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N°6 OCTOBRE DÉCEMBRE 2001

POLYALGIES Conduites à tenir, fiches pratiques : - Conduite à tenir devant une polyalgie et des douleurs ambulatoires - Diagnostic différentiel - Traitement analgésique - Les points forts de l’examen clinique - Pièges diagnostiques - Imagerie médicale

Observation : - Myélome multiple

?

?

Hahaha ! Personne ne me connait ici!

DOSSIER :

DOULEURS AMBULATOIRES

DU CHIEN ET DU CHAT Parmi les pièges diagnostiques les plus difficiles à éviter, les polyalgies et les douleurs ambulatoires restent un défi ...

Management et entreprise Dossier et fiches-action : Mieux médicaliser les jeunes

pour les médicaliser plus longtemps le renforcement de la médicalisation des seniors ne doit pas faire se relâcher l’effort en direction des jeunes...

Améliorer son organisation :

comment assurer la qualité du service rendu

REVUE DE FORMATION CONTINUE À COMITÉ DE LECTURE

Féline - Conduite thérapeutique pour l’analgésie - Alimentation : un régime tout viande

Observation : - Affection algique

Rubriques - Principe actif : le fentanyl - Geste : l’arthrocentèse - Analyse et commentaires : le liquide synovial - Comportement : évaluation comportementale du chaton - Immunologie et le B.A. BA en BD : la réponse immunitaire spécifique 2. la réponse mémoire

- N.A.C. : comment vermifuger les lapins, les furets et les rongeurs ?

Stratégie Entretiens autour de la nutrition : - une gamme exclusive pour

développer la nutrition-santé

- un formidable vecteur de la santé

Cas clinique :

- Optimiser la médicalisation des jeunes - La solution


sommaire Editorial par Marc Gogny

7

Test clinique : Urologie canine Ronan Cognet, Ludivine Houdre réponses page 93 Questions-réponses sur douleur et morphiniques par Jack-Yves Deschamps

4 9

CANINE Conduite à tenir devant les polyalgies et les douleurs ambulatoires chez le chien et le chat - Isabelle Valin Fiche : Conduite à tenir devant une polyalgie et des douleurs ambulatoires Isabelle Valin Fiche : Pièges diagnostiques - Isabelle Valin Fiche : Les points forts de l'examen clinique - Colette Arpaillange, Isabelle Valin Diagnostic différentiel : reconnaître les polyalgies - Luc Chabanne Traitement analgésique des polyalgies chez les carnivores - Patrick Verwaerde Modalités d’approvisionnement des morphiniques - Jack-Yves Deschamps Imagerie des polyalgies et douleurs ambulatoires - Daniel Huber, Jean-François Bardet Observation clinique : Myélome multiple manifesté par un état polyalgique Didier Lanore

N°6 OCTOBRE DÉCEMBRE 2001

DOSSIER 11

POLYALGIES et douleurs ambulatoires

19 20 21 23 31 38 39 43

FÉLINE Conduite thérapeutique pour l'analgésie chez le chat - Patrick Verwaerde, Géraldine Jourdan Observation clinique : Affection algique chez un chat - Guillaume Derré Alimentation : Un régime tout viande chez le chaton - Géraldine Blanchard, Juan Hernandez, Bernard Paragon

49 53 59

RUBRIQUES Principe actif : Le fentanyl - Marion Fusellier, Eric Sachot, Marc Gogny Comportement : Évaluation comportementale du chaton - Catherine Mège Geste : l'arthrocentèse - Daniel Huber, Jean-François Bardet Analyse et commentaires : Le liquide synovial Daniel Huber, Jean-François Bardet Immunologie : La réponse immunitaire spécifique (2e partie) : La réponse mémoire Séverine Boullier, Stéphane Bertagnoli Le B.A.BA en BD : Les commandos de l'immunité : 2e partie Frédéric Mahé N.A.C. : Comment vermifuger les lapins, les furets et les rongeurs ? Arnaud Charondière

63 65 67 68

70 71 73

MANAGEMENT ET ENTREPRISE Dossier - Mieux médicaliser les jeunes pour les médicaliser plus longtemps Philippe Baralon Fiche action - La médicalisation des jeunes : les différentes étapes - Philippe Baralon Fiche - ASV : comment vendre une consultation d’achat au téléphone ? Philippe Baralon Stratégie : - Un entretien avec Fabrice Crépin, directeur du circuit vétérinaire chez Royal Canin - Un entretien avec Christophe Tremblay, directeur général de Virbac France Cas clinique - les données : optimiser la médicalisation des jeunes Philippe Baralon Améliorer son organisation : comment assurer la continuité d’un service de qualité Fabrice Labadie Cas clinique : la solution Test clinique : les réponses Formation continue : les réponses

Souscription d’abonnement page 94

79 82 85 86 87

CANINE

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FÉLINE RUBRIQUE

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MANAGEMENT

93 94

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 3


gestes et gestion

LE NOUVEAU PRATICIEN vétérinaire NÉVA Europarc - 1 Allée des Rochers 94045 CRÉTEIL CEDEX Tél. 01 41 94 51 51 • Fax 01 41 94 51 52 e-mail neva@neva.fr

test clinique

Conseil scientifique Gilles Bourdoiseau (E.N.V.L.) Jean-Luc Cadoré (E.N.V.L.) Dominique Fanuel (E.N.V.N.) Pascal Fayolle (E.N.V.A.) Marc Gogny (E.N.V.N.) Jean-François Guelfi (E.N.V.T.) Jean-Pierre Jégou (praticien) Roger Mellinger (praticien)

questions Ronan Cognet,

Rédacteurs en chef Colette Arpaillange (E.N.V.N.) Christophe Hugnet (praticien)

Rédacteur en chef management Philippe Baralon (Phylum)

Comité de rédaction Xavier Berthelot (reproduction, E.N.V.T.) Géraldine Blanchard (Alimentation-nutrition, E.N.V.A.) Corine Boucraut-Baralon (Diagnostic, E.N.V.T.) Patrick Bourdeau (Dermatologie, E.N.V.N.) Florence Buronfosse (Toxicologie, E.N.V.L.) Luc Chabanne (Immunologie-Hématologie, E.N.V.L.) Bernard Clerc (Ophtalmologie, E.NV.A.) Valérie Chetboul (Cardiologie, E.N.V.A.) René Chermette (Parasitologie-mycologie, E.N.V.A.) Olivier Dossin (Médecine interne, néphrologie, E.N.V.T.) Valérie Dramard (Comportement, praticien) Olivier Jongh (Ophtalmologie, praticien) Emmanuel Faget (Internet, praticien) Alain Fontbonne (Elevage et collectivité, E.N.V.L.) Yvan Gamet (Médecine interne, praticen) Alain Ganivet (Elevage et collectivité, praticien) Laurent Marescaux (Imagerie, E.N.V.N.) Jean-Louis Pellerin (Microbiologie, E.N.V.N.) Claude Petit (Pharmacie-toxicologie, E.N.V.T.) Patricia Ronsin (Reproduction, E.N.V.T.) Etienne Thiry (Virologie, Liège)

Publicité Maryvonne Barbaray Carine Bedel (publicité-promotion) Marie Servent (publicité-promotion)

1 Quelles mesures urgentes mettez-vous en place ?

Maryvonne Barbaray Revue bimestrielle éditée par LES NOUVELLES ÉDITIONS VÉTÉRINAIRES ET ALIMENTAIRES – NÉVA SARL au capital de 50 000 F. Siège social : Europarc - 1 Allée des Rochers 94045 CRÉTEIL CEDEX

1 Aspect du fourreau. Noter la tuméfaction de la portion moyenne du fourreau ainsi que son aspect flasque sur la portion crâniale (photo R. Cognet).

a. une cystotomie b. une urétrotomie associée à une plastie du pénis c. Une amputation du pénis associée à une urétrostomie.

a. un dosage de la kaliémie b. un dosage de la créatininémie et de l’urémie c. un dosage de la natrémie d. un dosage de la réserve alcaline.

Directeur de la publication

Unité de Chirurgie de L’ENVN E.N.V.N. Atlanpole la Chantrerie BP 40706 44307 Nantes Cedex

3 Quelles mesures chirurgicales proposez-vous ?

2 Quels examens complémentaires proposez-vous ?

NÉVA Europarc - 1 Allée des Rochers 94045 CRÉTEIL CEDEX Tél. 01 41 94 51 51 • Fax 01 41 94 51 52 e-mail neva@ neva.fr

Ludivine Houdre

À l’examen clinique, l’animal présente une déshydratation estimée à 8 p. cent et un abdomen douloureux, la palpation abdominale met en évidence un globe vésical. L’examen du pénis est délicat car très douloureux, une importante tuméfaction est notée à mifourreau (photo 1).

a. une cystocentèse b. la pose d’un cathéter vésical sus-pubien c. une fluidothérapie d. une radiographie

Abonnement Carine Bedel - Marie Servent

Réponse à ce test page 93

comité de lecture

C.P.P.A.P 0901 T801 21 I.S.S.N. 0399-2519 Impression - photogravure : Imprimerie Nouvelle Normandie 24, rue Haëmers B.P. 14 76191 - YVETOT Cedex

Toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, de la présente publication sans autorisation est illicite et constitue une contrefaçon. L’autorisation de reproduire un article dans une autre publication doit être obtenue auprès de l’éditeur, NÉVA. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre français d’exploitation du droit de la copie (C.F.C.). LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 4

U

n chien mâle croisé Griffon, âgé de 8 ans, non reproducteur, est présenté en consultation pour des saignements urinaires importants et une modification de l’apparence du fourreau. Les propriétaires ont constaté ces signes au retour d'une fugue. Ils évoquent aussi un amaigrissement, une anorexie, une polydipsie, une anurie et des vomissements.

4

Hélène Arnold-Tavernier, Jean-François Bardet, Michel Baron, Jean-Jacques Bénet, Emmanuel Bensignor, Juliette Besso, Gérard Bosquet, Vincent Boureau, Didier Boussarie, Régis Braque, Stéphane Bureau, Jean-Jacques Bynen, Sylvie Chastant-Maillard, Claude Chauve, Yan Cherel,

Cécile Clercx (Liège), Jean-Pierre Cotard, Jack-Yves Deschamps, Pierre Desnoyers, Gilles Dupré, Patrick Devauchelle, Marc Eloit, Brigitte Enriquez, Pascal Fanuel, Frédéric Gaschen (Berne, Suisse), Olivier Gauthier, Emmanuel Gaultier, Sébastien Géroult, Jean-Pierre Genevois,

Isabelle Goy-Thollot, Laurent Guilbaud, Jacques Guillot, Philippe Hennet, Marc Henroteaux (Liège, Belgique), Yves Legeay, Bertrand Losson (Liège, Belgique), Leila Loukil, Sandrine Macchi, Lucile Martin-Dumon, Philippe Masse, Martine Mialot, Jean-Paul Mialot,

Pierre Moissonnier, Patrick Pageat, Pierre Paillassou, Luc Poisson, Jean-Louis Pouchelon, Alain Régnier, Yannick Ruel, Yves Salmon, Odile Sénécat, Brigitte Siliart, Isabelle Testault, Jean-Jacques Thiébault, Bernard Toma, Muriel Vabret, Isabelle Valin.


Editorial Gérer la douleur, c’est d’abord la reconnaître et l’évaluer a douleur a “le vent en poupe". Plus exactement, la nécessité d’une prise en charge de la douleur chez l’animal fait l’objet d’une prise de conscience progressive, faisant écho aux récentes décisions ministérielles de Bernard Kouchner, Ministre de la Santé, et à sa volonté de développement des centres d’algologie humaine en France. Cette prise de conscience était nécessaire, tant il était systématique de sous-estimer la douleur animale, voire d’en nier l’existence dans un certain nombre de situations pathologiques. Pour autant, le chemin qui reste à parcourir est encore long et sinueux, pour deux raisons principales.

L

Marc Gogny

Unité de Pharmacologie et Toxicologie, E.N.V.N. Atlanpôle, La Chantrerie, BP 40706 44307 Nantes Cedex 03

Pour mieux gérer la douleur, encore faut-il savoir la reconnaître, et l’évaluer. Les outils disponibles sont peu nombreux, et sont encore à valider. Les échelles classiquement utilisées chez l’homme, comme l’échelle visuelle analogique, sont d’un emploi délicat en médecine vétérinaire. Les grilles multiparamétriques semblent mieux à même de distinguer les faux positifs ou les faux négatifs, et sont d’un emploi facile lorsqu’elles sont bien conçues. L’Association Vétérinaire pour l’Anesthésie et l’Analgésie Animale (4A-Vet), de création récente, a élaboré et proposé deux grilles d’évaluation de la douleur postopératoire, l’une pour le chien et l’autre pour le chat. Ces grilles, d’un grand intérêt, restent cependant à valider statistiquement sur une population importante d’animaux algiques. En outre, elles ne sont pas transposables à tous les types de douleur, notamment les douleurs chroniques, et il convient de réfléchir, le cas échéant, à des moyens d’évaluation adaptés.

Mener des études complémentaires pour mieux connaître les interactions médicamenteuses possibles ou les effets à long terme des traitements analgésiques La douleur, reconnue et évaluée, peut et doit être combattue. Des moyens analgésiques simples et efficaces sont désormais disponibles dans de nombreuses espèces, avec des protocoles adaptés aux trois principaux niveaux de douleur (douleur légère ou palier I, douleur modérée à sévère ou palier II, douleur intense ou palier III). Un effort sur l’information et la formation peut encore être fait pour que la profession connaisse mieux les substances employées, notamment les morphiniques, et maîtrise mieux ces protocoles. De nombreuses études complémentaires sont encore à mener, pour mieux connaître, par exemple, les interactions médicamenteuses possibles ou les effets à long terme des traitements analgésiques. La douleur iatrogène est souvent perçue comme une fatalité. Là encore, une réflexion sur ses pratiques personnelles amène à découvrir fréquemment qu’une alternative moins agressive est possible à peu de frais. Certes, la dimension économique reste une préoccupation souvent mise en avant. Mais que vaut le surcoût qu’implique le changement de pratique, face aux conséquences médicales et éthiques de la démarche ? Le client n’est pas insensible, loin de là, aux efforts que l’on développe pour éviter des souffrances à son animal. Ainsi, au bilan, c’est tout l’ensemble animal/propriétaire/vétérinaire qui bénéficie d’une meilleure prise en charge de la douleur.

