne selon un modèle linéaire, caractérisé par le principe « extraire – fabriquer – consommer – jeter ». Comme l’explique Hoai

Thu Nguyen Doan, « les entreprises récoltent et extraient les matières premières utiles à la fabrication de leurs produits. Ceux-ci sont ensuite vendus aux consommateurs, qui les utilisent et puis les jettent quand ils n’en ont plus besoin ou ne fonctionnent plus ». Et la chaîne recommence, de manière à pouvoir satisfaire à nouveau nos besoins. L’économie circulaire, elle, s’attache à fonctionner, comme son nom l’indique, en boucle. Dans cette optique, rien n’est jeté définitivement. Chaque élément est recyclé, réutilisé, réparé, réinjecté dans la chaîne de valeur, une fois arrivé en fin de vie. La fondation britannique Ellen MacArthur définit ainsi ce modèle comme « un cycle de développement positif continu, qui préserve et développe le capital naturel, optimise le rendement des ressources et minimise les risques systémiques par la gestion des stocks et des flux de ressources ».

d’une croissance extensive. « Pour créer plus de richesses, il faut sans arrêt alimenter une machine insatiable, avec toujours plus d’emplois et plus de ressources, explique Hoai Thu Nguyen Doan. Les données du think tank écologique américain Global Footprint Network démontrent d’ailleurs que, si la population mondiale s’alignait sur le mode de vie luxembourgeois, il faudrait huit planètes pour subvenir à ses besoins... Un tel modèle est insoutenable à long terme, car il génère des défis non négligeables en termes ­d’infrastructures, de logement, de mobilité et de cohésion sociale. » Au-delà de ces préoccupations, « ce modèle génère d’autres externalités négatives, telles que la production exponentielle de déchets, dont on ne sait que faire, et une empreinte écologique écrasante qui, entre autres, menace la biodiversité, entrave le renouvellement des ressources naturelles et provoque des dérèglements

A-T-ON ENCORE LE CHOIX ?

Une telle transition vers une économie circulaire est-elle toutefois réaliste ? « On est en droit de se poser cette question, effectivement, reconnaît Romain Poulles, véritable ambassadeur de l’économie circulaire au Luxembourg. Mais il faut surtout se demander si le système linéaire dans lequel nous évoluons aujourd’hui est encore durable… La réponse est clairement ‘non’. Extraire des ressources comme nous le faisons n’est plus possible. D’une part, parce que ces matières premières s’épuisent à grande vitesse et que notre modèle actuel n’est pas pensé pour pouvoir les réutiliser suffisamment. D’autre part, parce que ces ressources sont inégalement réparties dans le monde, que tout le monde se les arrache, et que leur approvisionnement est donc compromis. » En 2017, la Commission européenne a ainsi identifié 27 matières premières critiques, à savoir des matières premières qui présentent « un risque élevé de pénurie d’approvisionnement et une grande importance économique, auxquelles l’accès fiable et sans entraves constitue un enjeu pour l’industrie européenne et les chaînes de valeur ». Le phosphate naturel, par exemple, intensivement utilisé dans l’agriculture en est une. Le caoutchouc naturel aussi, utilisé notamment dans le monde médical, de même que le silicium, qui entre en compte dans la fabrication de cellules solaires photovoltaïques. Parallèlement, d’autres ressources naturelles s’épuisent à grande vitesse. Si l’on tient compte de la consommation mondiale actuelle de ces produits, on estime que les réserves d’or, zinc, plomb, cuivre, pétrole, ou encore gaz naturel seront vides d’ici, au maximum, une cinquantaine d’années. Au Luxembourg, le modèle de croissance actuel et la hausse du PIB sont dépendants

UNE ENTREPRISE ZÉRO DÉCHET, VRAIMENT ? En septembre 2018, IMS lançait le manifeste Zero Single-Use Plastic. Un an plus tard, 67 entreprises luxembourgeoises, de tous secteurs et de toutes tailles, ont rejoint le mouvement, et se sont ainsi engagées à supprimer les plastiques à usage unique de leur société : gobelets, assiettes, pailles, bouteilles, emballages, etc. « Il s’agit d’une mesure assez ambitieuse, confie Nancy ­Thomas, directrice d’IMS. Cela représente en effet 145 tonnes de plastique éliminées chaque année. » Supprimer tous les déchets en entreprise, est-ce toutefois envisageable ? « C’est un objectif extrême, concède Nancy Thomas. Même les ménages engagés dans cette démarche produisent quelques kilos de déchets. À l’échelle d’une entreprise, et dans le contexte de notre système économique actuel, cela me semble donc très difficile d’y arriver. Toutefois, chaque geste, chaque avancée, compte. Il peut être très facile, en réalisant simplement un état des lieux de ses déchets en entreprise, de voir ce qui peut être éliminé, et ainsi d’avoir un impact considérable sur la réduction de son empreinte écologique. »

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ANTI-GASPI ­climatiques », ajoute Hoai Thu Nguyen Doan. Sans changement de notre système économique, résoudre les problèmes auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés, tels que les conflits géopolitiques ou la crise écologique, apparaît plus que compromis.

passer des mots à l’action. L’économie circulaire implique avant tout un changement total de vision et de paradigme. L’ensemble de la chaîne de valeur, du système dans lequel un produit évolue, doit désormais être pris en compte. Pour ce faire, il convient dans un premier UN CERCLE VERTUEUX temps de repenser la conception de chaque Pour répondre à ces problématiques, le produit. « Si l’on veut pouvoir recycler à quaLuxembourg cherche à évoluer vers un lité égale les matières premières utilisées modèle plus résilient et efficace, « au sein dans le cadre de la fabrication d’un produquel chaque cycle de production, au lieu duit, les revaloriser, et ainsi les réintroduire de générer des externalités négatives, entre- dans le cycle de production, les produits et tiendra un cercle vertueux dans lequel les les matières doivent pouvoir être facilement sous-produits d’une activité ne seront plus désassemblés et réassemblés, mentionne considérés comme des déchets, mais plu- Gérard Zoller, CEO des Peintures Robin, une tôt comme des ressources pour une autre entreprise impliquée dans l’économie circuactivité », indique Hoai Thu Nguyen Doan. laire, qui a développé une peinture entièreAux yeux de l’économiste, cette ambition est ment biosourcée. Il faut parvenir à intégrer, réaliste. « La petite taille du Luxembourg dès la conception du produit, l’idée de pounous confère une réactivité et une flexibilité voir le réparer et le démonter. » certaines. Le Grand-Duché bénéficie d’un Aujourd’hui, beaucoup de produits ne gouvernement réactif, d’une bonne volonté peuvent en effet pas être recyclés, ou en tout citoyenne, ainsi que d’une taille idéale pour cas pas entièrement, car ils comportent des faire du pays un puissant banc d’essai pour alliages ou parce qu’on ne sait tout simplement la circularité. Il existe un potentiel national pas exactement ce qu’ils contiennent. « Dans considérable pour appliquer les principes un modèle circulaire, on pourrait imaginer circulaires afin d’impacter positivement créer une base de données indépendante et l’économie, l’emploi et l’environnement. » sécurisée, dans laquelle chaque entreprise Les opportunités offertes par l’économie déposerait tous les composants de ses procirculaire sont en effet nombreuses. Souvent duits, et ce afin de pouvoir réexploiter ces présentée comme un modèle économique matières premières une fois le produit [arrivé] respectant l’environnement, il ne s’agit pas en fin de vie », préconise Gérard Zoller. là de son seul bénéfice. Bien sûr, le modèle permet de pérenniser et sécuriser l’apport DES SERVICES, ET PLUS DES PRODUITS des matières premières. Mais pas seulement. Parallèlement, le système économique entier « Dans le modèle circulaire, on cherche à avoir doit être repensé, dans une logique de Prodes impacts positifs dans tous les secteurs, duct as a Service. L’idée est de vendre non et ce en plaçant l’Homme, son bien-être, plus un produit, mais un service. « Je prends ­l’environnement et l’économie au cœur de souvent l’exemple d’une fenêtre pour illusla réflexion », précise Romain Poulles. Ainsi, trer cette idée, commente Romain Poulles. selon l’Institut de l’économie circulaire, ce Un châssis renferme un gaz rare, de l’argon modèle « concrétise l’objectif de passer d’un ou du krypton, qui lui confère son pouvoir modèle de réduction d’impact à un modèle de isolant. Au fur et à mesure du temps, ce gaz création de valeur, positif sur un plan social, s’échappe, car les joints qui le contiennent économique et environnemental ». Pour Sarah ne sont pas parfaitement étanches. Petit à Mellouet, économiste au sein de la Fonda- petit, la fenêtre perd donc son pouvoir isotion Idea, spécialiste des nouveaux modèles lant, et nous devons la remplacer. Dans une économiques et de la RSE, « le développe- optique d’économie circulaire, il s’agit de ment de l’économie circulaire au Luxem- vendre une isolation performante, et non bourg constitue aussi un enjeu de nation plus une fenêtre, et ce en rendant ce joint branding, d’image du pays dans le monde parfaitement hermétique. De cette manière, d’aujourd’hui et de demain. Sur un marché le produit a une durée de vie plus longue, et de l’emploi de plus en plus tendu, la mise en le gaz rare ne doit plus être extrait. » place d’une économie circulaire peut en effet, Dans le même ordre d’idées, une start-up par exemple, constituer un atout charme française a créé une machine à laver durable. pour le marché du travail luxembourgeois. » Baptisée « L’Increvable », elle est conçue pour fonctionner durant plusieurs décennies. LA NÉCESSITÉ D’UNE PLUS L’accès aux différentes pièces est facilité, de GRANDE TRANSPARENCE manière à ce qu’elle puisse être réparée ou Si l’on comprend bien l’intérêt, la nécessité, améliorée au fil du temps. Des services en et même l’urgence de déployer des modèles ligne sont aussi proposés pour faciliter sa plus circulaires, encore faut-il savoir c­ omment maintenance. Bien connue au ­Luxembourg, 36 —

