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Architecture Carla Swickerath nous parle de l'émotion en architecture

EN ARCHITECTURE

L'architecture parle. Elle raconte des histoires. Elle hurle ses émotions. Des émotions tantôt agréables, tantôt rudes. Pour Carla Swickerath, figure de proue du célèbre cabinet d'architectes Libeskind, c'est cet équilibre qui fait la beauté du métier. « L'architecture mélange raison et émotion. C'est ce qui la rend si puissante. Chez Studio Libeskind, nous ne faisons aucune distinction. »

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Impossible de donner un chiffre

Voilà ce que répond Carla quand on lui demande à combien de projets elle a déjà participé. Son expérience couvre des projets culturels, civils, commerciaux et résidentiels. De la planification à la conception.

La gare de l'Oculus, au World Trade Center, a été conçue par l'architecte espagnol Calatrava. L'association de la lumière naturelle et de la forme sculpturale sublime les niveaux inférieurs et les allées piétonnes de l'édifice.

Se préparer à l'inattendu

Les meilleurs résultats s'obtiennent quand on est ouvert à l'inattendu. N'ayez aucune idée préconçue, laissez-vous emporter dans l'aventure et découvrez l'histoire authentique d'un projet.

— Cette approche rend-elle votre

travail unique ?

Carla Swickerath : « Ici, nous sommes tous d'accord pour dire que l'architecture transcende ses aspects techniques et rationnels. L'architecture ne remplit vraiment sa mission que lorsqu'elle parle à l'âme humaine. Chaque projet a besoin de ce lien émotionnel, que ce soit avec les passants ou les visiteurs... Pour nous, il est crucial que les deux aspects s'entremêlent. »

— Est-il difficile d'établir ce

lien personnel ?

« Pour éveiller des émotions, il faut avant tout de l'empathie. Nous sommes une oreille attentive qui s'efforce réellement de comprendre la culture ainsi que le sens et le sentiment d'un lieu et de ses habitants. Je crée plus facilement si je peux vraiment m'imprégner du lieu. C'est une manière de ne pas perdre l'ensemble de vue. »

— Est-ce plus facile avec de l'expérience

ou vous fiez-vous à votre instinct ?

« Difficile à dire. Une grande partie de mon travail repose sur l'intuition et je dois y être ouverte. En tant que mère d'une petite fille, je suis persuadée que chacun a la capacité de suivre son intuition. Nous avons tous la capacité d'apprécier l'inconnu et de trouver la reconnaissance à un niveau qui transcende la langue. D'autre part, vous ne vous posez plus de questions sur votre méthode de travail. Vous le faites, tout simplement. »

— L'expression d'émotions via

l'architecture est-elle difficile dans des lieux déjà chargés émotionnellement, ou l'histoire émotionnelle facilite-t-elle justement les choses ?

« Prenons, par exemple, le drame émotionnel lié à Ground Zero. L'émotion est partout, ce qui la rend, d'une certaine manière, plus accessible. L'inconvénient, c'est que le défi est d'autant plus grand puisqu'il faut faire preuve de beaucoup plus de sensibilité. Il importe de transposer ce lien émotionnel direct dans le design. Vous vous sentez aussi responsable de refléter ce sentiment de la bonne façon. Surtout pour les gens qui ont un lien direct avec le site. »

— Comment vous attelez-vous à un projet

d'une telle envergure ?

« C'est un grand honneur de se voir confier la responsabilité d'un projet de cette ampleur. Mais d'un autre côté, vous ressentez immédiatement la tragédie et le traumatisme. C'est pourquoi nous partons toujours du point de vue humain. Le bâtiment du WTC émeut non seulement la population de New York et de l'Amérique, mais il touche aussi le monde entier. »

— Pas facile, j'imagine.... « Pas du tout. Dans le cas du World Trade Center, les divergences d'opinions étaient nombreuses. Il est rare qu'il n'y ait qu'une seule histoire ou qu'une seule opinion. Vous essayez donc de trouver une solution qui contente toutes ces voix dans une certaine mesure. C'est la clé du succès du projet. La complexité de ces interactions fait partie intégrante de notre processus créatif. C'est un grand numéro d'équilibriste, un peu comme de la gymnastique. »

— N'est-il pas parfois accablant de

ressentir ces émotions tous les jours ?

« Pas vraiment. En réalité, ça m'inspire. Je veux créer des bâtiments qui ont un impact, qui font une différence là où ils sont érigés. C'est comme ça que je touche les gens. C'est pour ça que j'aime mon travail. Il n'y a pas deux projets qui se ressemblent. L'architecture et l'émotion qui en découlent vous mettent au défi de vous ouvrir à l'aventure. De plonger dans l'inattendu et vous laisser porter par ce qui arrive. »

Ngaren - Kenya Studio Libeskind

Une ode à la genèse de l'humanité. Voilà comment se décrit le musée. Le design s'inspire des anciennes hachettes qui furent autrefois les tout premiers outils humains. Les formes, les volumes et les matériaux donnent vie au début de l'ingéniosité humaine.

Maggie's Centre - Londres

Studio Libeskind

« Nous avons conçu Maggie's Centre pour qu'il mette à l'aise. C'est un endroit où les personnes touchées par le cancer peuvent se réunir pour trouver du réconfort. Nous voulions créer une oasis de paix dans un monde chaotique et bureaucratique. »

Musée juif - Berlin

Studio Libeskind

L'histoire de Berlin est inextricablement liée aux énormes contributions de la communauté juive. C'est précisément pour cette raison que le sens de l'holocauste doit avoir sa place dans la conscience et la mémoire de la ville de Berlin. C'est dans cet esprit que Studio Libeskind a conçu un design émotionnel et interactif.

Architecte optimiste

Pour les architectes et les designers de Studio Libeskind, l'architecture est un exercice d'optimisme. Impossible de créer des endroits magiques sans croire en l'avenir.

Sainte-Chapelle

Cette église parisienne de style gothique est l'endroit où Carla a commencé à percevoir la puissance de l'architecture. À l'époque, elle avait 18 ans. « Je suis arrivée et j'ai tout de suite senti le pouvoir de l'aspect émotionnel, mais aussi intellectuel, mathématique et rationnel de l'architecture. J'ai été subjuguée. Le fait d'être là, à ce moment-là, a eu plus d'impact que toutes les connaissances acquises auparavant. »

Carla Swickerath travaille pour Studio Libeskind depuis 1999. Son portefeuille impressionnant et sa riche expérience en gestion de projet et en conception l'ont amenée à passer du poste d'architecte principale et de CEO à celui d'associée.

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