Marc Gogny

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 7


questions réponses sur… douleur et morphiniques ■ Pour quel type d’intervention

doit-on penser à évaluer la douleur ? Toute intervention chirurgicale implique une douleur. Le clinicien estime a priori l’intensité de la douleur. Il met en place une analgésie en fonction de la douleur attendue dans la plupart des cas. Or, la douleur est une sensation individuelle. Un acte peut être perçu comme très douloureux par un animal et peu douloureux par un autre. L’évaluation de la douleur permet d’adapter l’apport d’analgésique en fonction des besoins. L’objectif est de procurer une analgésie satisfaisante en limitant les effets secondaires liés aux analgésiques.

■ Peut-on gérer la douleur sans recourir aux morphiniques ? > Oui, la douleur peut être gérée, dans certains cas, sans morphinique : 1. certaines douleurs digestives, articulaires, musculaires relèvent de mécanismes particuliers : - les douleurs digestives répondent aux antispasmodiques ; - les douleurs articulaires répondent aux anti-inflammatoires ; - les douleurs musculaires répondent aux myorelaxants, … ; 2. les douleurs chirurgicales faibles à modérées ne justifient pas l’utilisation d’un morphinique : extraction d’un croc de lait, biopsie cutanée, etc. D’autres interventions réputées modérément douloureuses (castration, ovariectomie) peuvent être gérées sans avoir recours aux morphiniques, avec des alpha2-agonistes et/ou des anti-inflammatoires non stéroïdiens et/ou des anesthésiques locaux. Mais, les morphiniques diminuent, voire dispensent de l’utilisation conjointe d’autres analgésiques. > Non, la douleur ne peut être gérée sans avoir recours aux morphiniques, pour les douleurs intenses.

■ Peut-on encore réaliser une anesthésie

“éthiquement correcte” sans morphinique pour les interventions chirurgicales de convenance ? Oui. Une anesthésie, comprenant un alpha 2-agoniste (médétomidine ou xylazine) et un anesthésique local, suffit à gérer la douleur peropératoire pour les interventions de convenance (stérilisation, chirurgie esthétique). Mais un morphinique utilisé à faible dose procure la même analgésie. Ceci n’est pas le cas de l’onychectomie, une intervention particulièrement douloureuse.

1 Adapter l’apport d’analgésique en fonction des besoins (photo Service de médecine, E.N.V.N.).

■ Doit-on prendre en compte la douleur du chiot lors de caudectomie réalisée à l’âge de un à trois jours ? Je ne sais pas répondre à cette question. Il semble désormais établi que le très jeune enfant ressente la douleur et qu’une douleur infantile peut avoir des répercussions tardives sur le psychisme. Qu’en est-il chez le chiot âgé d’un jour chez lequel le système nerveux est encore très imparfait ? Je l’ignore. Je préconise actuellement une infiltration de la base de la queue avec un anesthésique local. Le doute doit profiter à l’animal ... ■ Faut-il utiliser des grilles d’évaluation de

la douleur ou peut-on faire confiance à sa seule appréciation clinique ? Ces grilles sont-elles fiables quels que soient l’âge et la race de l’animal ? L’utilisation d’une grille d’évaluation de la douleur témoigne d’une démarche volontaire de prise en charge de la douleur. Le praticien aguerri en algologie peut en faire l’économie. Son expérience lui permet alors d’apprécier rapidement les paramètres de la grille et d’en déduire l’intensité de la douleur. La mesure donnée par une grille doit effectivement être modulée en fonction de l’âge. Les individus jeunes expriment plus la douleur, les individus très âgés l’expriment souvent peu. La race intervient parce qu’elle sous-entend un certain “contexte social”. Un chien de chasse rustique exprime moins la douleur qu’un Yorkshire dorloté chez lequel la part émotionnelle de la douleur est très élevée. ❒

réponses de Jack-Yves Deschamps Unité de Médecine E.N.V.N. E.N.V.N. Atlanpole la Chantrerie BP 40706 44307 Nantes Cedex 03

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE - DÉCEMBRE 2001 - 9


conduite à tenir

lors de polyalgies

et de douleurs ambulatoires chez le chien et le chat

Isabelle Valin Clinique Vétérinaire Chirurgicale 5, rue Fernet 94700 Maisons Alfort

Comment différencier une boiterie liée à un trouble du système musculo-squelettique de celle provoquée par la douleur ?

L

es douleurs ambulatoires sont provoquées par une affection multifocale qui entraîne un phénomène douloureux pour l'animal qui se déplace. La difficulté générale de l’animal à se déplacer, l'aspect douloureux plus que mécanique d'une boiterie, ou l'absence de boiterie sont ainsi prises en compte. MOTIFS DE CONSULTATION

Rares sont les propriétaires de chien qui signalent lors de la prise de rendez-vous : “mon chien souffre de polyarthrite rhumatoïde, que faire !”. Le motif de la consultation est souvent très vague : l’animal refuse de se déplacer, ou il se déplace à petits pas, marche “comme sur des œufs” , le dos voussé, le nez au sol, donne l’impression de “boiter de partout”, se plaint dès qu’il tente de bouger, reste figé dans une position qu’il ne quitte qu’au prix d’efforts ou de plaintes évidentes, ou bien encore, il reste dans un coin et devient agressif dès qu’il est sollicité (photo 1). ÉTAPE NUMÉRO 1 : L’ÉCOUTE Particulièrement pour ce motif de consultation, l'écoute du propriétaire est primordiale. Il convient de noter les conditions d’apparition des symptômes, la possibilité ou non d'un traumatisme, la durée des symptômes, les traitements administrés et leur efficacité. Cette écoute est très importante car : - la douleur n'est pas localisée ou localisable ; - l'animal peut “bluffer” et ne pas exprimer cette douleur en raison du stress, des odeurs laissées pas ses congénères. ● Un chien souffrant de hernie discale cervicale peut hurler spontanément de douleur à la maison et se déplacer normalement en salle de consultation, une fois la crise de cervicalgie passée. Le propriétaire décrit son animal qui hurle de façon fugace, comme s’il avait reçu une décharge électrique, se fige, baisse la tête, vousse le dos, voire recule, puis avance avec précaution, comme sur des œufs. ●

Objectif pédagogique Comment aborder la consultation d’un animal qui présente des douleurs ambulatoires. 1 Caniche atteint de polyarthrite rhumatoïde. Noter son incapacité à marcher seul, sa souffrance quand il est doit se tenir debout, son mauvais état général, l'aspect de son poil et son amaigrissement (photos I. Valin).

Motifs de consultation Les motifs de consultation sont extrêmement vagues.

ÉTAPE NUMÉRO 2 : OBSERVER L’ANIMAL EN LIBERTÉ Regarder l'animal se déplacer dans la salle de consultation est une étape à ne pas négliger. Elle peut ne pas être aisée car l'animal algique peut rechigner à se déplacer. Il convient alors d'user de stratagèmes : proposer des friandises, faire croire au départ des maîtres. La difficulté devient majeure chez le chat qui, plaqué au sol, gagne le dessous d'une chaise ou un recoin de la salle de consultation pour ne plus en bouger. Un film vidéo, réalisé à la maison par les propriétaires, permet de visualiser la démarche de l’animal. L'observation permet de repérer les positions antalgiques. Par exemple, un ventre tendu et/ou levretté signe une douleur de la sangle abdominale, non pas forcément viscérale. Une démarche dos voussé et tête basse est une position antalgique vertébrale (cervicale ou thoraco-lombaire). À ce stade, il est nécessaire de chercher à différencier une boiterie isolée d'une boiterie multifocale. La vigilance s'impose pour des animaux qui boitent de façon évidente sur un membre alors qu’en les observant de plus près, ils sont boiteux d'au moins un autre membre, ou en tous cas ils compensent sur un autre membre. Le chien dysplasique des hanches, présenté pour une boiterie antérieure, est un cas typique.

11

Essentiel ❚ Les données sur l’âge, la race de l'animal et l'anamnèse permettent d’orienter le diagnostic vers les polyarthrites : - arthrosiques ; - immunitaires ; - infectieuses ; - traumatiques ; - dégénératives (ostéochondrose), donc de préconiser les examens complémentaires adéquats.

CANINE - FÉLINE

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 11


Fiche

conduite à tenir devant une polyalgie

et des douleurs ambulatoires

Isabelle Valin Clinique Vétérinaire Chirurgicale 5, rue Fernet 94700 Maisons Alfort

Comment rationaliser l’examen clinique lors de polyalgie. Rechercher une atteinte de l’état général

ÉTAPE

Si l’abdomen n’est pas souple, explorer l’intégrité des organes abdominaux - Radiographie - Prise de sang (hématologie, biochimie) - Échographie

ÉTAPE

Diagnostic différentiel - Radiographie - Analyse du liquide synovial

ÉTAPE

ÉTAPE

- Amaigrissement, - Hyperthermie, ...

Affections inflammatoires ou infectieuses - Panostéite - Polyarthrite septique ou immune - Spondylodiscite, parésie, paralysie - Néoplasie généralisée Palper l’abdomen

- Péritonite - Pancréatite, ...

Rechercher un ou des épanchements articulaires

Inflammations articulaires - Polyarthrites - Arthrose - Troubles de l’ossification enchondrale

Rechercher une douleur osseuse diaphysaire - Panostéite - Myélome - Syndrome de Cadiot Ball - Métastases osseuses

Rechercher une douleur nerveuse radiculaire bilatérale

Diagnostic différentiel - Radiographie - Myélographie - Analyse du liquide céphalo-rachidien - Scanner, IRM - Affections vertébrales

Rechercher une affection cérébrale

Diagnostic différentiel - Analyse du liquide céphalo-rachidien - Scanner, IRM

ÉTAPE ❺

ÉTAPE

CANINE - FÉLINE

- Hypertension intracrânienne - Dégénérescence corticale - Méningites

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 19


pièges diagnostiques le clinicien à l’épreuve Isabelle Valin

Clinique Vétérinaire Chirurgicale 5, rue Fernet 94700 Maisons Alfort

Ces quelques observations vous aideront à résoudre des cas diagnostiques parfois difficiles …

Cas n° 1

Cas n° 3

“Crises douloureuses” et … hernie discale ● Un Teckel, opéré pour hernie discale thoraco-lombaire qui avait entraîné une paraplégie deux ans auparavant, est présenté pour des crises douloureuses lombaires et une diminution spontanée d'activité. ● En consultation, le chien saute, fait la fête, ne présente aucune douleur ni aucun déficit neurologique. Un traitement médical antalgique est mis en œuvre. ● Quelques jours plus tard, le chien évolue vers la paraplégie, signant ainsi sa deuxième hernie discale, un espace intervertébral plus haut que la précédente.

Dos voussé, ventre tendu et … ficelle Un Teckel est présenté, par un amateur connaissant leur sensibilité aux hernies discales. Il marche dos voussé, nez au sol. Il gémit spontanément, son ventre est tendu, n’a ni symptômes digestifs ni de déficit proprioceptif. ● Quand les vomissements sont apparus, le chien recevait des anti-inflammatoires depuis cinq jours, et conservait un transit digestif. Difficile de rapporter ces symptômes à un syndrome occlusif ! ● Quelques jours de fourvoiement et quand le clinicien réévalue son examen clinique, la laparotomie exploratrice est dépassée… Ce chien avait avalé une ficelle ! ●

Cas n° 2 Cervicalgie et… corps étranger Un Labrador est présenté pour cervicalgie après avoir joué, quinze jours auparavant, avec un morceau de bois. Des antalgiques avaient été prescrits. ● Lors de la consultation, le chien est tellement douloureux que seuls ses yeux bougent quand on le sollicite : il est littéralement “paralysé de douleur”. Il ne présente pas de déficit neurologique. Une myélographie et un scanner sont réalisés. Quelques jours plus tard, l'animal évolue vers la tétraplégie. ● On retire, par laminectomie cervicale, un bout de bois, qui s’était planté dans un trou de conjugaison C4-C5, et avait migré dans le canal rachidien.

Cas n° 4

Difficultés locomotrices et … rupture de vessie Un Gronendael est présenté pour difficultés locomotrices (marche à petits pas, ventre tendu) et parésie postérieure brutale, depuis deux jours… ● Ce chien souffrait d'une rupture de vessie consécutive à une bagarre avec un autre chien. Comme le chien vit dans le jardin, les propriétaires étaient incapables de rapporter l'absence de mictions. ●

Cas n° 5 Boiteries “baladeuses” et … myélome ● Un Tervueren est présenté plusieurs fois à la consultation pour des boiteries “baladeuses”, avec le plus souvent, une dérobade sur un membre antérieur. ● Les examens cliniques successifs ne permettent pas de localiser de douleur précise. Les examens radiographiques ne sont pas significatifs… ● Quelques mois plus tard, l'animal est présenté pour une fracture du coude survenue lors d'une course : un traumatisme est envisageable. Lors de l'ostéosynthèse, le chirurgien prélève un fragment de cortex et de moelle osseuse. L'examen histopathologique conclut au développement d'un myélome.