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FIT 4 CIRCULARITY : POUR ACCÉLÉRER LA TRANSITION Pour accompagner les PME dans leur transition vers une économie plus circulaire, le ministère de l’Économie, en collaboration avec Luxinnovation, développe depuis 2015 le programme Fit 4 Circularity. L’accompagnement peut se faire en deux temps. La première phase consiste en un audit du fonctionnement et des processus de production de l’entreprise. Il permet d’identifier les plus-values d’un modèle plus circulaire et de définir des axes de travail permettant d’évoluer dans ce sens. La seconde phase concerne la mise en application des pistes identifiées à travers un programme de recherche et le développement concret de mesures. À ce jour, Luxinnovation a soutenu une dizaine d’entreprises. Les motivations des chefs d’entre­ prise sont multiples : « Ils sont ­souvent convaincus par l’économie circulaire, se questionnent par rapport à l’approvisionnement des matières premières qui entrent en compte dans la fabrication de leurs produits, ils cherchent également de nouveaux relais de croissance, explique Charles-Albert Florentin, manager du Cluster Cleantech. La transition vers un modèle circulaire nécessite parfois d’opérer un changement stratégique important, c’est pourquoi nous réfléchissons actuellement à accroître la portée du programme pour toucher le plus grand nombre d’entreprises dans des secteurs-clés de l’industrie au Luxembourg. » Pour participer à Fit 4 Circularity, il faut être reconnu comme PME, c’est-à-dire employer moins de 50 personnes et disposer d’un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 10 millions d’euros. Courant 2020, le programme devrait néanmoins être élargi au secteur industriel.

car elle y possède son département de Recherche & Développement, la société française Tarkett, implantée dans plus de 100 pays, fait également figure de pionnière dans l’économie circulaire. En juin dernier, l’entreprise a ainsi inauguré une nouvelle ligne de production à Clervaux permettant de



ANTI-GASPI produire des revêtements de sol qui peuvent être recyclés à l’infini. Il ne s’agit pas là de quelques initiatives isolées. La logique du produit en tant que service est en effet déjà courante dans certains secteurs, comme celui de la musique. Qui, aujourd’hui, achète encore des CD ? ­Désormais, on n’achète plus l’objet, mais un service, tel que Spotify. Certains poids lourds de l’industrie se sont aussi lancés dans ces modèles, à l’image de Philips, qui propose un service baptisé « Light as a ­Service ». ­Plutôt que de vendre des ampoules, l’entreprise commercialise de la lumière. Concrètement, Philips se charge d’installer et d’entretenir les systèmes d’éclairage chez l’utilisateur. ­L’entreprise en reste propriétaire et les reprend une fois obsolètes ou arrivés en fin de contrat. Le client, lui, paie uniquement la quantité de lumière consommée.

DES BUSINESS MODELS À CONSTRUIRE

Mais comment parvenir à gagner sa vie dans un tel système ? « L’économie circulaire ne constitue pas une évolution de notre économie linéaire vers un modèle plus durable ou moins énergivore. Il s’agit plutôt d’une véritable rupture par rapport à notre fonctionnement actuel. Il faut donc parvenir à penser différemment, à sortir de cette logique du acheter – consommer – jeter, et réfléchir en termes de service, de partage, de performance, d’utilisation à long terme », recommande Romain Poulles. « La plupart des économies au niveau mondial évoluent dans des modèles de type linéaire, et ce depuis le 19e siècle. Les vieilles habitudes ont la vie dure. Il n’est donc pas simple d’effectuer un changement radical de mentalité dans les habitudes de consommation et de production », confie, elle aussi, Hoai Thu Nguyen Doan. Et c’est là, sans doute, que le modèle circulaire se heurte encore à un déploiement à grande échelle. « Les modèles circulaires font du sens, mais pas assez d’un point de vue financier. Toutes les entreprises n’y trouvent pas encore leur compte. Dès que cela sera le cas, la transition s’opérera », assure Romain Poulles. « Aujourd’hui, l’économie se porte très bien au Luxembourg, les modèles actuels rapportent de l’argent, et c’est tout ce qui importe aux entreprises. Elles ne voient donc pas la pertinence et l’intérêt d’un changement de modèle, analyse Gérard Zoller. Pour convaincre un entrepreneur d’évoluer vers un modèle c­ irculaire, il faut pouvoir lui présenter concrètement quelle en sera la valeur ajoutée. ‘Que va-t-on générer comme bénéfices ?’, ­‘Comment réalisera-t-on notre chiffre d’affaires ?’, ‘Quels seront les contrats à la clé ?’… Voilà les questions que se posent les dirigeants. » Or, pour l’heure, ces nouveaux business models ne sont pas encore assez clairs ni suf38 —

fisamment rodés. « L’économie de partage, par exemple, qui est très liée au concept circulaire, rencontre des problèmes de taxation, le repairing pose question quant au coût de la maind’œuvre », illustre le CEO de Peintures Robin. « Passer d’une économie linéaire à une économie circulaire, c’est comme changer les pièces d’une voiture en train de rouler. Les changements doivent s’opérer alors que la machine est en marche, d’où des complications d’ordre opérationnel », ajoute Hoai Thu Nguyen Doan.

UN CADRE LÉGAL À DÉFINIR

Parallèlement, le cadre légal n’est, lui non plus, pas encore suffisamment développé. « Même si les acteurs y travaillent, il n’existe par exemple actuellement pas de normes ­officielles, de certifications ISO qui permettent d’identifier de manière indépendante des produits ou services s’inscrivant dans une logique circulaire », regrette Gérard Zoller. Dans ce contexte, le rôle des autorités publiques apparaît essentiel. « La transition passera essentiellement par la législation, par la mise en place d ­ ’incitants ou de réglementations ­adéquates. Par ce biais, l’État peut en effet ordonner et précipiter le changement, affirme Sarah ­Mellouet. Lors du choix d’un prestataire, on pourrait par exemple imaginer que le prix ne soit pas seulement pris en compte, mais aussi sa démarche d’innovation, le respect de l’environnement, son engagement social. Il s’agirait d’une manière de donner un avantage compétitif à la circularité. » Le Luxembourg ne pourra toutefois pas agir seul dans cette voie. « La coopération au niveau international pour la mise en place de normes faciliterait la transition, souligne Hoai Thu Nguyen Doan. Au niveau de l’Union européenne, il existe déjà une volonté politique forte, qui se traduit notamment par la mise en place de budgets conséquents pour déployer l’économie circulaire, mais aussi par l’existence de nombreux dispositifs de support qui servent notamment à mesurer, financer, développer et encourager la transition vers une économie circulaire. L’Union a ainsi mis en place un plan d’action dont le but est de donner aux opérateurs économiques et à la société des signaux clairs sur la voie à suivre pour accélérer la transition européenne vers une économie circulaire, stimuler la compétitivité de l’UE au niveau mondial et promouvoir une croissance économique durable et génératrice d’emplois. »

