Jade Maridort_Mémoire HMONP_1/2

LE SENS DES SURFACES : > QUELLES RÉPONSES ARCHITECTURALES AUX ENJEUX DE LA CONSOMMATION ÉNERGÉTIQUE ?

Jade Maridort Mémoire HMONP Sous la direction de Nicolas André Soutenance : 13-17 septembre 2021 MSP : ateliers o-s architectes Du 01/10/20 au 01/05/21 Référent MSP : Guillaume Colboc

REMERCIEMENTS

Je souhaite remercier Nicolas André pour son suivi et ses conseils avisés. Je remercie Guillaume Colboc, Vincent Baur et Gaël Le Nouëne pour leur confiance et leur accompagnement au sein d’ateliers o-s architectes.

Je remercie également Philippe Madec, Eric Bussolino, Emmanuelle Patte, Héloïse Pelen et Laurent Mouly d’avoir gentiment accepté de répondre à mes questions en partageant leurs savoirs, engagements et expériences.

Je remercie également Bruno Follin et mes colocataires pour leurs aides, aussi diverses soient-elles.

Enfin, je remercie mon compagnon pour ses encouragements quotidiens.

AVANT-PROPOS

Diplômée de l’ENSA Paris-Belleville en janvier 2018, voilà maintenant 2 ans que je fais partie de l’équipe des ateliers o-s architectes. C’est donc tout naturellement que j’ai choisi de faire ma mise en situation professionnelle chez eux afin de profiter des missions qui m’y sont confiées pour mettre en pratique les enseignements de la formation. Durant cette année, j’ai été en charge de la direction d’exécution des travaux pour la restructuration de la demi-pension d’un lycée en banlieue parisienne et chargée de projet pour les études d’un ensemble de 97 logements et 4 commerces à Dijon.

Tandis que les cours m’ont permis de mieux définir le rôle de l’architecte vis-à-vis des différents acteurs du chantier, l’exercice du mémoire m’a permis d’interroger les valeurs que je souhaite défendre dans ma pratique et que j’espère, traduire dans mes futurs projets.

La problématique de ce mémoire découle d’un constat que j’ai pu faire très tôt à l’agence.

Portée personnellement sur les questions environnementales contemporaines, j’ai d’abord été ravie de travailler sur ce projet dijonnais arborant le label HQE dans cet ensemble urbain naissant qui se dit être un « Ecoquartier ». A l’appellation, je m’attendais à participer à la concrétisation d’une belle promesse : matériaux biosourcés, énergies renouvelables, espaces partagés, etc. Cependant, malgré les quelques prescriptions non pas illusoires, mais quasi superficielles (au regard de la situation climatique) de la fiche de lot, rien de tout cela n’est aujourd’hui porté. Certes, les exigences thermiques et acoustiques seront respectées, mais pour des questions budgétaires, la Maitrise d’Ouvrage supprime le « non essentiel » : toitures végétalisées, terrasses et potagers partagés dimensionnement structurel pour prévoir une éventuelle surélévation, etc. « Haute Qualité environnementale », « Ecoquartier », « BEPOS », « BBC », «E+C-» : autant d’appellations sujettes à devenir des coquilles creuses ? À l’aube de la RE2020, je me demande la profondeur de ces titres et l’étendue de leurs miroitements. Le respect des objectifs énergétiques dans les phases d’études est-il garant d’une consommation réelle équivalente ? La performance est-elle uniquement relative à la technologie ? Miser uniquement sur la technicité n’est-il pas alimenter un fantasme comme quoi nous allons pouvoir conserver nos modes de vie actuels ?

Pour répondre à ces questions, j’ai cherché d’une part, à connaître différents positionnements que peut choisir un architecte vis-à-vis de la technique du bâtiment et d’une autre part, à comprendre comment le projet architectural pouvait impacter les comportements en faveur d’une utilisation plus vertueuse des énergies.

SOMMAIRE Introduction

8

1/ ALTERNATIVES FACE À LA TECHNICITÉ CONVENTIONNELLE DES BÂTIMENTS I. QUELQUES PATHOLOGIES DU BÂTIMENT BAS-CARBONE

12

Les problèmes liés à l’équipement

12

Surchauffes et nuisances sonores Entretien Multiplication des systèmes et surdimmensionnement

Les problèmes liés à l’usage

15

La déresponsabilisation des usagers L’effet rebond La part d’aléatoire des comportements

II. DES ALTERNATIVES LOW-TECH : LE RÔLE DE L’HABITANT

17

Une inspiration vernaculaire ?

Confort d’été

18

Les protection solaires La vitesse de l’air

Ventilation naturelle

20

Principes et références Ventiler le logement collectif: expérimentations pour un système frugal

Confort d’hiver Dispositifs Logement collectif : peut-on éviter les systèmes ?

4

25

I. LA CONSOMMATION DES SURFACES

27

Le nombre de m 2 par habitant

27

Croissance et disparités

m 2 : «autant de surface à chauffer» ?

Analyse de l’enquête Phébus sur la consommation des ménages

30

Les performances du logement et la consommation conventionnelle Influence des caractéristiques du logement Influence du comportement des habitants Performance et intensité d’usage Une sobriété nécessaire ? Le scénario Négawatt

II. LE SENS DES SURFACES : QUALITÉ D’USAGE ET PLAISIR D’HABITER

34

Concevoir l’espace avec le temps

34

La réversibilité pour répondre à différents cycles de vie La distension de l’espace en fonction des saisons : le nomadisme intérieur L’espace tampon : la serre et le jardin d’hiver

Repenser la relation à l’extérieur

42

Espaces annexes à disposition Questionner la porosité de l’enveloppe

5

LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

2/ RENDRE L’HABITAT DÉSIRABLE ET CONFORTABLE POUR UN MODE DE VIE PLUS FRUGAL

III. TEMPÉRATURE DE CONSIGNE ET CONFORT

43

Le confort aujourd’hui

43

La contrainte thermique oubliée Les paramètres mesurables du confort thermique

La matérialité comme facteur de confort

44

La tempérture des parois Une autre approche de la beauté : entre éthique et esthétique

Le confort adaptatif

47

Conclusion

48

Bibliographie

50

Iconographie

52

Annexes

53

Entretien 1 avec Philippe Madec Entretien 2 avec Eric Bussolino Entretien 3 avec Laurent Mouly Entretien 4 avec Emmanuelle Patte et Heloïse Pelen

53 64 77 81

Curriculum Vitae

89

6

LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

7

INTRODUCTION

En 2019, l’énergie primaire consommée en France est de 248 Mtep1 pour une consommation finale de 152,8 Mtep. Le secteur du bâtiment représente 45 % de la consommation finale (29% pour le résidentiel et 16% pour le tertiaire). Il est de fait, le secteur le plus consommateur d’énergie en France.

En deuxième position se trouve les transports (32%) puis l’industrie (20%)2 et l’agriculture/pêche (3%).

Le secteur du bâtiment est responsable de 18% des émissions de gaz à effet de serre3.

Consommation d’énergie finale par secteur en 2016

Depuis le choc pétrolier de 1973, un ensemble de réglementations thermiques ont vu le jour pour diminuer la consommation énergétique du bâtiment. En 2015, la Loi de Transition énergétique pour une Croissante Verte fixe entre autres, les objectifs de diviser par 4 les émissions de GES entre 1990 et 2050 et de généraliser la construction de bâtiment à énergie positive (BEPOS) pour toutes les constructions neuves dès 20204.

Réglementations thermiques et objectif 2030 et 2050

1.A noter que l’énergie primaire consommée (248,6 Mtep) est 1,85 fois plus grande que l’énergie primaire produite sur le territoire français (134 Mtep). La France est donc dépendante à 45,4% d’énergie venant d’autres pays.

2.Datalab, «Bilan énergétique de la France en 2019, données définitives», Déc.2020.

3.Données INSEE 2019.

4.Future réglementation environnementale RE2020, prévue applicable en 2020 et reportée à 2022, préfigurée par le label E+C-.

8

LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

Comme le rappelle Franck Boutté5, la rénovation du parc existant est un enjeu majeur de la transition énergétique. Il est important de recontextualiser l’impact de la construction neuve et sa part de consommation énergétique par rapport à celle de l’existant. Pour lui, la course au BEPOS « revient à faire une sur-optimisation sur un gisement marginal ». En effet, le neuf représente 1/100e du bâti dans son ensemble. Et en terme d’énergie globale 1 m2 construit neuf est 5 à 10 fois moins intense qu’1 m² du bâti existant. Il faut donc prendre un certain recul sur la part d ‘énergie de l’architecture « neuve ».

Répartition du parc existants en millions de logement selon l’efficacité énergétique des logements

La technologie permet aujourd’hui de construire des bâtiments très économes, voir même des bâtiments «producteurs» d’énergie. Cependant, ces économies réalisées grâce à l’amélioration de l’efficacité énergétique des logements ne se retrouvent pas toujours dans le bilan final de consommation énergétique et c’est à ce paradoxe que s’intéresse ce mémoire en particulier.

En ce qui concerne le secteur résidentiel, une étude de l’Ademe sur les variations de consommations des ménages indique à première vue une diminution de 14,5 Mtep entre 2000 et 2015. Mais en additionnant l’ensemble des variations propres à différents facteurs, l’économie énergétique n’est en réalité que de 3,9 Mtep, soit seulement 27% des économies initialement attendues (cf. schéma ciaprès). Parmi ces facteurs pesant dans la balance énergétique, on trouve notamment l’augmentation du nombre de logements ainsi que de leur taille, mais aussi une augmentation des consommations liées directement à un changement de comportements des habitants caractéristique de ce qu’on appelle «le paradoxe de Jevons» ou «l’effet rebond»6 qui sera expliqué dans cette recherche.

5. BOUTTE Franck, «Arrêtons l’hyper-performance dans le neuf», In Ecologik n°66, juin-juillet-août 2020, p. 20.

6. Les ménages auraient tendance à augmenter leur confort ou diminuer leurs restrictions dans leur logement lorsque celuici présente une efficacité thermique, qui diminue ainsi le coût énergétique du logement.

9

Décomposition des variations des consommations des ménages

De plus, à l’aube de l’application de la RE2020, qui tiendra compte non seulement de la consommation liée à l’usage du bâtiment, mais aussi à l’impact environnemental de chaque élément de la construction, de l’exploitation et de la maintenance du projet (à travers l’analyse de leur cycle de vie7), les concepteurs sont amenés à prendre en compte l’impact des systèmes techniques de régulation thermique en amont et en aval de leur utilisation. Une nouvelle donnée rentre alors en jeu dans le calcul de performance du bâtiment : c’est l’ «énergie grise».

Par ailleurs, la multiplicité des systèmes dans un bâtiment peut parfois rendre la technicité contre-productive. En effet, pour être efficaces, les équipements doivent être fonctionnels. Et la maintenance de ces équipements implique parfois des connaissances spécifiques que les utilisateurs n’appréhendent pas toujours de la bonne manière, engendrant un dysfonctionnement qui peut être parfois plus énergivore.

L’autonomie relative des systèmes engendre également une standardisation des ambiances et exclut l’usager du contrôle de son propre confort. De fait, cette mise à distance déresponsabilise les personnes de la consommation énergétique du bâtiment. Ce qui va largement à l’encontre des prises de conscience vers lesquelles il est aujourd’hui nécessaire d’aller.

7. ACV : Analyse du cycle de vie. Analyse des impacts environnementaux d’un matériau ou d’un produit de l’extraction de la matière première, à l’élimination du produit en passant par le transport, la transformation, la mise en oeuvre et l’utilisation.

10

Entre performance du bâtiment et usages réels, la recherche d’efficacité doit-elle s’accompagner d’une recherche de sobriété9 ?

L’architecture peut-elle alors inspirer et promouvoir un mode de vie plus frugal ?

Comme l’indique très justement Alain Bornarel10, on ne peut pas décréter que les gens vont avoir un comportement économe. En revanche, nous pouvons, en tant que concepteurs, mettre à disposition des bâtiments avec possibilité d’utilisation économe. Et pour que les habitants s’investissent dans cette démarche, il faut avant tout qu’ils prennent plaisir à habiter ces bâtiments.

