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Smartlist : 4 pistes pour le développement durable
Peut-on atteindre les recommandations des Nations-Unies ?
La Belgique a encore fort à faire pour atteindre les 5 “P” (People, Peace, Prosperity, Planet, Partnership) recommandés par les Nations-Unies. Ces Objectifs de Développement Durable (ODD) font partie d’un ambitieux plan d’action à concrétiser à l’horizon 2030. Quels moyens pouvons-nous mettre en œuvre pour tenir ces engagements ?
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Décloisonner les objectifs.
Pour parvenir à la réalisation des ODD, il est nécessaire d’envisager les 5P comme des enjeux interconnectés. En effet, l’effet boule de neige qu’une décision peut entraîner sur un autre secteur n’est pas à prendre à la légère. Privilégier uniquement l’approche analytique pour faire face à un problème n’est plus suffisant. Elle doit être couplée à une analyse systémique. Trouver des solutions en vue d’un monde plus durable, plus transparent, plus équitable ne peut se faire qu’en prenant en compte les aspects économiques, sociaux et écologiques, et en les considérant comme un ensemble à part entière. Il faut revoir les méthodes, comprendre les enjeux et les impacts de celles-ci. L’économie fonctionnelle en est un exemple concret : on partage la ressource sans en transférer la propriété. Il n’est plus question ici de miser sur l’acte d’achat, mais plutôt sur l’usage qui en est fait. On se repose dorénavant sur la qualité plutôt que sur l’extraction compulsive de ressources. Il est nécessaire de faire durer le bien ou le service en question afin de réduire le gaspillage de ressources. Par exemple, en mettant à disposition une batterie ou une chaudière à destination de tout un quartier ou d’une communauté énergétique. De cette manière, il est plus simple d’obtenir un équilibrage entre la production et la consommation, et par conséquent de mieux gérer les ressources.
Participer tous ensemble à l’effort.
Pour atteindre les 5 “P”, il n’y a pas d’autre choix que l’union. C’est ensemble que nous réussirons ou nous échouerons. Par conséquent, Il faut cesser les discours polarisants, mettre un terme à la division afin de réunir tous les citoyens en vue d’un même objectif : créer un monde plus juste et plus durable pour un avenir meilleur. Faire un petit geste tous les jours individuellement est une noble intention, mais ce sera malheureusement insuffisant pour nous permettre d’atteindre les objectifs recommandés par la communauté scientifique. La sobriété énergétique peut faire peur, mais elle est indispensable, tant pour les particuliers que pour les entreprises. Une transition socioéconomique-écologique-énergétique réussie passe par plus de dialogue et de cohésion. Blâmer les plus pollueurs, qui n’ont parfois tout simplement pas les moyens de s’offrir un logement équipé de chaudières moins énergivores ou encore une voiture électrique, ne fait que renforcer la division. C’est ensemble qu’il faut trouver des solutions afin d’adopter des alternatives plus vertes et plus durables. Par exemple, avec les Social Impact Bond (Mesures d’Impact Social) qui offrent la possibilité d’investir dans des innovations sociales tout en réduisant le budget opérationnel de l’Etat. Il est primordial de créer des projets fédérateurs.
Pour laisser au placard nos mauvaises habitudes énergivores et polluantes, il faut oser sortir de notre zone de confort. Il est important de se mettre en quête d’alternatives plus vertes, moins lourdes, plus éthiques, plus durables et plus transparentes. De nombreuses initiatives prônent ces valeurs, qu’ils s’agissent de collectifs citoyens, d’ateliers de réparations d’objets électroniques, de mutualisation de véhicules ou encore de partages de ressources. Et elles sont à la portée de tous. Par exemple, “Just Electronics” à Bruxelles contribue à réduire l’empreinte écologique des consommateurs en leur proposant des d’appareils électriques et électroniques 100% reconditionnés. Le “Yuman Village” est également un acteur de choix en termes d’économie circulaire. Il offre une variété de produits issus de matériaux recyclés et éco-conçus pour limiter l’impact sur la planète ainsi que des solutions zéro déchets. Le collectif “Dégage”, quant à lui, est parvenu à mutualiser 370 véhicules entre 3.700 citoyens depuis 20 ans. Toutes ces expérimentations durables doivent être des sources d’inspiration, à la fois pour les particuliers, pour les autorités et les entreprises. Proposer une nouvelle façon d’envisager le partage de ressources, l’optimisation du budget des ménages, ou encore contribuer à la lutte contre l’obsolescence programmée sont les ingrédients qui nous permettront de nous rapprocher des objectifs à atteindre à l’horizon 2030.
Récompenser les efforts.
Pourquoi nous ruons-nous vers des enseignes polluantes, peu chères, qui produisent des objets dans des conditions de travail déplorables et de moindre qualité ? Tout simplement parce qu’elles sont faciles d’accès et que nous disposons d’un pouvoir d’achat suffisant pour nous les offrir. Cependant, s’en remettre à de telles enseignes revient à annuler tous les efforts déjà réalisés auparavant. Il est donc nécessaire de se tourner vers des alternatives durables et plus vertueuses. Celles-ci émergent un peu partout et partagent un point commun : récompenser le citoyen vertueux. À Bonheiden, par exemple, une commune anversoise, on récompense les enfants qui viennent à l’école en vélo. Ils reçoivent des “Dukats”, une monnaie locale qu’ils peuvent échanger lors des cinq fancy-fairs des établissements scolaires. De plus, les jeunes cyclistes peuvent engranger des “Dukats” supplémentaires lorsqu’ils empruntent les chemins les plus sécurisés. Les avantages sont nombreux : les enfants font du sport, les parents sont rassurés, cela réduit les émissions de gaz à effet de serre et évite aussi de nombreux embouteillages aux abords des écoles. En Suède, la start-up Doconomy entend révolutionner la manière de faire du shopping. Sa carte de banque a pour ambition d’afficher le poids en carbone de nos achats. Dès lors, il sera possible de fixer une limite mensuelle pour en contrôler l’impact. Les consommateurs pourront ainsi se rendre compte des conséquences de leurs comportements d’achats et préserver les ressources de la planète.
