Accueillir les “ mauvaises herbes” au jardin
J'agis pour la biodiversité
Eve
J'agis pour la biodiversité
EveFamille : Astéracées.
Cycle : vivace.
Ses effets sur les sols : anti-érosion, offre un couvert protecteur. Ses effets sur la santé humaine : hémostatique*.
L’achillée millefeuille, cette petite vivace rustique de taille moyenne (environ 50 cm), est facilement reconnaissable car très commune et répandue, même si sa faible résistance aux pesticides diminue sa présence. Avec sa myriade de feuilles découpées en fines lanières comme un sourcil (d’où son autre nom de « sourcil de Vénus ») et sa floraison en forme d’ombelles* blanches, elle nous accompagne du printemps à l’automne. C’est la plante de nos pelouses, des talus et des bords de route, qui s’invite facilement sur nos bordures et massifs érodés puisqu’elle aime les sols secs et rocailleux ou les espaces laissés en friche au jardin.
L’achillée pousse spontanément sur des sols « maltraités » par des excès de retournements, comme les labours trop profonds ou les travaux de terrassement, qui ont pour conséquence une érosion et un excès de matières organiques qui ne peuvent plus pénétrer dans le sol. En se propageant grâce à ses racines traçantes, elle offre un couvre-sol réparateur, tel un gazon. À la différence d’une simple pelouse, l’achillée supporte le piétinement et donne de la vigueur aux autres végétaux. Utilisée pour améliorer la formation des composts, comme paillage ou
encore en préparation antifongique* naturelle, elle est devenue la star des pulvérisations au potager !
L’achillée millefeuille est une plante aromatique qui contient plus de 82 constituants actifs ! Son odeur âcre et amère repousse nombre de prédateurs comme les pucerons et attire de nombreux pollinisateurs comme les abeilles, les papillons ou les syrphes. Ses fausses ombelles, que les botanistes appellent les « corymbes », forment une piste d’atterrissage sûre aux insectes ! Ses
Partie de la plante à récolter : les sommités fleuries.
Récolte : de juin à octobre.
Outils : ciseaux, sécateur.
fleurs faciles à butiner sont particulièrement appréciées des coléoptères*, mais les pollinisateurs (comme la cétoine, par exemple), plus statiques avec leur carapace de scarabée, s’y attardent volontiers.
Sa carrière médicale a commencé par la guerre de Troie et le fameux talon d’Achille dont elle porte le nom. Plante compagne des combats, remède des plaies et des blessures, cette réputation lui a valu tous ces noms vernaculaires si évocateurs : « herbe aux soldats », « herbe aux militaires », « herbe aux charpentiers », « herbe à la coupure », « saigne-nez », etc. L’achillée est vulnéraire (du terme vulnerarius, qui veut dire
blessure en latin), c’est-à-dire utilisée pour les affections dermatologiques de type crevasses, écorchures, piqûres d’insectes, etc. C’est une plante liée au sang, elle est hémostatique, décongestionnante, emménagogue*, anticoagulante, elle traite les problèmes circulatoires en général, elle est capable de stopper des hémorragies internes ou externes. Plante de la femme, elle agit contre les douleurs menstruelles, elle stimule et régule le flux sanguin en absence de règles1 ou le contraire. C’est aussi un tonique stomachique, antispasmodique. Les jeunes pousses, les fleurs et les feuilles se mangent.
On peut en faire une décoction à pulvériser au jardin comme traitement antifongique : comptez 100 g de fleurs d’achillée pour 1 litre d’eau.
1. Attention à son utilisation en cas de grossesse ignorée, elle pourrait être abortive.
Famille : Amaranthacées.
Cycle : annuelles, non rustiques. Leurs effets sur les sols : renforcent la perméabilité du sol, absorbent les nitrates du sol, nourrissantes, fournissent ombrage et paillage. Leurs effets sur la santé humaine : comestibles, riches en vitamines et minéraux.