L’objectif de ce mémoire est de présenter différentes alternatives mises en oeuvre à travers le projet architectural, permettant d’une part, à l’habitant de régler les ambiances intérieures de son logement à l’aide de dispositifs simples, pratiques et économiques et d’une autre part, à lui donner l’envie et le plaisir de le faire.

Après avoir présenté certaines pathologies auxquelles peut mener une vision trop techniciste du bâtiment aujourd’hui, ce travail exposera les alternatives techniques « low-tech » permettant à l’habitant de réguler lui-même les ambiances de son logement.

Une deuxième partie abordera la question de la consommation au-delà du système technique en exposant d’autres enjeux de la conception architecturale. Il s’agit d’une part, de justifier le sens des surfaces construites en questionnant leur réversibilité, leur modularité mais aussi leur désirabilité.

Et il s’agit également d’interroger nos critères de confort en redécouvrant des qualités sensorielles apportées par l’architecture.

8. Problèmes d’entretien des machines et complexité d’usage ; prise en compte de l’énergie grise de ces technologies; mise à distance entre habitant et habitat; homogénéisation des ambiances et microclimats en dépit des variables extérieurs; effet rebond et hausse de la consommation (en réf. à l’ouvrage l’Âge des Low-Tech de Philippe Bihouix).

9. Études : Le Labo de l’Économie sociale et solidaire, « Sobriété énergétique », dans Transition énergétique citoyenne, 2018, p.19. et Rapport du Breakthrough Institute, Energy Emergence - Rebound & backfire as emergent phenomena, février 2011.

10. Interview de A.Bornarel «Dans la construction, il faut être frugal en matériaux, en énergie, en technique», Le Monde, 12/12/18. https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/12/dans-la-construction-il-faut-etre-frugal-en-materiaux-enenergie-en-technique_5396521_1652612.html 11

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Aux vues des impasses vers lesquelles les stratégies dites «high-tech» peuvent amener8, une approche plus frugale des modes de concevoir et d’habiter s’esquisse comme réponse durable aux enjeux environnementaux.

PARTIE I . LES ALTERNATIVES FACE À LA TECHNICITÉ CONVENTIONNEL DU BÂTIMENT

1992

Convention -cadre des Nations Unies sur les changements climatiques Sommet de Rio 1988 Création du GIEC

1972

Conf. des Nations Unies sur l’environnement, à Stockholm

1970

1980 RT 1974 331 à 450 kWh.m²/an

1990

RT 1982

1973

151 à 230 kWh.m²/an

1987

Choc pétrolier «EARTHSHIPS, ARCHITECTURE SOLAIRE, RECHERCHE BIOCLIMATIQUE»

RT 1989

231 à 330 kWh.m²/an

Rapport Brundland Naiss. du concept de développement durable «DÉVELOPPEMENT DURABLE»

1997

Signature du Protocole de Kyoto

«HQE ET SES 14 CIBLES»

Négociations internationales pour le climat et évolution des réglementations thermiques

I. QUELQUES PATHOLOGIES DU BBC 1 :

Les problèmes liés à l’équipement « J’ai participé à un moment dans ma carrière à ce qu’on a appelé le village solaire de Nandy, succession de petites maisons solaires. C’était extraordinaire ! Enfin nous avions de vraies maisons solaires habitées par de vraies gens. Je suis retourné à Nandy quelques années plus tard … Une catastrophe ! Les maisons étaient là, les gens aussi, mais tout ce qui était lié à l’approche solaire n’avait pas résisté à l’usure du temps. Pourquoi ? Parce qu’on leur avait donné des machines. »2 A. Bornarel

1. Rapport « Retours d’expériences dans les bâtiments à basse consommation et risques de non-qualité », Règles de l’Art Grenelle Environnement 2012.

2. BORNAREL Alain et MADEC Philippe, «Bio-inspirée & bioclimatique, la métamorphose», Webinaire «Métamorphoser l’acte de construire» organisé par la Frugalité heureuse et Créative, 1er déc.2020.

12

2013-2020

Grenelle de l’environne- 2ème période d’engagement ment du Protocole de Kyoto

2002

Sommet de Johannesburg

2000 RT 2000 91 à 150 kWh.m²/an

2008-2013

1ère période d’engagement du Protocole de Kyoto

2015

COP21 à Paris

2010 RT 2005 51 à 90 kWh.m²/an

2020

RT 2012

inf.ou ég. à 50 kWh.m²/an

2005

2011

kWh.m²/an

inf.ou ég. à 15 kWh.m²/an

RT 2020

2016

Entrée en vigueur de l’Accord de Paris

(en 2022) inf. à 0 kWh.m²/an

Entrée en vigueur du Création de la plateProtocole de Kyoto forme Durban «BBC» «BEPAS, «BEPOS» inf.ou ég. à 50 inf. à 0 kWh.m²/an MAISON PASSIVE»

Surchauffes et nuisances sonores : Bien que l’efficacité thermique du bâtiment BBC soit reconnue en hiver, il n’en est pas de même pour la période estivale. En effet, plusieurs retours d’expériences se plaignent de surchauffe.

Ce désagrément est dû à plusieurs facteurs : l’absence de protection solaire ou un mauvais usage de celles-ci si existantes, une mauvaise prise en compte des apports thermiques internes lors de la conception ou encore un mauvais positionnement des VMC double flux3, l’impossibilité d’assurer une ventilation naturelle ou traversante, etc..

De plus, la ventilation double-flux peut également ajouter son lot de nuisances. D’une part, la forte isolation acoustique des bâtiments BBC vis-à-vis de l’extérieur augmente l’audibilité des nuisances sonores internes comme les sifflements des bouches d’insufflation, les vibrations liées au mauvais réglage des débits d’air, la transmission de sons par les gaines, des vibrations de l’équipement luimême s’il n’est pas bien fixé, etc ..

L’entretien :

3.

Dans des combles non isolés par exemple.

13

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2007

D’une autre part, si la VMC d’un bâtiment étanche à l’air n’est pas bien entretenue, elle peut également causer un vrai problème d’assainissement de l’air. Il faut que les bouches d’insufflation soient positionnées loin des bouches d’extraction et de façon à brasser l’air jusque dans le fond des pièces. Il faut également que les portes soient détalonnées pour permettre le passage de l’air4 entre les pièces.

Si ces principes ne sont pas respectés ou maintenus en place, la machine produit l’inverse de l’effet escompté.

Une fois installés, ces systèmes restent à entretenir, et là encore, un problème persiste. Bien souvent les moteurs sont installés dans des espaces difficilement accessibles, rendant l’entretien5 et la maintenance plus complexe, parfois même décourageants pour les habitants qui n’ont pas toujours les informations nécessaires à cet effet. « Le défaut de ces dispositifs techniques, c’est qu’ils consomment eux-mêmes de l’énergie, même s’ils ont un bon rendement. Ils demandent un entretien qui bien souvent n’est pas fait, en raison de quoi, ils n’atteignent jamais les performances promises. Et ils ont une durée de vie limitée : il faut changer une ventilation mécanique tous les dix ans et une chaudière, au bout de sept ou huit ans.»6 A. Bornarel

La multiplication des systèmes et le surdimensionnement des équipements : L’utilisation d’énergies renouvelables implique également une multiplication de sources de chaleur d’appoint pas toujours bien maîtrisée. Par exemple, une installation de chaudières bois qui, pour un bon fonctionnement ne doit pas être sollicitée trop souvent, est quasi systématiquement accompagné d’un système d’appoint gaz. Le dimensionnement de ces équipements pose également question.

Par exemple, la chaudière bois va fonctionner couramment à 50 % de sa capacité, les 50 % restant ne seront utilisés qu’exceptionnellement lors de températures extrêmes (ce qui peut arriver quelques jours dans l’année). « Le client (Région des Pays de la Loire pour les lycées) nous a clairement dit qu’il était trop compliqué d’entretenir des chaufferies mixtes, avec un côté du bois, un autre du gaz. Ça donne un double réseau, d’autant plus compliqué en maintenance. »7 E. Bussolino.

Un surdimensionnement de certain équipement peut également être néfaste pour leur propre fonctionnement. Un équipement utilisé à une puissance inférieure à sa capacité s’encrasse plus rapidement. Cela peut être le cas des panneaux solaires qui, lorsque leur surface est trop importante, vieillissent prématurément à cause d’une surchauffe, d’une dégradation du liquide caloporteur, ou de fuites … Enfin, par leur quantité et dimensionnement ces installations consomment non seulement de l’énergie, mais également de l’espace. Ils nécessitent des locaux techniques conséquents, des gaines, des faux plafonds, etc..

4.

5.

6.

7.

14

Ce qui n’est pas le cas des portes acoustiques par exemple.

Changement des filtres.

Article web Le Monde. cf. Bibliographie. cf. Entretien Eric Bussolino.

Une automatisation des systèmes qui déresponsabilise les utilisateurs : Aujourd’hui, certains bâtiments sont capables de réguler de façon quasi autonome leurs températures grâce à l’installation d’une multitude de capteurs thermiques, hygrométriques, etc. … Eric Bussolino nous parle des risques de cette automatisation parfois appliquée « à outrance » : « Plus on mécanise, plus on risque l’inconvénient des pannes, un des 1ers sujets de sinistre, ce sont les GTB, les systèmes de gestion technique du bâtiment qui tombent en panne. Ils sont censés récolter finalement tous les points de mesures du bâtiment et enclencher les systèmes en conséquence. Il y a tellement de remontées de points que finalement ça se fait assez mal, ça dialogue mal, etc. … Et donc le système n’arrive pas à gouverner ». « On a été aussi à un moment donné dans cette automatisation un peu « à outrance »… et finalement à constater des surconsommations parce que les choses s’étaient déréglées, personne ne faisait attention au système étant donné qu’il était sensé marcher tout seul…

Mais en réalité personne ne comprenait quoi que ce soit. Et puis, on arrivait parfois à des aberrations : on faisait du chaud en même temps que du froid, etc. » « On voit bien que cet usage de la métrique dans l’usage du bâtiment de façon un peu démesurée conduit à une impasse performancielle et en plus, déresponsabilise et « désaculture » les utilisateurs de leur environnement. » E. Bussolino.

Effectivement, en automatisant complètement les systèmes, on met à distance les usagers de la régulation thermique du bâtiment, qui détermine leur propre confort. Cette conception peut être à l’origine de situation paradoxale et même inconfortable : « Typiquement, la question des stores automatisés sur toutes les façades, on a plein de retours négatifs. Construisant des bureaux très vitrés, on a tendance à installer des gestions de protections solaires en fonction de la courbe du soleil. Sauf que les gens sont dans leur bureau et d’un coup les stores se mettent à se baisser. Les gens ne comprennent pas. Peut-être que certains étaient d’ailleurs dans une ambiance avec une tache solaire intéressante, une luminosité particulière, etc ...Et d’un coup, tous les stores se baissent, s’orientent comme il faut et les usagers trouvent ça finalement hyper intrusif. » E. Bussolino

L’effet rebond Enfin, même si le progrès technologique permet aujourd’hui de construire des bâtiments très performants, on constate un autre paradoxe non anticipé qui influe considérablement dans la consommation énergétique des ménages : l’« effet rebond ».

Un article du Monde paru le 04 octobre 2020 présente le cas de l’Allemagne qui est particulièrement parlant : 340 milliards d’euros ont été investis dans la rénovation énergétique des bâtiments entre 2010 et aujourd’hui, pour passer d’une consommation énergétique par foyer de 131 kWh/m2/an à 130 kWh/m2/an.

Cette contre-performance s’explique entre autres par l’augmentation de la température de consigne des ménages qui au lieu de chauffer à 20°C, est montée à 22°C.

15

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Les problèmes liés à l’usage

Une étude de l’Ademe analyse ce phénomène et distingue différents changements de comportement liés à l’augmentation de l’efficacité énergétique du logement, se traduisant par une augmentation du confort et/ou une diminution des restrictions.