CANINE

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 20

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Fiche

les points forts de l’examen clinique

Colette Arpaillange* Isabelle Valin**

et des examens complémentaires

Identifier la douleur

Continue / par crise Ancienneté / évolution Observation de l’animal en liberté

* Unité de Médecine, E.N.V.N. E.N.V.N. Atlanpôle La Chantrerie B.P. 40706 44307 Nantes Cedex 03

**Clinique Vétérinaire Chirurgicale 5, rue Fernet 94700 Maisons Alfort

ÉTAPE

ÉTAPE

- Positions antalgiques - Boiterie localisée ou multifocale - Boiterie intermittente ou permanente - Ataxie, parésie, paralysie

Examen clinique général

Objectif 1. Identifier une douleur d’origine viscérale 2. Repérer des symptômes d’appel (affection systémique)

- État général - Température corporelle - Palpation abdominale - Palpation des nœuds lymphatiques

Examen neurologique

Examen orthopédique

Polyalgies d’origine “extra musculo-squelettique” ● Signes hématologiques : anémie, saignements, pétéchies ● Douleur / Masse abdominale ● Adénomégalie ● Syndrome fébrile : hyperthermie, abattement, anorexie ● Signes cutanés : lésions érosives ou croûteuses, hyperkératose, squamosis, allongement des griffes, … ● Signes digestifs : vomissements, régurgitations, constipation, diarrhée ● Signes urinaires : polyuro-polydipsie, protéinurie, anurie, dysurie, … ● Signes génitaux : écoulements vulvaires, déformation

Objectif 1. Confirmer l’origine nerveuse 2. Localiser la lésion 3. Choisir les examens complémentaires

ÉTAPE

Polyalgies d’origine nerveuse ● Déficit proprioceptif (usure des griffes) ● Douleur du rachis ● Ataxie ● Parésie, paralysie ● Mouvements anormaux

Objectif 1. Confirmer l’origine musculo-squelettique 2. Localiser la lésion 3. Préciser sa nature 4. Choisir les examens complémentaires

ÉTAPE

Polyalgies d’origine musculo-squelettique ● Déformation/douleur articulation(s), rayon(s) osseux ● Suppression d’appui ● Anomalies ligamentaires ● Amyotrophie

Commémoratifs : race, âge, mode de vie Anamnèse : modalités d’apparition et d’évolution des symptômes

CANINE - FÉLINE

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 21


diagnostic différentiel reconnaître les polyalgies chez le chien et le chat

Luc Chabanne

Il n’est pas facile de déterminer l’origine de douleurs multiples et diffuses, hormis lors d’un traumatisme par exemple. C’est pourquoi, il est important de prendre en compte les maladies responsables de polyalgies lors du diagnostic différentiel.

E

n raison du caractère diffus de la douleur, une localisation précise des zones algiques s’avère bien souvent délicate, sinon impossible, d’autant qu’elle s’accompagne d’hyperesthésie ou qu’elle revêt un caractère ambulatoire. Certaines maladies inflammatoires, d’origine infectieuse ou non, sont susceptibles d’entraîner des lésions viscérales, musculosquelettiques ou nerveuses, à l’origine d’une telle douleur. Par ailleurs, au cours de l’évolution de ces maladies, en dehors d’une hyperthermie inexpliquée ou d’un mauvais état général, les autres symptômes peuvent être plus ou moins frustes et les manifesta-

tions douloureuses constituer alors le principal, sinon le seul, signe d’appel. Les maladies infectieuses virales, bactériennes ou parasitaires, et les maladies dysimmunitaires doivent être évoquées dans un diagnostic différentiel (cf. tableau récapitulatif).

La maladie de Carré - Chez le jeune chien non vacciné, les signes nerveux surviennent une à trois semaines après l’amélioration ou la guérison apparente des premiers signes cliniques (jetage oculo-nasal, toux, dyspnée, vomissements, diarrhée). - Ces signes peuvent se manifester par une hyperesthésie, une rigidité cervicale, des crises convulsives, une ataxie, un syndrome vestibulaire ou cérébelleux, une tétraparésie, accompagnés parfois de myoclonies très caractéristiques. - Le diagnostic est fondé sur l’anamnèse et les signes cliniques. Il peut être conforté par la recherche d’inclusions intracytoplasmiques (corps de Lentz-Sinigaglia) dans les cellules épithéliales, par la sérologie ou par une technique PCR (Polymerase Chain Reaction).

La péritonite infectieuse féline (PIF) - Chez le chat, une atteinte nerveuse est présente ●

dans pratiquement 25 p. cent des cas de formes sèches de la péritonite infectieuse féline (PIF). - Des douleurs multiples et diffuses peuvent résulter des lésions affectant le système nerveux central ou être la conséquence des lésions viscérales également présentes au cours de l’évolution de cette maladie.

Objectif pédagogique

LES MALADIES INFECTIEUSES Les maladies virales Certaines maladies virales peuvent entraîner un phénomène douloureux généralisé, en relation principalement avec l’installation de lésions nerveuses. Outre la rage, la maladie de Carré, la péritonite infectieuse féline (PIF), les rétroviroses félines et la calicivirose féline peuvent être citées (encadré 1). Les maladies bactériennes La borréliose, les ehrlichioses, les brucelloses, les méningites bactériennes, les arthrites et polyarthrites bactériennes doivent être évoquées. L’essentiel est rapporté dans l’encadré 2.

Encadré 1 - Quatre maladies virales responsables de polyalgie ●

Unité de Médecine Interne Département des Animaux de Compagnie E.N.V.L. 1, avenue Bourgelat B.P. 83 69280 Marcy L’Étoile

- La PIF affecte de préférence les jeunes chats de moins de deux ans ou des animaux âgés de plus de neuf ans (cf. LE NOUVEAU PRATICIEN n°1, Juin - Juillet 2001, p 42-44). - Le diagnostic de cette maladie n’est pas facile en l’absence de marqueurs biologiques spécifiques. ●

Les rétroviroses félines

Le virus de l’immunodéficience féline (FIV) peut être à l’origine d’une encéphalopathie. Les phénomènes douloureux dans ce cas sont peu documentés.

La calicivirose féline - Lors de l’infection du chaton par certaines ●

souches de Calicivirus félin ou suite à la vaccination contre cet agent, un syndrome douloureux en relation avec une atteinte inflammatoire articulaire (résolution spontanée en 2 à 4 jours) peut accompagner les autres signes d’une calicivirose féline. - Le syndrome douloureux peut survenir aussi 7 à 10 jours après l’apparition des signes cliniques d’atteinte de l’appareil respiratoire supérieur.

Comment reconnaitre les différentes affections responsables de polyalgies chez le chien et le chat.

Essentiel ❚ Les analyses sérologiques sont utilisées pour le diagnostic de : - la maladie de Carré, la PIF, le FIV ; - la borréliose, l’ehrlichiose, la brucellose ; - la leishmaniose, la toxoplasmose, la néosporose. ❚ Les anticorps anti-nucléaires doivent être recherchés lors de suspicion : - de lupus érythémateux systémique ; - du complexe polyarthrite / polymyosite. ❚ Les arthrites réactionnelles et les polyarthrites idiopathiques peuvent être soignées avec des antibiotiques. ❚ Certaines méningoencéphalomyélites aseptiques répondent à la corticothérapie, mais pas toutes.

CANINE - FÉLINE

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 23


traitement analgésique

des polyalgies

chez les carnivores Pour élaborer un protocole d’analgésie efficace, le clinicien se trouve confronté en pratique, à diverses questions : comment et quels médicaments analgésiques choisir ? comment les administrer, quelles formes galéniques utiliser ? pendant combien de temps faut-il administrer les produits et comment interrompre l’analgésie ?

L

utter efficacement contre la douleur chez le chien et chez le chat suppose d’être capable de répondre précisément à ces interrogations. Si ces questions se posent tant pour une polyalgie canine que pour une polyalgie féline, les réponses appropriées notamment sur le médicament et la posologie peuvent être parfois sensiblement différentes d’une espèce à l’autre (cf. article thérapeutique chat dans ce même numéro).

Si les polyalgies peuvent parfois poser des difficultés diagnostiques, leurs traitements s’articulent souvent entre la mise en place d’une thérapeutique étiologique (traitement adapté à l’origine du syndrome de polyalgie) et d’une thérapeutique symptomatique qui inclut notamment un traitement de la douleur. La mise en place du traitement étiologique n’exclut en rien la réalisation d’une analgésie qui dépend essentiellement de l’intensité des phénomènes douloureux. En effet, les processus algiques sont fréquemment à l’origine d’une complication du tableau clinique initial et d’un nombre important d’échecs thérapeutiques qui peuvent conduire à la mort de l’animal. Ainsi, la prise en charge de la douleur reste un des enjeux majeurs du traitement des polyalgies chez les carnivores domestiques. Confronté à ces évidences, le clinicien doit maîtriser les principes qui régissent l’obtention d’une analgésie efficace et connaître les enjeux et les moyens pratiques.

Patrick Verwaerde Géraldine Jourdan Anesthésie- Réanimation E.N.V.T. 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex

Objectif pédagogique Être capable de mettre en place un traitement de la douleur adapté à l’intensité des phénomènes algiques.

Définition

❚ La douleur se définit comme “une expérience sensorielle et/ou émotionnelle désagréable, causée par une atteinte tissulaire réelle ou potentielle qui provoque des réactions motrices et végétatives protectrices conduisant à la modification du comportement spécifique de l’individu”.

Figure 1 - Conséquences physiopathologiques des phénomènes algiques Essentiel

❚ Pour être efficace, il est essentiel de réaliser une analgésie de type multimodale encore qualifiée de “balancée”. ❚ Afin de respecter le principe d’analgésie multimodale, il est nécessaie d’utiliser simultanément une combinaison de médicaments agissant sur différentes cibles pharmacologiques des voies de la douleur.

CANINE - FÉLINE

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 31


imagerie

des polyalgies

et douleurs ambulatoires chez le chien Comment les nouveaux moyens diagnostiques, notamment l’arthroscopie et le scanner, facilitent l’exploration d’affections difficiles à détecter ?

L

e diagnostic d’une boiterie repose principalement sur les commémoratifs, l’examen clinique, l’examen orthopédique, complété ou non d’un examen neurologique, et des examens complémentaires parmi lesquels la radiologie tenait une place essentielle. En médecine canine, l’arthroscopie s’est développée ces dix dernières années [1]. Cette technique permet de visualiser directement les structures intra-articulaires inaccessibles et inexplorables par la radiologie conventionnelle. La chirurgie arthroscopique entre aussi dans le cadre de l’évolution de la chirurgie moderne mini-invasive. Parallèlement, l’utilisation du scanner s’est aussi développée. La scintigraphie, l’échographie et l’IRM ne sont utilisées qu’exceptionnellement et ne sont pas décrites dans cet article. LA RADIOGRAPHIE : TECHNIQUE DE BASE

La radiologie conventionnelle reste de loin l’examen le plus utilisé pour l’investigation des boiteries. Les commémoratifs et l’examen clinique permettent de localiser le segment squelettique atteint. ● Les radiographies sont indispensables à la détection et à l’évaluation des fractures, des luxations, de l’arthrose, des tumeurs, des dysplasies et de certaines maladies du squelette d’origine génétique. Elles sont aussi indispensables à l’évaluation de la guérison des fractures et au suivi du traitement des maladies articulaires. En général, deux vues orthogonales sont indispensables. Il existe de nombreuses vues spécifiques [2]. Une des limites de la radiographie est sa faible sensibilité dans la détection de la lyse osseuse puisqu’il faut 50 à 70 p. cent de perte du tissu osseux avant que la lésion ne puisse être détectée. ●

Jean-François Bardet Clinique Vétérinaire 32 rue Pierret 92200 - Neuilly sur Seine

L’ARTHROGRAPHIE : RAREMENT UTILISÉE L’arthrographie est une radiographie effectuée après injection intra-articulaire d’un produit de contraste iodé. L’arthrographie de l’épaule est la plus fréquente : elle permet d’explorer les lésions du tendon du biceps et d’identifier certaines lésions d’ostéochondrite disséquante et les souris articulaires. En raison de sa faible spécificité et avec le développement de l’arthroscopie, cette technique est rarement utilisée.

Objectif pédagogique Comment prescrire le bon examen complémentaire d’imagerie médicale.

LA TOMODENSITOMÉTRIE Si le scanner ne remplace pas la radiographie conventionnelle, cette technique apporte des informations complémentaires indispensables au diagnostic, à la compréhension et/ou au traitement de nombreuses causes de boiteries. ● La tomodensitométrie est une méthode de mesure de la densité radiologique de volumes élémentaires appartenant à une coupe. À partir de ces mesures de densité, l'appareil construit une coupe numérique sur une échelle de 2000 niveaux de gris ! Or l’œil humain en distingue une vingtaine au plus. ● Il est donc nécessaire de “fenêtrer” les coupes c’est-à-dire de choisir une zone réduite de l’échelle pour augmenter la discrimination entre des densités voisines : on parle de “fenêtre osseuse”, “fenêtre moelle”, … Chaque image est ainsi visualisée avec chacune des fenêtres adaptées à l’examen. Avant et après le produit de contraste La comparaison des images avant et après injection intraveineuse de produit de contraste apporte beaucoup d’informations. L’identification des structures anatomiques est facilitée par le marquage vasculaire, et les lésions sont en général rehaussées par une prise de contraste pathologique. Cet aspect de l’examen, associé à la qualité extrême du repérage topographique, est primordial à l’interprétation.

1 Vue 3D ventrale colorisée des hanches d’un chien dysplasique (cf. photo 6).

2 Griffon présenté pour cervicalgie. Noter la hernie discale volumineuse occupant la quasi-totalité du diamètre du canal spinal. Scanner cervical vue 3D crâniocaudale.

CANINE

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 39


observation clinique myélome multiple

Didier Lanore* Fabrice Conchou** Patricia Meynaud*** Cathy Trumel**

manifesté par un état polyalgique

chez un chien

* Clinique Vétérinaire de la Rivière 1, rue Pierre Loti 31830 Plaisance du Touch

Une chienne croisée de 12 ans et 19 kg est présentée à la consultation pour abattement et anorexie observés depuis 3 jours. L’examen clinique révèle d’emblée de vives douleurs à la manipulation des articulations.

L

e propriétaire signale des difficultés au lever, mises sur le compte d’une hypothétique arthrose et décrit une “incontinence urinaire”, l’animal étant souillé par ses propres urines. EXAMEN CLINIQUE Les principales anomalies observées à l’examen clinique sont : - une déshydratation estimée à 5 p. cent ; - une maigreur marquée ; - des douleurs intenses à la manipulation de toutes les articulations et segments osseux qui se manifestent par des plaintes et de l’agressivité ; - des vaisseaux artériels rétiniens tortueux, associés à la présence d’hémorragies. EXAMENS COMPLÉMENTAIRES Une analyse d’urines est effectuée pour vérifier l’hypothèse d’une PUPD à l’origine de l’incontinence. Des clichés radiologiques du squelette sont réalisés pour explorer les douleurs ostéo-articulaires. Un bilan biologique général est également demandé.

** Service de Médecine *** Service de Chirurgie Département des Sciences Cliniques des Animaux de compagnie et de sport E.N.V.T. 23, chemin des capelles 31076 Toulouse Cedex

Objectif pédagogique 1 Le frottis sanguin révèle de nombreux rouleaux

Bilan biologique

Le bilan biologique permet de mettre en évidence les modifications suivantes (tableau 1) : - une baisse marquée de la densité urinaire à 1,009 (valeurs usuelles chez le chien : 1,015 1,045) confirmant la PUPD, associée à une faible protéinurie (une croix à la réaction de Heller) ; - une hyperprotidémie sévère à 120 g/l (valeurs usuelles : 54 - 71 g/l) ; - une hypercalcémie majeure. La calcémie corrigée est de 171 mg/l (valeurs usuelles : 85 - 110 mg/l) ; - une augmentation modérée de la créatininémie à 177 µmol/l (valeurs usuelles : 44 - 133 µmol/l) permettant de suspecter une insuffisance rénale parenchymateuse ; - une numération-formule fortement modifiée, caractérisée par une leucopénie marquée à 2900 leucocytes/mm3 et une anémie

Tableau 1 - Bilan des examens complémentaires effectués sur ce chien Examens complémentaires

Analyse d’urines

Comment diagnostiquer un myélome multiple chez le chien.

de globules rouges, même en queue de frottis, et des lymphocytes de type plasmocytaire (photo C. Trumel).

Observations

densité : 1,009 Faible protéinurie (Heller + ) Taux protéique sanguin 120 g/l Calcémie (corrigée)* 171 mg/l Créatininémie 177 µmol/l Numération-formule 2900 leucocytes/mm3 sanguine 10,5 g/dl d’hémoglobine Nombreux rouleaux de globules rouges, Frottis sanguin même en queue de frottis Lymphocytes de type plasmocytaire Radiographies Diminution globale de la densité osseuse (squelette) Nombreuses petites zones d’ostéolyses (géodes)

Valeurs usuelles

1,015 - 1,045

Hypothèse diagnostique Myélome multiple.

Essentiel ❚ Le myélome multiple est caractérisé par un polymorphisme clinique.

❚ Le diagnostic est difficile à établir en raison de la faible spécificité et de la banalité des symptômes. ❚ Les examens complémentaires à effectuer ne sont pas des examens de routine. Note Le calcium sanguin est fixé sur les protéines sériques. Il est important d’éliminer de fausses hypercalcémies par hyperprotidémie. La calcémie corrigée est calculée dans ce but.

54 - 71 g/l 85 - 110 mg/l 44 - 133 µmol/l 6000 - 17 000 12 - 19 g/dl

CANINE

*Ca corrigé = Ca mesuré - (Protéines (g/l) x 0,4) + 33

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conduite thérapeutique pour l’analgésie chez le chat Le chat souffre en silence. Aussi, le clinicien sous-estime-t’-il souvent la douleur alors qu’il n’est pas plus difficile de lutter efficacement contre la douleur dans cette espèce.

L

a gestion de la douleur animale en général et du chat en particulier, requiert essentiellement de vaincre diverses idées reçues. Face à une polyalgie du chat, la prise en charge thérapeutique de la douleur se réalise de la même façon que chez le chien : respect et mise en application identique des mêmes principes. ● Initialement, il convient de réaliser une évaluation précise de l'intensité douloureuse, que le chat exprime de façon différente du chien. ● Un protocole d'analgésie est mis en place en suivant les mêmes recommandations que chez le chien, mais en respectant les particularités métaboliques et physiologiques du chat. Un analgésique constitue la base du traitement auquel on adjoint d'autres médicaments co-analgésiques qualifiés d'adjuvants. ● Le clinicien doit évaluer l'efficacité du traitement initié et l'adapter si nécessaire, comme pour toute thérapeutique entreprise chez le chat ou le chien. COMMENT ÉVALUER L'INTENSITÉ DE LA DOULEUR LORS DE POLYALGIE ?

durable qui, dans cette espèce, peut être à l'origine de nombreuses modifications métaboliques, point de départ d'un processus de lipidose hépatique. Ainsi, évaluer la douleur chez le chat suppose d'être perspicace. L'intensité de la douleur du chat est souvent sous-estimée. Le recours à un outil diagnostique objectif, sensible et reproductible revêt une importance majeure chez le chat (tableau 1). Cet outil doit tenir compte de l'existence des modifications comportementales spécifiques du chat. Il n'existe pas d'outil diagnostique spécifique à l'évaluation de l'intensité douloureuse des chats polyalgiques. Cependant, une grille algométrique (de type multi-paramétrique) pour l'évaluation de la douleur postopératoire du chat a été récemment développée et rend possible la quantification de la douleur chez des chats atteints de polyalgie (figure 1). Simple à utiliser, cette grille permet au clinicien de classer l'intensité douloureuse en trois catégories : - douleur faible (dite de palier I) ; - douleur modérée (dite de palier II) ; - douleur sévère (dite de palier III). Il convient pour le clinicien de déterminer le palier douloureux, qui permet de définir l'analgésique de base adapté à la situation clinique, comme pour le chien. LES MÉDICAMENTS ANALGÉSIQUES CHEZ LE CHAT Adapter les posologies

L'une des particularités du chat reste sa manière d'exprimer la douleur. Si le chien se comporte souvent de façon extravertie (gémissements, hurlements…), le chat en souffrance apparaît comme introverti (prostré au fond de la cage, apathique, plainte discrète…). Cette discrétion ne signifie nullement que la douleur soit chez le chat moins délétère que chez le chien. La morbimortalité induite par la douleur apparaît comparable dans toutes les espèces. De plus, le tableau clinique d'un chat polyalgique est souvent dominé par une anorexie

En raison de particularités physiologiques, le chat présente classiquement des défauts de métabolisme hépatique des xénobiotiques (absence de glucuronoconjugaison par exemple). Sa sensibilité à certains médicaments (alpha2-agonistes) est différente du chien. Il est nécessaire d’adapter cliniquement des doses thérapeutiques et des intervalles de temps entre les prises médicamenteuses, spécifiques au chat. Dans la pratique, seules quelques adaptations posologiques s'avèrent nécessaires (tableau 1).

Patrick Verwaerde Géraldine Jourdan Anesthésie- Réanimation E.N.V.T. 23 chemin des Capelles, 31076 Toulouse Cedex

Objectif pédagogique Être capable de reconnaître un chat en douleur et d’adapter une analgésie efficace selon l’intensité douloureuse.

1 A la différence du chien, le chat en souffrance apparaît comme introverti (prostré au fond de la cage, dans son coin)... (photo service de médecine, E.N.V.N.).

Essentiel ❚ Des adaptations posologiques sont nécessaires entre le chat et le chien : - doses thérapeutiques ; - intervalles de temps entre les prises médicamenteuses. ❚ Chez le chat comme chez le chien, les effets secondaires observés avec les morphiniques sont essentiellement : - des nausées au début du traitement ; - des phénomènes de constipation et/ou de rétention urinaire lors d'utilisation chronique.

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FÉLINE

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observation clinique

affection algique chez un chat

Guillaume Derré Unité pédagogique de Médecine E.N.V.N. Atlanpole la Chantrerie BP 40706 44307 Nantes Cedex 03

Cette observation présente une hypervitaminose A et donne des indications sur l’utilisation des AINS et des morphiniques dans la gestion de la douleur.

Objectif pédagogique Comment gérer la douleur non contrôlée par les AINS.

U

n chat mâle castré, croisé chartreux de 9 ans est présenté à la consultation pour apathie, amaigrissement et douleur exprimée lorsque ses propriétaires le prennent dans leurs bras. Ce chat sédentaire qui vit en appartement, sans contact avec d’autres animaux, est sans aucun antécédent médico-chirurgical. Grison pèse 5,5 kg et n'est ni vermifugé ni vacciné. Son alimentation est constituée de croquettes (100 g par jour) et de pâtée achetées dans le commerce. Ses propriétaires lui donnent également plusieurs fois par semaine une tranche de foie cru de bovin de 100 g environ. ANAMNÈSE Grison est abattu depuis environ 6 mois. Les propriétaires notent une aggravation de l’état général depuis 2 mois. Il ne joue plus, ne grimpe plus sur les fauteuils, reste continuellement dans son panier. Sa démarche est très modifiée et il exprime des douleurs au niveau de l’arrière-train lorsque ses maîtres le manipulent. Il a perdu plus d’un kilogramme. Des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) lui ont déjà été prescrits pendant 5 jours. Les propriétaires n'ont noté aucune amélioration. EXAMEN CLINIQUE Prostré, le chat se déplace avec difficulté sur la table de consultation. Sa posture est anormale : position assise, membres postérieurs légèrement fléchis, membres antérieurs ramenés vers l’arrière et fléchis, dos rond, tête basse, cou en extension. Sa température rectale est de 37,8°C, ses muqueuses sont pâles et son poil terne, piqué. Un squamosis pytiriasiforme généra-

Motif de consultation Apathie, amaigrissement et douleur.

1 Grison en position antalgique. Noter les membres postérieurs fléchis, les membres antérieurs ramenés vers l’arrière, le cou tendu, la tête portée basse, le dos rond (photo Service de médecine, E.N.V.N.).

Symptômes

lisé important est noté. Il présente également une mydriase bilatérale permanente sans doute liée au stress. À la palpation, il exprime une douleur vive (grognements) surtout au niveau cervical et lombaire. On note une amyotrophie modérée de l’ensemble du corps. L‘auscultation cardio-respiratoire et la palpation abdominale sont normales. La vessie n’est pas palpable. Au BILAN - Un amaigrissement chronique (perte de poids estimée à 20 p. cent) ; - des douleurs diffuses mais exacerbées en région cervicale et lombaire ; - un abattement important et un pelage terne et mal entretenu chez un chat qui consomme régulièrement du foie cru. Un diagnostic clinique de syndrome algique associé à une maladie chronique cachectisante est porté.

Nous retenons : ❚ une baisse de l'état général avec perte de poids ; ❚ des déplacements difficiles ; ❚ une posture anormale ; ❚ une démarche modifiée ; ❚ des douleurs cervicales et lombaires.

Hypothèses diagnostiques ❚ Hypervitaminose A ❚ Lipidose hépatique ❚ Syndrome de malabsorption - maldigestion ❚ Processus tumoral et syndrome néoplasique.

FÉLINE

HYPOTHÈSES DIAGNOSTIQUES À partir des signes cliniques, nous émettons les hypothèses suivantes (tableau 1).

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DECEMBRE 2001 - 53


alimentation un régime tout viande chez le chaton Les régimes “tout viande” - et avec eux l’ostéofibrose -, sont devenus rares chez les carnivores, mais ils n’ont pas encore disparus. Un chat qui présente un syndrome douloureux général, en particulier articulaire, ou un chaton avec un déficit staturo-pondéral et une atteinte du squelette doit suggérer une enquête alimentaire et une radiographie afin de rechercher ou d’exclure cette affection du diagnostic différentiel.

U

n chaton femelle âgé de 3 mois, pesant 900 g, est présenté à la consultation pour difficultés locomotrices.

COMMÉMORATIFS ET ANAMNÈSE Le chaton a été adopté à l’âge d’un mois. Il est correctement vacciné et vermifugé. Son alimentation est exclusivement composée de viande rouge hâchée depuis 2 mois. Aucun traumatisme n’est rapporté. Depuis un mois, les propriétaires ont observé une baisse d’activité : les séquences de jeux sont rapidement interrompues. Le chaton se couche alors en décubitus latéral. Depuis 48 heures, l’animal ne se déplace plus. La stimulation déclenche des plaintes. L’appétit est par ailleurs conservé. EXAMEN CLINIQUE Examen à distance

Le chat présente un déficit staturo-pondéral important. Il est constamment en décubitus latéral. Quand on le met sur ses pattes, il chute rapidement sur le côté et manifeste une vive douleur. Examen rapproché

L’examen orthopédique met en évidence de très importantes déformations du squelette appendiculaire et axial. Les deux fémurs présentent une angulation médiodiaphysaire de quasiment 90°. La colonne vertébrale présente une déformation mar-

Géraldine Blanchard, Juan Hernandez**, Bernard Paragon* *UP Nutrition **UF Imagerie Médicale E.N.V.A. 7, avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons Alfort cedex

Objectif pédagogique

1 Radiotransparence généralisée importante et lordose (Unité fonctionnelle d’Imagerie Médicale, ENVA).

quée en région lombaire évoquant une lordose. L’ensemble des manipulations est à l’origine de vives plaintes. ● L’examen neurologique est partiellement effectué. Les réactions posturales semblent déficitaires sur les membres postérieurs. Compte tenu de la vive douleur que déclenche la moindre manipulation des fémurs, ce déficit proprioceptif est à confirmer. Les réflexes tendineux ne sont pas réalisés à cause des déformations fémorales. Le réflexe de flexion est quant à lui présent sur les deux postérieurs.

Comment reconnaître et traiter une ostéofibrose d’origine nutritionnelle.

Symptômes ❚ Déficit staturo-pondéral ; ❚ Incapacité à se déplacer, voire à tenir debout ; ❚ Douleur et plaintes ; ❚ Déformations squelettiques.

HYPOTHÈSES DIAGNOSTIQUES Deux hypothèses diagnostiques peuvent être avancées. 1. Une ostéofibrose d’origine nutritionnelle : l’âge du chat, l’alimentation exclusivement carnée, les douleurs et les déformations osseuses permettent de penser à cette hypothèse. Celle-ci peut favoriser des fractures suite à des traumatismes de très faible intensité (saut, jeux, poids du corps). 2. Une origine traumatique est aussi envisagée. Une lésion médullaire peut aussi être suspectée. L’atteinte serait de type motoneurone central sur les membres postérieurs. La localisation lésionnelle serait entre T2 et L4 (réflexes tendineux non pratiqués et réflexes de flexion présents). Son origine serait traumatique (fracture vertébrale) ou constitutive (malformation vertébrale).

Hypothèses diagnostiques ❚ Ostéofibrose d'origine nutritionnelle ; ❚ Traumatisme ; ❚ +/- Lésion médullaire.

