TROISCOULEURS #171 - été 2019

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N 171

O

ÉTÉ 2019 GRATUIT

UNE FILLE FACILE DE REBECCA ZLOTOWSKI REINES DE L’ÉTÉ


domino films présente

SWANN ARLAUD MAUD WYLER FANNY ARDANT NICOLAS MAURY

une comédie amoureuse de ERWAN LE DUC

PERDRIX DYNAMITE LA COMÉDIE ROMANTIQUE Première

PERDRIX CIRCULE À TOUTE ALLURE Le Monde

FOLLEMENT DRÔLE Les Fiches du Cinéma

PERDRIX, LE CAPITAINE S’ENFLAMME ! Libération

HUMOUR DÉCAPANT France Info

AU CINÉMA LE 14 AOÛT


ÉDITO Zahia

Dehar. En France, tout le monde connaît son prénom, mais qui connaît son nom de famille ? S’il s’agissait sans doute de la manière dont elle se faisait appeler quand elle exerçait comme escort-girl, certains médias n’ont pas hésité à la figer dans cette image réductrice, en continuant à la nommer par son seul prénom (comme Marilyn Monroe en son temps) après sa reconversion en tant que mannequin, créatrice de lingerie et aujourd’hui actrice. Cet été, c’est à travers un film que Rebecca Zlotowski et Zahia Dehar elle-même tentent d’ébranler le mythe, de se réapproprier cette étiquette de « fille facile », d’en révéler d’autres facettes. En un mot : de l’anoblir. Par le verbe (cette scène dans laquelle l’héroïne redore le mot « pute » ; cette autre dans laquelle elle coupe adroitement la chique à une femme riche et jalouse qui tente de la faire passer pour une écervelée) comme par les actes (elle transmet à sa jeune cousine les compétences qu’elle a acquises pour se sentir libre et pour pouvoir circuler dans tous les milieux sociaux, qu’il s’agisse d’utiliser son corps comme elle le désire ou de se livrer à l’introspection à travers la littérature), le personnage de Parisienne épicurienne campé par Zahia Dehar contrecarre tous les préjugés liés au slut-shaming, cette attitude qui consiste à humilier quelqu’un (souvent une femme) à cause de son goût affiché pour la sexualité. En déconstruisant patiemment ce système sexiste, sous une apparence légère conviée par les vacances dans les calanques cannoises et la torpeur estivale, Zahia Dehar et sa réalisatrice Rebecca Zlotowski (la première est venue trouver la seconde et a beaucoup nourri le film, nous ont-elles confié en interview) nous apprennent comment changer le sens des images et celui des mots. • TIMÉ ZOPPÉ


Une pépite. Une merveille. A voir d’urgence. TÉLÉRAMA

LE PARISIEN

© LES ARMATEURS – MELUSINE PRODUCTIONS – CLOSE UP FILMS - ARTE France Cinéma - RTS - KNM 2018

LES

HIRONDELLES DE KABOUL un film de

ZABOU BREITMAN et ÉLÉA GOBBÉ-MÉVELLEC adapté du roman de YASMINA KHADRA

avec SIMON ABKARIAN ZITA HANROT SWANN ARLAUD HIAM ABBASS

4 SEPTEMBRE

ELLE


POPCORN

P. 14 RÈGLE DE TROIS : SWANN ARLAUD • P. 16 SCÈNE CULTE : LES MOISSONS DU CIEL • P. 22 FLASH-BACK : EYES WIDE SHUT

BOBINES

P. 26 EN COUVERTURE : UNE FILLE FACILE • P. 38 INTERVIEW : DESPLECHIN X LUBTCHANSKY • P. 46 INTERVIEW : RICHARD KELLY

ZOOM ZOOM P. 66 MIDSOMMAR • P. 68 HER SMELL

P. 70 GIVE ME LIBERTY • P. 76 DIEGO MARADONA

COUL’ KIDS

P. 88 INTERVIEW : GRAND CORPS MALADE & MEHDI IDIR P. 90 LA CRITIQUE DE LÉONORE : WONDERLAND

OFF

P. 92 LA NOUVELLE BD POSTAPOCALYPTIQUE • P. 96 EXPOS : BARBARA PROBST • P. 108 SÉRIES : THE LOUDEST VOICE

ÉDITEUR MK2 AGENCY — 55, RUE TRAVERSIÈRE, PARIS XIIe — TÉL. 01 44 67 30 00 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : ELISHA.KARMITZ@MK2.COM | RÉDACTRICE EN CHEF : JULIETTE.REITZER@MK2.COM RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE : TIME.ZOPPE@MK2.COM | RÉDACTEURS : QUENTIN.GROSSET@MK2.COM, CORENTIN.LE@MK2.COM, JOSEPHINE.LEROY@MK2.COM | GRAPHISTE : JÉRÉMIE LEROY | SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : VINCENT TARRIÈRE STAGIAIRE : QUENTIN BILLET-GARIN | ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : JULIEN BÉCOURT, LILY BLOOM, CHARLES BOSSON, RENAN CROS, JULIEN DOKHAN, JULIEN DUPUY, MARIE FANTOZZI, YANN FRANÇOIS, CLAUDE GARCIA, ADRIEN GENOUDET, AÏNHOA JEAN-CALMETTES, DAMIEN LEBLANC, GRÉGORY LEDERGUE, OLIVIER MARLAS, STÉPHANE MÉJANÈS, THOMAS MESSIAS, JÉRÔME MOMCILOVIC, WILFRIED PARIS, MICHAËL PATIN, LAURA PERTUY, PERRINE QUENNESSON, BERNARD QUIRINY, CÉCILE ROSEVAIGUE, ÉRIC VERNAY, ANNE-LOU VICENTE, ETAÏNN ZWER & LÉONORE ET ANNA, MATHILDE, CÉSAR ET ANNA | PHOTOGRAPHES : JULIEN LIÉNARD, PALOMA PINEDA, JAMES WESTON ILLUSTRATEURS : PABLO COTS, SAMUEL ECKERT, ÉMILIE GLEASON, ANNA WANDA GOGUSEY, PABLO GRAND MOURCEL PUBLICITÉ | DIRECTRICE COMMERCIALE : STEPHANIE.LAROQUE@MK2.COM | RESPONSABLE MÉDIAS : CAROLINE.DESROCHES@MK2.COM ASSISTANTE RÉGIE, CINÉMA ET MARQUES : EVA.LEVEQUE@MK2.COM | RESPONSABLE CULTURE, MÉDIAS ET PARTENARIATS : ALISON.POUZERGUES@MK2.COM | ASSISTANTE CULTURE, MÉDIAS ET PARTENARIATS : CLAIRE.DEFRANCE@MK2.COM TROISCOULEURS EST DISTRIBUÉ DANS LE RÉSEAU LE CRIEUR CONTACT@LECRIEURPARIS.COM © 2018 TROISCOULEURS — ISSN 1633-2083 / DÉPÔT LÉGAL QUATRIÈME TRIMESTRE 2006 — TOUTE REPRODUCTION, MÊME PARTIELLE, DE TEXTES, PHOTOS ET ILLUSTRATIONS PUBLIÉS PAR MK2 AGENCY EST INTERDITE SANS L’ACCORD DE L’AUTEUR ET DE L’ÉDITEUR. — MAGAZINE GRATUIT. NE PAS JETER SUR LA VOIE PUBLIQUE.


INFOS GRAPHIQUES

FEUILLE DE (DÉ)ROUTE

Cet

été, deux beaux road movies sont à l’écran : Give Me Liberty de Kirill Mikhanovsky (lire p. 70) et Roads de Sebastian Schipper. On a saisi l’occasion pour se demander comment et à quel rythme les héros de road movies américains emblématiques parcouraient leur pays. À partir des étapes énoncées dans chaque film, on a estimé avec Google Maps la longueur et la durée réelles de leur trip (s’ils le faisaient d’une traite en voiture), ainsi que leur temps de trajet fictionnel. En comparant tout ça, on constate que, comme dans la vie, il y a ceux qui respectent le code de la route et ceux qui devraient vraiment renoncer à conduire. • JOSÉPHINE LEROY

1 834 KM

(soit 20 heures)*

de Jonathan Dayton et Valerie Faris (2006)

UNE HISTOIRE VRAIE

de Ridley Scott (1991)

de David Lynch (1999)

1 909 KM

(soit 12 heures)*

parcourus en environ deux jours dans le film Une panne, un cadavre sur les bras, un ado en crise… À bord de leur van, les Hoover, très pressés, font face à tout pour que la petite Olive se rende à un concours de beauté.

4 762 KM

2 787 KM

(soit environ 5 heures)*

parcourus en quatre jours dans

EASY RIDER

de Dennis Hopper (1969)

(soit 38 heures)*

BROWN BUNNY de Vincent Gallo (2004)

7 684 KM

(soit environ 46 heures)*

le film

parcourus en six jours dans le film

parcourus en environ deux semaines dans le film

parcourus en environ une semaine dans le film

Fuyant les flics à la suite d’un drame, deux amies carburent sur les routes. Et ça se sent dans le montage nerveux et l’énergie des actrices (Susan Sarandon et Geena Davis).

Juché sur sa (très) lente tondeuse à gazon, le vieil Alvin part rendre visite à son frère. Si au départ on a le sourire un peu moqueur, ce héros au rythme si singulier finit par nous arracher une larme.

Comme nos icônes bikers du Nouvel Hollywood (Dennis Hopper et Peter Fonda) aiment la fumette et les réunions de hippies en plein désert, on comprend pourquoi ils mettent si longtemps à toucher au but.

Sur le chemin d’une course de motos en Californie, un pilote professionnel (Vincent Gallo) est envahi par les douloureux souvenirs d’une passion amoureuse, ce qui rend son voyage long et mélancolique.

: « Give Me Liberty » de Kirill

: « Roads » de Sebastian

Schipp er (Rezo Films, 1 h 4 0), sor tie le 17 juille t

Mikhanovsky (Wild Bunch, 1 h 51), sortie le 24 juillet

ILLUSTRATION : JÉRÉMIE LEROY

THELMA ET LOUISE

* Longueur et temps de tra jet estimés avec Google Maps

LITTLE MISS SUNSHINE

ÉMOPITCH MIDSOMMAR (SORTIE LE 31 JUILLET) 6


EXPOSITION 12 JUILLET— 10 NOVEMBRE 2019

261, boulevard Raspail 75014 Paris — fondation.cartier.com #FONDATIONCARTIER

#NOUSLESARBRES

CÁSSIO VASCONCELLOS, A PICTURESQUE VOYAGE THROUGH BRAZIL #37 (DÉTAIL), 2015. COURTESY DE L’ARTISTE ET GALERIA NARA ROESLER, SÃO PAULO, BRÉSIL. © CÁSSIO VASCONCELLOS. DESIGN GRAPHIQUE © AGNÈS DAHAN STUDIO.


FAIS TA B.A.

À chaque jour ou presque sa bonne action cinéphile. Grâce à nos conseils, enjolivez le quotidien de ces personnes qui font de votre vie un vrai film (à sketchs). POUR VOTRE ONCLE QUI A RÉALISÉ SON RÊVE AMÉRICAIN EN MONTANT UN RANCH EN CAMARGUE Son vrai nom est Jacques, mais il préfère qu’on l’appelle Jimmy. Et quand vous le voyez sortir son lasso, vous vous dîtes que, décidément, il n’est pas né dans la bonne contrée. Féru de westerns, votre tonton va adorer regarder le fringant Robert Redford scintiller en pleine nuit sur sa monture dans Le Cavalier électrique de Sydney Pollack, beau film autour d’un champion de rodéo déchu.

: « Le Cavalier électrique » de Sydney Pollack (Carlotta)

© T HÉÂTRE DU TEMPLE

POUR CE CLOWN DE RUE QUI S’AMUSE À FAIRE PEUR AUX PASSANTS DE VOTRE QUARTIER

Six femmes pour l’assassin, 1964

La première fois, c’est drôle ; la centième, ça l’est moins. Ce clown maladroit qui se cache derrière chaque coin de rue pour vous surprendre a du mal à renouveler son numéro. Invitez-le à la rétrospective que la Cinémathèque française consacre au cinéaste italien Mario Bava (Six femmes pour l’assassin, 1964), savant créateur de giallos et d’effets spéciaux dont il pourra s’inspirer.

: « Rétrospective Mario Bava », jusqu’au 28 juillet à la Cinémathèque française

POUR VOTRE PROF DE SOLFÈGE QUI VOULAIT FAIRE DE VOUS UN(E) ENFANT STAR Votre prof au regard sévère vous envoie depuis des années des lettres incendiaires pour vous répéter que vous avez fait une bêtise en ne l’écoutant pas. Pour la contredire, rien de mieux que ce puissant livre retraçant le parcours tragique de la géniale Judy Garland, qui a accédé toute jeune à la célébrité avec Le Magicien d’Oz de Victor Fleming avant de sombrer dans la dépression.

: « Judy Garland. Splendeurs et chute d’une légende » de Bertrand Tessier (L’Archipel, 288 p.)

POUR VOTRE COUSINE AVOCATE QUI DÉFEND CONSTAMMENT LES PLUS FAIBLES Quand vous étiez enfants, elle dévorait Les Misérables de Victor Hugo. Nul doute qu’elle sera fan du cinéma engagé du Japonais Kenji Mizoguchi, dont huit films sortis dans les années 1950 (L’Intendant Sansho, Les Contes de la lune vague après la pluie…) viennent d’être restaurés. Marqué par ses traumatismes de guerre, le cinéaste avant-gardiste a dénoncé avec force les dérives des sociétés patriarcales.

: « Kenji Mizoguchi en 8 films » (Les Bookmakers / Capricci Films), ressortie en version restaurée le 31 juillet

POUR VOTRE VOISIN, UN SCIENTIFIQUE QUI VIENT TOUJOURS SE PLAINDRE DE VOTRE HOME-CINEMA Le nez plongé dans ses ouvrages, il ne supporte pas d’entendre que, de l’autre côté de la cour, vous matez vos films d’horreur préférés avachi(e) dans votre canapé. Sensibilisez-le au ciné en l’emmenant à la master class « L’art et la science dans Alien », organisée à l’occasion de la parution d’un ouvrage collectif bien ficelé rédigé par des scientifiques autour de la fascinante (et flippante) saga qui fête ses 40 ans.

: « L’art et la science dans “Alien” », ouvrage collectif (La ville brûle, 176 p.) • une master class sur le même thème aura lieu au mk2 Bibliothèque en septembre

• JOSÉPHINE LEROY 8


QUE LA FÊTE COMMENCE !

ACTUELLEMENT AU CINÉMA

©2019 Disney/Pixar

DisneyPixarFR DisneyPixarFR @DisneyFR @DisneyFR @disneyfr @disneyfr #ToyStory4 #ToyStory4


HOME CINÉMA

Chaque mois, une traversée des tendances du design, de l’art de vivre et de la culture portées par le grand écran et disponibles au mk2 store du mk2 Bibliothèque. Ce mois-ci : une sélection pop et tarantinesque à l’occasion de la sortie le 14 août de Once Upon a Time… in Hollywood. • CORENTIN LÊ

LE ROCKYRAMA SPÉCIAL TARANTINO Dans ce nouveau numéro de la revue trimestrielle consacrée à la pop culture, l’équipe de Rockyrama parcourt la filmographie de Quentin Tarantino au gré de ses innombrables références. Cette publication riche en détours et anecdotes cinéphiles se décline en trois couvertures : Pulp Fiction, Boulevard de la mort ou Kill Bill. De notre côté, on préfère le jaune (fluo). Et vous ?

LE LIVRE CALIFORNIA GIRLS DE SIMON LIBERATI LE LIVRE CHARLES MANSON PAR LUI-MÊME Pour tout savoir de l’été sanglant de 1969 pendant lequel Once Upon a Time… in Hollywood prend place, pourquoi ne pas commencer par se plonger dans la biographie de Charles Manson par… lui-même ? À travers le récit du commanditaire du meurtre de Sharon Tate, retranscrit par un de ses compagnons de prison, peut-être verrez-vous cette époque sous un nouveau jour.

En complément de la biographie de Charles Manson, ce roman de Simon Liberati relate la période durant laquelle la Famille, la secte satanique qu’il a engendrée et qui tient un rôle important dans le nouveau film de Tarantino, a sauvagement assassiné l’actrice Sharon Tate et quatre autres personnes dans la nuit du 8 août 1969, sur les hauteurs de Los Angeles.

— : mk2 store du mk2 Bibliothèque 128, avenue de France, Paris XIIIe

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LE VINYLE DE LA B.O. DE PULP FICTION De Pulp Fiction, tout le monde retient la scène de danse entre Uma Thurman et John Travolta sur « You Never Can Tell » de Chuck Berry. Pour se remémorer le film sans quitter la piste, rien de mieux que le vinyle de sa bande originale, qui regroupe notamment les célèbres « Misirlou » de Dick Dale, « Girl You’ll Be a Woman Soon » d’Urge Overkill ou encore « Let’s Stay Together » d’Al Green.



CHAUD BIZ

CASSER CE QUI FONCTIONNE

POPCORN

Dans

de l’image animée a pour rôle de réglementer et de soutenir l’économie du cinéma, de l’audiovisuel, du multimédia et du jeu vidéo. Il est financé principalement par trois taxes : sur les entrées en salles, sur les éditeurs et les distributeurs de services de télévision et sur la diffusion des contenus audiovisuels qui ont rapporté quelque 672 millions d’euros en 2018. Alors que préconise ce rapport ? Il met en avant un plafonnement des taxes affectées au CNC, « dans l’objectif d’assurer un pilotage de la dépense », un rééquilibrage en faveur de l’audiovisuel, prétendument défavorisé par rapport au cinéma, et un contrôle renforcé par le Parlement. Des recommandations réfutées point par point par l’ensemble de la profession. Et notamment par le ministre de la Culture, Franck Riester, qui assure que les décisions essentielles du CNC « sont partagées avec le ministère [de la Culture, ndlr] » et que, pour les taxes affectées, « c’est le Parlement qui décide, pas le CNC tout seul », assurant ainsi la transparence du fonctionnement de l’organisme. Si les griefs de Céline Calvez et Marie-Ange Magne ne risquent pas de faire date, ils permettent cependant de rappeler que l’apparente indépendance du cinéma en tant qu’art et industrie n’est jamais gagnée. • PERRINE QUENNESSON — ILLUSTRATION : ÉMILIE GLEASON

un rapport d’évaluation paru début juin, deux députés de LREM affirment que le nombre de films français qui sortent en salles est trop important et épinglent le CNC. En sous-texte, on peut voir là une volonté de réorganiser un système pourtant fonctionnel. « Il faut trouver un dispositif qui finance des films mieux vus et mieux vendus à l’international pour consolider notre soft power. » C’est avec cette phrase – qui veut un peu tout et rien dire, mais dans laquelle on sent bien l’envie de rentabilité du cinéma – que le rapport des députées LREM Céline Calvez, vice-présidente de la commission des Affaires culturelles, et Marie-Ange Magne, membre de la commission des Finances, dans le cadre du « Printemps de l’évaluation » des politiques publiques, avait fait parler de lui fin mai, juste avant sa publication officielle. Sur le thème du « il y a trop de films qui sortent mais nous n’avons pas vraiment de solutions », le fameux rapport de 52 pages laisse entendre une autre petite musique qui, elle, revient encore plus régulièrement : il faudrait plafonner l’ensemble des taxes affectées au CNC, parce que, bon, donner de l’argent pour des produits qui ne fonctionnent pas toujours, ça va bien. Pour rappel, le Centre national du cinéma et

Une petite musique revient régulièrement : il faudrait plafonner l’ensemble des taxes affectées au CNC.

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avec

LUANA BAJRAMI LAETITIA COLOMBANI ISABEL AIMÉ GONZALEZ SOLA ALAIN ARTUR JOSHUA ROSINET MILAN HATALA SOLAL FERREIRA

AU CINÉMA LE 4 SEPTEMBRE


RÈGLE DE TROIS

SWANN ARLAUD

Après son César du meilleur acteur pour Petit paysan, le premier film d’Hubert Charuel, le prolifique Swann Arlaud continue de jouer devant la caméra de jeunes cinéastes. Cet été, il campe un gendarme déboussolé dans Perdrix d’Erwan Le Duc. L’acteur, à l’allure d’éternel jeune premier, a répondu à notre questionnaire cinéphile. Tes 3 flics favoris au cinéma ? Le lieutenant Smicer dans Perdrix, interprété par Alexandre Steiger. C’était une joie de jouer avec lui : il a la discrétion des gens brillants et un humour qui frôle le génie. L’officier Bauer dans Tchao pantin, campé par Philippe Léotard. Il est sur le fil, il n’a rien d’un flic et ne cherche pas à jouer la fonction ; il l’est, et on y croit absolument. Il n’y a plus beaucoup d’acteurs comme lui. Et Marge dans Fargo, campée par Frances McDormand. J’ai tout de suite pensé à elle avant de jouer mon rôle de gendarme. Elle n’a l’air de rien ; pourtant elle comprend tout, presque sans jugement. Comme souvent chez les frères Coen, il arrive des choses extraordinaires à des personnages ordinaires. 3 acteurs qui t’inspirent ? Michel Serrault, pour sa folie et sa liberté, avec son

physique d’une apparente normalité, sa voix inimitable. Benoît Poelvoorde aussi. Il peut tout jouer et il a une capacité à être dedans immédiatement alors que la seconde d’avant il faisait marrer toute l’équipe. Il a une grande tendresse et un amour des gens. Et François Morel, qui est dément d’invention, de poésie, et qui a bercé mon adolescence avec Les Deschiens. 3 cinéastes pour qui tu aimerais tourner ? Xavier Dolan. Il sait filmer les acteurs – il est d’ailleurs lui-même très bon comédien. Les thèmes qu’il aborde me parlent : la complexité des liens familiaux, amoureux, ce gouffre qui n’empêche pas l’amour mais qui empêche peut-être tout le reste. Valeria Bruni Tedeschi. Je me souviens d’elle dans Les gens normaux n’ont rien d’exceptionnels. Elle m’a toujours beaucoup touché, comme les films

qu’elle a réalisés depuis. Elle transforme avec humour et poésie des choses vécues, leur arrache quelques moments de grâce. Noémie Lvovsky. J’avais passé des essais pour Camille redouble, je n’avais pas eu le rôle et je me souviens avoir été très déçu. Mais quand j’ai vu Samir Guesmi dans le rôle, j’ai compris : y avait pas photo. J’ai adoré le film. 3 cinéastes taillés pour un film sur les gilets jaunes ? Ken Loach, pour comprendre ce qu’ils vivent et en pleurer. Antonin Peretjatko, pour montrer le décalage entre nos dirigeants et la réalité puis en rire. Matthieu Bareyre, pour leur donner la parole. Il a réalisé L’Époque, un très beau documentaire [sorti en avril, ndlr] dans lequel il rencontre de jeunes gens, la nuit, dans les rues de Paris et en banlieue.

• PROPOS RECUEILLIS PAR CORENTIN LÊ

— : « Perdrix » d’Erwan Le Duc, Pyramide (1 h 39), sortie le 14 août

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UNE AGENT DU MOSSAD INFILTRÉE EN IRAN A DISPARU

DIANE KRUGER

MARTIN FREEMAN

UN FILM DE YUVAL ADLER

AU CINÉMA LE 24 JUILLET ,


SCÈNE CULTE

LES MOISSONS DU CIEL (1979)

POPCORN

« Le diable est là, il rigole. Il est content quand les gens font le mal. »

États-Unis,

serpents », commente Linda de sa voix éraillée. La chute aura lieu sous la forme d’une invasion de sauterelles – un fléau biblique. À ce moment précis, le regard de Malick se transforme : il s’arrête sur plusieurs d’entre elles, dans une série de gros plans inquiets, comme s’il observait des êtres venus de l’espace. Le naturalisme laisse soudain place au présage, et les sauterelles envahissent chaque plan, obligeant la caméra à adopter des angles bizarres, comme cette contre-plongée sur Linda donnant de furieux coups de tapette aux insectes, ou ce travelling circulaire autour d’un feu dans lequel on les jette par paniers. Une funeste panique s’est emparée des hommes et des bêtes, et la nature elle-même change de visage, ravagée de taches noires, avant de s’embraser. Les jours d’enfer ont commencé. • MICHAËL PATIN

début du xxe siècle. Bill (Richard Gere) fuit Chicago pour les prairies du Texas avec sa jeune sœur, Linda (Linda Manz), et sa petite amie, Abby (Brooke Adams), qu’il fait passer pour son autre sœur. Embauchés à la saison des moissons dans une ferme isolée, ils vont esquisser un plan pour sortir de leur misère : Abby séduira le jeune propriétaire des terres (Sam Shepard), gravement malade, et dont les jours sont comptés… Pendant sa première heure, Les Moissons du ciel se déploie d’un seul mouvement, tel un poème sans strophe, ample et harmonieux. Terrence Malick filme la nature et les hommes comme les termes d’une même équation divine : rien n’est métaphore dans la danse du vivant, mais tout se répond par des voies mystérieuses. Ce sont les « jours de paradis » du titre original (Days of Heaven), qui se poursuivent après l’été, quand la petite communauté se recompose (Abby tombe amoureuse du fermier) et que chacun profite d’un trompeur repos de l’âme. « Le diable est là, il rigole. Il est content quand les gens font le mal. Puis il les envoie dans la fosse aux

— : de Terrence Malick,

ressortie en version restaurée le 17 juillet (Solaris, 1 h 34)

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UN MÉLANGE HABILE ENTRE

UNE CHRONIQUE DE CLASSE

FÉMINISME ET LIBERTÉ LES INROCKUPTIBLES

SOLAIRE FRANCE INFO

EN TOUTE LÉGÈRETÉ LIBÉRATION

EXPLOSIF

FASCINANT ! KONBINI

TÉLÉRAMA

LES FILMS VELVET présente

ZAHIA DEHAR

BENOÎT MAGIMEL

un film de

CLOTILDE COURAU

NUNO LOPES

REBECCA ZLOTOWSKI

AU CINÉMA LE 28 AOÛT

Crédit Photo : © Julian TORRES / Les films VELVET • Design : Benjamin & Laurent / TROÏKA

MINA FARID


TROIS IMAGES

NO FUTURE IS FEMALE Dans Her Smell, Alex Ross Perry met en scène la fin d’un groupe, détruit par une leadeuse excessive et toxique jouée par Elisabeth Moss. Retour en images sur des rockeuses mélancoliques qui contemplent leur horizon.

