
Tout commence par une histoire d'amour...

Tout commence par une histoire d'amour...
100 ans. Un siècle après le mariage d’Adolphe Leroy et de Rose Merlin à Bruay-la-Buissière, l’entreprise célèbre son centenaire. 100 ans à accompagner les Français dans l’aménagement de leurs appartements et de leurs maisons. 100 ans d’histoires de famille, de naissances, d’agrandissements, de nouveaux départs. 100 ans à travailler main dans la main pour s’adapter aux évolutions de la société, des matériaux et des modes de consommation. 100 ans à écouter battre le cœur des habitants pour mieux les servir. 100 ans d’union entre Adolphe et Rose. 100 ans d’amour entre Leroy Merlin et les Français. Le livre que vous tenez entre les mains raconte cette aventure collective. Vous y lirez le témoignage de femmes et d’hommes qui ont contribué depuis 1924 au succès de l’entreprise. Vous y découvrirez l’évolution de notre métier, de la vente de fromages, de harengs et de sardines à l’éco-conception et l’économie circulaire. Vous parcourrez, décennie après décennie, les moments clés de notre histoire. Crises économiques, innovations technologiques, rachats, nouveaux produits, échecs et grandes réussites... tout y est ! Grâce à ce travail historique, les générations à venir pourront explorer nos racines pour inventer l’avenir avec la créativité et l’ambition qui les caractérisent.
Quelques mois après mon arrivée à la direction générale de Leroy Merlin, je mesure, en tournant les pages de cet ouvrage, la chance que j’ai de diriger une si belle entreprise. Je sais que son agilité, sa solidité et son âme sont le reflet des équipes qui y ont travaillé et y travaillent encore. Le reflet des talents, des envies, des idées, des émotions qui les habitent. Que tous ceux qui ont contribué à la rédaction de ce livre et, plus généralement, à l’histoire de Leroy Merlin, en soient chaleureusement remerciés. Cet anniversaire est avant tout le vôtre.
Agathe Monpays
Directrice générale de Leroy Merlin France
À l’origine de Leroy
Merlin, il y a une hotte, des chevaux, des sardines, de la vaisselle et surtout deux familles du Pas-de-Calais. D’un côté, les Leroy, issus d’une lignée d’agriculteurs. De l’autre, les Merlin, intégrés à la petite bourgeoisie locale. En apparence, leurs destins semblent éloignés. Pourtant, l’histoire des Leroy et des Merlin présente quelques points communs.
Les belles histoires commencent parfois par des drames. Le 26 mai 1879 est un jour très triste à Billy-Berclau, une petite cité minière du Pas-de-Calais, à quelques kilomètres au nord de Lens. Ce jour-là, Félicité Drelon devient veuve à trente ans. Son mari, Adolphe Séraphin Leroy, était agriculteur, comme son père et son grand-père avant lui. Leur mariage a duré sept ans et donné naissance à trois enfants. En plein deuil, Félicité doit trouver une solution pour subvenir, seule, aux besoins de la famille. Hotte sur le dos, elle décide de marcher jusqu’aux villages voisins pour vendre des fromages, des harengs saurs et des sardines. La jeune femme auraitelle hérité du sens du commerce de son père, cabaretier ? Possible. Toujours estil que son épicerie ambulante rencontre un franc succès.
Félicité a tellement de clients à satisfaire qu’Adolphe, son fils, lui prête main forte les jeudis et jours de vacances. Le métier de commerçant lui semble bien
plus attrayant que la mine, qu’il doit cependant rejoindre à l’âge de seize ans pour venir en aide financièrement à sa famille. À cette époque, le charbon est le moteur de l’économie régionale. Billy-Berclau se trouve en plein cœur du bassin minier, cette bande de terre de cent kilomètres sur dix qui s’étend de Valenciennes à l’ouest de Béthune. Pour Adolphe, la richesse des sols, découverte au XVIIIe siècle, est plutôt une mauvaise nouvelle. « Je vivais avec l’attirance de devenir commerçant et d’être un jour débarrassé de ce pénible métier », se souvient-il dans ses mémoires écrits en 1955 à l’attention de ses enfants et petitsenfants. Pour Félicité, en revanche, l’or noir est une aubaine. Portés par l’envol industriel du territoire, beaucoup de paysans renoncent au travail de la terre pour devenir mineurs ou ouvriers. Ceux qui n’avaient qu’à se baisser dans les champs pour nourrir leurs familles comptent désormais sur les commerces locaux. Et Félicité, avec sa hotte chargée d’aliments, arrive toujours à point nommé ! Elle achète même une carriole et un mulet pour proposer ses produits dans les villages plus éloignés. Lorsque son fils se marie en 1900 et fonde une famille, Félicité lui confie les rênes de son entreprise. Des rênes, il en faut d’ailleurs de plus en plus. La tournée est désormais assurée par quatre chevaux et quelques livreurs et commis embauchés. Adolphe ne se contente plus de vendre des produits alimentaires.
Marchande des quatre saisons. Paris, vers 1900.
Le siège de la Compagnie des Mines de Nœux-les-Mines, futur siège de Leroy-Merlin, vers 1900.
Il achète aussi des lots de marchandises dans les ventes aux enchères pour les revendre au détail. Fort de son succès, l’ancien mineur devient propriétaire d’une belle maison à Auchy-les-Mines, où il s’installe avec sa femme Catherine et leurs trois enfants : Adolphe (né en 1901), Rachel (née en 1902) et Richard (né en 1906).
À quelques kilomètres de là, une autre famille montre aussi un certain talent pour le commerce. Chez eux, il n’a jamais été question de terrils et de charbon. Issus de la petite bourgeoisie locale, les Merlin sont commerçants de père en fils. Le dernier de la lignée, Jules, né en 1862, vend de la vaisselle dans une échoppe, avec sa femme Marie Rose Adèle. À BillyBerclau, les Leroy et les Merlin sont des commerçants reconnus et respectés. Leur vie aurait pu continuer ainsi. Mais l’histoire en a décidé autrement.