­— Green economy­— Décembre 2019

DES HABITUDES À CHANGER

La transition vers une économie plus résiliente nécessite ainsi la bonne volonté de tous et le changement des habitudes de production, mais aussi de consommation. Dans une économie de marché, le choix du consommateur est en effet extrêmement

puissant, car il définit la demande, à laquelle va se façonner l’offre pour la satisfaire. À cet égard, les comportements et les attentes des consommateurs évoluent, eux aussi. « Dans certains secteurs, acheter un ­service est déjà tout à fait ancré dans les mœurs, constate Romain Poulles. Par exemple, on n’achète pas un avion pour se rendre dans un pays lointain, on paie un service de vol. Sur des produits très chers, la logique de service est déjà pleinement adoptée. Aujourd’hui, cette même logique est en train de se déployer et d’être ­adoptée pour des produits moins coûteux. »

IL EST TEMPS DE PRENDRE LE TRAIN

Si les défis concernant la mise en place de l’économie circulaire sont nombreux, elle apparaît néanmoins de plus en plus comme une évidence. « Ne pas le reconnaître, c’est être obtus ou prendre le risque de se faire ‘kodakiser’. C’est-à-dire prendre le risque, comme Kodak, d’avoir vu le changement arriver, d’y avoir trouvé des solutions, mais d’en avoir eu peur et, dès lors, de ne pas l’avoir mis en place… avant de se faire dépasser par d’autres acteurs qui ont su prendre le train en marche », met en garde Romain Poulles. Le modèle économique linéaire semble déjà s’essouffler au niveau mondial. Il se traduit par une atonie économique généralisée dans la plupart des puissances mondiales. L’OCDE prévoit ainsi que la croissance des pays du G20 sera plafonnée aux environs de 3 % dans les années à venir. « Nous sommes à un moment charnière, confie Hoai Thu Nguyen Doan. Les technologies relatives à l’économie circulaire sont encore en phase de développement. Selon la théorie de la diffusion de l’innovation de Roger, les précurseurs de l’adoption d’une innovation bénéficient d’un environnement favorable où il reste encore de larges parts de m ­ arché à prendre, tandis que ceux qui tardent à ­s’engager devront se confronter à un m ­ arché plus saturé. C’est donc le moment d’agir. Et d’agir vite, si l’on veut rafler le first-mover advantage et imposer ses nouvelles technologies en tant que norme. » Une telle démarche ne pourra se faire en un claquement de doigts. Le changement doit être progressif, mais radical, et impliquer tous les acteurs. « Notre société et notre économie doivent progressivement évoluer vers un modèle plus résilient, un modèle zéro déchet et zéro gaspillage, où les sous-produits des uns feront les ressources et le bonheur des autres, considère Hoai Thu Nguyen Doan. Quand nous en serons arrivés là, le nouveau modèle économique apparaîtra comme une évidence, et nous aurons sans doute du mal à faire comprendre aux enfants sur les bancs d’école pourquoi nous avons passé autant d’années à gaspiller des ressources rares et précieuses. »  J.R.


your legal, tax and business services firm in Luxembourg


CONVERSION

RSE, plus facile à dire qu’à faire ? De nombreuses entreprises luxembourgeoises ont, à des degrés divers, décidé d’investir du temps et des moyens dans une politique de responsabilité sociétale ambitieuse, en faveur de l’environnement, de l’être humain et de l’ensemble du tissu socio-économique local. Témoignages.

naux, de magazines et de déchets de bureau, sans blanchiment et sans colorant artificiel. « L’avantage est que cette serviette est compostable, dégradable à 90 %. Nous pouvons la mélanger aux autres déchets bio-organiques, inévitables dans notre activité, même si nous travaillons continuellement à leur réduction », explique notre interlocutrice. Nous sommes 40 —

efforts pour trouver des solutions alternatives efficaces. « Nous avons donc signé le manifeste de l’IMS et nous sommes engagés dans un vaste chantier de réduction des plastiques à usage unique. Quand on assure des prestations de services pour de nombreuses sociétés, le chantier est colossal. » Chez Sodexo, tout a commencé par la suppression des agitateurs, des pailles et des sachets en plastique. Depuis l’été 2019, ce sont les couverts qui ont disparu du catalogue. « Le plus important dans cette démarche est de ne pas remplacer un déchet par un autre. À nous de sensibiliser nos clients à ces enjeux durables et de travailler sur le terrain avec eux », résume la directrice Marketing et Communication. Pour réduire l’usage du plastique, certaines entreprises ont décidé de mettre de la vaisselle à disposition, d’offrir des tasses, à charge pour les collaborateurs de s’occuper du nettoyage. D’autres ont été plus loin et proposent un service de ramassage et d’entretien de la vaisselle. « Nous avons par exemple déployé 13.000 Ecobox sur nos DU RECYCLAGE À LA RÉDUCTION DES DÉCHETS sites de restauration. Ce système mis au point Afin d’aller plus loin dans leur engagement en par la SuperDrecksKëscht pour le compte du faveur de l’environnement, quelque 70 entre- ministère du Développement durable, et élaprises ont, à ce jour, signé le manifeste de boré en coopération avec l’Horesca, permet l’IMS, Zero Single-Use Plastic. Si l’objectif est d’emporter son repas. » simple – éliminer le plastique à usage unique Éliminer tout plastique à usage unique des entreprises d’ici la fin de l’année 2020 –, la de notre quotidien exige toutefois des gestes mise en œuvre exige par contre de nombreux forts et beaucoup d’éducation. « Il reste encore

­— Green economy­— Décembre 2019

PHOTO Patrick Galbats

ur la table de cette cafétéria, les serviettes S sont composées de fibre naturelle, 100 % recyclée. Elles sont produites à partir de jour-

au siège de Sodexo Luxembourg, et Laurence Graff est, en plus de son poste de directrice Marketing et Communication, en charge de la RSE de ce groupe connu du grand public pour ses services de restauration. « D’ici quelques semaines, je vais abandonner l’aspect marketing, pour consacrer davantage de temps aux questions de responsabilité sociétale », précise-t-elle. Pour en revenir à nos serviettes, elles sont envoyées avec les autres déchets de cuisine vers la station de biométhanisation d’Itzig, aux abords de la ville de Luxembourg. Les biodéchets organiques y sont convertis, par fermentation, principalement en biométhane qui sera directement injecté dans le réseau de gaz naturel. Le reste est utilisé comme engrais organique pour l’agriculture. « J’ai moi-même visité ce site pour m’assurer que nos déchets y étaient recyclés de la meilleure manière qui soit », ajoute Laurence Graff. Quand on s’engage en RSE, les belles paroles ne suffisent pas.


beaucoup de travail à mener. Nous testons les feuilles de papier kraft pour l’emballage des sandwiches, poursuit Laurence Graff. Nous cherchons encore des solutions pour le conditionnement des desserts. Nous discutons beaucoup avec nos fournisseurs, qui, pour la plupart, ont été pris de court. Nous n’avons pas voulu nous engager sur la voie des produits à base de plastiques biosourcés, pour la bonne raison qu’ils ne sont pas forcément biodégradables et qu’il n’existe pas de filière de tri et de valorisation dans nos régions. Il faut des conditions bien spécifiques de température pour que cette matière se décompose efficacement. » Reste encore la question des boissons. Beaucoup de sites sont passés au verre, mais dans la vente à emporter, cela reste difficile à mettre en place. Et le dernier combat concerne les emballages des produits industriels, comme les chips et les barres chocolatées. « Ne plus proposer de chocolat est un choix extrême, et, en Europe, nous ne disposons pas d’un pouvoir de lobbying suffisant pour faire changer les pratiques. »