© D. R.

force de Her Smell, c’est sa construction très radicale en cinq scènes et autant de courts interludes vidéo qui enregistrent les dernières heures d’un girls band des années 1990. Dans son studio, Becky Something erre, usée par la drogue, la solitude et l’égoïsme, irritante jusqu’à l’insupportable pour son entourage et pour le spectateur. Le visage relevé, les yeux hagards, la chanteuse s’incarne dans un moment d’absence, avant de regarder enfin celle qui est là et qui l’attend, sa fille. À la mort de sa mère, une jeune femme interviewée par une chaîne de télé locale livre sans détour sa vision nihiliste et sarcastique du futur dans l’excellent Ladies and Gentlemen. The Fabulous Stains de Lou Adler (1982). Corinne Burns devient malgré elle la voix d’une génération, et s’arme d’un micro pour fonder son propre groupe et prêcher une rébellion des femmes. Le jeune âge des actrices du film (Diane Lane a 17 ans, Laura Dern, qui joue la bassiste, en a 15) et l’aspect documentaire de celui-ci chargent d’une grande vérité émotionnelle ces moments de contemplation de l’avenir. Le girls band formé par trois lycéennes japonaises et leur correspondante coréenne dans Linda Linda Linda de Yamashita Nobuhiro (2005) vient à peine de naître et il ne connaît encore ni la brutalité de la vie de tournée ni la désillusion de la séparation. Le cinéaste capte avec une tendresse inouïe cet îlot de liberté dans lequel se réfugient trois adolescentes jusqu’à la fin d’un été. L’actrice Bae Doona (muse de Bong Joon-ho et des sœurs Wachowski) prête son corps somnambule à ce personnage qui découvre en musique sa force et sa liberté. • CHARLES BOSSON

— : « Her Smell » d’Alex Ross Perry, Potemkine Films (2 h 14),

© D. R.

POPCORN

La

sortie le 17 juillet

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AU CINÉMA LE 21 AOÛT

© 2019 WHY NOT PRODUCTIONS - ARTE FRANCE CINÉMA

PHOTO: SHANNA BESSON

WHY NOT PRODUCTIONS PRÉSENTE


LE TEST PSYNÉPHILE

AS-TU LA POISSE  ?

La canicule n’a pas eu raison de toi, tu penses… T’offrir un week-end un peu particulier au Cap d’Agde. Louer une baraque dans les hauteurs de Los Angeles.

POPCORN

Faire un break à Miami avec plein de copines délurées.

Qu’est-ce qui est pire qu’un déj’ en tête à tête avec Trump ? Servir d’encas à des piranhas préhistoriques. Un dîner à thème avec Charles Manson. Une journée de jeûne avec Depardieu. Si je te dis « bonheur », tu me réponds quoi ?

Jusqu’où irais-tu pour éviter de passer l’été avec ta belle-mère ?

« J’ai besoin d’une sérieuse dose de sérotonine. » « Donne-moi un Quarter Pounder avec du fromage. »

L’envoyer sur le boulevard de la mort. Simuler ton propre kidnapping. Ramper jusqu’à la Casbah. On t’offre un saut en parachute, tu penses…

« Que je sois damné(e) ! » Le permafrost fond pendant l’été, tu fais quoi ? Rien – tu es la reine des connes.

C’est bon, au pire, j’ai déjà eu neuf vies. Plutôt sauter sans – le destin est une putain.

Tu fais une liste de gens à abattre et tu t’y mets avec méthode.

Je veux un gonze dans chaque bol de riz pour lui plomber les molaires.

Tu écoutes « Crocodaïl » de Jacques Higelin, en attendant la vague.

SI TU AS UN MAXIMUM DE : OUI, ET C’EST SPECTACULAIRE. En même temps, t’as toujours de mauvaises idées, comme traverser un désert radioactif en famille, ou agiter ton bikini fluo dans un lac infesté de piranhas. Tu vas adorer le dernier film au pitch improbable d’Alexandre Aja, Crawl (qui sort le 24 juillet). En plein ouragan, une jeune femme préfère se battre avec de gros crocos dans un sous-sol plutôt que déguerpir en vitesse… Ce film et cette nana sont faits pour toi.

OUI, MAIS C’EST SUPRA COOL. T’es du genre à te faire applaudir quand tu te ramasses. Tarantino aussi. Avec lui, être has been devient branché, et des musiques improbables se muent en standards intemporels. Dans Once Upon a Time… in Hollywood (qui sort le 14 août), il arrive à transformer une histoire sordide en hommage geek… à Hollywood. Alors, le film est bancal, un peu douteux, mais difficile de faire des reproches à Quentin.

NON, TU ES MONSIEUR CHANCE. Alors qu’on ne sait pas si c’est une guerre nucléaire ou le changement climatique qui aura raison de notre espèce, tu crois encore en la possibilité d’une île. Tu dois certainement avoir envie de partir te reposer. Eh bien c’est le programme que te propose Guillaume Nicloux avec Thalasso (qui sort le 21 août). T’as du bol, tu ne seras pas seul(e) dans ce monde des repas sans sel : tu pars avec Depardieu et Houellebecq.

• LILY BLOOM — ILLUSTRATION : PABLO GRAND MOURCEL 20


AU CINÉMA LE 14 AOÛT

SudoKu Aventure Chaque case et chaque ligne verticale ou horizontale doit contenir tous les symboles sans quʼils se répètent. Et trouve le chemin qui mène à la cité dʼor.


FLASH-BACK

EYES WIDE SHUT Vingt ans après sa sortie, Eyes Wide Shut est-il toujours écrasé par son intimidant statut de film posthume de Stanley Kubrick ? Réponse avec le scénariste Laurent Vachaud, spécialiste de l’œuvre du cinéaste.

« Le

film fut projeté pour la première fois à Tom Cruise et Nicole Kidman quelques jours avant la mort de Stanley Kubrick, survenue le 7 mars 1999. Mais le mixage n’était pas fait, et il restait quelques plans à caler », rappelle Laurent Vachaud. Kubrick ayant pour habitude de modifier ses œuvres jusqu’au dernier moment, Eyes Wide Shut demeure inachevé. L’accueil du film (sorti le 13 juillet 1999 aux États-Unis) s’avéra assez froid. « Même ceux qui l’ont défendu semblaient surpris par la lenteur du récit. De folles rumeurs avaient circulé pendant des années sur ce projet. Tout le monde s’attendait à un thriller érotique torride ; on racontait aussi que Tom Cruise s’habillait en femme à un moment. » Aucune trace pourtant d’une telle séquence dans cette adaptation moderne de La Nouvelle rêvée d’Arthur Schnitzler qui suit les déambulations nocturnes d’un médecin (Tom Cruise) devenu ivre de jalousie après que sa femme (Nicole Kidman) lui a confessé ses fantasmes sexuels. Eyes Wide Shut a en tout cas progressivement

laissé son empreinte. « Quand Da Vinci Code fut publié en 2003, Dan Brown raconta que le film de Kubrick lui avait inspiré son portrait des sociétés secrètes. » Pour Vachaud, auteur en 2013 d’un texte publié dans les colonnes de la revue Positif intitulé Le Secret de la Pyramide, le film traite en effet de l’instrumentalisation de femmes que l’on prive de libre arbitre pour servir d’esclaves sexuelles aux élites new-yorkaises. « Il est également question de la fracture entre les maîtres et les valets. Le héros ne cesse de montrer ses billets pour affirmer son statut social, mais à la fin il s’écrase comme un laquais. Kubrick était visionnaire et avait pressenti que les ultrariches allaient gagner ; ce qui est confirmé aujourd’hui quand on voit le président américain. Donald Trump aurait parfaitement eu sa place dans la célèbre scène de l’orgie. » Vingt ans après, Eyes Wide Shut invite plus que jamais à ouvrir les yeux. « Des choses horribles et insoupçonnables se passent peut-être au coin de votre rue. » • DAMIEN LEBLANC ILLUSTRATION : ANNA WANDA GOGUSEY

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DONALD

SETH

CHIWETEL

ALFRE

BILLY

JOHN

JOHN

AVEC

BEYONCÉ

ET

JAMES EARL

GLOVER ROGEN EJIOFOR WOODARD EICHNER KANI OLIVER KNOWLES-CARTER JONES

LE 17 JUILLET AU CINÉMA #LEROILION


LE NOUVEAU

POPCORN

TIMOTHÉE ROBART

Avec

ses yeux doux, il traverse Vif-Argent, très joli premier film de Stéphane Batut (auréolé du Prix du jury au Champs-Élysées Film Festival et du prix Jean-Vigo) de sa dégaine tranquille. Son personnage, prénommé Juste, écoute le monde avec grâce, devenu spontanément passeur entre la vie terrestre et l’au-delà. « Je ne me suis pas fait violence pour le rôle, Stéphane a vu le personnage à travers ce que je dégageais. » Arrivé sur le tournage un peu par hasard, touché par un scénario ancré dans des lieux familiers (un XIXe arrondissement onirique), Timothée Robart n’entretient pourtant pas de velléités de jouer la comédie. À 21 ans, ce passionné de son ambitionne de devenir

perchman et de voguer entre les différents tournages. « On y noue des relations très fortes, très soudées, en plus de découvrir de nouveaux lieux. » Rattrapé par son talent, il s’apprête toutefois à investir un autre premier rôle chez Vincent Cardona, jeune réalisateur remarqué pour son court métrage Coucou-les-Nuages. Une nouvelle rêverie qui, on l’espère, en inspirera bien d’autres. • LAURA PERTUY PHOTOGRAPHIE : PALOMA PINEDA

— : « Vif-Argent » de Stéphane Batut,

Les Films du Losange (1 h 44), sortie le 28 août

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BOBINES

UNE FILLE FACILE

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© D. R.

BOBINES

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BOBINES

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FIÈRES EXPLORATRICES Avec Une fille facile, sensation de la dernière Quinzaine des réalisateurs, Rebecca Zlotowski (Belle épine, Grand central) offre à la gracieuse Zahia Dehar, ancienne escort-girl devenue mannequin et créatrice de lingerie, un époustouflant premier rôle au cinéma – celui de Sofia, une Parisienne douce et voluptueuse qui, le temps d’un été chez sa jeune cousine à Cannes, fait valser les clichés. Sur la terrasse ensoleillée d’un grand hôtel parisien, la réalisatrice et l’actrice nous ont raconté leur coup de foudre artistique, leur rapport aux féminités et comment elles explorent les mythes que l’on y associe. 28


Comment vous êtes-vous découvertes l’une et l’autre ? Rebecca Zlotowski : J’avais repéré Zahia, dont j’aimais l’allure, le parcours de transfuge social. Mais, à ma grande surprise, c’est elle qui m’a contactée sur Instagram. Zahia Dehar : J’étais fan de son film Grand central, et il y avait quelque chose dans son visage qui me plaisait. R. Z. : Je songeais à faire un film d’été autour de deux jeunes michetonneuses, mais rien de précis. Ma rencontre avec Zahia a été déterminante pour l’écriture du film, sur laquelle on a toutes les deux travaillé. (Elle se tourne vers Zahia.) La scène où Sofia explique à sa cousine Naïma qu’avant un rencard autour d’un dîner il faut manger pour être pleinement attentive, ça vient de toi, par exemple. Sofia initie aussi sa cousine à l’empowerment des femmes. Quelles lectures sur le sujet vous ont particulièrement touchées ? Z. D. : Surtout celle de Grisélidis Réal, une artiste peintre, autrice et prostituée. À sa mort, elle a insisté pour que sur l’épitaphe de sa tombe on n’indique pas seulement « écrivaine et artiste », mais aussi « prostituée ». J’adore cette phrase, dans Le noir est une couleur [publié en 1974, ndlr], où elle dit : « La prostitution est un acte révolutionnaire.» Dans le film, le corps de Sofia est filmé comme une œuvre d’art : sous différentes lumières, à plusieurs échelles, parfois longé par la caméra comme une surface mystérieuse. Considérez-vous le corps comme une matière artistique ? Z. D. : Oui. J’ai posé plusieurs fois pour les artistes Pierre et Gilles, je trouve que leur regard sur le corps est fantastique. J’ai toujours voulu jouer avec le mien, prendre des poses particulières. J’ai très longtemps eu un côté exhibitionniste. Petite, je cherchais déjà à attirer l’attention. R. Z. : L’idée du corps comme matière compte, mais je ne voulais surtout pas réduire le personnage de Sofia à son physique spectaculaire, même s’il est fascinant. Je voulais raconter son intériorité. Comment avez-vous discuté ensemble de la façon de filmer votre corps, Zahia ? Y avait-il des limites à ne pas franchir ? Z. D. : Aucune ! J’avais totalement confiance en Rebecca et en son sens de la mise en scène.

Dans les scènes de sexe, le corps de l’homme est filmé comme celui de la femme, et la jouissance féminine est montrée sans fausse pudeur. Vous vouliez faire exploser certaines barrières dans la représentation du plaisir féminin ? R. Z. : Oui, parce qu’on sent que, au cinéma, l’époque du code Hays [un code de censure appliqué de 1934 à 1966 à Hollywood, qui interdisait notamment la nudité à l’écran, ndlr] n’est pas encore révolue, et que c’est encore rare de voir des hommes attentifs au désir féminin. C’est pour ça qu’en postproduction j’ai retravaillé le son de la scène de sexe où Andrès [joué par Nino Lopes, ndlr] demande à Sofia ce qu’elle a envie qu’il lui fasse, pour qu’on entende bien sa question. Zahia, par votre allure et votre diction, on vous compare souvent à Brigitte Bardot ; vous semblez attachée à l’esthétique des années 1960-1970. Qu’est-ce qui vous fascine dans cette période ? Z. D. : Je crois que c’est parce qu’on en garde une image de grande liberté, d’hédonisme. R. Z. : C’est une période qu’on ne doit pas non plus idéaliser. Les femmes subissaient la misogynie, mais en même temps elles ont conquis une certaine liberté. Dans le film, on réutilise ces mythes avec un regard très contemporain. La force de Sofia, c’est aussi d’assumer son côté léger. Elle fait penser aux héroïnes de Jacques Rozier dans Du côté d’Orouët, notamment quand elle feuillette avec sa cousine des magazines féminins. Était-ce une référence ? R. Z. : Oui. Il y a aussi Adieu Philippine du même réalisateur, un film d’été très libre… En parlant de magazines féminins, je me souviens que je lisais beaucoup 20 ans quand j’étais ado. J’ai perdu ma mère tôt et ma sœur – à raison – n’a pas cherché à la remplacer. C’est à travers ces magazines

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Zahia Dehar

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ENTRETIEN


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« Je ne voulais surtout pas réduire le personnage de Sofia à son physique, mais raconter son intériorité. »

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REBECCA ZLOTOWSKI

que j’ai construit ma féminité. Mais l’idée de la scène où Naïma et Sofia lisent le courrier d’une lectrice qui s’interroge sur le fait de ne pas tomber amoureuse vient principalement de toi, Zahia. Z. D. : C’est vrai. J’aimais l’écho entre ce texte « antiromantique » et le personnage de Sofia, qui ne cherche pas du tout l’amour. Zahia, dans une interview à Première, vous avez dit ne pas supporter la « dictature du bonheur ». Qu’entendez-vous par là ? Z. D. : C’est un ressenti que j’ai. Dans notre société, il n’y a pas de place pour la tristesse, on est dans l’obligation de sourire de tout. Je m’oppose à ça, je voudrais qu’on puisse vivre nos émotions, positives ou négatives, ouvertement. Dans le film, plutôt que de les nier, votre personnage se réapproprie positivement

Mina Farid et Zahia Dehar

les clichés et les insultes misogynes, notamment le mot « pute ». Z. D. : Oui, et j’essaie de faire la même chose dans la vie. Je pense que ce mot enferme les femmes. Et, en même temps, il n’est pas insultant en soi. Même jeune, je n’ai jamais compris pourquoi il était perçu négativement. C’est quoi, « pute » ? Ça renvoie à la prostitution. Et est-ce que la prostitution, c’est mal ? Non. R. Z. : Et c’est bien plus varié qu’on ne le

« Riley » Lakhdar Dridi et Mina Farid

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négatif à ça, elle n’a pas honte de ses origines et n’a pas de désir de revanche sociale. À Cannes, on a aussi découvert le court métrage Plaisir fantôme de Morgan Simon, qui désamorce certains clichés, mais ici sur les actrices porno. Vous sentez un intérêt croissant du cinéma d’auteur français pour les figures féminines traditionnellement méprisées par la société ? R. Z. : Je ne l’ai pas vu, mais je sens que les choses bougent. Il y a urgence, notamment économique, pour le cinéma d’auteur à s’ouvrir à d’autres représentations, d’autres corps et d’autres récits. Z. D. : Personnellement, je suis heureuse de voir qu’on prend de plus en plus en compte ces autres formes de féminités, attaquées parce que libres, qui ne sont pas moins intéressantes que celles qu’on a beaucoup vues jusque-là.

pense. La prostitution, ça ne se réduit pas à assouvir le désir de l’homme. Le désir féminin est aussi en jeu. Z. D. : Je suis d’accord. On peut très bien imaginer une femme se prostituer un soir et payer un prostitué le lendemain pour son propre plaisir. R. Z. : Mais c’est important de préciser que Sofia n’est pas une prostituée. Si j’avais voulu faire un film sur la prostitution, je ne t’aurais probablement pas contactée, tu m’évoques d’autres choses. En fait, on ne sait rien du métier de Sofia. Z. D. : On sait seulement qu’elle a voulu librement quitter son milieu, explorer de nouvelles choses. Il y a tout de même l’idée d’une tension entre classes. Naïma et son meilleur ami, Dodo [campé par « Riley » Lakhdar Dridi, ndlr], se traitent par exemple de charclos [« clochards » en verlan, ndlr]. Qu’est-ce que ces jeunes projettent de ce point de vue dans le personnage de Sofia, selon vous ? R. Z. : Naïma et Dodo découvrent à travers elle qu’il y a des luttes à l’intérieur d’une même classe sociale. L’employé du yacht, par exemple, ne supporte pas de voir Naïma et Sofia passer l’entrée du bateau. Il y a un rejet virulent. Z. D. : À l’inverse, Sofia n’a pas de rapport

• PROPOS RECUEILLIS PAR JOSÉPHINE LEROY PHOTOGRAPHIE : PALOMA PINEDA

— : « Une fille facile » de Rebecca Zlotowski, Ad Vitam (1 h 31), sortie le 28 août

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ENTRETIEN


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Une fille facile, titre du dernier film de Rebecca Zlotowski, avec Zahia PIN-UP GRRRLS De tous les personnages de « femmes faciles » Dehar, est trompeur. Plutôt qu’une du cinéma, celui de la pin-up est l’un des plus dénomination morale, l’expression est anciens mais aussi des plus ambivalents. de charme s’affichant dans des portée comme un étendard féministe Symbole positions sexy, la pin-up est souvent désignée par la réalisatrice et par son actrice. comme objet du regard voyeur masculin Mélanie Boissonneau, qui a analysé Une démarche anti-slut-shaming qui, hétéro. ce stéréotype au cinéma dans les livres des pin-up au porno queer, s’inscrit Les Pin-up au cinéma (coécrit avec Laurent et Pin-up au temps du pré-code dans une filiation de représentations Jullier) (1930-1934), note que, contrairement à de femmes maîtresses de leurs d’autres figures comme la femme fatale ou la vamp qui usent consciemment de leur désirs à l’écran. attrait pour causer la perte des hommes, on

Sofia

et Naïma bullent dans une calanque en lisant des magazines quand deux jeunes hommes les abordent en les draguant lourdement. Absolument pas décontenancée, Sofia joue avec eux. Ils finissent par la traiter de pute. Elle ne leur répond pas, et, à sa cousine qui s’étonne de son manque de réaction, elle explique que, pour elle, ce n’est pas une insulte… Rebecca Zlotowski, avec sa manière habile de faire ressortir la capacité d’agir du personnage de Sofia joué par Zahia Dehar, s’attaque ici très directement au slut-shaming, cette attitude qui consiste à stigmatiser les femmes qui, par leur manière de s’habiller ou par leurs propos, affichent leur goût pour la sexualité. En interview, Dehar nous a confié être une lectrice de Grisélidis Réal, autrice et travailleuse du sexe suisse qui, dans ses livres, a mis en avant, sans fard ni idéalisation, son activité de prostitution comme « un acte révolutionnaire ». Sans s’en revendiquer explicitement, mais par ses propos et son choix de jouer ce rôle, on peut dire que l’actrice, créatrice de mode, modèle et ancienne escort-girl, inscrit sa démarche dans le courant du féminisme pro-sexe, par opposition à celui du féminisme abolitionniste qui considère

attribue à la pin-up les caractères de naïveté et d’inadvertance. C’est, par exemple, le personnage de Marilyn Monroe dans Sept ans de réflexion (1956), qui s’extasie des courants d’air de la bouche d’aération du métro sur laquelle elle met les pieds sans avoir l’air de se rendre compte que le vent dans sa robe dévoile ses jambes nues. Mais Boissonneau

Sept ans de réflexion de Billy Wilder (1956)

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© SWASHBUCKLER FILMS / 20TH CENTURY FOX

BOBINES

que la prostitution ou la pornographie oppressent systématiquement les femmes. Cette figure de « fille facile » se situe dans une lignée de représentations sur les écrans que d’aucuns jugent asservies aux fantasmes sexistes, quand des féministes pro-sexe ont justement tôt fait d’insister sur leur possibilité d’empowerment.


Une fille facile de Rebecca Zlotowski (2019)

Faster, Pussycat! Kill! Kill! de Russ Meyer (1965)

© FILMS SANS FRONTIÈRES

insiste sur le fait que la pin-up, c’est avant tout un rôle ; et que cette performance, qui constitue une position contrôlée de mise en scène de soi, dénote d’un plaisir dénué de complexe à se présenter comme objet du regard et du désir, tout en restant bien sujet. Dans le délirant Barbarella (1968) de Roger Vadim, Jane Fonda s’épanouit à la fois dans le statut de sex-symbol (elle s’effeuille dès le générique d’ouverture pour enlever sa combinaison spatiale) et dans celui d’icône féministe (elle explore la galaxie et ses désirs sexuels avec le même appétit), quand Tura

Se présenter comme objet du désir tout en restant bien sujet. Satana dans Faster, Pussycat! Kill! Kill! (1965) de Russ Meyer joue de ses charmes avec brutalité et sans empathie. Dans le registre de l’exagération, leur jeu verse dans une autoparodie qui démontre autant la construction du genre que la propension de ces actrices à s’amuser de ces codes de la féminité exacerbée. Malheureusement, dans beaucoup de cas, dès qu’un personnage féminin de cinéma s’assume en tant qu’objet de fantasmes, il est sanctionné moralement, voire physiquement. C’est le cas de manière flagrante avec les scream queens, ces femmes sexy qui crient parce qu’elles sont pourchassées par des monstres ou des tueurs en série dans les films d’horreur. Boissonneau cite celles de Souviens-toi… l’été dernier (Jim Gillespie, 1998) et de La Maison de cire (Jaume Collet-Serra, 2005), qui connaissent un destin funeste : les cheveux arrachés ou avec un pieu dans le front.

UN DÉSIR À SOI

Parce que le concept est lié à la sexualité dans son appellation même (slut signifie « salope », « fille facile » ; shaming renvoie à l’action d’humilier), le slut-shaming 33

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© JULIAN TORRES / LES FILMS VELVET

DÉCRYPTAGE


© STARZ

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Now Apocalypse de Gregg Araki et Karley Sciortino (2019)

Ces réalisatrices ou ces actrices clament le fait qu’elles jouissent avant tout pour elles. à l’écran peut apparaître encore plus violent une fois passée la frontière du X. Le phénomène du revenge porn, qui consiste à diffuser publiquement, sans son consentement, un contenu à caractère sexuel mettant en scène un(e) ex-partenaire (le plus souvent une femme) dans le but de le ou de la ridiculiser, le prouve bien. C’est contre cette dépossession de sa propre image et de ses désirs que Karley Sciortino, blogueuse sexe et cocréatrice avec Gregg Araki de la série Now Apocalypse (2019), a construit le personnage de Carly, camgirl à temps partiel (elle se dévêt et accomplit toutes sortes d’actes affriolants devant sa webcam pour des hommes qui la payent) qui acquiert une véritable confiance en elle et dans sa propre sexualité à travers cette activité. En mai dernier, Sciortino nous confiait : « Il y a toujours quelque chose de transgressif, de mystérieux et d’un peu provocateur dans le fait d’être une “salope”, mais la transgression peut être positive. Si on arrive à se réapproprier ce mot, son pouvoir de nuisance sur les femmes sera réduit. » Dans ce même courant prosexe, on note l’émergence dès les années 1970 d’un porno féministe et queer, aujourd’hui représenté par des réalisatrices comme Erika Lust, Courtney Trouble, ou encore Jennifer

Lyon Bell. Celles-ci s’élèvent contre le préjugé qui fait de la pornographie un genre asservissant par essence les femmes. D’autres points de vue que celui des mâles blancs hétéros (femmes, personnes trans, racisées ou non binaires), d’autres représentations moins normées (des hommes se faisant pénétrer par des femmes, des orgasmes sans pénétration, des digues dentaires ou des préservatifs féminins érotisés…) y sont affirmés, en même temps qu’un souci d’éthique. Le sexe protégé, le consentement, des rémunérations décentes y sont des conditions sine qua non, et l’on s’oppose à toute forme d’objectivation. Ces réalisatrices ou ces actrices clament le fait qu’elles jouissent avant tout pour elles. Ce n’est pas autre chose que dépeint Zlotowski dans une scène de sexe d’Une fille facile. Sur le bateau, par la porte entrouverte, Naïma tombe sur sa cousine Sofia à qui un homme riche, qui la rémunère indirectement sous forme de cadeaux, fait longuement un cunnilingus qui semble lui donner beaucoup de plaisir à elle. Son corps, Sofia le contrôle et lui fait lâcher prise en même temps. À sa jeune cousine à laquelle elle adresse un regard complice, elle donne les armes pour s’épanouir pleinement. • QUENTIN GROSSET & TIMÉ ZOPPÉ

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SAÏD BEN SAÏD ET MICHEL MERKT PRÉSENTENT

« ISABELLE HUPPERT EST IMPÉRIALE » LES INROCKUPTIBLES « L’UN DE SES FILMS LES PLUS ÉMOUVANTS » LE MONDE « BOULEVERSANTE » TÉLÉRAMA

ISABELLE HUPPERT

© 2018 SBS PRODUCTIONS / O SOM E A FÚRIA

réalisé par

BRENDAN GLEESON MARISA TOMEI JÉRÉMIE RENIER PASCAL GREGGORY VINETTE ROBINSON ARIYON BAKARE CARLOTO COTTA SENNIA NANUA et GREG KINNEAR écrit par MAURICIO ZACHARIAS & IRA SACHS

AU CINÉMA LE 28 AOÛT

IRA SACHS


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BOBINES

VA-ET-VIENT

C’est l’été à Cannes. Entre la plage, les yachts et l’appartement familial, Sofia (Zahia Dehar) prend sous son aile sa cousine Naïma (Mina Farid), illuminant un récit initiatique plus complexe qu’il n’y paraît.

