STRATÉGIE POUR LE FUTUR DE L’ÉLEVAGE
EN EUROPE

Ces 30 prochaines années, une augmentation globale de la consommation de protéines animales est attendue, associée à l'augmentation de la population mondiale, elle conduira à d'importantes hausses de production à réaliser Les produits d’origine animale permettent d'assurer une alimentation saine et complète, à travers des apports sécurisés en nutriments essentiels
Les produits d’origine animale représentent près de 20% des labels européens.
Les « paysages de l’élevage » et le patrimoine gastronomique constituent un véritable capital identitaire et culturel européen. Face à la concurrence mondiale, l’harmonisation des normes via des clauses miroir est essentielle pour garantir une agriculture de qualité et préserver les savoir-faire et le modèle européen
EST L’OPTION GAGNANTE POUR LA PLANÈTE
Si l’UE souhaite réellement contribuer à une réduction de sa participation aux émissions, à la déforestation et perte de biodiversité mondiale, il est essentiel de promouvoir une production durable en favorisant le maintien de la production et de la productivité au sein de l’Union européenne
L’élevage européen est le leader de l’efficience climatique grâce à des pratiques agricoles optimisées, une meilleure gestion des ressources (terres, eau, alimentation animale) et des normes environnementales strictes
ELEVAGE : DES ACTEURS CLÉS D’UNE AGRICULTURE DURABLE
Biodiversité
Efficience Climatique et Stockage de Carbone
Acteurs clés de l’économie circulaire
Valorisation des ressources naturelles
Bien-être animal
DÉFORESTATION EXTRA EUROPÉENNE
L’UE est le second plus grand importateur de déforestation
Soja-89000ha/an(31%)
32MtCO2eq/an
Viandebovine-28000ha/an(10%)
13MtCO2eq/an
Déforestation importée de l'UE et émissions associées par catégorie de produits. Source : Elaboration de l'auteur à partir de donnés WWF - The continuing impact of EU consumption on nature worldwide - 2021.
EXPLOITERLAFORCEDELA COMPLÉMENTARITÉDESSYSTÈMES
Pour remplir leurs rôles, les systèmes d’élevage européens doivent pouvoir fournir une gamme complémentaire de produits et de services, plutôt que d’être guidés par l’objectif unique de la production de viande L’élevage est un maillon essentiel de l’économie circulaire, au service de la transition énergétique et écologique européenne.
Les producteurs de lait et de viande sont un moteur d’emploi et de dynamisation des territoires Cependant, le secteur connaît une crise démographique (renouvellement générationnel), économique (réduction des aides) et environnementale (exigences de plus en plus strictes) qu’il faut sans plus attendre résoudre. Valeur de la production animale :214 Milliards€
Mettre fin à la décapitalisation et inverser cette tendance, en garantissant une protection efficace du marché intérieur européen et garantissant la pleine réciprocité des normes de l'UE pourlesproduitsimportés
Réévaluer et consolider le budget agricole pour tenir compte de l'inflation, trouver de nouveaux financementseuropéenspoursurmonterlescoûtsdetransitionetlaconcurrenceinternationale.
Garantirunsoutiencouplé à la production de bétail ruminant sans conditions environnementales supplémentaires
Rénover les interventions sur les marchés avec une actualisation des prix de référence pour les clauses de sauvegarde, en tenant compte des nouvelles valeurs de marché, et de nouveaux outils de gestion des marchés, en proposant par exemple des outils de compensation pour le maintien desanimauxsurl'exploitationencasdefortesperturbationsdesmarchés.
Renforcer l'autonomie alimentaire européenne et préserver l'influence de l'UE sur ses marchés d'exportationparunediplomatieéconomiquerenforcée
Encourager l’amélioration génétique des troupeaux par des animaux présentant de meilleures caractéristiques génétiques environnementales, tout en maintenant, voire en améliorant, leur valeur/performanceéconomiqueetproductive.
IntroduiredesmesuresincitativesauseindupremierpilierdelaPACpourlesnouveauxentrants.
Rechercher l'optimisation de la production et des émissions en lançant un plan d'amélioration génétique du cheptel et de diffusion des bonnes pratiques, plutôt qu ' en imposant une restructurationbrutalequiréduiraitlasouverainetéalimentaireeuropéenne.
Assurer une meilleure structuration, cohérente et non destructrice, des mesures de productivité, en favorisant le lien au sol par les prairies, les fourrages et la biodiversité ou les engrais organiques et la méthanisation Stimuler les pratiques agricoles existantes et vertueuses via un éco-régime adapté, en particulier la valorisation des prairies et des pâturages Les éco-régimes devraientinciterlesagriculteursàréduirelesémissionsetàstockerlecarbone.