Le 28 juin 1914, l’archiduc d’AutricheHongrie est assassiné à Sarajevo. Dans le Nord, certains n’y voient alors qu’un fait divers comme tant d’autres. Pourtant, l’événement va embraser l’Europe. Le 3 août, l’Allemagne déclare la guerre à la France. Les soldats sont mobilisés, les moyens de transport réquisitionnés. En quelques jours, le quotidien des Français est bouleversé. Les familles Leroy et Merlin n’y échappent pas. Mi-août, l’armée ennemie déferle dans le Nord-Pas-de-Calais. La panique est générale. Le 10 octobre, les premiers soldats allemands remontent la rue qui mène au bourg. Les habitants doivent se résoudre à vivre sous l’occupation.
Quelques mois plus tard, ils sont même contraints de réunir leurs affaires pour se réfugier loin des bombardements. Les Leroy optent pour Nœux-les-Mines, une ville minière de 9 000 habitan ts située à cinq kilomètres à l’arrière du front. Adolphe Leroy n’assiste pas au déménagement de sa famille. Il a été mobilisé, dès le début de la guerre, au 1er régiment d’artillerie, à Dunkerque.
Défilé des prisonniers à Nœux-les-Mines à la fin de la Grande Guerre. Adolphe Leroy fils en 1922 durant son service militaire au sein de son équipe de football (à genoux, premier en partant de la droite).
Rue du 11-Novembre à Billy-Berclau suite aux dégâts de la Première Guerre mondiale.
Il faut faire un voyage dans le temps pour comprendre l’époque dans laquelle les familles Leroy et Merlin ont posé les premières pierres de l’entreprise que tout le monde connaît aujourd’hui. Alors que leurs commerces ne cessent de croître, au cœur du bassin minier, une petite révolution a commencé à quelque 200 kilomètres de Billy-Berclau, dans la capitale. En 1852, Aristide Boucicaut a ouvert le Bon Marché, la première grande surface où les clients peuvent entrer comme ils le veulent, toucher les articles et même les échanger ou se faire rembourser s’ils sont défectueux. Les prix y sont fixes et souvent moins chers qu’ailleurs. Une centrale d’achat s’occupe d’acquérir les marchandises au meilleur prix et la marge moyenne n’est que de 20 % contre 40 % à 50 % ailleurs. Le succès du Bon Marché donne des idées. Le Bazar de l’Hôtel de Ville ouvre en 1855, le Printemps en 1865, la Samaritaine en 1870 et les Galeries Lafayette en 1899. En parallèle, un autre type de commerce apparaît dans la région de Reims : les succursalistes. Eux aussi possèdent des centrales d’achat mais ils écoulent leurs marchandises dans des chaînes de magasins de détail, surtout alimentaires. Pour concurrencer les grands magasins généralistes, les succursalistes ouvrent des enseignes spécialisées dans les chemises, les meubles ou la maroquinerie. Face à ces bouleversements, les petits commerces souffrent, mais ils résistent.
En son absence, ses enfants grandissent avec leur mère et leur grand-mère. Le commerce familial est à l’arrêt. Les chevaux ont été réquisitionnés. En juillet 1917, la roue tourne pour Adolphe. Lui qui a toujours détesté descendre à la mine va pour une fois tirer avantage de la mention « mineur » apposée sur son passeport militaire. Trois ans après le début de la guerre, le charbon manque. Les mineurs sont renvoyés chez eux pour retourner sous terre. De retour près des siens, Adolphe en profite surtout pour reprendre le commerce de vin, de chocolat et de chaussures après ses journées à la mine. Il n’a jamais perdu sa fibre commerciale. Lorsqu’il perçoit un peu d’argent pendant la guerre, il le dépense pour acquérir un stock de chaussures au lieu de l’envoyer à sa famille. « Je me demandais comment j’allais être reçu ! » , se souvient-il. À l’époque, les Leroy n’avaient pas grand-chose. Pourtant, épouse, mère, enfants… tous approuvent son choix. « Je crois que chez nous, nous étions tous nés commerçants. » En son absence, son fils Adolphe – troisième du nom – s’est d’ailleurs lancé à son tour. Il a bénéficié des conseils d’un bon maître en la matière : sa grand-mère, Félicité, la dame à la hotte grâce à laquelle l’épopée commerciale de la famille a débuté.
Lorsque l’armistice est signé le 11 novembre 1918 en forêt de Compiègne, la désolation est absolue à Billy-Berclau. La commune est entièrement rasée, comme les deux tiers du bassin minier. Lens n’est plus qu’un grand tas de briques ; 152 000 hectares de terre ont été stérilisés, 2 200 usines ont été ravagées et la destruction des immeubles et des maisons laisse près de 526 00 0 habitants sans abri. « On se demande comment jamais ce pays, hier si fertile, si prospère, pourra renaître, écrit le préfet de l’époque. On est effrayé devant la tâche de son relèvement. » Sur le territoire meurtri, certaines familles sont prêtes à relever le défi. C’est le cas des Leroy et des Merlin.
Inspiré par sa mère qui, quarante ans plus tôt, a pris la route avec son panier, Adolphe père se remet au travail. En passant par Nœux-les-Mines, il remarque une jolie maison au 79 rue de la Gare. Elle a toujours sa grande porte et son écurie mais elle a été endommagée à l’intérieur par la chute d’un obus. Adolphe ne se laisse pas impressionner. Il négocie avec le propriétaire pour la louer et reprend contact avec ses fournisseurs. Hélas, l’approvisionnement est bien moins simple qu’avant, surtout quand
Carte postale Au Stock Américain, 79 rue de la Gare, Nœux-les-Mines.
il faut emprunter la route ravagée qui mène à Lille. Mais Adolphe ne se résigne pas. Comme il a perdu deux maisons et tout son stock à cause de la guerre, il peut prétendre aux indemnités pour dommages de guerre proposées par l’État. Il ne touche pas d’argent mais des bons de cession sur les stocks entreposés par les Alliés. À ses yeux, cela vaut bien plus que de l’or.