Parvenue

à séduire le propriétaire fortuné d’un yacht, Sofia se dirige vers les cabines en contrebas sous le regard de Naïma, sa jeune cousine. Elle descend les escaliers puis s’exclame : « Je ne savais pas qu’il y avait un étage en bas ! » Si la réplique sonne comme une blague, elle reflète l’aisance de Sofia à pouvoir passer, sans complexe, d’une strate sociale à une autre. Figure libertaire à la sensualité débordante, Sofia mène la mise en scène de ce film rythmé par son goût pour les va-et-vient. Ceux-ci ne sont d’ailleurs pas ceux que l’on croit, car de sexe il est peu question dans Une fille facile. C’est que la « facilité » dont jouit Sofia se rapporte plutôt à son hédonisme en mouvement, se fondant à l’envi partout où elle le désire. Multipliant les allers-retours entre le haut et le bas, le dedans et le dehors, sans jamais que la topographie de son film ne s’avère totalement figée, Rebecca Zlotowski (Grand central, Planétarium) trouve dans les alentours escarpés de Cannes un terrain de jeu idéal. Des yachts s’entassent en

bas d’un port quand de petits appartements forment des nids d’aigles où l’on peut se couper du monde ; un carré V.I.P. est surélevé en boîte de nuit quand les cabines privées se terrent au-dessous des bateaux ; on grimpe vers une villa surplombant la Méditerranée puis l’on en redescend aussitôt. Aux côtés de cette « fille facile », difficile de distinguer les classes les unes des autres : Sofia s’y meut trop aisément, elle trouble les lignes. Le récit initiatique de sa cousine tient donc en ce qu’elle finit par emprunter ces circulations. Au début du film, Naïma regarde sa mère prendre le funiculaire du bas en haut d’une luxueuse résidence de vacances dans laquelle elle travaille. Plus tard, la jeune fille l’emprunte à son tour dans le sens inverse, vers le restaurant où elle s’apprête à dîner avec de riches vacanciers. Rien de définitif : il fallait simplement que Naïma goûte elle aussi à l’indolence du luxe avant de choisir sa propre voie. Soit descendre d’un étage pour mieux remonter la pente. • CORENTIN LÊ

Rebecca Zlotowski trouve dans les alentours escarpés de Cannes un terrain de jeu idéal.

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©CARACTÈRES CRÉDITS NON CONTRACTUELS

Elles donnent des couleurs à la comédie

21 AOÛT


BOBINES

INTERVIEW

LES LUMIÈRES DE LA VILLE

Irina Lubtchansky et Arnaud Desplechin

Après l’ardent Trois souvenirs de ma jeunesse (2014) et le tourmenté Les Fantômes d’Ismaël (2017), Arnaud Desplechin et la chef opératrice Irina Lubtchansky (qui a aussi collaboré avec Jacques Rivette ou Louis Garrel) se retrouvent avec le film noir Roubaix. Une lumière, qui sonde l’humanité de deux amantes soupçonnées de meurtre campées par Léa Seydoux et Sara Forestier. Le tandem offre un éclairage aussi social que romanesque sur cette ville du Nord, dans laquelle le cinéaste a vécu sa prime jeunesse. On les a réunis pour évoquer la cinégénie de cette cité toujours insaisissable. 38


Que vous inspire la lumière du nord de la France ? Irina Lubtchansky : On l’a travaillée différemment sur chacun de nos films. Là, nous étions en hiver, mais on a quand même choisi des tons chauds, avec des vapeurs de sodium issues des lampadaires, plutôt que du mercure [qui donne une lumière bleutée, ndlr]. C’est vraiment une lumière de film noir. Arnaud Desplechin : C’est important de le dire, car le film est souvent décrit comme appartenant au genre du film policier – film noir me paraît plus juste. Il y a un désir d’embrasser plus large que le seul récit policier, de d’abord faire le portrait de Roubaix, de nuit comme de jour. Peu à peu, on se resserre sur deux personnages, Claude et Marie [respectivement Léa Seydoux et Sara Forestier, ndlr]. Quand on commence à se concentrer sur ces deux visages, le film va plus loin, on pénètre le mystère des âmes. Les visages et les gros plans des films de Carl Theodor Dreyer ont été très importants pour ce film. I. L. : Claude et Marie sont filmées avec beaucoup moins de contraste que les autres personnages. J’ai l’impression que les scènes d’interrogatoire sont celles où l’on rentre le plus dans leur âme ; on s’approche d’elles doucement avec des travellings et des zooms, en légère plongée ou pas, et ça donne un côté très touchant. La question de cinéma sous-tendue par le film serait donc : que veut dire filmer un visage ? A. D. : Oui, et à ce propos je parlerais d’une scène qui me touche beaucoup

photographiquement. Marie est interrogée : la lumière décroît tandis que Daoud [le chef de la police de Roubaix, incarné par Roschdy Zem, ndlr] est penché tel un père qui écoute la confession d’un enfant qui a fait une bêtise. Un étage au-dessus, Claude résiste à Louis [nouveau venu au commissariat campé par Antoine Reinartz, ndlr] et clame son innocence. On a filmé cette persistance à être ce qu’elle dit être, et donc cette persistance dans la lumière. Cette attention au visage du personnage et de l’actrice qui l’interprète, c’est la raison pour laquelle je travaille avec Irina. Dans Trois souvenirs de ma jeunesse, vous filmiez des peaux juvéniles, veloutées, rosées. Dans Roubaix. Une lumière, les peaux des personnages prennent des tons plus ternes, voire blafards. I. L. : On est dans le registre du film noir, donc c’est moins solaire. Comme il fallait quand même qu’on puisse voir ces filles, on avait besoin d’être chirurgical. Cela dit, on a tenu à une certaine douceur. La tension entre film noir et film social se retrouve dans la lumière. Comment avez-vous travaillé ces glissements, cet équilibre ? A. D. : C’est difficile à dire, mais c’est comme cela que j’ai pensé le film à l’écriture. Je voulais faire le portrait d’une institution, un peu comme Frederick Wiseman dans Welfare [documentaire sorti en 1975 qui ausculte un bureau d’aide sociale new-yorkais, ndlr], qui croiserait le trajet de femmes vivant à Roubaix, à la manière des Dardenne. Mais étant donné qu’on filmait la vie des policiers dans un commissariat, c’est aussi devenu un film de genre. Là, on s’est éloignés du film strictement social pour revenir au cinéaste

Léa Seydoux et Roschdy Zem

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BOBINES

DESPLECHIN X LUBTCHANSKY


BOBINES

INTERVIEW de mes années de formation : Sidney Lumet. On embrassait une matière sociétale avec une légère torsion, en essayant d’ajouter une excitation, un suspense visuel dans chaque scène. I. L. : Je connais Arnaud et je savais qu’avec lui on irait au-delà du simple récit de fait divers. Mais je n’ai pas vraiment visualisé la lumière en lisant le scénario. C’est plutôt en découvrant les décors que tout s’est joué. A. D. : J’ai assez peu de mots au sujet de la lumière. Je ne fais pas de dossier avec des peintures, des images, comme d’autres réalisateurs. En revanche, j’ai un engagement viscéral : celui de travailler en décors naturels. Tant qu’on ne sait pas où ils se trouvent, je ne sais ni comment les personnages se déplacent ni ce que la scène veut dire. Louis et Daoud n’ont pas du tout la même manière d’interroger, de regarder les suspects. Vous les avez éclairés différemment ? A. D. : Ce ne serait pas juste, car cela reviendrait à juger un personnage, à dire à l’avance au spectateur s’il a tort ou pas. Il faut que celui-ci se débrouille avec l’incapacité du personnage, ses dons, son absence de don, sa grâce ou son absence de grâce. Il faut l’accepter. Il y a des directeurs de la photographie qui font un cadre et qui après éclairent l’image. Irina crée la lumière d’un espace avant le cadre. Cela influe sur le rapport qu’on peut avoir avec les personnages. Le cadre de Claude dans sa cellule, il vient par exemple de la lumière orangée qu’Irina m’a offerte. Cette image restera gravée en moi.

Dans le film, Roubaix reste insaisissable. On traverse beaucoup d’espaces, mais la géographie est obscure, incertaine. Vous l’avez pensée comme un espace mental, avec des zones confuses ? A. D. : Plutôt comme un espace mental que comme un espace géographique, en effet. Dans la scène où Daoud montre à Louis les environs de Roubaix depuis le toit d’un hôtel la nuit, tout ce qu’il dit est géographiquement exact, mais on ne voit rien car on est dans sa tête. On devine seulement l’espace. Il y a cependant des passages dans des lieux bien définis, comme le parc Barbieux, que l’on filme pour la troisième fois. Dans les films que vous avez tournés ensemble à Roubaix, il y a beaucoup d’espaces en ruine, un peu escarpés et désolés. À quoi ça tient ? A. D. : C’est le Roubaix dans lequel j’ai grandi, celui que j’ai aimé. Ces paysages de brique, cette façon de ne pas rejeter la pauvreté mais de l’embrasser et de l’accepter, d’y trouver de la beauté et de la gloire, ce sont des choses qui m’ont marqué et qui continuent de me travailler. La lumière porte-t-elle toujours une symbolique dans vos films ? A. D. : Ce n’est que ça ! J’ai envie de parler d’une séquence en particulier, une scène en voiture à la fin du film. Cette scène n’était composée que d’une seule didascalie qui disait que Claude et Marie sont dans un fourgon et qu’elles vont vers la prison. Il n’y avait rien d’autre. J’ai eu la chance de faire la veille un rêve très précis : à la fin

Léa Seydoux et Sara Forestier

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DESPLECHIN X LUBTCHANSKY

« Cette attention au visage du personnage, c’est la raison pour laquelle je travaille avec Irina. » ARNAUD DESPLECHIN et voilà que le film suivant s’appelle carrément Roubaix. Une lumière. J’y reviens sans cesse. I. L. : Roubaix est une ville très cinégénique. A. D. : En effet, et il me reste le tramway. Je n’ai pas encore réussi à le filmer, alors que c’est une part importante de ma vie. On l’empruntait pour aller au cinéma. Je pense au tramway de Prague, à celui des films d’espionnage. C’est un beau moyen de transport, le tramway. Comme le train, il invite à la fiction.

du « Paradis » , Dante arrive chez les morts. Il voit Béatrice, la femme aimée, échange avec elle un dernier regard, puis elle bat du cil. Je me suis réveillé en me disant : aujourd’hui on va filmer le battement de cil de Béatrice. Et on l’a eu ! Marie s’endort, paisiblement, comme après la guerre. Claude est derrière, cachée entre deux sièges. Tout à coup, il y a ce regard entre elles, le soleil monte de manière aberrante alors que la lumière changeait aléatoirement d’une rue à une autre, et il y a un dernier battement de cil. C’était un miracle photographique insensé à filmer. Sans ce miracle, la scène n’aurait pas de sens.

• PROPOS RECUEILLIS PAR QUENTIN GROSSET

& CORENTIN LÊ — PHOTOGRAPHIE : PALOMA PINEDA

— : « Roubaix. Une lumière »

Pensez-vous filmer de nouveau Roubaix à l’avenir ? A. D. : J’ai l’impression d’en avoir fait le tour, mais depuis mon premier film, La Vie des morts [1991, ndlr], je dis que c’est la dernière fois que je tourne à Roubaix. J’ai perdu toute crédibilité ! Je pensais avoir tout dit de Roubaix après Les Fantômes d’Ismaël,

d’Arnaud Desplechin, Le Pacte (1 h 59), sortie le 21 août

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BOBINES

Roschdy Zem et Antoine Reinartz


CRITIQUE

BOBINES

AU BOUT DU TUNNEL

Avec Roubaix. Une lumière, en Compétition officielle à Cannes en mai, l’auteur d’Un conte de Noël signe un polar social incandescent, inspiré de faits réels, et confirme qu’il est l’un de nos plus grands directeurs d’acteurs.

Arnaud

Desplechin est un sculpteur de fictions qui part des matériaux les plus divers (sa vie, une pièce de théâtre, un essai d’anthropologie ou même ses propres films) pour construire des récits cinématographiques qui happent le spectateur. Après les dédales et tourbillons des Fantômes d’Ismaël, il change totalement d’échelle et de rythme avec ce film qui présente l’originalité d’être largement inspiré par un documentaire, Roubaix, commissariat central. Affaires courantes de Mosco Boucault, diffusé à la télévision en 2008. Nous voici plongés dans le quotidien d’un commissariat, lieu qui concentre les maux d’une société, sa misère et sa violence. La première partie du film expose de façon fragmentaire de douloureuses affaires (viol, disparition…) traitées par le commissaire Daoud (Roschdy Zem, impérial) et le petit nouveau, le capitaine Coterelle (Antoine Reinartz, remarquable). La seconde se concentre sur deux jeunes femmes à la dérive, Claude et Marie (Léa Seydoux et

Sara Forestier, stupéfiantes), accusées du meurtre d’une vieille dame. Beau et éloquent, le titre résume parfaitement le film. Il y a donc Roubaix, le vrai Roubaix, la terrible réalité à laquelle sont confrontés les flics. Il y a la description précise, captivante du travail des policiers, de leur langage, sur le terrain et lors des interrogatoires. Et puis il y a la lumière, celle qui vient d’on ne sait où, qui nous transperce. La lumière est-elle du côté de Daoud, personnage phare du film, mi-psy mi-médium, mystérieux et flegmatique (« J’aime pas m’énerver, ça m’irrite. ») ? Mais ne jaillit-elle pas aussi de l’amour puissant et destructeur qui unit Claude et Marie, notamment lors de l’extraordinaire scène de confrontation de leur témoignage ? Réalisme social et élans passionnels, diagnostic chirurgical et envolées musicales (encore une belle partition de Grégoire Hetzel) : en faisant feu de tout bois, Arnaud Desplechin signe une œuvre pleine d’humanité sur de grands brûlés de la vie. • JULIEN DOKHAN

Et puis il y a la lumière, qui vient d’on ne sait où, qui nous transperce.

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LE MARIAGE DE

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MICHELA OCCHIPINTI

UN FILM DE MICHELA OCCHIPINTI HISTOIRE ET SCÉNARIO MICHELA OCCHIPINTI SIMONA COPPINI AVEC VERIDA BEITTA AHMED DEICHE AMAL SAAB BOUH OUMAR AICHETOU ABDALLAHI NAJIM SIDI MOHAMED CHIGHALY PRODUIT PAR MARTA DONZELLI ET GREGORIO PAONESSA DIRECTION DE LA PHOTOGRAPHIE DARIA D’ANTONIO MONTAGE CRISTIANO TRAVAGLIOLI MUSIQUE ORIGINALE ALEX BRAGA SON LAVINIA BURCHERI DIRECTION DE PRODUCTION LIVIA BARBIERI PRODUCTION EXÉCUTIVE ALEX BRAGA ALESSIO LAZZARESCHI PRODUCTION DÉLÉGUÉE SERENA ALFIERI 1ER ASSISTANT RÉALISATION FRANCESCA SCANU MONTAGE SON SILVIA MORAES MIRKO PERRI MATTIA PERSICO MIXAGE MICHELE MAZZUCCO UNE PRODUCTION VIVO FILM AVEC RAI CINEMA EN COLLABORATION AVEC FILMS BOUTIQUE ET KMBO SOUTENU PAR LE MINISTERO PER I BENI E LE ATTIVITÀ CULTURALI – DIREZIONE GENERALE CINEMA AVEC LE SOUTIEN DE REGIONE LAZIO ROMA LAZIO FILM COMMISSION DÉVELOPPÉ AVEC LE SOUTIEN DE CREATIVE EUROPE PROGRAMME – MEDIA OF THE EUROPEAN UNION

AU CINÉMA LE 4 SEPTEMBRE


MOTS CROISÉS

L’INTRANQUILLE Sintra, là-bas ! Glorieux éden, séjour céleste / Suivi sans fin de monts et de vallons / Mais quelle main saurait peindre ou décrire / Une moitié de ce que l’œil admire ? Le Pèlerinage de Childe Harold de Lord Byron (1812-1818)

Le réalisateur Ira Sachs (Keep the Lights on, Love Is Strange) était en Compétition à Cannes cette année avec Frankie, l’histoire d’une actrice (Isabelle Huppert, dans une composition très intimiste) atteinte d’un cancer qui réunit sa famille une toute dernière fois à Sintra, une station balnéaire portugaise connue pour ses miracles. On est toujours emportés par la sérénité et la délicatesse avec lesquelles Sachs traite des épreuves les plus douloureuses. On l’a donc fait réagir à des citations qui résonnent fort avec ce film inquiet mais lumineux.

Je me suis rendu pour la première fois à Sintra en 1979, pour y passer des vacances avec ma mère et mes deux sœurs. J’étais un adolescent qui découvrait la vie. J’y suis revenu sept ans plus tard, avec mon coscénariste Mauricio Zacharias. Il faut être patient pour toucher à la beauté de Sintra, il y a tellement de monde. C’est un peu cliché de le dire, mais il faut du temps pour vraiment découvrir ce que recèle un lieu. C’est intéressant parce qu’aucun personnage du film ne prête vraiment attention à Sintra, ils n’ont pas de lien personnel fort avec l’environnement. C’est parce que c’est avant tout un film de voyage : chacun s’autorise à être une version différente de lui-même, ils sont presque sur une scène de théâtre. J’ai pensé le film comme une performance. C’est autant un film sur Frankie face à sa mort prochaine qu’un documentaire sur Isabelle Huppert face à ce personnage.

Ma mise en scène est très spontanée, aléatoire et dictée par les circonstances, le décor et les acteurs. Par le possible, pour donner un terme plus générique. Éric Rohmer, entretien paru dans Les Inrockuptibles, 1996 C’est drôle que Rohmer ait dit ça parce que, sous son apparente légèreté, sa mise en scène, que j’ai beaucoup étudiée, est extrêmement pensée. Mon directeur de la photo Rui Poças et moi sommes très inspirés par ses films, particulièrement ceux dont la photo est signée Néstor Almendros [La Collectionneuse, Le Genou de Claire 44


IRA SACHS ou encore Pauline à la Plage, ndlr]. Leurs images ont une vraie sensualité, une compréhension du plaisir visuel lié aux corps et aux couleurs. Et aussi un sens chorégraphique inouï. Mais Rohmer avait du temps pour préparer le tournage de ses séquences ; nous, nous n’avions que trois semaines pour tourner. Il fallait donc beaucoup planifier. En revanche, je n’organise pas de répétitions avec les acteurs. Je leur donne le texte pour les guider, mais je souhaite préserver leur improvisation émotionnelle. En général, il y a toujours quelque chose d’inattendu qui survient.

l’invisible. Le film part ainsi d’instants que j’ai vécus personnellement qui ont bouleversé l’idée que j’avais de la mort. J’ai vu une amie très proche mourir d’un cancer, et j’ai été très présent dans les trois dernières années de sa vie. Ce qui m’a frappé, c’est qu’il y a de la vie jusque dans les derniers moments : de l’humour, de l’amour, du sexe. Le film parle de cette variété inattendue d’expériences.

Mon travail consiste à trouver des liens entre les peuples, entre les personnes, à trouver les points communs, les ressemblances entre les êtres humains. La tragédie a alors la même signification pour tous.

Nous vivons à une époque où l’artiste est oublié. Il est un chercheur. Je me vois comme ça. David Hockney, entretien

Abbas Kiarostami, entretien paru dans

paru dans The Observer, 1991 Cette citation sur l’artiste comme explorateur me fait penser à Isabelle Huppert. Je pense que la chose la plus importante pour elle, c’est d’être dans l’action, de prendre en charge une vraie part du processus de création des films. Elle a un rapport à la fois vorace et sincère à la culture, au cinéma, à la musique, au théâtre… Peut-être que ma position en tant que cinéaste est la même : ce que je regarde, je veux le comprendre. Or le film traite de cette difficulté de comprendre quelqu’un qui, comme une icône inaccessible, vous met sans cesse à distance. Je me pose une question : le film peut-il révéler cette part cachée et inconsciente du personnage de Frankie ? J’ai en tout cas demandé à Isabelle d’autoriser le public à la connaître, d’être aussi simple et transparente que possible, d’essayer de ne pas se cacher derrière sa technique.

J’envisage cette recherche dont parle Kiarostami à travers ce qui est spécifique, et non universel. En tant que cinéaste, j’essaye d’être le moins général possible, d’être attentif aux différences. C’est notamment pour cela que je voulais faire un film au Portugal, parce que je n’en connais presque rien. L’universalité de votre propos, elle apparaît d’abord parce que vous êtes un bon artiste. C’est pour cela que je me bats pour un cinéma très personnel. Parce que dans un monde globalisé l’individualité se perd, l’émotion devient générique.

• PROPOS RECUEILLIS PAR QUENTIN GROSSET PHOTOGRAPHIE : JULIEN LIÉNARD — : « Frankie » d’Ira Sachs,

SBS (1 h 38), sortie le 28 août

La vie est ce que nous en faisons. Les voyages ce sont les voyageurs eux-mêmes. Ce que nous voyons n’est pas fait de ce que nous voyons mais de ce que nous sommes. Le Livre de l’intranquillité de Fernando Pessoa (1982) J’aurais pu mettre cette citation en épigraphe du film. C’est une vraie chance de pouvoir regarder la vie avec d’autres perspectives que la sienne, et pour moi c’est ce que font les cinéastes. Ils sont le pont entre le visible et 45

BOBINES

L’Humanité, 2004


INTERVIEW

BOBINES

RETOUR VERS LE FUTUR

Un teen movie lynchéen réalisé à 25 ans (Donnie Darko, 2002, qui ressort en salles dans deux versions, dont le director’s cut inédit de 2004), une fresque d’anticipation délirante (Southland Tales, 2006, inédit en salles en France), un conte de science-fiction cruel (The Box, 2009), et puis… plus rien. Richard Kelly avait tout pour devenir un grand auteur populaire, mais le destin en a décidé autrement. Mal compris par la critique et l’industrie, ses trop rares films n’en ont pas moins imprégné l’inconscient collectif. On a fait le point avec l’Américain sur son étrange carrière, placée sous le signe du voyage dans le temps. 46


Je préfère penser le contraire. Bien sûr, j’aurais adoré que ce soit un carton immédiat – c’est ce que je souhaite pour tous mes films –, mais, quand un long métrage met quatre ou cinq ans à trouver son public, la récompense me semble encore plus belle. Ça veut dire qu’il est apprécié pour ses qualités propres. Donnie Darko doit son succès au bon vieux bouche à oreille. C’est quand même ironique qu’un film qui parle de voyage dans le temps vous oblige à vous replonger sans cesse dans votre passé… Oui, mais c’est un exercice intéressant. L’histoire se déroule en 1988, l’année où George Bush a succédé à Ronald Reagan. Une période plutôt innocente comparée à ce qu’on vit aujourd’hui sous le mandat de Donald Trump. Je pense que le film résonne différemment, peut-être mieux, dans cette période de grande tension et de crise culturelle. Là où Donnie Darko était clairement en avance, c’est sur le revival eighties qu’on connaît depuis quelque temps… Je repense souvent aux discussions que j’avais en l’an 2000 avec les financiers. « Pourquoi ton histoire se passe en 1988 ? Ça n’intéresse personne. Il faut parler du monde actuel ! » Ils ne comprenaient pas mon attrait pour cette époque, ni la tonalité nostalgique que je voulais insuffler au film. En même temps, imaginez si je devais vendre une idée similaire en 2019 : « Alors, c’est un film d’époque qui se déroule en 2008… » En effet. Mais attendez, ce film existe déjà : c’est Southland Tales ! Celui-ci est moins un film culte qu’un film maudit : hué lors de sa présentation en Compétition à Cannes en 2006, démoli par la majorité des critiques, presque pas distribué en dehors des États-Unis… C’est aussi celui que je chéris le plus. En mai dernier, on a ressorti des cartons la version cannoise [qui durait 2 h 40, contre 2 h 24 pour

celle sortie en salles aux États-Unis, ndlr] et on l’a projetée devant une foule immense au Los Angeles County Museum of Art. Même si les effets spéciaux sont restés à l’état d’ébauche, j’ai été soufflé par l’enthousiasme du public. Rien à voir avec cette horrible projection cannoise de 2006 ! Les réactions ont été vraiment brutales… Je pense que les gens n’étaient pas prêts pour un film aussi étrange, avec sa construction kaléidoscopique, son casting de figures pop [on y trouve notamment Sarah Michelle Gellar et Justin Timberlake, ndlr] et son mélange d’humour et de politique. Les producteurs ne savaient pas quoi en faire. Avant même la projection, j’entendais murmurer dans les couloirs que ça allait être un désastre. Ce film aussi résonne différemment depuis que Trump est au pouvoir. C’est presque comme si l’Amérique s’était modelée à son image. Il faut se remettre dans le contexte post-11-Septembre dans lequel est né le scénario. À l’époque, je vivais à Venice Beach. Quand mon colocataire m’a annoncé qu’un avion s’était écrasé sur le World Trade Center, j’ai cru que la Troisième Guerre mondiale venait de commencer. Et je me suis mis à en imaginer les conséquences : dictature, État policier, crise de l’énergie, terrorisme Internet… L’obsession pour la célébrité prenait déjà des proportions inquiétantes – c’était l’époque de Paris Hilton, de Britney Spears, des débuts médiatiques de Kim Kardashian. Pourtant, même dans mes pires délires, je n’aurais pas osé imaginer que Trump deviendrait président. Si je pouvais voyager dans le temps pour m’informer de ce qui va advenir, mon moi de 2006 dirait à mon moi de 2019 d’aller se faire foutre. Le voyage dans le temps est à la fois un motif de votre carrière et l’une de vos thématiques favorites. D’où vient cette obsession ? C’est la seule chose que l’être humain ne peut pas faire. On a marché sur la lune,

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Jake Gyllenhaal et Richard Kelly sur le tournage de Donnie Darko

© PANDORA INC

Donnie Darko a été un échec en salles, mais est depuis devenu culte. Vous voyez ce statut comme une malédiction ?

BOBINES

RICHARD KELLY


BOBINES

« Donnie Darko doit son succès au bon vieux bouche à oreille. »

© PANDORA INC

INTERVIEW

Donnie Darko (2002)

on envoie des robots sur Mars, on finira par envoyer des gens sur d’autres planètes… toutes ces évolutions sont à peu près garanties. Mais est-ce qu’on va un jour voyager dans le temps ? Je ne crois pas. Pour moi, c’est le plus tentant des mystères, parce que, si ça devenait une réalité, toutes nos règles seraient réécrites. Vous semblez avoir du mal à laisser vos films derrière vous. Quand vous ne les remontez pas, vous prolongez leur univers, en publiant un livre après Donnie Darko ou une série de romans graphiques autour de Southland Tales… J’ai toujours considéré Southland Tales comme un projet beaucoup plus vaste, qui pourrait donner lieu à de multiples suites et prequels. Certaines œuvres ont vocation à s’étendre, et le contexte actuel est favorable à cela. Vous avez vu la nouvelle version des Huit Salopards que Quentin Tarantino a montée pour Netflix ? C’est une minisérie en quatre chapitres, avec plus de quarante minutes inédites. Et c’est encore mieux que le film original. Avec l’avènement du streaming, on est entré dans une ère de formes longues. La frontière entre cinéma et télévision est très poreuse, et nos habitudes de spectateurs évoluent à toute allure. Les gens ont du mal à rester assis dans un cinéma pendant deux heures sans pouvoir consulter leur portable. Notre capacité d’attention se réduit de plus en plus. Vous entretenez un rapport compliqué avec l’industrie. Vos films nécessitent de gros budgets qui n’existent qu’à Hollywood, mais en même temps vous faites un cinéma d’auteur complexe. J’aimerais trouver le moyen de réduire l’échelle de mes films, mais ça va à l’encontre

de ma conception du cinéma. J’ai grandi avec les blockbusters de Steven Spielberg, de George Lucas, de Ridley Scott et de Robert Zemeckis. J’aime les grands décors, les grands studios, le grand spectacle conçu pour le grand écran. Les occasions de réaliser des films n’ont pas manqué depuis The Box, mais j’ai préféré rester sélectif et peaufiner mon écriture. Pour citer le poète Robert Frost, ou son homonyme imaginaire, le sénateur Bobby Frost de Southland Tales : « I have […] miles to go before I sleep, and miles to go before I sleep. » [« J’ai beaucoup de chemin à parcourir avant de me reposer », ndlr]. On peut donc s’attendre à de nombreux films signés Richard Kelly dans les prochaines années ? C’est mon vœu le plus cher. Mais vous n’êtes pas autorisé à m’en parler. Malheureusement non. Tout ce que je peux vous dire, c’est que les feux sont à l’orange. Si ça se trouve, pendant qu’on parle, j’ai reçu un message de mon agent et je vais devoir rentrer à Los Angeles sur le champ. En attendant, je dois garder la tête froide. Rien n’est plus imprévisible que l’industrie du cinéma.