Il existe une douzaine d’espèces d’amarantes en France, difficiles à identifier et sujettes à hybridation. Bien connues et catégorisées comme « mauvaises herbes » par les jardiniers que leur omniprésence enquiquine lorsque l’habitat est à leur goût ! Leur nom vient d’ailleurs du grec amárantos, « qui ne flétrit pas », qui évoque leur caractère permanent… Ces petites sauvageonnes poussent uniquement dans les milieux perturbés par l’activité humaine, dans les cultures, les jardins, les vergers ou les surfaces maraîchères. Elles existent depuis des temps immémoriaux,
cultivées en Asie, en Afrique et principalement en Amérique du Sud, puis introduites en Europe en tant que légumes, comme l’exubérante variété « queue-de-renard », sélectionnée aujourd’hui pour la culture ou l’ornement. Les amarantes sauvages sont aujourd’hui arrivées en ville, sur les bouts de trottoirs, toujours attirées par les excès d’azote liés aux pollutions humaines…
Leurs racines, fortes et profondes, aèrent et ameublissent le sol en profondeur, et font remonter les minéraux. Elles participent à la perméabilité du sol. Classées comme plantes de fixation de carbone C4, elles convertissent le dioxyde de carbone en biomasse. Ce sont des plantes qui ne demandent aucun arrosage et donc, même en cas de sécheresse, leur port buissonnant offrira une bonne quantité de matière végétale pour les paillages d’automne et d’hiver. Nitrophiles* (donc dépolluantes), les amarantes accumulent les nitrates des sols gorgés d’azote et de potasse, attention donc à leur provenance pour la consommation alimentaire. Elles indiquent un jardin bien fertilisé !
Au vu de l’immense quantité de graines produites par un pied, c’est une plante utile aux oiseaux. Ses minuscules graines peuvent être données aux poussins dès leur premier jour de vie. L’hiver, on suspendait les plantes remplies de graines au plafond des poulaillers. Les feuilles servent aussi de fourrage aux animaux.
Toutes les amarantes sont comestibles, consommées crues ou cuites. Leurs grains et leurs jeunes feuilles sont riches en protéines, 17 % de plus que n’importe quelle autre céréale, en fer, en une kyrielle de vitamines (A, B, C, K, E), en sels minéraux (calcium, magnésium, potassium) et en oligoéléments. Ses protéines contiennent les huit acides aminés essentiels et les acides gras (oméga 3, 6 et 9) comme celles d’origine animale et elles ne contiennent pas de gluten. C’est une excellente plante nutritive, qui aide au bon fonctionnement de tout le corps, en préventif comme en curatif pour les troubles liés à la dépression, au diabète, pour aider les capacités cérébrales, et comme soin du corps et de la peau, c’est une plante de beauté par excellence !
Attention, s’assurer que le lieu de cueillette ne soit pas pollué, la meilleure garantie étant son propre jardin !
Partie de la plante à récolter : les feuilles et les graines.
Récolte : les feuilles, au fur et à mesure des besoins pendant l’été, et les graines à l’automne.
Outils : ciseaux, sécateur.
Conseils : coupez les têtes pour les faire sécher au soleil avant de les égrainer en les tapant dans un contenant de votre choix.
Les amarantes sont anémophiles et produisent plusieurs milliers de graines par pied qui se ressèment grâce au vent, ce qui fait d’elles des plantes annuelles au jardin pérenne ! Elles ne craignent ni les limaces ni les escargots !
Famille : Astéracées.
Cycle : vivace rustique.
Ses effets sur les sols : antiparasitaire.
Ses effets sur la santé humaine : antifongique, antibactérienne et vermifuge*.
Voilà une plante rudérale bien commune de nos jardins, des bords de routes et des chemins, qui croît dans tous types de sols mais qui préfère ceux bien drainés et humides (elle n’est pas présente en région méditerranéenne), en excès d’eau. Gourmande en nitrates, on la rencontre près des fosses septiques, des dépotoirs ou d’autres lieux incultes riches en azote. Reconnaissable par sa grande taille (elle peut atteindre jusqu’à 2 m de haut en pleine floraison) dans la famille des armoises 1 , elle se différencie aussi par son feuillage recto vert foncé et verso blanc argenté. Son inflorescence* est si minuscule qu’elle est à peine visible pour nous et les abeilles !