En quittant la région, les Anglais et les Américains ont abandonné derrière eux des tonnes de matériel. Il y a des chaussures, des lits de camp, des savons, des outils, des pelles, des pioches, des couvertures… Avec ce « stock américain », comme l’appellent les clients, les deux Adolphe font des heureux. « Quand nos marchandises furent arrivées, déballées et connues de nos voisins et villages environnants, ce fut une procession de visiteurs pour des serviettes à un franc, des draps de lit à dix francs et des chaussures à quinze francs », s e souvient le père. Au lendemain de la guerre, les habitants n’ont plus rien et tout ce qui fait référence aux États-Unis attise la curiosité. Le succès est tel que père et fils abandonnent l’alimentaire et l’épicerie en gros pour se consacrer exclusivement à la vente de ces stocks, baraquements, matériaux de construction, meubles et ustensiles. En 1923, il est temps pour Adolphe père
de passer le flambeau à ses enfants. Son fils aîné, ambitieux, courageux et méthodique, reprend le commerce, rue de la Gare, à Nœux. Il fait avec les moyens du bord et étale des bâches sur le sol pour y installer les couverts en fer, vêtements en toile kaki ou bidons issus des surplus des Alliés. Les populations des environs sont si démunies qu’elles ne s’arrêtent pas trop aux apparences : les produits disparaissent en moins de temps qu’il n’en faut pour se réapprovisionner. Le nom de l’enseigne, ce sont les clients qui l’ont choisi à force de le prononcer : « Au Stock Américain ». Misant sur le fret de marchandises, majoritairement assuré par les rails, la sœur d’Adolphe, Rachel, s’installe, elle, sur un terrain à quelques pas de la gare de Bruay-en-Artois. C’est dans cette commune que l’histoire des Leroy et des Merlin va se rejoindre. Pendant que les combats faisaient rage, la famille Merlin s’est réfugiée juste à côté, à La Buissière. Là, les Merlin ont ouvert un magasin assez original pour l’époque qui vend des produits alimentaires mais aussi des meubles, de la vaisselle et des vêtements. Leurs enfants, Henri et Rose Merlin, ne sont jamais très loin…
Vente aux enchères : Adolphe père est quatrième en partant de la droite, 1930.
Après la guerre, les Leroy et les Merlin construisent leurs familles et relancent leurs commerces.
Adolphe fils analyse les besoins de la population et vise juste. Avec la vente de matériaux de construction et d’aménagement de la maison, il accompagne les prémices d’un nouveau marché. Mais, comme son père avant lui, il apprend qu’il ne faut jamais crier victoire trop vite.
Le rapprochement des deux familles se concrétise le 28 janvier 1924 à la mairie de Bruay-en-Artois, quand Adolphe Leroy fils épouse Rose Merlin, la fille de Jules. Ce même jour, Rachel Leroy, la sœur d’Adolphe, épouse Henri, le frère de Rose. Les deux unions scellent l’entente entre deux familles de commerçants bien connues dans la région. Conscient de l’intérêt de cette alliance, Adolphe ne se contente pas de donner son patronyme à son épouse. Il prend aussi le sien. Le terme « LeroyMerlin » appar aît ainsi sur certains bons de commande, avant même d’être officiellement déclaré au registre du commerce de Béthune, en 1931. Du côté des visiteurs, en revanche, rien ne change. Les clients font toujours leurs courses au « Stock Américain », un nom que certains continueront d’ailleurs d’utiliser bien après sa disparition officielle.
Après quelques années à vendre du petit matériel, Adolphe constate que les clients sont moins nombreux. Logique : les urgences de l’après-guerre sont passées et les besoins ne sont plus les mêmes. Déterminé à trouver une solution pour l’entreprise familiale, il
écoute, regarde et lit beaucoup. Il sait que de nombreux Polonais, arrivés dans la région pour travailler dans les compagnies minières, sont logés dans des cités étroites conçues à la hâte. Dès qu’ils en ont les moyens, ils investissent pour agrandir et loger leur famille. Adolphe pense qu’il a une carte à jouer, surtout qu’en 1923, la plupart des Français ont reconstitué leur épargne d’avant-guerre. Ils ont à nouveau de l’argent à dépenser !
À l’époque, le marché du bricolage n’existe pas. Le mot n’est même pas entré dans le vocabulaire courant sous sa forme péjorative (voir encadré). Bois de charpente, fenêtres, escaliers, portes, clôtures, carrelage, peinture, tuiles… Adolphe achète des produits issus de faillites d’usine, de fins de série ou d’invendus pour proposer aux particuliers tous les matériaux nécessaires à la construction. Il transgresse ainsi les règles du monde du bâtiment selon lesquelles les matériaux ne sont achetés que par des artisans qui réalisent des travaux chez leurs clients. Au Stock Américain, tout est directement mis à la disposition des particuliers. C’est un pari audacieux mais payant !
général Maison A. Leroy-Merlin, autour de 1930.
Chauffeurs devant leurs camions de livraison du Stock Américain, années 1930. Page de droite : chauffeurs devant leurs camions de livraison du Stock Américain, 1950.
