LE MÂCHON DES FILLES ELLES SONT PASSÉES PAR LÀ.. « Puisqu’ils veulent rester entre hommes, vous n’avez qu’à rester entre filles ». C’est à ce pertinent conseil d’Yves Rivoiron, le jovial patron de l’historique Café des Fédérations que l’on doit la naissance du « Mâchon des Filles », en 2005. Une association créée par Isabelle et Laura qui ont ouvert deux ans plus tard leur Bouchon des Filles, rue Sergent Blandan. Mais le Café des Fédérations est resté le siège officiel du « Mâchon des Filles ». Seule condition incontournable pour faire partie de l’association : être une femme ! L’association compte aujourd’hui 35 « mâchonneuses » qui ont à cœur de démontrer qu’elles savent aussi bien se tenir à table que leurs amis des Francs-Mâchons. Un nombre qui suffit à leur bonheur. Comme le précise Valérie Girod, leur actuelle présidente: « on ne cherche pas à recruter davantage, vu que nos mâchons se font dans des bouchons où l’espace est restreint, il n’y aurait pas de place pour tout le monde. » Ce qui arrive parfois cependant car il n’est pas interdit aux adhérentes d’inviter des amies. Et elles ne s’en privent pas. Si le Mâchon des Filles compte dans ses rangs des figures des bouchons lyonnais comme Arlette Hugon (chez Hugon) ou Françoise Gelin (ex La Meunière), les mâchonneuses exercent des professions diverses. Elles se réunissent six fois dans l’année, vêtues (enfin pas uniquement) de leurs tabliers et bérets noirs brodés de rose, pour partager un mâchon traditionnel. « Toujours à 9 heures pétantes » insiste Valérie Girod. L’heure idéale en effet pour déguster gratin de tripes ou tablier de sapeur ou tout autre lyonnaiserie gourmande. « Bouchons et bistronomie tu soutiendras, aux mères lyonnaises
hommage tu auras, femmes en cuisine tu encourageras » : trois des dix commandements du Mâchon des Filles qu’elles respectent avec dévotion. Si l’association ne remet pas de diplôme, les mâchonneuses laissent volontiers un petit mot au patron de l’établissement qui a accueilli leurs matinales agapes. Libre à lui de l’afficher pour signaler qu’elles sont passées par là et qu’elles ont apprécié l’accueil et la cuisine. Et si ce n’est pas le cas - ça peut arriver – alors, pas de petit mot : elles ne repasseront pas !
ACADÉMIE DU COQ EN PÂTE LES BONS BECS DE LYON..
« Au travail on fait ce qu’on peut, au lit on fait ce qu’on doit, mais à table on se force ! » En prenant pour devise cet aphorisme tiré de « La plaisante sagesse lyonnaise» édifiant recueil publié en 1920 par Justin Godart, sous le pseudonyme de Catherin Bugnard - l’Académie du Coq en Pâte proclame haut et fort sa volonté de promouvoir les traditions locales. Gourmandes certes, mais aussi culturelles ; même si aux esprits chagrins les secondes peuvent apparaître comme l’alibi des premières. De quoi faire se dresser sur leurs ergots les trente coqs qui composent cette académie dont la naissance en 1993 fut en fait une renaissance, celle de la défunte Académie du Porte-Pot. De là à ce que nos coqs se prennent pour des phénix ! Trente places donc, et pas une de plus, au sein de cette association ou seule une démission ou une disparition peuvent amener l’entrée d’un nouveau membre. « Nous avons pourtant beaucoup de demandes » commente le président Michel Boibien en
précisant que pour espérer être admis « il faut remplir deux conditions essentielles. » D’abord être du sexe des coqs, ensuite être né à Lyon. Si la seconde peut tolérer quelques exceptions, pour peu que l’impétrant puisse faire valoir de solides attaches lyonnaises, la première est absolument rédhibitoire. Mais si elles ne peuvent prétendre assister aux réunions mensuelles, les compagnes, sœurs ou amies ne sont pas exclues pour autant des manifestations organisées par les Coqs en Pâte tout au long de l’année. « Les poulettes sont les bienvenues chez les Coqs » assure Michel Boibien. Ce n’est pas au Chanteclerc, brasserie croixroussienne bien connue, que les Coqs en Pâte ont leurs habitudes mais au Garet, bouchon historique où Jean Moulin avait les siennes. C’est là qu’en 1993, autour de Michel Laurent, alors patron de l’établissement, les orphelins de l’Académie du Porte-Pot (terme désignant à Lyon une épicerie-comptoir) décidèrent de constituer
une nouvelle famille qu’ils baptisèrent Académie du Coq en Pâte. Pascal Lozano en fut le premier président, le demeura longtemps et le restera à vie. En reprenant le Garet, il y a quelques années, Emmanuel Ferra s’est bien gardé d’en chasser les Coqs. Bien au contraire, il a vite rejoint leurs rangs. C’est donc toujours au Garet que l’Académie tient ses séances gourmandes, le premier lundi de chaque mois ; non pas au chant du coq mais à 20h. Et au Garet, on ne picore pas ! Si aucune qualité particulière n’est requise, hormis les deux conditions citées plus haut, un solide appétit est de mise et une bonne culture générale est appréciée. Les Coqs ne manquent pas d’occasions de satisfaire l’un, ni d’enrichir l’autre au fil des diverses sorties, visites de la ville, de collines en traboules et autres lieux dignes d’intérêt, commentées par le Coq historien Gérard Corneloup. Soucieux de faire partager leur joie de vivre, les Coqs en Pâte proposent régulièrement des matinées dégustations au Garet, ouvertes à qui veut venir. Par ailleurs, ils distinguent chaque année en septembre « le chenu gone et la canante fenotte », choisis parmi des personnalités qui ont fait honneur à la ville de Lyon dans des domaines divers. L’an dernier ont ainsi été intronisés Simone Garnier, figure du petit écran, et Gabriel Paillasson, créateur de la Coupe du Monde de Pâtisserie. En septembre prochain, c’est Noëlle Noblecourt, autre Lyonnaise qui a marqué l’histoire de la télévision, qui devrait rejoindre ce tableau d’honneur. Une bien canante fenotte qui sera accompagnée d’un chenu gone dont l’identité reste encore à confirmer ; mais ce pourrait bien être un coq de Bresse…
Lyonpeople / Juin 2016
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