En effet, les économies réalisées grâce au progrès technologique sont en partie annulées par une augmentation de la température de consigne dans l’ensemble du logement, une baisse moins régulière du chauffage en cas d’absence ou dans les pièces de nuit, une augmentation de la consommation d’eau chaude.

L’effet rebond prend également deux autres formes. Il peut avoir un effet indirect qui consiste à reporter la consommation ailleurs. Dans l’exemple d’un ménage, le gain de pouvoir d’achat obtenu par la baisse de la facture énergétique sert à la consommation d’autres biens et services qui ont eux-mêmes nécessité une consommation d’énergie.

L’effet rebond peut également avoir un effet « macroéconomique » qui se traduit cette fois-ci par une amélioration de l’efficacité énergétique au service de la productivité de l’économie qui permet un regain de croissance, qui tire à son tour la consommation d’énergie à la hausse.

La difficulté d’appréhender la part d’aléatoire des comportements dans les modèles de calculs : Ces changements de comportements ne sont pas prévisibles. Et là aussi, la technologie est confrontée à une limite. La technicisation du bâtiment s’accompagne d’outils de conception et de calculs prédictifs très performants (modélisation thermique dynamique, etc.) qui permettent d’établir des hypothèses de fonctionnement selon une notion de confort prédéfinie. Mais ces hypothèses sont confrontées à l’usage réel du bâtiment. Car l’usage, qui est directement lié à l’humain, implique une part d’aléatoire et donc une adaptabilité des systèmes techniques, qui a malheureusement du mal à être appréhendée par ces derniers.

«C’est donc la confrontation entre un modèle numérique qui va être ultra précis, qui nous conduit potentiellement à annoncer des consommations ou à annoncer une façon de fonctionner dans un bâtiment avec l’usage réel du bâtiment, avec de vraies gens à l’intérieur, qui vont vivre leur ambiance, qui vont parfois avoir une envie peutêtre spécifique. (…) On voit bien que tout ce « ressenti » là n’est pas caractérisé par les logiciels et c’est effectivement la confrontation des deux « vies » qui conduit souvent à la surtechnicisation du bâtiment.» Eric Bussolino.

Finalement, les différents problèmes auxquels se confronte une vision trop techniciste du bâtiment peuvent amener à penser le projet autrement.

16

« L’air dans ton appartement, c’est une machine qui te l’apporte : la VMC. La lumière dans ton appartement, c’est une machine qui te l’amène : une ampoule électrique. La chaleur dans ton appartement, c’est une machine qui te l’amène : un radiateur. La lumière qui rentre par ta fenêtre, la chaleur du soleil et l’air… Tout ça est gratuit. Mais non, on te le fait payer. Donc nous, on veut retrouver une relation « naturelle » à la nature »8

« Ce n’est pas le bâtiment qui est intelligent, ce sont ses habitants »9

« Apprendre à quelqu’un à baisser les volets quand il y a du soleil, à préférer ouvrir sa protection solaire plutôt que d’aller allumer la lumière, on ne peut pas en faire l’économie.

On ne peut pas le faire à sa place. Quitte à imaginer à ce qu’au début, ce ne soit pas très bien fait. Mais de toute façon, si ça agit directement avec son confort, il va rapidement apprendre. » E. Bussolino Aux regards des impasses vers laquelle la stratégie « high-tech »10 peut conduire, il est nécessaire d’intégrer l’usager comme moteur de la régulation thermique du bâtiment dès la conception du bâtiment : un rôle à lui rendre et un rôle à lui apprendre pour que son comportement puisse être vertueux vis-à-vis des enjeux environnementaux. « C’est tout l’enjeu du low-tech y compris sur les systèmes, il faut accepter que quelque part, les gens ne soient pas des robots bioclimatiques. Ils ne vont pas forcément déclencher la descente des protections solaires ou l’ouverture des fenêtres au moment optimal, systématiquement. Mais par contre, c’est beaucoup plus pérenne d’avoir du manuel, ne serait-ce qu’en termes d’entretien maintenance. »11 E. Bussolino

Une inspiration du vernaculaire ?

Pour ce faire, une approche dite « low-tech » du bâtiment peut faciliter la responsabilisation des habitants. Elle ne signifie pas une absence de technologie, mais le recours en priorité à des techniques simples, accessibles et économiques. Cette approche se double d’un objectif environnemental en s’appuyant sur des principes bioclimatiques. C’est à dire profiter des ressources naturelles gratuites pour que le bâtiment joue sa fonction thermique sans polluer ni gaspiller comme capter l’énergie solaire pour se chauffer, le vent pour se rafraichir, etc .. On parle alors de solutions passives comme la ventilation naturelle, le mur trombe, le puits canadien, le géocooling, la serre, la boîte à ombrage.

8.Cf. Entretien P.hilippe Madec 9. Extrait du manifeste pour la frugalité heureuse et créative.

10.cf. L’âge des low-tech, Philippe Bihouix 11. cf. Entretien E. Bussolino 17

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II. QUELQUES ALTERNATIVES LOW-TECH : LE RÔLE DE L’HABITANT

Ces solutions low-tech trouvent très largement leur inspiration dans l’architecture vernaculaire qui est fondamentalement issue d’une recherche d’économie d’énergie, de matières et de moyens. Ces solutions « low-tech » pourraient paraître régressives. Dans « Les délices du Feu », Olivier Jandot rappelle que « pour les sociétés anciennes, la lutte contre le froid est un combat quasi perdu d’avance et sans cesse renouvelé ». Dans l’habitat rural, on installait l’habitacle à proximité immédiate de l’élevage pour profiter de la chaleur dégagée par les animaux. Comme le dit Olivier Namias12, personne aujourd’hui n’est prêt à mettre une vache au milieu de son salon pour faire des économies sur le chauffage.

Comme l’indique Philippe Bihouix, il s’agit de « tirer parti de toute la puissance du vernaculaire en profitant de nos connaissances d’aujourd’hui ». Il ne s’agit peut-être pas de reproduire, mais de comprendre les interactions possibles du bâtiment avec son environnement, ce que traduit l’architecture traditionnelle.

C’est également tirer leçon d’une architecture révélatrice. Avec le changement des températures par exemple, les références à l’architecture vernaculaire des pays chauds sont d’autant plus pertinentes.

C’est d’ailleurs l’essence du travail des architectes André Ravereau ou Hassan Fathy qui ont trouvé respectivement dans l’architecture vernaculaire de l’Algérie et de l’Égypte, l’inspiration d’une œuvre puissante, adaptée et frugale.

Le confort d’été Eviter que la chaleur ne rentre à l’intérieur : L’habitant est particulièrement actif dans les stratégies d’été. Le premier réflexe étant de ne pas laisser entrer la chaleur, les habitants peuvent facilement stopper la pénétration des rayons du soleil dans le bâtiment grâce à l’installation de protections solaires extérieures.

Les protections solaires extérieures peuvent être structurelles ou amovibles. Dans le premier cas, il peut s’agir de casquettes, ou de brise-soleils verticaux. Non déplaçables, ce sont des éléments architecturaux qui participent souvent à l’identité du bâtiment. Ils sont généralement réalisés en éléments pleins (béton , bois, métal) et en surimpression de l’enveloppe. On les trouve facilement sur les façades entièrement vitrées comme celles des bâtiments de bureaux.

L’intérêt des protections solaires mobiles est de pouvoir modérer leur impact en fonction de l’intensité du soleil. On trouve les panneaux coulissants, les brise-soleil orientables, le store en toile ou encore la protection escamotable.

Le panneau coulissant est généralement intégré à la façade. Il peut également être installé de manière déportée au niveau d’une terrasse, loggia ou coursive, permettant ainsi le possible cloisonnement de ces espaces extérieurs. Généralement robuste, il a l’avantage d’une stabilité au vent.

12. Olivier Namias, « Ce que le climat fait à l’architecture » in : Archiscopie 23, automne 2020.

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Le store en toile est une protection solaire manuelle efficace dépendamment de sa couleur et de la densité de son maillage. En effet, il faut prendre en compte des critères de résistances aux UV et d’étanchéité pour que le système soit efficace. De plus, sa prise au vent est importante. Il est donc généralement à utiliser pour des ouvertures restreintes. Il faut néanmoins prévoir un équipement particulièrement robuste aussi en fonction des étages.

On peut aussi mettre en place des protections escamotables qui ne se fixent que l’été ou bien des volets dont les panneaux peuvent être rabattables et ajourés. L’avantage des persiennes et de pouvoir laisser passer l’air la nuit bien que les volets soient fermés. De plus, tout comme avec le système de moucharabieh que l’on trouve facilement dans l’architecture orientale, la réduction de la surface de vide produite par le maillage accélère le passage du vent et facilite le sentiment de courant d’air en été.

Croquis des différentes protections solaire

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LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

Le brise-soleil orientable que l’on appelle aussi le store vénitien est particulièrement adaptable à la course du soleil. En effet, ses lames pivotantes selon un guidage coulissant sur les côtés permettent de filtrer la lumière en fonction des heures de la journée et sans obstruer la vue totalement.

Augmenter la vitesse de l’air pour une sensation de rafraîchissement : Le courant d’air est également un allié essentiel du rafraîchissement. En effet, en passant sur notre peau, la brise accélère la transpiration qui est déjà une réponse physiologique pour rafraîchir le corps.

1 litre de sueur évaporée correspond à 580 kilocalories13. Ainsi, en augmentant la vitesse de l’air de 1 m/s, on peut ressentir une différence de 4°C, à condition que cet air soit renouvelé14.

C’est la condition pour qu’un brasseur d’air puisse réellement améliorer le confort d’été. C’est-à-dire qu’il ne suffit pas de « mélanger » l’air de la pièce, il faut également que l’air dans lequel nous sommes et qui est aussi chauffé du simple fait de notre présence15 puisse être évacué.

Le brasseur d’air nécessite une alimentation électrique. Il reste néanmoins une solution technique à faible consommation n’énergie. En prévoyant un moteur basse consommation, avec des vitesses adaptables, il peut consommer 4 fois moins qu’un climatiseur classique. Le brasseur d’air est très largement répandu dans les pays du sud. En France, son utilisation est moins systématique.

La ventilation naturelle Principes et références La ventilation n’a pas forcément besoin de système mécanique . Le principe de ventilation naturelle a largement fait ses preuves depuis la nuit des temps.

En profitant des vents naturels, le bâtiment ne consomme aucune énergie pour renouveler l’air et le rafraîchir. Pour cela, la conception architecturale joue un rôle primordial. Après une analyse spécifique du site et de ses régimes de vent, on peut orienter les façades face aux vents dominants de façon à créer des différences de pression. En plaçant stratégiquement, des entrées et des sorties d’air, le mouvement, de l’air se crée, traversant le bâtiment horizontalement, ou verticalement.

L’intérêt des logements traversants est de pouvoir profiter d’une ventilation naturelle balayant facilement l’ensemble du logement, à condition que le passage de l’air soit possible entre les pièces via le détalonnage des portes ou autres ouvertures dans les cloisons.

Lorsque le logement est mono-orienté, la ventilation peut se faire via un phénomène de cheminée caractérisé par un mouvement créé par la différence de température entre le bas de la pièce (air plus froid) et le haut de la pièce (air plus chaud). La conception des fenêtres et ouvertures joue alors un rôle important. Le balayage de l’air n’en reste pas moins compliqué dans le fond du logement.

La mise à profit à l’échelle du bâtiment, de ces phénomènes de convection et d’aspiration n’est pas une nouveauté. Les architectures traditionnelles iranienne et égyptienne en sont les parfaits exemples.

13. ICEB : guide confort été 14. cf. entretien E. Bussolino 15. Un homme dégage entre 80 et 100 W d’énergie, soit l’équivalent d’une ampoule électrique classique.

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Coupe ventilation et Malkaf, étude d’après la maison Muhibb al-Din Muwaggi, Le Caire, 1350.

pakistanais

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Attrape-vents iraniens ...

et égyptien

Le bâdgir iranien ou « tour à vent » ouverte sur les 4 cotés pour attraper le vent dans toutes les directions.

Photo de la ville de Yazd

« Il capte le vent en hauteur, là où il est fort et propre par une disposition spéciale de la pièce dont la partie centrale très haute laisse échapper l’air chaud au sommet »16.