Les clients savent qu’ils trouveront tout ce dont ils ont besoin pour la rénovation, la réparation et l’aménagement de leur maison. Adolphe vend même des petits meubles en bois avec des portes en contreplaqué fabriqués par des menuisiers locaux ! Mais le patron veut aller encore plus loin. À la fin des années 1920, ceux qui ont tout perdu pendant la guerre vivent encore dans des baraquements de fortune qui se détériorent rapidement. En voyage à Paris, Adolphe découvre une entreprise qui vend des maisons préfabriquées en bois-fibrociment. Il veut proposer la même chose, même s’il ne connaît rien à la construction ! Adolphe aménage un atelier et investit dans un nouveau matériau, l’Éternit, conçu à partir d’eau, de ciment et de fibres de bois et textile. Chalets, garages, abris de jardin, cabines de plage, poulaillers, salles des fêtes ou écoles temporaires : il propose plus de 1 000 références à des prix défiant toute concurrence. Il propose même la livraison et la construction des bâtiments. Les clients sont séduits. Les commandes affluent. Adolphe a eu du flair !
Après avoir innové sur les produits, Adolphe compte aussi changer les façons d’acheter. Il négocie auprès des fournisseurs pour faire baisser les prix. Grâce à lui, les familles modestes peuvent s’offrir des éviers en céramique d’Aire-sur-la-Lys ou des poêles en fonte type Salamandre. Ce confort est une petite révolution à l’heure où l’eau courante et les toilettes à l’intérieur restent une exception.
Sans surprise, le Stock Américain attire une clientèle locale mais aussi régionale. Informés par la presse ou le bouche-àoreille, des clients viennent en train de l’Aisne ou de la Somme. Ils font le tour du magasin, prennent commande et repartent. Adolphe offre la livraison dans un rayon de cent kilomètres. Pour assurer ce service, il a acheté trois camions Renault et construit de nouveaux hangars de stockage, un garage et un magasin basé sur le système du comptoir. Il recrute aussi des chauffeurs, des vendeurs et demande à des ouvriers de la mine qui veulent arrondir leurs fins de mois de décharger les marchandises arrivées par les rails. Au Stock Américain, les employés doivent se montrer polyvalents.
général Maison A. Leroy-Merlin, autour de 1930.
Se plonger dans l’histoire de Leroy Merlin, c’est aussi découvrir l’histoire du mot « bricolage », qui n’a pas toujours eu la même connotation, loin de là ! À l’origine, le terme vient de l’italien briccola, qui signifie catapulte. Au XVIIe siècle, les Français l’utilisent plutôt dans un contexte érotique, pour désigner l’amour physique, la bagatelle, ce qui est frivole. Avec le temps, le mot change d’univers et sert à désigner l’exécution de petites tâches sans importance. Il se transforme même en verbe. On peut bricoler quelque chose et le mot « bricolage » apparaît dans le langage courant à la fin des années 1920. De là à dire qu’il avait le même sens qu’aujourd’hui, c’est une autre histoire ! Pendant longtemps, le terme a plutôt été synonyme de « rafistolage ». On l’utilise pour désigner les menus travaux réalisés par des particuliers qui cherchent à se passer du talent de professionnels du bâtiment. Le bricolage perd progressivement sa connotation péjorative après 1936 et l’arrivée, en France, des congés payés. Les Français découvrent les joies des loisirs mais aussi le plaisir d’investir leur temps libre dans des activités qui ne relèvent pas de leur domaine professionnel. Le bricolage devient positif. Il est associé à la créativité et devient une source d’économies face à la hausse du prix de l’immobilier.
Un vendeur peut décharger un camion ou faire de la comptabilité. Quant aux chauffeurs, ils doivent tous avoir passé quelques jours dans les rayons pour se familiariser avec les produits, car certains sont amenés à se rendre dans les familles qui ne peuvent pas se déplacer pour prendre leurs commandes. Dès la fin des années 1920, la satisfaction des clients est une règle d’or !
P our encourager la vente à distance et satisfaire toujours plus de monde, Adolphe publie même une brochure qui présente les articles phares de son stock.
« Dans ce catalogue, vous trouverez un aperçu de quelques-uns des MILLIERS D’ARTICLES que nous tenons à votre disposition », écrit-il sur la couverture.
« Les gens savaient ce qu’on trouvait au Stock, se souvient Henri Cordonnier, directeur du service construction, des années plus tard. Ils commandaient par lettre. Un acompte était demandé à la commande et le reste était payé au chauffeur à la livraison. » Les clients peuvent même acheter des produits d’occasion ou vendre ceux dont ils n’ont plus l’utilité.
Adolphe est infatigable. C’est un commerçant hors pair, exigeant envers lui-même mais aussi envers les autres. Il lui arrive de crier sur des salariés qui ont manqué à leur devoir. Il peut les licencier sur-le-champ… avant de les réembaucher le lendemain. Car Adolphe est aussi un homme au grand cœur qui gère ses équipes en bon père de famille. Il n’hésite pas à recruter des personnes sans expérience qui ont du mal à trouver un emploi. Il a même fait construire de petites maisons en bois, juste derrière les hangars, pour loger ses ouvriers les plus soumis à la précarité. Les salaires sont faibles mais le patron offre régulièrement des brouettes chargées de meubles et matériaux. Et il peut se lever à n’importe quelle heure de la nuit pour conduire quelqu’un chez le médecin. S’il est parfois difficile à vivre, les salariés – une cinquantaine à la veille de la Seconde Guerre mondiale – lui vouent une fidélité sans faille.
Dans la commune, Adolphe est aussi un homme apprécié. Il est un des acteurs majeurs de la vie associative locale. Il partage des parties de chasse et de pêche avec les habitants, fonde l’union commerciale et préside le club de boxe, de vélo et celui de colombophilie.
Équipe de foot de l’Union commerciale de Nœux-les-Mines, 1933. Adolphe Leroy affectionne les cérémonies de remise de médailles ou de trophées, Nœux-les-Mines, 1950. Le 4 juillet 1932, Adolphe Leroy organise un lâcher de montgolfière .
