Expression Architecturale et écriture cinématographique du réel à l'imaginaire, Partie 1
ECOLE NATIONALE D’ARCHITECTURE ET D’URBANISME DE TUNIS
EXPRESSION ARCHITECTURALE
ET ÉCRITURE CINÉMATOGRAPHIQUE
DU RÉEL À L’IMAGINAIRE
MéMoire d’architecture
Elaboré par: aziz Dhouib
EncaDré par: anas Triki
consulTanT: Mounir Dhouib
sEssion juin 2024
c’EsT En réDigEanT lEs DErnièrEs pagEs DE cE MéMoirE quE jE ME sEns éMu par l ’ EncouragEMEnT DE Ma faMillE, par lEur présEncE sans laquEllE jE nE sErais pas arrivé à franchir cETTE éTapE. jE rEMErciE MEs aMis pour lEurs consEils préciEux qui M ’onT pErMis DE rEsTEr MoTivé TouT au long DE cE parcours.
résuMé
En s’inspiranT DEs TEchniquEs cinéMaTographiquEs ET En ExploranT lEs concEpTs Du conTinu ET Du DisconTinu, l’archiTEcTurE pEuT DépassEr sEs liMiTEs ET créEr DEs EspacEs plus iMMErsifs. En inTégranT la boîTE à ouTils Du cinéasTE, noTaMMEnT lE caDragE, lE MonTagE ET lE sToryboarD, l’archiTEcTurE s’élèvE Du siMplE nivEau pragMaTiquE uTiliTairE pour DEvEnir unE ExpériEncE sEnsoriEllE. la convErgEncE EnTrE cinéMa ET archiTEcTurE MET En scènE lEs poinTs coMMuns ET lEs DifférEncEs EnTrE lEs DEux DisciplinEs, TouT En soulignanT lEur poTEnTiEl D ’EnrichissEMEnT MuTuEl.
«On devient cinéaste quand On crOise sOn prOpre regard avec le regard des autres.»
theO angelOpOulOs
AVANT-PROPOS
lE cinéMa fûT l ’ unE DEs chosEs qui onT réussi à accroîTrE Ma curiosiTé ET culTivEr Mon iMaginaTion DEpuis un Très jEunE âgE. j’ai porTé un granD inTérêT aux œuvrEs cinéMaTographiquEs, aux hisToirEs raconTéEs, au MonDEs iMaginés, Mais surTouT à l ’iMprEssionanT procEssus auDio -visuEl ingéniEusEMEnT éTuDié pour nous TransMETTrE unE E xpériEncE sEnsoriEllE uniquE.
c’EsT cET inTérêT ET cETTE curiosiTé, au rêvE ET à la DécouvErTE DE l’inconnu, Du MysTèrE quE jE chErchE à E xploiTEr DavanTagE. cE MéMoirE s’inTérEssE aux concEpTs issus Du cinéMa, noTrE rEfléxion visE à lEs élaborEr Dans lE buT D ’ E xalTEr l’archiTEcTurE cinéMaTiquE, DE rEpEnsEr la rElaTion DE l’usagEr avEc son EspacE ET D ’inTroDuirE finalEMEnT unE nouvEllE écriTurE spaTialE visanT à croisEr EnTrE réEl ET virTuEl, EnTrE MonDE réEl ET univErs iMaginairE
MonTagE, MisE En scènE ET sToryboarD, TEllE EsT la boîTE à ouTils Du cinéasTE, proDucTEur DE l ’iMagE cinéMaTographiquE, qui chErchE à coMMuniquEr l ’iDéE ET lE sEnTiMEnT Du cinéasTE Dans lEur pléniTuDE, sa vision créaTricE, son iMaginaTion, son univErs virTuEl..
cE MéMoirE visE à E xplorEr lEs liEns EnTrE lE cinéMa ET l’archiTEcTurE, En porTanT un inTêrET parTiculiEr à la ManièrE DonT lEs filMs génèrEnT DEs aTMosphèrEs, DEs EnvironnEMEnTs ET DEs E xpériEncEs visuEllEs à TravErs l’archiTEcTurE, ET invErsEMEnT, nous nous rETrouvons inTrigués par l ’influEncE cinéMaTographiquE ET sEs TEchniquEs DE proDucTion sur l’archiTEcTurE. si lE cinéMa a l ’ apTiTuDE DE nous TransMETTrE DEs éMoTions à parTir D ’univErs créEs, la chronologiE sEMblE s’invErsEr En passanT Du MonTagE cinéMaTographiquE à la concEpTion archiTEcTuralE. l’archiTEcTE parT
D ’iMagEs, D ’inTEnTions DE quêTEs D’éMoTions à chargEr Dans l ’EspacE archiTEcTural qu’il réalisE.
1: DéfiniTon Du cinéMa, MéMoirE khalED abDallah, p.27
INTRODUCTION
noTrE réflE xion chErchE à E xplorEr Dans lEs concEpTs cinéMaTographiquEs, En puisanT Dans lEs TEchniquEs cinéMaTographiquEs l’archiTEcTurE DE viEnT un réciT spaTial, l’archiTEcTE, TEl un cinéasTE, caDrE DEs pErspEcTivEs, MonTE DEs séquEncEs ET EsquissE DEs scénarios. noTrE inTêrET pour lE procEssus DE fabricaTion cinéMaTographiquE a guiDé noTrE rEfléxion ET nous a MEné à rETEnir lEs éléMEnTs capablEs D ’influEncEr noTrE pErcEpTion ET Donc D’inspirEr la concEpTion archiTEcTuralE. l’œuvrE archiTEcTuralE s’élèvE ainsi D ’ unE siMplE consTrucTion à un DE vEnir TéMoignanT Du DialoguE EnTrE lEs DEux DisciplinEs.
pour lE DévEloppEMEnT DE cE MéMoirE, nous EsTiMons uTilE DE coMMEncEr par unE rEDéfiniTion DEs concEpTs qu’on souhaiTE METTrE En rElaTion par la suiTE. En D ’auTrEs TErMEs, coMMEnT DéfiniT- on lE cinéMa? son iMagE ? lE réEl ET lE virTuEl ? sEs iMplicaTions sur l ’iMaginairE ET sa pErcEpTion ?
lE cinéMa EsT TouT D’aborD unE visualisaTion fabriquéE DE l ’iMagE réEllE, DiTE iMagE filMiquE ou virTuEllE. «c’EsT un DosagE DE DEux variablEs, DE la capaciTé D ’ un pEnsEur à créEr ET iMaginEr lEs chosEs ET D ’ unE inDusTriE, D ’ unE chainE DE proDucTion, D ’ unE MachinE apTE à TissEr lE géniE Du créaTEur ET lEs auTrEs facTEurs TEchniquEs pour proDuirE au final l ’iMagE filMiquE pEnséE.»1 cETTE noTion rEposE sur la rEproDucTion DE la rEprésEnTaTion visuEllE, voirE MEnTalE DE quElquE chosE, EssEncE DE l ’iMagE qui pEuT ETrE réEllE ou virTuEllE. or, cETTE DéfiniTion MêME DE l ’iMagE a éTé précEDEMMEnT éTabliE par plaTon qui DiT:
«J’appelle images d ’abOrd les Ombres ensuite les reflets qu’On vOit dans les eaux, Ou à la surface des cOrps Opaques , pOlis et brillants et tOutes les représentatiOns de ce genre.»
2: MarTinE jolly, inTroDucTion à l’analysE DE l ’iMagE, p.9-38
3: jE an - paul sarTrE, l’iMaginairE, p.122
4: EDgar Morin, lE cinéMa ou l’hoMME iMaginairE, p.31
si plaTon consiDèrE quE l ’iMagE EsT avanT TouT unE rEprésEnTaTion, quE l ’iMagE sEraiT Déjà un objET sEconD par rapporT à un auTrE qu’EllE rEprésEnTEraiT sElon cErTainEs lois parTiculièrEs.2 sarTrE aDMET quE l ’iMagE EsT «unE sTrucTurE EssEnTiEllE DE la consciEncE, foncTion psychologiquE»3, à TravErs laquEllE on associE DEs éléMEnTs DE la viE par rapporT à unE MéMoirE objEcTivE, c’EsT à DirE quE l’objET rEprésEnTé Dans la MéMoirE EsT un DoublE DE l ’iMagE pErçuE, ET quE cEllE- ci «pEuT présEnTEr Tous lEs caracTèrEs DE la viE réEllE, y coMpris l’objEcTiviTé.»4
Par conséquanT, si on aDMET quE cETTE iMagE aDopTE lEs propriTéTés DE noTrE MonDE réEl, cEla vouDraiT DirE qu’EllE EsT EllE- MêME, DE naTurE réEllE. En cE qui concErnE la DéfiniTion Du «réEl» Dans cE MéMoirE, nous EnTEnDons par «réEl» quElquE chosE DE concrET ET DE TangiblE, qui n ’EsT pas lE proDuiT DE l ’iMaginaTion ,Du rêvE ou Du virTuEl. par E xEMplE, lEs objETs MaTériEls TEls unE TablE, unE chaisE ou un arbrE sonT DEs chosEs réEllEs. lEurs iMagEs, cEpEnDanT, sEraiEnT DE naTurE «virTuEllE». nous consiDérons ainsi, TouT objET «virTuEl» coMME opposé au réEl. nous visualisons à TravErs lE cinéMa DEs iMagEs réEllEs qui, par l ’inTErMéDiairE DE l ’ apparEil cinéMaTographiquE, DE viEnnEnT DEs iMagEs fabriquéEs, ou virTuEllEs. Dans cE sEns, cE virTuEl EsT uTilisé pour inTroDuirE DEs MonDEs cinéMaTographiquEs, DEs hisToirEs rêvéEs ET DEs EnvironnEMEnTs iMaginéEs. cEs «iMagEs DE l ’iMagE» vonT par la suiTE êTrE pErçuEs ET inTErpréTéEs DE DifférEnTEs ManièrEs par noTrE cErvE au, influEncé par noTrE iMaginaTion, subconsciEnT ET vécu, on consiDèrE alors l ’EspriT huMain coMME éTanT la «MachinE à rEliEr».
réEl ET virTuEl sonT DEux opposés coMpléMEnTairEs qui coE xisTEnT ET parTagEnT DEs siMilariTés, En aDMETTanT qu’il EsT possiblE D’êTrE iMMErgé Dans unE E xpériEncE quE cE soiT En rEgarDanT un filM inTriguanT ou En E xploranT unE archiTEcTurE éMouvanTE. E xisTEraiT- il unE propriéTé parTagéE par lE réEl ET lE virTuEl qui DéclEnchEraiT cETTE iMMErsion ToTalE, capablE DE nous TransporTEr jusqu’à nous fairE pErDrE TouTE noTion DE TEMps ET D ’EspacE ?
PROBLÉMATIQUE
“le virtuel pOssède une pleine réalité, en tant que virtuel” giles deleuze
lE cinéMa ET l’archiTEcTurE, DEux DoMainEs qui, biEn quE DisTincTs, sonT éTroiTEMEnT liés. l’œuvrE archiTEcTuralE ET l’œuvrE cinéMaTographiquE sonT DEs forMEs D ’ arT qui pEuvEnT êTrE uTiliséEs pour E xpriMEr DEs iDéEs, DEs concEpTs ET provoquEr DEs éMoTions. cE qui nous MènE à nous DEManDEr, qu’EsT- cE qui DisTinguE ET rEliE à la fois l’archiTEcTurE ET lE cinéMa?
si lE cinéMa consTiTuE un langagE à parT EnTièrE, sEraiT- il possiblE DE TraDuirE son lE xiquE ET D ’aDopTEr sEs concEpTs pour Enrichir l’archiTEcTurE vErs unE écriTurE spaTialE gEnéréE par lE MouvEMEnT ET lE TEMps ET inspiréE par lEs noTions DE la cinéMaTographiE MoDErnE ? coMMEnT TransforMEr l’archiTEcTurE En unE E xpériEncE sEnsoriEllE croisanT TEMporaliTé ET spaTialiTé ? plus concrèTEMEnT, coMMEnT concE voir un EspacE archiTEcTural TransMETTanT unE sEnsaTion DE ry ThME accéléré ou plûToT un sEnTiMEnT DE lEnTEur sans fin ?
Figure 1: «EnTrE réEl ET virTuEl».
si nous consiDérons quE l ’iMagE En TanT quE réaliTé fabriquéE par lE cinéMa à parTir Du réEl, EsT la MêME iMagE qui créE DEs spaTialiTés Dans la concEpTion DEs EspacEs archiTEcTuraux, Dans quEllE MEsurE l ’ EMprunT DE l’approchE cinéMaTographiquE pEuT sTiMulEr la crE aTiviTé ET conDuirE vErs unE nouvEllE vision DE la spaTialiTé archiTEcTuralE ?
coMMEnT l ’univErs DE la créaTion cinéMaTographiquE pEuT- il inspirEr l ’univErs DE l’archiTEcTE créaTEur ? quEl iMpacT auraiT cETTE iMprégnaTion sur la pErcEpTion DEs EspacEs conçus ?
E xisTEraiT- il DEs DivErgEncEs ou DEs convErgEncEs EnTrE l ’iMagE réEllE ET l ’iMagE virTuEllE ? quEllEs sEraiEnT lEurs inciDEncEs sur la pErcEpTion Du TEMps au gré Du ry ThME iMaginé ?
MÉTHODOLOGIE
«les cOncepts n’Ont de raisOn d’être que par rappOrt à un prOblème dOnné » giles deleuze
lE prEMiEr chapiTrE visE à ExplorEr lE MouvEMEnT Dans lE cinéMa ET lE conjugEr avEc l ’iMagE Dans lE buT DE METTrE En scènE l ’iMagE-MouvEMEnT ET lEs aspEcTs DE la pErcEpTon qui y sonT TransMis on s’inTérEssE alors à iDEnTifiEr lEs DifférEnTEs TEchniquEs uTiliséEs par lEs cinéasTEs pour la MisE En scènE DE la rElaTion EnTrE conTinu ET DisconTinu,on s’EMprEignE D’œuvrEs cinéMaTographiquEs, DE scènEs-clés ainsi quE DEs concEpTs qui En éMErgEnT pour abouTir à unE réflExion archiTEcTuralE par l ’EssEncE DE l’analysE DE la ThEorisaTion cinéMaTographiquE
lE DEuxièME chapiTrE s’inTérEssE au TEMps, EnTrE l ’iMagE-TEMps ET la TEMporaliTé virTuEllE Dans lE cinéMa, soulignanT lEur poTEnTiEl à rEpoussEr lEs liMiTEs DE la pErcEpTion ET DE la créaTion D ’ unE parT visuEllE ET D ’ auTrE parT bâTiE. auTour DE cEs iDéEs, on visE à iDEnTifiEr lE rôlE Du TEMps Dans lE cinéMa Dans lE buT DE TirEr l’apporT Du conTinu avEc lE réEl, ET l’apporT Du DisconTinu avEc sa conTrE-parTiE virTuEllE, TouT En METTanT l’accEnT sur lEs aspEcTs DE la pErcEpTion TransMisE à TravErs cEs approchEs.
