3 minute read

De l’itinérance à l’abstinence

DE LA CONSOMMATION À LA RÉMISSION

Au début de mon secondaire, j’ai vécu de l’intimidation abusive. Un jour, le directeur de l’école a appelé ma mère pour lui dire qu’elle devait venir me chercher, car il ne pouvait plus garantir ma sécurité. En rentrant à la maison, j’ai essayé de m’enlever la vie, le seul sentiment qui m’habitait était d’être une moins que rien, de n’avoir aucune valeur. Puis, j’ai connu la consommation. Ça m’a donné l’impression d’être invincible. Plus rien ni personne ne pouvait m’atteindre, me persécuter. J’ai fait des transferts de dépendance d’une substance à l’autre. Je consommais plusieurs substances en même temps. J’ai consommé dès l’âge de 13ans, jusqu’à mes 24ans.

Advertisement

CONSOMMER

À 18 ans, j’ai commencé à travailler dans les bars, ça me permettait de consommer tout en étant payé. J’étais dans une relation très toxique et malsaine, mais j’étais borné à ne pas le voir. Jusqu’à ce qu’une partie de moi ne puisse plus l’ignorer. J’ai alors découvert une substance que je n’avais jamais essayée auparavant. L’effet était instantané, l’état d’euphorie et de bien-être total m’a rendu accro à la première dose. J’en voulais toujours plus. J’essayais de retrouver l’effet de la première fois, sans jamais y parvenir. Je vivais pour consommer et je consommais pour vivre. J’ai fait beaucoup de mauvais choix et j’ai posé de très mauvaises actions pour consommer. J’ai vendu des stupéfiants, jusqu’à ce que je consomme tout ce que j’avais. Je me faisais arrêter par la police constamment. J’ai volé pour consommer plus, volé ma propre famille, des inconnus. J’ai même échangé mon corps contre de la consommation. La femme en moi s’est alors sentie redevenir une fillette apeurée, pas respectée, pas considérée et dégoûtée d’ellemême. Je me suis retrouvée dans la rue, perdue, anéantie, sans repères. J’ai vécu chez des consommateurs et des vendeurs de drogues, d’un endroit à un autre. Pour consommer plus, pour combler le grand vide qui m’habitait. Je me suis un jour retrouvé à Toronto, où j’ai dormi dans des sous-sols d’église et des parcs pendant plusieurs mois. Le jour où j’ai pris l’autobus pour rentrer à Québec, j’ai été retrouvée inconsciente dans l’autobus et transportée à l’hôpital. J’ai fait une vingtaine de convulsions toxiques, dont plusieurs vers la fin de ma période de consommation: mon corps me suppliait d’arrêter. Lorsque je me réveillais, je ne reconnaissais ni l’endroit ni les gens avec qui j’étais. En août 2021, je me sentais totalement détruite. Les sentiments de culpabilité, les mensonges et la souffrance étaient des partenaires très intimes, la drogue et l’alcool, les amis que je chérissais le plus. Je ne pouvais plus continuer; j’ai donc décidé de me reprendre en main. Ça faisait environ 1 an que j’appelais à Portage Québec, mais je ne me présentais jamais aux rendez-vous. Ce jour-là, j’y suis allé.

SE LIBÉRER

J’ai entrepris une thérapie de 5 mois combinée avec des meetings CA. J’y suis arrivée sans avenue. Je n’arrivais plus à vivre avec moi-même et je ne me reconnaissais plus. Aujourd’hui, j’ai trouvé ma voie et découvert qui je suis en tant que femme et celle que je souhaite devenir. J’ai pardonné à la petite fille souffrante et dépourvue. J’ai repris confiance en moi, et j’ai défini mes valeurs, mes compétences. J’ai aussi appris à m’affirmer, et à respecter mes propres limites, à identifier mes émotions et à m’exprimer librement. On m’a aussi accompagné pour laisser derrière de mauvaises fréquentations, à développer de nouvelles habitudes dans ma routine de vie et lorsque j’ai envie de consommer. Aujourd’hui, ce n’est plus une option. Toutes ces expériences ont façonné la femme en construction que je suis. Je me sens libérée et en paix avec moi-même. Je partirai d’ici pour reprendre la route, délivré de ma dépendance, ayant acquis la connaissance de moimême, l’assurance et la sagesse qui me permettront de ne plus jamais vivre dans les ténèbres. Suite à ma thérapie, j’ai entrepris la démarche avec le Centre de formation à l’emploi. Je me suis inscrite à l’université pour faire mon certificat en dépendance à l’automne prochain. Je souhaite devenir intervenante en toxicomanie. Si tu souffres, tu n’es qu’à un pas de changer ta vie. Être abstinent dans le rétablissement, c’est possible, avec la force du nous.

ANNE

: Extrait du logo de Portage Crédit photo

This article is from: