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L’ART POUR TOUS
Salomé Partouche
De la capitale française à sa banlieue, l’artiste et curatrice parisienne décloisonne l’art contemporain en faisant de sa Biennale un événement pour tous.
Texte MARIE-MAXIME DRICOT Photo GUILLAUME LANDRY
Si l’on considère l’art comme le point de jonction entre le monde qui nous entoure et l’expression de nos ressentis, nous sommes tous en mesure de comprendre et de faire de l’art, à condition de disposer des outils appropriés. Rendre les institutions artistiques plus démocratiques, c’est justement le défi que les Parisiens Salomé Partouche et Jean-Samuel Halifi se sont donné en 2017 en créant l’Atelier de Paname et la Biennale de Paname. Un écosystème où les artistes se tournent vers leur public et vice versa.
La Biennale est une association pour l’art contemporain qui présente chaque année un événement artistique original. Dans sa continuité, l’Atelier de Paname regroupe différents talents créatifs dont le but est de centraliser des techniques et démarches artistiques: «Un lien direct entre la recherche et un public curieux qui n’a pas toujours les moyens d’accéder à l’antichambre de l’art.»
the red bulletin: L’Atelier et la Biennale sont deux projets qui détonnent dans le monde de l’art… D’où vous est venue l’idée?
salomé partouche: L’idée de la Biennale est née à Londres, où on a découvert beaucoup d’initiatives créées par de jeunes artistes. Ils installaient des warehouses, des lieux vides pour y exposer des choses de qualité. Il y avait une incroyable liberté! C’est ce qu’il manquait en France, alors on a voulu ramener ce vent frais et le placer en parallèle de la FIAC (Foire Internationale d’Art Contemporain qui a lieu à Paris depuis 1974, ndlr) en créant un événement gratuit et ouvert à tous. L’envie est de présenter une nouvelle génération d’artistes peu présents dans les institutions, galeries, musées…
Comment décririez-vous l’ADN de la Biennale de Paname?
Jeune, libre et sans limite. Cet événement est le fruit de beaucoup de réflexion, de travail et de détermination. On amène une alternative innovante sans empiéter sur celles mises en place précédemment. Je pense que c’est la clef de tout.
Ça n’a pas été trop dur de rassembler autant de personnes différentes autour d’un même concept?
Non, c’est la mif! Ce sont des gens qu’on aime, qui se sont mis à s’aimer et qui maintenant collaborent grâce à l’art. C’est ça, la Biennale, le mélange des genres. Pareil pour notre public, quand on te dit: «Le président [François Hollande] arrive», tu es surprise et contente. On n’y a pas cru.
Les politiques ont-ils leur place à la Biennale?
Je pense qu’ils s’y greffent parce que c’est intéressant pour eux de se positionner sur un événement gratuit en parallèle de la FIAC, avec une proposition jeune qui n’existe nulle part ailleurs. Et chez nous, tout le monde arrive à coexister et à passer une bonne soirée ensemble. Tout le monde oublie qui il est en entrant à la Biennale, parce que c’est bienveillant, que ce sont des potes de potes…
In fine c’est votre esprit de famille qui fait rayonner l’événement?
Si on avait été une grosse équipe de cinquante personnes remplie de mecs venus de la pub, emprisonnés dans leur carcan, ça aurait été différent. On ne vient pas de ce métier-là, alors on parle de nos événements à tout le monde, et on rencontre tout le monde. Il n’y a plus de frontière entre les métiers et les gens, on met tout le monde sur un pied d’égalité.
L’art a-t-il besoin de plus de mélange, notamment dans le public qui vient à sa rencontre?
L’art est humain, et on a construit notre projet autour de cette idée de base. On décomplexe et décomplexifie l’image qu’on se fait de l’art. On le décompose pour lui rendre son sens premier, qui est de ressentir des émotions, de passer un bon moment. Ce n’est pas plus compliqué que ça: faire son événement à son image. On n’a pas de boîte de production, donc on organise la Biennale de A à Z, et je pense que c’est pour ça que ça fonctionne et que les gens se sentent bien, comme à la maison, détendus.
En 2021, la Biennale s’est installée à Saint-Ouen, pourquoi?
Nous étions déjà en discussion avec les équipes de la mairie afin d’inscrire l’Atelier de Paname localement dans une dimension sociale. SaintOuen c’est le Brooklyn français, la ville foisonne d’ateliers d’artistes, de studios de son, de petits artisans!