lE TroisièME chapiTrE ExplorE la rElaTion EnTrE cinéMa ET archiTEcTurE En sE basanT sur lEs concEpTs DE la cinéMaTographiE pour approfonDir la réflExion sur la spaTialiTé il visE à Découvrir lEs siMiliTuDEs ET lEs DifférEncEs EnTrE cEs DEux DoMainEs. En ExploranT lEs approchEs conTEMporainEs DE la spaTialiTé En archiTEcTurE, on chErchE à éTablir unE rElaTion hypoThéTiquE EnTrE cEs DEux DisciplinEs cE chapiTrE visE à éTablir unE coMparaison EnTrE lE cinéMa ET l’archiTEcTurE, à ExplorEr coMMEnT lEs concEpTs cinéMaTographiquEs analysés pEuvEnT êTrE Transposés ET appliqués à l’archiTEcTurE.
lE quaTrièME chapiTrE capTurE la lEcTurE paysagèrE Du siTE DE l’anciEn porT DE Tunis, En raMEnanT cElui-ci par l ’inTErMéDiairE DEs concEpTs cinéMaTographiquEs éTablis, vErs unE MisE En scènE archiTEcTuralE.
lE cinquièME chapiTrE plongE Dans lE procEssus DE concEpTion archiTEcTuralE En s’inspiranT DEs TEchniquEs cinéMaTographiquEs éTabliEs précEDEMMEnT, En ExpériMEnTanT avEc la pErcEpTion Du TEMps ET Du MouvEMEnT, pour réfléchir à la ManièrE DonT l’archiTEcTurE pEuT influEncEr la pErcEpTion sEnsoriEllE DEs occupanTs D ’ un EspacE. cE chapiTrE MonTrE coMMEnT lE scénario, lE sToryboarD ET lE MonTagE pEuvEnT êTrE appliqués pour concEvoir l ’EspacE cinéMaTiquE
CHAPITRE I LE MOUVEMENT DANS LE CINEMA
Figure 2: lE MouvEMEnT Dans lE cinéMa
5:hEnri bErgson: ThE crE aTivE MinD, p.305
«..pour avancEr avEc la réaliTé MouvanTE, c’EsT En EllE qu’il fauDraiT sE rEplacEr. insTallEz-vous Dans lE changEMEnT, vous saisirEz à la fois ET lE changEMEnT lui - MêME ET lEs éTaTs succEssifs En lEsquEls il pourraiT à TouT insTanT s’iMMobilisEr.»5
6:hEnri bErgson: l’évoluTion créaTricE, p.305
7:hEnri bErgson: ThE crEaTivE MinD, p.169
8:ibiD, p222-223
I . 1. LE MOUVEMENT RÉEL
I . 1. 1. TEXTE DE heNri BergsoN
«il est vrai que, si nOus aviOns affaire aux phOtOgraphies tOutes seules, nOus auriOns beau les regarder, nOus ne les verriOns pas s’animer: avec de l ’immObilité, même indéfiniment JuxtapOsée à elle-même, nOus ne ferOns Jamais du mOuvement. pOur que les images s’animent, il faut qu’il y ait du mOuvement quelque part. le mOuvement existe bien ici, en effet, il est dans l ’ appareil. c’est parce que la bande cinématOgraphique se dérOule, amenant, tOur à tOur, les diverses phOtOgraphies de la scène à se cOntinuer les unes les autres, que chaque acteur de cette scène recOnquiert sa mObilité : il enfile tOutes ses attitudes successives sur l’invisible mOuvement de la bande cinématOgraphique.»6
bErgson uTilisE cE qu’il appEllE « l ’ apparEil cinéMaTographiquE » coMME analoguE DE la ManièrE DonT nous aborDons la réaliTé. cETTE analogiE apparaîT Dans lE DualisME épisTéMologiquE DE bErgson, où l ’inTuiTion sE placE aux côTés DE la pErcEpTion coMME MoyEn D’acquérir unE connaissancE absoluE sElon lui, « le mOuvement est la réalité elle- même »7 l a pErcEpTion EsT DE naTurE un MécanisME DE spaTialisaTion, cE qui signifiE quE pour acquérir DEs connaissancEs, EllE uTilisE DEs concEpTs, DEs syMbolEs, l’absTracTion, l’analysE ET la fragMEnTaTion. ouTils DE l ’iMagE cinéMaTographiquE qui E xpriME à la fois lE MouvEMEnT ET la réaliTé EllEMêME En TErMEs D ’iMagEs sTaTiquEs rEcousuEs il « substitue au cOntinu le discOntinu, à la stabilité de la mObilité… ».8
lE cinéMaTographE DE bErgson EsT un DisposiTif DE vision qui posTulE un spEcTaTEur là où on nE l ’ aTTEnD pas, cE qui DonnE à réflEchir quE l ’EssEncE MêME Du MouvEMEnT EsT unE DualiTé EnTrE conTinu ET DisconTinu. l a conTinuiTé ET la DisconTinuiTé nE sonT pas DEs aspEcTs opposés Du MouvEMEnT, Mais pluTôT DEs DiMEnsions coMpléMEnTairEs DE son E xprEssion. EnsEMblE, ils conTribuEnT à la coMplE xiTé ET à la richEssE DE la pEnséE créaTricE sElon la vision bErgsoniEnnE.
par conséquEnT, lE cinéMa offrE un TErrain favorablE pour E xplorEr lEs concEpTs DE conTinuiTé ET DE DisconTinuiTé visuEllEs DE ManièrE significaTivE. cETTE réflE xion porTE sur la rElaTion inDuiTE EnTrE cEs DEux concEpTs à TravErs lEurs rôlEs rEspEcTifs Dans lE cinéMa, unE réflE xion qui s’éTEnD au DElà Du cinéMa pour éclairEr un chEMin propicE à la concEpTion.
Figure 3: lE MouvEMEnT Dans lE cinéMa EnTrE conTinu ET DisconTinu.
I. 1. 2. MOUVEMENT CONTINU
MOUVEMENT DISCONTINU
bErgson consiDèrE lE MouvEMEnT coMME unE ManifEsTaTion DE la conTinuiTé réEllE, lE MouvEMEnT éTanT un flux conTinu DE TransforMaTions ou chaquE insTanT EsT lié au précEDEnT. si lE conTinu ET lE DisconTinu forMEnT unE uniTé DE conTrairEs, il E xisTEraiT Donc unE rElaTion EnTrE MouvEMEnT conTinu ET MouvEMEnT DisconTinu.
cETTE rElaTion EnTrE MouvEMEnT conTinu ET MouvEMEnT DisconTinu sE DéploiE DavanTagE Dans lE cinéMa, ou la conTinuiTé MET En scènE lE réEl En sE réfèranT à unE approchE narraTivE ET sT ylisTiquE. si on aDMET quE la rE aliTé Dans sa pléniTuDE EsT conTinuE, lE cinéMa, qui EsT unE visualisaTion virTuEllE Du réEl, EsT faiT DE DisconTinuiTés.
DEs fragMEnTs DisconTinus qui s’associEnT ET s’unissEnT pour créEr un conTinu visuEl, lui MêME DisconTinu si on lE raMènE à un nivE au DE lEcTurE TEMporEl «auTrE», cEci inDiquEraiT quE l ’ un n ’ E xisTEraiT pas sans l ’ auTrE, ET quE l ’ un sE TransforMEraiT En l ’ auTrE, alors cETTE iDéE inDuiT qu’il E xisTE unE DisconTinuiTé Dans lE MouvEMEnT.