Développer l'autonomie protéique pour renforcer l'autonomie stratégique de l'UE et intégrer cette question dans les négociations avec l'Ukraine afin de rechercher la complémentarité des systèmesdeproduction
Mieux reconnaître la contribution de l'élevage à la bioéconomie par une approche plus globale des cycles des nutriments et du carbone de toutes les utilisations alimentaires et non alimentaires.
Promouvoirlaqualitéeuropéenne,dontseslabelsreconnusetlescircuitscourts
Rouvrirlaquestiondesdénominationsdelaviandepourprotégerlesproduitsd'origineanimaleet assureruneréelletransparencepourlesconsommateurs.
Aligner l'évaluation des produits à base de viande ou de lait synthétique sur celle des produits pharmaceutiques, en mettant l'accent sur le rôle écologique des ruminants et la qualité nutritionnelleetsanitairedelaviandenaturelle
Inverser la perception négative de l'élevage en promouvant ses avantages environnementaux, territoriauxetsociétaux,notammentpardesplansdepromotion.
Assurer une gouvernance stable et cohérente, axée sur les incitations plutôt que sur les contraintes, et offrir aux producteurs une meilleure visibilité grâce à des relations contractuelles améliorées au sein du secteur ainsi qu'à des outils de couverture renforcés en intégrant aussi les coûtsdeproduction
Obliger les États membres à inclure des outils et des mesures visant à favoriser le renouvellementgénérationneldansleurplanstratégiquenational.
L'élevage durable,
L'élevage durable, une chance POUR
L'élevage durable, une chance POUR
LES CONSOMMATEURS
Chiffres
LES CONSOMMATEURS
LES CONSOMMATEURS
L’élevage européen est reconnu mondialement pour produire des produits d’origine animale de haute qualité, répondant aux normes de sécurité alimentaire les plus strictes au monde L’UE applique des normes rigoureuses, notamment en ce qui concerne les hormones de croissance, les antibiotiques et la traçabilité des produits d’origine animale
Depuis les années 80, l’UE interdit l’utilisation d’hormones de croissance pour le bétail Cette interdiction a été renforcée à plusieurs reprises dans les années 1990 et en 2006 avec l’exclusion des antibiotiques utilisés comme facteurs de croissance.
Cette norme en vigueur dans l'UE n ’est pas efficacement appliquée aux pays tiers, mais les contraintes d’importations vers l’UE sont en partie contournées ou mal contrôlées
Les disparités entre les réglementations européennes et celles d’autres grands pays exportateurs soulèvent des enjeux de concurrence sur le marché mondial de la viande et alimentent le débat sur la cohérence dans l’approche européenne en matière de standards de production, notamment en matière de bien-être animal et de normes environnementales pour lesquels une totale réciprocité devrait être assurée pour les produits importés en Europe. Les attentes des consommateurs européens sont donc ignorées.
-53%
DEPUIS LES ANNÉES 80, L’UE INTERDIT L’UTILISATION D’HORMONES DE CROISSANCE POUR LE BÉTAIL
RÉDUCTION DES VENTES TOTALES
D’ANTIBIOTIQUES DANS L’UE DEPUIS
2011
3rd and 4th generation cephalosporins
Polymyxins
Fluoroquinolones
Other quinolones -49% -91% -25% -90%
Source : European Medicines Agency (EMA). Surveillance européenne de la consommation d'antimicrobiens vétérinaires (ESVAC)
USAGE DES ANTIBIOTIQUES POUR LE BÉTAIL PAR KG DE VIANDE (2020)
Milligrammes d'antibiotiques utilisés par kilogramme de bétail. Ce chiffre est ajusté pour tenir compte des différences de nombre de têtes de bétail et d'espèces en le normalisant à une unité corrigée en fonction de la population. (PCU). Source : Our World In Data.
L'UE applique des normes strictes à son agriculture, tandis que les pays tiers exportateurs bénéficient de règles moins contraignantes, créant une distorsion de concurrence. Des "mesures et clauses miroir" sont nécessaires pour instaurer la réciprocité des règles commerciales. Les récentes manifestations des agriculteurs européens soulignent la nécessité de protéger l’agriculture européenne fragilisée par cette concurrence déloyale
La réduction de la production animale de l’UE est souvent proposée comme un moyen de résoudre les défis environnementaux
Pourtant, une substitution par des importations issues de pays aux réglementations moins contraignantes risquerait d’accroître la déforestation, les émissions de gaz à effet de serre et transférer la pression sur les ressources naturelles à l’échelle mondiale.
