

Dominique LAMANDÉ
Artiste plasticien - lamandedominique.blogspot.com
https://www.lamande-sculpture.com/
Enseignement
École Nationale Supérieure d’Architecture de Bretagne
Professeur titulaire Arts et Techniques de la Représentation 2015/2018
Enseignant chercheur DIPAU (Didactique du Projet Architectural et Urbain) et GRIEF (Groupe de Recherche sur l’Invention et l’Évolution des Formes)

Maître assistant titulaire 2006/2015
École Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Bordeaux
Maître assistant titulaire Arts et Techniques de la Représentation 2003/2006
Textes, conception graphique et chromatique : Dominique Laman D é

Ce dossier retrace l’élaboration d’un exercice en première année à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Bretagne sur la transformation du dessin en deux dimensions en volume tridimensionnel. Ce travail s’inscrit dans la continuité d’une semaine intensive sur l’initiation au dessin sous ses différents aspects sensibles et concerne plus particulièrement le dessin en tant que concept avec comme axe de recherche, la forme et le fond.
Nous avons choisi l’œuvre gravée du sculpteur Eduardo CHILLIDA comme support d’analyse pour aborder la notion de vide et de plein : aucun autre artiste n’a mis aussi bien en évidence cette notion à travers toutes ses d’estampes.
Chaque étudiant a réalisé sur un lé de papier blanc, une série de formes noires. À l’aide d’une spatule en carton, l’étudiant est venu partitionner cet espace avec de la gouache noire. Il était exclu de faire un travail d’expression, de produire un geste à la Hartung ou à la Soulage. Le graphisme produit devait suggérer une vue aérienne, une forme au bord net et maîtrisé, un choc entre le noir et le blanc, à la manière d’un cheminement se frayant un passage dans la matière du papier. Pour éviter le syndrome du bord du dessin, c’est sur un lé plus grand que l’étudiant s’est exercé pour ensuite pouvoir découper le carré prédéfini de 50x50 cm. La spatule étant un outil, l’étudiant devait en explorer toutes les possibilités. Ni haut, ni bas, ni droite ni gauche, les dessins ainsi réalisés pouvaient être regardés dans tous les sens. Dans chaque production, un seul dessin fut sélectionné et par affinité de famille de formes, associé à trois autres dessins de camarades. La constitution de ce graphisme de groupe a donné lieu à un débat pour savoir dans quel sens il était le plus judicieux d’associer ces quatre dessins afin d’élaborer une forme intéressante. Il existait autant de possibilités que de côtés pour chacun des carrés. Une première phase de réajustements a été nécessaire, pour réaffirmer des bords imprécis, des directions incertaines. Certains ajouts ont eu lieu pour faire coïncider les formes, peut-être un peu trop systématiquement. Cette création à quatre une fois stabilisée, chaque groupe a pu définir quelles étaient pour lui les formes pleines ou vides. L’esprit peut décider par exemple que le graphisme noir est une zone de circulation et le blanc de la matière ou inversement, la forme noire devient un plein et le blanc, un espace. Ce travail s’est poursuivi en reportant
sur du carton kraft de 100x100 cm le contour des formes qui ont été ensuite extrudées sur une hauteur de 20 cm, unique pour toute la promo. Une seconde phase de finalisation a nécessité de simplifier certains dessins, de synthétiser des graphismes en les rendant plus optimums et de remodeler certaines volumétries pour les rendre plus efficientes. Pour clore cette session, les productions finalisées ont donné lieu à un travail collectif dans le hall de l’école par assemblage de ces îlots, permettant ainsi de faire apparaître une grande cité abstraite de vides et de pleins, transformant les dessins en un vaste puzzle urbain.
Quatre dessins individuels ont été associés. Pour créer une cohérence, des liaisons, des compléments de formes ont été ajoutés.








Un grand dessin collectif prend forme et se stabilise.

L’esprit circule dans les espaces blancs, butant sur des formes pleines noires ou inversement, l’esprit se fraye un chemin dans des espaces noirs contournant des formes blanches pleines. Pour la suite du travail, chaque groupe doit déterminer qu’elles seront les formes pleines à extruder.


































Liste des étudiants 2017-2018
EPILOGUE
Ce travail collectif s’inscrit dans la théorie de la Gestalt, la forme et le fond transposés ici en vide/plein. Cette thématique est fondamentale dans la conception architecturale. L’architecture est un formidable champ d’arts appliqués et l’enseignement des arts plastiques en école d’architecture doit être un élément structurant pour les étudiants. On ne peut pas enseigner en école d’architecture comme on pourrait enseigner en école d’art ou en faculté d’arts plastiques. C’est une approche qui doit être en complète adéquation avec la formation des étudiants.
Ici, en partant de l’œuvre graphique du sculpteur Eduardo CHILLIDA, on interroge, dès la première année, la ville et l’architecture. Les dessins associés par groupes ont donné lieu à des connexions plus ou moins voulues, des travaux ont été refaits pour correspondre parfaitement aux dessins avoisinants. La notion de hasard, d’imprévu a bien souvent été gommée, au profit de la maîtrise parfaite du résultat de chaque groupe. Cet impondérable s’est de nouveau imposé quand nous avons réuni l’ensemble des travaux. L’assemblage de la totalité des îlots a provoqué la disjonction des voies de circulations qui pour certaines se sont trouvées bloquées par le volume du travail d’un autre groupe créant ainsi des voies sans issue, d’autres ont débouché sur un vide, une place permettant de décongestionner un ensemble. L’aléa est une notion difficile à faire accepter pour des concepteurs qui cherchent à toute force à tout contrôler, pourtant une ville trop maîtrisée conduit
à la monotonie, à l’ennui. Une ville se transforme de siècle en siècle par petits bouts, par destructions, reconstructions et en fonction des nécessités du moment, elle s’oriente selon des axes d’intérêts ou selon les points cardinaux.
Cette introduction à la volumétrie de la ville par ses vides et ses pleins interroge la place de l’architecture et de son impact sur son environnement. L’architecture n’est pas un simple objet déconnecté d’un contexte plus large, la ville. Pour tirer le meilleur parti de ce type d’exercice, il serait intéressant qu’il puisse être repris par les urbanistes/architectes afin d’ouvrir une réflexion sur le sens du bâti, le choix des voies de circulation, leurs priorités, sur la nécessité de faire des bâtiments publics des éléments d’exception, ancrages symboliques, points de repère dans un territoire, sur l’utilité des vides que l’on nomme places, squares, agoras… et qui sont autant d’indispensables respirations minérales ou végétales, ou encore sur l’analyse des espaces propres aux îlots, ces cours intérieures à définir.
Dans une relation interdisciplinaire, on pourrait imaginer faire en sorte de transformer ce travail en un jeu, un mécano à grande échelle, pour porter une réflexion collectivement sur la cité. Dans l’idéal, cette grande maquette pourrait être investie aussi bien par la deuxième voire la troisième année avec une approche et une résolution plus élaborée des problématiques.

Équipe pédagogique
Dominique LAMANDÉ plasticien
Anne PETIT architecte coloriste
Éva PALKOVA architecte

Avec la participation pendant la semaine intensive
Olivier DELÉPINE architecte