À chaque loterie, il offre des lots du magasin et, tous les ans, il organise des matchs de football au profit des personnes dans le besoin, des fêtes foraines – les ducasses en ch’ti – et des carnavals. Les défilés sont l’occasion pour lui de sortir son géant, un mineur de cinq mètres aux couleurs du Stock Américain. Tout ce qui peut faire parler de l’entreprise est bon à prendre !
Avec un sens du service et des produits bon marché que l’on ne retrouve pas ailleurs, Adolphe Leroy a trouvé la recette du succès. Il est aussi connu pour son sens de la formule. « Heureux comme un roi dans un chalet Leroy », « Tout pour la construction », « Faites comme l’escargot, ayez votre maison », « Bâ tir c’est rajeunir », lit -on sur les affiches et dans la presse locale. Grâce à lui, la clientèle ne se limite plus aux gens des mines. Des ouvriers et des employés viennent aussi au Stock Américain. Les cols blancs, c’est plus rare. À la fin des années 1920, les plus aisés n’imaginent pas encore réaliser eux-mêmes les travaux de leur maison. L’histoire va donner un coup de pouce à Adolphe.
En 1929, le krach boursier de Wall Street secoue les États-Unis. L’Europe pense être épargnée mais comme l’économie est déjà mondialisée, elle n’échappe pas à la crise. Les commandes de charbon de l’industrie sidérurgique s’écroulent. Dans le bassin minier, de 1931 à 1935, le chômage augmente et les salaires fondent. Les habitants peinent à se nourrir et ne pensent plus à agrandir ou améliorer leurs intérieurs. Les classes moyennes, qui voient leur pouvoir d’achat diminuer, décident de mettre la main à la pâte. À leur tour de découvrir le Stock Américain ! Adolphe, qui ne perd jamais le nord, profite également de la crise pour acheter, à bas prix, des invendus et réserves de matériaux de sociétés qui font faillite.
Hélas, tous les efforts d’un patron visionnaire ne servent à rien face au retour de la guerre en Europe. À peine arrivés, en 1940, les Allemands coupent le Nord-Pas-de-Calais du reste de la France. Ils réquisitionnent les camions et pillent les réserves. Mis à l’arrêt, Adolphe subvient aux besoins des enfants de Nœux et organise des chaînes de solidarité pour envoyer des colis aux prisonniers. Quand la région est libérée, après une pluie de bombardements destinés à préparer le Débarquement, il comprend qu’il va devoir, comme son père avant lui, tout reconstruire.
« Heureux comme un roi dans un
« Faites comme l’escargot, ayez votre maison »
« Bâtir c’est rajeunir »
Maquette d’une page de catalogue pour la vente de baraquement-cabine type Clairmarais, 1928.
1945-1959
Après la guerre, la famille Leroy doit relever d’immenses défis. L’approvisionnement est difficile, les besoins des clients ont changé, les modes de consommation aussi. En faisant preuve d’une capacité d’adaptation exceptionnelle, Adolphe, Lionel et Bernard montrent qu’ils sont à la tête d’une entreprise résolument atypique.
Dans le Nord-Pas-de-Calais, la Seconde Guerre mondiale a causé moins de dommages que la première. Des dizaines de milliers d’immeubles sont à reconstruire un peu partout mais aucune ville n’a été entièrement rayée du paysage. Les bombardements se sont concentrés sur les points névralgiques de la région : les ports de Boulogne ou Dunkerque, mais aussi les gares d’Arras, Béthune, Douai, Lille, Maubeuge ou Valenciennes. Pour Adolphe, qui entend bien permettre aux gens du Nord et du Pas-de-Calais de rénover leurs intérieurs dégradés par des années d’occupation, le défi est immense. Il recrute son fils pour l’aider. Lionel a seize ans, exactement comme lui quand il est venu aider son père dans le commerce familial. Le jeune homme a notamment pour mission de trouver des solutions face aux difficultés d’approvisionnement car la soif de consommer est à la mesure des privations endurées ces dernières années : énorme !
Lionel est aussi déterminé que son père, sinon plus. « J’allais voir les usines, se souvient-il. Je portais des pommes de terre à la douane pour obtenir un camion de ciment, j’acheminais le
camion de ciment à Maubeuge pour l’échanger contre un camion de tôles avec des bons métalliques. Je portais du beurre et des cigarettes que j’avais réussi à avoir au noir et je les proposais aux contremaîtres afin d’obtenir un chargement de cuisinières, de poêles et de feux que je ramenais à Nœux et qui étaient vendus d’avance. » P our s’assurer d’avoir un magasin plein, Lionel participe aussi à des ventes aux enchères où il joue de son âge pour faire de bonnes affaires. Sans oublier l’achat de surplus laissés à nouveau par les Américains ! E n 1946, l’entreprise fait même une affaire en or en rachetant les baraquements américains qui n’ont jamais été construits pendant la guerre. Problème : l es pièces sont dispersées aux quatre coins de la région. Loin de se laisser décourager, les salariés se lancent dans une chasse au trésor pour récupérer les toitures entreposées à Calais, les fers stockés à Cambrai et les planchers qui attendent à Dunkerque. Ensuite, ils doivent retrouver les plans et faire correspondre les numéros de série pour reconstituer des baraques complètes. Un vrai puzzle géant mais, en quelques semaines, 400 unités sont vendues !