LA RÉDUCTION DU GASPILLAGE ALIMENTAIRE

Afin de réduire plus globalement la production de déchets, Sodexo veut désormais lutter contre le gaspillage. Dès janvier 2020, sept sites pilotes vont tenter de diminuer la quantité de déchets alimentaires. « L’idée est d’instaurer un système de pesée, de la production jusqu’au retour du plateau. Sur base des données récoltées, nous pourrons émettre des recommandations pour diminuer le gaspillage. Ce système devrait permettre d’objectiver nos propositions et de discuter avec nos clients. » En matière de logistique, l’entreprise s’approvisionne, dans la mesure du possible, dans un rayon de 150 kilomètres, en veillant à la qualité des produits. Une partie des poulets servis dans les restaurants provient par exemple d’un éleveur luxembourgeois. « Le développement durable est une question qui nous occupe dans toutes nos démarches. Nous sommes une entreprise fortement décentralisée. Afin de livrer nos 60 à 70 sites de production, nous utilisons la plate-forme de distribution de notre fournisseur principal. Nous veillons à bien étudier nos commandes, pour éviter les livraisons journalières. Par ailleurs, nous disposons de sept véhicules électriques pour assurer les petites livraisons entre les sites. C’est notamment le cas dans le secteur scolaire, où toutes les écoles n’ont pas de cuisine. » Pour que les mentalités changent, et que de nouvelles pratiques s’installent, encore faut-il qu’elles soient acceptées et adoptées par les équipes, réparties à travers tout le pays. « Nous avons mis en place un groupe de travail interservice qui se rencontre réguliè-

« Le plus important dans cette démarche est de ne pas remplacer un déchet par un autre. » Laurence Graff Directrice Marketing, en charge de la RSE, Sodexo Luxembourg

rement, ajoute Laurence Graff. L’idée est de faire prendre conscience à chacun qu’il peut améliorer sa façon de travailler, en donnant les bons exemples. Il est important d’impliquer toutes les parties prenantes avant de déployer une nouvelle solution ou un nouveau processus. Nous avons par exemple fait le choix de ne plus acheter que des bananes 100 % fair trade. Bien sûr, on ne produit pas de bananes chez nous, mais il faut aussi rester raisonnable. Faire les bons choix n’implique pas de tout supprimer. Nous menons déjà beaucoup de projets. Nous proposons des plats végétariens dans nos restaurants, nous conscientisons au flexitarisme afin de réduire la consommation de viande. Nous travaillons sur les portions, les grammages. Nous formons nos chefs afin qu’ils proposent des alternatives, avec de vrais plats construits en tenant compte de leur apport nutritionnel. » Après, c’est au client de faire ses propres choix et de s’engager, ou non, vers des achats plus raisonnés et une consommation plus responsable.

COMMENT RECYCLER AUTANT DE PLASTIQUE ?

C’est à Capellen, dans les locaux de Victor Buck Services, que se poursuit notre voyage dans le petit monde des entreprises responsables. Ici aussi, la direction a tenu à signer le manifeste pour la suppression du plastique à usage unique, même si l’on est conscient que l’objectif sera difficile à atteindre dans un délai aussi court. « Notre volonté, en nous engageant de la sorte, est de faire un état des lieux. Dès 2014 ou 2015, nous avions supprimé les touillettes et les gobelets en plastique. Nous les avions remplacés par des tasses. À l’époque, nous avons tout de même dû faire face à de l’incompréhension, voire de la défiance. Depuis lors, nous avons appris à mieux communiquer, raconte Laure Rupp, responsable du service Achats et coordinatrice des actions RSE de l’entreprise, filiale du groupe Post. Nous avons organisé des formations sur des thèmes comme l’empreinte carbone, le cycle de vie des produits et des consommables. Le discours, s’il vient d’une personne externe, est souvent mieux accepté. » Avant de se lancer à corps perdu dans la suppression drastique de tous les déchets plastiques, Laure Rupp est allée à la rencontre des entreprises de collecte. « Si l’on veut aller

au bout de la démarche, il est primordial de comprendre comment sont ensuite traités ces déchets et pouvoir améliorer notre tri pour le recyclage. Certaines entreprises estiment que, parce qu’elles recyclent 100 % de leurs déchets plastiques, elles sont exemplaires. C’est effectivement un premier pas, mais il ne faut pas que cela devienne un prétexte pour se dédouaner de toute responsabilité, sinon on tombe rapidement dans le greenwashing. Aujourd’hui, il faut en être conscient, il n’y a pas assez d’usines en Europe pour traiter tous les déchets plastiques, et la Chine a totalement fermé ses frontières. Depuis qu’on veut supprimer le plastique partout, le papier carton l’a remplacé, et les usines de recyclage ne suivent pas… Dans notre société ‘drivée’ par les réseaux sociaux, les messages alarmistes se succèdent. Mais, malgré ce que l’on veut nous faire croire, les solutions miracles n’existent pas. Notre rôle est d’avancer dans cette cacophonie en essayant de trouver le meilleur chemin possible, tout en restant lucides. »

UNE SECONDE VIE POUR DES ORDINATEURS

Chez Victor Buck Services, une multitude de petites attentions contribuent à la politique RSE de l’entreprise, qui se vit au quotidien à travers des actes. « Tout d’abord, il faut faire attention à ne pas cantonner la RSE à une seule personne. C’est tout aussi important de pouvoir compter sur une direction qui vous donne les moyens d’agir et d’apporter des idées. Au sein de l’entreprise, nous avons mis en place un réseau d’ambassadeurs, mais rien n’est figé. Nous souhaitons en permanence ouvrir le dialogue, faire comprendre les enjeux, laisser la liberté à chacun de s’impliquer. Le mouvement appartient à tous. Il faut pouvoir expliquer ce que l’on fait, et, parfois, ce que l’on ne fait pas, et pour quelle raison. La RSE, ce n’est pas que la défense de l’environnement. C’est aussi l’être humain et le tissu socio-économique local. Si l’on veut être cohérent dans la démarche, il faut pouvoir allier ces trois aspects », poursuit Laure Rupp. Entreprise digitale, Victor Buck Services s’intéresse à l’économie circulaire. « Nous utilisons du matériel de dernière génération, et nous le changeons régulièrement afin de rester concurrentiels, explique Arnaud Wulgaert, le

Décembre 2019 — Green economy —

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CONVERSION directeur d’exploitation. Afin de ne pas jeter nos ordinateurs et nos écrans, nous avons cherché d’autres solutions. Dans le cadre du programme Digital Inclusion, via Caritas, nous avons par exemple donné des écrans de PC au Code Club, qui initie les enfants à l’informatique. Cela demande du temps de donner une seconde vie à ce matériel », mais la démarche RSE s’insinue bien plus loin encore. « Désormais, nous essayons de faire en sorte que tous les produits en développement ou commercialisés prennent en compte cette dimension RSE. » Société active dans le domaine des services informatiques, Victor Buck Services réfléchit depuis plusieurs années à l’impact de son activité sur l’environnement. « Dans le passé, nous utilisions notre propre infrastructure IT, avec notre propre data center. Voici six ou sept ans déjà, le premier grand chantier a été de virtualiser nos serveurs, une pratique peu connue à cette époque. Notre but est d’améliorer constamment notre bilan CO2. » Au-delà des machines, c’est aussi l’aspect humain qui intéresse Laure Rupp et sa direction. L’entreprise veille à donner leur chance à des profils seniors et offre à chacun la possibilité de se former pour progresser. Le seul critère est d’être compétent pour le poste à pourvoir.

DES E-MAILS TROP POLLUANTS

L’infobésité est le nouveau thème à apparaître sur le radar des entreprises en 2019. L’outil numérique, essentiel à nos activités, a déferlé dans le monde professionnel, offrant aux organisations une agilité sans précédent. Cependant, cette utilisation de plus en plus intense des moyens de communication digitaux renforce un phénomène : la surcharge informationnelle, avec des conséquences majeures sur le bien-être et la performance des salariés. « Nous allons organiser des journées sans e-mail, en interne, reprend Laure Rupp. Nous devons sensibiliser tout le monde à une meilleure utilisation de cet outil. Si l’on veut éviter une surchauffe des serveurs, avec l’impact que cela peut avoir sur l’environnement, il faut commencer par éliminer réguliè-

« La responsabilité sociétale est avant tout une question d’attitude plutôt que de labellisation . » Philippe Goossens Sales manager, Solar Screen International

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rement tous les e-mails inutiles de sa boîte. » À l’avenir, il s’agit de permettre aux organisations et salariés, grâce à l’acquisition de nouveaux savoirs et aptitudes, de mieux maîtriser l’impact du digital sur la vie professionnelle. Ceci afin d’améliorer bien-être au travail et temps productif.

