Catalogue "Oeuvres sur papier et grisaille", 2021, Paris, Galerie Eric Coatalem

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Œuvres sur papier & Grisaille 2021

GALERIE ERIC COATALEM 136, rue du Faubourg Saint Honoré 75008 Paris Tél. 33 (0)1 42 66 17 17 www.coatalem.com - coatalem@coatalem.com


A Charles, Louis et Pauline

Je tiens à remercier pour la réalisation des notices mais aussi, pour leur patience et leur précieuse aide : Joseph Baillio, Clara Bonczak, Barbara Brejon de Lavergnée, Sarah Catala, Maria Teresa Caracciolo Arizzoli, Agathe Dupont, Matthieu Fournier, Bénédicte Gady, Thomas Hennocque, Yuriko A. Jackall, Dominique Jacquot, Neil Jeffares, Frédérique Lanoë, Sidonie Laude, Jane Mac Avock, Agnès Malpel, Frédérique Mattéi, Marianne Paunet, Florent Piednoir, Mathieu Salesse, Nicolas Schwed et Dominique Vitart. Tous les montages ont été réalisés, avec élégance, par Sidonie Laude à Paris. Les dimensions sont données en millimètres en commençant par la hauteur. Tous les droits de reproduction sont strictement réservés à la Galerie Eric Coatalem, Paris.




Claude DERUET (Nancy 1588 - 1660) L’Enlèvement des Sabines Huile sur toile en grisaille, H. 53 cm ; L. 75,5 cm Provenance : très probablement le tableau « Ravissement des Sabines de deux pieds et demy de longueur ou largeur et deux pieds de hauteur », en noir et blanc côté 60 francs, qui figure en 1662 dans l’inventaire après décès du peintre. Bibliographie : S. Harent « L’Enlèvement des Sabines. Histoire d’une œuvre », dans Amazones et cavaliers. Hommage à Claude Déruet (v.1588-1660), musée des Beaux-Arts de Nancy, 2008, p. 37, note 42. Apprenti de Jacques de Bellange (vers 1575-1616), peintre de la cour de Lorraine en 1605, Déruet séjourne en Italie à partir de 1613, dans l’atelier du Cavalier d’Arpin (1568-1640), où il rencontre probablement Agostino Tassi (15781644). De retour à Nancy en 1619, il est accueilli comme le successeur de Bellange et chargé de la direction artistique de la cour de Lorraine par le duc Henri II. Il travaille pour la (fig.1) L’Enlèvement des Sabines, huile sur toile, grisaille, H. 95 cm ; L. 162 cm famille ducale avec les nancéens Jean Nancy, musée des Beaux-arts (inv. 2005.6.1) Le Clerc et Jacques Callot puis, à partir de 1633, date de la reddition de Nancy, s’assure la protection du roi de France Louis XIII. Le cardinal de Richelieu lui commande également, vers 1641-1642, les Eléments, pour orner son château dans le Poitou. Cependant, c’est le maréchal Henri de La Ferté-Senneterre, gouverneur de la Lorraine pour le roi de France, qui devient l’un de ses plus importants protecteurs. Déruet s’éteint à Nancy, (fig.2) L’Enlèvement des Sabines, couronné de succès. huile sur toile, H. 114,5 cm ; L. 186,5 cm En 1651, la ville de Nancy Munich, Alte Pinakothek, (inv. 13.113). acquiert un Enlèvement des Sabines Autrefois attribué à Jean Cousin. (fig.1) auprès de Déruet, pour le gouverneur de Lorraine, qui appréciait recevoir des tableaux en guise d’étrennes. Cette « peinture de foule » rassemble, dans un décor urbain idéalisé et avec une composition très construite et assez archaïque, de petits personnages au pied de la colonne Trajane, à la manière des représentations de batailles. Notre tableau en grisaille est une étude pour le tableau de l’Alte Pinakothek de Munich (fig.2). On peut également supposer, au regard des différences notables entre les deux grands tableaux, que Déruet recherchait dans des tableaux monochromes les effets de composition avant de l’exécuter en couleurs, suivant l’exemple de Tempesta. GALERIE ERIC COATALEM PARIS



Simon VOUET (Paris 1590 - 1649) Etude de drapé Pierre noire et rehauts de craie blanche, H. 255 mm ; L. 255 mm Fils d’un maître peintre parisien, Simon Vouet fut un artiste précoce que ses talents de portraitiste menèrent jusqu’en Angleterre, puis jusqu’à la lointaine Constantinople, dans la suite de l’ambassadeur de France, Achille de Harlay. Revenu en Europe en s’arrêtant à Venise en 1612, il entama une longue et brillante carrière italienne, à Rome et à Gênes notamment, qui le porta au comble du succès. Bénéficiant d’une clientèle prestigieuse, à la fois comme portraitiste et comme peintre d’histoire, il fut finalement élu Prince de l’académie romaine de Saint Luc en 1624, honneur qui n’avait jamais été accordé à un artiste étranger, avant d’être rappelé en France en 1627 par Louis XIII pour être nommé Premier peintre du roi. A Paris, il anima bientôt l’un des ateliers les plus actifs du temps, produisant pendant deux décennies, tant pour la famille royale que pour les principaux personnages du royaume. L’impressionnante liste de ses collaborateurs, disciples et élèves (Le Sueur, Pierre Mignard, Le Brun, etc) donnent la mesure du personnage et témoignent de son importance dans l’histoire de l’art français. Notre dessin, inédit, est très probablement une étude pour une figure de La Madeleine agenouillée de La Mise au tombeau du Havre (fig.1). Le drapé, en apparent désordre, enveloppe la figure grâce à de longues lignes fluides, que viennent interrompre des plis cassés mais souples. Le lyrisme du style, le sens aigu des formes, la suggestion du mouvement et le cadrage serré de la figure contribuent à la force de l’oeuvre. Nous remercions Barbara Brejon de Lavergnée et Dominique Jacquot d’avoir confirmé l’authenticité de ce dessin et qui sera inclus dans leurs catalogues raisonnés respectifs.

(fig.1) Simon Vouet, La Mise au tombeau, vers 1636-1638, Le Havre, MuMa (inv. A 381)

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Claude VIGNON (Tours 1594 - Paris 1670) Sémiramis Sanguine, H. 334 mm ; L. 200 mm Bibliographie : P. Pacht Bassani, Claude Vignon, 1593-1670, Paris, Ed. Arthéna, 1992, n°306, p. 368 ; V. Meyer, L’œuvre gravée de Gilles Rousselet, graveur parisien du XVIIe siècle, Paris, Musées Éditions, 2004 ; G. Duplessis, Catalogue de l’œuvre de Abraham Bosse, 1859 p. 186, n°1473. Né à Tours en 1593, Vignon apprend les rudiments des arts auprès du célèbre peintre Jacob Brunel (1558-1614). En 1610, âgé seulement de seize ans, il part poursuivre sa formation en Italie. Il y côtoie Valentin de Boulogne (1591-1632) et Simon Vouet (15901649) qui deviendra son ami et principal concurrent. De retour en France et précédé de sa réputation, Claude Vignon reçoit de nombreuses commandes publiques et privées dont plusieurs Mays dès 1623. Il bénéficie de la protection de Louis XIII et de Richelieu qui lui commandent de nombreux tableaux. Bien qu’il ait commencé très tôt la pratique de la gravure, c’est dans les années 1630 qu’il devient très productif dans ce domaine. Il produit lui-même des gravures d’après ses œuvres ou en confie la réalisation à d’autres artistes. Notre dessin représente Sémiramis, reine légendaire ayant régné au IXe siècle avant J.-C. sur l’Assyrie. Femme du roi Shamshi Adad V et mère d’Adad-nerari III, elle exerce la régence pendant cinq ans à la mort de son époux. Sa légende et l’admiration qu’on lui porte naissent grâce aux victoires militaires gagnées par son peuple sous son égide. Elle aurait été l’instigatrice de grands projets architecturaux, comme la création de Babylone et de ses jardins suspendus. Fidèle à la légende, Vignon la représente en reine guerrière : couronne surmontée d’une coiffe en plumes, arc à la main, carquois en travers du buste. Ce dessin fait partie d’un cycle destiné à être diffusé en gravure et exécuté vers 1639 sur le thème des Sept Merveilles du Monde, dépeignant des personnages historiques liés aux merveilles du monde antique. Vignon collabore avec les graveurs Gilles Rousselet (1614-1686) et Abraham Bosse (c.1602-1676) : le premier s’occupe des figures et le (fig.1) Gilles Rousselet et Abraham Bosse, Vignon, Sémiramis, gravure, second des arrière-plans représentant les merveilles d’après Claude H. 35,5 ; L. 21,2 cm. associées. Dans la gravure représentant Sémiramis (fig.1), l’arrière-plan représente la ville de Babylone et ses fortifications. Si la figure est très fidèle au dessin de Claude Vignon, un cadavre de lion, gisant aux pieds de la reine, a été rajouté. Il fait référence à un épisode de sa légende dans lequel elle aurait abattu un lion devant les murailles de la ville. Divers monuments de la cité sont représentés derrière la figure, dont un bâtiment circulaire surmonté d’une statue monumentale de la reine. Très peu de dessins ayant servi de modèle pour ces gravures ont survécu. Notre sanguine est le seul dessin préparatoire à la série des Merveilles du Monde étant parvenu jusqu’à nous. GALERIE ERIC COATALEM PARIS



Philippe de CHAMPAIGNE (Bruxelles 1602 - Paris 1674) Saint Benoît découvrant miraculeusement une fontaine cachée Plume, encre brune et lavis gris, H. 162 mm ; L. 198 mm Inscrit en bas à gauche : S. Conca (recto) et aa (verso) Provenance : collection privée ; Christie’s Londres, le 7 juillet 2015, lot 50. Bibliographie relative : B. Dorival, Philippe de Champaigne : 1602-1674, Paris, 1976, II, n° 103 ; D. Brême, À l’école de Philippe de Champaigne, exposition au musée d’Évreux, 2007 2008, Somogy éditions, 2007, p. 185, fig. 81 ; F. Lanoë, Trois maîtres du dessin, Philippe de Champaigne Jean-Baptiste de Champaigne, Nicolas de Plattemontagne, catalogue d’exposition, Magny-les-Hameaux, musée national de Port-Royal des Champs, 2009. Né à Bruxelles en 1602, Philippe de Champaigne débute dans l’atelier de Jean Bouillon, puis de Michel Bourdeaux, avant d’être élève du célèbre peintre paysagiste Jacques Fouquières (1580-1659). En 1621, il quitte sa ville natale pour se rendre à Rome, après avoir refusé de parfaire sa formation dans l’atelier de Rubens (1577-1640) à Anvers, mais c’est à Paris qu’il s’arrête et demeure. Les débuts du jeune Champaigne se révèlent difficiles, jusqu’à ce que Georges Lallemand (1575-1636) et Nicolas Duchesne (mort en 1628) le protègent et lui trouvent ses premières commandes. Notre peintre se lie d’amitié avec Nicolas Poussin (1594-1665) en 1623, lorsqu’il habite au collège de Laon, dans le quartier latin. En 1628, Champaigne est enfin reconnu en devenant Peintre ordinaire de Marie de Médicis, ainsi que Valet de chambre du Roy, honneurs qui lui donnent accès à un logement au Luxembourg. Il décore également de nombreux monuments parisiens (Palais-Cardinal, église Saint-Germainl’Auxerrois...) et devient Premier peintre de la reine, Anne d’Autriche. Il se rapproche dès 1643 du courant janséniste, mais c’est particulièrement lors de la guérison miraculeuse de sa fille, paralysée, que Philippe de Champaigne prend la défense des religieuses du couvent de Port-Royal. Il peint alors cet étonnant ex-voto de 1662, conservé au musée du Louvre (Inv. 1138). Il exécutera par la suite de nombreux tableaux mystiques et religieux, tout en ne négligeant pas ses fonctions à l’Académie royale de peinture et de sculpture, dont il fut un des membres fondateurs en 1648. Notre dessin est à ce jour la seule étude préparatoire connue, mais avec de nombreuses variantes, de l’une des douze scènes consacrées à la vie de saint Benoît exécutées autour de 1655-1656 pour la chambre de la reine Anne d’Autriche dans son appartement du Val-de-Grâce à Paris : La fontaine miraculeuse (fig.1).

(fig.1) La Fontaine miraculeuse Bruxelles, musées royaux des Beaux-arts (Inv. 29)

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Jean DARET (Bruxelles 1614 - Aix-en-Provence 1668) Le Christ en croix Pierre noire, H. 400 mm ; L. 270 mm Inscription à la plume et encre brune, en bas à droite Daret Provenance : Marquis de Chennevières (marque L.2072 ou 2073) ; sa vente Paris, Hôtel Drouot, 4-7 avril 1900, n°99 ; acquis par Ducrey ; vente Paris, hôtel Drouot, 29 mars 1943, n°34 (Ecole française XVIIe siècle, Le Christ en croix, annoté Daret) ; coll. particulière. Bibliographie : Ph. de Chennevières, « Une Collection de dessins d’artistes français », L’Artiste, 1895, p. 264 ; P. Rosenberg in La Peinture en Provence au XVIIe siècle, cat. exp. Marseille, musée des Beaux-arts, palais Longchamp, 1978, p. 42. Exposition : Dessins de la collection du Mis de Chennevières exposés au musée d’Alençon, Paris, Poulet-Malassis et de Broise, 1857, cat. exp. par Philippe de Chennevières, n°44. Né à Bruxelles en 1614, Jean Daret commence un apprentissage chez Antoine van Opstal à l’âge de 11 ans, avant un premier séjour à Paris. Il assiste au mariage de son cousin germain, le graveur Pierre Daret (1604-1678) en septembre 1633, en présence notamment de Jacques Blanchard (16001638). On retrouve notre peintre en 1637 à Aix-enProvence, sans doute après un premier séjour en Italie. Il se marie dans cette ville dès 1639 et y demeure jusqu’à sa mort, à l’exception de séjours à Bruxelles (1655), à Paris (1659-1664) et enfin à Rome à une date inconnue. Sa peinture en trompel’œil de l’escalier de l’hôtel de Châteaurenard à Aix (1654) où Louis XIV était logé au printemps de 1660, est son chef-d’œuvre. Lors du second séjour parisien, Daret exécute des portraits, travaille pour la gravure et aurait participé à la décoration du château de Vincennes. Son art, toujours imprégné de ses origines flamandes, subit de nombreuses influences. Seule une quarantaine de dessins de sa main est identifiée aujourd’hui.

(fig.1) Le Christ en Croix avec la Vierge, saint Pierre et saint Antoine, Cathédrale SaintSauveur d’Aix-en-Provence

Cette feuille, exceptionnellement grande pour Daret, prépare la figure du Christ de la Crucifixion avec saint Pierre et saint Antoine et la Vierge au Sept douleurs de 1640 (fig.1). L’éclairage, la position de la tête du Christ, les jambes et le bras ainsi que le pagne s’y trouvent déjà, alors que d’autres éléments naturalistes, notamment les clous gigantesques qui attachent le corps à la croix ou les tâches de sang sur le corps sont absents. Aujourd’hui conservée dans la cathédrale Saint-Sauveur, cette oeuvre fut commandée pour la chapelle Maurel à l’église Saint-Pierre des Augustins déchaussés d’Aix où elle demeura jusqu’à la Révolution. Nous remercions Jane Mac Avock pour l’authentification et la rédaction de cette fiche. GALERIE ERIC COATALEM PARIS