Rubrique réalisée en partenariat avec

FÉLINE

RADIOGRAPHIES Afin d’évaluer la densité et les déformations osseuses, des radiographies de face et de profil du bassin, des fémurs et des vertèbres

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 59


principe actif le fentanyl Marion Fusellier, Eric Sachot, Marc Gogny

L

a gestion de la douleur est une préoccupation grandissante depuis quelques années, tant chez l’homme que chez l’animal. Pour les douleurs modérées à sévères, elle conduit à utiliser les morphiniques qui seuls ont la puissance d’action nécessaire. Sous sa forme transdermique, le fentanyl offre un rapport risques/bénéfices et coût/bénéfices tout à fait remarquable. PHARMACOLOGIE Pharmacocinétique Chez le chien, la concentration efficace de fentanyl après administration intraveineuse se maintient seulement pendant 20 à 30 min. Ceci limite son utilisation dans le traitement de la douleur postopératoire ou de la douleur chronique. Une forme transdermique (patch), qui permet l’obtention d’un taux plasmatique constant, a été mise au point grâce au faible poids moléculaire du fentanyl et à sa forte lipophilie. Caractéristiques techniques Dans ce patch, le fentanyl est solubilisé dans un gel d’hydroxyéthylcellulose contenant de l’alcool, et favorisant sa pénétration cutanée. Une membrane permet d’assurer une diffusion constante du composé. Le débit délivré dépend directement de la surface de contact, donc de la taille du dispositif. Ainsi, quatre formes sont actuellement disponibles : 25, 50, 75 et 100 µg/h. Ces débits correspon-

dent aux valeurs moyennes obtenues chez l’homme. Chez l’animal, ils sont sensiblement inférieurs et surtout soumis à de fortes variations interindividuelles. L’état de la peau joue également un rôle important. Ainsi, il est déconseillé de dégraisser ou de raser après la tonte : l’amincissement de la couche cornée peut entraîner une augmentation imprévisible du débit de diffusion. Après application d’un patch, le plateau de concentration plasmatique est atteint en 24 h environ chez le chien et 12 h chez le chat. Un effet analgésique notable apparaît cependant avant l’état d’équilibre : - 8 à 12 h après la pose chez le chien ; - 6 à 8 h chez le chat. Dans l’intervalle, il convient d’avoir recours, si nécessaire, à des analgésiques d’action immédiate, comme la morphine (voie SC). La concentration demeure ensuite relativement constante pendant 3 à 4 jours chez le chien et 4 à 5 jours chez le chat. Lors d’application réitérée, la concentration plasmatique est relativement stable, avec de légères variations liées aux changements de dispositif ou à la formation de dépôts cutanés. Après le retrait du patch, elle diminue rapidement. La demi-vie apparente du fentanyl chez le chien est de 1, 4 h : il est préférentiellement éliminé sous forme de métabolites dans l’urine, et accessoirement dans les fèces.

Unité de Pharmacologie et Toxicologie, E.N.V.N. Atlanpôle, La Chantrerie, BP 40706, 44307 Nantes Cedex 03

Classe pharmacologique ❚ Analgésiques centraux, morphiniques

Posologie ❚ Chez le chien et le chat, la dose analgésique recommandée est de 2 à 4 µg/kg/h. ❚ La taille des patchs doit être adaptée à l’intensité de la douleur et à la réponse au traitement. ❚ Il est fortement déconseillé de couper le patch en deux. ❚ Les patchs recommandés sont de : - 25 µg/h : chien de 10-20 kg ; - 50 µg/h : chien de 20-30 kg ; - 75 µg/h : chien > 30 kg ; - animal de petite taille : utiliser la moitié d’un patch (ne décoller qu’une partie de l’adhésif de protection) ; - chien > 50 kg : utiliser deux patchs de 50 plutôt qu’un de 100 µg/h.

PROPRIÉTÉS PHYSICOCHIMIQUES Dénomination chimique : N-phényléthyl-N(1,2-phényléthyl-4-pipéridyl) propanamide ● Dénomination commune internationale : fentanyl ●

Structure et filiation ● Le fentanyl est un dérivé synthétique morphinomimétique, du groupe des anilino-4-pipéridines, de faible poids moléculaire (P.M. de 337), fortement lipophile (coefficient de partage octanol/eau de 813) et légèrement basique. ● Il passe rapidement et facilement à travers la peau et la barrière hématoméningée.

Figure - Structure du fentanyl

RUBRIQUE

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 63


Fiche-client

évaluation comportementale du chaton Nombre de nos clients demandent un conseil avant l’adoption d’un chat. Voici différents cas qui peuvent se présenter.

C

’est maintenant une certitude, le chat n’est pas un petit chien ! Il n’est donc pas possible de calquer la consultation du chaton sur celle du chiot. Il est important de bien connaître les particularités du développement et de l’écosystème du chat avant d’évaluer le comportement d’un chaton et de prodiguer des conseils aux nouveaux adoptants. UN DÉVELOPPEMENT RAPIDE Rôle du milieu de développement Pour se développer, le système nerveux a besoin de stimulations extérieures. Plus un chaton vit ses premières semaines dans un milieu riche, plus il a ensuite la capacité de s’adapter. Acquisition des auto-contrôles La mère apprend au chaton à contrôler ses griffes, ses dents et sa motricité. Les chatons élevés au biberon par l'homme présentent souvent un déficit de ces auto-contrôles. Attachement C’est un lien très fort et réciproque qui lie les chatons et la mère. Ce lien permet le développement mais se rompt précocement. Lors de l’adoption, vers l’âge de deux mois, il n’a pas besoin d’être recréé avec un humain. UN ANIMAL PLUS TERRITORIAL QUE SOCIAL Organisation sociale Le chat est d’abord solitaire. Il peut avoir des relations et créer des liens très forts avec ses congénères ou les humains, vivre en groupe, sans pour autant qu’une organisation sociale, une hiérarchie se mette en place.

Catherine Mège Clinique Vétérinaire des Grands Crus Parc des Grands Crus 60, avenue du 14 Juillet 21300 Chenove

Organisation territoriale Le chat est avant tout un animal territorial. Sa vie tourne autour de l’organisation qu’il met en place grâce au marquage : marquages facial et urinaire, griffades. Toute modification du territoire peut engendrer des réactions de sa part. La chasse, la recherche alimentaire, le jeu et la sieste forment le gros de son activité.

Fiche-client

La consultation d’un chaton est l’occasion de permettre une bonne intégration de l’animal dans son nouveau foyer. Un examen direct du chaton, des conseils simples peuvent éviter bien des déconvenues, d’autant que nous sommes encore les seuls interlocuteurs professionnels dans ce domaine. Le praticien consulte en général le chaton deux fois pour sa primovaccination. Son rôle est alors grand en matière de prévention et d’éducation. Il est de notre devoir de dépister et de traiter précocement les troubles du développement ou de les référer à un confrère comportementaliste ! Plus le trouble est géré rapidement, plus il est facile à corriger. ❒

Adoption conseils pratiques 1. Respecter une bonne corrélation entre le milieu de vie et le milieu d’adoption : > un chaton né en appartement ou en élevage vivra bien en appartement ; > un chaton né en famille et manipulé dès sa naissance a toutes les chances de bien s’intégrer dans la famille humaine ; > un chaton né en maison aura besoin d’un accès à l’extérieur. 2. Ne pas réaliser d’adoption précoce : > il est important que le chaton ait vécu avec sa fratrie et sa mère ou un autre adulte, afin que les auto-contrôles soient acquis (morsure inhibée, rétraction des griffes) ;

1 Le chaton doit pouvoir s’intégrer dans sa famille d’adoption (photo C. Mège).

> I’adoption précoce prédispose à l’hyperattachement et aux affections qui en découlent (anxiété, dépression).

RUBRIQUE

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geste

arthrocentèse les sites de ponction articulaire

Daniel Huber Jean-François Bardet Clinique Vétérinaire 32, rue Pierret 92200 Neuilly-sur-Seine

L’arthrocentèse est un geste simple à réaliser qui permet d’obtenir du liquide synovial. Son analyse fournit de précieux renseignements au praticien lors d’arthropathie (cf. Analyse et commentaires).

1 Localisation du lieu de ponction de l’articulation de la hanche.

2 Réalisation de la ponction de l’articulation de la hanche. Ces photos ont été réalisées avant intervention chirurgicale.

L

a ponction du liquide synovial permet de diagnostiquer de façon simple toute arthropathie. Il n’existe pas de contreindications à cet examen. Lieu de ponction Toutes les articulations des membres antérieurs et postérieurs peuvent être ponctionnées. Les sites de ponction sont cependant à connaître (photos 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8).

Préparation ● Les ponctions articulaires au niveau du carpe sont généralement bien tolérées, même sans sédation. Les autres sites de ponctions nécessitent le plus souvent une sédation. ● Les articulations sont très sensibles aux germes. Une tonte, puis une asepsie stricte, sont vivement conseillées.

4 Localisation du lieu de ponction de l’articulation de l’épaule. 3 Réalisation de la ponction de l’articulation de l’épaule.

6 Localisation du lieu de ponction de l’articulation du grasset.

Matériel La seringue de 2,5 ml est idéale. L'aiguille bleue de 23 G et 2,5 cm est utilisable pour le coude, le carpe, le genou et le tarse. ● Les ponctions de l’épaule et de la hanche nécessitent une aiguille plus longue (aiguille à ponction lombaire). ● ●

Le liquide synovial apathogène ne coagule pas. Cependant, un liquide synovial contaminé de sang ou inflammatoire peuvent précipiter. De ce fait, l'utilisation d'un tube contenant un anticoagulant est conseillé (EDTA de préférence ; héparine pour le test de précipitation). ❒

5 Localisation du lieu de ponction de l’articulation du grasset.

8 Réalisation de la ponction de l’articulation du coude.

RUBRIQUE 7 Localisation du lieu de ponction de l’articulation du coude.

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analyse et commentaires le liquide synovial Daniel Huber Jean-François Bardet Clinique Vétérinaire 32, rue Pierret 92200 Neuilly-sur-Seine

L’analyse du liquide synovial est un examen simple réalisable en clientèle qui fournit de précieux renseignements lors d’arthropathies. ANALYSE ET MODIFICATIONS DU LIQUIDE SYNOVIAL Quantité Une augmentation notable de volume de liquide synovial permet de diagnostiquer de manière objective une effusion articulaire (cf liquide normal : encadré 1). Turbidité et couleur

2 Vue microscopique d’un liquide inflammatoire à fort grossissement. Noter les cellules monocytaires et le macrophage érythrophagique (photos D. Hubert, J-F. Bardet).

Plus le liquide est jaunâtre et trouble, plus le liquide contient de cellules et de protéines, présentent lors d’arthropathies. Viscosité ● A défaut d'un viscosimètre, elle peut être mesurée par une technique simple consistant à former un fil de synovie le plus long possible (photo 1). ● Les valeurs usuelles sont de l’ordre de 2 à 3 cm. ● La viscosité diminue quand le taux de mucine diminue. Lors de toute arthropathie, le taux de mucine diminue généralement.

Taux protéique 3 Vue microscopique de cellules cancérigènes (carcinome) qui se situent en milieu synovial.

Le taux protéique s’obtient à l’aide d’un réfractomètre. ● Il augmente légèrement lors d’arthropathie dégénérative et considérablement lors d’arthropathie inflammatoire. ●

Taux cellulaire Un hémocytomètre permet de le mesurer. Avec un simple microscope, il est possible d’effectuer une estimation subjective au cabinet. ● Un étalement standard doit en effet contenir moins de 5 cellules leucocytaires pour un grossissement de 400. Une contamination érythrocytaire iatrogène est cependant assez fréquente. ●

RUBRIQUE

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1 Test de viscosité du liquide synovial.

Examen cytologique L’examen cytologique est un test primordial. Il ne nécessite qu’une seule goutte de synovie. L’étalement s’effectue sur une lame de microscope. Une coloration standard (HE, Diff Quick…) est conseillée. ● Un fond légèrement granuleux et éosinophilique est normal. Les cellules à différencier sont les polynucléaires neutrophiles, les éosinophiles, les lymphocytes et les cellules mononucléaires de plus grande taille (photo 2). ●

Mise en culture Des cultures en milieu aérobique, anaérobique et spécifique aux mycoplasmes peuvent être effectuées en cas de suspicion

Encadré 1 - Le liquide synovial normal Le liquide synovial est un dialysât de plasma modifié. ● Il se différencie par sa plus faible teneur en protéines totales (absence de fibrinogène et de facteurs de coagulation) et la présence d’acide hyaluronique (ou mucine). ● Les caractéristiques du liquide synovial normal sont : - quantité : 0,3 ml / articulation (chien taille moyenne) [3,4] ; - turbidité : transparent - couleur : incolore à légèrement jaune - viscosité : importante (forte concentration en mucine) - taux protéique : 15 g/l [5] - taux cellulaire moyen : taux cellulaire très bas : < 3000 cellules/µl [6] - cytologie : faible pourcentage de polynucléaires (10 p. cent) / mononucléaires [7, 9] ; - absence d’érythrocytes (sauf contamination iatrogène). ●


immunologie

la réponse immunitaire spécifique Séverine Boullier*, Stéphane Bertagnoli** * Service de microbiologie immunologie ** Service de maladies contagieuses, virologie E.N.V.T. 23, chemin des capelles 31076 Toulouse cedex 3

Objectif pédagogique Mise en place et implications de la réponse mémoire aprés avoir traité dans LE NOUVEAU PRATICIEN N°5 Juin/Septembre 2001 la réponse immunitaire contre les micro-organismes.

Glossaire Apoptose : mort cellulaire programmée.

Essentiel ❚ La réponse mémoire se met en place seulement si l’antigène (Ag) persiste suffisamment longtemps dans l’organisme ou après une deuxième rencontre avec le même Ag. ❚ La réponse mémoire permet à l’organisme de réagir plus rapidement et plus efficacement lors d’une réinfection. Le système immunitaire peut ainsi agir avant que l’agent reconnu comme étranger ne se soit disséminé dans l’organisme. ❚ La réponse mémoire est spécifique de l’antigène reconnu.