QUAND LE SECTEUR AÉRIEN S’INTERROGE

Aujourd’hui, la RSE s’infiltre dans toutes les sociétés, quels que soient leur taille et leur champ d’activité. « En tant que leader mondial des systèmes de gestion du fret aérien, nous cherchons constamment l’amélioration des relations et processus pour nos clients, partenaires et employés, témoigne Arnaud Lambert, CEO de Champ Cargosystems SA. Au-delà des engagements environnementaux, la RSE devient également un outil de gouvernance stratégique. En tant qu’entreprise internationale, notre volonté est d’avoir une approche globale, mais d’agir à l’échelle locale pour préserver les générations présentes et futures. Elle est bâtie autour des 17 objectifs de développement durable des Nations unies, dont 15 ont un impact direct sur l’industrie aérienne. À court et moyen termes, nous voulons être force de valeurs pour l’industrie en supportant les initiatives RSE. » Exemple d’implication, Champ Cargosystems a décidé de sponsoriser pour cinq ans le programme de développement durable « Sustainability Award » de The International Air Cargo Association (TIACA), initiative qui regroupe tous les acteurs opérant dans la gestion du fret aérien : aéroports, agents de handling, compagnies aériennes, commissionnaires de transport, logisticiens… « Cet engagement va être important afin de créer un momentum au sein de notre industrie. Nous accélérons également la collaboration entre nos employés, nos clients et partenaires à travers des initiatives comme la Champ Academy et nos programmes d’innovation. À plus long terme, nous envisageons diverses mesures pour réduire notre impact, accélérer la transformation digitale et préparer les futures générations aux mutations de notre industrie. Nous voulons être un accélérateur d’une économie responsable. » Basées au Luxembourg, en Suisse, en Allemagne, en Angleterre, aux Philippines ou encore à Singapour, les équipes de l’entreprise se contactent régulièrement pour coordonner les activités. Elles partagent les initiatives locales et globales, notamment avec leurs clients et partenaires. « L’engagement personnel est vraiment très important pour avoir une bonne approche et un impact sur le quotidien. La principale difficulté est d’avoir une démarche structurée, sur base d’objectifs spécifiques. Dans ce sens, une politique RSE demande une implication très forte

­— Green economy­— Décembre 2019

QUEL LABEL CHOISIR ? Quand une entreprise s’engage dans une démarche RSE, elle cherche naturellement à le faire savoir. Pour prouver la réalité de cet engagement, il est bon de faire appel à des acteurs externes qui proposent des certifications diverses. Avec l’essor de la RSE, les structures qui adoptent cette approche se sont multipliées, et il est facile de se perdre dans la multitude des labels. Au Luxembourg, le label RSE, délivré par l’Institut national pour le développement durable et la responsabilité sociale des entreprises (INDR), est la référence en la matière. Il permet à toute entreprise, peu importe sa taille, de se lancer petit à petit dans une politique RSE et d’être reconnue, à terme, comme entreprise responsable. Les membres de l’IMS – Inspiring More Sustainability –, association qui réunit des entreprises luxembourgeoises engagées en matière de responsabilité sociétale, sont majoritairement signataires de la Charte de la diversité Lëtzebuerg (60 %). Viennent ensuite les certifications ISO 9001 et 14001 (33 %), le label ESR de l’INDR (32 %), les lignes directrices du Global Reporting Initiative (25 %), ou encore le Global Compact (22 %).

du management, il est donc capital d’avoir une approche top down. Ce n’est pas un effet de mode que nous recherchons, mais une approche plus résiliente dans notre culture d’entreprise et un impact sur notre industrie », conclut le CEO.

DES RUCHES DANS LE JARDIN

Dans cette autre entreprise basée à Foetz, le bureau du CEO, entièrement vitré, est situé juste à côté de la réception. Nous nous trouvons dans les locaux de Solar Screen International SA, leader européen de la distribution de films adhésifs pour vitrages, aux propriétés isolantes, été comme hiver. « Ce nouveau bâtiment, dont nous avons pris possession en 2018, se veut le reflet de notre ADN. Pour moi, le bien-être des employés est primordial. Mon bureau est à l’entrée et, sauf exception, la porte est ouverte en permanence », témoigne Nicolas De Ridder. Ce matin-là, dans la grande cafétéria, les premiers employés arrivent pour prendre leur service. Quelques-uns se retrouvent déjà autour du baby-foot. « Nous voulions un endroit confortable et convivial, glisse Philippe Goossens, sales manager pour le Luxembourg. Nous avons bien sûr équipé notre bâtiment de nos films de protection solaire afin de diminuer la consommation d’électricité et le recours à la climatisation.


ACTIONS POSITIVES EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ DES FEMMES ET DES HOMMES DANS LES ENTREPRISES DU SECTEUR PRIVÉ

PLACE AUX CHAMPION-NE-S DE L’ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES Six entreprises obtiennent le label 2019 « Actions positives » du Ministère de l’Égalité La ministre de l’Egalité Taina Bofferding a décerné le 13 novembre un label à six entreprises qui ont mis en œuvre avec succès leur plan d’action pour un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes au travail. Le programme «Actions positives» encourage les entreprises à analyser leurs pratiques. Ainsi, les lauréats ont sur base volontaire réalisé des actions qui favorisent : • l’égalité de traitement • l’égalité dans la prise de décision • l’égalité dans la conciliation entre vie professionnelle et vie privée Soutenir les bonnes pratiques pour la mixité, c’est se donner toutes les chances de réussite collective. « Ensemble, nous sommes plus forts. Ensemble, le ministère et les entreprises partenaires font vivre la valeur fondamentale de l’égalité entre femmes et hommes. La mixité est notre moteur et marque de fabrique. » Taina Bofferding

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Sébastien Respaut

Managing Director ATOS LUXEMBOURG PSF S.A.

Marie-Hélène Massard

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Managing Director BRINK’S

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Administrateur-délégué FOYER ASSURANCES S.A.

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Directeur Général ONET LUXEMBOURG


CONVERSION Nous avons également installé des ruches à l’extérieur du bâtiment. Nous produisons notre propre miel, un petit geste de plus pour la nature qui nous entoure. » Ici, chaque employé reçoit une tasse à son nom. « Nous travaillons beaucoup sur la question du tri des déchets. Nous sommes une société européenne, et nos collaborateurs témoignent de cette diversité. Quinze nationalités se côtoient ici. Chacune a sa propre culture en la matière. On ne trie pas de la même façon en France, en Belgique ou en Italie. On note parfois un peu de désinvolture, mais nous sommes déjà parvenus à réduire drastiquement le contenu de nos déchets résiduels », constate Philippe Goossens. Au sein de leur centre de formation qui reçoit des installateurs venus du monde entier, les équipes de Solar Screen veillent à conscientiser leurs partenaires sur l’importance de ce tri des déchets. « Nous menons de nombreuses actions, sans en faire la publicité. Nous sommes en train de travailler à l’obtention de la norme ISO 9001, nous sommes labellisés SuperDrecksKëscht, et nous avons signés la charte de l’IMS pour la suppression du plastique à usage unique. Toutefois, je pense que la responsabilité sociétale est avant tout une question d’attitude plutôt que de labellisation », confie Nicolas De Ridder. Les produits distribués par l’entreprise ont pour vocation d’éviter le gaspillage énergétique. « Nous nous devons de montrer l’exemple, précise Philippe Goossens. Nous commercialisons par exemple un film adhésif de rénovation intérieure qui permet d’habiller du mobilier en un temps record et à moindre coût. Nous pouvons ainsi rénover des chambres d’hôtel. Plutôt que de tout arracher, il suffit d’appliquer ce film pour redonner une seconde vie au mobilier usé. » Prochaine étape, l’entreprise a fait appel à une société externe afin de calculer l’empreinte carbone de l’ensemble de ses achats, qui proviennent du monde entier, par bateau ou par avion. « Pour compenser nos émissions de CO2, nous allons investir dans un projet de reforestation en Afrique », conclut Nicolas De Ridder.

