Adapter mon potager au changement climatique

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Pas d’eau, trop d’eau, du vent…

Robert Elger
Adapter mon potager au changement climatique
Avant-propos 4 2019-2023 : une courte synthèse climatique 6 À l’heure du changement climatique 8 Des étés en pente raide ! 10 Y a plus d’hiver ? 12 V’là le printemps… 16 Des automnes généreux 20 Une météo entre le « trop » et le « pas assez » 22 Des températures sous zéro degré 24 Les chauds et froids du printemps… 28 Quand l’eau vient à manquer 33 40 °C à l’ombre 36 Des épisodes climatiques extrêmes 38 Et les plantes, elles en disent quoi ? 42
Sommaire
S’adapter, pour un potager plus résilient 48 Augmenter les réserves d’eau du sol 50 Systématiser les paillis et couvertures permanentes 62 Utiliser au mieux les particularités climatiques de chaque jardin 66 Les bénéfices climatiques de l’agroforesterie 70 Abris et cultures abritées 74 Des variétés adaptées à la nouvelle donne climatique 80 Vers un nouveau calendrier 84 De décembre à février 86 En mars et avril 96 En mai 106 De juin à août 112 En septembre 124 En octobre et novembre 131 Index 142

2019-2023 : une courte synthèse climatique

Réagir de façon pertinente aux évolutions climatiques en cours n’est pas une mince affaire. Pour m’y aider, je tiens méticuleusement un carnet potager depuis plus de 20 ans. J’y note tous les 15 jours la situation météo – températures, pluie, particularités climatiques, etc. –, ainsi que les dates de mises en culture et les récoltes. Sans oublier les inévitables accidents de culture ! Les carnets des années 2019 à 2023 témoignent d’années potagères somme toute gratifiantes !

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À l’heure du changement climatique

Bien sûr, les choses ne se sont pas faites toutes seules et tout n’a pas été parfait. Des conditions difficiles, essentiellement les canicules estivales et le stress hydrique généré par les sécheresses des étés 2020 et 2022, se sont répercutées sur la taille des légumes qui, parfois, peinaient à se développer. Sans rien perdre de leur saveur par ailleurs ! Au contraire, les fortes insolations assurent une synthèse maximale des sucres, alors que la disponibilité parcimonieuse en eau provoque une concentration de ces derniers.

Je n’ai jamais manqué de légumes, de plantes condimentaires et de fruits, même lors de la fameuse période de « soudure » d’avril et mai qui signe la « fin des haricots », quand les réserves d’hiver se vident et que les nouvelles mises en culture printanières ne sont pas encore prêtes à être récoltées.

À chaque jardin ses particularités…

Situé en Alsace, mon jardin profite d’un climat semi-continental qui, comparable à celui de la région parisienne, peut passer pour la moyenne en France La proximité du Rhin – j’habite à 2 km du fleuve – me permet de bénéficier de deux atouts D’un côté, les limons géologiquement récents qui en font une relative bonne terre de culture ; de l’autre, la présence à moins de 4 m de profondeur de la grande nappe phréatique rhénane

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qui me permet de disposer assez facilement de l’eau nécessaire L’inconvénient, c’est que la terre arable épaisse de quelques dizaines de centimètres recouvre un sous-sol essentiellement composé de galets et de graviers qui provoque en été un dessèchement rapide du sol en surface Toute la difficulté consiste à gérer ce paradoxe : l’eau est là, en profondeur, à disposition des arbres âgés dont les racines trempent littéralement dans la nappe, mais elle est hors de portée de la plupart des légumes, des condimentaires, des jeunes arbres et des arbustes à fruits

Quand la météo fait du yoyo

Entre 2019 et 2023, question températures, c’était les montagnes russes : un coup ça monte, un coup ça descend ! Alors que l’année 2019 était déjà d’une douceur exceptionnelle, 2020 s’est révélée caniculaire. L’année suivante, en 2021, les températures moyennes sont restées dans la norme, mais très contrastées. À un mois de février anormalement doux a succédé un printemps froid qui s’est conclu par de sévères gelées en avril. A suivi un mois de mai calamiteux, puis un retour de la douceur en juin. Malheureusement, l’été s’est révélé humide et relativement frais, le beau temps attendant patiemment septembre pour s’installer. Retour aux fortes chaleurs en 2022, une année que MétéoFrance a pointée comme la plus chaude jamais enregistrée. L’année 2023 est à l’avenant : la chaleur – et les orages – s’installe dès le mois de juin pour se maintenir jusqu’à l’automne, en dépit de deux intermèdes de fraîcheur et d’humidité d’environ 8 jours, le premier entre la fin du mois de juillet et le début du mois d’août et le second à la fin du mois d’août.