Depuis plusieurs décennies, l'UE observe une augmentation de sa superficie forestière, avec en parallèle, une diminution de ses surfaces agricoles, en particulier ses prairies. L'Union européenne ne devrait pas se féliciter de ce changement : en recourant à des importations croissantes, l'UE contribue à la déforestation des pays tiers
L'UE est aujourd’hui le deuxième plus grand importateur de déforestation tropicale où le stock carbone est bien supérieur aux forêts européennes, détruisant ainsi le stock de carbone des forêts tropicales
Si l’UE souhaite réellement contribuer à une réduction de sa participation aux émissions, à la déforestation et perte de biodiversité mondiale, il est essentiel de promouvoir une production locale durable en favorisant le maintien de la production et de la productivité sur son propre territoire.
Les prairies permanentes permettent une séquestration bien plus importante de carbone que les sols cultivés, contribuant ainsi à la réduction de l’impact en GES de l’élevage. À l’inverse, la mise en culture d’anciens sols forestiers ou herbagers provoque un relargage important de carbone dans l’atmosphère.
-10 Mha de terres agricoles dans l’UE
11 Mha de déforestation en lien avec les importations UE
L’Union européenne a enregistré une réduction de 10 millions d’hectares de sa surface agricole (dont 5 Mha de prairies et pâturages permanents) depuis les années 90 Sur la même période, on estime que les importations de l’UE ont entraîné la déforestation de plus de 11 millions d’hectares (dont 5,5 Mha pour le soja et les tourteaux de soja et 1,2 Mha pour les produits de l'élevage destinés à la consommation directe (principalement la viande de bœuf)).
L’UE est le second plus grand importateur de déforestation
Soja-89000ha/an(31%) 32MtCO2eq/an
Viandebovine-28000ha/an(10%) 13MtCO2eq/an
Déforestation importée de l'UE et émissions associées par catégorie de produits. Source : Élaboration de l'auteur à partir de donnés WWF - The continuing impact of EU consumption on nature worldwide - 2021.
Le soja, l'huile de palme et le bœuf sont les principaux moteurs de la déforestation tropicale importée de l’UE. Cela souligne l’importance de maintenir une production de viande en Europe, pour limiter les importations et de renforcer l’autonomie protéique et fourragère en limitant la dépendance aux importations, notamment en provenance de zones tropicales.
représente le plus grand potentiel d'atténuation des émissions au niveau mondial
La majorité de ce potentiel se trouve dans les forêts tropicales qui ont un des plus hauts potentiels de stockage du carbone : 240 t CO2 eq/ha répartis dans les sols et dans la biomasse.
Pour remplir leurs rôles, les systèmes d’élevage européens doivent pouvoir fournir une gamme complémentaire de produits et de services, plutôt que d’être guidés par l’objectif unique de la production de produits de base.
Les systèmes d’élevage de ruminants à l’herbe ont une incidence positive sur l’environnement : biodiversité, stockage de carbone, etc
Pourtant, le secteur est en déclin depuis plusieurs années, menaçant ces bénéfices La conversion des prairies permanentes en terres arables reste le premier facteur expliquant la diminution de la teneur en carbone de ces sols et des pertes de biodiversité liées en Europe Une nouvelle baisse de la production européenne de ruminants, pourrait entrainer la conversion de prairies en cultures et réduire la disponibilité en effluents d’élevage pour amender les sols, ce qui provoquerait une augmentation du déstockage de carbone, l’augmentation des émissions et la perte d’écosystèmes à haute valeur écologique.
La diversité au niveau européen des systèmes d’élevages est une force au service de la transition énergétique et écologique L’élevage peut joue un rôle clé dans les objectifs de décarbonatation du mix énergétique européen : les élevages produisent des déjections, utilisées pour apporter de la matière organique et des nutriments au sol, et qui peuvent aussi être valorisés en biogaz grâce aux installations de méthanisation, évitant ainsi l'utilisation de combustibles fossiles
Au-delà de son intérêt pour la production énergétique, la méthanisation produit du digestat, qui est utilisé comme fertilisant naturel par les agriculteurs
Chiffres clés
L’ÉLEVAGE acteur clé d’une agriculture durable
BIODIVERSITÉ :
50 % des espèces végétales endémiques de l’Europe dépendent du biotope des prairies 50 % des espèces d’oiseaux dépendent des prairies pour leur alimentation et leur reproduction
VALORISATION DES RESSOURCES NATURELLES :
Les élevages, basés sur des systèmes mixtes et de pâturages, valorisent des ressources et des territoires autrement inexploitables par l'Homme (ressources herbeuses, résidus de cultures, etc ) Ces systèmes sont des contributeurs net positifs à la disponibilité en protéines de haute qualité nutritionnelle pour l'Homme.
BIEN-ÊTRE ANIMAL :
Accès au plein air et expression des comportements naturels
STOCKAGE DE CARBONE :
L’élevage de ruminants et l’un des rares secteurs capables de compenser une partie de ses émissions en stockant du carbone dans le sol.