D ans un pr EM i E r TEM ps ET , Dans l E bu T DE D écor T iqu E r l ’ analys E D u M ouv EME n T ciné M aTographiqu E Dans sa pléni T u DE , on s ’ in T ér E ss E à abor DE r la noT ion DE D iscon T inui T é , l E ciné M a visualis E l E M ouv EME n T par l E D iscon T inu , il fai T E n qu E lqu E sor TE D u con T inu av E c l E D iscon T inu p our M i E ux co M pr E n D r E c ETTE i D é E , il fau D rai T D ’ abor D co M pr E n D r E qu ’ un fil M E sT co M posé D ’ i M ag E s , la nor ME habi T u E ll E pour la proj E c T ion DE fil M s Dans l E ciné M a E sT DE 24 i M ag E s par s E con DE . c E qui nous EMM èn E à in D iqu E r un E pr EM ièr E D iscon T inui T é . E n E ff ET , la visualisaT ion D ’ un fil M s EM bl E ê T r E con T inu E , co MME Dans la vi E , Tou T M ouv EME n T E sT con T inu , l E ciné M a , lui , jou E sur l ’ illusion DE la p E rc E p T ion E n créan T un E con T inui T é vir T u E ll E D u M ouv EME n T .
9: iMagE ET réaliTé Dans la ThéoriE cinéMaTographiquE, p.4.
10: ibiD, p.7
11: ibiD, p.8
En s’appuyanT sur lEs iDéEs D’anDrE bazin, l ’ un DEs fonDaTEurs DE la ThéorisaTion cinéMaTographiquE on pEuT affirMEr quE l ’iMagE cinéMaTographiquE rEprésEnTE l ’EssEncE MêME DE la réaliTé, qui résiDE Dans son aMbiguïTé par conséquEnT, bazin supposE «unE sphèrE inépuisablE DE choix TEchniquEs ET sT ylisTiquEs DE la parT Du cinéasTE»9 ET qu’EllE nE pEuT pas non plus offrir unE E xposiTion plEinE ET unE illusTraTion iMMéDiaTE.
pour bazin, «l ’EssEncE MêME DE la réaliTé résiDE Dans son caracTèrE insaisissablE ET MulTiDiMEnsionnEl.»10 l’iMagE cinéMaTographiquE, par sa capaciTé à capTurEr lE réEl Dans sa coMplE xiTé ET sEs nuancEs, pErMET D’approchEr cET EssEncE DE ManièrE plus auThEnTiquE coMparéE à D ’auTrEs forMEs D ’arT. EllE nE chErchE pas à offrir unE rEprésEnTaTion DéfiniTivE DE la réaliTé, Mais pluTôT à susciTEr unE réflE xion ET unE E xploraTion DE sEs facETTEs réEllEs ou virTuEllEs.
bazin a inTroDuiT l ’iDéE quE lE cinéMa En TanT quE séquEncEs DE prisEs En MouvEMEnT,pEuT êTrE uTilisé coMME fragMEnT DE la réaliTé. il a suggéré quE «l’iMagE cinéMaTographiquE, possèDE unE qualiTé onTologiquE spécifiquE.»11 cET acTE DE prisE ET DE saisiE Du réEl par l ’ apparEil ET DE rEnDu par l ’iMagE virTuEllE à TravErs lE MonTagE rEssEMblE énorMéMEnT au lE Travail DE l’archiTEcTE. par conséquanT, l’archiTEcTE TouT coMME lE cinéasTE TransMET unE EMoTion par la pErcEpTion D ’iMagEs l’archiTEcTE MET l’accEnT sur lE Travail Du cinéasTE En créanT DEs aTMosphèrEs ET DEs prisEs DE vuEs il uTilisE Donc l’ouTil DE l ’iMagE En la présEnTanT à son Tour sElon DEs MéThoDEs proprEs à l’archiTEcTurE.
Figures 4,5,6: prisEs Du filM «ThE rEvEnanT» (2015)
I. 1. 3. LA MISE EN SCÈNE
l a placE DE la caMéra DéfiniT, par l’objEcTif choisi ET lE caDrE, un EspacE Donné, unE « scènE», à la fois EMprunTéE à la réaliTé, avanT l ’ E xisTEncE DE l ’iMagE nuMériquE ET virTuEllE – ET hors DE cETTE réaliTé. «vuE sous cET anglE, la MisE En scènE pEuT êTrE un acTE Décisif coMME unE foncTion DérivéE.»12
il EsT priMorDial DE METTrE, En prEMiEr TEMps, l’accEnT sur la rElaTion qu’a lE cinéMa avEc lE réEl, avanT lE virTuEl. lE cinéMa puisE DEs noTions réEllEs ET lEs MET En scènE DE DifférEnTEs ManièrEs, il fauT Donc rETEnir cETTE noTion DE MisE En scènE, unE basE cinéMaTographiquE fonDaMEnTalE.
DElEuzE DéfiniT la MisE En scènE coMME éTanT «des pOints privilégiés , c’est à titre de pOints remarquables Ou singuliers qui appartiennent au mOuvement.»13
l a MisE En scènE pErMET D’aborD DE DéTErMinEr l ’aMbiancE généralE, la variéTé ET la conTinuiTé DEs plans, ainsi quE la coMpréhEnsion quE lEs spEcTaTEurs auronT vis-à-vis Du filM. En sEconD liEu, la MisE En scènE EsT un éléMEnT priMorDial pour lE réalisaTEur qui DéTErMinE lE choix DE caDragE, la luMièrE qui y pEnèTrE, lE conTrasTE DEs coulEurs ou la supErposiTion DEs plans. EllE s’appuiE sur cEs élEMEnTs pour créEr unE conTinuiTé En EllE- MêME.
l’EffET DE cETTE TEchniquE sur son pErcEpTEur EsT plus soulignéE par l ’iMMErsion inTEnsE à l ’ aiDE D’éléMEnTs coorDinaTEurs Du réEl, Dans cE cas, prEnons coMME E xEMplE lE filM «ThE rE vEnanT», DonT la MisE En scènE EsT rEMarquablE pour sa coMplE xiTé ET son inTEnsiTé, lE réalisaTEur MET En scènE DEs paysagEs naTurEls sEnsaTionnEls il capTurE DEs iMagEs D ’ un univErs réEl faMiliEr, quE lE spEcTaTEur aDMirE sous un nouvEl anglE cinéMaTographiquE choisi par lE cinéasTE pour lui fairE vivrE l ’iMMErsion.
Figure 5: L’image-mouvement, essence de La PercePtion de L ’ univers imaginaire.
cE qui DonnE à réflEchir quE la rElaTion EnTrE conTinu ET DisconTinu, pEuT êTrE pousséE DavanTagE par lEs axEs DE pErcEpTion réEllE ou iMaginairE, ou virTuEllE. En EffET, un MouvEMEnT DE la viE réEllE, DiT conTinu, obéiT aux lois DE la physiquE Dans l ’EspacE, il EsT régi par unE viTEssE, il subiT unE TrajEcToirE, il nE DE viEnT DisconTinu quE par l ’ EffET DE cEs lois.
cEla n ’EsT pas lE cas pour un MouvEMEnT virTuEl, EssEncE Du cinéMa, puisquE cElui - ci EsT coMposé D ’iMagEs, iMagEs qui pEuvEnT DépEinDrE unE réaliTé rêvéE, qui pEuvEnT illusTrEr n ’iMporTE quEl phénoMènE souhaiTé. cETTE iMagE virTuEllE n’obéiT a aucunE règlE car EllE EsT coMposéE DE DisconTinuiTés qui sEronT rEcousuEs par lE réalisaTEur. EllE n ’ a Donc pas DE liMiTEs, TanT qu’EllE pEuT êTrE iMaginéE, EllE pEuT êTrE sculpTéE, TanT qu’EllE E xisTE coMME iMagE DE noTrE MéMoirE, EllE pEuT êTrE TransMisE au réEl par l ’inTErMéDiairE DE l’ouTil cinéMaTographiquE.
lE MonDE, l ’univErs DE la pErcEpTion n ’EsT auTrE quE l’œuvrE filMiquE où TouTE iMagE virTuEllE sEra MisE En «TEnsion» avEc un EnsEMblE, c’EsT l ’iMagE- MouvEMEnT.