Ventiler le logement collectif : «Et pourquoi pas l’ouverture des fenêtres ?»17 . Expérimentations pour un système frugal.

«Il y a quelques chose que je déteste c’est l’idée que le matin quand tu vas dans ta salle de bain, tu vas dans un placard. Quand tu vas dans tes toilettes, tu vas dans un placard.

Et donc les deux premières pièces de ta matinée, c’est des placards. Quel signe de vie heureuse donnes-tu ?»18

16. Construire avec le peuple, H. Fathy. p.96 17. ICEB CAFE, «Pour une ventilation naturelle frugale», Visioconférence ICEB, janv. 2021.

18.Cf. Entretien Philippe Madec.

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Aujourd’hui, les principes vernaculaires sont repris pour un usage contemporain. Et l’inspiration du vernaculaire, couplée aux savoirs modernes permets d’adapter les systèmes pour une démarche toujours plus frugale. C’est le cas du bureau d’étude en développement durable Tribu dirigée par Alain Bornarel, qui continu d’expérimenter différentes solutions de ventilations naturelles notamment à travers l’évolution de 3 projets menés avec Philippe Madec et son atelier. « L’histoire commence en 2007 à Saint-Nazaire » avec l’opération de 95 logements collectifs sociaux et privés (livrés en 2017). Le système est simple : c’est une ventilation naturelle assistée contrôlée par tirage thermique à l’aide de cheminées de 3,66 m installées en toiture.

L’air rentre par des bouches d’entrée dans les façades, dans les pièces principales telles que le demande la réglementation. Un balayage se fait à l’intérieur du logement, c’est-à-dire jusque dans les pièces humides, et l’air est récupéré depuis les pièces humides et monte jusque-là toiture. Il y a une cheminée par logement et à l’intérieur de la cheminée, il y a un registre qui s’ouvre et

Un bouton d’augmentation du tirage permet d’activer les tourelles et de faciliter la ventilation au-dessus du plan de cuisson. En partie basse des tourelles, un hublot vitré « attise » le tirage thermique. En partie intermédiaire, une girouette oriente vers le vent un bec d’amenée d’air et en partie supérieure, une tourelle statique achève le tirage.

Logements à Saint-Nazaire

VNAC en logement : premiers bilans

çaLes marche, tourelles de ventilation mais quelle usine à gaz pour respecter toute la réglementation 96 logements square Delzieux à Saint Nazaire maître d’ouvrage CISN architecte atelier philippe madec bet dd tribu et pourquoi pas l’ouverture des fenêtres ?

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«On a même été jusque prévoir les 2 vitesses en cuisine avec un bouton que manipule l’utilisateur pour passer de la petite à la grande vitesse, comme le demande la réglementation. On y est arrivé, mais c’est très très lourd en logement. C’est beaucoup moins lourd en tertiaire. C’est dû à la réglementation thermique. Ça marche, mais quelle usine à gaz pour respecter la totalité de la réglementation.»19 Face à une certaine complexité du système, l’équipe décide de trouver une autre solution, plus simple : ouvrir les fenêtres. Ce principe se concrétise dans un premier temps à travers la réhabilitation d’une écurie en logement individuel à Plouguin (29) entre 2014 à 2016. Pour le renouvellement de l’air lié à l’usage du bâtiment, l’équipe mise totalement sur la responsabilité des habitants qui sont présents. « Ce sont eux qui décident de la nécessité et de la durée de l’ouverture, effectuent un arbitrage nécessaire entre les enjeux d’énergie, de qualité de l’air et de confort »20.

Cette ventilation est néanmoins possible grâce à une conception réfléchie et à la mise en place de dispositifs architecturaux pertinents. Le premier principe repose sur une double exigence : toutes les pièces ont une fenêtre en façade et toutes ces pièces sont ventilées par une bouche d’aération contrôlable, même quand les fenêtres sont fermées.

Le second dispositif doit permettre le passage de l’air à travers l’espace comme à travers les murs.

Ainsi, on trouve des baies libres à l’intérieur de la maison, des baies sur les façades opposées, mais également des ouvertures en toitures, facilitant le tirage lorsque le vent est faible.

L’attention doit également être portée aux détails. Les portes des chambres sont toute hauteur, sans imposte. Évitant ainsi un effet de cantonnement qui gênerait les mouvements de l’air.

Coupes principe de ventilation de l’Écurie et photos des portes toute hauteur permettant le passage d’air.

19.Ibid.

20. P. Madec, A. Bornarel, « L’écurie. Manifeste pour une architecture frugale ».

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qui se ferme en fonction des mesures de la vitesse d’air, pour respecter les débits réglementaires selon la typologie des logements.

Après avoir expérimenté cette solution en Bretagne, l’Atelier Philippe Madec et Tribu décident de l’appliquer à l’échelle d’un ensemble d’une centaine de logements sociaux à Bordeaux, sous l’égide de l’Office Public bordelais Aquitanis.

Pas de cheminée et de tirage thermique, mais des logements conçus de façon à ce les habitants contrôlent directement les flux d’air de leur logement, tout en respectant la réglementation (vitesse de l’air, débit, etc ..). Reprenant les prérequis de la ventilation naturelle (l’orientation, l’accès à la façade des pièces humides, traversées de l’air dans le logement et depuis l’extérieur), Tribu base la ventilation sur deux systèmes adaptés aux différents types de pollution.

Vis-à-vis de la pollution du bâti, qui est une pollution constante, un flux d’air continu est permis sans aucune régulation, mais il a fallu néanmoins trouver des astuces pour inciter les flux, et peser sur la direction de ces flux. Par exemple, avoir une entrée d’air plutôt en position basse et une sortie plutôt en position haute. C’est définir des zonages par le détalonnage des portes qui va permettre aux flux d’air d’aller ou non dans telle zone. Enfin, la dernière astuce est d’avoir un clapet antiretour sur certaines bouches pour qu’elles ne fassent passer l’air que dans un sens selon leur position.

d’abord de l’architecture des logements traversants des logements débitants

des occultations poreuses des pièces humides en façade Les logements sont traversants et chaque pièce à un accès à la façade. L’air passe grâce à des occultations poreuses

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Zoning et balayage grâce à des entrées d’air et pourquoi pas l’ouverture des fenêtres ? basses et des sorties hautes et clapets antiretour des bouches.

u p c p

Confort d’hiver Dispositifs : Les dispositifs les plus low-tech pour se chauffer sont les dispositifs passifs comme le mur trombe et la véranda.

Le mur trombe consiste à placer une masse qui emmagasine la chaleur derrière une paroi de verre et la restitue la nuit selon un déphasage propre au matériau du mur. Néanmoins, si le décalage temporel est trop important, l’énergie risque se dissiper au moment où on n’en a pas besoin. Il faut étudier finement le déphasage du matériaux avec lequel est fait le mur.

Concernant les systèmes « techniques » de chauffe, Héloïse Pelen, ingénieur en thermique, énergétique et environnement explique que le poele de masse serait le système le plus low-tech. Dans ce dispositif le feu ne chauffe pas par rayonnement direct. Le foyer n’est plus ouvert que pour la réactivation chaque matin. L’intégralité de la chaleur est absorbée par la masse de la maçonnerie et lentement restituée à l’espace qui l’environne. « C’est low-tech, même à construire. Il y a des guides pour le construire soi-même en open source. (…) Ce n’est pas compliqué à approvisionner, car tu peux mettre tout ce que tu veux comme bois. Tu n’as pas besoin d’avoir des granulés spécifiques comme certains poeles pour le coup plus « high tech .»21

Peut-on éviter les systèmes ?

Tribu et l’Atelier Philippe Madec ont également annoncer expérimenter un chauffage frugal pour les logements collectifs du projet Paul Boncour. Leur objectif était qu’il n’y ait aucun système comme pour le projet de l’Ecurie (uniquement un poele à bois et un sèche-serviette). En revanche, il est plus compliqué de garantir un confort toute l’année uniquement avec des solutions passives. Un système devra donc être installé. Et d’après leur retour d’expérience de leur projet d’écovillage des Noés à Val-de-Reuil, la machine ne servira pas beaucoup tant le projet est pensé pour optimiser les apports solaires : orientation, solarisation, isolation, inertie, usage.

21. cf. Entretien H. Pelen 25

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Pour évacuer l’air vicié lié à l’usage du logement, il faut ouvrir les fenêtres. Le bureau d’étude établit alors un certain nombre de scénarios qui permettent de se rendre compte du débit d’air en fonction du nombre et de la position des fenêtres, des saisons ainsi que la durée et le degré d’ouverture nécessaire pour un bon renouvellement. C’est l’occupant qui va finalement décider de ces scénarios avec une petite aide qui est une sonde CO2. La sonde permet d’indiquer l’état de l’air intérieur à l’aide de voyants vert (air OK), orange (attention) et rouge (air vicié).

Le projet n’étant pas encore terminé, le groupement n’a pas encore de retour d’expérience sur ce système de ventilation et se base sur des calculs théoriques. Le projet a fait l’objet d’une dérogation réglementaire au titre de l’expérimentation. Le système sera suivi par le Cerema ( Centre d’étude et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) après la livraison.

«Si on réussit à négocier avec l’État pour la ventilation, pour le chauffage s’est plus compliqué. (...) Si on réussit à le faire en Normandie, evidemment qu’à Bordeaux ça va marcher et qu’on n’a pas besoin de chauffage. Mais à Val-de-Reuil, on avait quand même installé des radiateurs avec un chauffage urbain au bois, avec une grande chaudière bois urbaine. On n’a pas encore trouvé la façon de faire accepter qu’on ne devrait pas en avoir besoin. Et donc pour compenser ça, il nous demande d’installer de la technique.» 22

22. P. Madec à propos de l’absence de système de chauffage pour le projet Paul Boncour à Bordeaux 26

I. LA CONSOMMATION DES SURFACES

La consommation énergétique n’est pas uniquement liée à la performance et l’efficacité du bâtiment.

Elle dépend aussi et avant tout, de la quantité de surfaces et volumes à chauffer, entretenir, rafraichir, car tout mètre carré construit , aussi vertueux soit-il en matière de performance et d’empreinte carbone ne compensera pas les dépenses d’énergie nécessaire à sa mise en œuvre s’il a été édifié inutilement. Il convient donc de réfléchir au sens donné aux surfaces et à leurs usages.

Nombre de m2 par habitant Croissance et disparité : En 2019, en France métropolitaine, sur les 36,1 millions de logements français, 82 % sont des résidences principales1, 10 % sont des résidences secondaires ou occasionnelles et 8 % sont des logements vacants. Depuis 2006, la vacance n’a cessé de croître dans l’ensemble des unités urbaines (moins à Paris) tandis que le taux de construction neuve reste constant depuis les années 80 (+ 1,1 %/an).

Qu’il soit principal, secondaire ou temporaire, le logement individuel est toujours majoritaire. En 2019, il représente 56 % des logements. Néanmoins, cette tendance est amenée à diminuer, car depuis 2013 le nombre de logements collectifs achevés dans l’année est supérieur à celui de logements individuels.

Entre 1984 et 2013, la surface moyenne du logement individuel n’a cessé de croître, passant de 96,4 m² à 112,2 m². La surface moyenne d’un logement collectif quant à elle, n’a pas vraiment bougé.

Au contraire, elle a légèrement diminué, mais l’INSEE explique ce phénomène en partie à cause de la législation plus contraignante en matière de déclaration de surfaces dans les années 2000, et qui aurait permis aux ménages d’avoir une connaissance plus précise que par le passé du métrage de leur logement.

Malgré une surface de plus en plus grande, le nombre moyen de personnes dans un logement individuel a légèrement diminué2. Faisant ainsi passer d’une moyenne de 33,1 m²/personne en 1984 à 45 m2/personne en 2013. Soit une augmentation de presque 12 m²/personne en presque 30 ans.

1.

2.

58 % des ménages sont propriétaires de leur résidence principale.

En 1984, le nombre moyen de personnes par logement individuel était de 2,9. En 2013, il est de 2,5 personnes.

