No 03 l'Ecole primaire, février 1882

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jets auxquels ils s'appliquent diffèrent. Par exemple : Quoi de plus charmant que ce mot, le réveil d'un enfant ? quoi de plus triste que celui-ci, le réveil d'un vieillard? L'enfant s'éveille comme la fleur s'oune. La nuit a travaillé pour lui comme pour elle. La fleur s'ouvre au matin, plus fra!che, plus parfumée, plus épanouie. L'enfant s'éveille plus rose, plus gai, plus fort. Ses lèvres brillantes et humides semblent couvertes de rosée; ses petits cheveux frisés et collée aux tempes par la légère sueur du matin, lui font comme une couronne ; ses bras et ses jambes sortant à demi et par échappée de dessous ses drapa ont l'air de marbre rose; à peine ses yeux ouverte, il se met à rire ... A quoi ritil ? ... A la vie 1 C'est une amie qu'il retrouvé 1 Si radieuse est sa figure qu'il semble revenir d'un paradis et rentrer dans un autre. ll ne descend pas de son lit, il saute à bas, demi-nu, et dès le premier pas, le voilà en possession de tout lui-même : ses mounments sont libres, faciles, mœlleux ; il est toute souplesse et toute grâce. Le rénil du vieillard est triste et lent. On dirait que le repos l'a fatigué. Il s'enfonce soue ses couvertures, de peur que l'air ne le frappe ; ses yeux ont peine à. soutenir la clarté du jour; sa tête est lourde. S'il a quelque souffrance habituelle, elle s'éveille en lui, avant lui, elle semble l'attendre, et il est encore engagé dans les limbes du sommeil, que son infirmité lui dit tout bas : Je suie là l Ses membres sont raides comme des ressorts rouillés; il entre péniblement dans la possession de chacun de ses organes; respirer, se mouvoir, parler, sont autant d'actes qui ne vont pas pour lui sans effort. La résurrection même de ses facultés ne se fait pas d'v.n seul coup ; elles renaissent en lui l'une après l'autre; il lui semble qu'il ait appris la mort et désappris la vie. Voilà, certes, deux spectacles bien différents; autantl'un est riant, autantl'autre est sombre. Eh bien, vieillard, veux-t11 que ton réveil soit le plue beau des deuxf Cela dépend de toi. L'enfant qui s'éveille ne pense qu'à lui-même; toi, ne pense qu'aux autres. L'enfant s'éveille pourj ouer, pour jouir, pour être heureux; toue les projets qu'il forme pour cette journée qui commence n'ont pour objet que des châteaux en Espagne d'amusements et de plaisir 1Toi, éveille-toi pour méditer, pour travailler, pour souffrir patiemment, et organise dans ton imagination ce jour de plus que Dieu t'accorde, en vue de la joie de tout ce qui t'entoure. L'enfant n'a guère pour vertu que de ne pas faire le mal; que la tienne soit de faire le bien 1 Je ne sais, certes, rien de plus touchant que l'hymne dicté par le poète à l'enfant qui s'éveille. Ce petit être s'agenouillant sur son lit à la voix de sa mère, et mêlant sa faible voix au chœur universel qui glorifie le Créateur, nous émeut comme la vue même de l'innocence et de la pureté. Mais que demande-t-il à Dieu? ll le prie, prière bien touchante, de donner la santé à. celui qui souffre, la liberté au prisonnier, une demeure à. l'orphelin, le morceau de pain à l'indigent l Eh bien 1 toi, vieillard, tu peux mieux faire encore, supplie celui qui tient en sa. main les Ames et les choses, supplie-le de mettre en toi, de te donner à toi, la charité qui nourrit le pauvre, la piété qui console le malade, le courage qui brise les captivités injustes, la paternité qui adopte l'orphelin, et alors, crois-moi, l'hymne même de l'enfant ne sera pas plus beau que la prière du vieillard à son réveil. Ernest LEGOUVÉ,

de l'Académie française.

N• 3.

Février.

1881-82.

SU PPL[M ENT _VALAISAN= ..

AU BULLETIN PÉDAGOGIQUE nubile sous les ansvices de la Société valaisanne d'Education. SowU.IRE. Manière d'ena . l cole à un seul maître ~âner _a grammaire aux enfants L'é Instruction civique · -L uclatJon des filles de la campag-n • · · e ca cul m t 1 e tJqu~. - Bibliographie.- Chroni en a . :- Questions d'aritbmé-~~-~---------..:.q::.u=e::_::e~t~a~v~J:s~s:colaires.- Variétés.

Manière d'enseigner la grammaire aux enfants. "

Lll grammaire est la bas d

L a. grammaire est comme un édüico dont l' intérieur renferme pl us ue trésors que n'en t'nd· le port· Jqoe :que. (QUINTILxn.)

to~tes les sciences et à tous l:s a~t!o~tGs l~s ~t~?es, J'initiation à do~t renoncer à rien savoir • EU · ehtl qu~ lzgnore, dit Bacon, q~ elle ne paraît l'être par ~a dé~i~r • plus !m_P?rtante au fond rrut donc porter trop de soin à tt on • (Qui~tlüen). On ne sanbonne~ méthodes pour réuss· . c~ .e é~ude, ru employer de trop donner à l'enfant quelques dé;[ ~r enseigne:. Celle qui consiste à un p~rroquet, sans comprendr~' i~ns abstraites qu'il récit.e comme ~boneusement retenu, est la 1 sens de ce q~e sa mémoire a Infructueuse. On peut s't~n co P ~s commode ma1s aussi la plus élèves qui, après avoir assénvawcr·e par_Je grand nombre des classe, sont incapables J.écr· quatre ou cmq ans dans la même ou ~e trouver la moindre r~re ~?rrectement u~e simple phrase les JOUrs devant les yeux ~t posiilOn ~ur un SUJet qu'ils ont tous les règles de la gl'ammaire é)~ur a~t. J]s sa~e?~ ~ peu près toutes regrett.able insuccès. Du man ~en aire: D ou VICnt donc un si la mémoire sans rien exiger deql ~.~ m~thode. Tout demander à '!lel_tre en jeu les autres faculté~ e~IOn, .de l'~bservation, sans 1éviter, il faut contraindre l'en! t ~ esp~It, voilà le mal. Pour par contrainte, je n'entends rie~ d travail_Jer p~r lui-même, et seulement la nécessité de s . e d~r, rien d emporté' mais écouter Je maître et réponde t~mr contm~ellement en éveil pour Cette métlwde d'enseio- ret a ~es questwns. BOer r oner ou~ par questions ' 1 a Jque, parce que Socrate le célèb hi s appe le méthode ' re P losophe, s'en servait

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