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La prise de conscience

LA PRISE DE CONSCIENCE «Accepter que tout le monde ne puisse pas aller à la même vitesse»

Pour un dirigeant d’entreprise, le passage à la décision et à l’action n’est jamais évident. Il survient toujours après une prise de conscience individuelle. C’est d’autant plus vrai pour la question de la transition écologique dans le BTP avec des contraintes importantes. Discussion avec Gilles Veyret, chauffagiste à Saint-Didier-de-la-Tour et Philippe Meunier, directeur de l’agence Colas à Grenoble.

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Gilles Veyret, gérant de l’établissement Jean Veyret.

Philippe Meunier, directeur de l’agence Colas.

Comment cette prise de conscience verte s’est immiscée dans votre esprit d’entrepreneur?

Philippe Meunier: Il y a une prise de conscience générale sur la nécessité de faire, chacun, quelque chose pour verdir notre façon de travailler. J’ai aussi une fibre personnelle, avec des enfants en bas âge et je me suis demandé quelle planète je voulais leur laisser. La contrainte légale nous oblige également à nous diriger vers de nouvelles façons de travailler. La ZFE de la métropole grenobloise nous a bousculés. Gilles Veyret : Au sein de mon entreprise, j’ai par exemple mis en place le tri des déchets dès le début des années 2000. Très vite, je me suis rendu compte que les façons de faire, comme tout évacuer en décharge n’étaient pas en phase avec mes convictions.

Pour cette question de transition écologique dans vos entreprises, est-ce que les prises de conscience et les passages à l’acte sont plus complexes ?

GV: Oui clairement, car nous n’avons pas tous la même opinion. Concrètement, on se rend compte que certains ne s’en soucient pas, mais les choses évoluent dans le bon sens. L’énergie est au cœur de mon métier et nous travaillons encore dans des immeubles passoires. Mes salariés me le font souvent remarquer, preuve que le message est passé et que cela a un impact sur notre prise de conscience. PM : Cela touche plusieurs sujets. Tout d’abord, la sensibilité personnelle, ensuite il y a le frein économique, les nouvelles contraintes technologiques engendrent des surcoûts financiers, enfin n’oublions pas la crise sanitaire et économique. Le cocktail est explosif et il faut accepter que tout le monde ne puisse pas aller à la même vitesse. Mais je sais que chacun, à son échelle, fait preuve de bonne volonté et les petites rivières font de grands fleuves.

Dans cette optique de plus de vert dans votre métier, est-ce que la contrainte technologique est aujourd’hui un frein dans votre action ?

PM : C’est le serpent qui se mord la queue. Les fabricants d’engins de chantiers n’investissaient pas, car il n’y avait pas de marché Et de notre côté, puisqu’il n’y a pas de solution nous n’achetons pas. Nos investissements sont onéreux et se font sur le long terme. Nous avons donc besoin de visibilité, mais aussi de légitimité vis-à-vis des entreprises qui ne joueraient pas le jeu. Le fait de ne pas être rassurés quant à la bonne technologie de demain, freine notre passage à l’action. Par ailleurs, les points de ravitaillement (gaz ou électrique) sont encore trop peu nombreux. Tout doit être réalisé de front et uniformisé sur l’ensemble des territoires. GV: Cela fait deux ans que je pense acheter des véhicules électriques. Même si au fond de moi, la décision est prise, il faut que les choses se mettent en place. Ce n’est pas simplement acquérir des voitures, il faut aussi pouvoir les recharger, donc installer des prises, voire du photovoltaïque sur place pour être autonome. Ici, la contrainte n’est pas tant d’ordre financier, même si elle est importante. Mais puisque j’aime aller au fond des choses, je dois franchir le cap de la technologie. Dans ce cas de figure, la réflexion est plus globale et engageante, donc plus longue. l

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