27

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PARTIE II. VERS UN MODE DE VIE PLUS FRUGAL :

Pour le logement collectif, le nombre de personnes par ménage a également diminué de 2,4 personnes par logement à 1,9. Ce qui équivaut à une moyenne de 27,3 m2/personne en 1984 et 32,5 m2/personne en 2013.

La baisse du nombre de personnes par logement s’explique tout d’abord par le vieillissement de la population. C’est-à-dire que les parents restent généralement dans leur logement même une fois les enfants partis ou lorsqu’un des conjoints décède. Cette baisse est ensuite liée à la multiplication des ruptures conjugales entrainant de fait, la « décohabitation » des ménages lors des divorces et séparations.

Mais en regardant de plus près, ces moyennes ne sont pas les mêmes partout et pour tous. Il existe en effet des disparités en fonction de l’âge et du statut de l’habitant, mais aussi en fonction de l’environnement urbain. Par exemple, un propriétaire vit dans un logement plus grand qu’un locataire. Il est généralement plus âgé et habite majoritairement un logement individuel. Aussi, on peut noter que la surface par habitant varie également en fonction de la dimension de l’unité urbaine : plus la taille de l’agglomération diminue, plus la surface par personne augmente. En 2013, la surface moyenne par personne en logement individuel est de 47 m² dans une commune rurale contre 31 m² à Paris par exemple.

Surface moyenne du logement en fonction du type de logement et du statut

Surface moyenne d’un logement individuel en fonction de l’âge

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Surface moyenne d’un logement collectif en fonction de l’âge

Surface moyenne par personne en fonction de la taille de l’agglomération

Logement individuel : 47 m2/pers.

Logement collectif : 39 m2/pers

Logement individuel : 45 m2/pers.

Logement collectif : 33 m2/pers

Logement individuel : 46 m2/pers.

Logement collectif : 36 m2/pers

Logement individuel : 37 m2/pers.

Logement collectif : 29 m2/pers

29

m 2 : autant de surface à entretenir ? Retour sur l’enquête Phébus et la consommation énergétique des ménages

En 2017, une étude THEMA est publiée sur « Les ménages et la consommation d’énergie »3. Cette étude s’appuie sur l’ enquête « Performances de l’Habitat, Équipements, Besoins et Usages » (Phébus) menée par le service statistique du ministère chargé de l’énergie et datant de 2014. Parmi les thématiques abordées, celle de la précarité énergétique occupe une place privilégiée. L’étude met en évidence les impacts des principales variables explicatives sur la consommation d’énergie : le climat, la surface, le type de logement, le prix de l’énergie, la température de chauffe, le nombre de personnes, le revenu, l’âge de la personne référente.

Dans le cadre de ce mémoire, l’analyse spécifique de certains résultats permet de mettre en évidence l’importance des comportements sur la consommation énergétique du logement.

Les performances du logement et la consommation conventionnelle En effet, l’étude étudie la consommation énergétique sous plusieurs angles. Un volet est consacré à l’analyse des résidences et de leurs occupants au travers de l’étiquette énergie conventionnelle du diagnostic de performance énergétique (DPE).

L’étiquette énergie évalue la quantité d’énergie primaire nécessaire au chauffage du logement et de l’eau chaude sanitaire par mètre carré de surface habitable. L’énergie est donc mesurée en kWhep/(m2.an). Cette méthode de calcul est dite « conventionelle », car seules les caractéristiques du logement sont prises en compte : chauffage et ECS. Le refroidissement et la production d’électricité sont considérés comme négligeables1.

L’énergie primaire est l’énergie avant transformation.

1. Seulement 5 % des logements étudiés sont concernés par la climatisation. Seulement 1 % des logements étudiés sont concernés par la production d’électricité.

Dans ce chapitre, il est mis en évidence que les logements les plus performants sont les plus récents4, mais aussi les plus grands. En effet, analysée exclusivement sous l’angle du DPE, on constate que la surface influe positivement sur l’étiquette énergie. Tandis que lorsqu’on analyse la consommation énergétique à travers les factures des ménages, on constate que les logements de grandes surfaces consomment finalement beaucoup plus.

3. Les ménages et la consommation d’énergie, Service de l’observation et des statistiques (SoeS), mars 2017.

4. Ceci étant dû à la succession de réglementation thermique imposant des seuils de consommation maximale de plus en plus faibles dans les bâtiments neufs.

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Répartition de la consommation par énergie, selon l’étiquette

Étant donné qu’ils consomment plus de chauffage, les logements de surface importante privilégient d’autres énergies que l’électricité pour le chauffage.

L’électricité pèse beaucoup dans la balance des calculs des DPE qui rappelons-le, se base sur la consommation d’énergie primaire. Pour 1kWh d’électricité inscrite au compteur (énergie finale), l’étiquette énergie compte 2,58 kWh d’énergie primaire5. Pour les autres énergies (Gaz, bois, autres ..), l’énergie primaire est considérée comme égale à l’énergie finale. La consommation conventionnelle est en moyenne d’autant plus élevée que l’électricité est utilisée pour le chauffage ou l’eau chaude sanitaire.

Influence des caractéristiques du logement sur la consommation : En analysant la consommation d’après les factures énergétiques6, on constate que parmi les caractéristiques techniques du logement les plus influentes, c’est la surface qui pèse le plus fortement sur le niveau de consommation. Un logement de 150 m² ou plus a une consommation près de deux fois plus élevée que celle d’un logement de 70 m² ou moins. On peut également noter qu’un logement individuel consomme près de 35 % d’énergie en plus qu’un logement collectif à caractéristiques comparables.

La localisation du logement influe également sur sa consommation énergétique. Un logement en zone climatique H3 (sud-est de la France) consomme 24 % de moins qu’un logement en zone H1 (nord et est de la France).

5. 1,58 kWh (61%) correspondant à l’énergie perdue lors de la production, de l’acheminement ou de déperditions dans le système de distribution. Dans une autre étude du Commissariat général au développement durable sur le « Bilan énergétique de la France en 2019 », les déperditions électriques sont évaluées à 68 %.

6. Prise en compte de l’ensemble des usages liés au logement : équipements électriques, cuisson, eau chaude sanitaire et chauffage. Cette consommation est mesurée en énergie finale.

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LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

Répartition des étiquette et consommation moyenne, selon surface habitable

Carte des zones climatique

De façon moins évidente, la taille de l’agglomération peut également influer. L’étude indique que plus la densité de population est grande plus le niveau de consommation décroît 7 . Cela s’explique d’une part par la mitoyenneté beaucoup plus récurrente qui diminue les déperditions thermiques, mais aussi par l’effet « îlot de chaleur » spécifique au milieu urbain.

Influence du comportement habitants sur la consommation :

des

Le comportement d’un ménage est tout d’abord et en partie lié à ses caractéristiques sociodémographiques. La consommation est différente en fonction de l’âge et de la taille du ménage. Par exemple, le passage à la retraite peut être synonyme d’une augmentation de la consommation étant donné que la personne est plus présente dans son logement avec peut-être un besoin physiologique en chaleur plus important. Il en est de même avec l’arrivée d’un enfant. Ces étapes de la vie influent sur la consommation à travers la durée d’occupation du logement.

L’impact du comportement est également lisible lorsqu’il y a une recherche d’optimisation de la part des habitants. Baisser ou couper son chauffage lors d’une absence, courte ou longue, entraîne des réductions de consommation de 6 à 7 %. Chauffer son logement à moins de 21°C en hiver peut réduire la consommation de 9 %8.

Mais les Français ne semblent pas avoir pris cette habitude. Trois ménages sur quatre en moyenne ont la possibilité de régler la température dans le logement (présence de thermostat, programmable ou non). Cette capacité est encore une fois, liée au type d’habitat et au statut de leur occupant : les propriétaires (80,8%) par exemple, habitant très majoritairement en logement individuel sont plus aptes à régler la température que les locataires (66,5%) qui logent plus souvent dans du collectif.

L’enquête demande aux ménages s’ils ont l’hiver précédent, eu l’habitude de baisser périodiquement la température ou d’éteindre le chauffage de leur logement : 26,8 % des ménages indiquent l’avoir fait à la fois le jour et la nuit, 11,9 % uniquement en journée et 4,6 % la nuit seulement. Ce qui signifie que 56 % des ménages n’ont pas eu ce réflexe, dont 25 %, car ils ne le pouvaient pas.

Il est intéressant de noter ici que ce réflexe diffère selon l’âge de la personne : plus la personne est jeune et plus elle intervient pour baisser ou éteindre le chauffage du logement. On peut néanmoins se demander si cette attitude découle d’une prise de conscience sur le long terme ou d’une contrainte budgétaire amenée à évoluer lors de la naissance d’un enfant, selon les revenus ou en fonction du

7. Le niveau de consommation d’un logement d’une unité urbaine de moins de 10 000 habitants consomme 15 % de plus qu’un logement dans une unité urbaine comprise entre 10 000 et 100 000 habitants qui lui-même consomme 7 % de plus qu’un logement dans une unité urbaine de 100 000 habitants ou plus.

8. À noter que les résultats de l’enquête indiquent que couper le chauffage dans les pièces de nuit à certains moments de la journée ou lorsqu’on aère le logement n’a pas d’impact significatif sur le niveau de consommation du logement.

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« C’est toujours une question d’argent. Lorsqu’on a mis en place les compteurs individuels, il y en a plus d’un qui a râlé. Ils se retrouvaient avec une facture beaucoup plus élevée qu’avant ! Cela dit c’est sûr que là, on fait plus attention à sa consommation. » 9 Dans son guide « Être écocitoyen à la maison »10 , l’Ademe conseille une température de 19°C dans les pièces à vivre et de 16°C dans les chambres. Seulement 33,9 % des ménages respectent cette consigne et la majorité de ces ménages ont un chauffage individuel. Selon l’Ademe, un degré en plus correspond à une augmentation de la consommation énergétique de 5 à 7 %11.

En ce qui concerne la ventilation, la majorité des logements de l’étude (57,8%) sont aérés plus de 15 minutes tous les jours ou presque lors de période de chauffe. Néanmoins, ce comportement dépend du système de chauffage du logement et de la main mise de l’habitant sur le réglage de la température.

On constate en effet, que sans système de réglage du chauffage, aérer est plus systématique (64,9%).

La première raison est qu’en logement avec chauffage collectif comme c’est principalement le cas dans l’enquête, le règlement du chauffage est confondu dans les charges et déconnecterait la pratique d’aération du montant de la facture. La seconde raison serait que la température de chauffage collectif peut être jugée trop élevée et dans ce cas, l’aération devient un moyen de régulation pour diminuer la température intérieure du logement.

En conclusion, les analyses de cette enquête démontrent d’une part que les habitants sont plus vigilants et plus aptes à adopter des comportements d’optimisation lorsque le contrôle de la température leur est propre.

9. Témoignage de Mr Delmas, propriétaire en copropriété, après être passé d’un chauffage collectif à des compteurs individuels.

10. Être écocitoyen à la maison : toutes les solutions pour un logement économe et facile à vivre, ADEME, éditions 2016.

11. L’analyse des données EDF par Reynaud en 2014 indique d’un degré supplémentaire au-delà de 23°C correspond à une surconsommation de 11 % et un degré inférieur à 19°C correspond à une économie de 11 % d’énergie.

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LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

Plus la personne est jeune, plus elle intervient pour baisser ou éteindre le chauffage

temps passé au domicile comme expliqué précédemment.

Le type de chauffage a également une influence sur ce comportement. 60,8 % de ceux dont le chauffage est collectif ne baissent jamais le chauffage alors même qu’ils ont la possibilité de régler la température ( ce taux n’est que de 40,5 % pour ceux qui sont équipés d’un chauffage individuel ). La gestion collective pourrait donc favoriser la déresponsabilisation.

Le deuxième aspect essentiel de cette étude réside dans l’observation de l’impact prépondérant des usages réels sur la consommation globale du logement et notamment l’écart de cet impact par rapport aux usages théoriques sur lesquels se base le classement énergétique d’un bâtiment.