• PROPOS RECUEILLIS PAR MICHAËL PATIN PHOTOGRAPHIE : JAMES WESTON — : « Donnie Darko » de Richard Kelly, Carlotta Films (1 h 53 | 2 h 14 pour le director’s cut), ressortie le 24 juillet

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DÉCRYPTAGE

FIN DE RÈGNE

Attendu comme une petite bombe de cool, Once Upon a Time… in Hollywood de Quentin Tarantino risque bien de dérouter les estivants spectateurs venus chercher le frais en salles. Et tant mieux. Le dixième film du réalisateur d’Inglorious Basterds et de Kill Bill est une élégie mélancolique et morbide sur la fin de Hollywood – et du cinéma ? – dans les ruines de l’âge d’or, en 1969. On en décrypte ici les symboles, pour mieux cerner ce qui se jouait cette année-là.

En

1967, Warren Beatty et Arthur Penn présentent au célèbre magnat hollywoodien Jack Warner leur Bonnie and Clyde, tout juste terminé. « Mais qu’est-ce que c’est que ce bordel ?! » s’exclame le patron à la fin de la projection. Embarrassé, Beatty tente de justifier la radicalité nouvelle de ce film de gangsters apathique et politique : « C’est un hommage au film de gangsters des

années 1930 de la Warner. » Ç’en est trop pour le producteur : « Un hommage ? Mais putain, si t’appelles ça un hommage, fourre d’urgence ton nez dans le dictionnaire ! » Cette anecdote, citée par Peter Biskind en ouverture de son livre* consacré au renouveau du cinéma américain dans les années 1970, saisit toute la tension de la fin des sixties à Hollywood. Une période charnière qui voit s’affronter 50


ONCE UPON A TIME… IN HOLLYWOOD

En 1969, Hollywood meurt et renaît à la fois. Los Angeles, là où la splendeur décrépie du cinéma d’hier côtoie les mouvements hippies et contestataires de l’époque. Un habile effet de contraste qui raconte l’époque par l’image. C’est, par exemple, une immense affiche défraîchie de Géant – l’un des derniers sommets du cinéma classique, avec James Dean – que croise une bande de jeunes filles hippies qui font de l’autostop. La ville grouillante et débordante se confond

deux visions du cinéma américain : d’un côté, une jeune génération engagée qui rêve d’un cinéma radical ; de l’autre, une ancienne génération qui s’accroche aux ruines d’un âge d’or moribond. L’histoire fera de cette nouvelle génération les vainqueurs et les artisans d’un nouvel Hollywood, une parenthèse de dix ans de cinéma furieux qui voit émerger Martin Scorsese, Francis Ford Coppola ou encore William Friedkin. Le nouveau film de Quentin Tarantino s’installe en 1969, dans ce contexte flottant où les clés de l’« usine à rêves » changent de main. Mais depuis Reservoir Dogs (1992), on le sait : Tarantino n’aime pas les vainqueurs. Once Upon a Time… n’est donc pas le récit de cette conquête, mais le portrait mélancolique de ceux que l’histoire et Hollywood ont oubliés.

CRÉPUSCULE DES LOSEURS

Nous sommes en 1969 et Rick Dalton (Leonardo DiCaprio) – héros d’un piteux western télévisuel comme on en produisait beaucoup à l’époque – rêve d’être une star

Leonardo DiCaprio et Brad Pitt

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BOBINES

de cinéma à l’ancienne. Tarantino nous glisse dans les pas de cet acteur lambda cabossé par l’alcool et les regrets pour saisir la charnière entre les deux Hollywood. Les affiches de cinéma « bigger than life » qui parsèment la villa de Rick contrastent avec le noir et blanc réducteur du petit écran sur lequel il joue les cow-boys pathétiques. Rick rêve de cinéma énorme, de films dans lesquels on dégomme des nazis au lance-flammes, de héros dominants dont la virilité éclate à l’écran. Mais l’Amérique, en 1969, se passionne elle pour les outsiders d’Easy Rider, les cow-boys fatigués de La Horde sauvage ou les hommes perdus de Macadam Cowboy. Des antihéros fragiles à la masculinité en crise – caractéristique d’un changement d’ère – qui contrastent avec les fantasmes de Rick. Alors il erre, pathétique et égocentrique, dans les rues de


DÉCRYPTAGE

Tarantino utilise le charme désarmant de Brad Pitt pour faire de Cliff un guide vers les zones d’ombre de l’époque. avec les dérives de l’industrie, le cinéma se mêle au quotidien dans un crépuscule permanent. En 1969, Hollywood meurt et renaît à la fois.

BOBINES

ZONES D’OMBRE

Once Upon a Time… in Hollywood est un long métrage dans lequel personnages – et spectateurs - flânent, zigzaguent dans les rues, s’aperçoivent mais ne se rencontrent jamais vraiment. À la façon d’un film de Robert Altman (Nashville, 1975), Tarantino raconte une époque, un moment, plus qu’il ne construit une histoire. Le film ressemble en cela à une œuvre du Nouvel Hollywood. Comme si, par le montage, l’image, le rythme, Tarantino suggérait déjà la défaite de ses personnages. Ainsi, par un effet caractéristique de cette période, il déplace sans cesse le point de vue. Once Upon a Time… in Hollywood n’a en apparence pas de héros, mais de pures énergies (parfois

du désespoir) que l’on suit le long d’une journée. Si la trajectoire de Rick et son ultime tentative de rêve hollywoodien occupent une large partie du film, Tarantino y intercale deux récits, deux promenades hollywoodiennes qui racontent elles aussi quelque chose de cette fin de règne. D’abord celle de Cliff Booth (Brad Pitt), cascadeur et doublure de Rick, qui traîne sa cool attitude et son sourire narquois sur les plateaux de Hollywood. Parasite généreux, ami fidèle, revenu de tout – notamment de la guerre du Viêt Nam –, le personnage incarne une forme de désinvolture pop. Tarantino utilise le charme désarmant de Brad Pitt pour faire de Cliff un guide vers les zones d’ombre de l’époque – il amorce un questionnement sur la liberté sexuelle, mais aussi sur la survirilité toxique des mâles (l’affrontement improbable entre Cliff et un jeune Bruce Lee qui vire au combat de coqs) et les dérives à venir de la contre-culture. Ironiquement filmé comme

Brad Pitt

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ONCE UPON A TIME… IN HOLLYWOOD corps-objet, machine à punchlines, Brad Pitt incarne une forme de rêve américain goguenard, dénué d’ambition, qui se nourrit et vit des rêves de Rick. Une masse physique ambiguë, à la fois sécurisante et inquiétante, qui fait le pont vers cette autre Amérique qui naît en bordure de ville : les communautés hippies, que Tarantino filme comme des villages de western où la tranquillité semble menaçante. Il raconte ainsi toute l’ambivalence des utopies libertaires de la fin des sixties, symbolisée en cette année 1969 par le concert phénomène de Woodstock – mais aussi par la funeste célébrité du clan meurtrier de Charles Manson.

À REBOURS

Si Rick et Cliff sont des inventions, symbolisant Hollywood et son revers ainsi que l’état de l’Amérique en 1969, Tarantino confronte aussi sa fiction à l’histoire par l’intermédiaire du destin tragique de Sharon Tate. Star montante, nouvelle figure chic du cinéma hollywoodien (elle est l’une des actrices principales de La Vallée des poupées, somptueux mélo rugueux et féministe, sorti aux États-Unis en 1967), en couple avec Roman Polanski – à l’époque vu comme un réalisateur européen avant-gardiste –, elle incarne le renouveau de Hollywood. En la filmant heureuse, insouciante et passionnée, Tarantino la pose discrètement en opposition à Rick. Le jeune Hollywood qui s’épanouit juste à côté de l’ancien. Deux mondes qui se croisent mais ne se rencontrent jamais. C’est la gorge serrée que le spectateur de 2019 contemple la fausse Sharon Tate (Margot Robbie) regarder, émue, la vraie Sharon sur l’écran d’un vieux cinéma de Los Angeles. Elle y joue avec ironie les pinup espionnes face à Dean Martin dans un épisode de la saga pop Matt Helm (Matt Helm règle son comte, 1968). Le dialogue entre l’écran et la salle, la Sharon Tate jouée et la Sharon Tate joueuse, permet à Tarantino de suspendre son film quelque part entre la fiction et la réalité. Car on sait que pèse sur ce « personnage » le poids du drame à venir : le 9 août 1969, la jeune actrice, enceinte, est assassinée dans sa villa hollywoodienne par des membres de la Famille, la secte créée par Charles Manson. Un fait divers sordide qui acte, par son caractère absurde et révoltant, la bascule vers un cinéma américain désabusé, inquiet, violent. On ne dira pas ici comment Tarantino s’en empare littéralement. Dans le dernier acte du film, comme une sorte de feu d’artifice purement fantasmatique, le réalisateur fait bifurquer son histoire du cinéma vers une histoire de regrets. À l’écran, c’est joyeusement gore et

Margot Robbie

colérique. Mais la distance qui nous sépare de 1969, le chemin qui va de l’histoire à la fiction, crée un dispositif troublant qui interroge. Comme la morale d’un conte de fée qui voit les crapauds se transformer en prince et les princesses retrouver leur trône, Once Upon a Time… in Hollywood veut réordonner le monde. Si le geste frôle la nostalgie revancharde, le « c’était mieux avant » qui guette souvent Tarantino, il est sauvé, in fine, par ses conséquences imaginaires et poétiques. Car le film révèle, dans ses toutes dernières secondes, pudiques, une émotion inattendue. Comme si, avec Once Upon a Time… in Hollywood, Tarantino avait enfin saisi la dimension quasi ésotérique de son cinéma fétichiste ultra documenté, le cinéaste libère à l’écran les fantômes et les laisse vivre, sans nous, une autre vie. • RENAN CROS

— : « Once Upon a Time… in Hollywood » de Quentin Tarantino, Sony Pictures (2 h 42), sortie le 14 août

* « Le Nouvel Hollywood. Coppola, Lucas, Scorsese, Spielberg… la révolution d’une génération » de Peter Biskind (Le Cherche midi, 2002)

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MICROSCOPE

LA MANIVELLE

Comme le diable, le cinéma se loge dans les détails. Geste inattendu d’un acteur, couleur d’un décor, drapé d’une jupe sous l’effet du vent : chaque mois, de film en film, nous partons en quête de ces événements minuscules qui sont autant de brèches où s’engouffre l’émotion du spectateur. Ce mois-ci : un bruit mécanique déchirant, dans First Man. Le premier homme sur la Lune de Damien Chazelle (2018).

BOBINES

C’est

un cliquetis d’une effroyable régularité, qui fait résonner toute la tristesse du monde. Clic, clic, clic : on met en terre un enfant. First Man raconte l’histoire de Neil Armstrong et finit, bien entendu, avec lui sur la Lune. Mais c’est au cimetière, où celui-ci enterre en 1962 sa fille de 3 ans, que Chazelle loge les prémices de son film. Au plan d’avant, la petite fille malade est endormie, ses douleurs oubliées sous la caresse patiente de son père. C’est sur ce plan d’une infinie douceur qu’apparaît la sonorité métallique et cadencée, dont la source est introuvable – une montre qu’on est en train de remonter, se dit-on sans

Une montre qu’on est en train de remonter, se dit-on sans avoir tout à fait tort. avoir tout à fait tort, tant c’est l’arbitraire scandaleux du temps qui se fait entendre dans la mort d’un enfant. Le plan suivant retrouve la mère, dehors, mais le cadre est trop serré pour savoir où. Les costumes noirs nous renseignent vite, puis le plan du cercueil minuscule, et sur son bord l’ombre d’une main qui fait tourner une manivelle et éclaire enfin le bruit qui n’a pas cessé : c’est la mécanique avec laquelle on fait descendre le cercueil. Le cliquetis persiste sur le plan du père, tout serait muet s’il n’y avait ce bruit, et l’enterrement se termine. On compte sur les doigts d’une main les scènes d’enterrement vraiment justes. Citons-en quelques-unes : Husbands (John Cassavetes, 1972), Jardins de pierre

(Francis Ford Coppola, 1988), L’Arrière pays, (Jacques Nolot, 1997). Car il n’y suffit pas, bien sûr, d’aller récolter sur le visage des acteurs l’affliction des personnages. Il ne suffit pas de l’idée de la mort, il faut qu’un détail tranche pour ramasser l’émotion – chez Cassavetes c’est la petite vieille dame, courbée comme un arc, filmée de si loin, accrochée au bras de Ben Gazzara. Ici c’est le bruit de la manivelle, pudique et effroyable à la fois. L’idée est d’autant plus subtile qu’elle en porte une plus globale, qui traverse First Man en lui donnant la beauté inhabituelle (ou plutôt : devenue rare) d’un film qui se donne à entendre autant qu’à voir. Le destin d’Armstrong, ici, est d’abord affaire de bruits, tout un tapage métallique relayé d’une machine l’autre en une longue oraison de métal. Qu’on trace un trait de l’infime au sidéral, c’est le moins qu’on puisse attendre d’un film sur la conquête de l’espace. Mais Chazelle s’y emploie avec une double et étonnante audace. D’abord, s’approprier le plus positif, le plus manifest destiny des mythes américains du xx e siècle (le petit/grand pas d’Armstrong), mais pour y raconter l’histoire d’un type qui ne va sur la Lune que pour y enfouir sa tristesse et regarder en face, sur le sol gris de ce gros caillou funèbre, la mort qui lui a pris sa fille. Et le faire en cousant l’intime et les étoiles par le fil de cette symphonie concrète. Dans l’avion qui, aux toutes premières images, pousse Armstrong hors de l’atmosphère, le moindre écrou chante une complainte funèbre, on jurerait que tout va finir broyé par la tôle. Puis c’est, dans un raccord inattendu, le grincement robotique de l’énorme appareil IRM penché sur le cancer de l’enfant. Et quelques scènes plus loin, donc, la manivelle chronométrique au bord du caveau. À l’oreille, trois temps mais une seule machine, du ciel au sous-sol : la vie d’un homme, first man, chantée par la ferraille. • JÉRÔME MOMCILOVIC

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BOBINES

MICROSCOPE

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PORTFOLIO

FILS DE L’OMBRE 56


© LARRY CLARK; COURTESY OF THE ARTIST AND LUHRING AUGUSTINE, NEW YORK

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FIL NOIR

Larry Clark, Sans titre, 1963, de la série « Tulsa », collection Maison européenne de la photographie, Paris

Dans

une banlieue tranquille, une lumière spectrale émane d’un pavillon niché derrière un arbre tortueux, perçant la nuit dans une contre-allée déserte. Il ne s’agit pas d’un plan d’un film de David Lynch, mais d’une photographie de Henry Wessel, Night Walk No 5, prise en 1998, visible dans l’expo « Henry Wessel. A Dark Thread » à la Maison européenne de la photographie jusqu’au 28 août. Pour prolonger l’hommage à l’artiste américain (décédé en 2018) qui créait des échos visuels entre ses images, la MEP a monté une autre expo, « Fil noir », en sortant de ses archives cent cinquante clichés en noir et blanc d’artistes de tous horizons eux aussi influencés par le film noir. Pascal Hoël, responsable de la collection de la MEP, a décrypté pour nous une sélection d’images qui évoquent ce genre filmique explorant les recoins sombres de l’âme humaine. À vos loupes. • JOSÉPHINE LEROY & TIMÉ ZOPPÉ 57


BOBINES

PORTFOLIO

Helmut Newton, Vogue Grande-Bretagne, Londres, 1967, collection Maison européenne de la photographie, Paris « Le travail de Helmut Newton, grand photographe de mode, a été très marqué par celui des paparazzis, et en particulier par celui de Weegee, un reporter qui a photographié quantité de faits divers dans les années 1940 et 1950. Cette photo, qui est une commande du magazine Vogue, est clairement un pastiche de La Mort aux trousses d’Alfred Hitchcock. C’est rare que Newton se réfère aussi nettement à une œuvre. »

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FIL NOIR

© THE HELMUT NEWTON ESTATE / MACONOCHIE PHOTOGRAPHY

© SABINE WEISS

Sabine Weiss, Sortie de métro, Paris, 1955, collection Maison européenne de la photographie, Paris « Cette photo a été prise à Paris, en 1955. Sabine Weiss est peut-être la dernière artiste du courant de la photographie humaniste [qui comptait notamment dans ses rangs Robert Doisneau, Izis ou Brassaï, ndlr] encore vivante. Ce sont des photographes qui ont souvent été associés au réalisme politique, au cinéma de Jean Grémillon et de Marcel Carné. Dans le contexte de l’après-guerre, cette école produisait des œuvres sombres, bien qu’on ait dit de leurs travaux qu’ils étaient optimistes. En réalité, il y a beaucoup de photographies de nuit, à l’atmosphère assez noire. »

© THE ESTATE OF JOHAN VAN DER KEUKEN

Johan van der Keuken, Boulevard du Temple, Paris, 1957, collection Maison européenne de la photographie, Paris « C’est une photo du Néerlandais Johan van der Keuken, qui est devenu l’un des plus grands réalisateurs de documentaires [il a par exemple signé L’Enfant aveugle (1964) ou Amsterdam Global Village (1997), ndlr]. On est en 1957, à Paris. Il a 23 ans et il suit des cours à l’institut des hautes études cinématographiques (IDHEC). Il est marqué par la photographie humaniste et il prépare son livre Paris mortel, inspiré du livre de William Klein New York 1954-1955. Il photographie de nuit un cinéma et son reflet dans le bitume parisien, ce qui rappelle fortement les codes du film noir. »

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René Groebli, Sans titre, 1949, de la série « Magie du rail » « Le photographe suisse René Groebli, qui a plus de 90 ans maintenant, a publié en 1949 un livre qui s’intitule Magie du rail dans lequel il évoque le mouvement d’une locomotive. Ce qui l’intéressait, ce n’était pas de photographier les cheminots ou autres personnages, mais de retranscrire le mouvement dans des images fixes. Ces photographies nous ont vraiment fait penser à la scène d’ouverture du film de Jean Renoir La Bête humaine [sorti en 1938, ndlr]. On imagine bien Jean Gabin dans cette locomotive. C’est un essai purement esthétique, assez radical. »

© SEYMOUR JACOBS PHOTOGRAPHY ARCHIVES

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© RENÉ GROEBLI

PORTFOLIO

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Seymour Jacobs, Flatbush Terrace, Brooklyn, 1977, collection Maison européenne de la photographie, Paris « Dans l’exposition, il y a beaucoup de personnages qui font penser à ceux des films noirs, dont cet homme à l’aspect mafieux, photographié par l’Américain Seymour Jacobs, qui a capturé un certain nombre d’anonymes dans son quartier d’enfance à Brooklyn. Cette photo en gros plans date de 1977 et donne l’impression d’être tirées de Scarface – aussi bien le film de Howard Hawks [sortie en France en 1933, ndlr] que celui de Brian De Palma [sortie en France en 1984, ndlr]. Elle évoque aussi les personnages de Martin Scorsese. »


Charles Harbutt, Car, Aspen, Colorado, 1971, collection Maison européenne de la photographie, Paris « Charles Harbutt est un photographe américain qui fut très longtemps membre de l’agence Magnum. Il disait qu’on ne voit vraiment ce qu’est l’image que longtemps après la prise. Cette image est tout à fait exemplaire de ce côté-là. C’est une photographie prise du réel, mais, avec cette portière de voiture ouverte, cette nature pleine d’arbres dont on ne voit que les troncs, on a l’impression d’une mise en scène proche de l’univers de David Lynch, dont les films sont pourtant sortis des années après. »

— : Exposition « Fil noir », jusqu’au 25 août à la Maison européenne de la photographie

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© CHARLES HARBUTT / COURTESY OF PETER FETTERMAN GALLERY

FIL NOIR


17 JUIL.

Folle nuit russe d’Anja Kreis, ASC (1 h 17)

Give Me Liberty de Kirill Mikhanovsky, Wild Bunch (1 h 51), page 70

Les Moissons du ciel de Terrence Malick, Solaris (1 h 34), page 16

Persona non grata de Roschdy Zem, Mars Films (1 h 32)

Manta Ray de Phuttiphong Aroonpheng, Jour2fête (1 h 45), page 72

Her Smell d’Alex Ross Perry, Potemkine Films (2 h 14), pages 18 et 68

Roads de Sebastian Schipper, Rezo Films (1 h 40)

Crawl d’Alexandre Aja, Paramount Pictures (1 h 28), page 82

Le Voyage de Marta de Neus Ballús, New Story (1 h 23), page 72

Le Roi lion de Jon Favreau, Walt Disney (1 h 58)

Daniel Darc Pieces of my Life de Marc Dufaud et Thierry Villeneuve, UFO (1 h 45), page 82

L’Œuvre sans auteur Parties 1 & 2 de Florian Henckel von Donnersmarck, Diaphana (1 h 31) et (1 h 39), page 82

Te Ata de Nathan Frankowski, Jupiter Films (1 h 41)

The Operative de Yuval Adler, Le Pacte (1 h 56), page 82

Yuli d’Icíar Bollaín, ARP Sélection (1 h 50), page 82

Wild Rose de Tom Harper, SND (1 h 41)

Factory de Yuri Bykov, KinoVista / Bac Films (1 h 49), page 84

100 kilos d’étoiles de Marie-Sophie Chambon, Bac Films (1 h 28)

Le Coup du siècle de Chris Addison, Universal Pictures (1 h 34)

24 JUIL. Donnie Darko de Richard Kelly, Carlotta Films (1 h 53 | 2 h 14 pour le director’s cut), page 46

Wonderland Le royaume sans pluie de Keiichi Hara, Art House (1 h 55), page 90

303 de Hans Weingartner, Wayna Pitch (2 h)


Ils reviennent… d’Issa López, Karmafilms (1 h 23)

La Source de Rodolphe Lauga, Apollo Films (1 h 45)

Comme des bêtes 2 de Chris Renaud et Jonathan Del Val, Universal Pictures (1 h 26)

Nomades d’Olivier Coussemacq, Local Films (1 h 27), page 84

Mon frère de Julien Abraham, Bac Films (1 h 36)

C’est quoi cette mamie ?! de Gabriel Julien-Laferrière, UGC (1 h 39)

Promare de Hiroyuki Imaishi, Eurozoom (1 h 51)

Fast & Furious Hobbs & Shaw de David Leitch, Universal Pictures (N. C.)

Midsommar d’Ari Aster, Metropolitant FilmExport (2 h 27), page 66

Rétrospective Kenji Mizoguchi Les Bookmakers / Capricci Films

Playmobil Le film de Lino DiSalvo, Pathé (1 h 43)

Halte de Lav Diaz, ARP Sélection (4 h 36), page 74

Rêves de jeunesse d’Alain Raoust, Shellac (1 h 32)

31 JUIL.

Ricordi? de Valerio Mieli, Le Pacte (1 h 51), page 74

7 AOÛT

14 AOÛT Perdrix d’Erwan Le Duc, Pyramide (1 h 39), pages 14 et 78

Diego Maradona d’Asif Kapadia, Mars Films (2 h 10), page 76

Une grande fille de Kantemir Balagov, ARP Sélection (2 h 17), page 76

Once Upon a Time… in Hollywood de Quentin Tarantino, Sony Pictures (2 h 42), page 50

Les Faussaires de Manhattan de Marielle Heller, Condor (1 h 47), page 84

Nevers Grow Old d’Ivan Kavanagh, Rezo Films (1 h 40), page 84

Le Mystère des pingouins de Hiroyasu Ishida, Wild Bunch (1 h 48), page 78


L’Intouchable Harvey Weinstein d’Ursula Macfarlane, Le Pacte (1 h 39), page 80

Le Déserteur de Maxime Giroux, Ligne 7 (1 h 34), page 86

Je promets d’être sage de Ronan Le Page, Apollo Films (1 h 32), page 84

Late Night de Nisha Ganatra, ARP Sélection (1 h 42), page 86

Dora et la cité perdue de James Bobin, Paramount Pictures (N. C.)

Ma famille et le loup d’Adrià Garcia, Apollo Films (1 h 20), page 86

Vif-Argent de Stéphane Batut, Les Films du Losange (1 h 44), pages 24 et 86

Le Gangster, le Flic et l’Assassin de Lee Won-tae, Metropolitan FilmExport (1 h 49)

Thalasso de Guillaume Nicloux, Wild Bunch (1 h 33), page 86

Une fille facile de Rebecca Zlotowski, Ad Vitam (1 h 31), page 26

Nuits magiques de Paolo Virzì, Bac Films (2 h 05)

A Dog’s Journey de Gail Mancuso, Universal Pictures (1 h 48)

Frankie d’Ira Sachs SBS (1 h 38) page 44

L’Affaire Pasolini de David Grieco, 2iFilms (1 h 53)

La Vie scolaire de Grand Corps Malade et Mehdi Idir, Gaumont (N. C.), page 88

Roubaix Une lumière d’Arnaud Desplechin, Le Pacte (1 h 59), page 38

Les Baronnes d’Andrea Berloff, Warner Bros. (N. C.)

La Chute du président de Ric Roman Waugh, SND (N. C.)

Hauts Perchés d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, Épicentre Films (1 h 30), page 80

Reza d’Alireza Motamedi, Norte (1 h 34)

L’œuf dure de Rémi Lange, Destiny Films (1 h 53)

21 AOÛT

Scary Stories d’André Øvredal, Metropolitant FilmExport (N. C.)

28 AOÛT



ZOOM ZOOM

LES FILMS DU MOIS À LA LOUPE

MIDSOMMAR Un couple états-unien en crise et leurs amis sont conviés à une célébration païenne qui n’a lieu qu’une fois tous les quatre-vingt-dix ans dans un village suédois reculé… Après le stupéfiant Hérédité, Ari Aster confirme son statut de nouveau maître de l’horreur avec ce film en transe qui installe le mal au cœur de la plus parfaite harmonie – et nous prend par surprise en explorant d’un ton grinçant la violence qui consiste à exotiser des cultures différentes.