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la réponse mémoire

L

a réponse primaire, qui correspond à la reconnaissance de l’antigène (Ag) par les cellules du système immunitaire et à leur différenciation en cellules effectrices, est un phénomène long à se mettre en place. Pendant cet intervalle, les agents pathogènes prolifèrent et induisent des lésions dans l’organisme, accompagnées de signes cliniques. DESTRUCTION DES MICRO-ORGANISMES : RÉPONSE PRIMAIRE Au fur et à mesure de la mise en place de la réponse immunitaire, qui a lieu dans les nœuds lymphatiques, les cellules effectrices deviennent de plus en plus efficaces. Elles prolifèrent de façon très importante et se répartissent dans tous les sites d’infection. Les anticorps (AC) synthétisés par les plasmocytes sont de plus en plus spécifiques du pathogène et les cellules cytotoxiques particulièrement agressives. Cette réponse immunitaire adaptée permet l’élimination de l’agent pathogène. MISE EN PLACE DE LA RÉPONSE MÉMOIRE

Après la disparition de l’agent pathogène, l’organisme possède des milliers de cellules spécifiques de cet agent. Hautement activées, ces cellules peuvent être dangereuses pour l’organisme et doivent être éliminées. ● Cette élimination s’effectue par apoptose. Elle se produit spontanément quand les cellules spécifiques de l’antigène ne trouvent plus d’antigène. Il s’agit en quelque sorte d’une mort par épuisement et désœuvrement. ● Cependant, toutes les cellules spécifiques de l’Ag ne meurent pas. Une petite partie survit - les cellules les plus efficaces - et se transforme en cellules mémoires. Les AC spécifiques du pathogène ont une demi-vie longue (15 jours - 6 mois) et persiste dans l’organisme. ● La présence d’une réponse mémoire est une des principales caractéristiques de la réponse immunitaire spécifique. Elle permet à l’organisme de réagir plus vite et plus efficacement lors d’une réinfection. Les mécanismes exacts de la mise en place de la réponse mémoire ne sont pas connus et ●

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tous les micro-organismes n’induisent pas une bonne réponse mémoire (ce qui a des conséquences pour la vaccination). Pour que la réponse mémoire se mette en place, il est nécessaire que l’agent étranger soit resté suffisamment longtemps dans l’organisme pour que la réponse spécifique se soit mise en place. DESTRUCTION DES MICRO-ORGANISMES : LA RÉPONSE MÉMOIRE ● Ces cellules mémoires ont une durée de vie longue, mais variable, en fonction du pathogène initiateur. Elles patrouillent dans tous les tissus de l’organisme. Lors d’une réinfection, ces cellules sont capables de reconnaître directement le micro-organisme sans l’intervention immédiate des lymphocytes T CD4. C’est la mémoire immunitaire. ● Les cellules mémoires se divisent immédiatement et permettent une réponse très efficace et très rapide, soit : - via la synthèse d’AC pour les plasmocytes ; - par leur activité cytotoxique pour les lymphocytes T CD8. Les lymphocytes T CD4 mémoires se divisent aussi très vite et viennent en renfort des lymphocytes T CD8 et des plasmocytes. La réponse se met en place après environ 48 h. L’agent pathogène est éliminé avant d’avoir pu se multiplier dans l’organisme. ● Lorsque les AC mémoires spécifiques du pathogène sont encore présents, ils peuvent agir directement en bloquant l’entrée du pathogène dans l’organisme. ● Les lymphocytes mémoires sont spécifiques de l’antigène contre lequel ils ont été activés. Si un micro-organisme différent pénètre dans l’hôte, les lymphocytes mémoires ne reconnaissent pas ce nouveau pathogène. Une nouvelle réponse immunitaire spécifique se met en place sur plusieurs semaines (cf. Nouveau Praticien Vétérinaire N°5 - Juin/Septembre 2001, 411-414).

CONCLUSION La réponse mémoire est donc plus rapide et plus efficace que la réponse primaire, mais elle est spécifique de l’Ag rencontré la première fois. C’est le principe de la mémoire immunitaire qui est utilisé pour la vaccination. ❒


Stéphane Bertagnoli & Séverine Boullier Dessin : Frédéric Mahé

Résumé : la réponse immunitaire primaire est longue à se mettre en place. Pendant ce temps, les pathogènes prolifèrent et induisent des lésions dans l’organisme.

Au fur et à mesure de la mise en place de la réponse immunitaire, qui a lieu dans les nœuds lymphatiques, les cellules effectrices deviennent de plus en plus efficaces. Elles prolifèrent de façon très importante et se répartissent sur tous les sites d’infection.

(suite)

Les anticorps synthétisés par les plasmocytes sont de plus en plus spécifiques du pathogène. Les cellules cytotoxiques deviennent particulièrement agressives.

Weuuu on va leur péter la gueuuule !

Allez, cent pompes !

Après quelques jours, l’organisme possède des milliers de cellules spécifiques de l’agent pathogène visé.

Mais après la bataille, ces cellules spécifiques hautement activées sont potentiellement dangereuses pour l’organisme et doivent donc être éliminées, ce qui se fait par apoptose. Ceci se produit spontanément quand les cellules spécifiques ne trouvent plus d’antigène. Il s’agit en quelque sorte d’une mort par épuisement et désoeuvrement. Weuuu, personne ne veut plus de nous… Tu vois, il ne nous reste plus qu’à devenir cellules-mémoire...

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 71


La présence d’une réponse mémoire est une des principales caractéristiques de la réponse immunitaire spécifique. Elle permet à l’organisme de réagir plus vite et plus efficacement lors d’une réinfection. Les mécanismes exacts de la mise en place de la réponse mémoire ne sont pas tous connus et tous les microorganismes n’induisent pas une bonne réponse mémoire.

En effet, toutes les cellules spécifiques de l’Ag ne meurent pas, une petite partie (les cellules les plus efficaces) survit et se transforme en cellules mémoires. De plus, les anticorps spécifiques du pathogène ont une demi-vie longue et persistent également dans l’organisme. Ces cellules mémoires ont une durée de vie longue (mais qui est variable en fonction du pathogène initiateur). Elles patrouillent dans tout l’organisme.

Pour que la réponse mémoire spécifique se mette en place, il faut que l’agent étranger soit resté assez longtemps dans l’organisme.

Lors d’une réinfection, ces cellules sont capables de reconnaître directement le microorganisme présenté par la cellule présentatrice de l’antigène sans un nouvel apprentissage dans les nœuds lymphatiques.

De plus, quand les anticorps spécifiques du pathogène sont encore présents, ils peuvent agir directement en bloquant l’entrée du pathogène dans l’organisme.

Les lymphocytes mémoires sont spécifiques de l’antigène contre lequel ils ont été activés ; si un microorganisme différent pénètre dans l’hôte, les lymphocytes mémoires ne le reconnaîtront pas. Une nouvelle réponse spécifique va se mettre en place, ce qui prendra plusieurs semaines.

?

?

Hahaha ! Personne ne me connaît ici ! Niark ! Niark !

La réponse mémoire est donc plus rapide et plus efficace que la réponse primaire, mais elle est spécifique de l’antigène rencontré la première fois. C’est le principe de la mémoire immunitaire qui est utilisé pour la vaccination. Mais, lors de l’attaque par un nouveau pathogène, les cellules mémoires restent totalement inertes. Les cellules présentatrices de l’antigène migrent vers le nœud lymphatique avec le nouveau pathogène. Oui, il y a une vie après l’apoptose ! La vaccination, c’est nous !

Prochain épisode : L a va c c i n a t i o n ! LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DECEMBRE 2001 - 72

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N.A.C. comment vermifuger les lapins, les furets et les rongeurs ?

Arnaud Charondière

La première consultation est l’occasion de mettre en place des mesures de prophylaxie médicale : vermifugation et vaccination (cf. Le Nouveau Praticien N°5 Mai-Septembre). Cet article résume les principales parasitoses internes des lapins, des furets et des rongeurs et propose des protocoles de vermifugation.

D

ivers helminthes sont susceptibles d’infester les rongeurs, le lapin et le furet. Si certaines espèces sont peu pathogènes, d’autres peuvent provoquer des troubles plus sérieux (diarrhée, occlusion, automutilation de la queue), voire mettre en péril la vie de l’animal. Une prophylaxie médicale peut éviter l’apparition de ces signes. Plusieurs helminthes sont par ailleurs responsables de zoonoses dommageables, en particulier pour les jeunes enfants. PARASITOSES INTERNES CHEZ LES RONGEURS ET LES LAGOMORPHES Principales parasitoses digestives chez les rongeurs et les lagomorphes

L’importance des helminthoses digestives dépend en grande partie de l’origine des animaux et de leur alimentation. ● Une nourriture souillée et le contact avec des congénères infestés constituent les sources de contamination. Ceci explique une prévalence souvent plus faible chez les rongeurs et le lapin de compagnie. ●

Les nématodes ● Les Oxyuridés sont sans doute les plus fréquents. Ils peuvent être à l’origine de troubles diarrhéiques. Ce sont : - chez le lapin : Passalurus ambiguus (photos 1, 2) ;

Unité de Médecine Interne Département des Animaux de Compagnie École Nationale Vétérinaire de Lyon 1, avenue Bourgelat - BP 83 69280 Marcy L’Etoile

Objectif pédagogique Présenter l'essentiel des protocoles de vermifugation en fonction des différentes espèces.

1 Passalurus ambiguus est un parasite fréquemment parasité rencontré chez le lapin (photo D. Boussarie).

- chez la souris : Syphacia obvelata (photo 3) et Aspiculuris tetraptera ; - chez le rat : S. muris. Syphacia sp. provoque également un important prurit anal qui peut conduire à une automutilation de la queue et un prolapsus rectal. ● D’autres parasites peuvent également être rencontrés. Ce sont : - chez le rat : Strongyloides ratti ; - chez le lapin (Trichuris leporis), le rat et la souris (T. muris) ; Capillaria hepatica chez le lapin et les rongeurs ; - chez le lapin : Graphidium strigosum et Angiostrongylus cantonensis ; - chez le rat et la souris : Nematospiroïdes dubia et Nippostrongylus brasiliensis ; - chez le chinchilla : Haemonchus contortus ; - chez le rat et la souris : Heterakis spumosa ; - chez le cobaye et le hamster : Paraspidodera uncinata. Les cestodes

Les rongeurs et les lagomorphes sont les hôtes intermédiaires de plusieurs cestodes. Ce sont : - chez le lapin : Taenia pisiformis, T. (= Multiceps) serialis ; - chez le rat, la souris et d’autres rongeurs des champs : T. crassiceps, T. (= Hydatigera) taeniaeformis, M. brauni, M. smythi, Echinococcus multilocularis. ● Ces parasitoses larvaires ont peu d’incidence sur la santé de l’animal et sont en général découverte par hasard lors d'un examen nécropsique. ●

2 Passalurus ambiguus (photos L. Zenner, Service de parasitologie E.N.V.L.).

Essentiel Les agents responsables de zoonoses sont : ❚ le genre Hymenolepis ; ❚ Dicrocoelium lanceolatum ; ❚ Fasciola hepatica ; ❚ Giardia duodenalis ; ❚ Toxocara cati ; ❚ Toxascaris leonina ; ❚ Ankylostoma sp. ; ❚ Dypillidium caninum.

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RUBRIQUE

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 73


Mieux médicaliser les jeunes pour les médicaliser plus longtemps

Philippe Baralon Phylum, BP 27-16, 31312 Labège Cedex e-mail : baralon@phylum.fr

Les chiots – et dans une moindre mesure les chatons – représentent aujourd’hui une part importante de l’activité des entreprises vétérinaires. Avec le vieillissement de la population de carnivores, l’intérêt de renforcer la médicalisation des seniors s’est imposé. Cette indispensable prise de conscience ne permet pas de relâcher l’effort en direction des jeunes animaux, au contraire.

L

a richesse de l’offre de services destinés aux chiots et aux chatons répond à la diversité des attentes de leurs propriétaires. Prévention des maladies infectieuses, du parasitisme externe et interne, dépistage des anomalies ou malformations, éducation, bon déroulement de la croissance, contrôle de la reproduction, tous ces besoins expliquent que 87 p. cent des familles accueillant un chiot le présentent au moins une fois à un vétérinaire au cours de sa 1ère année, généralement pour une “vaccination”. Les chatons débutent le plus souvent leur médicalisation par une intervention chirurgicale : 68 p. cent des mâles sont castrés, l’ovariectomie concernant 53 p. cent des femelles. UNE MOBILISATION SPÉCIFIQUE DE LA CLINIQUE La proportion importante de jeunes animaux présentés spontanément à un vétérinaire constitue une chance majeure d’enclencher un processus de médicalisation récurrente. C’est pourquoi, satisfaire le client lors de son ou ses premiers contacts avec son vétérinaire, mais aussi le convaincre de l’intérêt d’une médicalisation récurrente représentent des objectifs prioritaires. En d’autres termes, ces phases initiales de médicalisation doivent mobiliser fortement la clinique, ce qui suppose quatre actions concrètes (encadré 1).

DÉPASSER LA VACCINATION La prévention vaccinale des maladies infectieuses représente une attente importante des propriétaires de jeunes animaux. C’est souvent celle qui est exprimée spontanément lors de la prise de rendez-vous. Néanmoins, les attentes réelles sont plus diverses : vérification de l’état de santé de l’animal, prévention des maladies parasitaires, éducation, nutrition, maîtrise de la reproduction. Pour être moins souvent spontanément exprimées, ces attentes ne sont pas accessoires car elles répondent à des besoins réels des propriétaires. Pourtant l’offre actuelle des entreprises vétérinaires est très, trop, fortement structurée autour de la seule vaccination. Les conséquences sont limitées au niveau des jeunes animaux car les propriétaires sont convaincus de l’importance de les protéger contre les maladies infectieuses. En revanche, une offre trop exclusivement centrée sur la vaccination ne matérialise pas suffisamment l’apport de la médicalisation récurrente dans les autres domaines, alors même qu’il représente l’essentiel du temps passé

Objectif pédagogique ❚ Amorcer la médicalisation récurrente dès le plus jeune âge de l’animal.

Encadré 1 - Quatre actions pour mobiliser la clinique 1. Dès la prise de rendez-vous, les ASV repèrent ces premiers contacts -nouveaux clients ou clients habituels avec un nouvel animal - par un questionnement suffisant (âge de l’animal, objet du rendez-vous). 2. La clinique affecte un vétérinaire formé et entraîné à ce type de consultations. Cette recommandation peut paraître incongrue. Pourtant, très souvent, une consultation initiale ou une castration de chat sont considérées comme des actes si simples qu’ils peuvent être confiés sans précaution à des “débutants”. Si ce jugement de valeur peut se comprendre d’un point de vue technique, il néglige l’aspect relationnel essentiel pour établir une relation durable avec le client.