Performance et intensité d’usage : Les divergences observées entre les consommations conventionnelles et facturées caractérisent cet « effet rebond » précédemment évoqué12. L’étude confirme effectivement que l’amélioration de l’étiquette conventionnelle du DPE d’un logement (lors de travaux de rénovation) a un effet réel moindre que celui attendu. Les logements A-B-C devraient avoir une consommation inférieure de 65 % à celle des F-G. Pourtant, d’après les résultats de l’enquête, ces logements ne consomment que 13 % de moins. On estime que pour une baisse de consommation annoncée par l’étiquette DPE de 10 %, l’« intensité d’utilisation » du logement augmente de 5 % et la facture baisse de 5 %.

L’« intensité d’utilisation » caractérise le ratio entre les consommations réelles et conventionnelles.

Un ratio supérieur à 1 indique que le logement est utilisé de façon intensive. S’il est inférieur à 1, cela indique qu’il est utilisé de façon économe. Si le ratio est de 1, le logement est utilisé selon le scénario conventionnel prévu dans le calcul DPE.

Ratio d’intensité d’utilisation du DPE selon l’étiquette, pour les logements avec chauffage individuel et ECS au gaz

À la lecture de ce graphique, on constate que plus le logement est de qualité du point de vue énergétique, plus l’intensité d’usage est forte. Les ménages auraient donc tendance à se contraindre fortement lorsqu’ils sont dans des « passoires thermiques » et à se chauffer sans limites lorsqu’ils sont dans des logements performants.

Une sobriété nécessaire ? Le scénario Négawatt : L’effet rebond ne remet pas en cause la nécessité de poursuivre les efforts en matière d’efficacité énergétique. Il montre seulement que ces gains ne suffisent pas à eux seuls à réduire la consommation globale d’énergie. Pour être opérante, d’aucuns diront que l’efficacité doit impérativement être couplée à la sobriété énergétique13.

12. cf. Partie 1 - I p. 15 13. Le Labo de l’Économie sociale et solidaire, « Sobriété énergétique », dans Transition énergétique citoyenne, 2018, p.19.

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Pour le secteur du bâtiment en particulier, le scénario Negawatt fait de la rénovation énergétique une priorité, mais pas seulement. Il souhaite également favoriser de nouvelles pratiques de l’habitat pour augmenter légèrement le nombre de personnes par logement (colocation étudiant/senior par exemple).

Il prévoit une réduction de la part de maisons individuelles dans la construction neuve et une diminution des surfaces neuves au profit de la réhabilitation de bâtiments existants. Enfin, il prévoit l’élimination du gaspillage notamment dans la consommation d’électricité.

II. LE SENS DES SURFACES : QUALITÉ D’USAGE ET PLAISIR D’HABITER

Concevoir l’espace avec le temps « Un des premiers vecteurs de frugalité, c’est la frugalité de l’espace. C’est cette capacité à interroger la chronotopie de l’usage des espaces. L’idée c’est qu’on crée un espace, on a envie qu’il soit occupé H24. Et qu’il ne soit pas inactif, 90 % de son temps. » E. Bussolino Je pense qu’en tant que concepteurs, il faut questionner le sens des surfaces amenées à être construites. Dans une recherche d’économie, en interrogeant la quantité, on pense mutualisation, réversibilité, adaptabilité : rendre plus d’usages possibles dans un même bâtiment, un même espace.

L’espace n’a-t-il qu’une destination ? Est-il utilisé tous les jours, toutes les heures de la même façon?

Est-il immuable ? Eric Bussolino évoque une anecdote assez parlante :

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LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

Logo de l’association

C’est le cas de l’association Négawatt qui inscrit depuis les années 2000, la sobriété comme premier axe de la transition énergétique. Elle établit un scénario, une ligne de conduite, pour respecter les engagements de la France vis-à-vis du climat (contenir le réchauffement en dessous des 2°C, diviser par 4 les émissions de GES, diviser par 2 la consommation d’énergie finale d’ici 2050). Ce scénario se base sur une démarche consistant à : - prioriser les besoins essentiels dans les usages par des actions de sobriété.

- diminuer la quantité d’énergie nécessaire à la satisfaction d’un même besoin grâce à l’efficacité énergétique.

- privilégier les énergies renouvelables.

« Je me souviens d’une étude qui avait été faite de lancer de nouvelles opérations de salles de cours parce qu’ils manquaient de place et en fait en faisant un audit assez poussé, on s’est rendu compte qu’il y avait 90 % des salles, qui n’étaient utilisées que 50 % du temps pour des raisons de programmation, etc.. Et donc en optimisant, on pouvait presque ne pas construire de nouveau bâtiment. » E. Bussolino.

La réversibilité de l’espace revient à penser l’espace avec le temps. Ces logiques de chronotopies sont un modèle d’évolutivité. Dans le logement, ces évolutions sont dictées par 2 conditions : le cycle de vie et le climat. L’appréciation des cycles de vie revient à penser une diversité d’usage. Tandis que la prise en compte du climat revient à penser les conditions de confort intérieur en fonction de l’environnement extérieur14. Ces deux considérations sont complémentaires et indissociables. Elles définissent ce que l’on pourrait appeler une «qualité d’usage». Plus l’espace présente une grande qualité d’usage, plus les usagers prendront plaisir à l’occuper, et plus sa création sera justifiée.

L’ Évolutivité pour répondre à différents cycles de vie : Les structures familiales varient dans l’espace et dans le temps. Aujourd’hui, le schéma « classique » de la famille ne représente plus que 45 % des ménages. Les foyers se fragmentent lors de divorce, de jeunes adultes reviennent à la maison obligeant une « re-cohabitation » avec les parents, les familles se recomposent, etc. … À cela, s’ajoute maintenant la question du travail qui dans le contexte actuel, s’immisce dans l’espace de vie privée par la démocratisation du télétravail en réponse à la crise sanitaire de 2020.

Pour Patrick Bouchain, rendre l’architecture réversible est une nécessité. Le logement social construit sur l’unique modèle du couple hétérosexuel actif avec 2 enfants n’est pas un modèle intemporel.

L’évolutivité des logements, et des bâtiments doit permettre à l’architecture de répondre le plus globalement possible à des situations diverses et variables. La mutualisation de certaines fonctions, usages et espaces comme la laverie commune ou la chambre d’amis dans le collectif permet de rationaliser les surfaces bâties de chacun des logements sans pour autant perdre des fonctions.

Le principe de cohabitation qui mutualise différentes fonctions et usages d’habiter, peut également s’appliquer de façon intergénérationnelle pour que les rythmes de chacun se complètent. Ainsi, par l’échange et la collaboration, la mutualisation suscite une vraie cohésion sociale. « La forme de l’architecture n’est pas responsable. Changer la forme est inutile tant qu’il n’y a pas d’usage libre ! La première qualité en architecture, c’est la surface et le volume ; la deuxième qualité, c’est la lumière ; la troisième, l’acoustique ; et ce qui fait la beauté de l’architecture, c’est l’harmonie des gens qui l’habitent. Alors seulement l’architecture prend forme. Et l’harmonie c’est le bonheur d’y habiter. » P. Bouchain15

14. Aujourd’hui, étant donné l’importance des intersaisons et des dérèglements saisonniers, il convient plutôt de parler de chaud et de froid plutôt que d’hiver et d’été.

15. Covid #7 | Avec et pour les habitants (https_topophile.net) 36

Du point de vue du confort thermique, la qualité d’espace se mesure à sa capacité d’offrir des conditions de vie agréable en fonction du climat extérieur.

De la même façon que certains d’entre nous ont pris l’habitude de fuir la ville vers la campagne lorsqu’il fait trop chaud, le logement (dépendamment de sa conception) peut permettre aux habitants de migrer au sein d’un même logement. C’est ce qu’on pourrait appeler le nomadisme intérieur. Gilles Perraudin évoque ce principe dans plusieurs de ses projets d’habitat individuel.

Projet à Ceyzérieu par Gilles Perraudin

Tout d’abord dans un de ses premiers projets de maison solaire à Ceyzérieu qu’il considère comme un manifeste des principes qu’il développera tout au long de sa carrière, il propose d’emboîter les espaces les uns dans les autres comme des poupées russes. Ce dispositif permet de distinguer un espace central qui concentre les usages nécessaires en hiver. C’est un espace minimum de 40 m² avec une forte inertie. Devant, un grand vitrage permet à la masse de ce noyau de capter la chaleur selon le principe du mur trombe. Seul ce noyau est chauffé. Les chambres sont des espaces de lits clos dans lesquelles on se réfugie les nuits d’hiver et qui ne sont pas sans rappeler l’architecture vernaculaire bretonne. Cet espace est enveloppé par une deuxième carapace qui permet le développement des espaces diurnes. À cela s’ajoutent des espaces tampons à l’est, l’ouest et au nord qui protègent l’espace central des vents et accueillent différents usages en fonction des saisons . En été, des dispositifs d’ombrage protègent la façade sud avec des pergolas et de grandes toiles en tissu étirable comme des stores. Ainsi, l’espace de vie passe de 40 m² en hiver à jusqu’ à 100 m² lorsque l’ensemble des espaces mêmes extérieurs, protégés et abrités sont utilisables.

Tous ces principes se réfèrent directement à l’architecture vernaculaire qui est guidée par un souci fondamental d’économie et qui donne à chaque espace un rôle sur le plan climatique. Dans l’architecture traditionnelle, l’espace principal est celui qui nécessite le plus de chaleur en hiver, il est donc séparé de l’extérieur par des espaces intermédiaires qui le protègent en préchauffant l’air autour de l’espace de vie. Ainsi, la salle principale de vie chauffée est toujours entourée des chambres à l’est ou à l’ouest. Au nord, on trouve les pièces annexes, servantes, comme la souillarde (espace de lavage pour la vaisselle, le linge, etc..) qui protège également l’espace central. Au sud, la pergola permet de faire pousser une végétation qui protège du soleil en été, mais laisse passer la lumière en hiver.

L’espace ombragé par la végétation permet de prolonger l’espace de l’habitat à l’extérieur.

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LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

Distension de l’espace de vie selon les saisons : le nomadisme intérieur.

Comparaison du plan RDC de la maison de Ceyzérieu avec un plan d’une ferme traditionnelle et photo de la ferme

La disposition des pièces en plan n’est pas la seule manière de tirer parti des microclimats créés par l’architecture. Les habitants des pays chauds pratiquent depuis toujours le nomadisme à l’échelle de leur logement. C’est le cas de la casbah d’Alger où les corps de bâtiments généralement à 2 étages renferment un patio central dont le microclimat intérieur rythme la vie des habitants. En été, la vie quotidienne se passe dans les pièces intérieures du rez-de-jardin ombragé. Et la nuit, la chaleur accumulée par la masse thermique du bâtiment est restituée profitant aux habitants qui montent sur les toits-terrasses pour continuer leur activité interrompue lors des fortes chaleurs du jour.

Alors que le projet de Ceyzérieu n’a jamais été construit, l’Atelier de Gilles Perraudin livre en 2019 à Montélimar, une maison qui traduit plus que jamais ses engagements. Il présente ce projet comme « une critique du confort architectural contemporain standardisé et homogène toute l’année »16. Ici, vivre sa maison, c’est vivre au rythme des saisons. 96 m² aménagés à 1,70 m du sol, zone inondable oblige. L’été, le rez-de-jardin et la terrasse doublent les surfaces habitables. Mais c’est Nicolas, le propriétaire qui en parle encore le mieux : «L’hiver nous nous rapprochons du poêle à bois, situé entre les deux chambres qu’il réchauffe, au printemps et à l’automne, nous sommes dans la grande pièce de vie – cuisine, salon, salle à manger – avec la baie vitrée et la terrasse tout du long. L’été, nous

16. BERTHIER, Stéphane, «Architectures post-carbone», In D’Architecture n°276, nov.2019, p.60.

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Photos de la maison de Montélimar par Gilles Peraudin

L’espace tampon, la serre et le jardin d’hiver : Parmi les architectes qui ont fait du climat un outil de conception, on trouve également le duo Anne Lacaton et JeanPhilippe Vassal pour qui l’espace libre et son appropriation par l’habitant sont uns des fondamentaux de l’architecture. La liberté d’usage est un moyen de rendre l’architecture réversible et est également un modèle d’évolutivité dans le temps, au fil des saisons et des usages. À travers de nombreux projets, la concrétisation de leur démarche se traduit par l’adjonction d’un espace auxiliaire similaire à une serre ou un jardin d’hiver. D’aucuns diront que c’est un espace supplémentaire à chauffer parfois difficilement, de la surface superflue. Le travail de ces deux Transformation de la Tour Bois le Prêtre par Lacaton & Vassal architectes souligne un aspect quelque peu paradoxale entre confort d’usage et confort thermique. En effet, si la qualité d’usage est bien réelle, n’est-elle pas ici au détriment d’un confort thermique ou d’une consommation supplémentaire17

17.Certains habitants se plaignent d’une difficulté de chauffe de ces grands espaces en hiver, engendrant une consommation supplémentaire de chauffage.