Un

tableau idyllique. De gentils touristes américains curieux de découvrir les traditions anciennes de la Suède. Une communauté aux habits éclatants qui les accueille chaleureusement dans un paysage lumineux et fleuri. Des cérémonies panthéistes qui prêchent la communion entre l’humain et les émanations de la nature. C’est effrayant. Avant tout parce que Dani (Florence Pugh et son étrange sourire à l’envers) se sent gênante. Elle est venue ici chercher un refuge émotionnel après la mort soudaine de toute sa famille. Mais, avant même leur départ, son copain Christian (Jack Reynor), peu attentionné, et ses acolytes lui font comprendre qu’elle est en trop dans leur boys club. Et, une fois en Suède, face à la tribu Hårga (une peuplade fictive du nord de la Suède) très démonstrative dans la bienveillance, Dani sent bien que celle-ci prépare un rituel pas net. Ce sentiment de ne pas être la bienvenue l’isole et la sauve en même temps. Contrairement à elle, ses compagnons de route n’ont pas l’air de comprendre qu’ils sont si bien accueillis parce qu’ils sont des proies. Pourtant, la mise en scène d’Ari Aster, en apparence chatoyante et délicate, avec très peu d’ombre, ne cesse de les


FILMS

© METROPOLITAN

3 QUESTIONS À ARI ASTER

prévenir à coups de silhouettes bizarroïdes qui menacent à l’arrière-plan, de fresques de mauvais augure, de fleurs colorées vénéneuses, d’architecture insensée, de surexpositions qui brûlent la rétine… La séquence en focalisation interne dans laquelle Dani prend des champignons hallucinogènes l’indique : la fête va tourner au mauvais trip, et les danses rituelles vont se faire mortifères. On pense aux Maîtres fous de Jean Rouch (1957), documentaire figurant la transe collective d’une tribu d’immigrés nigériens installés à Acra au Ghana dont on ne sait trop si elle est un rituel de sorcellerie ou bien une représentation parodiant les colonisateurs britanniques. Avec leurs manières outrecuidantes (un des Américains pisse sur un tronc sacré, l’autre photographie un livre interdit et pose des questions incommodantes sur la prétendue pratique de l’inceste au sein de la communauté), c’est comme si ces dudes venus pour satisfaire leur curiosité anthropologique condescendante s’étaient pris au piège de traditions plus ambiguës qu’ils ne le pensaient. C’est tout l’art d’Ari Aster d’aller débusquer l’ombre sous le soleil rasant, là où elle semblait de prime abord s’être éclipsée. • QUENTIN GROSSET

Midsommar est un film de rupture. Le film d’horreur serait-il un genre intimiste ? C’est un genre qui sonde les profondeurs obscures de l’humanité, et c’est effectivement un biais utile pour parler de choses personnelles. Le film d’horreur me force à aller vers l’extrême. Mais je suis surtout fan du mélodrame : il y a ici une intensité dramatique et musicale, un aspect tout à la fois expressionniste et mental que j’essaye de donner à tous mes films. C’est une gamme qui détermine les émotions des héros et me permet de les embarquer ailleurs. Peut-on voir Hérédité, votre précédent film, et Midsommar comme un diptyque sur la transmission ? Oui, je n’ai pas pensé Midsommar comme une suite d’Hérédité, mais, en le concevant, j’ai vu des liens qui se tissaient entre les deux films. Je vois Midsommar comme un conte de fées autant que comme un film d’horreur sur la codépendance, ce qu’on retrouve dans Hérédité. Mais les deux films partagent surtout cette réflexion sur la famille, sur ce qu’on en fait, sur la manière dont on vit avec nos origines et comment on s’en éloigne. Quelles sont vos influences graphiques pour toutes les fresques qui ponctuent le récit ? Lors de mes recherches avec mon chef décorateur Henrik Svensson, originaire de Stockholm, je suis allé dans le nord de la Suède et on a filmé des maisons avec des peintures qui datent de plusieurs siècles. Les fresques sur les murs des Hårga sont un hommage à ces décorations. On a essayé de s’approprier leur style médiéval pour inventer quelque chose de spécifique à ce monde et qui permet d’émailler le récit d’éléments prophétiques.

— : d’Ari Aster, Metropolitan FilmExport (2 h 27), sortie le 31 juillet

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FILMS

ZOOM

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HER SMELL

Le

désir d’indépendance chevillé au corps, Alex Ross Perry (Queen of Earth) livre un film punk qui loue la force du collectif dans une industrie grignotée par la course au profit. Meneuse d’un groupe de rock qui tutoya un temps la gloire, Becky Something (Elisabeth Moss), rattrapée par ses nombreuses dérives, est sommée de retrouver l’inspiration après l’annulation d’une tournée en Europe – « Je ne suis pas finie », lance-t-elle à ses comparses au début du film. La recherche de complétude de cette rock star cramée par la drogue se joue en cinq actes tirés au cordeau, matière assez épaisse pour en extraire son portrait. Chez Alex Ross Perry, le temps s’égrène comme au théâtre, en de folles explosions de dialogues et des morceaux entiers de musique, autrement dit en des scènes où les personnages n’ont

d’autre choix que de se révéler sans artifice, malgré les paillettes qui parsèment leurs visages. Le film navigue dans le chaos et fait transpirer la solitude du processus créatif, mais aussi la quête de liberté qui l’accompagne. En investissant le délire égotique de son héroïne, le cinéaste vient à nouveau côtoyer la Nouvelle Vague après Listen Up Philip et Queen of Earth, dans un naturalisme particulièrement percutant et volubile. Becky, dont le patronyme (« quelque chose ») évoque le champ des possibles, réfléchit à la fois à l’indépendance et au collectif comme salvation. • LAURA PERTUY

— : d’Alex Ross Perry,

Potemkine Films (2 h 14), sortie le 17 juillet

3 QUESTIONS À ALEX ROSS PERRY Pourquoi avoir choisi l’univers du rock des nineties ? J’avais essayé de faire un film sur la musique des années 1960 il y a maintenant quelques années, mais, au final, l’idée d’ancrer Her Smell dans une période que j’ai vécue, dont la musique et les stations de radio me sont familières, m’a paru plus cohérente.

Comment avez-vous appréhendé la notion de temps sur ce film ? Le fait de passer trois jours dans un studio d’enregistrement pour tourner une scène de 25 minutes où il ne se passe rien, où l’héroïne n’avance pas, c’était faire le pari de la vérité. Ça m’a permis de retranscrire un écoulement réaliste du processus créatif. 68

Envisagez-vous d’enchaîner avec un film d’une même ampleur ? J’aspire à travailler sur des projets du même acabit que le Suspiria de Luca Guadagnino, mais c’est un film qui a été rendu possible par le succès de Call Me by Your Name. C’est perturbant de se dire que c’est impossible de proposer des objets plus longs, étranges, tout en gardant son indépendance.


« U N E FA B L E É C O L O G I Q U E , D R Ô L E E T L U M I N E U S E » FRANCE INFO

LE 24

JUILL

ET


FILMS

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GIVE ME LIBERTY

Découvert

à la Quinzaine des réalisateurs, ce deuxième long métrage fougueux de Kirill Mikhanovsky (Sonhos de peixe) sur un jeune Américain bienveillant qui transporte en camionnette des personnes en situation de handicap tient le spectateur en haleine et désamorce certains clichés. Milwaukee, dans le Wisconsin. Alors qu’une révolte sociale gronde dans cette ville paumée, Vic, un jeune Américain travaillant dans une société assurant le transport de personnes en fauteuils roulants, fait tout pour se dédoubler : à bord de son van, il doit s’arranger pour déposer ses clients (notamment une jeune femme qui doit se rendre à un concours de chant et Tracy, une jeune Afro-Américaine, qui a prévu de s’installer chez son copain instable) et accompagner son papi russe et ses amis aux funérailles d’une vieille tante. Fidèle à certains codes du road movie (les imprévus

qui chamboulent tout, les nombreuses séquences de huis clos…), ce deuxième long de Kirill Mikhanovsky – lui-même ambulancier quand il a débarqué de sa Russie natale aux États-Unis – surprend par son rythme fou : sur l’autoroute de sa fiction fiévreuse, pas d’arrêt inutile et, malgré quelques crochets rapides et toujours savoureux, l’impression d’un long plan-séquence qui met tout le monde à égalité sans jamais questionner cette évidence. Teinté d’une pointe d’absurde, ce film brut de décoffrage dévoile surtout la force indéboulonnable de citoyens marginalisés, tout en échappant aux lectures politiques simplistes. Arrivés à destination, on se dit qu’il serait impossible de cloisonner ce film d’une liberté rare. • JOSÉPHINE LEROY

— : de Kirill Mikhanovsky,

Wild Bunch (1 h 51), sortie le 24 juillet

3 QUESTIONS À KIRILL MIKHANOVSKY Le climat politique actuel aux États-Unis vous a-t-il poussé à défendre la diversité ? Non, ce n’est pas un film politique, je n’ai pas voulu faire passer un message. Mon passé, mon histoire m’ont naturellement ouvert aux autres. Le van a simplement permis de créer une connexion singulière entre des gens isolés socialement.

Le rythme du film est très particulier, l’atmosphère, pleine de tensions. À quoi est-ce dû ? Aux difficultés qu’on a rencontrées pour financer le film, aux conditions de tournage, au fait aussi que les acteurs sont pour la plupart des non-professionnels. Tous ces obstacles ont façonné le rythme du film et nous ont obligés à être plus inventifs. 70

Pourquoi avoir choisi le noir et blanc pour la brillante et intense scène de manifestation ? C’est un parti pris esthétique. Je voulais que la scène contienne moins d’informations, qu’elle soit plus viscérale, dépouillée. Malgré la manifestation, ça resserre l’attention sur les héros. C’est eux contre le reste du monde.


AU CINÉMA LE 14 AOÛT


FILMS

LE VOYAGE DE MARTA

— : de Neus Ballús, New Story (1 h 23), sortie le 17 juillet

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À

la veille de ses 18 ans, Marta (étonnante Elena Andrada) accepte de passer des vacances au Sénégal avec son petit frère et son père (génial Sergi López), qui travaille dans une agence de tourisme et qu’elle voit rarement. Dans le club-hôtel choisi par ce dernier et peuplé de touristes principalement européens qui bullent autour de la piscine, sirotent des cocktails ou jouent au ping-pong, elle s’ennuie… Dans ce récit familial intimiste, qui prend peu à peu une couleur plus politique, l’Espagnole Neus Ballús – qui signe ici son premier long métrage de fiction – nous fait sentir avec une belle intensité le désir épidermique des ados de se libérer de l’autorité des parents. Elle donne bien vite une autre ampleur au récit en faisant dévier la trajectoire de Marta, qui se retrouve par hasard aux côtés d’employés sénégalais de ce club-hôtel, desquels elle se rapproche. Par un dispositif malin, Neus Ballús intègre dans son film les rushs du caméscope de Khouma, le photographe de l’hôtel, qui capture les ridicules divertissements proposés à ces touristes friands d’exotisme. Des images qui questionnent en profondeur notre regard sur l’Afrique à l’ère du postcolonialisme. • JOSÉPHINE LEROY

MANTA RAY

— : de Phuttiphong Aroonpheng, Jour2fête (1 h 45), sortie le 24 juillet

Choc

esthétique, invitation au voyage intérieur : le premier long métrage de Phuttiphong Aroonpheng évoque l’œuvre d’Apichatpong Weerasethakul. Devant Manta Ray, sa forêt envoûtante et sa rivière en forme de barrière, il y a comme une langueur qui nous frappe, une hypnose qui s’accroît à mesure que l’intrigue s’amincit. Ici un pêcheur thaïlandais recueille un homme blessé dans les bois puis disparaît sans raison, prélude d’un chassé-croisé qui voit le rescapé mutique prendre la place du sauveur… Si l’on peut lire ce destin cahoteux comme l’allégorie de la souffrance des Rohingyas (minorité musulmane persécutée en Birmanie et contrainte de s’exiler vers les pays limitrophes), le cinéaste thaïlandais ouvre assez de brèches oniriques dans le récit pour écarter toute réponse évidente. Refuge ou lieu de perdition (notamment lors de scènes nocturnes de traques hallucinées), la forêt est surtout un labyrinthe mental dans lequel s’égarent nos songes. C’est grâce au montage de Lee Chatametikool, déjà à l’œuvre sur Tropical Malady et Cemetery of Splendour de Weerasethakul, que les repères temporels deviennent flous et que chaque plan se fait rêverie étirée. • OLIVIER MARLAS

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FILMS

HALTE

— : de Lav Diaz, ARP Sélection (4 h 36), sortie le 31 juillet

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De

retour avec un nouveau film défiant les standards de la narration cinématographique, le prolifique Philippin Lav Diaz (Norte. La fin de l’histoire, La Femme qui est partie) a présenté à la dernière Quinzaine des réalisateurs cette dystopie apocalyptique en noir et blanc, étirée sur quatre heures et demie. Si ce programme peut en faire fuir plus d’un, le cinéaste fait pourtant, comme souvent, des miracles. Nous propulsant en 2034, il imagine son pays littéralement plongé dans la nuit, gouverné par un fasciste mégalo qu’il caricature sans retenue – l’ombre du Dictateur de Charlie Chaplin plane, mais c’est surtout une puissante charge contre le gouvernement philippin actuel, dirigé par le populiste Rodrigo Duterte. Le cinéaste nous ballotte entre absurdités et visions noires ultra réalistes – il filme, en plans fixes, la déglingue écolo et politique de son pays, menacé par des pluies torrentielles et par les coups de feu des militaires. « Les Philippins ne veulent pas se souvenir », fait dire Diaz à l’un de ses personnages, comme pour mieux renvoyer au présent et entourer son film entêtant d’une aura tragiquement prophétique. • JOSÉPHINE LEROY

RICORDI?

— : de Valerio Mieli, Le Pacte (1 h 51), sortie le 31 juillet

Envisager

le couple comme un empilement de souvenirs, c’est le beau parti pris de ce film italien qui nous incite à fouiller dans nos mémoires… mais également à nous en méfier. L’entreprise de Valerio Mieli (Dix hivers à Venise) est ambitieuse : raconter une relation amoureuse en explorant les mondes intérieurs d’une femme et d’un homme sans jamais filmer la réalité objective. Deux visions s’opposent : si elle a tendance à magnifier les événements du passé, lui n’en retient que leurs fantômes. Une divergence de points de vue qui permet à Ricordi? de déployer son onirisme gorgé de mélancolie et d’inquiétude. Le cinéaste mène un travail intelligent sur les couleurs (froides pour lui, chaudes pour elle), jouant d’abord sur l’opposition des deux regards avant de filmer leur fusion progressive et tumultueuse. Ricordi? invite à réinterroger ses propres histoires de couples, à distinguer le réel du fantasmé. Que peut-on espérer d’une relation basée sur des lambeaux de souvenirs ? Même lorsqu’il filme la chaleur estivale de l’Italie, Valerio Mieli parvient à donner la chair de poule. • THOMAS MESSIAS

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©CARACTÈRES

UN FILM DE KANTEMIR BALAGOV ALEXANDER RODNYANSKY ET SERGEY MELKUMOV PRÉSENTENT UNE GRANDE FILLE UN FILMDE KANTEMIR BALAGOV VIKTORIA MIROSHNICHENKO VASILISA PERELYGINA ANDREY BYKOV IGOR SHIROKOV KONSTANTIN BALAKIREV KSENIA KUTEPOVA OLGA DRAGUNOVA TIMOFEY GLAZKOV PRODUCTEUR PRODUCTEURS ÉXÉCUTIF NATALIA GORINA ASSOCIÉS ELLEN RODNYANSKI MICHEL MERKT MONTAGE IGOR LITONINSKIY DÉCORS SERGEY IVANOV COSTUMES OLGA SMIRNOVA PRODUIT RÉALISÉ MUSIQUE EVGUENI GALPERINE SCÉNARIO KANTEMIR BALAGOV ALEXANDER TEREKHOV IMAGE KSENIA SEREDA PAR SERGEY MELKUMOV ALEXANDER RODNYANSKY PAR KANTEMIR BALAGOV

7 AOÛT


FILMS

DIEGO MARADONA

— : d’Asif Kapadia, Mars Films (2 h 10), sortie le 31 juillet

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Légende

vivante, footballeur de génie, idole déchue… Diego Maradona avait déjà inspiré un film à Emir Kusturica (Maradona) en 2008, mais Asif Kapadia, auteur de remarquables documentaires sur les trajectoires brisées d’Ayrton Senna (Senna, 2011) et d’Amy Winehouse (Amy, 2015, Oscar du meilleur docu), concentre ici son regard sur les années napolitaines du joueur argentin. Une intense période qui démarre en 1984 lorsque, à la surprise générale, el Pibe de Oro (« le gamin en or ») rejoint le peu couru club italien. Hissant sa nouvelle équipe au sommet, Maradona se heurtera pourtant à de nombreux démons (addiction à la drogue, fréquentation de la mafia, refus de reconnaître un enfant né d’une relation extraconjugale). Ayant eu accès à cinq cents heures d’images d’archives inédites, Kapadia sublime cette épopée aussi sportivement glorieuse qu’intimement éprouvante ; après un générique survitaminé dont le synthétiseur rappelle l’introduction du Scarface de Brian De Palma, le cinéaste manie avec brio des émotions contraires qui transforment une houleuse aventure personnelle en une déchirante tragédie universelle. • DAMIEN LEBLANC

UNE GRANDE FILLE

— : de Kantemir Balagov, ARP Sélection (2 h 17), sortie le 7 août

En

1945, dans une ville de Leningrad dévastée et qui sort à peine de la guerre, deux jeunes femmes chargées de soigner des victimes du conflit essaient de reprendre goût à la vie. L’une est régulièrement atteinte de crises nerveuses qui la paralysent et l’empêchent de respirer ; l’autre, qui a vu l’enfer du front, est devenue stérile. Ensemble, elles vont affronter l’adversité, les traumatismes et les situations imprévues… Moins de dix-huit mois après Tesnota. Une vie à l’étroit, le jeune prodige russe Kantemir Balagov (28 ans cet été) s’inspire de La guerre n’a pas un visage de femme de l’écrivaine biélorusse Svetlana Aleksievitch et met en scène un environnement dont les couleurs chatoyantes ne peuvent dissimuler la violence subie par des corps féminins qui ont payé un terrible tribut durant le conflit armé. Porté par deux sidérantes actrices (Viktoria Miroshnichenko et Vasilisa Perelygina), le film s’avère souvent asphyxiant mais réussit à porter haut l’idée, forte et tangible, qu’il est tout aussi éreintant de lutter pour réapprendre à vivre qu’il fut douloureux de braver la mort et la fureur guerrière. • DAMIEN LEBLANC

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“UN FILM QUI REGORGE D’AMOUR”LES INROCKS AUSTEN & MIKHANOVSKY présentent

LE PETIT BIJOU DE

UN FILM DE

KIRILL MIKHANOVSKY

une production GIVE ME LIBERTY Mfg. en association avec FLUX CAPACITOR STUDIOS BRIMSTAGE FILM FUND GREEN STREET FILM Co. THE SPACE PROGRAM SOTA CINEMA GROUP “GIVE ME LIBERTY” avec CHRIS GALUST LAUREN “LOLO” SPENCER MAXIM STOYANOV et avec JAMES WATSON STEVE WOLSKI MICHELLE CASPAR BEN DERFEL ZOYA MAKHLINA DARYA EKAMASOVA SHERYL SIMS-DANIELS ARKADY BASIN ANNA MALTOVA DOROTHY REYNOLDS costumes KATE GRUBE décors BART MAGRUM son JEREMY MAZZA design son VINCENT HAZARD mix son JULIEN PEREZ image WYATT GARFIELD producteurs exécutifs GUS DEARDOFF BRIAN FENWICK OLEG KOKHAN ALEKSEY MAKUKHIN DAVID STAMM RYAN ZACARIAS BENH ZEITLIN ERIC WAGNER ALEX WITHERILL et BRIGHT STAR WISCONSIN producteurs VAL ABEL WALLY HALL MICHAEL MANASSERI GEORGE RUSH SERGEI SHTERN MIKHANOVSKY produit par AUSTEN scénario de AUSTEN & MIKHANOVSKY montage+réalisation par MIKHANOVSKY 2019 © GIVE ME LIBERTY THE MOVIE, LLC


FILMS

LE MYSTÈRE DES PINGOUINS

— : de Hiroyasu Ishida,

Wild Bunch (1 h 48), sortie le 14 août

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Quand

des dizaines de pingouins et un mystérieux vortex apparaissent sans raison, le quotidien de la petite ville nippone où vit Aoyama, 10 ans, est bouleversé à jamais. Associant conte bucolique, comédie burlesque et film d’aventure, quelque part entre Les Goonies, Hayao Miyazaki et Mamoru Hosoda, Le Mystère des pingouins trouve matière à revitaliser ce cinéma d’animation japonais peuplé d’univers magiques et autres animaux fantastiques. Si Aoyama tente de percer le secret des pingouins puis de l’étrange portail qui s’est ouvert, le principal n’est pas là. Derrière ses péripéties épiques, sur fond d’inframonde menaçant le sort de toute l’humanité, c’est un touchant récit d’amitié et d’apprentissage qui, peu à peu, se met en place. En plus de conjurer le sort qui malmène sa région, Aoyama se rapproche de ses amis comme de ses ennemis, jusqu’à faire l’expérience, aux côtés d’une assistante dentaire dont il s’est épris, d’une vie d’adulte qu’il pense déjà pouvoir mener du haut de sa dizaine d’années. Le jeune surdoué en retiendra une chose : tout vient à point à qui sait attendre. • CORENTIN LÊ

PERDRIX

— : d’Erwan Le Duc, Pyramide (1 h 39), sortie le 14 août

Dans

un commissariat vosgien, le gendarme Pierre Perdrix (Swann Arlaud, voir p. 14) s’ennuie, entre sa famille charmante mais un chouïa collante et ses collègues paresseux. Jusqu’au jour où il voit débarquer, en même temps que des naturistes radicaux, une certaine Juliette Webb (hilarante Maud Wyler), jeune femme obsessionnelle qui vient dynamiter son quotidien… Présenté à la Quinzaine des réalisateurs cette année, ce premier long métrage épate d’abord par son dynamisme, offrant à travers sa galerie de personnages perchés une belle choralité burlesque – la famille Perdrix, qui vit encore sous un même toit, rappelle beaucoup La Famille Tenenbaum de Wes Anderson, avec une Fanny Ardant géniale en maman poule prodiguant de sa voix langoureuse des conseils amoureux dans une émission de radio kitsch que personne n’écoute et un Nicolas Maury en fiston, spécialiste des vers de terre et père divorcé à côté de la plaque. Mais c’est dans la relation des êtres à l’espace qu’Erwan Le Duc excelle. En incorporant progressivement dans ce paysage bucolique la mélancolie de ses personnages, le film atteint, en même temps qu’eux, une subtile harmonie. • JOSÉPHINE LEROY

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SORTIE LE

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AOÛT


FILMS

L’INTOUCHABLE. HARVEY WEINSTEIN — : d’Ursula Macfarlane,

Le Pacte (1 h 39), sortie le 14 août

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Un

an et demi après l’éclatement de l’affaire Harvey Weinstein, la Britannique Ursula Macfarlane revient, dans un documentaire brillant et subtil, sur cet événement qui a soulevé une vague d’indignation mondiale. Pour aborder cet épineux sujet, elle a rassemblé les témoignages glaçants de victimes, de témoins, de collaborateurs et de journalistes (notamment Ronan Farrow, qui a signé l’enquête du New Yorker ayant révélé les agissements du producteur) qui brossent le portrait d’un homme asocial, menaçant et avide de pouvoir. Elle dévoile la perversité du personnage, comme celle du système hollywoodien qui, obéissant à la loi du silence, a fermé les yeux sur les nombreux cas de viols et de harcèlements sexuels pourtant portés à sa connaissance. Dans cette ambiance nimbée de mystère, proche de celle du film noir – dès l’ouverture, la caméra longe lentement des palmiers californiens ensoleillés par-dessous, alors qu’on entend en voix off l’annonce de l’éclatement de l’affaire –, on pense beaucoup au livre Hollywood Babylone de Kenneth Anger, sur le Hollywood sombre et tordu de l’âge d’or, qu’on espère maintenant définitivement révolu. • JOSÉPHINE LEROY

HAUTS PERCHÉS

— : d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, Épicentre Films (1 h 30), sortie le 21 août

Après

l’embrasé Théo et Hugo dans le même bateau (2016), Olivier Ducastel et Jacques Martineau proposent un huis clos aux airs de Cluedo intimiste. Une femme et quatre hommes sont réunis dans un appartement par leur ex commun. Ils ne se connaissent pas et savent juste que celui-ci se cache dans une chambre attenante : au fil de la soirée, chacun ira se confronter à lui. En attendant, les convives démêlent les fils de leur relation houleuse avec cet homme ; ils esquissent le portrait d’un séducteur manipulateur… La bonne idée des cinéastes est de ne pas nous dévoiler ce qui se déroule dans cette fameuse pièce : comme un point aveugle qui incarne l’incertitude propre à toute relation amoureuse, celle-ci concentre d’abord toute l’attention. Puis, progressivement, les langues se délient, et on ne porte plus grand intérêt au mystérieux personnage qui s’y trouve. D’abord construit comme une enquête, le récit dévie vers le pur plaisir de la conversation cathartique. À la fin, on constate, le sourire aux lèvres, que, s’il essaye encore de s’agiter vainement avec son piteux stratagème, cet ex relou s’est déjà dissipé dans notre souvenir. • QUENTIN GROSSET

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LE 31 JUILLET PROPRIÉTÉ DE FOX. À USAGE PROMOTIONNEL UNIQUEMENT. VENTE, DUPLICATION OU TRANSFERT DE CE MATERIEL STRICTEMENT INTERDITS.


FILMS L’ŒUVRE SANS AUTEUR. PARTIES 1 & 2

Dans la RDA des années 1940, Kurt rencontre Ellie (Paula Beer) dans son école d’art. Leur amour grandissant et leur soif de liberté les poussent à passer à l’Ouest… Nommée à l’Oscar et au Golden Globe du meilleur film étranger en hiver dernier, cette fresque émotionnelle est une formidable réflexion sur les souvenirs et sur leur perception à travers l’art. • Q. B.-G.

— : de F. H. von Donnersmarck (Diaphana, 1 h 31 et 1 h 39), sortie le 17 juillet

YULI

Jouant son propre rôle, Carlos Acosta met en scène un spectacle de danse inspiré de sa vie et se remémore des événements qui l’ont mené des rues de Cuba au Royal Ballet de Londres… La cinéaste Icíar Bollaín signe un biopic ample et ambitieux qui donne à voir les souvenirs épars du célèbre danseur de ballet, à mi-chemin entre fiction et réalité. • C. L .

— : d’Icíar Bollaín (ARP Sélection, 1 h 50), sortie le 17 juillet

DANIEL DARC. PIECES OF MY LIFE

Marc Dufaud et Thierry Villeneuve retracent la carrière du regretté Daniel Darc, de ses débuts frénétiques dans Taxi Girl aux compositions mystiques de ses dernières années, avec des images d’archives inédites révélant autant sa singularité musicale que sa sensibilité d’écorché vif. Si le film émeut autant, c’est parce qu’on sent qu’il est fait par de proches amis. • Q. G.