« La RSE devient également un outil de gouvernance stratégique . » Arnaud Lambert CEO, Champ Cargosystems SA

participative avec l’ensemble de ses parties prenantes. « Notre secteur est connu comme étant un grand consommateur de matières premières. Il utilise beaucoup d’énergie et produit beaucoup de déchets. La question centrale est de savoir comment nous pouvons construire mieux, dans tous les domaines, en intégrant cette dimension de management durable, qui nous tient à cœur. Jusqu’à présent, notre secteur pèse négativement sur le changement climatique. Il faut prendre ce sujet à bras-le-corps et démontrer que des solutions positives et durables existent. En tant qu’institut de formation, nous nous devons d’être exemplaires. Nous avons un devoir de sensibilisation vis-à-vis de nos membres et des autorités publiques. C’est pourquoi l’IFSB a fait le choix de se baser sur la certification GRI, reconnue au niveau international. En tant que cadre de référence, cela nous oblige et nous motive à toujours plus nous améliorer dans tous les domaines visés par la RSE, et dans notre secteur en particulier. » Conscient du rôle central qu’il peut jouer dans l’éducation des acteurs, l’IFSB délivre des formations dans des domaines comme la sécurité et la santé, la gestion des déchets, le développement durable, en veillant à développer les compétences techniques de ses stagiaires. « Le développement durable fait partie de notre ADN. Il se traduit tant dans les formations que l’on donne que dans le management de la maison. Nous avons engagé une personne en charge de la coordination de toutes nos actions RSE. Les thématiques qui nous occupent sont nombreuses. Nous avons par exemple mis en place une grille LA CONSTRUCTION DURABLE, des salaires identique pour les hommes et les SOURCE D’EMPLOIS femmes. Cette grille est inscrite dans le foncNotre dernière étape nous conduit à Bet- tionnement de notre entreprise et contribue tembourg, au siège de l’Institut de formation à l’égalité des genres. » sectoriel du bâtiment (IFSB). « Notre société, et plus précisément le secteur de la construc- DES LÉGUMES SUR VOTRE TOIT tion, est en pleine mutation. Les défis sont non L’IFSB veille par ailleurs à sensibiliser l’enseulement techniques, technologiques, énergé- semble des professionnels de la constructiques, environnementaux, mais aussi socié- tion à l’importance de la sécurité sur les taux », explique Bruno Renders, directeur chantiers. « Pour 1 euro investi, parce qu’il de cet institut, qui reçoit quelque 5.500 sta- s’agit bien d’un investissement et non d’une giaires par an. À travers des actions concrètes contrainte ou d’une dépense, le retour est de et des services pertinents, l’IFSB participe 2,20 euros. Le développement durable va de activement à ces évolutions, en adoptant une pair avec l’amélioration continue de nos serdémarche RSE volontaire, transparente et vices et de nos formations. Notre secteur est

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­— Green economy­— Décembre 2019

à la recherche de nombreux profils, et nous connaissons les besoins. Nous évaluons les compétences de certaines personnes et nous mettons en place un plan de formation afin de leur permettre de trouver un job et de se réinsérer dans la vie active. Nous travaillons avec l’Adem sur le programme ‘Fit4 Green & Build Jobs’. » Chaque année, l’Institut travaille aussi à la valorisation des métiers de la construction auprès des jeunes. « Que ce soit au travers d’une journée découverte, de building games ou d’autres initiatives, nous leur montrons de façon très pratique les métiers de demain. Le secteur de la construction durable va continuer à engager. Il s’agit d’un investissement de longue haleine qui fait partie des missions de notre maison », explique Caroline Gontier, responsable du développement durable au sein de l’IFSB. Afin de toujours montrer l’exemple, l’entreprise a récemment installé une serre sur le toit de son bâtiment. « L’économie circulaire est un thème central dans notre secteur. Nous devons revoir notre façon de penser les bâtiments du futur, témoigne Bruno Renders. À l’avenir, nous n’aurons plus besoin de démolisseurs, mais de déconstructeurs. Un matériau innovant doit aujourd’hui avoir plusieurs fonctions. Un mur peut être isolant tout en produisant de l’énergie et en purifiant l’air. En plaçant une serre sur un toit, nous participons au projet européen Groof, pour ‘Greenhouse to Reduce CO2 on Roofs’. » C’est une approche novatrice intersectorielle visant à réduire les émissions de CO2 issues des secteurs de la construction et de l’agriculture en combinant le partage de l’énergie et la production locale d’aliments. « L’idée principale est d’utiliser les serres sur les toits comme un outil pour récupérer la chaleur produite et non consommée par le bâtiment de manière active grâce aux systèmes de ventilation et de chauffage, mais également, de manière passive, au travers de la production de végétaux alimentaires. Ensuite, nous récupérons les émissions de CO2 produites à la fois par l’activité humaine et par les activités du bâtiment, pour ‘nourrir’ les végétaux, et nous réduisons les émissions de CO2 générées par les transports en produisant des plantes localement. » Des solutions positives et durables pour un monde plus vert et plus humain.  M. P.


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ÉNERGIES RENOUVELABLES

L’éolien a le vent en poupe L’éolien est aujourd’hui le principal moteur du développement des énergies renouvelables. Une quarantaine de turbines devraient s’ajouter aux 64 déjà actives sur le territoire. Pour répondre aux objectifs environnementaux qui attendent le Luxembourg à l’horizon 2030, il faudra sans doute en développer 40 à 50 de plus dans les 10 prochaines années. omme beaucoup d’autres pays signaC taires des accords de Paris sur le climat, le Luxembourg doit contribuer au développement des énergies renouvelables sur son territoire. En la matière, les objectifs à atteindre par le Luxembourg d’ici 2030 n’ont pas encore été arrêtés. Toutefois, on peut se donner une bonne idée des enjeux en parcourant le projet de Plan climat et énergie présenté par le gouvernement. L’un d’eux est de faire évoluer la part des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale brute de 11 % en 2020 à au moins 23 % en 2030. Pour atteindre cet objectif, l’État entend développer la production d’énergie renouvelable localement. La poursuite du développement de l’éolien, à cet égard, doit permettre de répondre en bonne partie à ces objectifs.

UNE SOIXANTAINE D’ÉOLIENNES

Mais dans quelle mesure le vent souffle-t-il dans les pales des rotors au Luxembourg ? Et comment cette source d’énergie renouvelable va-t-elle être exploitée dans les années à venir ? « Aujourd’hui, le pays compte une soixantaine d’éoliennes, principalement réparties sur la moitié nord du territoire. Leur nombre devrait considérablement évoluer dans les 46 —

mois et années à venir pour contribuer à la production d’énergie renouvelable nationale », commente Paul Zeimet, administrateur délégué de la société Soler, qui opère déjà une quarantaine d’éoliennes au Luxembourg, représentant environ 75 % de la production annuelle moyenne de l’énergie éolienne. Créée en 2001, cette structure est une joint-venture de la Société Électrique de l’Our (SEO) et d’Enovos, sociétés dans lesquelles l’État détient une forte participation. « À l’époque, le rapprochement entre SEO et Enovos a été envisagé pour mieux soutenir le Luxembourg dans la réalisation de ses objectifs 2020 en matière de développement des énergies renouvelables, qu’il s’agisse de centrales éoliennes ou d’installations hydro-électriques, poursuit l’administrateur délégué. L’enjeu était que, d’ici l’année prochaine, 11 % des besoins énergétiques au niveau national proviennent de sources d’énergie renouvelable. »

lation (ILR), l’électricité renouvelable produite au Luxembourg, toutes sources confondues (éolienne, hydro-électrique, photovoltaïque, biogaz, etc.), s’élevait à 688 GWh. C’est une hausse de 14 % par rapport à l’année précédente. Pour la première fois, la part d’électricité locale renouvelable dans la consommation nationale dépassait la barre des 10 %. Or, c’est l’éolien qui représente la principale source d’énergie renouvelable dans la production nationale. C’est aussi celle qui a le plus progressé ces dernières années. Entre 2017 et 2018, sa production a évolué positivement, de 20 GWh à 255 GWh produits. Si l’on reprend les objectifs 2020 fixés par le gouvernement, il était prévu que la production éolienne annuelle atteigne 240 GWh. L’éolien aura donc fait sa part.