14: phonéTiquE Du MoT «iMagEMouvEMEnT» lalanguEfrancaisE.coM
I. 2. 1. L’IMAGE-MOUVEMENT
l E conc E p T D ’ i M ag E - M ouv EME n T a é T é in T ro D ui T par l E philosoph E français g il E s D E l E uz E . Dans sa réfl E xion , D E l E uz E E xplor E l E s
D iffér E n TE s for ME s D ’ i M ag E - M ouv EME n T ET é T u D i E co MME n T c E ll E s - ci
façonn E n T l ’ E xpéri E nc E ciné M aT ographiqu E D u p E rc E p TE ur .
n éan M oins , E n c E qui conc E rn E la réfl E xion DE c E M é M oir E , qui por TE plu T ô T sur l’analogi E qui p E u T E xis TE r E n T r E ciné M a ET archi TEc T ur E , nous EM prun TE rons plû T o T l E conc E p T in T ro D ui T par D E l E uz E ET
l E D éfinir au T r EME n T, c E qui p E r METT rai T D ’ E nrichir nos propos ET
D’ancr E r no T r E analys E s E lon DE s œuvr E s spécifiqu E s . q u E ll E s son T D onc l E s proprié T és DE c ETTE i M ag E - M ouv EME n T ? c o MME n T D é TE r M in E r
l E s inci DE nc E s DE l’œuvr E ciné M aT ographiqu E sur l E p E rc E p TE ur?
Dans l E ciné M a M o DE rn E c’E s T l ’ i M ag E - M ouv EME n T qui pré D o M in E , c E conc E p T r E pos E ra sur l ’ i D é E qu E l E ciné M a E s T capabl E DE saisir ET D écrir E l E s forc E s invisibl E s , l E s TE nsions ET l E s T ransfor M aT ions qui ani ME n T no T r E M on DE . l’i M ag E - M ouv EME n T E xpri ME ainsi la co M pl E xi T é DE s rappor T s E n T r E E spac E ET ac T ion , ré E l ET vir T u E l , à T rav E rs l E s i M ag E s E n M ouv EME n T,14 DE s i M ag E s D iscon T inu E s D ’ un M ouv EME n T con T inu. E ll E E s T facil EME n T obs E rvé E , D onné E à son u T ilisaTE ur , l E sp Ec TaTE ur , M ais DEME ur E plus co M pl E x E Dans sa pléni T u DE
p r E nons par E x EM pl E l E fil M i ncepti O n, réalisé par c hris T oph E r n olan où l ’ i M ag E - M ouv EME n T E s T un élé ME n T clé DE l ’ in T rigu E . l E fil M E xplor E la M anièr E D on T l E s rêv E s p E uv E n T ê T r E M anipulés ET con T rôlés , un E scénographi E ap TE à T ransfér E r l ’ i M ag E vir T u E ll E Dans un scénario ré E l créan T ainsi DE s M ouv EME n T s ET DE s ac T ions qui D épass E n T l E s li M i TE s i M posé E s par l E s lois DE la physiqu E .
*oniriquE: rElaTif aux rêvEs Figures 8,9,10 : EscaliEr DE pEnrosE Du filM «incEpTion»(2010)
En aborDanT lEs propriéTés DE la ficTion, nolan a raMEné, par l ’inTErMéDiairE DE l ’iMagE- MouvEMEnT, lE MonDE virTuEl poussé par l’insEnsé vErs lE réEl qui EsT associé à la logiquE, à la raTionaliTé. lE réalisaTEur poussE lE spEcTaTEur par la vision D’aspEcTs virTuEls à sE souMETTrE à son univErs cinéMaTographiquE.
nolan visualisE l ’EscaliEr DE pEnrosE, unE configuraTion iMpossiblE, pour illusTrEr lEs concEpTs DE bouclEs TEMporEllEs ET D’archiTEcTurEs iMpossiblEs présEnTEs Dans l ’univErs oniriquE* Du filM plus préciséMEnT, l ’EscaliEr DE pEnrosE EsT uTilisé pour rEprésEnTEr unE réaliTé qui DéfiE la logiquE, prEsEnTé coMME un MoyEn pour Définir un objET oniriquE sans fin Dans un MonDE par aillEurs fini
cETTE iMagE éTanT pErçuE coMME iMpossiblE n ’ E xisTE pas réEllEMEnT, EllE EsT un fragMEnT virTuEl inTErpréTé DE ManièrE réEllE. l’iMagEMouvEMEnT conçoiT alors unE rE aliTé nouvEllE pousséE par lE virTuEl, ou cEs DEux noTions s’EnTrEMêlEnT, rEnforçanT ainsi lE ThèME cEnTral DE la ManipulaTion DE la réaliTé ET DE l ’EspacE Dans lE filM.
l a séquEncE sE DéroulE rapiDEMEnT DE façon à TransMETTrE au spEcTaTEur lE ry ThME Du MouvEMEnT, sans pour auTanT assiMilEr l ’iMagE visuEllE qui EsT prEsEnTéE. sans sE rEnDrE coMpTE, lE spEcTaTEur DE viEnT iMMErgé Dans l ’univErs DE nolan par l ’ inTErMEDiairE DE l ’iMagE- MouvEMEnT, synchronisé avEc lE rêvEur, ou on nE pEuT plus s’aTTEnDrE a cE qui pourraiT sE passEr par la suiTE, la séquEncE jouE un rôlE iMporTanT Dans la pErcEpTion, créanT unE inTriguE aMplifiéE par lE MonTagE DE plans DE visions.
15: francEsco casETTi, «lEs ThéoriEs Du cinéMa DEpuis 1945», Milan 1933, p.50
16: albus DuMblEDorE, harry poTTEr ET lEs réliquEs DE la MorT parTiE: 2
17: EDgar Morin, lE cinéMa ou l’hoMME iMaginairE, préfacE
I. 2. 2. PERCEPTION DE L’IMAGINAIRE
« le mOnde du film n’est pas un mOnde empirique dans lequel nOus vivOns chaque JOur, c’est un mOnde fait de la manière des rêves , ses ObsessiOns , ses images et ses utOpies. »15
il EsT sans DouTE iMporTanT DE fairE l’analogiE EnTrE la pErcEpTion ET lE cinéMa, ou l ’iMagE cinéMaTographiquE inTErprèTE l ’iMaginairE DE façon à visualisEr DEs iDéEs ET DEs éMoTions qui nE pourraiEnT pas êTrE capTuréEs DE ManièrE réalisTE
lE cinéMa osE, En EffET, DéfiEr lEs liMiTEs DE la réaliTé car lui - MêME n ’ y apparTiEnT pas. il EsT virTuEl, Mais, coMME l ’inDiquE DElEuzE, possèDE unE plEinE réaliTé En TanT quE virTuEl. pour lE pErcEpTEur, lE cinéMa offrE unE sourcE D’échappaToirE DEs noTions DE la viE quoTiDiEnnE En illusTranT DEs iMagEs iDéEllEs ou DEs concEpTs absTraiTs, DEs DilEMMEs Moraux ou DEs quEsTions socialEs iMporTanTEs DE ManièrE MéTaphoriquE.