Adaptation et coopération : comment viser une sécurité sociale plus durable

Éradication de la pauvreté, de la faim, réduction des inégalités, amélioration des conditions de travail… En 2015, l’Organisation des Nations unies définissait dix-sept objectifs de développement durable en vue de garantir à tous un avenir meilleur. Dix-sept objectifs liés par une même volonté : la protection sociale décente des citoyens du monde. Mais comment garantir l’existence et la pérennité d’une sécurité sociale de qualité ?
La sécurité sociale : une appellation aux contours souvent un peu flous pour le citoyen. L’évoquer nous amène évidemment à penser aux cotisations qui nous sont réclamées ponctuellement et qui sont le fondement du système belge reposant sur la solidarité entre les citoyens. Mais il ne faut pas oublier que la sécurité sociale c’est aussi et surtout le remboursement des soins de santé, les allocations de chômage, les allocations familiales, les pensions, les interventions financières en cas d’accidents ou de maladie… Autant de mesures de soutien à la population qui se révèlent cruciales, surtout aujourd’hui, dans un monde confronté à de nombreux défis et crises.
Pandémie de covid-19, changement climatique, guerre en Ukraine, problématique de l’énergie… Comme le fait remarquer Peter Samyn, président du Comité de direction du Service public fédéral Sécurité sociale en Belgique, les crises se suivent, se ressemblent parfois, mais surtout s’accélèrent au fil du temps. Des situations complexes et souvent éprouvantes pour les citoyens, qui rappellent aussi l’intérêt d’un système de protection sociale efficace, solide, basé sur la concertation sociale, et réactif. Manuel Paolillo, directeur général Coordination des Politiques et Relations internationales au SPF Sécurité Sociale, souligne l’importance, en temps de crise, de réagir vite et d’apporter aux citoyens des aides concrètes qui répondent aux besoins du terrain.
Une capacité d’adaptation qui va être mise à l’épreuve des enjeux futurs, à commencer par celui de la transition écologique, un changement qui pourrait bien être lourd de répercussions d’un point de vue social. Comme l’expliquent les deux spécialistes, si la transition est bien entendu nécessaire, elle pourrait avoir des effets anti-redistributifs, et donc augmenter les inégalités au sein de la société. Pensons par exemple au passage à la voiture électrique, que toutes les bourses ne pourront pas se permettre, ou encore à la rénovation énergétique des bâtiments, une mesure nécessaire en ces temps de crise énergétique mais qui, malgré les aides, requiert un investissement conséquent à titre personnel.
Au même titre que de nombreux autres défis, la question de la transition écologique est un enjeu qui touche tous les pays du globe. Elle doit donc être envisagée à un niveau international, sans adopter une vision tiers-mondiste dans la lignée de l’Organisation internationale du travail. D’où la nécessité de créer des ponts, des structures collaboratives entre les différents systèmes de protection sociale. L’Union européenne s’y attelle également avec le socle des droits sociaux, qui sera un thème phare de la présidence belge en 2024. C’est de cette collaboration que pourront naître des solutions innovantes pour répondre aux problèmes qui nous seront posés à l’avenir. Une coopération qui a déjà fait ses preuves au niveau belgo-belge, notamment pendant la pandémie de Covid-19 avec, pour la première fois, la création d’une taskforce interinstitutionnelle capable d’alimenter rapidement en statistiques pertinentes pour apporter des réponses aux problématiques rencontrées par les citoyens. Cette collaboration existe aussi au niveau international par exemple depuis neuf décennies avec l’AISS, une association internationale qui rassemble des organisations de sécurité sociale à travers le globe. Grâce à l’AISS, ces organisations trouvent un espace de parole où elles peuvent échanger sur les problématiques rencontrées, sur les bonnes pratiques à adopter et s’intéresser aux grands dossiers d’aujourd’hui mais aussi de demain… Autant de discussions qui seront peut-être à l’origine des aides implémentées bientôt en Belgique pour répondre aux attentes des citoyens ou pour les anticiper de manière proactive.
La sécurité sociale est et doit rester championne de la résilience. Nous avons besoin d’un système capable de très vite s’adapter aux crises et d’apporter des solutions efficaces aux citoyens.
— Manuel Paolillo
Manuel Paolillo
Directeur général Coordination des Politiques et Relations internationales
Peter Samyn
Président du Comité de direction
Le Service public fédéral sécurité sociale est en charge des matières liées à la sécurité sociale en Belgique. Son activité s’organise autour de deux pôles : le service aux personnes d’une part, avec des missions très concrètes comme la reconnaissance et l’octroi des droits et facilités pour les personnes souffrant d’un handicap ou encore la gestion du statut d’artiste, et, d’autre part, le soutien à la politique régissant les matières sociales.