LA PRODUCTION DEVRAIT VITE DOUBLER

En 2018, avec ses 42 éoliennes, Soler produisait déjà 185 GWh d’électricité. « Avec notre production actuelle d’énergie éoPREMIÈRE SOURCE D’ÉNERGIE RENOUVELABLE lienne, nous pourvoyons à l’équivalent des On peut affirmer que ce premier objectif est besoins en électricité de 41.100 foyers de désormais à la portée du Luxembourg. En 2018, quatre personnes, ce qui représente plus selon les chiffres communiqués en octobre de 164.000 personnes, soit un quart de la dernier par l’Institut luxembourgeois de régu- population luxembourgeoise », poursuit

­— Green economy­— Décembre 2019


PHOTO Nader Ghavami

Paul Zeimet. Soler travaille actuellement sur une dizaine de projets éoliens supplémentaires sur le territoire luxembourgeois. « Si les démarches avancent bien, environ 40 nouvelles éoliennes de dernière génération devraient sortir de terre prochainement, dont une bonne partie avant 2021, assure Guy Uhres, responsable Énergies renouvelables au sein de SEO. La production annuelle estimée de ces nouvelles installations devrait approcher les 250 GWh, une nouvelle éolienne pouvant produire 8 GWh d’énergie par an. » La production d’énergie éolienne actuelle devrait donc rapidement doubler. Les objectifs 2020 étant atteints, ces investissements actuellement envisagés contribueront déjà à la réalisation de ceux qui orienteront la politique environnementale du Luxembourg jusqu’en 2030. « D’ores et déjà, il faut envisager d’autres projets au-delà de ceux à l’étude ou en cours de réalisation, assure Guy Uhres. Si on s’en tient aux objectifs actuellement discutés, c’est sans doute entre 45 et 50 éoliennes supplémentaires qu’il faudra développer dans les 10 prochaines années pour atteindre une production éolienne de plus de 600 GWh. »

UN NOMBRE D’ACTEURS LIMITÉ

En observant le marché luxembourgeois de l’éolien et en comparant ce qui se passe ici à la situation des pays voisins, on s’étonne tout de même de ne pas voir plus d’opérateurs investir le territoire. À côté de Soler, le Luxembourg

ne compte que quelques rares acteurs purement privés, comme Emca et Becolux, qui ont investi dans le parc Oekostroum Weiler et ses sept éoliennes. Or, chez nos voisins, les investisseurs et promoteurs s’arrachent les terrains des agriculteurs pour développer des projets. « En Belgique et en Allemagne, les autorités étatiques ont clairement défini des zones pouvant accueillir des projets éoliens et adopté une réglementation spécifique encadrant leur développement, précise Paul Zeimet. Cela a le mérite de clarifier beaucoup de choses pour les porteurs de projets. Au Luxembourg, aucun terrain n’a été préalablement reconnu comme pouvant accueillir ces installations. La première difficulté est donc d’identifier les parcs qui pourront accueillir des centrales éoliennes et, pour cela, mener de nombreuses études pour évaluer le potentiel, la faisabilité, les incidences environnementales du projet. » Tout cela prend déjà beaucoup de temps et implique de procéder à des investissements pour un résultat, au final, très incertain.

UN INVESTISSEMENT RENTABLE

Selon les dirigeants de Soler, l’investissement pour une éolienne s’élèverait à 5,5 millions d’euros, les études préalables à sa mise en œuvre incluses. Si l’on considère la rentabilité des installations, cela en vaut la chandelle. En effet, pendant les 15 premières années de fonctionnement, les kWh produits par de telles installations bénéficient d’un prix garanti. Une telle mesure, qui assure des rendements appréciables, vise à soutenir la promotion de plus de projets et à renforcer la sécurité d’approvisionnement en énergie de l’Union européenne. Au-delà de 15 ans de production, sachant que la durée de vie d’une éolienne est estimée à une vingtaine d’années, l’électricité produite est payée suivant les prix du marché. Cependant, malgré l’attrait financier de tels investissements, il semble que les promoteurs privilégient encore actuellement d’autres régions à la campagne luxembourgeoise. « Les contraintes environnementales au Luxembourg sont en effet considérées comme plus strictes que dans les pays voisins. Les exigences de distance entre chaque éolienne et les habitations, les limites nationales en matière de bruit et d’ombre portée sont plus sévères au Luxembourg qu’ailleurs, explique Guy Uhres. D’autres considérations environnementales, comme la présence de nids d’oiseaux ou de chauves-souris, entrent aussi en compte. » Certaines communes luxembourgeoises à la frontière n’ont par exemple pas pu développer de projets éoliens sur leur territoire en raison d’intérêts environnementaux. À quelques dizaines ou centaines de mètres, cependant, de l’autre côté de la frontière, de gigantesques pales de rotors tournent inlas-

sablement pour fournir de l’électricité verte à nos voisins européens.

DÉVELOPPER ET RENOUVELER

Les contraintes permettent aussi d’expliquer la faible densité de l’éolien au Luxembourg. On compte en moyenne une éolienne pour 40,4 km2. C’est vraiment très peu, en comparaison avec certains länder en Allemagne, championne européenne du renouvelable, avec plus de 30.000 éoliennes installées. Il y aurait encore de la marge, au Luxembourg, avant que la population n’ait l’impression d’être envahie. « On peut encore développer de nouveaux projets dans le respect des contraintes, assure Paul Zeimet. D’autre part, il y a aussi une opportunité à remplacer les plus vieilles éoliennes sur le territoire par des centrales de dernière génération. » À Mompach, sur la commune de Rosport-­Mompach, Soler opère quatre éoliennes, en fonction depuis 1996. La société mène actuellement un projet de renouvellement de cette installation. « Une nouvelle centrale va produire à elle seule trois fois plus d’énergie que les quatre anciennes éoliennes réunies », assure Guy Uhres. Pas de doute, il semble qu’au Luxembourg, l’éolien n’ait pas fini de monter en charge.

ASSOCIER LES CITOYENS ET LES COMMUNES

Dans les régions voisines du Luxembourg, les projets éoliens suscitent régulièrement le mécontentement de la population. Dans de nombreuses communes du sud de la Belgique, la contestation se fait entendre dès qu’un projet est révélé, souvent portée par les habitants les plus proches des sites envisagés. Qu’en est-il au Luxembourg ? Dans l’ensemble, en dehors de quelques associations d’habitants faisant part de leurs craintes, par exemple autour d’un projet éolien porté par des promoteurs privés à Differdange, ces développements semblent bien acceptés. « Pour chaque projet, nous cherchons à associer les citoyens et les communes, en leur octroyant des participations. Dès lors, ils peuvent profiter des retombées des centrales développées, explique Paul Zeimet. Souvent, ce sont les Communes qui nous approchent pour que nous les aidions à évaluer l’opportunité de développer un projet sur leur territoire. » Les autorités communales, à leur niveau, doivent aussi contribuer à la réalisation des objectifs environnementaux nationaux, comme le définit le pacte climat. À cette fin, le développement d’un projet éolien est une option souvent envisagée. « En outre, la procédure pour permettre le développement d’un projet est longue, et nous y associons les habitants, en toute transparence, dès l’entame des études, notamment à travers des rencontres et des séances d’information, assure Paul Zeimet. Cela permet d’expliquer les choses, d’analyser les problématiques en toute sérénité, et contribue aussi à l’acceptation des projets. »  S. L.

Décembre 2019 — Green economy —

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Le Luxembourg, 2e économie la plus productive

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Le Luxembourg fait partie des pays les plus productifs parmi les économies matures, selon une étude publiée le 15 avril par The Conference Board. La tendance globale est cependant à la baisse.

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QUAND ÉCOLOGIE RIME (ENFIN) AVEC ÉCONOMIE BioÊconomie, tech verte et autre Êconomie circulaire intÊressent de plus en plus les investisseurs. Le Luxembourg, oÚ le Green Tech Innovation Centre du Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST) a ouvert ses portes au mois de juin, a une vraie carte à jouer dans le domaine.