À la fin de la guerre, le Stock Américain a toujours pignon sur rue, près de la gare de Nœux. Le bâtiment en briques a été miraculeusement épargné par les bombes. Les visiteurs y trouvent un magasin d’exposition et de vente de 300 m2 avec des meubles, sanitaires et de la petite quincaillerie. À côté, un grand hangar abrite les stocks de matériaux sensibles aux intempéries comme le bois ou les objets métalliques. Et encore plus loin, il y a l’atelier de fabrication qui s’occupe de préparer les fameux « c halets Leroy » et a utres bâtiments préfabriqués. C’est aussi rue de la Gare qu’Adolphe a établi ses bureaux. « E n 1957, sur une centaine de personnes, il y avait quarante-cinq monteurs et chauffeurs, trente-cinq ouvriers à l’atelier, et le reste était réparti entre les administratifs et les vendeurs, se souvient Jean-Claude Lavigne, ancien responsable de l’entrepôt de Nœux-les-Mines. Le travail était pénible. Il n’y avait pas de palettes, pas d’élévateurs et les produits arrivaient en vrac. »
Au fur et à mesure du développement, la famille rachète les terrains voisins. Les pouvoirs de décision restent entre les mains des Leroy. Le modèle américain
des années 1930 avec des PDG qui délèguent et des managers qui dirigent, ce n’est pas trop du goût d’Adolphe. Il n’imagine pas que quelqu’un puisse prendre les décisions à sa place.
Comme son père avant lui, Adolphe observe avec attention ce qui se passe autour de lui. C’est de là qu’il tire une grande partie de son talent commercial. Il remarque par exemple que les baraquements récupérés après la guerre pour reloger les sinistrés sont peu confortables, à peine isolés et ne répondent plus aux exigences de la clientèle. L’entreprise met donc en avant l’isolation de ses chalets préfabriqués en misant sur le fibrociment et propose à des collectivités de monter en temps record des salles des fêtes, bureaux ou écoles provisoires. À partir de 1956, les Leroy montent même un service de construction pour proposer des maisons de qualité, toujours axées sur le fibrociment ossature bois, mais plus spacieuses. L’idée est d’autant plus maline que la région, comme le reste du pays, est en plein baby-boom. Les naissances se multiplient tellement vite que l’État peine à proposer des logements suffisamment grands pour les familles. Les particuliers s’inscrivent sur des listes d’attente pour obtenir un logement HLM et, quand ils en ont assez de patienter, ils réfléchissent à d’autres solutions.
École provisoire réalisée par les Établissements Leroy Merlin et Fils, début des années 1950. Offre de constructions démontables (verso d’un courrier de 1949).
Rayonnages d’un supermarché à Perros-Guirec en 1961.
Intérieur
Après la Seconde Guerre mondiale, l’Europe connaît une renaissance économique et industrielle extraordinaire. En France, les Trente Glorieuses débutent à la fin des années 1940. Elles sont marquées par une augmentation du niveau de vie, une modernisation des usines, un développement des transports… Ces bouleversements modifient la vie des Français mais aussi l’essence même du commerce. Désormais, les consommateurs ont le choix. Il ne suffit plus de produire, il faut aussi vendre ! Apparu en 1916 aux ÉtatsUnis, le libre-service débarque en France. Pour la première fois, les ménagères sont invitées à remplir elles-mêmes leurs paniers. Encore faut-il les convaincre de l’intérêt d’aller dans des magasins pour se servir seules, en payant le même prix qu’ailleurs. En 1951, Édouard Leclerc ouvre le premier discount avec des marges de 11 % maximum. Comme les Français sont de plus en plus nombreux à posséder une voiture, les premiers supermarchés arrivent en 1958, à Paris, puis trois ans plus tard à Roubaix avec l’ouverture du premier Auchan de la famille Mulliez. En quelques années, plus de 200 supermarchés s’installent dans l’Hexagone. Et, en 1963, Marcel Fournier ouvre le premier Carrefour à Sainte-Geneviève-des-Bois. Avec 2 600 m2 et un parking de 400 places, ce n’est pas « juste » un grand supermarché. C’est un hypermarché, où l’alimentaire n’occupe qu’un tiers de la superficie. On y vend même de l’essence « à prix cassé ». Accueillie avec enthousiasme, l’enseigne devient un modèle qui se généralise sur tout le territoire, modifiant radicalement le visage de la distribution.
Face à la concurrence qui se développe autour d’eux, Adolphe, Lionel et bientôt Bernard, le deuxième fils d’Adolphe embauché en 1952, cherchent à innover. Adolphe propose d’appliquer une technique dont les hypermarchés vont s’inspirer par la suite. Il vend certains matériaux à prix coûtant pour attirer les clients. « Mon père avait imaginé que pour attirer le client, il fallait vendre les produits basiques à très faible prix, se rappelle Lionel. C’est ce qu’on a fait avec le ciment qui est à la base d’une maison. » Un e fois dans les secteurs – on ne parle pas encore de rayons –les consommateurs en profitent pour acheter le carrelage, la peinture, la laine de verre, les clous, vis, pelles, marteaux, scies dont ils ont aussi besoin. Adolphe et ses fils ne vendent plus uniquement des stocks. Ils ont aussi une gamme permanente. Les Leroy ont d’ailleurs la réputation d’être extrêmement durs en affaires avec les fournisseurs.
En mars 1963, pour contrôler davantage les coûts, Adolphe, Lionel et Richard décident de racheter une petite menuiserie à Cuinchy, près de Nœux. La Société des Menuiseries Leroy Frères a des carnets de commandes bien remplis mais elle peine à faire face à la demande.
« Les machines étaient vieillottes et à la fin du mois, le chiffre d’affaires atteignait péniblement les 1 000 francs, raconte Jacques Dubois, directeur des menuiseries de 1963 à 1985. On était mal barrés. » C’était sans compter sur la débrouillardise des Leroy. De passage à la foire d’Hanovre, ils sont les premiers de la région à investir dans des machines quatre faces qui permettent la production de menuiseries en série. Non seulement leurs produits gagnent en qualité, mais ils sont aussi proposés à des prix défiant toute concurrence. Tout ce que les Leroy aiment !