PERMANENTE (stocks t CO2eq/ha)
Source : ADEME, IPCC, NASA
:
Le plan REPowerEU de la Commission européenne fixe un objectif de production de 35 bcm de biométhane par an d'ici 2030 Selon certaines études la valorisation du fumier pourrait contribuer jusqu’à hauteur de 16 bcm
:
Le secteur de l’élevage est un acteur incontournable de l’économie circulaire
Effluents d’élevage
45%
Figure - Estimation de la répartition des apports d’azote dans la fertilisation des sols agricoles
Source : INRAE
L’ÉLEVAGE EUROPÉEN : UN SECTEUR ÉCONOMIQUE ET COMMERCIAL STRATÉGIQUE
La valeur de la production agricole de l'UE s'élevait à 537,1 milliards d'euros en 2023 Près de 40% de la production totale provenaient des animaux et des produits animaux, soit 214 milliards d'euros.
La contribution de l'élevage est beaucoup plus élevée dans certains États Membres (Irlande, Danemark, Belgique) Le secteur du lait arrive en tête (14%), suivi du porc (9%), des ruminants (8%), de la volaille (5%) et des œufs (3%).
Si l’UE occupe historiquement une place importante dans le domaine des productions animales mondiales, à contre-courant des tendances observées dans le monde, sa production, notamment de viande bovine, observe une diminution constante Les baisses de production ont été particulièrement marquées en France (-4,4% /2021), en Allemagne (-8,4%) et en Pologne (-2,6%)
Cette réduction de la production, qui a limité le disponible consommable et exportable à la fois intra et extra-UE, associée à une forte hausse des prix, a réduit la capacité du secteur européen à répondre à la demande des marchés émergents L’UE importe de plus en plus et exporte de moins en moins vers les pays tiers Elle apparaît de plus en plus marginale dans le commerce entre grands bassins mondiaux
À noter que les échanges intracommunautaires de viande bovine ont nettement repris après s’être contractés en 2020, représentant 37 % des volumes abattus en 2022 (35 % en 2019)
Dans ce contexte, une réflexion stratégique sur l’avenir de l’élevage européen apparaît essentielle, notamment face à la concurrence accrue des produits extra-UE (Mercosur, etc...).
L’ÉLEVAGE, UN PILIER ÉCONOMIQUE MAJEUR DU SECTEUR AGRICOLE EUROPÉEN
Valeur de la production animale :214 Milliards€
Figure - Output of the agricultural industry - 2023.
Source : Eurostat
UNE PRODUCTION UE DE VIANDE BOVINE QUI CONTINUE DE DIMINUER à contre-courant des tendances mondiales
Chiffres clés -33% +38%
L’UE IMPORTE DE PLUS EN PLUS et exporte de moins en moins vers les pays tiers
La baisse de la production UE a limité le disponible exportable, et la hausse des cours a réduit la présence des viandes européennes sur les marchés émergents.
L’élevage est une des activités les plus structurantes des territoires ruraux dans l’Union européenne (UE) Il joue un rôle économique, territorial et environnemental important dans de très nombreuses régions agricoles.
En 2020, l’UE27 comptait 9 millions d’exploitations agricoles C’est 37 % de moins que 15 ans plus tôt, en 2005, selon les chiffres publiés par Eurostat, le 3 avril 2023 Le nombre de fermes de polyculture-élevage (mixed farming sur le graphique) a baissé de 60 % en 15 ans, et celui d’élevages spécialisés de 45 % Le nombre de fermes spécialisées en cultures s ’est aussi érodé mais avec une baisse de “seulement” 15 % par rapport à 2005.
L'agriculture européenne connaît une crise démographique et économique, qui touche tout particulièrement le secteur de l’élevage
Les jeunes générations, pourtant intéressées à en croire les effectifs de l’enseignement agricole, se détournent de ce secteur en raison des conditions de travail difficiles, du manque de reconnaissance, de revenu et de la pression économique croissante Cette tendance, couplée à la réduction des aides et aux exigences environnementales de plus en plus strictes, fragilise un secteur pourtant essentiel à l’économie rurale européenne.
LES ÉLEVAGES EUROPÉENS EMPLOIENT ENVIRON DE PERSONNES
Source : INRA - Spécialisation territoriale et concentration des productions animales européennes : état des lieux et facteurs explicatifs
SPÉCIALISATIONS DES FERMES UE (2020)
Polyculture élevage 19%
EN 15 ANS UNE BAISSE DE :
DU NOMBRE DE FERMES SPECIALISEES EN ELEVAGE
DU NOMBRE DE FERMES DE POLYCULTURE-ÉLEVAGE