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Des étés en pente raide !

Le déficit hydrique estival a été la norme pendant toutes ces années. Or, en terrain sec, la levée des carottes se fait mal et, par la suite, celles-ci restent chétives et filiformes.

Des légumes qui réagissent différemment

Les divers choux peinent également à se développer. En 2020, 2022 et 2023, les choux d’été – choux pointus, choux-fleurs et brocolis – sont restés petits en dépit d’apports d’eau réguliers. Seule la relative fraîcheur de 2021 leur a été favorable. Cultivées à mi-ombre, les laitues d’été ont malgré tout développé des pommes denses et croquantes. Les courges et, plus généralement, toutes les Cucurbitacées – courgettes, pâtissons, concombres, melons… – requièrent un sol frais. Mais comme elles se paillent facilement et qu’elles manifestent très vite les manques d’eau en se flétrissant, il a été relativement facile d’y remédier. Plus délicat était d’éviter une mauvaise fécondation – et donc une mauvaise fructification – des courgettes et des potimarrons en situation chaude et très ensoleillée. À noter : les butternuts et, plus généralement, toutes les courges musquées ont mieux supporté les grandes canicules de 2019 et 2023.

Les fortes chaleurs de 2019, 2022 et 2023 ont handicapé les récoltes de haricots, tant filets que mangetout et à grains, qui se sont révélées moins généreuses que celles de 2020 et 2021. Les débuts d’été secs de 2022 et 2023 se sont répercutés sur le volume des pommes de terre qui ont peiné à grossir. De même, les céleris-raves et les céleris branches

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présentaient une croissance décevante en 2022, due au fort déficit hydrique estival, et ce en dépit du retour des pluies d’orage de fin août.

Toutefois, les fortes chaleurs ont été très favorables aux tomates, aubergines et poivrons, comme aux concombres et aux melons, ainsi qu’aux basilics, dont les récoltes ont été plus que satisfaisantes tant en qualité qu’en quantité en 2019, 2020, 2022 et 2023.

Et du côté des fruits ?

Les arbustes à petits fruits et surtout les arbres fruitiers implantés depuis plusieurs années sont moins sensibles aux fluctuations climatiques saisonnières qu’aux sécheresses pluriannuelles chroniques. Les arbres fruitiers à noyaux comme les pêchers, les pruniers et, dans une moindre mesure, les cerisiers (la culture des abricotiers est très aléatoire dans ma région) peinent depuis plusieurs années, au point de nécessiter un suivi en arrosage même longtemps après la plantation – de fait, jusqu’à ce que leurs racines parviennent au niveau de la nappe phréatique. Signe des temps ? Les récoltes de mes cinq variétés de figuier, espèce méditerranéenne s’il en est, sont aujourd’hui moins aléatoires que celles des quetsches et des mirabelles, qui font de longue date la fierté des arboriculteurs de ma région. La floraison de ces dernières a en effet été malmenée par les gelées printanières d’avril en 2020 et 2021. A contrario, les étés chauds et secs ont été très favorables aux raisins de table, en particulier grâce aux variétés récentes peu sensibles au mildiou et à l’oïdium.

Des plantes qui s’adaptent ?

Le biologiste Jean Rostand affirmait qu’il était tout à fait envisageable de faire vivre des grenouilles dans une eau proche de la température d’ébullition, du moment qu’on les y habitue par générations successives C’est également vrai pour les plantes – en théorie ! Néanmoins, cette adaptation demande beaucoup de temps, alors que les modifications climatiques sont, elles, très rapides Il est donc préférable de ne pas trop y compter

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Y a plus d’hiver ?