«bien sûr, cela se passe dans ta tête, harry, mais pOurquOi cela signifiet- il que ce n’est pas réel ?»16
l’iMagE- MouvEMEnT EsT l ’EssEncE MêME DE l ’iMaginairE, cE concEpT possèDE la faculTé DE rapporTEr nos rêvEs lEs plus insEnsés vErs unE iMagE rapprochéE Du réEl, il consTruiT ainsi unE rElaTion DirEcTE EnTrE lE cErvE au ET l ’EspriT, ou on nE pourraiT DissociEr l ’ un par rapporT à l ’ auTrE, l ’EspriT huMain éclairE lE cinéMa, qui éclairE à son Tour l ’EspriT huMain.
En EffET, lE cErvE au conçoiT DEs rEprésEnTaTions qu’il convErTiT En iMagEs, iMagEs qui sonT façonnéEs par l ’EspriT, ou noTrE rE aliTé subjEcTivE, or, Morin E xpliquE quE «l a seule réalité dOnt nOus sOyOns sûr, c’est la représentatiOn, c’est à dire l’image, c’est à dire la nOn - réalité, puisque l’image renvOie à une realité incOnnue »17
18: a RENAULT, « phénoMénologiE DE l ’iMaginairE ET iMaginairE DE la phénoMénologiE, p.160
Figure 11: rElaTion EnTrE la pErcEpTion ET l ’iMaginairE
il EsT cEpEnDanT éviDEnT D’éclairEr lEs noTions apprisEs DE la pErcEpTion, son rapporT avEc l ’EspriT, l ’iMaginairE, par la réflE xion DE MErlE au - ponT y. lE phénoMénologuE a DévEloppé unE approchE originalE DE la pErcEpTion qui accorDE unE placE iMporTanTE à l ’iMaginairE. pour lui, la pErcEpTion n ’EsT pas unE siMplE récEpTion passivE D’inforMaTions sEnsoriEllEs, Mais unE acTiviTé consTrucTivE qui iMpliquE l ’iMaginaTion.
l’iMaginaTion n ’EsT pas unE faculTé sEconDairE qui s’ajouTE à la pErcEpTion, Mais unE conDiTion DE possibiliTé DE cEllE- ci. En EffET, pour pErcE voir un objET, nous DE vons Déjà avoir unE cErTainE iDéE DE cE qu’il EsT. cETTE iDéE préliMinairE, qui EsT issuE DE noTrE vécu ET DE noTrE iMaginaTion, nous pErMET DE DonnEr un sEns aux sEnsaTions quE nous rEcE vons. c’EsT ainsi quE « la viE iMaginairE ManifEsTE E xEMplairEMEnT sEs sTrucTurEs E xisTEnTialEs qui sonT auTanT D’insTiTuTions DE Mon E xpériEncE ET qui corrEsponDEnT à “cE rapporT E xacT DE l ’iMaginairE ET Du réEl” ou EncorE à cE quE MErlE au - ponT y appEllE l’invisiblE. »18
I. 2. 3. LE STORYBOARD
un sToryboarD EsT par DéfiniTion un DocuMEnT graphiquE qui visualisE unE scènE DE filM En phasE DE préproDucTion Dans lE buT DE planifiEr lEs plans qui consTiTuEronT lE filM, ainsi quE sEs DifférEnTEs MéThoDEs DE rEprésEnTaTion. (caDragE, MonTagE, MouvEMEnT DE caMéra..)
lEs DEssinaTEurs chargés D’illusTrEr lEs séquEncEs onT pour objEcTif DE raMEnEr unE sorTE DE banDE DEssinéE, illusTréE DisconTinuEllEMEnT, vErs unE scènE conTinuE, plan par plan, vErs lE réEl. lE sToryboarD conTiEnT TouTEs lEs inforMaTions nécEssairEs pour lE DéroulEMEnT DE la scènE, allanT Du Décor DE la scènE jusqu’au MouvEMEnT DEs pErsonnagEs.
lE sToryboarD En cinéMa sEMblE présEnTEr DEs siMiliTuDEs au plan archiTEcTural, ou cE DErniEr EsT unE rEprésEnTion qui coMMuniquE unE vuE DE DEssus DEs EspacEs à concEvoir par l’archiTEcTE, concréTisanT la réflExion DE cE DErniEr. cEpEnDanT, cEs éléMEnTs graphiquEs sonT DE naTurE pragaMTiquE, ET sonT par conséquanT Dépourvus DE l ’iMpacT sur l’usagEr, ou lE spEcTaTEur. cE qui nous aMènE à réflEchir, coMMEnT lE cinéasTE, créaTEur DE l ’iMagE fabriquéE, rEMEDiE à cETTE insuffisancE éMoTionEllE ou cogniTivE par rapporT au son pErcEpTEur?
:
lE sToryboarD En cinéMa, TouT coMME lE plan archiTEcTural, EsT un ouTil EssEnTiEl DE planificaTion ET DE coMMunicaTion, pErMETTanT DE visualisEr ET DE concEpTualisEr unE vision arTisTiquE Dans son EnsEMblE. cEpEnDanT, si lE plan archiTEcTural sE concEnTrE principalEMEnT sur la sTrucTurE uTiliTairE, lE sToryboarD cinéMaTographiquE visE à capTurEr l ’EssEncE éMoTionnEllE ET narraTivE D ’ unE scènE. lEs DEssins ET annoTaTions Du sToryboarD nE sE conTEnTEnT pas DE rEprésEnTEr lEs aspEcTs visuEls DE la scènE, Mais chErchEnT égalEMEnT à TransMETTrE lEs sEnsaTions, lEs éMoTions ET lEs inTEnTions DEs pErsonnagEs.
ainsi, lE cinéasTE, En uTilisanT lE sToryboarD, nE sE conTEnTE pas DE planifiEr lEs aspEcTs TEchniquEs DE la réalisaTion, Mais chErchE égalEMEnT à anTicipEr ET à corrigEr TouTE insuffisancE éMoTionnEllE ou cogniTivE qui pourraiT affEcTEr lE spEcTaTEur. par lE choix DEs anglEs DE vuE, DEs caDragEs, DEs MouvEMEnTs DE caMéra ET DEs E xprEssions DEs pErsonnagEs, lE cinéasTE orchEsTrE unE E xpériEncE EngagE anTE, visanT à susciTEr lE public sur lE plan éMoTionnEl ET sEnsoriEl.
En résuMé, lE sToryboarD cinéMaTographiquE DépassE sa siMplE foncTion DE planificaTion uTiliTairE, voir pragMaTiquE pour DE vEnir un ouTil arTisTiquE ET narraTif, pErMETTanT au cinéasTE DE TraDuirE sEs iDéEs En iMagEs ET DE créEr unE connE xion profonDE avEc lE pErcEpTEur.
