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Quand la mort rôde

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Chère dulcinée

Chère dulcinée

CENTRE DE CONSOMMATION SUPERVISÉE DE SUDBURY

QUAND LA MORT RÔDE

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L’ouverture d’un centre de consommation supervisée à Sudbury était appréhendée par une partie de la population habitant le centre-ville. Toutefois, pour les sans-abri dépendant aux drogues et ayant des troubles de santé mentale, il s’agit d’un véritable baume sur un fléau qui prenait de l’ampleur.

Le rapport Plus qu’un simple chiffre publié au mois d’août par l’Institut des politiques du Nord révèle que de 44 à 68% de la population sans-abri du Nord de l’Ontario vivent avec un problème de dépendances et de santé mentale en même temps. À Sudbury, la plus grande ville du Nord de l’Ontario, 44% de la population sans-abri souffre de problèmes de dépendances. Ce n’est pas le ratio le plus élevé de la région, mais les urgences du Grand Sudbury ont tout de même eu 313 visites pour des surdoses en 2021, soit le nombre le plus important dans le Nord de l’Ontario. Pour tenter d’abaisser le taux de décès liés aux surdoses — 53 personnes par 100000 habitants en 2021 — les organismes de santé communautaire de la région attendaient depuis longtemps un centre de consommation supervisée, projet qui a longuement été retardé par un manque de volonté de financement. Le centre de consommation, qui a commencé à accueillir ses premiers utilisateurs en septembre, est situé non loin du cœur du centre-ville de Sudbury.

UN TRIO QUI FAIT MAL

Denis Constantineau est le coordonnateur du Réseau des sans-abri, un organisme qui fournit et coordonne les services aux personnes en situation d’itinérance à Sudbury. Il rappelle que le trio dépendance, santé mentale et itinérance rend les interventions auprès des utilisateurs de services particulièrement difficiles. «On gérait le centre de réchauffement l’hiver dernier dans l’édifice. On l’a vécu au quotidien ici et on voyait chaque jour deux, trois, quatre surdoses par jour. On était rendus que ça prenait deux, trois ou quatre doses de naloxone pour ramener quelqu’un parce c’est rendu tellement toxique les substances qui circulent dans la rue», déplore-t-il. «On l’a vu les problèmes de comportement. On le sait que ceux qui vivent avec le sansabrisme doivent beaucoup trop souvent vivre avec les trois conditions en même temps», ajoute-t-il. Le coordonnateur n’est pas surpris que la situation se soit autant dégradée au cours des dernières années. «C’était vraiment terrible. Juste le fait que tous les services soient fermés a fait en sorte qu’un énorme campement s’est formé ici au centre-ville puisque personne ne pouvait accéder aux services; on ne veut plus jamais se rendre jusqu’à ce point», indique-t-il.

CONSTRUIRE COÛTE QUE COÛTE

Le centre de consommation supervisée donne beaucoup d’espoir au Réseau des sans-abri, notamment en ce qui concerne la sécurité des personnes qui consomment des drogues. L’ouverture du centre va permettre aux utilisateurs qui le désirent de ne pas consommer seuls et de tester leurs drogues. L’arrivée de ce centre ne causera pas nécessairement de problèmes avec le voisinage du centre-ville. «Tous les problèmes avec le voisinage, avec les gens qui ne voulaient pas qu’on construise, on a réglé ça dans le processus», indique M. Constantineau. Nous avions une liste plus grande que mon bras de critères, et nous avions plein de gens qui ne voulaient pas qu’on s’installe», ajoute-t-il. Mais maintenant que le centre La Place est installé, que le personnel est recruté et que le Réseau Access Network, l’organisme de gestion est prêt à lancer les activités, les opposants au projet n’ont plus d’impact, selon M. Constantineau. «Une fois que le projet est lancé, les gens qui ont chialé contre, ça leur est sorti de la tête, ils ont passé à autre chose», croit-il. L’arrivée du centre de consommation supervisée de Sudbury permettra en quelque sorte de réduire la terrible cohabitation avec la mort qui frappe la ville du Nickel.

FRANCIS BEAUDRY

: Francis Beaudry Crédit photo

Denis Constantineau, coordonnateur du Réseau des sans-abri de Sudbury

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