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Vivre avec ses fantômes

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Cohabitation

Cohabitation

Après la violence conjugale Vivre avec ses fantômes

Mon amour, Je te vois me regarder avec tendresse alors que par en dedans, je sens que mon être tombe en lambeau. Il y a ces moments où je vois le désir dans ton regard alors que moi je me sens comme une poubelle. Je perçois que pour toi, il n’y a rien qui existe outre le moment où je suis au creux de tes bras. Alors que tu m’enveloppes de tes tendresses, au fond de moi il y a encore cette femme qui n’en finit plus avec les pleurs. Je me doutais bien que choisir le quotidien à deux serait un pas d’engagement vers la guérison de mon cœur et mon être brisés par plusieurs années de violence conjugale. Savais-je que cette nouvelle réalité m’entraînerait dans un chaos intérieur plus vrai que nature? Dis-moi, ne vois-tu pas au fond de mon regard ce tumulte qui m’habite? Entends-tu le craquement de cet être qui a été détruit à petit feu par cette violence que je nomme parfois du bout des lèvres? Cette reconstruction de moi dans laquelle je me suis engagée est loin d’être facile. Mon passé a des répercussions émotives et psychologiques dans mon quotidien. Notre quotidien. Oui, bien sûr qu’il y a des ressources pour aider. Violence Info a de supers intervenantes qui aident énormément dans le processus de reprise de pouvoir sur sa vie et le long processus qui mène à une reconstruction de soi. Oui, j’ai des amis(es), mais il y en a une seule que j’ai connue avant ce grand séisme qu’ont été mes années de violences conjugales. Une survivante précieuse à mon cœur. Les ressources que j’utilise au quotidien viennent de l’intérieur. Je puise mes forces dans le chaos de mes nuits si nombreuses ou je n’arrive toujours pas à trouver le sommeil, malgré tes présences bienveillantes à nourrir notre amour. Je puise dans la confiance d’un retour aux études à 40ans. Je me reconstruis et j’apprends à cohabiter avec moi. Je fais des choix et m’engage à avancer dans le chaos du pardon à petits pas au quotidien: Me pardonner de ne pas être parfaite. Me pardonner d’avoir laissé quelqu’un qui dit m’aimer me dire mille mots de haine sous le couvert de l’amour. Me pardonner de ne pas être ce que je voudrais. Me pardonner d’avoir laissé mon cerveau se faire laver. Me pardonner d’en avoir voulu à ma vie. Me pardonner d’avoir perdu des amies. Me pardonner d’avoir perdu mes enfants. Je dois accepter de me pardonner, de te montrer mes vulnérabilités dans un moment d’égarement, afin d’apprendre à t’accueillir, t’aimer et t’accepter avec les tiennes. Chaque jour, j’apprends ce qu’est la vraie vie de couple: aimer et être à deux. Nous cohabitons mon amour, comme deux cœurs rapiécés dans le chaos des engagements d’un quotidien routinier. Nous devons vivre avec les séquelles d’une violence qui subsiste après plus de 7 ans de séparation. Nous cohabitons mon amour, nous avons choisi de nous engager dans le chaos d’une seule réalité. Avec toi, je n’ai plus besoin d’être une guerrière qui endure le chaos du quotidien. Je peux m’engager à me battre pour les causes qui me tiennent à cœur. Maintenant, je cohabite avec l’espoir.

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: Engin Akyurt de Pixabay Crédit photo

MÉLANIE TREMBLAY

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