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Ça colle et c’est piquant

Formant le duo Martin XVII, les Jurassiens Louis Riondel et Pascal Lopinat viennent de sortir leur premier album alliant électro et chanson –tout en lançant un style, le mielcore, une musique sucrée aux accents désabusés.

Texte: Pierre Wuthrich Photos: Matthieu Spohn

Le Jura est un canton à part. Politiquement et socialement bien sûr – la légendaire hospitalité jurassienne est sans pareille –, mais aussi culturellement. Ainsi, le petit dernier de la Confédération voit naître sur ses terres un grand nombre d’artistes qui font fi de la ruralité ambiante et développent des univers rivalisant avec les meilleurs créatifs des grandes métropoles. Citons le plasticien Augustin Rebetez, qui est représenté par de prestigieuses galeries à l’international, ou l’illustrateur Dexter Maurer, dont l’imagerie à servi à habiller un clip de la chanteuse américaine Ariana Grande. Parmi cette génération joyeusement décomplexée, voici Louis Riondel et Pascal Lopinat.

Une colocation expérimentale Le premier, après un bachelor en sciences politiques et après avoir fait ses premières armes dans le monde du spectacle en donnant des coups de main dans le domaine de la technique scénique est devenu régisseur notamment pour deux compagnies de danse contemporaine romandes, tout en explorant le monde du rap. Le second, diplômé de l’École jurassienne et conservatoire de musique (EJCM) avec une prédilection pour la batterie, a formé son premier groupe de rock à 13 ans avant d’évoluer dans des fanfares, des orchestres et une multitude de projets musicaux en groupe, en duo ou en solo.

«Nous nous sommes rencontrés lors de différents événements culturels dans le Jura et nous avons commencé à collaborer de temps en temps. J’étais à l’époque sur un projet trip-hop, que Louis a intégré pour faire notamment la voix. Quant à moi, je suis allé remplacer un bassiste dans la formation de Louis», précise Pascal Lopinat. Petit à petit, les deux compères se rapprochent et deviennent colocataires à Delémont, rue des Martins 17.

«Nous étions alors assez proches pour nous lancer dans un projet commun», explique Louis Riondel. Ce sera donc Martin XVII et nous sommes en 2016. Curieux et ne désirant pas entrer dans des cases musicales définies, le duo expérimente, visite le champ – et le chant – des possibles et se cherche une posture à adopter face au monde qui nous entoure. «Nous avons fait des expérimentations du dimanche, à l’arrache, que l’on envoyait sur Soundcloud. Nous les laissions un moment avant de les reprendre et de les retravailler. Il existe ainsi plusieurs versions de chacun des morceaux de notre album», lance Pascal Lopinat.

«Cet album est une invitation à rester conscients des problèmes, tout en calmant nos stress sur l’état du monde»

Louis Riondel

Du miel pour les oreilles L’album justement: huit pistes alliant musique électronique et chanson pour une musique intelligente mais sans prise de tête. Riche sans être chargée, complexe mais accessible. Et des voix qui, mises ensemble, forment un timbre, qui n’est pas sans rappeler par moments Laurent Voulzy. Un hasard, toutefois.

«Notre musique, c’est du mielcore, un terme que des amis ont imaginé. C’est mielleux mais assez acidulé dans les textes. Nous évoquons ainsi la planète qui va toujours plus mal, mais nous sommes opposés à une victimisation de la population. Cet album se veut ainsi une invitation à rester conscients des problèmes, tout en calmant nos stress communs sur l’état du monde», précise Louis Riondel.

Pour concocter ses morceaux –le duo parle parfois de manipuler les sons –, Martin XVII peut compter sur une mécanique assez bien huilée. «Nous avons les deux des idées pour les musiques, les textes, les arrangements. Après, c’est un ping-pong et chacun peut rebondir sur ce que propose l’autre», explique Pascal Lopinat. «Nous nous faisons confiance. Pascal est, lui, plus pointu sur les harmonies et moi plus pointilleux sur les paroles. Nous sommes donc assez complémentaires et profitons des capacités de l’autre», poursuit Louis Riondel.

Par la suite, les compositions ont été testées sur le public. Pour cela, le duo a imaginé des concerts à domicile durant les deux semi-confinements. «Nous avons beaucoup joué chez des particuliers à Lausanne, Bienne ou La Chaux-de-Fonds, avec des jauges de dix personnes. Cela nous a permis de roder nos titres», se souvient Pascal Lopinat. «Et comme les idées de notre album sont nées sur un canapé, il était assez logique de présenter le résultat dans des salons», note Louis Riondel. Ah oui, encore une chose, Martin XVII s’écrit en chiffres romains, «pour le côté princier que l’on aime apporter au projet», explique en chœur le duo. Il est vrai que Martin XVII, c’est plutôt la classe. MM

Les Jurassiens Louis Riondel et Pascal Lopinat de Martin XVII proposent une musique pointue mais accessible.

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