Charles LE BRUN (Paris 1619 - 1690) Etude d’une figure de dos avec des reprises du bras (recto) Etude d’une figure de dos (verso) Sanguine, H. 255 mm ; L. 370 mm Annoté à la plume en bas à gauche C. Le Brun Provenance : inédit. Fils de Nicolas Le Brun, maître sculpteur, Charles Le Brun étudie auprès du maniériste Georges Lallemant avant de devenir l’élève de François Perrier, en 1632. Dès 1634, la protection du chancelier Séguier lui permet de rencontrer Simon Vouet puis de partir en Italie en 1642, avec Nicolas Poussin qui retourne à Rome. Le Brun fait déjà preuve d’une activité extraordinaire : quand il ne peint pas, il grave à l’eau forte, compose des dessins de thèses, modèle en cire… Fort bien accueilli à Rome par le Cardinal Barberini et le Pape Urbain VIII, il y reste quatre ans. De retour à Paris en 1648, Le Brun participe activement à la fondation de l’Académie. En 1649, il rencontre le Cardinal de Mazarin, qui le présente au roi Louis XIV. Colbert le nomme directeur des Gobelins et, en 1660, le roi lui commande plusieurs sujets sur l’Histoire d’Alexandre. Premier peintre en 1662, Le Brun décore pour Fouquet le château de Vaux le Vicomte, pour Colbert le château et les pavillons de Sceaux, les façades des pavillons de Marly et les demeures royales comme la Galerie d’Apollon au Louvre, l’escalier des Ambassadeurs et la Galerie des Glaces à Versailles… Il régnera sur tous les arts de l’époque avant d’être détrôné par son concurrent Pierre Mignard. Notre dessin est préparatoire à une figure en bas à gauche de la composition Le Réveil des eaux ou Le Triomphe de Neptune et d’Amphitrite (fig.1) exécutée par Charles Le Brun pour la galerie d’Apollon au Louvre à partir de 1663 sur commande de Colbert. L’artiste élabore tout le programme décoratif, en référence au soleil et aux éléments. Il ne réalisa luimême que trois plafonds, Le Triomphe de Neptune, Le Soir et La Nuit, mais ses croquis et indications seront suivis jusqu’au XIXe siècle afin d’achever la commande dont le chantier est mis à mal par le départ de Louis XIV pour Versailles en 1679. Le croquis moins abouti de la même figure au verso et la reprise du bras droit montrent le travail de recherche de Le Brun pour parvenir à la figure parfaite, traduisant avec force l’énergie de ses protagonistes. Nous remercions Bénédicte l’authentification de ce dessin.

Gady

de

nous

avoir

aimablement

(fig.1) Le Triomphe de Neptune et d’Amphitrite, Galerie d’Apollon, Paris, musée du Louvre

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confirmé



Adam François Van der MEULEN (Bruxelles 1632 - Paris 1690) Deux cavaliers Pinceau et lavis de sanguine brûlée, H. 440 mm ; L. 480 mm Provenance : succession de Monsieur X, vente Piasa, Hôtel Drouot, Paris, le 7 décembre 2011, n°29 ; collection particulière, Paris. Formé chez Peter Snayers peintre de batailles à la cour de Bruxelles, Adam-François se consacre rapidement à ce genre en plein essor depuis la guerre de Trente Ans, et sa renommée dépasse vite les frontières des Pays-Bas espagnols. Dès 1664, il rejoint la cour de France en qualité de peintre historiographe de Louis XIV, appelé par Colbert et Charles Le Brun. Logé aux Gobelins, très correctement pensionné par le roi, Van der Meulen fut rapidement chargé de suivre Louis XIV dans ses campagnes menées dans les Flandres. Son travail consiste à proposer des œuvres représentant la magnificence du roi devant les places fortes qui viennent d'être conquises. Il sut se montrer suffisamment courtisan pour obtenir en 1669, année durant laquelle le roi accepte d’être le parrain d’un de ses fils, le privilège de faire graver les « marches, batailles et entrées de ville ». De même, il entretient des relations avec Le Brun, Champaigne, le collectionneur Jabach... En 1672, éclate la guerre de Hollande: Van der Meulen s’y rend et réalise un grand nombre de dessins des trente-deux villes conquises par les armées de Louis XIV. L’année suivante, il est enfin reçu à l’Académie de Peinture et de Sculpture avec le privilège exceptionnel de ne pas présenter de morceau de réception. A la mort de Colbert, il sut s’attirer l’appui de Louvois, nouveau surintendant des Bâtiments, et conserva jusqu’à la fin de sa vie le soutien du roi. A la fois peintre, dessinateur et graveur, Van der Meulen utilisait plusieurs fois ses dessins pour ses tableaux, dans lesquels on retrouve à l’identique des groupes de personnages ou de végétaux, et réalisait des dessins, ou des contre-épreuves, afin d’ajuster les équilibres entre les personnages et les chevaux. Notre dessin reprend ainsi, en sens inverse, le groupe de cavaliers situé au premier plan de Louis XIV au Siège de Lille (musée des Beaux-Arts de Dijon) (fig. 1). Ce même procédé est utilisé dans une Etude de trois cavaliers (fig.2) reprenant un groupe de cavaliers de L’Armée (fig.1) Détail des cavaliers à gauche de la composition française marchant sur Courtrai conservé à Versailles (fig. 3).

(fig.2) Adam-François van der Meulen, Etude de trois cavaliers, pinceau et lavis de sanguine brûlée sur trait de crayon noir. Vente publique 2014

(fig.3) Adam-François van der Meulen, L’Armée française marchant sur Courtrai, Versailles, musée de l’Histoire de France (MV 5846)

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Jean JOUVENET (Rouen 1644 - Paris 1717) La Dernière Communion de Saint Louis Plume et encre brune, lavis brun et rehauts de blanc sur papier gris, H. 358 mm ; L. 253 mm Cachet de la collection Chennevières (L.2072) et Louis Deglatigny (L.1768a) Monogramme à la plume et à encre noire en bas à gauche «AB» Provenance : Peut-être collection chevalier de Damery ; sa vente le 18 novembre 1803, n°43 avec deux autres dessins, sous le titre « Apothéose de Saint Louis » ; peut-être collection A. Bourduge (monogramme AB ?) ; collection du marquis de Chennevières en 1895 ; sa vente, Paris, 4-7 avril 1900, peut-être partie du n° 245 ou 529 ; collection Louis Deglatigny ; sa vente, Paris, 22-23 novembre 1937, partie du n°153 (comme La mort d'un Apôtre). Bibliographie : P. de Chennevières, « Une collection de dessins d'artistes français », L'Artiste, septembre 1895, p. 170 ; A. Schnapper, « Philippe de Chennevières et la province » dans BSAF, 1972, n°6, p. 36 ; A. Schnapper, Jean Jouvenet, 1644-1717 et la peinture d’histoire à Paris, Paris, 1974, n°42 ; L.-A. Prat - L. Linhares, La Collection Chennevières. Quatre siècles de dessins français, Paris, Ed. musée du Louvre, Ecole nationale supérieure des beaux-arts, 2007, n°428, p.332, repr. sous le titre « Un vieillard étendu sur son lit de mort et entouré de sa famille et de ses serviteurs » ; A. Schnapper - C. Gouzi, Jean Jouvenet, 1644-1717, Ed. Arthéna, 2010, n° D 84, repr. p. 358. Jean Jouvenet est l’un des principaux représentants de la peinture française de la seconde moitié du 17ème siècle. Après avoir reçu une première formation de son père, Laurent Jouvenet, peintre et sculpteur rouennais, il rejoint Paris en 1661 pour y poursuivre ses études artistiques. En 1669, il rencontre Charles Le Brun avec lequel il collabore au Château de Saint-Germain-en-Laye, aux Tuileries puis à Versailles. Son May de 1673 marque véritablement le début de sa renommée et lui vaut l’admiration de toute une clientèle de riches collectionneurs privés, pour lesquels il réalise de grandes compositions décoratives, alliant une certaine rigueur esthétique héritée de Poussin et de Le Brun, à une utilisation de la couleur s’inspirant de la peinture de Rubens. Jouvenet reçoit d’importantes commandes de tableaux pour des églises et couvents parisiens. Reçu à l’Académie en 1675, il mène une longue carrière de peintre officiel couronnée de succès. Décrit par Chennevières comme « un vieillard étendu sur son lit de mort et entouré de sa famille et de ses serviteurs », ce dessin a été mis en rapport avec l’Extrême-onction (Lille, musée des Beaux-arts), datable vers 1685-1690. Il s’agirait plutôt, selon Gouzi, d’une représentation de La Dernière Communion de Saint Louis, reprenant des éléments d’un autre dessin du même thème (Alençon, musée des Beaux-arts et de la dentelle) et y associant un ravissement au ciel de Saint-Louis par des anges, au-dessus du lit à baldaquin, la présence du Christ, au centre de la composition, venant appuyer la Sainteté du roi mourant. Le dallage géométrique du sol, qui s’oppose aux volutes des nuées dans le registre supérieur, renforce la composition marquée par la mort terrestre et l’élévation céleste de Saint-Louis. On retrouve cette façon si particulière de dessiner les doigts par de petits bâtons. Le trait est vif et anguleux. Les ombres et lumières sont réalisées par des rehauts de blanc hachurés et un léger lavis. Les drapés cassés rappellent les sculptures romaines.