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sommes en bas. Ce nomadisme interne, s’il est source d’économie d’énergie, est aussi un déplacement du corps dans l’espace vers le lieu le plus propice. Notre comportement s’est adapté à celui de la maison et nous a permis de redéfinir la notion de confort. Nous ne voulons pas vivre à température constante, 20° été comme hiver, il faut accepter les variations» Nicolas, le propriétaire.

? Il n’en reste pas moins que la création de ces espaces tampons permet une relation différente à l’extérieur, et ce rapport pourrait influencer les comportements.18 Lorsque celle-ci est bien conçue, la serre permet un ratio entre l’effort et l’effet très efficace. En plus d’une diversité d’usage, la serre tire profit des ressources naturelles gratuites pour gagner en confort. D’une part, elle amortit l’amplitude des températures extérieures et d’une autre part, elle capte les calories du rayonnement solaire. Le rendement d’une serre peut couvrir jusqu’à 20 à 40 % du besoin de chauffage en hiver et contribue au rafraîchissement l’été. La serre fonctionne de la même façon qu’un mur trombe sauf que la lame d’air est agrandie afin d’y accueillir un espace de vie.

La performance de la serre dépend principalement du comportement des habitants. En effet, si celle-ci n’est pas automatisée, son fonctionnement demande une implication de l’usager pour fermer et ouvrir ses portes et fenêtres selon les températures extérieures. L’habitant est maître de ses conditions de confort.

« Il faut vraiment réfléchir à comment l’utilisateur sera bien avec le minimum d’effort énergétique en hiver et comment il sera bien avec le minimum d’effort énergétique en été.

Et pour cette réflexion, le sujet des espaces tampons entre intérieur et extérieur est très pertinent. (...) Lors de nos recherches, un projet nous a paru particulièrement intéressant.

C’est une ferme de 600 m² avec le toit écroulé. Les gens n’avaient pas les sous pour rénover 600 m². Ils ont conservé des murs à l’intérieur qui est devenu l’extérieur de la maison et l’espace entre le nouveau et ancien mur extérieur devient un espace abrité du soleil, avec des plantes, protégé du vent. Dans ce genre d’espace, tu peux très bien avoir un vitrage qui permet de capter les calories en hiver, de tempérer un peu et l’été tu ouvres en grand et ça te donne un espace supplémentaire hyper agréable. Il suffit d’ouvrir et de fermer des fenêtres. »19

18.cf. Partie 2 - III p.47 19. cf. Entretien Héloïse Pelen.

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Réhabilitation d’une ferme par le collectif ENCORE, à Hourré LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

Vue depuis l’entre-deux coques (anciens murs extérieurs et nouvelle façade de la maison

Le trou dans le toit a été transformé en verrière éclairant l’intérieur de la maison. Le ciel pour toit.

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Exteriorisation des usages intérieurs : une salle de bain extérieure

Repenser la relation à l’extérieur

La notion d’espace tampon renvoie à qualifier l’enveloppe que forme un bâtiment. Cette double peau met en relation un extérieur avec un intérieur. Rendre l’architecture et les modes de vie plus respectueux de l’environnement, c’est retrouver une relation naturelle à la nature. Et pour cela, quoi de plus efficace que d’y être confronté ? Non pas par contrainte, mais par opportunité. Quelle est la place laissée à l’extérieur dans les projets ?

Espaces annexes à disposition Dans l’enquête « Logement » de 2013, l’INSEE avait étudié l’évolution de la part des espaces attenants au logement d’avant 1949 à 2013. Dans le logement collectif, la part de logement avec des espaces extérieurs était de 44 % à la fin des années 70. En 2013, elle n’est plus que de 35 %. Pour les balcons et loggias, le pourcentage a baissé dans les années 80 et 90 passant de 66 % à 62 %. En 2013, la part de logement collectif bénéficiant d’un balcon ou d’une loggia est de 64,5 %.

L’évolution pourrait paraître presque dérisoire. Néanmoins, il peut être intéressant de mettre en rapport l’évolution de la part d’espaces extérieurs privatifs avec l’évolution de la part de logement collectif bénéficiant de caves. Alors que 69 % des logements bénéficient d’une cave dans les années 70, ils ne sont plus que 31 % en 2013. En se déplaçant dans la ville, il n’est pas rare de constater qu’aujourd’hui certains balcons ou loggias sont saturés de meubles ou objets en tout genre. Sans pour autant faire de généralité, force est de constater qu’un espace extérieur perd de sa qualité d’usage lorsque celui-ci se transforme en espace de stockage. À noter également que la place de la voiture elle, n’a cessé de croître, passant de 56 à 78 % de logement collectif équipé de garage ou box ouvert en sous-sol ou parking extérieur privatif.

Suite à l’épidémie Covid-19, la considération de l’espace extérieur et de l’espace annexe a considérablement augmenté. En septembre dernier, Nexity s’est même engagée à ne plus construire un seul logement sans balcons, terrasses ou loggias20. Qu’il soit privatif ou non, faire d’un espace extérieur la propriété de quelqu’un le rend responsable de son entretien. Dans une cour commune, il peut même devenir un espace de représentation.

Questionner la porosité de l’enveloppe : La porosité du bâtiment elle-même est interrogée à travers cette relation intérieure/extérieur. Sou Fujimoto a extrapolé cette porosité en proposant une maison sans toit ni mur. La Maison N est une succession d’espace transitoire créant un continuum entre la ville et l’espace domestique.

20. Les échos, «Nexity ne construira plus un seul logement sans espace extérieur ». 23 sept.2020.

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Enfin comme le souligne Emmanuelle Patte, la question de la relation à l’extérieur soulève la problématique de la densité et de l’hospitalité des milieux urbains. « Les voitures font de la chaleur, du bruit, prennent de l’espace, de la vitesse. Si tout le monde fait de la climatisation, la densité devient insupportable. Ce serait intéressant de repenser la densité avec la lecture du low-tech. Ça interroge non seulement les bâtiments avec leur enveloppe, leurs systèmes, mais aussi les autres éléments dont on a besoin pour vivre : le transport, l’alimentation, etc. … » E. Patte21

III. TEMPÉRATURE DE CONSIGNE ET CONFORT

Le confort aujourd’hui La contrainte thermique oubliée De toute évidence, un extérieur citadin n’aura pas les mêmes prédispositions qu’un extérieur à la campagne pour « renouer avec la nature ». Mais on parle ici de connexion à l’environnement. Il s’agit d’arrêter de faire abstraction des variations climatiques, de nier l’extérieur. Comme le rappelle Éric Bussolino, l’homme avec ses exigences de confort aujourd’hui, « a beaucoup de mal à envisager des écarts de températures importants dans ses espaces de vie. On est habitué à régler le 1/2 degré dans sa voiture, chauffage comme climatisation »22. En été par exemple, une personne peut passer une journée entière sans avoir ressenti la réalité de l’environnement. Elle quitte son logement climatisé pour aller, en voiture équipée de la climatisation, dans son bureau également climatisé. Il en est de même pour le chauffage en hiver.

Les systèmes techniques développés jusqu’à aujourd’hui « lissent un maximum les températures »23 et fausse notre perception physiologique. Désormais couplée à l’absence d’effort physique pour accéder aux ressources, et à la facturation fractionnée et décalée dans le temps, la croissance a participé à l’oubli de la contrainte thermique.

21. cf. Entretien Emmanuelle Patte 22. cf. Entretien Eric Bussolino 23. Ibid.

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À Paris cette fois, existe une crèche sans bâtiment. De -4°C à 30°C, les enfants sont accueillis dans la halte-garderie du Champ de mars, en plein air. Seul un chalet de 9 m² sert d’abris en cas de fortes intempéries. Pas de lit. Pour la sieste, les enfants rejoignent leur poussette cape de pluie déroulée. « Le plafond c’est le ciel ! » déclare l’auxiliaire de puériculture. Qu’il vente, neige, ou pleuve, les parents considèrent que leurs enfants doivent mettre le nez dehors plus souvent. Malgré les températures hivernales, la majorité d’entre eux constatent que leurs enfants sont beaucoup moins malades qu’en crèche fermée où la chaleur profite à la prolifération des microbes et virus.

Les paramètres mesurables du confort Comme démontré dans l’étude Phébus sur l’effet rebond24, non seulement le nombre de pièces chauffées et le temps de chauffe ont augmenté, mais la température de consigne a également évoluée à la hausse. Au XVIIIe siècle, 14°C en intérieur était considéré comme dangereux pour la santé. Aujourd’hui, la température moyenne de nos intérieurs est de 22°C alors que l’ensemble des simulations énergétiques sont basées sur 19°C. De plus, on sait qu’un jeune couple positionne le thermostat à 19°C, une famille avec enfant à 21°C, un couple de retraités à 22°C. La possibilité de surchauffer momentanément le logement à 24°C est appréciée notamment lors de l’arrivée d’un nourrisson.

Qu’est-ce qui définit le confort ? Dans leur ouvrage « La conception bioclimatique », Samuel Courgey et Jean-Pierre Oliva distinguent le confort du bien-être thermique. Le premier est mesurable d’après différents paramètres tandis que le second est personnel, élargi aux champs des ressentis et du plaisir.

Pour être en pleine capacité, le corps humain se maintient à 37°C grâce à différentes stratégies.

Il y a tout d’abord des moyens internes qui sont des mécanismes de thermorégulation comme la transpiration quand il fait chaud ou le frisson quand il fait froid. Il y a ensuite des moyens externes comme l’alimentation, l’habillement, la migration et l’architecture.

De nombreuses études sur la zone de confort sont apparues dès lors que la technologie permit le parfait contrôle de l’environnement thermique. Il s’agissait de savoir quel était le véritable environnement thermique optimal. Ainsi, la norme ISO 7730 définit précisément le confort thermique.

Basées sur le modèle de Fanger, les conditions de confort sont obtenues entre 19°C et 26°C.. Le modèle prend en compte des données propres à l’homme comme l’habillement (variation possible de 4°C entre une tenue d’été et d’hiver), l’activité (variation possible de 6°C entre une activité sédentaire et une marche sportive), mais aussi des paramètres d’ambiances comme la température de l’air ambiant, son humidité et sa vitesse.

Plus la vitesse de l’air est élevée, plus notre corps perd de sa chaleur. En été, un courant d’air est apprécié, car celuici accélère la sudation au contact de la peau. Il procure alors une sensation de rafraîchissement. L’humidité de l’air agit également sur la sudation. En été, une humidité trop importante ralentit la sudation. La chaleur en climat humide est alors plus inconfortable.

La matérialité comme facteur de confort La température des parois La température des parois agit également sur le confort thermique. Tel que l’illustre le schéma suivant, une paroi à 14°C nécessitera une surchauffe de l’air à 25°C pour avoir la sensation d’un air ambiant à 19°C. Ces 6°C supplémentaires généreront une dépense énergétique supplémentaire qui peut être considérable selon la température extérieure, la performance du bâti et le type de chauffage25.