Figure 12
sToryboarD Du filM psycho (1960)
19:gilEs DELEUZE: cinéMa 1: l ’iMagE- MouvEMEnT, p.27
DiviDuEllE: consTiTuéE DE parTiEs inDépEnDanTEs concEpTuEllEMEnT
20: EDgar Morin, lE cinéMa ou l’hoMME iMaginairE, p.64
21: MarcEl MARTIN, sourcE: cinéclub DE caEn
I. 2. 4. LE MONTAGE
«..c’est prObablement le plus haut degré pOssible d ’apprOximatiOn qui existe pOur cOmmuniquer au spectateur l’idée et le sentiment de l ’ auteur dans la plénitude de la vérité physique avec laquelle est issue la visiOn créatrice.» sErgEi EisEnsTEin
si DElEuzE E xpliquE «l’iMagE cinéMaTographiquE EsT Toujours DiviDuEllE»19, c’EsT pour METTrE En éviDEncE l’apporT qu’a lE cinéMa avEc son iMagE virTuEllE DiTE DisconTinuE. Mais, sElon la cohérEncE narraTivE ET visuEllE
D ’ un filM, EllE pErMET DE créEr unE illusion DE réEl conTinu Dans la DisconTinuiTé à TravErs plusiEurs façons.
on a éTabli précEDEMMEnT quE la caDEncE D ’iMagEs univErsEllE EsT DE 24 iMagEs par sEconDE, unE caDEncE qui iMpliquE unE DisconTinuiTé cE prEMiEr T ypE DE DisconTinuiTé EsT cEpEnDanT En rElaTion DirEcTE avEc un DEuxiEME, lE MoNtage.
«le film cesse d’être une phOtOgraphie animée pOur se mOrceler en une infinité de phOtOgtaphies animées hétérOgènes , Ou plans . mais , en même temps , il devient un système de phOtOgraphies animées qui a acquis des caractères spatiaux et tempOrels nOuveaux. »20
lE MonTagE sE rEfèrE à l’acTion D’assEMblEr bouT à bouT plusiEurs plans Dans lE buT DE forMEr DEs séquEncEs.21 l’orDrE D’organisaTion DEs plans s’éTabliT sElon DEs conDiTions D’orDrE ET DE DuréE, cE qui assurE la consTrucTion D ’ un conTE x TE narraTif qui évEillE l’éMoTion Du pErcEpTEur. on a éTabli jusquE là quE lE cinéMa EsT faiT D ’iMagEs DisconTinuEs rEliéEs EnTrE- EllEs Dans lE buT DE créEr lE conTinu, or, c’EsT à TravErs lE MonTagE quE cE procEss sEra coMpléTé. par aillEurs, lE MonTagE assurE aussi la coupurE EnTrE lEs plans, cE qui DonnE à croirE quE cElui - ci assurE la conTinuiTé Du DisconTinu, pour Enfin lE souMETTrE à la DisconTinuiTé.
Figure 16: lE MonTagE, apparEil filMiquE Du conTinu
Figures 17,18,19: prisEs DE la scènE finalE Du filM «Whiplash» (2014)
lE prochain E xEMplE va METTrE l’accEnT sur la noTion DE conTinuiTé Du MonTagE par l’analysE D ’ unE séquEncE Dans lE filM whiplash, où lE MonTagE jouE un rôlE crucial Dans la pErcEpTion DE la scènE par lE spEcTaTEur
Dans lE filM «Whiplash» réalisé par DaMiEn chazEllE, il E xisTE plusiEurs E xEMplEs DE MonTagEs «EfficacEs» qui conTribuEnT à créEr Du suspEnsE ET DE l ’inTEnsiTé. un E xEMplE pErTinEnT sE TrouvE Dans la scènE où lE pErsonnagE principal, anDrEW, jouE Dans un concours DE jazz iMporTanT
Dans cETTE scènE, lE MonTagE EsT uTilisé pour MonTrEr lEs DifférEnTs éléMEnTs qui sE DéroulEnT siMulTanéMEnT : anDrEW qui jouE DE la baTTEriE avEc unE énErgiE incroyablE, lEs MEMbrEs Du jury qui évaluEnT sa pErforMancE avEc DEs rEgarDs inTEnsEs, ainsi quE DEs plans rapiDEs DEs auTrEs concurrEnTs En Train DE jouEr. cEs évènEMEnTs sE DéroulEnT En TEMps réEl, MêME s’il sonT DisconTinus Dans lEur naTurE, ils sonT rEgroupés DE façon à créEr unE séquEncE hoMogènE, DonT la conTinuiTé EsT holisTE. lE MonTagE aTTEinT par conséquEnT lE conTinu par la liaison Du DisconTinu.
cEla nous MènE à consTaTEr quE lE MonTagE possèDE unE foncTion priMorDialE Dans la sTrucTuraTion DE séquEncEs DE ManièrE à préparEr lE spEcTaTEur à cE qui va sE passEr. par l ’uTilisaTion DE la foncTion synTaxiquE, lE MonTagE éTabliT DEs rElaTions EnTrE lEs plans pour guiDEr l ’aTTEnTion ET DéclEnchEr unE aTTEnTE chEz lE spEcTaTEur, on pEuT En conclurE quE lE MonTagE a vériTablEMEnT pour objEcTif l ’anTicipaTion.
Figures 20,21,22: prisEs Du filM «ThE lighThousE» (2019)
I. 2. 5. LA MACHINE À RELIER
l’apporT Du MonTagE éTabli précEDEMMEnT MET En E viDEncE la rElaTion DE DualiTé DirEcTE EnTrE la pErcEpTion ET l ’anTicipaTion par E xEMplE, nos aTTEnTEs pEuvEnT influEncEr la façon DonT nous pErcE vons unE siTuaTion, lE cinéMa visualisE DEs iMagEs ET nous pErMET parfois D ’inTErpréTEr lEs chosEs D ’ unE ManièrE spécifiquE qui corrEsponD à nos préDicTions
cEpEnDanT, nos pErcEpTions iMMéDiaTEs pEuvEnT parfois conTrEDirE nos aTTEnTEs, cE qui nous MènE au concEpT DE l ’ EffET koulEchov.
e FFet KouLechoV
l’EffET koulEchov EsT iMporTanT Dans l ’influEncE DE la pErcEpTion Du spEcTaTEur. il rEposE sur la jux TaposiTion DE DifférEnTEs iMagEs pour créEr un sEns ou unE éMoTion qui n ’ E xisTEraiT pas si lEs iMagEs éTaiEnT vuEs séparéMEnT. cET EffET EsT parTiculièrEMEnT puissanT Dans lE MonTagE cinéMaTographiquE, où lE réalisaTEur pEuT ManipulEr l’associaTion DEs iMagEs pour rEDirigEr l ’anTicipaTion Du spEcTaTEur.
on TéMoignE DE l ’ EffET koulEchov Dans lE filM «ThE lighThousE», ou cElui - ci rEnforcE l ’aTMosphèrE opprEssanTE ET la TEnsion psychologiquE EnTrE lEs pErsonnagEs principaux. unE scènE En parTiculiEr qui illusTrE cE concEpT sE DéroulE lorsquE lEs DEux pErsonnagEs sonT confronTés à unE TEMpê TE violEnTE.
lE MonTagE alTErné EnTrE lEs plans DEs visagEs DEs DEux hoMMEs, MonTranT lEur pEur ET lEur DésEspoir croissanTs, ET lEs plans DEs vaguEs DéchaînéEs ET Du pharE sEcoué par la TEMpê TE, créE unE sEnsaTion D’angoissE ET DE DéTrEssE. cE qui nous DonnE à réfléchir, coMMEnT cET EffET influEncE- il la pErcEpTion?