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Antoine DIEU (Paris 1662 (?) - 1727) L’Apothéose de Romulus (recto) La Mort de Caton (?) (verso) Pierre noire, plume et encre brune, lavis brun, H. 370 mm ; L. 510 mm Généralement situé à mi-chemin entre Charles Le Brun et d’Antoine Watteau, Antoine Dieu traverse le règne de Louis XIV, la Régence, et s’éteint après l’avènement de Louis XV. Il étudie de 1682 à 1686 à l’Académie royale de peinture et de sculpture, alors dominée par la personnalité du Premier peintre Le Brun puis, ponctuellement, pour les Bâtiments du roi entre 1700 et 1715 et participe à certains grands projets pour Versailles. Maître-peintre, il est d’abord membre de l’Académie de Saint-Luc, au sein de laquelle il joue un rôle de premier plan lors de sa réforme – il est professeur et directeur de l’institution en 1707 – avant d’être reçu académicien à l’Académie royale, institution rivale, en 1722. En parallèle, il mène une activité de marchand et tient boutique sur le Petit-Pont à partir de 1698, commerce qu’il cédera ensuite à Edmé-François Gersaint en 1718. Notre feuille est dessinée recto et verso. Côté face, il s’agit d’un dessin abouti, probablement destiné à être présenté à un commanditaire. Au dos (fig.1), une composition encore très ébauchée témoigne d’un processus créatif à l’œuvre, et la mise au carreau laisse supposer qu’elle a donné suite à un projet de plus grande ampleur. Les deux dessins ne sont pas nécessairement contemporains et sont stylistiquement différents. Le recto prépare une Apothéose ou Déification de Romulus. Le fondateur de Rome se présente sous l’aspect d’un général romain, porté vers l’Olympe sur son char, cerné de trophées et annoncé par les Victoires. Il est présenté aux dieux par l’intermédiaire de Mars, sous les auspices d’un autre guerrier élevé au rang de divinité, Hercule. La composition vue da sotto in su ainsi que le travail de l’ombre et de la lumière, dont les contrastes, déterminés par le lavis brun, créent un effet de perspective, portent naturellement à croire qu’elle prépare un projet de plafond. Il existe un pendant à ce dessin : Phaéton demandant le char d’Apollon, de même technique et de dimensions proches (fig.2). Nous remercions Marianne Paunet d’avoir authentifié cette œuvre.

(fig.1) La Mort de Caton (?) (verso) Pierre noire, traces de sanguine, mise au carreau à la pierre noire, H. 370 mm ; L. 510 mm

(fig.2) Antoine Dieu, Phaéton demandant le char d’Apollon, pierre, plume et encre brune, lavis brun, rehauts d’encre noire, traces de sanguine, H. 414 ; L. 545 mm, collection particulière

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Antoine RIVALZ (Toulouse 1667 - 1735) L’Enlèvement des Sabines Crayon et rehauts de blanc sur plusieurs feuilles de papier, H. 410 mm ; L 750 mm Bibliographie : J. Penent, Antoine Rivalz (1667-1735), le Romain de Toulouse, catalogue d’exposition, Toulouse, musée Paul-Dupuy, Ed. Somogy, 2004, p. 303, n°732 (œuvre non localisée). Antoine Rivalz commence son apprentissage à Toulouse auprès de son père, JeanPierre Rivalz (1625-1706), peintre et architecte, puis de Raymond Lafage (1656-1684). En 1685, à Paris, il suit les cours de l’Académie Royale de Peinture avant de partir pour l’Italie, où il séjournera une dizaine d’années. Alors qu’il connaît à Rome ses premiers succès, la consécration survient lorsqu’il gagne le second prix de l’Académie de Saint-Luc, derrière Antonio Balestra. Peu après son retour à Toulouse en 1703, Antoine Rivalz est nommé, à la suite de son père, peintre du Capitole, statut qui lui confère un quasi-monopole sur la peinture locale. Il est en charge de l’élaboration des programmes artistiques des monuments toulousains et missionné pour exécuter les portraits des Capitouls, les magistrats de la ville. La municipalité lui commande en outre une série de tableaux monumentaux qui s’inscrivent dans un projet de réhabilitation des galeries du capitole pour en faire un lieu de mémoire dédié à l’histoire et aux Grands Hommes de Toulouse. Il compose des tableaux à la gloire de héros locaux, comme la Bataille remportée par les Tectosages sur le roi Antiochus. Sa peinture porte la marque du baroque importé d’Italie, mais aussi l’expression du classicisme hérité de Poussin qui inspire nombre de ses compositions. Cette approche ouvre la voie du néoclassicisme à ses nombreux élèves tels que son fils Pierre (1720-1785) et son neveu Barthélemy (1692 ?-après 1772), Pierre Subleyras (1699-1749) ou encore Jean-Baptiste Despax (1710-1773). En 1726, Antoine Rivalz renforce l’importance du foyer artistique toulousain en fondant l’École académique de dessin. Elle deviendra en 1750 l’Académie Royale de peinture, sculpture et d’architecture de Toulouse, la seule institution à porter ce titre, avec celle de Paris. Tiré des récits de l’histoire de Rome par Tite-Live et Plutarque, le sujet de l’Enlèvement des Sabines raconte le rapt des femmes du peuple des Sabins par les premiers citoyens de la ville de Rome. Dans un premier temps, l’artiste a choisi de représenter, au centre, un autre groupe de figures en lutte (fig.1) puis d’ajouter, par-dessus, un cavalier qui se précipite sur la scène, avec sa cape ondulant derrière lui. Ce repentir, collé de façon à masquer son premier geste, montre que Rivalz hésitait encore sur la forme finale de sa composition. Des mouvements théâtraux accentuent le tumulte et la violence de la scène, où des femmes se débattent pour échapper à leurs ravisseurs. (fig.1) Groupe de figures en lutte, sous le repentir.

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Jean-Baptiste OUDRY (Paris 1686 - Beauvais 1755) Cerfs chassés par les loups Mine de plomb, plume et encre noire, lavis brun et gris, rehaussé de blanc, H. 336 ; L. 565 mm Signé et daté en bas à gauche J.B. Oudry / 1745 Provenance : collection privée américaine. C’est dans l’atelier de son père, peintre et doreur que Jean-Baptiste Oudry grandit dans l’amour de la peinture. De 1707 à 1712, Oudry devient l’élève de Nicolas de Largillierre qui lui apprend à regarder et copier les maîtres flamands du XVIIème siècle. Reçu en 1708 à l’Académie de Saint-Luc, il entre ensuite en 1719 à l’Académie Royale de Peinture comme peintre d’Histoire grâce à son tableau L’Abondance avec ses attributs (Versailles, Grand Trianon) et éxécute à cette époque un nombre important de portraits. Il se consacre progressivement, vers 1715-1725, à la peinture de natures mortes, de gibiers et de scènes de chasse pour laquelle il montre une prédilection dès ses débuts. En 1722, la Chasse aux sangliers qu’il présente à l’exposition de la Jeunesse confirme sa réputation de peintre animalier. Il obtient l’amitié de Louis XV et devient le peintre officiel des chasses royales. Artiste fécond et complet, Oudry recueille tous les honneurs. Nommé d’abord Peintre Ordinaire de la Vénerie Royale, il devient ensuite Peintre Officiel de la Manufacture des tapisseries de Beauvais, dont il assure brillament la direction artistique dès 1734. Deux ans plus tard, il est promu Inspecteur des Gobelins où il conçoit ses plus beaux cartons de tapisserie illustrant La Fontaine, Molière, Ovide et bien sûr les chasses royales. Ce grand dessin en clair-obscur comparable à d’autres œuvres datées de 1749, dont celle du musée Atger de Montpellier (fig.1), est caractéristique du style tardif d'Oudry, mis en relation par Opperman (Jean-Baptiste Oudry, New York et Londres, 1977, I, p. 152) avec les expériences à l’huile de l'artiste des mêmes années.