24. cf. Partie 2 - I p.30 25. COURGEY Samuel, OLIVA Jean-Pierre, «La conception bioclimatique : des maisons confortables et économes», Ed. 44

Température ressenti en fonction de la température de la paroi

« En fait avec le béton de chanvre il y a un phénomène de régulation hygrothermique qui fait que le mur est un peu plus chaud en hiver et un peu plus froid en été. Et ça, le promoteur m’expliquait qu’il était allé de temps de temps aux Loges-en-Josas, et les gens qui y habitent trouvent ça extrêmement confortable été comme hiver. Cet été quand on avait 40°C, les gens fermaient un peu pour se protéger du soleil,

aérer correctement la nuit et il faisait 25°C dans leur maison. C’est le signe qu’il y a une manière d’habiter qui change. (…) Quand on habite comme ça dans des maisons avec des matériaux un peu différents, et qu’on n’est pas insensible, on change un peu son comportement. Et donc on fait des économies d’énergies » L. Mouly27

Une autre approche de la beauté : entre éthique et esthétique En faisant ces preuves du point de vue thermique, la matérialité pourrait donc également inciter à un comportement plus économe. La mise en œuvre de ces matériaux implique également de rendre visible la matière qui ne peut pas être cachée derrière parement et autres couches subsidiaires28. La matérialité de la surface devient spécifique, justifiée. C’est un autre rapport aux matériaux qui n’est pas sans rappeler un certain principe du Brutalisme qui « tisse une profonde relation entre l’esthétique et l’éthique »29.

Les matières naturelles ainsi laissées brutes font rentrer la nature dans le quotidien des espaces intérieurs et par leurs couleurs, leurs aspects offrent aux habitants non seulement une ambiance chaleureuse, mais aussi une beauté particulière. La mise en œuvre du matériau façonne simultanément son apparence.

« La beauté n’est pas un luxe, mais une nécessité »30 D. Gauzin Müller

26. Sans rentrer dans les détails, il s’agit de comprendre la façon dont le matériau emmagasine la chaleur ou l’humidité, la restitue et la diffuse.

27. cf. Entretien Lauren Mouly.

28. Un matériau biosourcé permet une juste régulation hygrothermique à condition de « respirer ». C’est-à-dire qu’il ne peut être étouffé par une couche superficielle imperméable qui causerait des dégâts.

29. MADEC Philippe, BORNAREL Alain, BRUNAUD PierreYves, «L’écurie», Ed. Museo, 2019. p.58 30. GAUZIN-MÜLLER Dominique, « La beauté n’est pas un luxe, mais une nécessité », In : Ecologik, n°1 fév-mars 2008. p.72.

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La matérialité joue donc un rôle important vis-à-vis du confort. En effet, la prise en compte de l’inertie, de la conductivité, de l’effusivité et de la diffusivité propres à chaque matériau26 peut permettre un gain de confort considérable. C’est le cas par exemple du béton de chanvre dont nous parle Laurent Mouly :

Dominique Gauzin-Müller nous parle de son séjour dans la maison de Martin Rauch construite en pisé et dont il qualifie lui-même de « cabane africaine avec le confort moderne » : « C’est à la fois archaïque et très luxueux. Mais le luxe ne vient pas des couleurs ou du précieux. Il vient des matériaux naturels et de la qualité de l’air. Je ne connais aucune maison dans laquelle l’équilibre hygrothermique est aussi agréable. »31

Maison de Martin Rauch en pisé. Photographies de D. Gauzin-Müller. Diffraction de la lumière sur le pisé à travers les marches de l’escalier

«Ici, c’est la maison qui a changé, voire transformé ses habitants.

Les murs sont dépouillés, même la céramique blanche de la cuisine est immaculée. «Ne pas décorer permet d’être juste contemplatif, la variation des ombres sur les murs change toute la journée. C’est une petite maison, mais elle paraît très grande», explique Nicolas. L’épure est donc aussi intellectuelle. Bien qu’en pierre massive, comme chez les nomades, cette maison permet de voyager léger.»32 Maison à Montélimar par Gilles Perraudin 31. GAUZIN-MÜLLER Dominique, «Vers un nouveau vernaculaire : bois, terre, paille & pierre», Webinaire «Métamorphoser l’acte de construire» organisé par la Frugalité Heureuse et Créative, 3 nov. 2020.

32. https://chroniques-architecture.com/perraudin-maison-individuelle-montelimar/.

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Le confort adaptatif : Aux paramètres mesurables du confort thermique s’ajoutent les facteurs démographiques déjà évoqués comme l’âge et le cycle de vie, mais aussi des facteurs socioculturels. En effet, les populations se sont acclimatées à leur environnement. Ainsi, pour un individu inactif et légèrement vêtu, la zone de confort sera de 14,5°C à 21°C s’il est anglais, de 20°C à 26°C s’il est américain ou encore de 23°C à 29,5°C s’il est d’ un pays tropical.

L’acclimatation est le reflet d’un phénomène particulièrement intéressant lorsqu’on s’intéresse à la régulation du confort thermique par des systèmes passifs. Au début des années 2000, une étude américaine indique que le modèle de Fanger évoqué précédemment est valable en été pour les bâtiments climatisés, mais pas du tout pour les bâtiments ventilés naturellement. Complété par les travaux de chercheurs français, il s’avérerait que les usagers d’un bâtiments ventilé naturellement s’adaptent plus facilement lorsque la température extérieure est plus élevée en été 33.

C’est-à-dire que la plage de confort n’est pas seulement déterminée par des conditions comportementales et d’ambiances, mais aussi par une appréciation affective d’un ressenti. Proposer des bâtiments qui fonctionne au rythme des climats induirait donc un degré d’acclimatation des habitants à des écarts de température plus importants dès lors que les habitants ont conscience des conditions «naturelles» de leur confort.

Modèle de confort adaptatif : Corrélation entre la température de confort et la température extérieure.

On accepte plus facilement des températures plus froides en hiver et plus chaudes en été lorsque les conditions de confort sont directement dépendantes de l’environnement extérieur.

33. ICEB, «Guide Bio-tech : Confort d’été passif», Arene Île-de-France, avril 2014. p.12 47

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En utilisant la pierre en monomur et à cause de la situation géographique du projet, l’architecte Gilles Perraudin arbitre en faveur du confort d’été. Il n’est pas sans savoir qu’ici, les maisons isolées selon la RT2012 peuvent avoir beaucoup de mal à évacuer la chaleur l’été. Si bien que les habitants finissent pas acheter des appareils de climatisation qui finalement annulent tous les gains énergétiques hivernaux, voir plus. Selon le propriétaire, sa consommation énergétique a été divisée par 2 depuis que la famille vit ici. Le chauffage d’appoint prévu au sol n’est quasiment jamais utilisé.

CONCLUSION

Au regard de l’ensemble de ces données, de ces scénarios tendanciels et prospectifs (partie 2), il semble important de rappeler que les statistiques et calculs théoriques sont autant de vérités que d’habitants. Un profil sociodémographique ne sera jamais qu’une généralité dans un monde où chaque être, chaque cycle de vie, habitudes de consommation sont différents. Il en est de même pour le modèle de confort thermique unique sur lequel s’appuient les réglementations. Une réponse architecturale ne peut donc être générique. La considération de la technologie semble être synonyme de pondération.

De la même façon qu’une utilisation raisonnée et durable de la matière consiste en priorité à utiliser le bon matériau, au bon endroit et en bonne quantité, il faut penser le bon système pour le bon climat et la bonne spatialité pour le bon usage.

Connaître le besoin Et pour cela, comme le rappelle Éric Bussolino1, « la première chose à faire quand on veut faire un bâtiment dans lequel on veut mettre l’usager au centre, c’est de le rencontrer et d’être en capacité de mesurer la façon dont il pourra s’investir. Il faut comprendre son degré d’acceptation, de son parti pris dans le bon fonctionnement du bâtiment et de construire le projet avec lui.».

Un programme, un cahier des charges sont-ils suffisants pour se saisir du sens des surfaces projetées ?D’après ma propre expérience, j’ai remarqué que l’opinion des futurs usagers pouvait être considérée comme une contrainte par l’architecte qui très tôt peut avoir une idée assez figée du projet.

Or, elle n’est rien d’autre qu’une donnée supplémentaire qui ne peut qu’enrichir la conception. Pour Philippe Madec, il faut écouter le désir des gens. Son équipe et lui proposent quasi systématiquement des temps d’échanges en amont du projet avec les habitants, voisins, usagers via des concertations.

Il distingue 3 enjeux à travers cette démarche : le premier est d’entendre la réalité des attentes portées par le projet. Le second est de comprendre leurs peurs à travers leurs mots. Le troisième est de permettre une appropriation du projet dès lors qu’ils sont inclus dans le processus de conception. « Ils se l’approprient parce qu’ils sont engagés dans le projet et parce que le projet est aussi approprié à ce qu’ils attendent du projet.»2

Vers un vernaculaire contemporain ?

Du point de vue architectural, le discours n’est pas de dire qu’il faut revenir à l’âge de pierre ou vivre dans des «tiny house». Promouvoir une meilleure qualité de vie ne doit pas être au détriment de l’environnement et vice-versa. L’espace n’est pas forcément synonyme de consommation s’il est utilisé à bon escient et créer selon une démarche durable. L’économie n’est pas non plus synonyme de restriction si celle-ci est judicieusement faite.

1.Cf. Entretien E. Bussolino.

2.Cf. Entretien P. Madec 48

Réflexion prospective pour la profession de concepteur La démarche frugale s’accompagne également d’une certaine évolution intellectuelle vis-à-vis du métier de concepteur.

Tout d’abord chez les bureaux d’études : le principe du low-tech étant de faire disparaître la machine, quel futur pour l’ingénierie qui conçoit et décrit justement les systèmes ? Le directeur ingénierie de AIA Environnement y voit là l’occasion de «transcender sa profession en accompagnant le non système». Il constate d’ailleurs déjà chez la jeune génération une motivation à l’égard de ce travail d’»effacement» qui nécessite tout autant d’intelligence. Comme dirait un architecte du Vorarlberg3 : «le pistolet à colle apparaît là où l’intelligence s’arrête »4.

Pour l’architecte, c’est également l’occasion de mettre en exergue plus que jamais sa capacité à offrir les espaces les plus qualitatifs en tenant compte des capacités du client : les capacités d’investissement dans l’entretien de leur logement comme évoquées précédemment, mais aussi les capacités financières.

Dans le Vorarlberg, le recours à l’architecte n’est pas imposé. Pourtant, tous les habitants décident volontairement de monter leur projet avec. Dominique Gauzin-Müller explique que c’est parce que les gens savent qu’il n’y a que l’architecte qui saura le mieux mettre à profit leur budget pour concevoir un espace dans lequel il fait bon vivre.

La maison conçue par Gilles Perraudin à Montélimar et dont le cout de construction est de 165 700 euros HT (pour 96 m2 ) est un bon exemple de cette compétence. La compacité de la composition et l’absence d’élément de second œuvre payent la pierre. La portée de 3m permet l’utilisation de bois de petite dimension qui réduit également les couts. Additionnés, ces choix permettent de faire de ce logement relativement petit et économique, un espace de vie lumineux, spatieux, adapté et non sans une certaine noblesse qui distingue le projet architectural du logement standardisé produit à la chaîne par les constructeurs. C’est cette plus-valus que seul le travail de l’architecte peut apporter.

3.Région d’Autriche particulièrement portée sur l’environnement. Il s’y développe une architecture durable et écologique grâce au travail en concert des artisans, architectes et habitants.

4. GAUZIN-MÜLLER Dominique, «Vers un nouveau vernaculaire : bois, terre, paille & pierre», Webinaire «Métamorphoser l’acte de construire» organisé par la Frugalité Heureuse et Créative, 3 nov. 2020.

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LE SENS DES SURFACES / SOMMAIRE / INTRODUCTION / PARTIE 1 / PARTIE 2 / CONCLUSION / BIBLIOGRAPHIE / ANNEXES

L’analogie à l’architecture vernaculaire trouve sa pertinence dans la relation de l’architecture au climat, à la ressource, au site. Le bioclimatisme traite la relation au contexte non matériel. Le low-tech traite la relation au contexte matériel. Et rassembler les deux dans le projet revient à créer une réponse architecturale adaptée aux enjeux climatiques d’aujourd’hui.