Dans les pratiques de l’agriculture biodynamique, l’usage des pulvérisations de préparations à base de plantes pour protéger et renforcer le sol et les plantes cultivées afin d’augmenter leur résistance aux parasites et aux maladies ne date pas d’hier. La « Protection des Plantes Par les Plantes », est un projet d’expérimentation de l’INRA et de l’ITAB basé sur la recherche d’autres solutions que l’emploi de pesticides, en s’appuyant sur l’évaluation de préparations à base de plantes (décoctions de prêle, Equisetum arvense,
armoise, Artemisia vulgaris, absinthe, Artemisia absinthium, et saule, Salix alba) avec pour objectif la protection des plantes en arboriculture, maraîchage et viticulture. L’intérêt de ces préparations à base d’extraits de plantes a été mis en évidence en viticulture et en arboriculture, permettant la réduction des doses de soufre… Antifongiques,
Partie de la plante à récolter : les feuilles.
Récolte : entre juin et septembre.
Outils : ciseaux, sécateurs.
antibactériennes et antiparasitaires, ces macérations longues jusqu’à fermentation peuvent être utilisées au jardin comme répulsif pour éloigner les insectes, rongeurs, escargots, limaces et aussi pour lutter contre le mildiou, l’oïdium, la tavelure ou la cloque ! Notre armoise vulgaire, formant des buissons ardents quand elle se plaît, un peu envahissante, peut se révéler bien utile avec son huile essentielle (thuyone) répulsive.
L’armoise vulgaire est une aromatique et une plante comestible à la saveur amère particulière dont on fait divers usages culinaires. Ce sont les jeunes pousses et les tiges qui parfumeront sautés de viande, gâteaux ou encore apéritifs. La découverte des bienfaits thérapeutiques de l’armoise ne date pas d’hier. Aussi magique (pour chasser les mauvais esprits, ou encore la grêle et
les orages) que thérapeutique, comme remède à de nombreux maux, cette plante herbacée est aujourd’hui réputée pour son pouvoir fortifiant, comme excellent stimulant digestif, antispasmodique, anti-inflammatoire, diurétique, antifongique, vermifuge et un puissant antibactérien. C’est aussi une grande plante compagne de la femme pour la régulation de son cycle menstruel. Les dernières recherches ont enfin démontré les propriétés antiparasitaires de ses inflorescences contre le paludisme.
L’armoise commune peut être confondue avec l’ambroisie, Ambrosia artemisiifolia, appelée aussi « petite herbe à poux » et jugée envahissante et inquiétante, qui s’invite de plus en plus dans les cultures avec l’armoise champêtre, Artemisia campestris. Une étude vient d’être publiée, nous y apprenons que l’ambroisie (par ailleurs indicatrice de pollution des sols) est pourtant dotée d’un effet antimicrobien dans le sol… et chez les humains.
1. Exemple d’armoises : estragon (Artemisia dracunculus), absinthe (Artemisia absinthium), aurone (Artemisia abrotanum), etc.
Des pissenlits et du pourpier poussent au milieu du potager, un tapis de pâquerettes se mêle à la pelouse, des orties et des ronces colonisent le pied du mur…
La tentation est grande de les arracher ! Pourtant, ces plantes spontanées qui s’invitent au jardin ont de multiples bienfaits.
Elles témoignent de l’état du sol (tassé, riche, hydromorphe…), font remonter des minéraux depuis leurs racines, nourrissent les insectes et les oiseaux, abritent les papillons, et en plus elles peuvent même nous nourrir et/ou nous soigner.
Vous trouverez dans ce guide plus de 30 plantes aux multiples vertus et les conseils pour bien les utiliser sans se laisser envahir.
Eve Gaignard accompagne des projets de création de jardins pour des entreprises, des collectivités et des particuliers. Spécialisée en plantes médicinales, conseillère en phytothérapie, elle écrit des guides pratiques pour le jardin et anime des ateliers à la rencontre des plantes, de leurs bienfaits et de leurs usages pour notre santé et celle de la terre.
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