22: EDgar Morin, « lE cinéMa ou l’hoMME iMaginairE », p.205
« le cinéma nOus Offre le reflet, nOn plus seulement du mOnde, mais de l’esprit humain.»22
En prEnanT lE filM «ThE lighThousE» coMME E xEMplE, on aDMET quE lE réalisaTEur aMplifiE l ’iMpacT DEs scènEs sur la pErcEpTion Du spEcTaTEur, En jouanT sur la jux TaposiTion DEs E xprEssions facialEs inTEnsEs DEs pErsonnagEs ET lEs MET En conTrasTE avEc lEs iMagEs DE la TEMpê TE En furiE. cETTE approchE par MonTagE pErMET au pErcEpTEur D’êTrE inTrigué à rassEMblEr lEs piècEs Du scénario En puzzlE TouT En iMaginanT la scènE à suivrE. l’EspriT huMain a bEsoin DE DonnEr Du sEns aux chosEs. il EsT capablE D ’ aTTribuEr unE inTEnTion DraMaTiquE à un plan rElaTivEMEnT aMbigu, coMME lE visagE sTupéfaiT D ’ un pErsonnagE ou lE pharE iMMErgé par l’océan En TEMpê TE
si l ’ EffET kouElchov rEnvoiE vErs lE concEpT DE MonTagE, son EssEncE rEposE sur la réflE xion cachéE DErrièrE la supErposiTion DE plans. on pourraiT associEr cE concEpT à l ’iDéE DE la conTinuiTé Du MonTagE, éTanT Donné quE cElui - ci rEliE lEs iMagEs DisconTinuEs En créanT unE séquEncE conTinuE. l’EffET- koulEchov lui, MET l’accEnT sur la DisconTinuiTé MêME ET son influEncE sur l ’EspriT, lE cErvE au DE viEnT lui MêME la MachinE à rEliEr.
il EsT D ’ auTanT plus iMporTanT DE rETEnir quE cET EffET DE DécoupagE n ’EsT pas sEulEMEnT insinué par l ’EspriT Du pErcEpTEur, Mais, EsT inDirEcTEMEnT TransMis par lE cinéasTE, qui EsT capablE DE DonnEr Du sEns avEc DEs iMagEs qui nE sEMblEnT pas avoir DE liaison apparEnTE. cETTE noTion EsT quElquE fois rEliéE au Travail DE l’archiTEcTE, qui conçoiT DEs EspacEs pour pErMETTrE l’usagEr DE s’appropriEr l ’EspacE D ’ unE ManièrE pErsonnEllE.
Figure 23: la MachinE à rEliEr, ouTil DE la pErcEpTion conTinuE
CONCLUSION
En éTuDianT lE procEssus créaTif cinéMaTographiquE, Du sToryboarD au MonTagE, il DE viEnT clair quE chaquE éTapE EsT iMprégnéE D ’ unE inTEnTion subjEcTivE profonDE lE storyBoard, biEn plus qu’un siMplE ouTil DE planificaTion, EsT unE fEnêTrE à TravErs laquEllE lE cinéasTE pEuT non sEulEMEnT visualisEr son œuvrE, Mais aussi anTicipEr ET aDoucir lEs aspEcTs éMoTionnEls qui influEncEnT lE pErcEpTEur.
DE plus, lE MoNtage, par sa capaciTé à sTrucTurEr lEs séquEncEs DE ManièrE à susciTEr l ’anTicipaTion, DE viEnT un MoyEn DE créEr unE E xpériEncE iMMErsivE ET EngagE anTE pour lE pErcEpTEur.
l’EffET KouLechoV MET En luMièrE l ’iMporTancE DE la coNtiNuité Du MonTagE ET soulignE lE pouvoir quE DéTiEnT lE cinéasTE qui résiDE Dans la créaTion DE sEns à parTir D ’iMagEs apparEMMEnT DisjoinTEs, DiTEs discoNtiNues. c’EsT là où résiDE la vériTablE MagiE Du cinéMa, où la pErcEpTion EsT façonnéE, sculpTéE par la vision Du réalisaTEur, TouT coMME lEs EspacEs créEs par l’archiTEcTE qui pErMETTEnT à son occupanT DE sE l’appropriEr DE ManièrE subjEcTivE.
ainsi, quE cE soiT à TravErs lEs iMagEs cinéMaTographiquEs ou lEs EspacEs archiTEcTuraux, l ’ arT DE créEr DEs connE xions invisiblEs Mais puissanTEs EnTrE DEs éléMEnTs DivErs résiDE Dans la capaciTé à guiDEr l ’EspriT ET l’éMoTion DE cEux qui lEs DécouvrEnT. c’EsT Dans cETTE inTEracTion EnTrE lE créaTEur ET lE pErcEpTEur qu’éMErgE la vériTablE TranscEnDancE arTisTiquE, où lEs fronTièrEs EnTrE lE rée L ET l ’iMagiNaire s’EsToMpEnT, laissanT placE à unE E xpériEncE profonDéMEnT pErsonnEllE ET EnrichissanTE
CHAPITRE II LE TEMPS DANS LE CINEMA
24: lE TEMps Dans lE cinéMa 23: hEnri bErgson: ThE crEaTivE MinD, p.17-18
«..si le mOuvement est une série de pOsitiOns et change une série d’états , le temps est cOnstitué de parties distinctes immédiatement adJacentes les unes aux autres . sans dOute On dit encOre qu’elles se succèdent, mais dans ce cas cette successiOn est semblable à celle des images sur un film cinématOgraphique : le film pOurrait s’écOuler dix, cent, vOire mille fOis plus vite sans la mOindre mOdificatiOn du dérOulement ce qui était mOntré ; si sa vitesse était augmentée à l ’ infini, si le dérOulement devenait instantané, les images seraient tOuJOurs les mêmes.»23
Figure
on s’EsT focalisé jusqu’à présEnT, sur lE MouvEMEnT cinéMaTographiquE ET sur son apporT DE DisconTinuiTés, cachanT sa vériTablE conTinuiTé, MéTTanT En éviDEncE unE rElaTion DirEcTE EnTrE réEl ET virTuEl. cEpEnDanT, TouT MouvEMEnT quElquE soiT sa naTurE influEncE la pErcEpTion Du TEMps. En EffET, un MouvEMEnT Donné porTanT D ’ un poinT DE DéparT, vErs un poinT D’arrivéE, TéMoignE DE la DiMEnsion TEMporEllE linéairE. quanD lE MouvEMEnT EsT DéclEnché, son DéparT EsT passé TanDis quE son arrivéE EsT fuTurE.
lE cinéMa MET l’accEnT sur cETTE noTion DE linE ariTé TEMporEllE, En EffET, lE 7E arT pErMET unE visualisaTion concrèTE Du TEMps. conTrairEMEnT à la pEinTurE ou à la phoTographiE, ou lE TEMps EsT un concEpT Dérivé inDirEcTEMEnT par unE visualisaTion Du TEMps figé, lE cinéMa visualisE DEs iMagEs ET lEs rEliE En séquEncEs, créanT ainsi unE te MporaLité qui s’approchE Du réEl.
EnsuiTE, En éTablissanT quE lE cinéMa EsT unE rEprésEnTaTion virTuEllE Du réEl, cETTE iDéE iMpliquE qu’il E xisTE DEux T ypEs DE TEMporaliTés, unE rée LLe, ET unE auTrE Virtue LLe.
cE qui nous a MEnés à réfléchir ET a nous posEr DEs quEsTions concErnanT lEs DifférEncEs ET lEs siMilariTés EnTrE lEs DEux TEMporaliTés, quEllEs sEraiEnT alors lEs DifférEncEs ET lEs siMilariTés EnTrE TEMps réEl ET TEMps virTuEl? coMMEnT influEncEraiEnT- EllEs la pErcEpTion?