— : de Marc Dufaud et Thierry Villeneuve (UFO, 1 h 45), sortie le 24 juillet

CRAWL

En Floride, après qu’un ouragan a tout dévasté, des alligators se promènent dans les rues d’une zone pavillonnaire inondée. Hayley (Kaya Scodelario) part à la recherche de son père… Habitué des monstres aquatiques (Piranha 3D), Alexandre Aja a l’art de faire naître la tension avec peu de chose : un animal, une maison, du vent, de la pluie. C’est tout. • Q. G.

— : d’Alexandre Aja (Paramount Pictures, 1 h 28), sortie le 24 juillet

THE OPERATIVE

À la fin des années 2000, l’Iran, qui cherche à obtenir l’arme nucléaire, est particulièrement surveillé. Une espionne du Mossad (Diane Kruger) s’infiltre à Téhéran pour obtenir des informations, avant de disparaître… Adapté du roman The English Teacher, censuré en Israël à sa sortie en 2013, ce thriller ultra réaliste questionne le libre arbitre des espions. • Q. B.-G.

— : de Yuval Adler (Le Pacte, 1 h 56), sortie le 24 juillet

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FILMS FACTORY

Près de Moscou, une vieille usine est fermée du jour au lendemain. Quelques ouvriers qui n’ont plus rien à perdre décident de prendre en otage le propriétaire des lieux, un oligarque influent de la région… Ce thriller nocturne sur fond de crise sociale et de précarité des classes populaires résonne implacablement avec l’actualité. • C. L .

— : de Yuri Bykov (KinoVista / Bac Films, 1 h 49), sortie le 24 juillet

LES FAUSSAIRES DE MANHATTAN

Pour rembourser ses dettes et relancer sa carrière, une biographe monte une arnaque consistant à imiter à la perfection des lettres intimes écrites par des stars et à les revendre. Un don qui intéresse vite le F.B.I… Inspirée d’une histoire vraie, cette comédie dramatique est portée par une Melissa McCarthy méconnaissable et parfaite en galérienne de l’emploi. • Q. B.-G.

— : de Marielle Heller (Condor, 1 h 47), sortie le 31 juillet

NEVER GROW OLD

Après l’arrivée de malfrats, un charpentier devenu croque-mort (Emile Hirsch) voit sa bourgade plonger dans le chaos. Mais si les cadavres s’amoncellent, le business, lui, est florissant… Ivan Kavanagh fait simple et efficace dans ce western blafard hanté par les spectres fordiens et par l’ambivalence du mythe américain, partagé entre sa soif de morale et de sang. • C. L .

— : d’Ivan Kavanagh (Rezo Films, 1 h 40), sortie le 7 août

NOMADES

À Tanger, un adolescent envisage de rejoindre ses deux frères aînés, exilés en Europe dans l’espoir d’une vie meilleure. Pour le dissuader de partir, sa mère, qui l’a élevé seule, l’emmène au sud du pays… Dans ce drame intimiste à la mise en scène appliquée, la crise économique se juxtapose au conflit générationnel qui divise le Maroc et les cercles familiaux. • C. L .

— : d’Olivier Coussemacq (Local Films, 1 h 27), sortie le 7 août

JE PROMETS D’ÊTRE SAGE

Franck plaque tout : il lâche sa compagnie de théâtre et se reconvertit comme agent de sécurité dans un musée. Alors qu’il pense connaître enfin le calme, il rencontre Sibylle, une collègue misanthrope prête à tout pour le démoraliser… Cette comédie romantique efficace mise tout sur la prestation de ses acteurs (l’énergie de Pio Marmaï, l’insolence de Léa Drucker). • Q. B.-G.

— : de Ronan Le Page (Apollo Films, 1 h 32), sortie le 14 août

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FILMS LATE NIGHT

La présentatrice snob d’un late-night show (Emma Thompson), qui risque de perdre son émission si elle ne récupère pas un bon taux d’audience, embauche une autrice ambitieuse… Comme Présentateur vedette. La légende Ron Burgundy d’Adam McKay, cette comédie entraînante tourne en dérision le monde de la télévision à coups de répliques incisives. • Q. B.-G.

— : de Nisha Ganatra (ARP Sélection, 1 h 42), sortie le 21 août

MA FAMILLE ET LE LOUP

Hugo, 9 ans, passe les vacances d’été près de Toulon, chez sa grand-mère (Carmen Maura). Alors qu’un loup géant menace de capturer celle-ci, il élabore un plan avec ses cousins pour l’en empêcher… Alternant prises de vue réelles et animation, cette comédie familiale solaire travaille les codes du conte pour enfants, de Perrault au mythe du grand méchant loup. • Q. B.-G.

— : d’Adrià Garcia (Apollo Films, 1 h 20), sortie le 21 août

THALASSO

Après l’avoir kidnappé (L’Enlèvement de Michel Houellebecq, 2014), Guillaume Nicloux envoie cette fois le romancier en thalasso. Il y rencontre Gérard Depardieu… Dans cette comédie dramatique, les corps sont malmenés, l’étrange toujours prêt à s’immiscer dans les couloirs de l’établissement, et Houellebecq passe avec brio du bougon comique à la figure tragique. • C. L .

— : de Guillaume Nicloux (Wild Bunch, 1 h 33), sortie le 21 août

LE DÉSERTEUR

Alors que son pays est menacé par une guerre dont on ne sait rien, un Canadien (Martin Dubreuil), imitateur professionnel de Charlie Chaplin, part se réfugier dans l’Ouest américain. Il y rencontre un agent d’acteurs (Reda Kateb) intéressé par ses talents… Ce drame intense, qui mixe absurde beckettien et western américain, se révèle aussi étrange que fascinant. • J. L .

— : de Maxime Giroux (Ligne 7, 1 h 34), sortie le 21 août

VIF-ARGENT

Chargé d’accompagner des êtres dans l’au-delà, Juste (le jeune Thimothée Robart, tout en retenue, voir p. 24) prend sa mission à cœur. Censé être invisible, il est reconnu par une jeune femme (Judith Chemla) dont il tombe amoureux… Entre film de fantômes minimaliste et tragédie romantique, ce joli drame parisien souligne la puissance des souvenirs. • J. L .

— : de Stéphane Batut (Les Films du Losange, 1 h 44), sortie le 28 août

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COUL’ KIDS

GRAND CORPS MALADE ET MEHDI IDIR Anna, Mathilde, César et Anna ont entre 15 et 16 ans. Élèves de troisième et de seconde, ils ont interviewé le slameur Grand Corps Malade et Mehdi Idir, coréalisateurs de La Vie scolaire, leur deuxième film (après Patients, 2017), qui raconte la vie d’un collège de la ville de Saint-Denis.

L’INTERVIEW

Qu’est-ce qui vous a inspiré pour ce film ? Grand Corps Malade : Nos années collège. On en parlait souvent avec Mehdi, on avait pas mal d’anecdotes sur cette période. Mehdi Idir : Et puis on a de nombreux amis ou proches qui sont enseignant ou conseiller principal d’éducation, comme mon cousin, qui a donné son nom au prof de maths du film. Quel genre d’élève étiez-vous au collège ? M. I. : J’étais un peu comme le personnage de Yannis dans le film : je bavardais beaucoup, je m’ennuyais un peu, en fait. G. C. M. : Moi c’était un peu moins pire : j’avais de bons résultats, mais je collectionnais les avertissements de conduite. Pour vous, qu’est-ce qu’un parcours scolaire réussi ? G. C. M. : On pense systématiquement à la filière générale et aux grandes écoles, alors qu’un parcours scolaire réussi devrait correspondre à tes envies. Trop souvent, les filières pro sont vues négativement, alors que si c’est ce que tu désires faire c’est épanouissant.


D’ANNA, MATHILDE, CÉSAR ET ANNA LE DÉBRIEF

Si vous étiez ministre de l’Éducation, que feriez-vous ? G. C. M. : Je changerais vite de métier ! Plus sérieusement, j’essaierais de lancer une grande concertation et je donnerais plus de moyens aux écoles des quartiers en difficulté. Le prof de maths de notre film dit : « Enseigner à Saint-Denis, c’est pas comme enseigner ailleurs. » C’est vrai, il y a des particularités, et il faut investir dans la formation des enseignants. Qu’est-ce qui est le plus difficile, dans la réalisation d’un film ? M. I. : Tenir sur la longueur. Entre le moment où l’on a écrit celui-ci et sa sortie, il s’est écoulé deux ans. Est-ce qu’il y a une scène qui a été particulièrement compliquée à tourner ? M. I. : Oui, il y a deux longs plans-séquences

dans le film : une scène d’accident, pour laquelle il a fallu bloquer des rues, et une autre où Yannis part de chez lui à pied pour se rendre au collège. Sur son parcours, il croise beaucoup de personnages : si un acteur se trompe dans son texte ou son déplacement, il faut tout recommencer depuis le début ! À quel moment pensez-vous à la musique de votre film ? M. I. : On y pense en écrivant. Il y a même des scènes qui sont écrites pour les sons qu’on a en tête. Ça permet à la production de demander l’autorisation d’utiliser ces titres et de tourner avec ces musiques. G. C. M. : En plus des morceaux existants, il y a aussi une bande originale, qu’Angélo Foley a créée en fonction de notre montage. Où écrivez-vous ? G. C. M. : Il n’y a pas de règles… Dans un café, à la terrasse d’une chicha, dans des bureaux. M. I. : En musique ou dans le silence, on s’adapte à notre environnement. • PROPOS RECUEILLIS PAR ANNA, MATHILDE, CÉSAR ET ANNA (AVEC CÉCILE ROSEVAIGUE) — PHOTOGRAPHIE : PALOMA PINEDA

— : « La Vie scolaire » de Grand Corps

Malade et Mehdi Idir (Gaumont), sortie le 28 août,dès 10 ans

TOI AUSSI TU AS ENVIE DE RÉALISER UNE INTERVIEW ? DIS-NOUS QUI TU AIMERAIS RENCONTRER EN ÉCRIVANT À BONJOUR@TROISCOULEURS.FR

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COUL' KIDS

« On a vu le film une semaine avant l’interview, j’étais pressée de poser mes questions. — On les a interviewés sur la terrasse d’un hôtel plutôt très chic. — Au début, ils étaient un peu tendus ; et pour la séance photo, ils étaient plus intimidés que nous. — Finalement, au bout de deux questions, ils avaient l’air contents de nous rencontrer. C’était super, on a bien discuté ! »


LA CRITIQUE DE LÉONORE, 8 ANS

COUL’ KIDS

WONDERLAND

« Une histoire comme celle de Wonderland sert à fabriquer une morale et à nous faire visiter un monde imaginaire auquel on croit vraiment le temps du film. Au début, l’héroïne refuse d’aller à l’école : elle est toute molle et elle ne veut rien faire, parce qu’elle ne veut pas avoir de problèmes. Mais sa maman l’oblige à sortir, et du coup elle découvre dans un magasin l’entrée vers un monde magique, avec des gros chats qui parlent comme nous et des personnages encore plus petits que des petits nains. Il y a des choses qui font peur aussi, comme un gros véhicule qui ressemble à un camion de guerre. Mais le film ira quand même pour les enfants, parce qu’à la fin ça se passe bien. Je crois qu’aller dans le monde magique aide l’héroïne : elle apprend des trucs, alors que chez elle elle n’aurait rien appris. La morale de l’histoire, c’est donc qu’il ne faut pas rester au lit, sinon on devient rien. Et ça, c’est nul, parce que moi j’ai envie de rester au lit tout le temps. En plus, je sais très bien que je ne vivrai jamais une aventure comme ça, alors bon… »

LE PETIT AVIS DU GRAND Depuis Un été avec Koo, on sait que Keiichi Hara ne peut se satisfaire de la réalité pour atteindre la vérité de ses personnages. Après le récit de fantômes (Colorful) et le biopic à consonances fantastiques (Miss Hokusai), le cinéaste s’essaie au merveilleux avec Wonderland, en créant un univers où chaque lieu et chaque rencontre agissent comme une métaphore de l’état intérieur de son héroïne. Plus enjoué que ses précédents films, Wonderland est surtout une bonne introduction à l’œuvre de ce réalisateur à la sensibilité exacerbée. • JULIEN DUPUY

— : «Wonderland. Le Royaume sans Pluie » de Keiichi Hara, Art House (1 h 55), sortie le 24 juillet, dès 6 ans

COUL’ KIDO EST CACHÉ 3 FOIS DANS CETTE PAGE… SAURAS-TU LE RETROUVER ?

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SI VOUS NE DEVEZ VOIR QU’UN SEUL FILM D’ANIMATION CETTE ANNÉE,

CE DOIT ÊTRE CELUI - CI

U N F I L M D E H I R OYA S U I S H I DA

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À VO U S D E M E N E R L’ E N Q U Ê T E !

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TIR D E

8

ANS


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CECI N’EST PAS DU CINÉMA

LIGNES D’ARRIVÉE Juin 2019. La France connaît un épisode caniculaire précoce. Est-ce un hasard si, cette année, plusieurs bandes dessinées ont évoqué, à leur manière, le sentiment que la catastrophe écologique se conjugue au présent ? Sous le crayon de Zep, de Frederik Peeters ou encore de Renaud Thomas, la réalité dépasse désormais la fiction.

Saccage de Frederik Peeters (2019)

On

oublie souvent que le grand récit catastrophiste et mythique de Katsuhiro Ōtomo, Akira, se déroulait en 2019. Lorsqu’a débuté la parution de la série manga, en 1982, la projection d’un avenir au milieu des ruines, entre effondrement et radiation, guerre et famine, semblait plutôt lointaine. Les récits en bande dessinée publiés par Metal hurlant dans les années 1970, ou les grandes sagas futuristes et galactiques, d’Enki Bilal à Alejandro Jodorowsky en passant par les rêveries de François Schuiten et de Benoît Peeters dans Les Cités obscures et celles de Philippe Druillet et de Mœbius, propulsaient les lecteurs dans des visions futuristes destinées à déplacer le présent, à le mettre à distance. L’échelle du temps a bien changé depuis. La bande dessinée, comme les autres arts, s’imprègne de


BD L’INSTANT DESSINÉ

© ÉDITIONS ATRABILE

l’anxiété ambiante et donne à voir et à penser, par des amas de traits et de lignes, que l’avenir doit désormais se dessiner au présent.

EFFET DE PROXIMITÉ

Dès ses balbutiements, le neuvième art s’est confronté aux récits d’anticipation, aux utopies et à la science-fiction. En regard de son histoire, on pourrait croire que l’acte du dessin invite à la projection, à l’envie d’imaginer un monde futur, des créatures nouvelles ou des terres aux contours inconnus. Sauf que, rien que cette année, trois bandes dessinées (Zone Z de Renaud Thomas, The End de Zep et Saccage de Frederik Peeters) ont traité de la question de la catastrophe écologique ou de l’effondrement de la civilisation en considérant qu’elle était déjà advenue. Selon une tonalité apocalyptique

ou postapocalyptique, ces œuvres ne mettent pas en question les causes de la « fin », mais directement ses conséquences brutales sur les êtres qui restent et errent sur une planète dévastée. « Sur les causes et les motifs qui menèrent à la fin, on aurait pu écrire des chapitres entiers. Mais après la fin, aucun livre ne fut plus écrit. » On pouvait lire cette sentence au début de La Terre des fils de Gipi, (2016), qui, comme La Route de Cormac McCarthy dix ans plus tôt en littérature, ouvrait la voie du postapocalyptique de proximité : tout, dans les décors, les références culturelles, les habits et les personnages, nous fait penser que la catastrophe se situe à notre époque. « La fin des temps est, selon moi, inéluctable, elle est pour nous », nous explique Renaud Thomas. Auteur de Zone Z, il a décidé de faire errer ses deux personnages, sans but précis, au milieu des ruines d’une périphérie sans contours. « Avec la catastrophe, je pense à l’urbanisme, à ces zones sans âme qui ont déjà un goût de fin des temps », ajoute-t-il. Construit comme une sorte de conte, le récit donne à voir notre environnement saturé de panneaux publicitaires et de centres commerciaux – mais marqué par le désastre. Cet effet de proximité s’accompagne d’un désir de comprendre et d’insérer de la connaissance dans les récits fictionnels. Dans le surprenant The End, Zep suit une petite équipe de scientifiques qui va découvrir que ce sont les arbres qui peuvent réguler la Terre et les êtres vivants. En imaginant que ceux-ci sont responsables d’un empoisonnement massif qui aurait conduit à l’extinction des dinosaures, Zep explique la fin prochaine de l’humanité par le même biais : les arbres nous feraient la peau pour que la Terre survive. Au-delà du

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La bande dessinée est un art du collage et de la réappropriation. Pour mieux étendre les temps et donner la sensation d’une catastrophe présente dans laquelle toute notre culture visuelle serait notre ultime mémoire collective, Frederik Peeters multiplie les références aux grands peintres, dessinateurs et cinéastes, en redessinant, au sein de ses planches, des éléments reconnaissables par tous. Renaud Thomas, quant à lui, intensifie la dimension présente de la catastrophe en photographiant (plus de treize mille photos) des paysages urbains, puis en les redessinant, directement, et en les « altérant » pour créer les décors de son récit apocalyptique. Ce faisant, Thomas permet que le lecteur se retrouve face à des paysages qui lui sont familiers et qui, en fin de compte, l’intègrent dans le récit et l’interpellent – puisque ces lieux abandonnés et en ruines sont ceux qui, dans la réalité, nous entourent. • A. G.


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© RUE DE SÈVRES

© SANJA MARUŠIĆ

SONS

The End de Zep (2019)

Dans The End, Zep suit une équipe de scientifiques qui découvre que ce sont les arbres qui peuvent réguler la Terre et les êtres vivants. récit, extrêmement bien ficelé, Zep dilue de réelles intuitions scientifiques et pose des questions touchant l’actualité de la recherche, et donc notre époque. On retrouve cet entre-deux dans l’excellent Petit traité d’écologie sauvage d’Alessandro Pignocchi (2017-2018) dans lequel l’auteur imagine, à l’inverse de la catastrophe, que notre époque aurait enfin pris conscience de l’urgence écologique en adoptant la vision du monde des Indiens d’Amazonie. Les scènes, tirant vers l’absurde et habitées par un humour grinçant, donnent à lire les nouveautés qui accompagnent la recherche en anthropologie tout en restituant l’intensité de la pensée amérindienne, proche du vivant, et confrontent notre époque à son aveuglement.

POÉTIQUE DES RUINES

La catastrophe ? « Difficile d’éviter un tel sujet de nos jours ! » sourit le Suisse Frederik Peeters. La claque de cette année nous vient de son somptueux Saccage. Plus de soixante-dix dessins pleine page, muets, nous racontant le désastre à l’échelle de l’instant : comme si la planète, à travers les yeux d’un personnage

spectateur, revivait toutes les catastrophes au moment du dernier déluge, celui qui nous sera fatal, celui de notre époque. À travers ces planches magistrales, aux collages et aux références multiples, on voit se dessiner un nouvel enjeu : celui de la poétique de la ruine et de la fin. « C’est la dimension poétique, dans le désastre, qui m’intéresse avant tout », nous confie Renaud Thomas, quand Peeters déclare que, ce qui le guide, c’est d’orienter ce sujet vers une « dimension poétique, esthétique », même si le mot ne lui plaît pas. Or, c’est bien cela dont il est question : de sentir la catastrophe, par le dessin, car, selon Thomas, « le trait participe du désastre ». Peeters ajoute qu’il faut bien chercher « une mise à distance poétique », par une forme de « transe » pour ne pas tomber dans la « fascination » et pour « dépasser l’effroi ». Il y a de cela, chez Zep, Peeters ou Thomas, une volonté d’apprivoiser la catastrophe en dessinant, en cherchant à trouver, par le trait, les couleurs, la planche et les rythmes, un dernier soupçon de beau, pour parvenir à mieux s’endormir le soir – et nous aider, nous aussi, à trouver le sommeil. • ADRIEN GENOUDET

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EXPOS

© ADAGP, PARIS, 2019

BARBARA PROBST

Exposure # 139, Munich, Nederlingerstrasse 68, 08 . 21 . 18, 5 :13 p. m., 2018

OFF

En

réalisant des prises de vue d’un même sujet selon différents angles, la photographe allemande crée d’intrigantes mises en scène et en regard qui nous invitent à entrer dans l’espace de l’image. Qu’il s’agisse de scènes fixes ou en mouvement, que celles-ci réunissent des personnages (une femme traversant la gare Grand Central à New York) ou des objets (une main gisant paume vers le ciel à côté d’un pied de table, d’une bouteille de verre vide et d’un citron), chaque ensemble d’images de la série Exposure – un terme anglais délibérément polysémique pouvant signifier « exposition » ou « révélation » – relève d’un même protocole qui consiste à déclencher simultanément plusieurs appareils photographiques disposés en différents endroits, offrant ainsi une multiplicité de points de vue qui oriente et modifie nécessairement notre lecture, plurielle, de ces fragments de réel. Si telle image peut nous montrer ce que l’on ne peut voir dans telle autre, dévoilant ainsi une forme de contrechamp voire de hors-champ, il en ressort moins une « clairvoyance » qu’une étrangeté qu’amplifient les variations (de distance, de hauteur, de couleur) d’un cliché à un autre. Chaque Exposure est numérotée, laissant apparaître dans sa légende le lieu, le jour et l’heure précis des faits, pour ne pas dire du « crime », tant Barbara Probst se plaît à jouer des ressorts de l’enquête, de l’indice et de l’instant dont il nous revient de recomposer l’épaisseur narrative dans l’espace et dans le temps. • ANNE-LOU VICENTE

— : « The Moment in Space », jusqu’au 25 août au Bal

Une multiplicité de points de vue qui oriente et modifie nécessairement notre lecture.

FUTURES OF LOVE

BRICE DELLSPERGER

L’amour est-il soluble dans les algorithmes ? Comment la technologie oriente-t-elle nos désirs ? En guise de réponse prospective, l’exposition « Futures of Love » réunit des œuvres d’une quarantaine d’artistes du monde entier. Installations, vidéos et performances y interrogent l’avenir de la libido face à l’avènement de l’intelligence artificielle et du troisième sexe. • JULIEN BÉCOURT

Quintessence du camp, le vidéo-artiste Brice Dellsperger tourne depuis les années 1990 des Body Doubles, remakes de films célèbres dans lesquels un comédien transformiste incarne tous les rôles. Après s’être attaqué à Żuławski, De Palma ou Van Sant, il revisite le film Perfect de James Bridges. Une déconstruction queer et grinçante du cinéma hétéronormé. • J. B.

: « Futures of Love », jusqu’au 8 septembre aux Magasins généraux (Pantin)

: « Fucking Perfect. Body Double 36 »

de Brice Dellsperger, jusqu’au 13 octobre à la villa Arson (Nice)

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ART COMPRIMÉ Tous les mois, notre chroniqueuse vous offre un concentré des dernières réjouissances du monde de l’art.

Nouvel épisode dans le feuilleton du rachat des grandes maisons de vente aux enchères par des milliardaires français. Après François Pinault (Christie’s) et Bernard Arnault (Phillips), c’est au tour de Patrick Drahi de s’offrir Sotheby’s, pour la bagatelle de 3,7 milliards de dollars. Un moyen pour le magnat franco-israélien des télécommunications et des médias, collectionneur discret mais avisé, d’acquérir un pouvoir d’influence dans le monde entier, estimait un spécialiste dans Le Monde le mois dernier. • Un riche inconnu a quant à lui fait l’acquisition du pistolet avec lequel Vincent Van Gogh se serait suicidé en 1890. Adjugé pour 162 500 euros aux enchères à Drouot à Paris, le 19 juin, ce Lefaucheux de calibre 7 mm, aujourd’hui amplement rouillé, n’a pas atteint le prix du revolver que Paul Verlaine avait utilisé contre Arthur Rimbaud, vendu 434 500 euros en 2016. • En revanche, personne ne semble prêt à débourser 10 000 euros pour un tableau de Pal Sarkozy, père de Nicolas. Mis aux enchères à Nice le 18 mai, Cycle of Life (2008) – un arbre doté d’attributs féminins du meilleur goût – n’a pas trouvé preneur. • Nous vous annoncions dans le numéro 169 de mai que Christo allait emballer l’Arc de triomphe en avril 2020. Il se trouve que ça a été décalé à septembre. Le plasticien américain ne savait pas (comme nous) que des faucons crécerelles venaient couver sur les hauteurs du monument parisien d’avril à août : tout l’amour de l’art ne saurait compliquer la reproduction d’une espèce protégée ! • MARIE FANTOZZI ILLUSTRATION : PABLO GRAND MOURCEL


SPECTACLES

MON GRAND AMOUR — : de Caroline Guiela Nguyen, jusqu’au 3 août

© JEAN-LOUIS FERNANDEZ

166, rue de Tolbiac, Paris XIIIe (1 h)

OFF

En

2017, Caroline Guiela Nguyen bouleversait les festivaliers d’Avignon avec Saïgon, grande fresque de 3 h 45 s’attachant à redessiner, par le prisme familial, une histoire de la colonisation à cheval entre le Viêt Nam et la France, sur plusieurs générations. Issu d’un long processus de recherche et de collecte de témoignages qui l’a emmenée jusqu’à Hô-Chi-Minh-Ville avec sa compagnie des Hommes approximatifs, Saïgon prenait aussi – et surtout – le parti de l’émotion et du (mélo)drame, ce dont le théâtre contemporain français fait trop souvent l’économie. En parallèle, comme un pendant encore plus intimiste, la metteuse en scène a imaginé Mon grand amour, une petite forme pour un appartement. En tout petit comité, les spectateurs y suivent trois histoires qui ont lieu en même temps : à Bruxelles, une femme décide de quitter son mari ; à Paris, un policier est licencié après une bavure ; la troisième histoire, elle, n’est pas toujours la même. Fidèle à son envie de mettre en lumière des récits et des personnes que l’on n’entend et que l’on ne voit que trop rarement sur les scènes, Caroline Guiela Nguyen a choisi de confier ce dernier rôle à un comédien amateur rencontré dans la ville où la pièce est jouée. Avec Mon grand amour comme dans Saïgon, l’espace quotidien devient la chambre d’écho du bruit du monde, la violence politique se donne à lire dans les corps, et les trajectoires singulières tissent un récit pourtant commun – car ici ou ailleurs, les larmes ont toutes le même goût. • AÏNHOA JEAN-CALMETTES

L’espace quotidien devient la chambre d’écho du bruit du monde.

L’ABSENCE DE PÈRE

D’APRÈS UNE HISTOIRE VRAIE

Lorraine de Sagazan s’est fait une spécialité d’interpréter et de réécrire les classiques du siècle dernier. Avec Démons (d’après Lars Norén), elle explorait les rapports de pouvoir amoureux. Avec Une maison de poupée (d’après Henrik Ibsen), elle interrogeait le machisme persistant. C’est vers Anton Tchekhov qu’elle se tourne aujourd’hui pour prendre à bras-le-corps la question de la reconnaissance sociale, à une époque où il devient urgent de redéfinir le concept de réussite. • A. J.-C.

