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Flanders Best et Dejaeghere
from Syndicaliste n°968
by ACVCSC


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Benjamin Gonzalez et Rachid Merrir, délégués CSC chez Flanders Best et Dejaeghere: «Une de nos premières et principales victoires concerne les contrats et salaires».
Flanders Best et Dejaeghere «Les travailleurs ont enfin leur mot à dire»
L’histoire syndicale chez Flanders Best et Dejaeghere est très récente: pour la première fois lors des élections sociales de 2020, des travailleurs se sont portés candidats pour représenter leurs collègues au sein du CPPT. Dans la foulée, ces mêmes candidats ont instauré une délégation syndicale. La CSC est actuellement le seul syndicat présent dans l’entreprise. Syndicaliste a rencontré l’équipe syndicale de la CSC Alimentation et Services, Benjamin Gonzalez, Rachid Merrir, Guillaume Verhee (absent lors de l’interview), ainsi que leur secrétaire permanent syndical, Dieter Devos.
Comment se fait-il qu’il ait fallu attendre 2020 pour voir arriver une représentation syndicale dans l’entreprise?
Benjamin: «La direction faisait tout ce qui était en son pouvoir pour décourager toute présence syndicale dans l’entreprise. Il s’agit d’une entreprise familiale et la famille Dejaeghere la dirige d’une main de fer, ne tolérant aucune contestation, voulant décider de tout, avoir la main sur tout.» Dieter se souvient: «Dès le départ, nous avons eu des problèmes avec la direction pour organiser les élections sociales. Elle voulait absolument scinder Flanders Best et Dejaeghere dans la procédure élections sociales, ce qui aurait eu pour effet qu’une partie du personnel n’aurait pas pu élire de représentants. C’est absolument contraire à la loi. Nous avons donc dû entamer un bras de fer avec la direction, dont nous sommes logiquement sortis vainqueurs: tous les travailleurs de Flanders Best et Dejaeghere allaient pouvoir élire leurs représentants!»
Qu’est-ce qui a changé dans l’entreprise suite à l’arrivée d’une représentation syndicale dans l’entreprise?
Benjamin: «Avoir enfin des représentants syndicaux a permis l’instauration d’un droit de parole et d’un rapport de force. Avant ça, il était impossible d’avoir un dialogue avec la direction qui faisait ce qu’elle voulait dans son entreprise.» Dieter: «Avant l’installation du CPPT et de la délégation syndicale, je recevais de nombreuses questions ou plaintes de la part de nos affiliés. Maintenant, elles se font rares: la direction est beaucoup plus prudente. Elle est contrainte de mieux respecter la législation car elle sait que les représentants syndicaux sont vigilants.» Rachid ajoute: «En effet, la présence de représentants syndicaux fait que lorsqu’il y

a un problème, on peut en discuter directement avec la direction, de manière officielle dans les organes de concertation ou à d’autres moments moins formels. Nous essayons d’être très réactifs et de résoudre les situations problématiques avant qu’elles ne prennent trop d’ampleur. Cela permet de résoudre les problèmes en interne. C’est aussi plus efficace. Les travailleurs ne sont plus livrés à euxmêmes. Ça ne veut pas dire que la direction n’essaye pas encore d’agir comme bon lui semble, mais elle sait que désormais, elle n’a plus les mains totalement libres pour faire ce qu’elle veut, au mépris des législations.»
Avez-vous obtenu des victoires syndicales en à peine 2 ans?
Rachid et Benjamin: «Nous en avons même obtenu plusieurs! Ça n’a pas été facile, car nous partions de zéro et la situation était telle qu’il y avait beaucoup à faire, ce qui est encore le cas aujourd’hui, même si nous avons obtenu de belles avancées! Une de nos premières et principales victoires concerne les contrats et salaires: jusqu’à très récemment, tout était livré au bon vouloir de la direction. La situation pouvait être résumée en une phrase: «À travail égal, salaire inégal!». Les salaires étaient aléatoires, tout le monde n’était pas payé à hauteur de ce qu’il faisait: pour une même tâche, un travailleur pouvait gagner moins que son collègue. La direction avait toujours de «bonnes excuses» pour justifier un refus d’augmentation. Cela créait des injustices et des tensions. Aujourd’hui, ça a changé: nous avons pu contraindre la direction de mettre de l’ordre dans tout ça en respectant les accords sectoriels et en rémunérant de manière égale et objective les travailleurs. Sans syndicat, il n’y aurait jamais eu aucun changement à ce niveaulà, c’est une certitude! Nous avons également obtenu qu’une conseillère en prévention soit nommée (et formée). C’est une obligation légale, mais jusque là, nous n’en avions pas! Depuis l’arrivée de la conseillère en prévention interne, les choses bougent aussi pas mal et évoluent dans le bon sens vers plus de sécurité pour les travailleurs. Il faut dire qu’elle fait un super boulot! Récemment, nous venons d’obtenir une autre belle victoire: l’obtention de tickets restaurant pour tout le monde. Cela n’a pas été facile à obtenir. La direction voulait dans un premier temps ne les accorder qu’aux membres de la direction… Puis elle a souhaité exclure les intérimaires. À force de pressions, nous avons finalement obtenu que tous les travailleurs totalisant au moins deux ans d’ancienneté, quel que soit leur statut, aient droit à des tickets restaurant.
Tout semble se dérouler parfaitement alors…
Rachid et Benjamin: «Loin de là! Il y a en effet eu de belles avancées, mais il y a encore beaucoup à faire! Par exemple, un de nos prochains objectifs sera de faire baisser (ou tomber) la condition d’ancienneté pour l’obtention de tickets restaurant. Par ailleurs, les collègues nous sollicitent beaucoup pour que nous améliorions leurs conditions de travail. Nous avonçons, mais ils souhaiteraient que cela aille encore plus vite!» Dieter: «Il reste également un gros point noir au niveau de la représentation syndicale: nous n’avons pas encore de représentants des travailleurs parmi les employés. Or, le turnover est très important au sein de cette catégorie de travailleurs, ce qui illustre bien qu’il y a là aussi de nombreux problèmes au niveau des conditions de travail. Si nous parvenons à motiver un ou une employée à se joindre à l’équipe, nous pourrons aussi agir plus efficacement pour ce groupe de travailleurs, ce qui est compliqué pour l’instant puisque nous ne savons pas vraiment ce qu’il s’y passe.» | Propos recueillis pas Laurent Lorthioir |


«Depuis l’installation du CPPT et de la délégation syndicale, la direction est beaucoup plus prudente. Elle est contrainte de mieux respecter la législation car elle sait que les représentants syndicaux sont vigilants.»
Dieter
Flanders Best – Dejaeghere
Flanders Best et Dejaeghere sont les deux composantes d’une seule et même entreprise spécialisée dans le traitement et le conditionnement de fruits et légumes surgelés. Il s’agit d’une entreprise créée et gérée exclusivement par la famille Dejaeghere et qui est basée dans les environs d’Ypres, en Flandre occidentale. Entre 100 et 150 personnes y travaillent, ce nombre variant selon les saisons. L’entreprise embauche, à la haute saison, un nombre important de saisonniers (sous contrats intérim, étudiant ou CDD).