(fig.1) Combat de lions et de sangliers, encre brune, grise et noire, rehauts de blanc à la gouache, H. 319 mm ; L. 546 mm, signé et daté en bas à droite, J.B.Oudry / 1745 Montpellier, Musée Atger, inv. n°212

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Charles-Antoine COYPEL (Paris 1694 - 1752) La Dame à l’éventail Pastel, H. 790 mm ; L. 620 mm Exécuté vers 1730-1740 Historique : collection du marquis de Blaisel (?) puis sa vente à Paris, Hôtel Drouot, 9-10 mai 1873, lot 118 ; vente de la collection Léon Burat, Galerie Charpentier, Paris, 17 juin 1937, lot 2 ; conservé dans la même famille depuis cette vente. Bibliographie : Perry B. Cott, The Theodore T. and Mary G. Ellis Collection : I. Continental European paintings, Worcester Art Museum, 1941, p. 33, non repr. ; Paul Ratouis de Limay, Le pastel en France au XVIIIe siècle, Paris, Baudinière, 1946, pl. V/7. ; Thierry Lefrançois, Charles Coypel 1694-1752, Paris, Arthéna, 1994, p. 249, P.130 ; Neil Jeffares, Dictionary of pastellists before 1800, London, Unicorn Press, 2006 (mis à jour sur pastellists.com), n° J.2472.325, repr. en couleur. Fils d’Antoine et neveu de Noël-Nicolas, Charles Coypel est le dernier représentant de cette illustre famille d’artistes et mènera une brillante carrière de peintre, graveur et écrivain. Il maîtrise toutes les techniques et pratique tous les genres picturaux, avec cependant une attirance particulière pour le « grand genre » dont il se fit un ardent défenseur. Directeur de l’Académie, Premier Peintre du Roi et du duc d’Orléans, Garde des tableaux et dessins de la Couronne, protégé de Marie Leczinska, il est l’un des artistes les plus érudits et les plus appréciés de la Cour et des cercles mondains de son temps. Le goût du théâtre est très en vogue à l’époque et Charles Coypel, dramaturge lui-même, le répercute dans ses oeuvres. Il voulait même aller plus loin que Le Brun dans la voie difficile de l’expression des passions en introduisant la simultanéité des sentiments, afin de permettre à la peinture de rivaliser avec la poésie. Ainsi pour la décoration de l’appartement de la Reine à Versailles, il réalise, à plusieurs reprises, des cartons de tapisserie inspirés du théâtre lyrique ou tragique. Ces oeuvres rassemblées dans la tenture des Fragments d’Opéra, exécutées de 1733 à 1741 et complétées vers 1747-1748, connurent un véritable succès. Ce très beau pastel, souvent rapproché du portrait de la marquise de Lamure (fig.1) représentée, elle aussi, avec un éventail, reste cependant un portrait anonyme mais l’on peut deviner par la douceur qui émane du regard du modèle, la rare complicité avec l’artiste. Les mains délicatement présentées au premier plan, la tête légèrement tournée vers la droite pour faire face au spectateur, dans une gestuelle étudiée, le regard brillant et intense, sûre de sa beauté, accentuée par les dentelles, la soie, les perles et les rubans qui l’habillent, cette jeune femme aux carnations parfaites illustre l’incomparable talent de portraitiste de Coypel.

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(fig.1) La marquise de Lamure, née Charlotte Philippine de Chastres de Cangé (1713–1789), pastel, H. 730 ; L. 590 mm, Worcester Art Museum, inv. 1940-61



Jean-Baptiste Marie PIERRE (1713-1789) Femme agenouillée de dos, avec un drapé Sanguine et rehauts de craie blanche sur papier chamois, H. 435 mm ; L. 300 mm Dessin collé sur un passe partout du XVIIIème siècle et signé en bas à droite Provenance : collection particulière. Bibliographie relative : N. Lesur et O. Aaron, Jean-Baptiste Marie Pierre, 1714-1789, Premier peintre du roi, Paris, Ed. Arthéna, 2009, p. 284, P.195.

Disciple de Charles Natoire, Pierre reçoit le Grand prix en 1734. De 1735 à 1740, il est pensionnaire de l’Académie de France à Rome, où les directeurs Nicolas Vleughels puis JeanFrançois de Troy le considèrent comme l’un de leurs meilleurs élèves. De retour à Paris, il est rapidement agréé en 1741, puis reçu membre de l’Académie en 1742. Il monte successivement tous les échelons de la carrière de peintre d’histoire au sein de l’Académie, obtenant en 1770 le poste de directeur. La même année, il succède à François Boucher comme premier peintre du roi. Après 1770, Pierre restreint son activité de peintre pour pouvoir se consacrer entièrement à la direction de l’Académie. En 1757, pour son retour au Salon après six ans d’absence, consacrés aux chantiers de Saint-Roch et du Palais-Royal, Pierre expose L'Enlèvement d'Europe (n°19) (fig.1). La composition, saluée par la critique, servira de modèle pour la première série de la tenture des Amours des dieux, tissée aux Gobelins et commandée par le roi pour le marquis de Marigny comme cadeau d’usage à son directeur des Bâtiments aux meilleurs peintres français : Pierre, Vanloo, Boucher et Vien. Le tableau passe ensuite des Gobelins au Louvre, avant d’être mis en dépôt au musée d’Arras en 1872 où il aurait été détruit lors de la première guerre mondiale. Notre dessin est préparatoire à la figure en bas à gauche. La ligne claire et sinueuse des épaules et du bras droit souligne l’anatomie de la jeune femme dont les traits, la main et le pied droits sont à peine esquissés. Le drapé, qui semble porter la figure, alterne hachures à la sanguine et rehauts de blanc pour construire les volumes. Nous remercions M. Nicolas Lesur qui a confirmé l'authenticité de ce dessin.

(fig.1) L’Enlèvement d’Europe, huile sur toile, H. 325 cm ; L. 325 cm, 1757, détruit

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Jean-Baptiste GREUZE (Tournus 1725 - Paris 1805) Le départ en nourrice Sanguine, pierre noire, encre de Chine, lavis gris, gouache blanche, H. 415 mm ; L. 530 mm Œuvres en rapport : une autre composition sur le même sujet, en hauteur, était autrefois conservée à la Norton Simon Foundation à Los Angeles (voir catalogue de l'exposition JeanBaptiste Greuze, Dijon, 1977, n°41, repr.) ; Le Départ de la nourrice, crayons noir et blanc, Paris, musée du Louvre (Inv 26954) (fig.1) ; composition similaire avec de nombreuses variantes mais dans le même décor, d'un esprit plus serein, anciennement conservé à l'Ermitage et vendu chez Boerner le 4 mai 1932, n°44, repr. pl. VI ; gravures de ce sujet par Jean-Baptiste Simonet et Claude Henri Watelet, toutes deux en hauteur. Après avoir étudié à Lyon dans l’atelier du portraitiste Charles Grandon, Greuze arrive à Paris au début des années 1750 pour y suivre les cours de l’Académie où il est l’élève de Charles Natoire (1700-1777). Parrainé par le sculpteur Pigalle (1714-1785), il est agréé en 1755 et expose la même année au Salon où, acclamé par le public et la critique, il reçoit les éloges de Diderot. Après un séjour en Italie, entre 1755 et 1757, il poursuit sa carrière à Paris et expose avec succès aux Salons de 1759 à 1765. Ses relations conflictuelles avec l’Académie le poussent à se retirer des Salons jusqu’en 1800 ce qui ne l’empêche pas d’exposer chaque année ses dernières œuvres dans son atelier du Louvre, au même moment que le Salon officiel. Il y expose à nouveau dans les dernières années de sa vie et se fait remarquer du public par l’étonnante vigueur de son art. Jusqu’à sa mort en 1806, il exécute nombre de tableaux importants, des scènes de la vie quotidienne aussi bien que de brillants portraits. Greuze illustre une pratique courante au XVIIIe siècle : la mise en nourrice du nouveau-né citadin à la campagne. Sa propre fille AnneGeneviève, sur les conseils de son épouse, avait été mise en nourrice à Champigny. Si cela donnait lieu à des parties de campagne enjouées entre amis, il semble que Greuze ait souffert de ces séparations forcées. Le Louvre (fig.1) possède une étude au crayon de notre composition où l’accent est porté sur la nourrice, point culminant de la composition. Les obliques dynamiques des corps, tous dans des positions différentes, et la (fig.1) Jean-Baptiste Greuze, Le Départ de la nourrice, crayons noir et blanc, H. 420 mm ; L. 520 mm gestuelle des bras levés accentuent Paris, musée du Louvre, inv. 26954, recto l’aspect solennel et dramatique de la scène. Les figures dessinées à la pierre noire et à la sanguine sont peintes au lavis brun puis relevées de grands traits de plume d’encre noire, vifs et rapides et enfin rehaussées de touches de blanc pur posées avec violence qui illuminent la scène.