3. Le contenu de chaque phase de médicalisation des jeunes a fait l’objet d’un débat entre associés conclu par la formalisation de son déroulement et de son contenu. Cela se résume sur une fiche (un recto suffit) pour chaque type de contact (consultation d’achat, 1ère consultation initiale, 2nde consultation initiale, consultation de contrôle, castration de chat, ovariectomie de chatte). La séquence de médicalisation est prise en compte. Une ovariectomie de chatte est ainsi traitée différemment si elle constitue le premier contact avec la clinique ou si elle intervient après deux consultations initiales (cf. fiche-action “les étapes de la médicalisation des jeunes”). 4. Le planning de rendez-vous permet de consacrer un temps suffisant aux consultations de médicalisation des jeunes.

MANAGEMENT

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Fiche-action

la médicalisation des jeunes Philippe Baralon Phylum, BP 111 31675 Labège Cedex e-mail : baralon@phylum.fr

les différentes étapes

U

ne médicalisation réussie commence dès l'arrivée de l'animal dans le foyer du propriétaire et se termine lors du premier examen annuel de santé. CINQ ÉTAPES

1. La consultation d'achat est destinée aux propriétaires accueillant un nouvel animal. Elle permet de vérifier l'état de santé de l'animal, de dépister les vices rédhibitoires et de mettre en place dès le départ les bonnes pratiques en matière de santé, de nutrition et

d'éducation. Elle est proposée le plus rapidement possible après l'arrivée de l'animal. 2. Les consultations initiales sont rythmées par la séquence de primo-vaccination. Elles permettent de suivre la santé du jeune animal au cours des deux ou trois 1ers mois de vie dans la famille, de le protéger contre les maladies infectieuses auxquelles il est exposé et d'assister le propriétaire pour la mise en œuvre des bonnes pratiques qui concernent la santé, la nutrition et l'éducation.

3. Le rendez-vous intermédiaire répond aux besoins spécifiques de certains animaux en fonction de leur race ou de leurs caractéristiques individuelles. Son objectif se centre sur le contrôle du bon déroulement de la croissance, sur le dépistage d'une éventuelle dysplasie de la hanche ou sur le contrôle de la socialisation de l'animal. Dès lors, la date de ce rendez-vous est choisie en fonction de l'animal et de l'objectif.

4. L'intervention chirurgicale de stérilisation, très fréquente chez le chat ou la chatte, et de plus en plus, chez la chienne répond au choix par le propriétaire de cette solution pour maîtriser la reproduction et/ou le comportement de son animal. Chez le chat ou la chatte, cette étape est très importante car elle constitue souvent le premier contact de l’animal avec la clinique.

5. Le premier examen annuel de santé représente la 1ère étape de la médicalisation récurrente de l’adulte. Il s’agit de vérifier l’état de santé de l’animal, de prolonger sa protection contre les maladies infectieuses et d’apporter les conseils utiles de santé et de nutrition. LISSER LE RAPPORT PRIX/CONTENU Il importe de programmer les actes techniques et les conseils apportés tout au long de la séquence de médicalisation et de fixer les prix en visant deux objectifs : ● parvenir à un rapport prix/contenu constant pour chaque acte ; ● optimiser l’efficacité des différents messages délivrés en facilitant leur assimilation par le propriétaire de l’animal.

MANAGEMENT LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 82

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Comment vendre

une consultation d’achat par téléphone

L

’acquisition d'un animal représente un moment important dans une famille. Une source de joie mais aussi une cause de stress. "L'animal que je viens d'acheter me convient-il bien ? Est-il en bonne santé ? Vais-je être à la hauteur ?" Autant de questions que se pose le propriétaire au moment d'accueillir son animal. A cet instant, le maître présente deux caractéristiques très importantes : - il est avide d'informations sur son animal et sur son rôle de propriétaire ; - il est très motivé pour "bien faire" . La consultation d'achat constitue la meilleure réponse de l'entreprise vétérinaire aux besoins des clients qui viennent d'accueillir un nouvel animal. Proposée le plus rapidement possible après l’acquisition de l’animal, la consultation d’achat permet de vérifier l'état de santé, de dépister les vices rédhibitoires et de mettre en place dès le départ les bonnes pratiques de santé, de nutrition et d’éducation. COMPRENDRE QUE LE SERVICE EST INDIQUÉ

Objectif : dépister au téléphone les clients susceptibles de consommer ce service. De plus en plus de propriétaires achètent leur animal dans une animalerie ou chez un éleveur, parfois assez éloigné. Ces transactions ont fréquemment lieu le samedi. Au début de la semaine suivante, un des membres de la famille appelle souvent la clinique, par exemple pour vérifier si leur animal, qui vient de recevoir une 1 ère injection vaccinale, doit subir un rappel. L’ASV vérifie l’âge de l’animal et la nature du vaccin reçu. Si ces données sont conformes, elle confirme les dires du vendeur et propose au propriétaire un rendez-vous ou lui demande de rappeler dans trois semaines. Cette réponse, techniquement exacte, ne prend pas en compte plusieurs points-clés. ● L’animal peut présenter des symptômes discrets non encore perçus par le propriétaire ; la probabilité d’une telle situation est accrue par l’évolution de la filière canine vers des circuits commerciaux complexes et/ou des modes d’élevage mal maîtrisés.

Le propriétaire dispose d’un délai très court* pour préserver ses droits par l’établissement d’un diagnostic de suspicion de vice rédhibitoire . ● La mise en place très précoce des bonnes pratiques de santé, de nutrition et d’éducation est décisive pour l’épanouissement de la relation entre la famille et l’animal. ● Les attentes du propriétaire et sa réceptivité sont maximales à l’arrivée de l’animal, elles décroissent rapidement avec le temps. Aussi, une meilleure réponse à un tel appel téléphonique peut être proposée.

Philippe Baralon Phylum, BP 111 31675 Labège Cedex e-mail : baralon@phylum.fr

Objectif pédagogique Comment vendre très précocement une consultation d’achat à des gens que l’on ne connaît pas ou dont on ignore qu’ils viennent d’acquérir un animal ?

FORMULER UNE OFFRE CLAIRE L’ASV commence de la même manière par vérifier le protocole vaccinal utilisé. S’il est correct, elle confirme les dires du vendeur et la nécessité de pratiquer un rappel trois semaines plus tard. Jusque là aucune différence avec la réponse classique. Après un léger temps d’arrêt, l’ASV poursuit par exemple : “Nous proposons une consultation d’achat aux personnes qui, comme vous, viennent d’acquérir un jeune animal. Cette consultation permet de vérifier que l’animal est en bonne santé et de dépister les principales maladies qui peuvent exister à cet âge. Elle permet aussi de vous conseiller pour la santé, la nutrition et l’éducation. Dans ce cas, il faut prendre un rendez-vous dès que possible. Cette consultation dure entre 20 et 30 min et coûte 35 €**. Souhaitez-vous prendre rendez-vous ?” Le taux d’acceptation de ce type de proposition est très élevé. Les clés de la réussite se situent au début et à la fin de la conversation. Dans les 1 ères secondes, seule une grande attention permet à l'ASV de bien repérer le client susceptible d'être intéressé par une consultation d'achat, là où une réponse machinale conduirait à écourter l'entretien en proposant un rendez-vous trois semaines plus tard. En fin d'entretien, c'est la clarté de la proposition finale qui emporte la décision. On peut parvenir spontanément à un bon résultat. Le plus souvent, et notamment pour le personnel débutant, un petit entraînement préalable permet d'arriver à un enchainement naturel et efficace des arguments. ❒

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Essentiel ❚ Écouter les clients pour détecter un intérêt potentiel pour le service. ❚ Commencer par répondre à leur attente directe (par exemple une information sur le calendrier vaccinal ou tout autre renseignement technique). ❚ Formuler une offre claire et percutante en incluant le prix du service.

Note * Cinq jours pour la parvovirose et huit jours pour la maladie de Carré **Il s’agit d’un exemple.

MANAGEMENT LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE OCTOBRE / DÉCEMBRE 2001 - 85


Stratégie Propos recueillis par Philippe Baralon Phylum, BP 111 31675 Labège Cedex e-mail : baralon@phylum.fr

Rencontre avec notre confrère, Fabrice Crépin, directeur du circuit vétérinaire chez Royal Canin.

Fabrice Crépin : L’exclusivité est le levier indispensable à une politique de fidélisation du propriétaire à la clinique vétérinaire

NOTES 1. GMS : grandes et moyennes surfaces 2. APE : antiparasitaires externes

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Fabrice Crépin “Une gamme exclusive pour développer la nutrition santé en clinique vétérinaire” ■ Pour Royal Canin, un des principaux intervenants sur le marché de l'alimentation des animaux de compagnie, quel enjeu représente le circuit vétérinaire ? - Fabrice Crépin : Le marché de l’alimentation des chiens et des chats est structuré en fonction de la sensibilité du consommateur à la nutrition. Celle-ci a beaucoup évolué et est passée : - de la simple alimentation (jusqu’en 1980) : un aliment pour nourrir son animal ; - à la nutrition (ces vingt dernières années) : un aliment formulé en fonction de l’âge et de l’activité de l’animal ; - à la “nutrition santé” (ces dernières années) : des aliments capables de prévenir l’apparition de maladies et de soigner. De plus en plus de consommateurs modernes souhaitent donner le meilleur pour le bien-être, la santé et la longévité de leur animal. Cette évolution culturelle a conduit Royal Canin à placer le vétérinaire au cœur de sa stratégie depuis 1998. ■ La notoriété de la marque Royal Canin, sa distribution large, dans tous les circuits, y compris GMS1 , et sa forte implantation dans le monde de l’élevage, représentent-elles des atouts pour les entreprises vétérinaires ? - F. Crépin : La notoriété de la marque Royal Canin s’est construite année après année sur une stratégie claire et simple : - le parti pris du sec : concentration des forces de l’entreprise sur le développement d’aliments nutritionnels pour chiens et chats ; - le resserrement de nos liens de proximité avec les professionnels, vétérinaires et éleveurs, et avec la distribution spécialisée ; 84,8 p. cent de notre chiffre d’affaires a été réalisé avec les circuits spécialisés en 2000. Dans ce cadre et depuis Vet Cat en 1998, Royal Canin a engagé un vaste programme en faveur des vétérinaires en développant des gammes exclusives et complètes d’aliments nutritionnels. ■ Justement pourquoi avoir développé une gamme spécifique au circuit vétérinaire ? - F. Crépin : Face aux campagnes de publicité sur les gammes grand public, l’exclusivité est le levier indispensable à une politique de fidélisation du propriétaire à la clinique vétérinaire : le faire revenir chaque

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mois pour acheter un sac de croquettes crée des occasions de contacts entre celui-ci et la clinique. Accélérer l’innovation, développer des produits exclusifs ciblés et performants, tels sont les moteurs du développement de la nutrition santé dans les cliniques. ■ La nutrition canine et féline vous semblet-elle de nature à développer l’activité des entreprises vétérinaires ? Présente-t-elle des synergies avec les métiers classiques des vétérinaires ? - F. Crépin : Oui incontestablement. Pour les ventes au comptoir, le petfood constitue un fabuleux levier de développement du chiffre d’affaires. Des enquêtes menées en clientèle vétérinaire par nos soins montrent une corrélation positive entre le lieu d’achat du petfood et celui des médicaments “conseil” : APE2, vermifuges, shampoings. Pour le suivi d’un traitement médical, les dernières innovations en matière de diététique clinique peuvent permettre d’améliorer le bien-être de l’animal. Je citerai par exemple, le recours à un régime hyperprotéiné dans le traitement du diabète chez le chat, qui autorise le clinicien à réduire – voire à supprimer dans certains cas – les injections d’insuline.

■ Pensez-vous que les entreprises vétérinaires ont la volonté et les moyens de développer leur part de marché, encore modeste ? - F. Crépin : Fort d’une pénétration de près de 33 p. cent du nutritionnel chat et environ 10 p. cent du nutritionnel chien en Europe, les entreprises vétérinaires doivent garder l’ambition de développer ce marché compte tenu des effets synergiques avec l’ensemble des métiers de la clinique et de l’impact sur la fréquentation de la clinique par les propriétaires. Nous pensons également que le développement du petfood permettra au chef d’entreprise “clinique vétérinaire” de redéfinir les missions de ses collaborateurs et de donner ainsi une dimension managériale plus importante à sa fonction : le vétérinaire devient un gestionnaire d’entreprise. C’est l’ambition de Royal Canin que de permettre au vétérinaire ce développement en proposant à ses clients des gammes de pro❒ duits et de services exclusifs.


cas clinique : les données optimiser la médicalisation des jeunes Philippe Baralon Phylum, BP 111 31675 Labège Cedex e-mail : baralon@phylum.fr

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es docteurs Corinne et Bactérium sont associés à la clinique des Cèdres, qui s’adresse spécifiquement aux petits animaux, située dans une sous-préfecture de 25 000 habitants. Ils ont fait beaucoup d’efforts pour améliorer la médicalisation récurrente des jeunes animaux. Ainsi, à l’initiative du Dr Corinne, les Cèdres ont mis en place une consultation d’achat pour les propriétaires qui viennent d’acquérir un chiot. Le Dr Corinne explique : “J’y consacre au moins 40 minutes et j’aborde tous les grands sujets de préoccupation du propriétaire notamment tous les problèmes de com-

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portement”. S’il reconnaît que les clients sont très satisfaits de ce service, Le Dr Bactérium regrette que la clinique ne le facture pas. Le Dr Corinne corrige : “nous nous rattrapons largement sur les anti-parasitaires externes et internes et parfois, il est nécessaire de revacciner l’animal ce qui entraîne bien sûr une facturation” et ajoute “c’est un service que nous n’offrons qu’à nos bons clients”. Le Dr Bactérium estime que la nutrition représente un marché important pour la clinique. Il s’est investi personnellement sur ce sujet et l’aborde dès la 1ère consultation vaccinale. Ceci lui permet de nourrir environ 15 p. cent des chiots qui se présentent à la clinique. Il regrette que son associé ne partage ni les mêmes convictions, ni les mêmes résultats. Celui-ci se justifie : “d’une part, je passe beaucoup de temps sur le comportement lors de la première consultation vaccinale et d’autre part, l’addition est déjà salée avec 40 Euros de vaccin, et en moyenne 25 Euros d’anti-parasitaires ; je ne me vois pas rajouter plus de 50 Euros de croquettes, donc je ne parle d’alimentation que lors du rappel”. Un entretien avec Caroline, ASV aux Cèdres, permet d’avoir un avis extérieur sur les pratiques des deux associés. Il apparaît qu’ils utilisent les mêmes protocoles vaccinaux pour les chiots, souvent en deux consultations, facturées au même prix (40 Euros TTC). Le Dr Corinne consacre 25 min (15 min s’il y a avant une consultation d’achat), à la 1ère et 15 min à la 2nde. Le Dr Bactérium est un peu plus rapide : 20 et 10 min. Il le reconnaît bien volontiers : “Pour le comportement, je me limite aux conseils de base d’éducation et lors du rappel, je fais essentiellement du relationnel”. Les différentes séquences de médicalisation actuelles sont résumées dans la figure ci-contre. Le Dr Corinne propose très souvent un “contrôle comportemental” de l’animal après quelques mois, d’une durée d’environ 25 min, qu’il facture le prix d’une consultation, soit 25 €. Son confrère ne le fait pas car il ne se sent pas assez compétent. Finalement les deux associés se considèrent complémentaires, l’un plus impliqué en nutrition, l’autre en comportement. Corinne ne “se considère pas comme un bon vendeur de croquettes” ; Bactérium ne “se sent pas l’âme d’un psy”. ❒ ➜ Pouvez-vous aider les docteurs Corinne et Bactérium à améliorer leur offre ?


améliorer son organisation comment assurer la continuité d’un service de qualité Assurer un service de qualité passe par la mise en œuvre de procédures simples et d’objectifs clairement identifiés. Ce travail organisationnel permet, dans chaque clientèle, de réfléchir aux pratiques quotidiennes.

réalisés soit par le vétérinaire lui-même qui organise ainsi sa tournée en fonction des urgences soit par l’ASV, qui voit sa charge de travail augmenter.