PHOTO Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST)

L’

ĂŠcologie, avenir de l’Êconomie ? Oui. Du moins en partie, si l’on en croit le dernier rapport Bloomberg New Energy Finance 2018, qui recense les investissements rĂŠalisĂŠs dans le domaine des ĂŠnergies vertes. RĂŠsultat, plus de 332 milliards de dollars ont ĂŠtĂŠ posĂŠs sur la table des acteurs du secteur en 2018. Et le Luxembourg, oĂš les investisseurs n’ont — initialement — pas besoin de  green tech  pour affluer, n’y ĂŠchappe pas. En tĂŠmoigne le succès grandissant du Green Tech Innovation Centre (lire ci-contre), oĂš se nouent des partenariats et se signent des contrats avec des entreprises du monde entier. Bien que les investissements soient en lĂŠgère baisse en comparaison avec l’annĂŠe 2017, d’importants financiers sont montĂŠs, ces derniers mois, Ă bord du train de la tech verte. Bill Gates, Jeff Bezos, Richard Branson, Jack Ma, tous se sont

par exemple rĂŠunis pour fonder Breakthrough Energy Ventures, un fonds d’investissement qui doit permettre aux chercheurs et entreprises de disposer de temps et de capitaux pour gĂŠrer les problèmes techniques et dĂŠfis inhĂŠrents aux ĂŠnergies renouvelables. Pour le moment, Breakthrough Energy Ventures compte une quinzaine d’entreprises dans son portefeuille. Au fil des annĂŠes, le rendement des entreprises spĂŠcialisĂŠes dans les  green tech  a grimpĂŠ. Jusqu’à dĂŠpasser de loin les attentes des analystes. Le rendement moyen de l’indice S&P Global Clean Energy, composĂŠ d’une combinaison de 30 entreprises actives dans l’Ênergie, les ĂŠquipements et les technologies propres, plafonnait mĂŞme Ă 13 % pour 2018. Et certains spĂŠcialistes du secteur estiment que cela ne devrait pas s’arrĂŞter lĂ . Tout en mettant en garde quant au chemin restant Ă parcourir.  ď ľ

  Si l’on regarde les projections, on voit la croissance sur le long terme.  

randes g e d s lu p n ÂŤ De plus e s passent Ă entreprise mie. Âť o la bioĂŠcon

E

n matière de green tech, le Luxembourg fait office de pionnier dans la rĂŠgion.  On a mis en place, depuis le mois de juin, le Green Tech Innovation Centre ici. Nous avons les infrastructures, en termes de chimie, de biologie molĂŠculaire, de biotechnologies, de gĂŠnie des bioprocĂŠdĂŠs, ainsi que les plate-formes de production, via des biorĂŠacteurs, pour rĂŠpondre aux besoins des industrielsÂ?Âť, explique Lucien Hoffmann, biologiste de formation et directeur du dĂŠpartement Environmental Research & Innovation (ERIN) au Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST).

ENGOUEMENT RAPIDE

Et le projet a rapidement rencontrĂŠ un franc succès.  Les premiers chiffres sont vraiment positifs, on a attirĂŠ du monde, c’est très bien. Nous avons plusieurs modèles de collaboration, financĂŠs notamment via les aides aux entreprises en matière de RDI par le Ministère de l’Économie ou via les instruments de financement de projets privĂŠs-publics du Fonds National de la Recherche. Nous proposons aussi aux entreprises d’installer leurs ĂŠquipes dans nos laboratoires. Cela permet une interaction poussĂŠeÂ?Âť, dĂŠveloppe-t-il.

les biotechnologies environnementales, en partie parce que nous sommes les seuls au Luxembourg. Et mĂŞme dans la Grande RĂŠgion. On est encore en train de se dĂŠvelopperÂť, estime Lucien Hoffmann.

ÂŤ UN ÉCOSYSTĂˆME PARTICULIER Âť

De lĂ Ă rester bien ancrĂŠ au Grand-DuchĂŠ ?  Le marchĂŠ luxembourgeois n’est pas suffisant sur du long terme, il faudra que l’on regarde vers l’Êtranger. Nous discutons d’ailleurs en ce moment avec une entreprise amĂŠricaine pour valoriser les dĂŠchets organiques et produire de nouveaux types d’aliments. C’est une activitĂŠ très spĂŠcifique, il nous faut des infrastructures et des compĂŠtences particulières en termes de support aux entreprises. Ce que le centre permet, d’ailleursÂ?Âť, rĂŠsume le scientifique, avant de conclure :  Nous voulions avant toute chose offrir aux entreprises un guichet unique pour rĂŠpondre de manière efficace Ă leurs besoins en innovationÂ?Âť. Les premiers chiffres montrent que l’exercice est plutĂ´t rĂŠussi. ď ľ Dr Lucien Hoffmann Director LIST

ENCORE SEUL

Si le Green Tech Innovation Centre n’a pas de mal à signer des contrats, c’est aussi parce que l’infrastructure est unique dans la Grande RÊgion.  Le centre a un immense potentiel dans la valorisation de molÊcules biologiques à intÊrêt industriel et dans la valorisation et le recyclage de dÊchets biologiques, ainsi que dans

POUR EN SAVOIR PLUS : LIST.LU

DÊcembre 2019 — Green economy —

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FORECAST

11 % d’énergie propre en 2020, c’est encore possible ? Il y a dix ans, le Luxembourg présentait son plan d’action national sur les énergies renouvelables et se fixait pour objectif que celles-ci atteignent 11 % de la consommation énergétique totale du pays en 2020. L’engagement sera-t-il tenu ? Réponses optimistes de trois acteurs engagés.

nes les Fränk Thin renouvelab e Énergies gn pa m ca e Chargé de Greenpeac er Anouk Hilg ergies wable en ne re of d ea H xembourg Enovos Lu

mes Claude Tur ie et de rg ne l’É de e Ministr territoire du t en l’Aménagem

le transport. Vis-à-vis de l’électricité, qui concerne Enovos, les derniers chiffres publiés par l’Institut luxembourgeois de régulation (ILR) sont encourageants. En 2018, le Luxembourg a couvert 10,4 % de la consommation nationale au départ de sources d’énergies renouvelables : hydroélectrique, éolienne, ­biogaz, photovoltaïque, biomasse, incinération de déchets. Au regard des projets développés par Enovos et d’autres acteurs du secteur, je suis confiante quant à l’atteinte de cet objectif. Il faudra néanmoins poursuivre ces efforts dans les années à venir, en déployant notamment le photovoltaïque à plus grande échelle, en continuant à développer l’éolien et en mettant l’accent sur ­l’efficacité énergétique. De nouveaux objectifs européens, qui seront transposés au niveau grand-ducal, mentionnent en effet une part de 23 à 25 % d’énergies renouvelables d’ici 2030. 50 —

C. T. : Au cours de la dernière décennie, le

Luxembourg a progressé dans le développement du renouvelable. Entre 2008 et 2018, l’éolien a augmenté de 410 %, et le photovoltaïque de 533 %. Quelque 7.000 installations photovoltaïques ont été implantées. Pour continuer en ce sens, j’ai lancé en septembre 2019 un appel d’offres portant sur la réalisation et l’exploitation de nouvelles centrales de production d’électricité d’une plus grande surface au départ du photovoltaïque. La politique nationale pour la promotion de la biomasse dans l’industrie porte aussi ses fruits. Une installation produisant 150 GWh d’électricité et 550 GWh de chaleur a par exemple été mise en place cette année. En 2018, 74 % de la consommation des ménages ont ainsi été couverts par la production d’énergies renouvelables nationale. Au vu des multiples dossiers en cours de réalisation, ce développement va se poursuivre, et le Luxembourg atteindra son objectif.

­— Green economy­— Décembre 2019

F. T. : L’objectif devrait en effet être atteint.

­ outefois, il ne faut pas perdre de vue qu’une T partie de cette énergie renouvelable n’est pas produite sur le sol luxembourgeois, mais est issue de mécanismes de coopération avec d’autres pays. En outre, 89 % des besoins ­restants du pays seront encore couverts par des sources d’énergies non renouvelables. Bien sûr, au cours des dernières années, le gouvernement a pris des mesures pour encourager le développement des énergies renouvelables, et des ­progrès ont été enregistrés. Néanmoins, à l’heure actuelle, moins d’un toit sur 40 est équipé de panneaux photovoltaïques. Si l’on veut pouvoir réellement transiter vers un autre mode de consommation, il faut faire plus. L’installation photovoltaïque pour les nouveaux bâtiments, par exemple, doit devenir obligatoire et être combinée à un s­ ubventionnement social. Il faut arrêter de croire que quelques idéalistes vont sauver notre futur. Il faut un changement de perception à une plus grande échelle.

PHOTO Nader Ghavami

A. H. : Cet objectif se réfère à trois piliers distincts : l’électricité, la chaleur  /  le froid et


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