Soit 10 ans

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La deuxième moitié du vingtième siècle, on le sait, aura été duchampienne jusqu'à la caricature. C'est simple, on ne s'en sortait pas ; de l'objet manufacturé, de l'art-action, du corps-sculpture, de la spéculation vertigineuse, de l'invisible, du hasard, etc. C'est-à-dire : du ready-made, des échecs, du silence, de la tonsure, de la boîte verte, des bruits secrets, du mètre-étalon et de toutes ces choses que Tonton Marcel nous avait léguées, qui s'avérèrent en fin de compte bien plus encombrantes que prévu. Un comble, venant d'un tenant de l'inframince... On ne s'en sortait pas, et puis une lumière s'est allumée, un contrefeu presque. Car l'art brut est venu, afin de remettre un peu de nécessité dans tout cela, en ce début de vingt et unième siècle. On s'en sort encore, mais tout n'est déjà plus que griffures, envahissement, foultitudes, déformations, tensions, diagrammes, fagots, prosopopées... En fait, les deux feux auront historiquement brillé plutôt en parallèle, certains acteurs alimentant même l'un et l'autre successivement ou simultanément, comme André Breton, qui écrivait ainsi à propos du Tonton en 1939 : « Notre ami Marcel Duchamp est assurément l’homme le plus intelligent et (pour beaucoup) le plus gênant de cette première partie du vingtième siècle ». Bien entendu, Dubuffet éructait sa haine à l'encontre de Duchamp. Il a même assez pesté devant Hubert Damisch la fois où le Tonton a réussi à lui extorquer 15


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