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Jean-Honoré FRAGONARD (Grasse 1732 - Paris 1806) Jardin de villa italienne (Villa d’Este ?) Sanguine, H. 350 mm ; L. 485 mm Provenance : très probablement un des dessins de la collection Lempereur ; sa vente le 24 mai 1773, n°731 « Un, idem (superbe dessein à la sanguine) au milieu duquel est une statue sur le bord d’un bassin entouré de cyprès) ; de 1907 à 1934, collection M. G. Deligand, Paris ; collection particulière, Paris. Bibliographie : Société de Reproduction des Dessins de Maîtres, Paris, 1913, vol V, n°28 rep.; A. Ananoff, L’œuvre dessiné de Jean-Honoré Fragonard (1732-1806), vol II, Paris, 1963, n°941 et vol IV, n°941. Expositions : Paris, 1907, Galerie Georges Petit, Chardin-Fragonard, n° 170 ("La Villa d'Este") ; Paris, 1921, musée des Arts Décoratifs, Pavillon de Marsan, Exposition de dessins de Fragonard, n° 184 ; Paris, 1934, musée des Arts Décoratifs, Pavillon de Marsan, Les artistes français en Italie, n°451; Hubert Robert, de Rome à Paris, Galerie Eric Coatalem, Paris, texte de Sarah Catala, n°50, p. 87. Œuvres en rapport : contre-épreuve d’un autre dessin quasi similaire, Montpellier, musée Fabre (in. 864.2.476) (fig.1) ; d'après Fragonard, Jardin de villa italienne, musée des BeauxArts de Reims (fig. 2). Véritable amoureux de la nature et du frémissement du vent dans les arbres, Fragonard découvre la nature italienne lors de son voyage initiatique idéalisant, notamment, ce jardin de la Villa d’Este. Récemment redécouverte, notre puissante sanguine est très probablement celle qui faisait partie de la vente de la collection Lempereur en 1773 et qui réapparaît dans la collection Deligand, au début du XXe siècle. Les différentes expositions, au début du siècle dernier, et la publication de ce paysage en 1913, nous permettent de retracer avec certitude le lien avec notre feuille. Le musée Fabre de Montpellier conserve une contre-épreuve (fig.1) qui comporte quelques variantes, comme l'ajout d'une barque en bas à droite, et le musée des Beaux-Arts de Reims (fig.2) possède une composition inspirée de notre dessin par une main anonyme du XVIIIe siècle.

(fig. 2) H. 360 mm ; L. 505 mm Reims, musée des Beaux-Arts

(fig. 1) H. 360 mm ; L. 470 mm Montpellier, musée Fabre

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Hubert ROBERT (Paris 1733 - 1808) La Promenade Sanguine, H. 305 mm ; L. 440 mm Provenance : Auguste Desperet, Lyon (Lugt 721 en bas à droite) ; Henry P. McIlhenny, Philadelphie ; sa vente, New York, Christie's, 20-21 mai 1987, lot 126 ; collection Felix Rohatyn, New York ; sa vente, New York, Sotheby’s, 14 octobre 2020, lot 3. Bibliographie : J. de Cayeux, Les Hubert Robert de la collection Veyrenc au musée de Valence, musée d’Art et d’Histoire de Valence, 1985, sous le n° 17, p. 112. Fils d’un valet de chambre du marquis de Stainville, Hubert Robert fait son apprentissage dans l’atelier du sculpteur Michel-Ange Slodtz. En 1754, grâce à l’appui de Stainville (futur duc de Choiseul), il obtient une place à l’Académie de France à Rome, où il demeure jusqu’en 1765 et suit l’enseignement de Gian Paolo Panini. Durant ce séjour en Italie, Robert se lie d’amitié avec Jean-Honoré Fragonard et l’abbé de Saint-Non, qu’il accompagne lors de son fameux voyage à Naples en 1760. De retour en France en 1765, il connaît une grande renommée comme peintre de ruines et de paysages et travaille pour les plus prestigieux collectionneurs parisiens de son temps, dont Watelet, Mariette, Marigny et Breteuil... Notre artiste entre à l’Académie en 1766 et expose dès l’année suivante au Salon où il reçoit les éloges de Diderot. Sa notoriété ne fait que croître durant les trois décennies suivantes et, grâce à ses dons artistiques et à son érudition, Robert devient l’un des personnages les plus en vue de la haute société parisienne. Malgré l’insistance de l’impératrice Catherine II, qui lui demande à plusieurs reprises de venir travailler pour elle en Russie, il préfère poursuivre sa carrière à Paris. Ce dessin à la craie rouge d'un homme se promenant dans la campagne parmi les ruines romaines est un beau témoignage du séjour de l’artiste à Rome. Le personnage non seulement souligne l’échelle des monuments grandioses, mais surtout anime la scène et l’imprègne d’un sentiment de sérénité et de contemplation. Tout comme le Jeune Homme lisant appuyé sur un chapiteau du musée de Quimper (fig.1), le personnage n’est pas identifié. Il peut tout aussi bien s’agir d’un ami de Robert que d’un jeune noble effectuant le Grand Tour, révélant par sa solitude et sa contemplation, la fascination préromantique de l’artiste pour les ruines.

(fig.1) Hubert Robert, Jeune homme lisant appuyé sur un chapiteau corinthien, vers 1760-1765 dessin à la sanguine sur papier, H. 208 mm ; L. 300 mm, Quimper, musée des Beaux-arts (inv. 873-2-38)

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Jean-Jacques LAGRENEE (Paris 1739 - 1821) L’annonce aux bergers Plume, lavis brun, rehauts de gouache blanche sur papier préparé en bleu, H. 370 ; L. 535 mm Provenance : probablement le dessin exposé au Salon de 1775 sous le numéro 138 ; vente Saint-Morys, Paris, 6 février 1786, probablement le n°689 ; collection privée, Avignon. Bibliographie : M. Sandoz, Les Lagrenée, II, Jean-Jacques Lagrenée 1739-1821, Paris, Éditart-Les Quatre Chemins, 1988. Grand peintre d’histoire, dessinateur et graveur français, Jean-Jacques Lagrenée nait à Paris en 1739. Il est le frère de Louis-Jean-François Lagrenée, auprès de qui il débute sa formation artistique. Il gagne le second prix de Rome en 1760 et, la même année, accompagne son frère pour un voyage de deux ans en Russie. En 1765, Jean-Jacques Lagrenée quitte à nouveau la France et part se former à Rome, grâce à l’influence conjointe de Louis-JeanFrançois et de Charles-Nicolas Cochin (1715-1790), qui lui obtiennent une place à l’Académie de France. Le célèbre Charles-Joseph Natoire (1700-1779) qui occupe à cette période le poste de directeur de l’Académie, ne tarit pas d’éloges à son sujet : « Les talens du Sr Lagrené me paroît promettre infiniment ; il a du feu et beaucoup d’imagination ; avec ce beau naturel, il peut aller loin ». Ce séjour est l’occasion pour lui de découvrir la peinture des grands maîtres. Ce voyage marque aussi le début d’une passion pour l’antique et l’archéologie qu’il découvre à Herculanum et Pompéi. De retour en France en 1769, il devient membre agréé de l’Académie Royale de Peinture et expose pour la première fois au salon de 1771. Il y présente L’Hiver, une esquisse pour le décor qui sera intégré au plafond de la Galerie d’Apollon au Louvre, venant compléter l’œuvre de Charles Le Brun. Cette composition magistrale, inspirée des plafonds de la galerie du palais Farnèse, fait office de morceau de réception au salon de 1775 et lui permet de devenir membre de l’Académie. Il obtient alors d’autres commandes royales, telles que les Noces de Cana ou le Baptême du Christ pour la chapelle de la Trinité du château de Fontainebleau. Sa carrière académique, et en particulier sa nomination en tant que professeur en 1781, témoigne de son succès. C’est à l’occasion du salon de 1775, que Jean-Jacques Lagrenée présente très probablement notre dessin alors intitulé « L’Ange annonce aux Bergers la venue du Messie » accompagné de six autres esquisses qui reçoivent de nombreuses louanges. Lagrenée se conforme au l’évangile de Saint Luc en représentant l’épisode de nuit. Il choisit le moment où un ange vient annoncer la venue du Christ aux bergers gardant leur troupeau. Jean-Jacques Lagrenée a réalisé plusieurs versions de cet épisode, dont au moins deux sur un papier (fig.3) Le repos pendant la fuite en Égypte bleu. L’une d’elle, qui présente de légères Huile sur toile, H. 89 cm ; L. 119,5 cm, Salon de 1775, n°134 ( ?), Galerie Eric Coatalem différences, est conservée au Metropolitan Museum de New York (inv. 1983.302). On sait que l’artiste a pour habitude de réaliser de nombreuses esquisses préparatoires à ses tableaux. Il produit en effet plusieurs peintures sur le thème de l’Annonciation au bergers, qui sont aujourd’hui disparues et dont ces deux esquisses sont les seuls témoignages. GALERIE ERIC COATALEM PARIS