À la fin des années 1950, Adolphe profite de l’arrivée de ses fils dans l’entreprise pour se retirer à Merlimont, où il vient passer ses vacances depuis 1930. Située sur la côte d’Opale, la commune n’est pas encore devenue la station balnéaire que l’on connaît aujourd’hui. Mais Adolphe a eu un coup de cœur et il rêve d’y passer plus de temps. Évidemment, il ne s’imagine pas une seule seconde couler une retraite paisible faite de parties de pêche ou de chasse – pourtant il adore ça ! – ou de promenades en bord de mer. Adolphe propose d’y ouvrir la première succursale du Stock Américain, près de la villa qu’il a achetée en 1937.
la fin des années
Il fait construire un hangar sur un terrain arraché aux dunes et met au point un service original pour s’assurer d’avoir des clients. Sur simple demande, un bus vient les chercher à domicile pour faire leurs courses. Il y a tellement de demandes que, très vite, Adolphe doit agrandir les locaux. Conforté dans son intuition, il décide alors d’entamer une conquête territoriale. En 1958, les Leroy ouvrent un troisième dépôt à Longueau, à quelques kilomètres d’Amiens. Ils n’y installent qu’un baraquement des plus sommaires et une cour des matériaux avec les produits de base. Pourtant, le succès dépasse leurs espérances. « À l’ouverture de Longueau, on a fait un véritable malheur. Il y a eu trois jours d’embouteillages, la ville était pratiquement paralysée, je n’avais jamais vu ça, se souvient Lionel. Il y avait des milliers de voitures. Il fallait croire que ça manquait vraiment ! Les gens attendaient les camions qui venaient livrer la peinture. Jamais un magasin n’a vendu autant de peinture blanche, pas moins de 300 tonnes en pots de trois kilos. »
Forte de cette implantation réussie en dehors de sa région – une première –la famille revient sur ses terres pour ouvrir son quatrième lieu de vente sur le terrain des Merlin, au centre de Bruay-la-Buissière. « L e Stock Américain était connu de Dunkerque à la Somme en passant par l’Aisne », se souvient Jean-Claude Lavigne. L’entreprise doit peut-être sa notoriété à son originalité. À l’époque, il n’y a dans la région aucun autre magasin qui soit à ce point spécialiste de la maison et
donc multi-spécialiste puisque l’habitat concerne à la fois le gros œuvre et la décoration.
Deuxième piste pour expliquer le succès du Stock Américain : l’âme que l’entreprise n’a jamais perdue. Même si l’effectif passe d’une cinquantaine de personnes en 1949 à près de 250 en 1965, la direction reste très proche des employés. Et les méthodes de gestion demeurent celles d’une petite entreprise familiale. « Adolphe décidait le prix des produits au pif, se souvient Jean-Marie Buchet, ancien directeur de la centrale d’achat. Il disait : bon, ç a, ça vaut cinq francs. Si ça se vend bien, on le vend six francs, si ça se vend mal, on le vend quatre francs ! Bref, les prix étaient faits à la tête du produit. »
L’entreprise est restée une maison unique en son genre dont l’image repose sur trois critères : l e prix, le choix et le service. Pour toute une frange de la population, le Stock Américain représente une réelle possibilité d’améliorer le confort intérieur à des prix abordables. À l’inverse, une catégorie de gens plus aisés l’évite, ne voyant en lui qu’un marchand de lots, de marchandises de second choix. Cette image populaire, si elle est un atout à court terme, n’aidera pas la société à toucher une clientèle plus large quand une nouvelle orientation lui sera donnée dans les années 1960. Par ailleurs, si les Leroy sont nés avec la passion du commerce, du client et du produit, ils ont moins celle de la gestion ou de la comptabilité. Cela signifie qu’ils devront relever de nombreux défis pour continuer à grandir !
Les clients qui venaient faire leurs achats au Stock Américain le week-end n’en ont rien su mais, dès que Lionel et Bernard sont montés dans la hiérarchie de l’entreprise, ils ont entamé d’intenses négociations pour changer son nom. Selon eux, la référence aux États-Unis n’avait plus de sens alors que le territoire commençait à souffrir de la crise du charbon. Parmi les produits proposés au comptoir, plus aucun ne venait des bons récupérés durant l’après-guerre. Au début, Adolphe était catégorique : hors de question de changer de nom. Et puis, face à l’insistance de ses fils, il finit par céder. En 1960, l’entreprise paternelle devient la SA Leroy-Merlin. Et comme un changement peut en cacher un autre, il est également temps de quitter la rue de la Gare et son terrain devenu trop exigu.
En 1959, Johnny Hallyday se fait remarquer lors d’un radio-crochet. Jacques Brel chante Ne me quitte pas, et l’émission Salut les copains débarque sur Europe 1. Cette année-là, le bassin minier est aussi frappé de plein fouet
par la crise du charbon. Entre 1947 et 1965, l’effectif des Houillères du bassin du Nord et du Pas-de-Calais est divisé par deux. En 1965, les gérants de la mine annoncent la fermeture de leurs grands bureaux à Nœux-les-Mines, sur le carreau de la fosse numéro 1. Ils laissent à l’abandon un bel édifice construit en 1860 et beaucoup de terrains. Pour Lionel, il ne faut pas laisser passer cette occasion en or, le site est à vendre pour une bouchée de pain ! A dolphe n’est pas convaincu mais il finit par donner son accord. À la surprise du personnel, les nouveaux établissements Leroy-Merlin, qui ne comptent que 250 s alariés, deviennent propriétaires de parcelles gigantesques. En attendant la transformation des infrastructures, les bureaux administratifs s’installent dans des locaux provisoires et les sept hectares de terrain deviennent des zones de stockage. Les frères Leroy s’en servent également pour lancer quelques activités de menuiserie qui viennent compléter celles de la Société des Menuiseries Leroy Frères, toujours basée à Cuinchy. Et ils profitent du déménagement pour restructurer l’activité de construction. Le service, qui était jusque-là partie intégrante de Leroy-Merlin, devient une filiale, la SARL des Constructions LM.