Comme son titre l’indique, l’envie de cette création vient d’un souvenir. À Istanbul, il y a désormais plus de dix ans, alors que le chorégraphe assiste à un spectacle, des hommes surgissent sur la scène pour improviser une danse folklorique. Pour Christian Rizzo et ses huit danseurs, pas question de reproduire ces pas, ni même de rejouer ce qui s’est produit : plutôt de chercher à retrouver et à partager la profonde émotion qui l’a saisie ce jour-là. • A. J.-C.

au Centquatre(2 h 15)

au lycée Jacques-Decour (1 h)

: de Lorraine de Sagazan, du 26 au 28 juillet

: de Christian Rizzo, du 31 juillet au 3 août

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RESTOS

DU NEUF SOUS LE SOLEIL

OFF

© STÉPHANE MÉJANÈS

Et si on profitait du (relatif) calme de l’été parisien pour découvrir de nouvelles adresses sans se presser ? Au programme : Fleur de Pavé et sa cuisine chaleureuse, Adar et ses assiettes ensoleillées, Augustin Marchand d’vins et ses planches canailles.

FLEUR DE PAVÉ Il manquait au paysage gastronomique parisien. Fin 2017, il avait cédé Itinéraires, le restaurant étoilé qu’il tenait avec Sarah, son épouse et associée (et directrice de salle hors pair, et sommelière surdouée). Juin 2019, Sylvain Sendra est revenu (presque) seul. Sarah s’est occupée de la déco et des arts de la table (magnifiques assiettes, verres et accessoires soufflés à la bouche par l’Atelier George), mais « c’est le restaurant de Sylvain », insiste celle-ci, qui voguera bientôt vers d’autres projets. Dans l’ancienne Mémère Paulette, on se plonge dans le Paris 1920 de Picasso et de Foujita : carrelage noir et blanc, verrières, tables noires, mobilier vintage. Comptoir sur cuisine ouverte, alcôve pour six ou huit personnes ou tables classiques, on choisit son ambiance pour une balade très végétale. Élève de Sarah, Maxime Courvoisier tient la salle et la cave tout en sourire. La carte des vins regorge de pépites à bon prix (savoie altesse d’Antoine Petitprez, 59 €). Dans les assiettes, techniques et spontanées, l’inspiration vient de l’enfance lyonnaise du chef, de ses ascendances italiennes et algériennes. Marqué aussi par un récent séjour de quatre mois au Liban, il envoie un fondant carré d’agneau de Lozère, ravioles ricotta-menthe, condiments zaatar-sumac, et LE meilleur dessert de l’année (pour votre serviteur), fraises gariguette, crémeux de lait comme un ashta, miel-fleur d’oranger. Sans oublier la salade du jardin d’Asafumi Yamashita, parmesan et praliné. Menus : 45 €, 65 € ou 95 € (113 € accords mets-vins). • STÉPHANE MÉJANÈS

: 5, rue Paul-Lelong, Paris IIe

ADAR

AUGUSTIN MARCHAND D’VINS

Adar, c’est le sixième mois du calendrier hébraïque, entre mars et avril, celui qui porte bonheur. C’est sous ce signe que Tamir Nahmias se lance en solo. Petites assiettes et traiteur, on découvre une cuisine israélienne pleine de saveurs : labné, poulet aux artichauts, babka noisettes, jus de grenade (4,90 €). Menu : 20 €. Assiettes à partir de 5 €. • S. M.

Artiste, auteur, journaliste, Augustin Marchand (pseudo) a ouvert en mai son bar à vin façon cénacle. Vins vivants, jura en majesté (Les Lumachelles, domaine des Cavarodes, 34 € sur table), rillettes pur canard (15 €), burrata (17 €), assiettes selon la saison, caillette ardéchoise maison, par exemple (20 €), fraises, rhubarbe et crème de jersiaise (9 €). • S. M.

: 49, passage des Panoramas, Paris IIe

: 26, rue des Grands-Augustins, Paris VIe

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CONCERTS

404BILLY — : le 24 août à Rock en Seine

© FLORENT MUSET

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Quand

les lumières s’éteignent, c’est du 404Billy : le rappeur de Villiers-le-Bel brille par sa capacité à broyer du noir avec brio. Sur la vingtaine de pistes que recèlent Hostile (2018) et Process (2019), ses deux prometteuses premières mixtapes, il déploie un art essentiellement nocturne, dans lequel des flashs violents (« Quand j’coupe des têtes, les oiseaux s’envolent ») jouent le rôle de lampe torche. « Sombre univers, ciel orageux », voici le mantra du MC de 24 ans, dont le flow lapidaire a la fluidité froide et implacable d’un plan-séquence de polar new-yorkais en noir et blanc. Pour la zumba et la musique de club, on repassera. Hors des modes et conscient de cette image d’animal à sang froid qu’il dégage depuis la sortie de son glaçant clip « Le kid est mort » (« Mes djinns sont mes ghostwriters, me poursuivent pour droit d’auteur »), 404Billy laisse parfois se craqueler l’armure pour parler de ses blessures intimes (absence d’un père gangster, séparation d’avec la mère de ses enfants). Il sait aussi se moquer de lui-même sur le single « Sombre fan », captant avec malice la voix exigeante de son public dans un habile tour de passe-passe. Plus kickeur macabre que chanteur de Macarena, « autant puriste que futuriste », le rappeur désenchanté détonne dans un rap game français dopé à la pop ensoleillée. C’est sans doute cette intransigeance qui a conduit Damso à poser avec lui sur l’imparable « RVRE » et à l’inviter sur sa dernière tournée. Le kid est mort, vive 404Billy. • ÉRIC VERNAY

Le rappeur désenchanté détonne dans un rap game français dopé à la pop ensoleillée.

KING PRINCESS

KOKOROKO

La nouvelle icône queer, c’est elle. Signée par Mark Ronson, la très jeune New-Yorkaise a charmé la pop US en un unique EP (Make My Bed, 2018). La faute à sa nonchalance enjôleuse, à ses clips en forme de vignettes vintage léchées et à ses titres sacrément bien roulés qui jonglent entre identité et intimité pour raconter sans fard et avec un humour irrésistible (« Pussy Is God ») l’amour, le sexe (« Talia ») et l’empowerment entre filles. Loud and proud. • ETAÏNN ZWER

Shabaka Hutchings, Nubya Garcia, Kamaal Williams... l’excitante scène underground londonienne réinvente le jazz, portée par une communauté de kids décomplexés. Dernière pépite en date : le collectif Kokoroko, mené par la trompettiste Sheila Maurice-Grey et révélé avec l’ultra smooth « Abusey Junction » (compilation We Out Here, 2018), dont la fusion magique entre afrobeat, highlife, soul et pulsations urbaines impose sa grâce groovy et chaleureuse. Jazz alive ! • E. Z .

: le 23 août à Rock en Seine

: le 3 septembre à Jazz à La Villette

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Grande Halle de la Villette 50 artistes - 4 scènes - 3 jours de fête

Jeudi 31 octobre by Skepta - Mura Masa - Hamza Zola - Ateyaba

:

Celeste - Duendita - Ezra Collective Flohio - Kojey Radical - Master Peace slowthai - The Comet is Coming Yussef Dayes…

Vendredi 1er novembre : Chromatics - Belle & Sebastian Primal Scream - Weyes Blood Barrie - Briston Maroney - Chai - Desire Drugdealer - Helado Negro - In Mirrors Jackie Mendoza - Nilüfer Yanya Orville Peck - Sheer Mag - Squid…

Samedi 2 novembre : The 1975 - Charli XCX 2manydjs (dj set) Aurora - SebastiAn Aeris Roves - Jamila Woods Jessica Pratt - Kedr Livanskiy Korantemaa - Scène Konbini… Tickets sur pitchforkmusicfestival.fr

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PLANS COUL’ À GAGNER

JEAN DUBUFFET EXPO

— : « Jean Dubuffet. Un barbare en Europe », jusqu’au 2 septembre au Mucem (Marseille)

Cet

© D. R.

Jean Dubuffet, Affluence, 1961

parcours de cette exposition, riche de près de trois cents pièces, objets et documents dévoilant une partie de la conception de ses œuvres, s’articule en trois sections. De ses figures fantasmatiques à sa critique de l’art en passant par sa période ethnographique et par l’éclosion de la notion d’art brut, le Mucem vient tisser le fil qui l’a mené de la célébration de « l’homme du commun » (celui plus banal que beau) à celle d’un relativisme absolu dans lequel l’ensemble des formes et des figures finissent par fusionner. • CORENTIN LÊ

OFF

été, rendez-vous à Marseille pour tout savoir du peintre et sculpteur français Jean Dubuffet, polémiste ayant revigoré l’avant-garde artistique européenne à la fin de la Seconde Guerre mondiale après avoir questionné les représentations picturales par la mise en avant de la folie et des marginaux. Mettre à nu des corps entassés dans des compositions déstructurées, à l’époque jugées barbares, comme dans son Affluence (1961) ou son célèbre Ontogénèse (1975), Dubuffet s’y est attelé durant presque quarante ans. Le

LE VOYAGE À NANTES

ÉVÉNEMENT

Comme chaque été depuis 2012, la ville de Nantes est investie par l’art sous toutes ses formes – peinture, graphisme, sculpture… Une ligne verte tracée au sol sert de guide pour se repérer dans cette installation insolite qui longe l’estuaire de la Loire. Gratuite dans la plupart des sites, cette escapade emprunte pour la première fois la célèbre butte Sainte-Anne. • Q. B.-G. La Colline du collectif Appelle-moi papa, 2018

: « Le Voyage à Nantes », jusqu’au 1er septembre

CHEFS-D’ŒUVRE DU GUGGENHEIM

EXPO

Une cinquantaine d’œuvres issue des collections de la Fondation Guggenheim sont montrées pour la première fois en Europe à l’occasion d’une exposition itinérante. Après le Guggenheim de Bilbao, l’Hôtel de Caumont expose à son tour des monuments de l’art moderne tels que Devant la glace d’Édouard Manet (1876) ou Le Moulin de la Galette de Pablo Picasso (1900). • Q. B.-G.

: « Chefs-d’œuvre du Guggenheim », jusqu’au 29 septembre Pablo Picasso, Le Moulin de la galette, 1900

à l’Hôtel de Caumont – Centre d’art (Aix-en-Provence)

COUP DE FOUDRE

EXPO

Investissant les 800 m de la Fondation EDF, les artistes Fabrice Hyber et Nathalie Talec illustrent le flux d’émotions qui nous traverse lors d’un coup de foudre amoureux. Le visiteur peut se déguiser, entrer dans des « chambres de sidération » ou danser dans une salle de bal où résonne, tous les jeudis, une playlist electro du DJ Christophe Vix-Gras. • Q. B.-G. HyberTalec, Cadavres exquis, 2019

: « Coup de foudre », jusqu’au 20 octobre à la Fondation EDF

© PHILIPPE PIRON / LVAN ; D. R. ; D. R.

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SONS

TY SEGALL — : « First Taste » (Drag City), sortie le 2 août

© DENÉE SEGALL

OFF

Après

deux albums en 2018, le prolifique Californien revient avec un First Taste gonflé à bloc d’électricité, de colère (politique ou introspective) et de recherches soniques. Dans le premier clip extrait de son nouvel album, « Taste », on voit Ty Segall assassiner un à un tous les membres de son groupe (sauf un), pour leur prendre leurs vêtements les plus scintillants, et finir par danser, seul au milieu de mannequins dénudés, paré d’un costume pailleté, parfaitement glam. « Our salivating makes it all taste worse » (« Notre salivation donne à tout un goût encore pire »), chante-t-il sur sa danse victorieuse, pointant le dégoût qui succède fatalement à l’appétit, dans un monde où l’envie et le conformisme s’apparentent à du vampirisme. C’est tout le sel de ce First Taste nouveau que de mettre ses auditeurs face à leurs responsabilités, en tant que narrateurs de leurs propres prophéties, décideurs de leurs choix les plus écœurants. Ty Segall ne s’épargne pas, dans le fracas électrique, « I am a rabbit and I worship the dog » (« Je suis un lapin et je vénère le chien »), se présentant en créature de Frankenstein, golem pétri de multiples glaises (John Lennon, T. Rex,

SI TON ALBUM ÉTAIT UN FILM ? « Je ne sais pas ce que ce serait exactement, mais j’espère quelque chose comme un mélange entre La Montagne sacrée d’Alejandro Jodorowsky et Hellraiser de Clive Barker, avec une éclaboussure du Sacré Graal

Led Zeppelin, ses parents ici) et de culpabilité. Celle-ci appelle à la rédemption, et l’album manie cette ambivalence, comme son titre : « L’avant-goût [« First taste », ndlr] a plusieurs sens, répond-il par mail : Péché, renaissance, enfance, curiosité, début d’une fin… J’aime beaucoup les paroles, les titres de chansons et les noms d’albums qui sont difficiles à interpréter. Les chansons sont parfois politiques, mais pas toujours. Elles peuvent être à textes, parfois juste sonores. » Et First Taste est spécialement sonore (de la fuzz partout), très chargé musicalement (on y entend koto, flûte à bec, bouzouki, mandoline, cuivres…), usant particulièrement de la stéréo, avec deux batteries (Ty Segall sur le haut-parleur gauche, Charles Moothart sur le kit côté droit), heavy, en un mot. Tout cela laisse peu de place au silence, comme le reflet d’un monde saturé de bruit, d’informations, de messages. « Le seul message que j’ai délibérément voulu diffuser, c’est l’intensité, et un léger stress. Je ne voulais pas faire un disque “sympa”. » Dans cette surcharge sonore, la voix de Ty Segall, toujours tendue et vibrante, au risque de casser, est un formidable fil d’Ariane vers une nouvelle saveur. • WILFRIED PARIS

des Monty Pythons. Mes chansons sont parfois politiques, parfois juste personnelles. J’aime quand l’auditeur crée une définition à lui. Peut-être que je voulais juste faire quelque chose de plus fort et de plus fucked-up… » TY SEGALL

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JUKE-BOX

« DANIEL DARC ÉTAIT AUTHENTIQUE. CE FILM LUI RESSEMBLE. » PREMIÈRE

« VIBRANT DE SINCÉRITÉ » MAGIC

LE RÉVEIL DES TROPIQUES : « L’Arbre à cames » (Flat Moon)

Nommé en référence à un dispositif mécanique, ce nouvel album des Lyonnais (issus de FOUDRE !, d’Oiseaux-Tempête, de Trésors ou de Casse Gueule) mêle divers enregistrements (scène, studio, usine désaffectée, nature) célébrant dix ans d’expérimentations psychédéliques. Entre krautrock, free et noise, le caractère hybride du collectif ressort ici en de longues jams hypnotiques, accordant les singularités en une fascinante alchimie. • W. P.

STEREO TOTAL

: « Ah ! Quel cinéma ! » (Tapete)

Cela fait vingt ans que Stereo Total fête son éternelle jeunesse pop, punk, disco ou new-wave, en héritiers de Jacno, de Telex ou de Charles Trenet. Ce douzième album est fidèle à l’esprit lo-fi et iconoclaste du duo, porté par les instruments cheap de Brezel Göring et la fausse ingénuité façon Bardot berlinoise de Françoise Cactus. Ils s’amusent ici des codes de la représentation féminine (ce « cinéma »), avec humour et énergie. • W. P.

: « Band Apart »

(Crammed Discs)

Crammed Discs réédite l’œuvre du duo franco-américain Band Apart, dont la trajectoire météorique (1981-1983) a laissé de belles traces dans le ciel de la no-wave, entre New York et Marseille. Minimalistes et brumeuses, les compos de Jayne Bliss (issue de la scène downtown de la fin des années 1970) et de M. Mader (compagnon phocéen d’Hector Zazou) font dissoner funk et new-wave, façon Lizzy Mercier Descloux codéinée, Theoretical Girls envapées. • W. P. ILLUSTRATION : SAMUEL ECKERT

UFO DISTRIBUTION PR ÉSENTE U N E PR O D U CT I O N SOMBRERO & CO

DANIEL PIE CES OF MY LIF E DARC

UN FILM DE

MARC DUFAUD ET THIERRY VILLENEUVE

AU CINÉMA LE 24 JUILLET

© Tous droits réservés

BAND APART


SÉRIES

THE LOUDEST VOICE — : Saison 1 sur Canal+ Séries

© SHOWTIME

OFF

À

dont il fut sur la fin très proche : mégalo, parano, et convaincu que les faits valent peu face aux opinions pourvu qu’on les assène suffisamment fort. Décidément plein de ressources, il incarne aussi l’avant-#MeToo, une sorte de Harvey Weinstein de l’info en continu accusé de harcèlement sexuel par plusieurs collaboratrices. McCarthy s’écoute parfois un peu maudire, à travers Ailes, les néoconservateurs d’autrefois et le pensionnaire actuel de la Maison-Blanche. Mais difficile, devant The Loudest Voice, de ne pas ressentir la même fascination morbide que devant la terrifiante Chernobyl. Ici, c’est le même effarement permanent devant la reconstitution édifiante d’une catastrophe dont on n’a pas fini de mesurer les retombées radioactives : l’effondrement moral de la fabrique de l’opinion en Amérique. • GRÉGORY LEDERGUE

travers le biopic du conservateur Roger Ailes, homme de télé qui avait l’oreille des grandes figures du Parti républicain, Tom McCarthy (Spotlight) règle ses comptes avec la droite américaine. Dans The Loudest Voice, le scénariste et son cocréateur Alex Metcalf (Sharp Objets) chargent d’abord leur protagoniste, ogre engloutissant tout sur son passage, en commençant par ensevelir l’acteur qui l’incarne (Russell Crowe) sous les prothèses. Depuis le lancement de Fox News en 1996, dont Ailes fut le grand architecte (« Laissons CNN apaiser le monde. Nous, on s’en tape, on est du côté de l’Amérique », dira-t-il après le 11-Septembre), jusqu’à sa mort en 2017, c’est la situation politique dans laquelle se trouvent aujourd’hui les États-Unis qui se dessine au fil des épisodes. L’homme a beaucoup en commun avec Donald Trump,

REVOIS

VOIS

PRÉVOIS

TUCA & BERTIE

EUPHORIA

FERTILE CRESCENT

Doublées par les humoristes Tiffany Haddish et Ali Wong, Tuca et Bertie sont deux dames-oiselles d’aujourd’hui, cool et trendy. Voilà, tout est dit à propos de ce cartoon signé par l’équipe de BoJack Horseman – dont on retrouve la patte graphique mais pas la mélancolie. Très chouette. • G. L .

Passé un pilote trash et putassier, la première série teen de HBO se laisse davantage apprécier pour ce qu’elle est : la proposition de Sam Levinson (Assassination Nation) de présenter avec force excès de mise en scène l’adolescence comme une expérience baroque. • G. L .

Arte continue à prendre le pouls de la planète et enverra cette fois Félix Moati en Syrie chercher sa sœur, partie combattre Daech. La série, en tournage, est pilotée par une équipe de scénaristes israéliens (dont ceux de False Flag) et est coproduite avec Hulu. • G. L .

: saison 1 sur Netflix

: saison 1 sur OCS

108

: saison 1 prochainement sur Arte


PREMIER DE LA CLASSE de Luc Besson

ANNA

LE ROI LION de Florian Henckel von Donnersmarck

avec la voix de Jean Reno

L’ŒUVRE SANS AUTEUR

FACTORY avec la voix de Philippe Lacheau

avec Pascal NZonzi et Michèle Laroque

de Yuri Bykov

COMME DES BÊTES 2

DIEGO MARADONA avec Chantal Ladesou, Julie Gayet et Lucien Jean-Baptiste

C’EST QUOI CETTE MAMIE ?!

PLAYMOBIL, LE FILM avec Dwayne Johnson, Jason Statham et Idris Elba

de Asif Kapadia

avec les voix de Kad Merad et Franck Dubosc

FAST & FURIOUS : HOBBS & SHAW

de Arnaud Desplechin

ROUBAIX, UNE LUMIÈRE

LA VIE SCOLAIRE

*Conditions générales d’abonnement consultables sur ugc.fr

– UGC CINÉ CITÉ – RCS de Nanterre 347.806.002 – 24 avenue Charles de Gaulle, 92200 Neuilly-sur-Sein - Capital social 12.325.016€

ONCE UPON A TIME… IN HOLLYWOOD de Quentin Tarantino

de Grand Corps Malade et Mehdi Idir

FRAIS D’ADHÉSION OFFERTS* DU 17 JUILLET AU 20 AOÛT 2019

PLUS DE 1000 FILMS PAR AN DANS PLUS DE 850 SALLES


JEUX VIDÉO

OBSERVATION

— : Devolver Digital

OFF

(PS4, PC)

Avec

son scénario catastrophe et sa capacité permanente d’expérimentation, Observation redéfinit le concept d’incarnation avec brio. Quelque part au milieu de l’espace, dans une station orbitale à la dérive, une astronaute se réveille après avoir perdu connaissance. Patatras ! les dégâts sont innombrables, la plupart des commandes ne répondent plus et ses collègues ont tous disparu. Aux commandes de SAM, son ordinateur de bord, il va nous falloir remettre l’appareil en route et tirer tout ça au clair. Au départ, nos moyens sont plus que limités : à peine peut-on passer d’une caméra à l’autre pour observer un décor sous plusieurs angles, ou actionner certaines écoutilles pour permettre à notre cosmonaute de se déplacer. Heureusement, notre I.A. gagne peu à peu en efficience : bientôt, elle saura piloter un

petit drone pour se balader librement dans la carlingue, ou pirater certains terminaux pour en apprendre toujours plus sur le secret de cet endroit maudit. À l’image de Stanley Kubrick et de son HAL 9000, la science-fiction n’a que trop exploité la figure de l’I.A. misanthrope et complotiste. Observation ose le postulat inverse : que se passe-t-il quand celle-ci possède une bonne âme, la nôtre ? Flirtant autant avec le réalisme pointu (le design de la station inspiré du vrai modèle SSI) qu’avec le trip ésotérique, la narration multiplie les rebondissements et les défis, comme pour mieux nous permettre de nous glisser dans la « peau » de SAM et de réfléchir comme elle. De cette aventure trépidante naît le plus beau des vertiges : devenir une machine, pour mieux nous connaître nous-mêmes. • YANN FRANÇOIS

OUTER WILDS

JUDGMENT

SUPER MARIO MAKER 2

Prisonnier d’une boucle temporelle, notre héros astronaute doit visiter les planètes de son système solaire pour briser ce maléfice… Pensé avec minutie, regorgeant de découvertes en tout genre, chaque monde se fait ode à l’esprit d’aventure. Enchanteur. • Y. F.

Les créateurs de la saga Yakuza reviennent avec un nouveau spin-off. Dans une reproduction aussi fidèle qu’outrancière du quartier de Shinjuku, on dirige un détective privé chargé d’enquêter sur plusieurs affaires mafieuses… Les héros changent, mais le génie narratif, lui, demeure intact. • Y. F.

Alors que l’on croit connaître Mario par cœur, cet opus créatif – il faut construire ses propres niveaux de A à Z – vient nous donner une bonne leçon. Quel que soit l’habillage graphique (de la NES à la Wii U, tout y est) que l’on choisit, le monument de Nintendo n’a jamais fini de nous surprendre. • Y. F.

: (Annapurna Interactive | PC, One)

: (Sega | PS4)

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: (Nintendo | Switch)


Chaque mois, notre chroniqueur explore les mondes du jeu vidéo indépendant en donnant la parole à l’un de ses créateurs.

Un petit cube de couleur doit aller d’un bout à l’autre d’un parcours constitué d’obstacles et de précipices en tout genre. Le programme a l’air simple, mais l’originalité est ailleurs : chaque note de la bande-son (electro) va avoir une incidence sur notre périple. Parfois, c’est une plate-forme qui disparaît et revient. Parfois, c’est un piège mortel ou un bonus à attraper à toute vitesse qui s’invite dans l’équation. Pour survivre, pas le choix : il nous faut caler nos mouvements sur chaque pulsation, étudier le niveau comme d’autres apprendraient une partition par cœur, et recommencer sans relâche jusqu’à choper le bon tempo… On doit ce petit prodige à Ludopium, un studio allemand basé à Cologne. Selon Francesca Calderoni, coordinatrice du projet, « tout est parti d’une idée un peu folle : créer une synesthésie parfaite entre image et son dans la tête des joueurs, pour qu’ils soient capables d’avancer leur cube sans avoir à regarder l’écran ». Repéré par Arte, le studio bénéficie alors d’un budget plus confortable pour transformer le prototype en jeu à part entière, avec pour seul contrainte de devoir créer une expérience aussi accessible qu’évolutive, avec une nouvelle idée par niveau. « Souvent, nos joueurs essaient de s’approprier le jeu, comme s’ils apprenaient vraiment à danser. On ne s’y attendait vraiment pas. » Même combat pour l’esthétique minimaliste (inspiré des tableaux de Victor Vasarely), choisie pour garantir une immersion immédiate dans un monde harmonieux de sons et de formes. « L’abstraction est un outil précieux pour permettre à n’importe qui sur Terre d’interpréter les règles d’un jeu en quelques secondes. » En effet, ce petit cube est bien parti pour faire danser la planète entière. • YANN FRANÇOIS

— : « Vectronom »

(Ludopium | PC, PS4, Mac)


LIVRES

LAISSER DES TRACES Vous

avez adoré les élections européennes ? La politique vous passionne ? En attendant les municipales, ouvrez le dernier roman d’Arnaud Dudek, Laisser des traces. Vous y découvrirez, croqué avec malice, le petit monde des appareils partisans, des campagnes électorales et des coups fourrés tacticiens. Dudek raconte l’histoire de Maxime, un jeune loup aux dents longues, membre d’un nouveau parti qui rappelle vaguement LREM. Élu maire d’une ville moyenne, Maxime se frotte aux difficultés quotidiennes de la gestion d’une commune – les problèmes de logement, les services publics à assurer, les plans d’urbanisme à réviser. Mais il a déjà des vues plus ambitieuses. Il se verrait bien siéger au palais Bourbon, voire entrer au gouvernement. Un drame survenu non loin de sa mairie le rappelle brutalement au sens profond de son engagement politique, et lui inspire des projets soudain très différents… Laisser des traces offre deux romans pour le prix d’un : d’un côté, c’est une satire grinçante du milieu politique, avec ses manœuvres d’appareil, sa langue de bois technocratique, ses mensonges et son cynisme ; de l’autre, c’est une célébration humaniste du geste gratuit, du don de soi, du dévouement à un idéal qui ne rapporte rien mais qui grandit l’âme, preuve qu’un incorrigible optimiste sommeille chez Arnaud Dudek, lequel signe là son meilleur livre. On retrouve son regard doux-amer sur les choses, son humour

décalé, ses petites potacheries malicieuses – voyez les titres des trois parties, « Carottes et polémiques », « Brouillard et sociologie », « Tajines et cahiers ». Attentif aux détails, aux marqueurs sociologiques qui classent les gens et révèlent l’esprit de l’époque, il excelle dans l’art du portrait express, résumant ses personnages en moins d’une ligne – « Soixante-treize kilos, quarante-trois ans, treize de tension ». Laisser des traces

OFF

On retrouve l’humour décalé d’Arnaud Dudek, ses petites potacheries malicieuses. s’impose ainsi comme une jolie comédie pleine de charme et de piquant, illuminée par la tendresse bienveillante de l’auteur pour ses personnages, spécialement les seconds rôles, les modestes, les anonymes. Vous aimez la politique ? Lisez ce roman. Vous la détestez ? Lisez ce roman, il pourrait bien vous réconcilier avec elle. • BERNARD QUIRINY

QUELQUES CAFÉS ITALIENS

L’ALTANA OU LA VIE VÉNITIENNE

Un excellent poche pour l’été ? Patrick Mauriès promène son regard d’érudit dandy de Milan à Rome dans ce petit bijou entièrement dédié aux cafés italiens, lieux de sociabilité, de littérature et d’histoire. Une perle chic, à lire avec un nuage de lait. • B. Q.