Anne VALLAYER-COSTER (Paris, 1744 - 1818) Nature morte aux roses blanches Huile sur papier marouflé sur toile, H. 34,5 cm ; L. 52,5 cm Provenance : collection de l’artiste ; vente Vallayer-Coster, 21 Juin 1824, n°20 ; marché de l’art parisien en 1966 ; marché de l’art, Londres en 1967 ; collection privée, New York ; collection privée, France. Bibliographie : M. Roland Michel, Anne Vallayer-Coster, 1744-1818, Paris, 1970, repr. p. 134, n°109 ; Anne Vallayer-Coster. Peintre à la cour de Marie-Antoinette, WashingtonDallas-New-York Marseille, 2002-2003, cat. exp., p. 221, n°151, repr. Fille d’un compagnon des Gobelins, orfèvre à la Cour royale, Anne Vallayer est l’élève de Madeleine Basseporte (1701-1780), illustratrice botanique et de Claude-Joseph Vernet (1714-1789). Elle est une des rares femmes à être admise à l’Académie Royale de peinture et de sculpture le 28 juillet 1770 en tant que peintre de natures mortes. Elle expose au Salon dès l’année suivante. Denis Diderot écrira à son sujet: « Quelle vérité, et quelle vigueur dans ce tableau ! Mme Vallayer nous étonne autant qu’elle nous enchante. C’est la nature, rendue ici avec une force et une vérité inconcevable, et en même temps une harmonie de couleur qui séduit. » Le 23 avril 1781, Anne épouse Jean-Pierre Sylvestre Coster, avocat au Parlement et receveur général. Elle devient Chef du Cabinet de Peinture de la reine MarieAntoinette ainsi que son professeur de dessin. Spécialisée dans le portrait et la nature morte, Anne Vallayer-Coster s’illustre aussi dans les tableaux de genre et la miniature. Notre étude est caractéristique de l’art de Vallayer Coster à l’apogée de sa carrière : sur un fond brun, neutre, rapidement brossé, l’artiste rassemble des roses épanouies et en boutons, qu’elle peint sous tous les points de vue, de l’intérieur des boutons éclos, parfois parsemés de gouttes d’eau translucides, aux boutons à peine ouverts, laissant les tiges coupées apparaître et les feuilles tendres ponctuer la composition. La touche est délicate, parfois rapide et ponctuée de coups de pinceaux de blanc pour accentuer les volumes.

Anne Vallayer-Coster, Nature morte aux roses roses et jasmin blanc huile sur papier marouflé sur toile, H. 34,5 cm ; L. 52,5 cm. Collection privée

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Élisabeth Louise VIGÉE LE BRUN (Paris 1755 - 1842) Portrait présumé du jeune Antoine Jean Gros Pastel sur papier marouflé sur toile, H. 75 cm ; L. 64,5 cm Vers 1776 Provenance : collection particulière, Italie ; Gênes, Cambi Casa d’Aste, 10.12.2020, n° 97. Bibliographie : N. Jeffares, Dictionary of pastellists before 1800, London, Unicorn Press, 2006 n° J.76.164, repr. Longtemps donné à tort à Maurice Quentin de La Tour, ce ravissant portrait de garçon aux yeux bruns vêtu de bleu, les longs cheveux poudrés à blancs et retenus derrière la tête par un catogan a récemment fait l’objet d’une étude rédigée par Joseph Baillio. Il lui avait été signalé par le spécialiste des pastels avant l’an 1800, Neil Jeffares, lequel avait instinctivement cru y déceler la facture de la célèbre artiste française. L’attribution à la jeune Mme Le Brun ne fait pas de doute et repose sur le traitement très particulier du médium poudreux, c’est-à-dire sur des facteurs essentiellement stylistiques et chromatiques correspondant à sa technique de la première moitié des années 1770. Elle exécute le portrait peu avant ou peu après son mariage avec le marchand d’art JeanBaptiste Pierre Le Brun au tout début de l’année 1776. On retrouve la pose et le costume du modèle vêtu en petit adulte il enfonce la main droite dans le gilet d’un costume de satin bleu ciel orné de brandebourgs - dans l’effigie du Baron de Choiseul d’Esguilly, que la jeune artiste avait déjà réalisée vers 1772 (fig.1). Quant à l’identification du garçon, elle repose sur des hypothèses. Si l’on consulte les listes chronologiques des individus portraiturés par elle au début de sa carrière (fig.1) Portrait de Louis Marie Gabriel César de Choiseul, Baron (Souvenirs de Madame Louise-Élisabeth Vigée-Lebrun (..), de Choiseul d’Esguilly, dit « le Librairie de H. Fournier, 1835, vol. I, pp. 39-41), ce jeune Marquis de Choiseul » (1734garçon d’environ cinq ans ne pourrait correspondre qu’à deux 1795), vers 1772, collection privée. noms, ‘Le petit Roissy’ (liste de 1774) ou ‘M. Gros, peintre, enfant’ (liste de 1776). Or, le futur naturaliste Félix Michel de Roissy, l’année où Mlle Vigée le portraitura, n’avait au plus que trois ans, tandis que Antoine Jean Gros (1771-1835), destiné à devenir l’un des élèves principaux de Jacques Louis David puis le grand peintre d’histoire et de portraits que l’on connaît, posa pour l’amie de ses parents en 1776. Ses parents, qui étaient tous les deux peintres, étaient des amis proches du ménage Le Brun et Élisabeth Louise ne tardera pas à trouver dans l’enfant un talentueux émule auquel elle prodiguera des leçons. Les deux resteront très attachés jusqu’à la mort tragique de Gros, qui la laissera dans une « vive affliction » (Ibid, 1837, vol. III, p. 325). Elle l’avait tellement aimé qu’elle le traitait comme le fils qu’elle n’a jamais eu. On est donc en droit de conjecturer qu’il s’agit du portrait du futur grand peintre. La fraîcheur, la beauté des couleurs bleutées et la merveilleuse technique de Vigée Le Brun se conjuguent pour rendre, savoureusement, la vivacité de l’enfant. Ce pastel sera inclus dans le catalogue raisonné des peintures, pastels et dessins de l’artiste, par Joseph Baillio, que nous remercions (communication écrite du 1er oct. 2020). GALERIE ERIC COATALEM PARIS