Il ne faut pas aller trop vite en besogne et décréter la fin des « vrais » hivers. Même si la probabilité reste faible, le risque d’un mois de janvier à -25 °C dans les années à venir n’est pas à exclure. Les hivers d’antan sont toujours là, les fortes chutes de neige (plus de 40 cm) de mi-janvier 2021 suivies d’une petite vague de froid (-16 °C enregistrés le 12 février) sont là pour nous le rappeler.

L’hiver au chaud

Jusqu’à -8 °C, il est assez facile de remédier aux dommages des vagues de froid à l’aide des voiles d’hivernage ou de forçage déposés sur une ou plusieurs couches Au-delà, une couverture de paille sèche renforcera encore la protection jusqu’au retour de températures plus clémentes Maintenir en place ou récolter ?

La vague de froid précoce qui, vers la mi-décembre 2022, a fait chuter brutalement les températures jusqu’à -11 °C a provoqué quelques dégâts. D’autant que les hivers doux des deux précédentes années m’avaient incité – péché d’optimisme impardonnable ! – à maintenir en place une partie des betteraves rouges, des radis d’hiver et des céleris qui ont partiellement gelé (les navets de Nancy, eux, n’ont pas souffert du froid et se sont conservés en place jusque très tard). Les racines de

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ces mêmes espèces stockées dans le tunnel sous une couche de paille, ont passé l’hiver sans dommage et sont restées disponibles jusqu’en avril. De même pour les légumes-racines insolites, comme la poire de terre, la capucine tubéreuse et les ocas du Pérou. Sans surprise, les très rustiques poireaux, crosnes, panais, topinambours et hélianthis se sont maintenus, stoïques, jusqu’au printemps.

Les laitues d’hiver, les bettes, les persils et le cerfeuil n’ont pas demandé de protection particulière. Leur tenue au froid est suffisamment bonne pour s’en passer, exception faite des épisodes de fortes gelées, comme lors de la seconde quinzaine de janvier 2022, où un simple voile d’hivernage a suffi pour les préserver. De même, la mâche et le cresson d’hiver ont conservé une belle allure sous voile de forçage malgré les fortes chutes de température. Les cueillettes de pourpier d’hiver se sont poursuivies de novembre à mai, exception faite de l’hiver 2022-2023 où, du fait des chutes de températures de décembre, elles n’ont débuté que vers la mi-février. Même doux, l’hiver reste une saison difficile pour les artichauts qui sont des légumes frileux. Les pieds de ‘Gros Vert de Laon’, une variété pourtant donnée comme la plus rustique, ont gelé lors des hivers 2020-2021 et 2022-2023.

Inversement, les carottes se sont mieux maintenues en place au potager qu’en cave ou même en silo. De même pour les poireaux, pour qui le sol n’a jamais suffisamment gelé pour empêcher l’arrachage. Toutes ces années, les choux cabus verts et rouges se sont conservés en place jusqu’au cœur de l’hiver, et les choux de Milan, les choux de Bruxelles et les choux frisés ou chou kale sont restés disponibles jusqu’en avril.

Côté plantes condimentaires

Si les mesures de protection préventives – voiles de protection et paille sèche – sont essentielles, pas de véritable dégât non plus sous tunnel froid (c’est-à-dire non chauffé). Les jeunes plantes arbustives semées ou

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Adapter mon potager au changement climatique

Robert Elger

Canicules, sécheresses, inondations, tempêtes, la météo met à rude épreuve nos potagers…

Comment s’y adapter ? Comment s’y préparer ? Quelles cultures privilégier ? En partant d’observations sur le terrain, Robert Elger fait d’abord état des derniers événements climatiques et montre que les années ne se ressemblent pas même si des tendances se font sentir.

Il propose un « nouveau » calendrier, certaines cultures sont désormais possibles plus tôt ou plus tard, pour notre grand plaisir...

Faisons évoluer nos méthodes de culture pour des récoltes toujours abondantes !

Pépiniériste et jardinier, Robert Elger dispense des formations dans ces domaines et il est l’auteur de nombreux livres aux éditions Rustica, dont Créer un jardin-forêt comestible et Un potager à votre goût.

14,95 € TTC MDS : RU21686
www.rusticaeditions.com

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