Un excellent poche pour l’été (bis) ? Aucun écrivain français n’a aimé Venise comme Henri de Régnier. Il l’explore sous toutes ses coutures dans ce livre qui, quatre-vingt-dix ans après sa parution, reste le meilleur guide pour découvrir les secrets de la Sérénissime. • B. Q.

(Arléa, 112 p.)

(Omnia Poche, 286 p.)

: de Patrick Mauriès

: d’Henri de Régnier

112

— : « Laisser des traces » d’Arnaud Dudek (Anne Carrière, 188 p.)

INCOGNITA INCOGNITA Un excellent poche pour l’été (ter) ? L’Anglais Mark Forsyth vous explique pourquoi le plus important n’est pas ce que l’on sait, ni ce que l’on sait ignorer, mais ce que l’on ne sait pas ne pas savoir. Une leçon de sagesse en moins de 50 pages, à lire le temps d’un trajet. • B. Q.

: de Mark Forsyth (Les Éditions

du Sonneur, 48 p.)


JEAN-MARC DUMONTET

présente

29 août / 10 septembre

ALEX LUTZ

Cheval

Photo Hélène Pambrun

Graphisme : Hartland Villa

OCTOBRE

Licence : E.S. - 1083294 - 1041550 - 1041546 - 1041547

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M M J V S D L M M J V S D L M M J V S D L M M J V S D L M M J

Lumières

TOM DINGLER

Thér. de l'E. Léger Gérard Fr. d'Assise Fleur Bruno Serge Pélagie Denis Ghislain Firmin Wilfried Géraud Juste Thér. d'Avila Edwige Baudouin Luc René Adeline Céline Elodie Jean de C. Florentin Crépin Dimitri Emeline Jude Narcisse Bienvenu Quentin

V S D L M M J V S D L M M J V S D L M M J V S D L M M J V S

Toussaint Défunts Hubert Charles Sylvie Bertille Carine Geoffroy Théodore Léon Armist. 1918 Christian Brice Sidoine Albert Marguerite Elisabeth Aude Tanguy Edmond Prés. de Marie Cécile Clément Flora Catherine Delphine Sévrin Jacq. de la M. Saturnin André

JANVIER

DÉCEMBRE

NOVEMBRE 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

DAVID CHAILLOT

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D L M M J V S D L M M J V S D L M M J V S D L M M J V S D L M

Florence Viviane Fr.-Xavier Barbara Gérald Nicolas Ambroise Concept. Pierre Fourier Romaric Daniel Jean. F. de C. Lucie Odile Nianon Alice Gaël Gatien Urbain Zéphyrin Pierre Hiver Hiver Adèle Noël Etienne Jean Innocents David Roger Sylvestre

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Jour de l'an Basile Geneviève Odilon Edouard Mélaine Raymond Lucien Alix Guillaume Pauline Tatiana Yvette Nina Rémi Marcel Roseline Prisca Marius Sébastien Agnès Vincent Barnard Fr. de Sales Conv. S. Paul Paule Angèle Th. d'Aquin Gildas Martine Marcelle

* Le Jazz n’est pas mort

OCTOBRE 2019 - JANVIER 2020

LICENCE : 2-T1005584 - DESIGN : YOCITY.FR

Mise en scène


BD

OFF

LES FLEURS ROUGES

C’est

— : de Yoshiharu Tsuge (Cornélius, 260 p.) —

un univers entier, habité de personnages errants dans les marges du Japon ; c’est un noir et blanc ancestral, gras et étiré, limpide, qui s’offrent à nos regards. Auteur méconnu en France, élève prolifique de Shigeru Mizuki, Yoshiharu Tsuge nous livre ici ses obsessions sous forme de nouvelles, enfin traduites, parues dans le célèbre magazine Garo à partir de 1967. Chez Tsuge, tout part de l’attention portée aux détails, aux rythmes de l’environnement et au temps qui passe. Trait caractéristique de son graphisme, la nature est dessinée avec application alors que les personnages sont parfois de simples contours. Chaque histoire est un condensé brut d’une vie en cours – à la limite, toujours, de la disparition. Pionnier de la bande dessinée autobiographique, Tsuge devient le personnage de quelques histoires qui nous parlent toutes d’un conflit temporel : lorsque le Japon se modernise, le passé se fait tradition et laisse flotter, à ras des ruisseaux, un intense sentiment de mélancolie. • ADRIEN GENOUDET 114


LE PARC DES PRINCES COMME VOUS NE L’AVEZ JAMAIS VU

STADIUM TOUR HISTORY ROOM ARCADE VR SOYEZ LES PREMIERS À VIVRE L’EXPÉRIENCE

DÈS LE 22 JUILLET INFOS ET RÉSERVATIONS SUR

EXPERIENCE.PSG.FR


LES ACTUS mk2

BOUILLON DE CULTURE Cette année encore, les salles mk2 accueillent une riche saison culturelle. Outre les traditionnelles conférences et les différents cycles pour découvrir les arts, les sciences et l’histoire, trois nouveaux programmes déversent eux aussi leur flot de connaissance. Des agendas sont disponibles aux caisses des cinémas ; et toutes les infos, sur le site mk2.com

« CULTURE POP ET PSYCHIATRIE » À partir de la culture pop, le médecin psychiatre Jean-Victor Blanc propose, un samedi par mois au mk2 Beaubourg, de donner des clés de compréhension des enjeux de la psychiatrie moderne. Pourquoi associer culture pop et psychiatrie ? Les troubles psychiques sont très fréquents : une personne sur quatre est concernée au cours de son existence. Pourtant, ils sont mal connus et sont l’objet de beaucoup de préjugés négatifs. Au cinéma, la schizophrénie est trop souvent amalgamée avec le fait d’avoir plusieurs personnalités. Mais je garde espoir, car les choses évoluent positivement depuis quelques

années, par exemple le regard posé sur le trouble bipolaire dans Happiness Therapy est bien moins négatif. Comment sont organisées vos conférences ? C’est très variable. J’utilise les films comme support à la discussion, pour aborder des thèmes qui sont parfois peu connus ou tabous, comme la dépression post-partum. Avec des références très

vastes, de Melancholia aux Kardashian, en passant par Sophie Calle ou Dalida, j’essaye de rendre accessible à tous la compréhension de la santé mentale, avec un ton ludique. Quels peuvent être les enjeux d’une plus grande pédagogie à propos de la santé mentale ? Il y en a tant ! Au vu de la fréquence des troubles psychiques, on y sera tous confrontés à un moment de notre vie, à titre personnel ou à travers notre entourage. Mieux les comprendre, c’est permettre une meilleure inclusion des personnes concernées. Faire référence à Amy Winehouse ou à Virgin Suicides pour en parler, c’est un moyen de les illustrer et de diminuer cette stigmatisation dont souffrent les patients. Les succès de films comme Black Panther ou Le Secret de Brokeback Mountain ont déjà montré que la culture pop était un formidable catalyseur des évolutions sociétales. À quand le tour de la psychiatrie ?

: programme complet sur mk2.com

« LUNDIS PHILO DE CHARLES PÉPIN » Charles Pépin vous convie chaque lundi à un cours de philo dans un lieu propice à la réflexion et à l’introspection : une salle de cinéma. Des relations humaines (« Et si nous cessions de “communiquer” pour apprendre à parler ? ») aux questions existentielles (« Comment épouser le mouvement de la vie ? »), ses conférences apportent des réponses accessibles, qui sont ensuite soumises au débat. Suite à leur succès, elles sont maintenant proposées les lundis à 12 h 30 au mk2 Bastille (Côté Beaumarchais) en plus du mk2 Odéon (côté St Germain) à 18 h 30.

: programme complet sur mk2.com 116


RENTRÉE CULTURELLE AU BAL DES INITIÉS

VERS L’INFINI ET AU-DELÀ

On a beau les avoir vus mille fois, ils sont toujours aussi irrésistibles : les films culte s’invitent de nouveau en salles cette saison, particulièrement avec le bien nommé cycle « Cultissime ! », toujours les dimanches après-midis au mk2 Gambetta. D’ici décembre, vous serez notamment conviés au sanguinaire bal de fin d’année de Carrie, l’héroïne de Brian De Palma, aux parties de bowling du Dude du Big Lebowski des frères Coen, et aux rêveries sans pareilles de Hayao Miyazaki (Le vent se lève, Princesse Mononoké…). Le magazine en ligne madmoiZelle se joint à la partie en proposant, les mardis soirs, sa propre sélection de films inoubliables dans son cycle « CinémadZ » au mk2 Bibliothèque.

La première image d’un trou noir super massif dévoilée le 10 avril dernier vous travaille encore ? Le cycle « Venez parcourir l’univers avec Christophe Galfard » est fait pour vous. Spécialiste des trous noirs, le physicien Christophe Galfard vous invite à percer les mystères de l’univers : relativité gravitationnelle, monde quantique… Suite à leur succès, ses conférences ont maintenant lieu au mk2 Odéon (côté St Germain) un vendredi par mois en plus du mk2 Quai de Loire un samedi par mois. Pour entrer en connexion spirituelle avec ces autres dimensions, « Karma Cinéma » vous propose des cours de méditation avec Sophia L. Mann un mardi par mois au mk2 Bastille (côté Fg St Antoine).

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« LA POUDRE REPLAY AVEC LAUREN BASTIDE » Huit épisodes du podcast féministe La Poudre à réécouter collectivement, un samedi par mois au mk2 Quai de Seine, lors de séances accessibles à tous suivies d’une discussion. Pourquoi réécouter un podcast, qui plus est collectivement ? J’ai constaté que les épisodes de La Poudre continuaient à susciter des réactions longtemps après leur mise en ligne. J’ai eu envie de voir cette communauté se matérialiser dans la vraie vie. Une écoute collective est par ailleurs une expérience très riche. Au début, on ne sait pas bien où regarder ; puis quelque chose s’installe dans la salle et une connexion se crée entre les

membres du public. C’est très fort en émotions ! Les dispositifs sous-titrés et interprétés en langue des signes vous semblent-ils trop rares aujourd’hui ? Oui, il y en a très peu. Un podcast, malheureusement, n’est accessible qu’aux personnes entendantes, à moins de fournir pour chaque épisode des retranscriptions qui induisent un travail très long que nous

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n’avons pas souvent la possibilité de fournir. Ce cycle est donc une opportunité de permettre enfin aux personnes sourdes et malentendantes d’écouter La Poudre. Pourquoi la parole et l’écoute sont-elles primordiales pour les luttes féministes ? Parce que les femmes bénéficient d’un temps de parole inférieur à celui des hommes dans les médias, mais aussi au cinéma, dans les conférences, dans les universités et dans l’ensemble de l’espace public. Or, cette rareté entraîne la persistance des stéréotypes de genre. En multipliant les récits, on apporte de la nuance et on déconstruit les préjugés. C’est pour cela qu’on dit souvent, dans le mouvement féministe, que « le personnel est politique ». Quant à l’écoute, elle déclenche une parole profonde et authentique. Je m’émerveille chaque jour de tout ce que j’apprends des femmes que j’interviewe : elles nourrissent mon engagement féministe.

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LES ACTUS mk2 « SCIENCES SOCIALES & CINÉMA »

ART VIVANT En format long ou court, le cinéma contemporain qui fait bouger les lignes investit les salles mk2 pour dresser un état des lieux des préoccupations actuelles et des artistes de demain. Organisé par l’ACID, le programme « Acid pop », au mk2 Quai de Seine, donne la parole à des cinéastes indépendants de toutes nationalités qui viennent partager leurs expériences de travail autour de thématiques données. Le cycle « Déjà demain », par l’Agence du court métrage, propose quant à lui des rencontres au mk2 Odéon (côté St Michel) avec des réalisateurs prometteurs qui viennent présenter des œuvres en format court qui se sont fait remarquer, comme Mémorable de Bruno Collet, Cristal du court métrage au festival d’Annecy cette année.

Le cinéma n’est pas qu’une imbrication d’images et de sons ; c’est aussi un miroir des sociétés dans lesquelles nous vivons. Un lundi par mois, au mk2 Bibilothèque, le cycle « Sciences sociales & cinéma » explore ce rapport en projetant un film qui est ensuite commenté par un enseignant ou une enseignante de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Cette nouvelle saison nous invite à étudier les utopies avec un programme de films qui permet de scruter le mythe de Thomas More sous tous les angles – par exemple Captain Fantastic de Matt Ross, qui suit une famille américaine isolée du monde par un père de famille idéaliste.

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« VOTRE CERVEAU VOUS JOUE DES TOURS » Docteur en neurosciences et psychologue, Albert Moukheiber propose, un dimanche par mois au mk2 Bibliothèque, d’analyser le comportement du cerveau humain. Quelles conclusions tirez-vous de votre étude sur le fonctionnement de notre cerveau ? Que nous sommes tous en train de reconstruire le monde grâce à lui. Le réel existe, mais nous ne saurions l’appréhender sans que notre cerveau l’interprète. Récemment, nos connaissances sur ses mécanismes se sont développées grâce aux progrès techniques. Ce cycle de conférences a pour objet de faire le point sur de nouvelles

connaissances ainsi que sur leurs implications concernant divers sujets, telles que les problématiques sociétales, les fake news ou l’écologie. Votre cycle reprend-il aussi des exemples tirés de votre livre, qui porte le même titre, sorti cette année ? Certains thèmes sont communs. Lors de la deuxième conférence, nous parlerons par exemple de biais cognitifs, et nous allons aussi creuser un peu plus en

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détail certains thèmes qui ont été survolés dans le livre – les mythes actuels autour des neurosciences, le Q.I. et ses implications chez les enfants – mais aussi chez les adultes. Comprendre la cognition, c’est aussi une forme de thérapie sur le plan personnel et affectif ? Mes recherches sont basées sur la connaissance. En tant que clinicien, je travaille par exemple avec mes patients sur leurs acquisitions de connaissances sur eux-mêmes – l’estime de soi, l’humeur, le stress... Avec le public en général ou les entreprises, je travaille sur les mécanismes qui peuvent modifier la manière dont on acquiert des connaissances sur le monde qui nous entoure – nos collègues, la politique, la santé publique... Je travaille aussi sur la prise de décisions et le raisonnement critique. Plus récemment, j’ai aidé à fonder un laboratoire de recherche, Chiasma, qui étudie les freins cognitifs et comportementaux face à l’urgence climatique.

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RENTRÉE CULTURELLE

1 HEURE POUR LE SAVOIR En soixante minutes chrono, des historiens de l’art, des sciences, de la société, des civilisations, du cinéma vous font découvrir une œuvre, une personnalité ou même une cité millénaire. Une heure, c’est presque le temps qui sépare, en voiture, Paris de Germignonville dans l’Eure-et-Loir. Une heure, c’est plus ou moins le temps qu’il faut pour regarder un épisode de sa série préférée. Une heure, c’est aussi le temps de cuisson d’un gratin de rutabaga. Mais une heure, c’est surtout le temps qu’il faut pour découvrir en famille, dans les cinémas mk2 tout au long de l’année, un film, un artiste, un musée, une cité millénaire ou encore un

mythe. Organisées par Des Mots et Des Arts, de nombreuses conférences viennent éclairer des œuvres, des lieux ou des figures célèbres, dont Agnès Varda, Eugène Delacroix, John Ford, Rosa Luxembourg, Le Corbusier, Jérôme Bosch, Camille Claudel, et même Paris, le musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg ou Babylone. Ces monuments de l’histoire de l’art et du cinéma se regroupent au sein de cycles thématiques dans lesquelles des historiens et des historiennes

POUR LES ENFANTS Parce qu’il n’y a pas d’âge pour s’émerveiller devant un film, mk2 propose plusieurs programmes destinés à la prime jeunesse avide d’images en mouvement. Les plus petits, de 2 à 4 ans, ont droit à leurs séances dédiées avec le cycle « Bout’Chou », qui propose des films de moins d’une heure, dans une lumière tamisée et avec un niveau sonore adapté pour leurs oreilles juvéniles. Emmenez-les voir Les P’tits Explorateurs ou

dressent des ponts et créent des résonances à travers les âges et les courants. Fanny Laruaz explore notamment les cités millénaires d’Uruk, de Troie ou de Persépolis au mk2 Grand Palais, Nachiketas Wignesan analyse un film (Vertigo, Blow Up…) ou l’œuvre d’un cinéaste (Akira Kurosawa, Brian De Palma, Stanley Kubrick, Quentin Tarantino…) au mk2 Odéon (côté St Michel), quand Paul Bernard-Nouraud et Nicolas Xavier-Ferrand décryptent au mk2 Parnasse et au mk2 Bastille (côté Beaumarchais) La Vierge à l’enfant avec sainte Anne de Léonard de Vinci, Les Ménines de Vélasquez ou encore La Vénus d’Urbin de Titien. Au carrefour des arts et des pratiques, un cycle réaffirme l’importance du genre féminin dans l’histoire de la société, des arts et des sciences. Tatiana Mignot et Manon Roth retracent – en une heure donc – au mk2 Odéon (côté St Michel) le parcours exceptionnel de femmes d’influence telles que George Sand, Simone de Beauvoir, Marie Curie ou encore Charlotte Perriand. Vous ne pourrez pas dire que vous n’aviez pas le temps.

: programme complet sur mk2.com

Le Petit Monde de Bahador et grâce à vous ils pourront dire, eux aussi, qu’ils sont tombés dedans quand ils étaient petits. Dans le cadre du cycle « Junior », les enfants plus âgés, dès 5 ans, pourront de leur côté (re) découvrir l’animation traditionnelle devant Dumbo, Mary Poppins, Les 101 Dalmatiens ou Robin des bois, et aussi s’émouvoir du stop motion avec Le Piano magique ou Le Voyage de Tom Pouce. Et parce que le futur n’attend pas, pourquoi ne pas emmener tout ce beau monde explorer les mondes virtuels du mk2 VR. Des jeux et des expériences inédites et immersives y sont à découvrir en famille. Également pour les petits et les grands, le cycle « 1 heure, 1 mythe en famille », organisé par Des Mots et Des Arts, revient au mk2 Quai de Loire sur les grandes figures de la mythologie grecque et de l’Antiquité. Présentées par l’historienne de l’art Cécile Lecan, ces conférences narrent les histoires passionnantes et épiques de la guerre de Troie, d’Ulysse, d’Orphée et Eurydice ou des douze travaux d’Héraclès.

: programme complet sur mk2.com 119


LES ACTUS mk2

OFF

© MK2+

CINEMA PARADISO : LE RETOUR

Pour

les 30 ans de sa pyramide, le Louvre vous invite au cinéma, avec des projections gratuites de films culte en plein air dans sa cour carrée. Après deux éditions sous la nef majestueuse du Grand Palais (en 2013 et 2015), Cinema Paradiso, la salle de cinéma éphémère de mk2, s’installe au cœur du plus grand musée du monde. Du 19 au 26 juillet, les spectateurs sont invités à pénétrer chaque soir dans la cour carrée, métamorphosée pour l’occasion en festival de cinéma en plein air : 3 000 places face à un écran géant de 24 mètres de long. Les visiteurs profiteront de nombreuses animations (food court, cours de danse, ping-pong, pétanque…) jusqu’à 22 heures, heure du début de la séance. Confortablement lovés dans des chaises longues, ils pourront redécouvrir les secrets des galeries du musée en compagnie du

professeur Robert Langdon (Da Vinci Code), parcourir l’ancien château avec La Reine Margot pour guide, réveiller les momies avec les éclats de colère de Cléopâtre (Astérix et Obélix. Mission Cléopâtre). Au programme également : Visages villages, Cinema Paradiso, Indiana Jones et la dernière croisade, Le Voyage de Chihiro et Quand Harry rencontre Sally. L’accès aux projections est gratuit, mais la réservation en ligne est obligatoire. • CLAUDE GARCIA

— : du 19 au 26 juillet, à partir de 19 h, gratuit, réservation obligatoire sur www.mk2cinemaparadiso.com, Une coproduction Le Louvre, Kinoshita Group et mk2

mk2 SUR SON 31 Cet été, trois films sont projetés lors de plusieurs séances du cycle Cultissime ! certains dimanches après-midi au mk2 Gambetta.

DIMANCHE 18 AOÛT Projection d’Arrietty de Hiromasa Yonebayashi.

DIMANCHE 25 AOÛT

Projection du Vent se lève de Ken Loach.

120

DIMANCHE 1er SEPT.

Projection de Porco rosso de Hayao Miyazaki.


LIBERTÉ  !

Chez k , tous les jours à toutes les séances, votre place de cinéma à

Cet été, Bordeaux associe moult talents contemporains à sa riche histoire pour une saison culturelle placée sous le signe de la liberté, avec des concerts ensoleillés, des spectacles vivants et des expositions riches en planches de surf.

— : du 20 juin au 20 août à Bordeaux

5

k

Bastille

Quai de Seine

Odéon

Bibliothèque

Gambetta

Quai de Loire Beaubourg

Nation

Parnasse

Grand Palais

Que peuvent bien avoir de commun la figure du surfeur en take off sur sa longboard et l’allégorie révolutionnaire du tableau d’Eugène Delacroix La Grèce sur les ruines de Missolonghi ? Toutes les deux sont présentes cet été à Bordeaux et viennent représenter, à leur façon, une appétence partagée pour la liberté. La première est à retrouver tout au long de cette rafraîchissante saison culturelle, durant le parcours « La Déferlante surf » au musée d’Aquitaine, au cours de l’expo « Surf Tribe » de Stephan Vanfleteren à la cour Mably ou à travers la rétrospective « Life’s a Beach » du photographe Martin Parr qui jalonne les grilles du jardin public. La seconde, elle, est au centre de l’exposition « La Passion de la liberté. Des lumières au romantisme » à la galerie des Beaux-Arts, l’un des temps forts de cette saison qui offre décidément son lot d’événements à ne pas manquer. Parmi eux : un parcours urbain consacré à l’artiste lituanien Žilvinas Kempinas et conçu par JoséManuel Gonçalvès, qui a élu domicile le long des quais de la Garonne et à la chapelle du Crous ; des concerts prenant la forme de croisières musicales à bord du Sicambre, quai des Chartrons ; ou encore la série d’installations sportives « Play ! », créée par le skateur Léo Valls en association avec l’artiste et designeur Nicolas Malinowski, qui met un point d’honneur à repenser la notion de liberté par l’entremise du mouvement dans l’espace public. Rien de mieux pour confirmer cette aspiration urbaine et libertaire que d’explorer, à votre tour, la ville cet été à la recherche d’une nouvelle vague (culturelle). • CORENTIN LÊ

© MARTIN PARR / MAGNUM PHOTOS / LA COMPAGNIE CULTURELLE

Martin Parr, Devon et Cornwall England, 2017

* € 0 6,9

la carte

Quai de Seine Quai de Loire Gambetta Grand Palais

Beaubourg Bastille Odéon Parnasse

Nation

Bibliothèque

* Pour l’achat d’une carte 5 à 34,50€, pour 1 à 3 places par séance Valable 1 an ou 2 mois après la 1ère date d’utilisation - Hors films en 3D relief


LES ACTUS mk2

MK2 ET LE PSG LANCENT

OFF

© MK2+

PSG EXPERIENCE

Le

club de football parisien s’associe à l’entreprise cinématographique pour réinventer la visite du Parc des Princes au moyen de technologies immersives de pointe. Visiter les vestiaires, s’asseoir sur le banc de touche, mais aussi survoler le célèbre stade ou arrêter les coups francs de Kylian Mbappé… PSG Expérience propose toutes sortes d’activités regroupées dans trois lieux. Le PSG Stadium Tour, d’abord, prend la forme d’une visite de stade inédite, enrichie par des dispositifs d’immersions, qui donne au public accès aux coulisses de l’exploit. La History Room, ensuite, permet de revivre les grands moments de l’histoire du club, grâce à une projection vidéo englobant le spectateur, qui déambule ainsi dans le récit avant de

découvrir le mur des trophées du PSG. La PSG Arcade VR, enfin, une salle d’arcade de 400 m2 dédiée à des expériences de réalité virtuelle telles que voler au-dessus de Paris et du Parc des Princes grâce au Birdly, enfiler les gants du gardien de but du PSG pour arrêter les tirs d’Ángel Di María, revivre le dernier classico contre Marseille en vidéo à 360 degrés, ou même faire du rameur sur la Seine avec des joueurs parisiens. • CLAUDE GARCIA

— : Ouverture au public le 22 juillet, toutes les informations et billetterie en ligne sur experience.psg.fr

VR ARLES FESTIVAL Parmi les nombreux événements associés à la 50e édition des Rencontres de la photographie d’Arles, il en est un qui se consacre aux œuvres cinématographiques tournées en réalité virtuelle et qui propose une idée moderne et ludique du septième art. Cette année, les dix-huit films en compétition (le jury est présidé par Charlotte Rampling) sont répartis en trois catégories correspondant à autant de façons de travailler le réel : le réinterpréter (Fictions), en raconter les enjeux sociaux et politiques selon une forme documentaire (Versions) ou en imaginer les prolongements surnaturels ou abstraits (Visions). On peut notamment y découvrir 7 Lives de Jan Kounen, Charles Ayats et Sabrina Calvo, sur les expériences de mort imminente, ou le cartoon de science-fiction Bonfire d’Eric Darnell (coréalisateur des trois volets de Madagascar). Le jeune public est aussi convié à plusieurs ateliers, comme la création d’un jardin en réalité augmentée. • Q. B.-G.

: jusqu’au 25 août à Arles, à partir de 6 ans

122


Photographie : © Alexandre Chamelat / Conception graphique : direction de la communication, mairie de Bordeaux 2019

une saison culturelle

du siècle des Lumières à l’esprit océan

20 juin 20 août 2019


YEARS AND YEARS SEULEMENT AVEC ¢SÉRIES Dès juin avec ¢SÉRIES. En exclusivité sur SVOD. À partir de 6,99 € par mois pour une connexion à la fois sur PC/Mac, tablette ou smartphone. Pour toute souscription au service SVOD ¢SÉRIES en France métropolitaine. Sauf résiliation avant échéance mensuelle, renouvellement annuels. Rendez-vous sur boutique.canal.fr

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