Elisabeth VIGEE LE BRUN (Paris 1755 - 1842) Un cours d'eau traversant une vallée, des montagnes au loin, ciel nuageux Pastel, H. 230 mm ; L. 275 mm Vers 1820 Provenance : collection particulière, France. Bibliographie : Neil Jeffares, Dictionary of pastellists before 1800, London, Unicorn Press, 2006 (mis à jour sur pastellists.com), n° J.76.581, repr. en couleur. Fille du pastelliste Louis Vigée (1715-1767), membre de l'Académie de Saint Luc, et d'une coiffeuse d’origine paysanne, mademoiselle Vigée dessine avec passion dès son plus jeune âge. C’est de son père qu’elle reçoit ses premières leçons. Un peu plus tard, Joseph Vernet qu’elle rencontre au Louvre lui conseille de peindre d'après nature. Elle s'adonnera à la figure humaine, devenant très tôt une portraitiste de renom. Elle épouse le marchand de tableaux Jean-Baptiste-Pierre Le Brun en 1775 et, déjà, son talent attire une clientèle fortunée. Ses portraits de femmes, à la fois ressemblants et flatteurs, lui attirent la sympathie de MarieAntoinette, sa contemporaine exacte, qui fait d’elle son peintre favori et lui permet, à titre exceptionnel, d’être reçue à l'Académie royale de peinture et de sculpture le 31 mai 1783. Elisabeth Louise peindra plus de 30 portraits de la souveraine. A la Révolution, grâce à ses amis royalistes, elle fuit à Rome, Vienne, Londres et surtout à Saint-Pétersbourg, où elle fait un séjour de plusieurs années favorisé par des commandes de la haute société russe et des appuis de Gabriel-François Doyen, proche de l'Impératrice et de son fils. Elle regagne Paris en 1802 et, en 1807, exécute un portrait de Caroline Murat, la sœur de Napoléon. Ce sera la seule commande de la part du gouvernement impérial. Elle voyage en Europe puis publie ses Souvenirs vers 1835. Elle s'éteint à Paris à son domicile le 30 mars 1842, à 87 ans. Comme l’écrit Joseph Baillio, notre artiste est plus connue comme portraitiste même si, influencée par son mentor Joseph Vernet, elle reste très attirée par les paysages, représentant souvent ses modèles en plein air. Pendant toute la période de l’émigration et du blocus continental (1789-1805), elle a exécuté en Italie, en Autriche, en Russie et en Angleterre un assez grand nombre de paysages, la plupart au pastel, technique qu’elle pratiqua tout au long de sa carrière. Il n’en reste malheureusement que très peu dans un état aussi exceptionnel, dont celui du musée du Minneapolis Art Museum (fig.1). La technique utilisée pour cette vue montagneuse qui surplombe une vallée où s’écoule une rivière se jetant dans un lac, si raffinée et d’une fraîcheur merveilleuse, peut être comparée à certains pastels que fera beaucoup plus tard l’impressionniste Claude Monet. Ce pastel sera inclus dans le catalogue raisonné des peintures, pastels et dessins de l’artiste, préparé par Joseph Baillio (communication écrite du 28 janvier 2020).

(fig.1) Vue du lac de Challes et du Mont Blanc, vers 1807, H. 229 ; L. 340 mm, Minneapolis Art Institute, inv. 2007.51.

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Louis-Léopold BOILLY (La Bassée 1761 - Paris 1845) Portrait présumé de Madame Boilly, née Adélaïde Leduc, seconde femme de l'artiste, et de ses trois fils Julien, Edouard et Alphonse Huile sur papier marouflé sur panneau, H. 17,7 cm ; L. 17,7 cm Provenance : collection particulière Bibliographie : E. Bréton et P. Zuber, Louis-Léopold Boilly (1761-1845), Le peintre de la société parisienne de Louis XVI à Louis-Philippe, Paris, Ed. Arthéna, 2019, p. 593, n°480 P bis, rep. Louis-Léopold Boilly, né en 1761 dans le nord de la France. Il commence tôt à peindre et reçoit ses premières commandes à l'âge de onze ans. En 1779, remarqué par l'évêque de la ville, il part pour Arras où il acquiert une réputation de portraitiste qui lui aurait valu jusqu'à trois cents commandes. Il semble que ce soit à Arras qu'il ait appris à peindre les trompe-l'œil et grisailles sous la direction du peintre Dominique Doncre (1743-1820). En 1785, il s'établit à Paris qu'il ne quittera plus jusqu'à sa mort. Il participe pour la première fois au Salon en 1793 et y expose régulièrement jusqu’en 1824. Pendant la Terreur, dénoncé au comité de Salut Public pour avoir peint des sujets allant à l’encontre de la morale, Boilly échappe de peu à la guillotine, en montrant son Triomphe de Marat, aujourd’hui conservé au musée des Beaux-arts de Lille (Inv.1290bis). Toute sa carrière sera essentiellement consacrée à deux types de représentations : les scènes de genre et les portraits.

(fig.1) Portrait présumé d’Edouard Boilly, vers 1808, huile sur toile, collection particulière

(fig.2) Portrait d’un jeune garçon accoudé, crayons, rehauts de blanc sur papier brun, H. 172 mm ; L. 186 mm Anciennement Galerie Coatalem, Paris

Ce charmant portrait de groupe pourrait représenter la seconde épouse de Boilly, Adélaïde-Françoise-Julie Leduc, serrant Julien, Edouard (fig.1) et Alphonse dans ses bras. Dans une mise en page sobre et intimiste chère à l’artiste, Boilly concentre l’expression de la tendresse d'une mère et celle de l’amour filial et fraternel. Le regard direct de la mère et du jeune garçon au premier plan peut être rapproché d’un dessin de Jeune garçon accoudé (fig.2, Portrait présumé d’Edouard Boilly ?). GALERIE ERIC COATALEM PARIS



Jean-Baptiste WICAR (Lille 1762 - Rome 1834) Etude de tête d’homme de profil Huile sur papier marouflé, trace de mise au carreau visible en bas à droite, H. 41; L. 43, 5 cm Bibliographie comparative : M.T. Caracciolo, « Jean-Baptiste Wicar (Lille, 1762 - Rome, 1834). Catalogue raisonné des peintures, 1 », Les Cahiers d’Histoire de l’Art, n° 7, 2009, pp. 137-161. L’œuvre peinte de la jeunesse de Wicar est encore mal connue. Au premier noyau de peintures de l’artiste parvenues jusqu’à nous, dont Fernand Beaucamp a établi la liste en annexe à sa monographie de 1939, Maria Teresa Caracciolo Arizzoli a pu ajouter quelques toiles, en 2009 et 2011, en proposant un catalogue raisonné provisoire. La qualité de notre étude de tête, le caractère spontané qu’elle conserve dans son achèvement, témoigne du soin que Wicar consacrait à ses oeuvres, même quand celles-ci ne représentaient qu’une étape en vue d’une composition d’envergure plus ample et plus complète. On peut la rapprocher d’une étude de tête de jeune garçon, peinte à l’huile sur papier (fig.1) ainsi que d’un dessin du musée de l’Académie des Beaux-arts de Perugia (fig.2). Sa facture libre et spontanée, comme le traitement du fond de la peinture, font penser davantage à la production de la fin du 18ème siècle, et notamment aux œuvres réalisées alors que Wicar fréquentait l’atelier de David dès 1781-82. Les peintures historiques et bibliques de Wicar exécutées à cette époque sont une illustration parfaite de la méthode que le maître transmettait à ses élèves dans son atelier. Parmi les piliers de cette méthode, avec l’étude d’après le modèle nu et drapé, se trouvait la pratique de l’étude de tête, peinte ou dessinée. Des éléments stylistiques précis permettent de l’intégrer à la production de jeunesse de Wicar même s’il faudra attendre de nouvelles découvertes pour savoir si elle fut simplement un exercice de travail ou si elle constitue une étape d’une œuvre plus ambitieuse. Nous remercions Maria Teresa Caracciolo Arizzoli, spécialiste de l’artiste, pour son aide à la rédaction de cette notice.

(fig.1) Etude peinte de la tête d’un jeune garçon, huile sur papier, collection Marcello Aldega

(fig.2) Etude dessinée de la tête d’un jeune garçon, Perugia, musée de l’Académie des Beaux-arts

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ARTISTES

BOILLY Louis-Léopold

LE BRUN Charles

CHAMPAIGNE Philippe de

OUDRY Jean-Baptiste

COYPEL Charles-Antoine

PIERRE Jean-Baptiste Marie

DARET Jean

RIVALZ Antoine

DERUET Claude

ROBERT Hubert

DIEU Antoine

VALLAYER-COSTER Anne

FRAGONARD Jean-Honoré

Van der MEULEN Adam François

GREUZE Jean-Baptiste

VIGEE LE BRUN Elisabeth Louise

JOUVENET Jean

VIGNON Claude

LAGRENEE Jean-Jacques

VOUET Simon

WICAR Jean-Baptiste

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Copyright Galerie Eric Coatalem, Paris, 2021


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