
Guilhem Lesaffre
Guilhem Lesaffre
Autant l’avouer d’emblée : apprécier la taille d’un oiseau n’est pas chose facile ! Quand on me demande d’en identifier un d’après un témoignage, je m’enquiers entre autres de sa taille. Les réponses que j’obtiens alors sont, au mieux imprécises, au pire totalement fantaisistes, en général peu utiles… C’est que les oiseaux bougent et que l’on ignore souvent à quelle distance ils se trouvent. Les points de repère peuvent également faire défaut et pour ce qui est de comparer à d’autres oiseaux censés être connus, encore faudrait-il avoir, justement, une bonne connaissance, et être capable d’établir des comparaisons judicieuses.
Un autre biais est lié à l’utilisation d’instruments d’optique. Un oiseau observé à travers des jumelles ou une lunette terrestre (le « télé » des ornithologues) paraît toujours plus grand qu’il n’est. Cette constatation est vérifiée même chez de bons ornithologues lorsqu’ils se trouvent en contact avec un oiseau en « taille réelle ». D’ordinaire, la réaction devant un oiseau en captivité, naturalisé uage est exclamative : « C’est si petit que ça ! » L’exemple des roitelets est significatif. Vu aux jumelles, l’un d’eux peut prendre des allures de moineau, mais le jour où l’on parvient à voir un roitelet de près, à l’œil nu, on est stupéfait par la petitesse de l’oiselet, gros comme un pouce…
Le jardin est un bon terrain d’entraînement pour apprendre à juger convenablement de la taille des oiseaux. Les espèces, souvent habituées des lieux, y sont en général en nombre limité et se laissent observer assez facilement tant aux jumelles qu’à l’œil nu. De plus, les oiseaux se côtoient, facilitant les comparaisons. Dans le présent ouvrage, des espèces témoins ont été choisies car elles sont supposées connues de tous : moineau (domestique), merle et pigeon.
Une petite précision qui peut avoir son intérêt : il n’existe pas de différence de taille entre un oiseau adulte et un jeune. Lorsqu’un oiseau sort du nid, la taille de son corps est définitive ; tout au plus peut-il avoir une queue plus courte car les plumes qui la forment n’ont pas fini de pousser. Ce qui peut jouer, en revanche, c’est le degré de gonflement du plumage. Un oiseau qui cherche à se réchauffer gonfle ses plumes et, s’il est apeuré, il a tendance à plaquer son plumage. Sa silhouette change alors radicalement.
La longueur se mesure de la pointe du bec au bout de la queue. La variabilité des valeurs que l’on trouve dans la littérature ornithologique s’explique par le fait que les mesures sont tantôt prises sur un oiseau vivant, tantôt sur un oiseau mort – et dans ce dernier cas, en l’étirant ou non…
L’envergure est calculée d’un bout à l’autre des ailes étendues (avec les mêmes remarques que précédemment). Au sujet de l’envergure, il faut garder à l’esprit que deux oiseaux peuvent avoir sensiblement la même envergure et ne pas être comparables en termes de corpulence et donc de poids. Ainsi le moineau domestique et le gobemouche gris ont-ils à peu près la même envergure mais le gobemouche le plus lourd pèse 5 g de moins que le plus léger des moineaux. La raison est simple : le gobemouche est un grand migrateur et dispose des ailes indispensables à ses voyages entre l’Europe et l’Afrique.
Fauvette à tête noire (femelle).
Le poids varie sensiblement chez les oiseaux, selon le sexe et en fonction du moment. Un oiseau migrateur emmagasine de la graisse afin de disposer d’assez d’énergie, au point de doubler son poids dans certains cas. Le poids des femelles augmente également avant la ponte. Les valeurs citées ici ne sont, là aussi, que des moyennes indicatives.
Les oiseaux présentés dans cet ouvrage ont à peu près la même taille qu’ils soient mâle ou femelle, à l’exception notable de l’épervier d’Europe dont le mâle est bien plus petit que la femelle (voir pp.104-105).
Les informations relatives à la longévité (Fransson, T., Kolehmainen, T., Kroon, C., Jansson, L. & Wenninger, T. (2010) EURING list of longevity records for European birds) ne concernent que des valeurs maximales obtenues par le biais du baguage, que les oiseaux concernés aient été trouvés morts (mort récente) ou « contrôlés » vivants. L’espérance de vie de la plupart des espèces est nettement inférieure aux longévités extrêmes mentionnées ici. Ainsi environ 8 petits passereaux sur 10 ne dépassent pas la première année d’existence, les aléas de la migration ou les rigueurs de la mauvaise saison provoquant des pertes importantes.
Les données sur l’augmentation ou la diminution des populations de certaines espèces proviennent du programme STOC (Suivi temporel des oiseaux communs) mené sous l’égide du Muséum National d’Histoire Naturelle, et dont les résultats présentés ici concernent – sauf mention contraire – la période allant de 1989 et 2018.
Enfin, les indications relatives aux effectifs sont tirées de l’Atlas des oiseaux de France métropolitaine, coordonné par Nidal Issa et Yves Muller (2015, Delachaux et Niestlé, LPO, MNHN et SEOF). Les effectifs mentionnés concernent essentiellement les estimations sur le nombre de couples nicheurs. Toutefois, les oiseaux sont, pour la plupart, éminemment
mobiles, aussi les chiffres évoluent-ils au fil de l’année avec le passage des migrateurs et, dans bien des cas, le départ de certains nicheurs, parfois compensé par l’arrivée d’hivernants. Ainsi peut-on avoir des rougegorges nicheurs qui restent sur place, d’autres qui nous quittent pour aller passer l’hiver en Espagne, alors que d’autres encore nous arrivent d’Europe du Nord, qu’ils ne fassent que passer chez nous pour aller plus au sud ou qu’ils choisissent d’y passer l’hiver. On comprend dès lors la difficulté de fournir des chiffres, même vagues, en dehors de ceux concernant les nicheurs. Le problème ne se pose pas pour les grands migrateurs comme le rougequeue à front blanc qui niche en France et quitte le pays avant l’hiver.
Le moineau friquet – un adulte, à gauche, accompagne ici son jeune – fait partie des espèces de passereaux victimes d’un déclin sensible depuis quelques décennies.
La mésange bleue a-t-elle la même taille qu’un moineau domestique ? Savez-vous qu’un merle pèse autant que vingt roitelets ? L’envergure du pic vert est-elle identique à celle du pic épeichette ?
Ce guide répond à toutes ces questions, et à bien d’autres encore, en vous présentant plus de cinquante oiseaux du jardin classés par taille et illustrés par des photos à taille réelle. Vous pourrez ainsi comparer facilement les oiseaux entre eux et les reconnaître plus facilement.
Chaque oiseau fait l’objet d’une fiche descriptive vous donnant les principales caractéristiques à retenir : longueur, envergure, poids, effectifs, lieux et périodes de présence, comportement, alimentation, chant, cris… Pour compléter le tout, l’auteur vous fournit une multitude d’informations et de conseils pour mieux observer, identifier, connaître les petites habitudes des oiseaux et ainsi mieux les protéger.