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Ces évolutions très nettes des clientèles vétérinaires conduisent nécessairement à réfléchir à l’organisation de l’activité. Cette réflexion n’est pas spécifique aux grosses structures. Même dans les petites, les mutations de clientèles et l’accroissement des tâches conduisent à une désorganisation, si des adaptations et des modifications propres à répondre à une demande différente ne sont pas réfléchies et mises en place. En outre, la réduction légale du temps de travail à 35 heures accroît ce besoin d’adaptation.

’accroissement des vitesses de transport et de transmission de l’information ont conduit notre société à vivre selon un mode instantané. Les technologies allant plus vite, nous en sommes arrivés non pas à gagner du temps pour faire les choses plus posément mais à accroître la somme de travail dans un temps qui reste incompressible. Ces modifications sociétales conduisent à accroître les différences de perception du temps qui passe entre les individus. Selon la nature de son emploi, son statut professionnel, l’avancement de sa vie et sa personnalité, la notion de temps est conçue différemment. Parallèlement, s’est développé un sentiment d’incertitude, notamment dans la vie professionnelle. L’absence de lisibilité sur l’avenir associée à cette pression du temps est génératrice de stress et de souffrances personnels et professionnels. LES CONSÉQUENCES EN CLIENTÈLE Les conséquences pour la pratique vétérinaire sont nombreuses. ● L’attente est devenue un critère négatif d’appréciation de la prestation du vétérinaire. ● La demande de disponibilité s’accroît dans toutes les clientèles. Ceci n’est pas sans poser de problème, notamment dans les clientèles rurales en mutation où l’activité canine se développe de façon importante. Par ailleurs, il est maintenant très fréquent en pratique rurale, que les éleveurs demandent à être prévenus sur leur téléphone portable, dès que le vétérinaire est sur le point d’arriver dans l’élevage. Ces appels sont

Le stress et l’impatience des clients sont communicatifs : le personnel et l’équipe de l’entreprise vétérinaire le vit souvent à ses dépens.

Fabrice Labadie 13, Impasse de la Garenne 41600 Lamotte Beuvron e-mail : flabadie@waika9.com

Objectif pédagogique ❚ Comment mettre en place une organisation qui permette d’assurer un service de qualité, en toutes circonstances, dans chaque entreprise vétérinaire.

PENSER SON ORGANISATION SOUS FORME D’OBJECTIFS Lorsqu’une difficulté est identifiée et analysée, il est indispensable d’établir une proposition de solution sous forme d’objectifs. Un objectif se définit par un résultat à atteindre (éventuellement chiffré), des moyens à mobiliser et un délai de mise en œuvre. Le fonctionnement par objectifs s’appliquent aussi bien aux tâches de routine qu’aux objectifs de progrès.

Essentiel

SE FIXER DES OBJECTIFS IMPOSE DE FAIRE DES CHOIX Il n’est pas possible – et pas souhaitable – de tout changer simultanément dans une organisation. Il est impératif de privilégier des axes de changement peu nombreux et réalistes. Cela impose d’établir des priorités pour l’entreprise vétérinaire. Se donner des priorités accroît les chances de réussite du changement car la dispersion est ainsi évitée. La démarche apparaît clairement à l’ensemble des acteurs qui travaillent alors tous dans le même sens.

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❚ Le fonctionnement par objectifs s’appliquent aussi bien aux tâches de routine qu’aux objectifs de progrès. ❚ Ne pas tout changer en même temps : établir des priorités.

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cas clinique la solution Philippe Baralon Phylum, BP 111 31675 Labège Cedex e-mail : baralon@phylum.fr

es docteurs Corinne et Bactérium ont déjà fait beaucoup d’efforts, mais de nombreux points ne leur permettent pas d’en récolter tous les fruits.

la 1ère des consultations initiales en l’absence de consultation d’achat. Une formation spécifique de Corinne paraît indiquée.

Exploiter les complémentarités

Le dispositif actuel ne peut pas être considéré comme satisfaisant. Selon que le client a à faire à l’un ou l’autre des associés, le prix payé est le même (un point positif), le temps consacré est proche (c’est pas mal), mais les contenus sont différents, ce qui pose problème. Ainsi, un propriétaire qui commence par une 1ère consultation avec le Dr Corinne et poursuit avec son associé, ne reçoit pas de message sur la nutrition. De manière générale, les clients reçoivent beaucoup de messages lors des 1èrs contacts alors que les derniers sont beaucoup moins denses. Une meilleure séquence des services est illustrée par la figure ci-contre. Les messages sont répartis ce qui permet à la fois d’améliorer leur assimilation et de proposer un rapport “contenu / prix” presque constant. Surtout, cela évite de terminer avec un client déçu en sortant d’une consultation rapide et peu dense, facturée au prix de la précédente qui est apparue longue et chargée. Les principaux messages oraux (éducation, nutrition, parasitisme, reproduction) sont utilement relayés par des documents simples et remis aux propriétaires à chaque étape. Chaque fois que possible, il est préfèrable de remettre les documents édités par la clinique plutôt que ceux fournis par les laboratoires qui ne permettent pas la même personnalisation de la relation clinique / client.

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La clinique des Cèdres est riche de compétences, mais les développe parallèlement, sans optimiser les synergies entre les associés. Il n’est sans doute pas facile de faire de Bactérium un spécialiste du comportement. Ce n’est pas non plus indispensable. En revanche, son associé doit lui transmettre deux savoir-faire :

Essentiel ❚ Travailler en équipe et pas seulement côte à côte (ou dos à dos). ❚ Favoriser les référés internes pour valoriser les compétences disponibles. ❚ Veiller à maintenir un rapport “contenu/prix” constant dans les séquences de médicalisation. ❚ Éviter les actes gratuits au prétexte de se rattraper sur les ventes de produits.

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les bases à connaître pour délivrer le message minimum requis pour tout propriétaire et la capacité à détecter les cas à problèmes qu’il peut lui référer précocément. De son côté, le Dr Corinne, malgré sa passion pour le sujet, doit adopter cette démarche : un message simple et assimilable pour chacun et une consultation spécialisée proposée aux couples animal-propriétaire pour lesquels cela est indiqué. De même, la consultation de “contrôle comportemental”, doit être proposée par les deux associés chaque fois qu’elle est justifiée. En revanche, seul le Dr Corinne effectuera ce type d’acte. La mise en place d’un rappel pour cette consultation améliorera significativement le taux d’observance. Objectif pour le Dr Bactérium : convaincre son associé que la nutrition ne se résume pas à "vendre des croquettes" et que ce sujet doit être abordé dès la consultation d’achat ou dès

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Optimiser les séquences de médicalisation

Revoir la facturation des actes Si la consultation d’achat est une bonne idée, ses modalités sont à revoir. Elle doit être proposée à tous (voir fiche action ASV), adopter un contenu ciblé sur les messages primordiaux et… facturée. Bien entendu, les clients sont ravis qu’on leur consacre beaucoup de temps utile gratuitement, mais cela déséquilibre toute la séquence de médicalisation. Les consultations ultérieures apparaîtront vides et chères et la présence d’un vaccin ne peut pas justifier un tel écart. Enfin, le “contrôle comportemental” qui prend 25 min ne peut pas être facturé au même prix qu’une consultation banale. Aussi est-il proposé d’instaurer un acte de “consultation spécialisée”, facturé 35 € tant pour la consultation d’achat que pour le contrôle comportemental. ❒


test clinique

les réponses

une fracture du pénis

Ronan Cognet, Ludivine Houdre Unité de Chirurgie de L’ENVN E.N.V.N. Atlanpôle la Chantrerie BP 40706 44307 Nantes Cedex 03

Le diagnostic porté est celui d’un traumatisme du pénis qui a entraîné une anurie par obstruction. 1 Quelles mesures urgentes mettez-vous en place ? a. Une cystocentèse : c’est l’une des mesures urgentes qui peut être entreprise afin de vidanger le globe vésical. Lors d’anurie par obstruction, cas envisagé ici, l’urine s’accumule dans la vessie et entraîne un arrêt de la diurèse à l’origine d’une insuffisance rénale aiguë (IRA) dite postrénale. Le traitement d’urgence vise à relancer la diurèse. b. La pose d’un cathéter sus-pubien permet de court-circuiter l’urètre. La vessie peut être vidangée facilement, la diurèse est relancée (encadré). Cette technique est très utile chez des animaux en mauvais état général car elle peut être pratiquée sous anesthésie locale. c. Une réanimation liquidienne est nécessaire afin de corriger la déshydratation et surtout de relancer la diurèse. Le volume de liquide perfusé représente 8 p. cent du poids de l’animal. d. La radiographie n’est pas urgente. Elle n’est pas nécessaire au diagnostic de globe vésical déjà établi par palpation. Dans ce cas, elle a permis de mettre en évidence l’absence de la portion crâniale de l’os pénien associée à une tuméfaction des tissus mous (photo 2). 2 Quels examens complémentaires sont envisageables ? a. Un dosage de la kaliémie : ce dosage n’est pas nécessaire bien que l’hyperkaliémie soit une cause majeure de mort lors d’IRA post-rénale. Sa correction est indispensable avant d’entreprendre une intervention chirurgicale. Les conséquences cardiaques d’un excès de potassium sont majeures. La relance de la diurèse par fluidothérapie suffit à éliminer le potassium en excès (valeurs usuelles de la kaliémie chez le chien : 3,7 - 5,2 mmol/l). L’emploi de NaCl 0,9 p. cent est conseillé. b. Un dosage de l’urémie et de la créatininémie : l’urémie et la créatininémie signent l’importance de l’insuffisance rénale. Ces dosages n’ont toutefois pas de valeur pronostique car ces paramètres se normalisent très vite après relance de la diurèse lors d’IRA post-rénale par obstruction. Dans ce cas, l’urémie est de 2.5 g/l, la créatininémie de 43 mg/l.

Encadré - Technique : la pose d’un cathéter sus-pubien 2 Radiographie du pénis Nous diagnostiquons une fracture de l’os pénien avec tuméfaction importante des tissus mous. Le pénis semble amputé de sa portion crâniale. Une obstruction urétrale traumatique a provoqué l’anurie.

● Cette

3 Urétrostomie scrotale et amputation du pénis (photos R. Cognet).

c. Un dosage de la natrémie : la valeur de la natrémie n’est utile que pour connaître la déshydratation intracellulaire. d. Le dosage de la réserve alcaline : il permet d’apprécier l’état d’acidose. Celle-ci se corrige dès la relance de la diurèse. Aucun examen complémentaire n’est fondamental. La mesure de la kaliémie est la plus utile. La relance de la diurèse permet de corriger les écarts de ces paramètres. Le lendemain de la pose du cathéter sus-pubien et de la réanimation liquidienne, l’état général de l’animal est meilleur, il a retrouvé de l’appétit, n’est plus déshydraté, les paramètres sanguins sont revenus à des valeurs usuelles : urémie : 0,48 g/l, créatininémie : 9,56 mg/l. 3 Quelles mesures chirurgicales

proposez-vous ? a. Une cystotomie : elle ne résoudrait rien dans ce cas précis. b. Une urétrotomie associée à une plastie du pénis : la plastie du pénis expose à des difficultés techniques et des complications de sténose. L’aspect de l’os pénien fracturé est à prendre en considération. Il convient, de plus, d'évaluer l’importance de l’atteinte urétrale. Comme ce chien n’est pas un reproducteur, cette intervention n’est pas retenue. c. Dans ce cas, une amputation du pénis associée à une urétrostomie scrotale semble être le meilleur choix . Une castration est réalisée dans le ❏ même temps opératoire (photo 3).

technique permet d’éviter les complications possibles lors de cystocentèses répétées dans l’attente d’une intervention chirurgicale. ● Le cathétérisme sus-pubien consiste à mettre en place une tubulure à travers la peau, la paroi abdominale et le muscle vésical et permet ainsi d’évacuer les urines qui ne peuvent plus (obstruction urétrale) ou qui ne doivent plus (lésions urétrales) être éliminées par les voies naturelles. ● Classiquement, la tubulure est une sonde de Foley mise en place à l’occasion d’une laparotomie sous anesthésie générale. Nous avons utilisé une technique de pose “en aveugle” qui mime une cystocentèse : la tubulure est introduite à travers un trocart qui est ensuite retiré. La tubulure est laissée en place. Un dispositif de robinet à trois voies permet la connexion à une poche recueillant les urines. L’utilisation d’un système de collecte clos et stérile permet de limiter l’infection par voie ascendante. La tubulure est suturée à la peau. La perfusion rénale est ainsi maintenue jusqu’à l’intervention et la contamination vésicale de stase par les urines est évitée.

Gestion ❚ Une sonde de Foley droite cylindrique (30 cm - 8 French) s’adapte à tous les animaux dans la technique en aveugle. ❚ Son prix HT est de 5,5 € (36 F)

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