Rue Nationale, Nœux-les-Mines (ancien bâtiment de la compagnie des Mines) juste avant l’implantation du premier magasin, 1964. Dans les bureaux de Nœux-les-Mines, 1971.
À gauche : vue aérienne de Nœux-les-Mines : magasin rue Nationale, bureaux et arrière des entrepôts, vers 1970 .
Les maisons en fibrociment qui avaient fait les grandes heures de l’entreprise dans l’entre-deux-guerres sont abandonnées au profit de pavillons en bois habillés d’un parement en briques. Toujours vendues sur catalogue, elles sont exposées physiquement dans un parc près des magasins. Et elles n’ont rien à envier aux maisons proposées par les meilleurs constructeurs. Le bureau d’études interne est excellent et les équipes peuvent livrer un pavillon de qualité en quelques semaines ! Sans surprise, les carnets de commande ne désemplissent pas. La société bâtit jusqu’à 300 maisons par an.
Quelques mois avant de déménager, l’entreprise a acheté une PME de ferronnerie pour fournir les magasins en poignées de porte, quincaillerie, chandeliers, serrurerie, cheminées… Les frères Leroy ont été bien inspirés car ces salariés leur sont d’une aide précieuse pour transformer les anciens hangars des houillères en magasin. « Il y avait des voies de chemin de fer partout, dehors comme dedans, se souvient Jean-Claude Gorrez, alors responsable du service ferronnerie. Avec les rails qu’on a démontés, on a fait des mezzanines dans
le magasin afin de présenter les rayons sanitaires et meubles. » La mission n’a rien d’évident. « On a tout inventé, se souvient Jean-Marie Buchet, directeur de la centrale d’achat de 1965 à 1983. Il n’y avait aucun modèle à suivre car il ne faut pas oublier que Merlin l’Enchanteur était le seul à vendre aux particuliers, ce qui imposait une exposition adaptée des produits. On a imaginé des présentoirs pour le fibrociment, le bois… On était aménageurs, un peu architectes, c’était vraiment le Far West. » À quoi ressemble une visite chez LeroyMerlin à cette époque ? Les clients sont accueillis et suivis par un vendeur. Ensemble, ils déambulent dans le hangar de stockage pour découvrir les milliers de références de meubles, sanitaires, carrelage, petite quincaillerie, bois ou ciment. Pour les parpaings, les briques ou le gravier, ils vont à l’extérieur. Une fois le tour terminé, une quinzaine d’employés sont chargés d’établir les factures et les commandes sur une grande table de vingt mètres de long installée à l’entrée. Le client peut ensuite faire la queue à la caisse centrale. La procédure ne semble pas décourager les visiteurs. Mais face aux files d’attente lorsque le dépôt fonctionne à plein régime, les frères Leroy comprennent qu’ils doivent trouver une nouvelle organisation.
Chalet dans les environs de Berck, 1969. Équipe de charpentiers dans les années 1960. Bernard Leroy au volant d’un camion de livraison Leroy-Merlin, dépôt de Longueau, 1955.
À la fin des années 1960, le concept de « bricolage » commence à faire des adeptes. Le mot a finalement perdu la connotation péjorative qu’il charriait depuis des décennies. Alors que les armoires se remplissent de vêtements tie and dye et que les jukebox vibrent aux sons des chanteurs yéyés, le bricolage devient un hobby de plus en plus prisé. La hausse du niveau de vie a lancé la mode des maisons secondaires, dans lesquelles les propriétaires sont prêts à se retrousser les manches pour améliorer leur confort. Le matériel de bricolage devient plus pratique et plus facile à manier pour les amateurs. Testé et validé par les succursalistes de l’alimentaire, le libre-service explose, ce qui va aussi permettre la naissance de magasins spécialisés. Mr.Bricolage ouvre en 1965, Obi en 1968 et Castorama en 1969. Pour Leroy-Merlin, c’est une menace, mais pas que ! L’émergence de cette nouvelle concurrence permet à la famille Leroy d’observer les bonnes idées des autres pour opérer des restructurations plus que bienvenues.
Nouveau magasin rue Nationale à Nœux-les-Mines en 1966.
Les matins et après-midis de semaine, quand les clients se font rares, les dizaines de vendeurs jouent aux cartes. Les soirs et week-ends, en revanche, ils sont débordés. Les patrons doivent faire quelque chose, c’est évident. Ils multiplient les voyages pour voir comment s’organisent leurs concurrents. Lionel et Bernard se rendent au BHV à Paris d’abord, mais également aux ÉtatsUnis, et rentrent avec une certitude : il faut passer au libre-service. Adolphe n’est pas pour, mais après d’âpres négociations, il concède à ses fils l’ouverture d’un espace en libre-service pour la quincaillerie. Les salariés doivent désormais compter, trier et mettre en sachets les produits avant l’arrivée des clients. Cela peut sembler anecdotique mais, pour les consommateurs, c’est une petite révolution. Ils n’ont plus besoin de vendeur pour acheter des vis et peuvent toucher avant d’acheter. À l’ouverture, en octobre 1968, le succès est fulgurant. « On n’arrivait pas à fermer le magasin », se souvient Jean-Marie Buchet. Même si le négoce constitue encore 90 % d u chiffre d’affaires, le libre-service est alors considéré comme la voie d’avenir. En 1969, les magasins de Bruay, Longueau et Merlimont implantent à leur tour une zone où les clients peuvent faire leurs courses seuls. Les gammes
présentées ne sont pas toujours les mêmes car certaines, comme le meuble ou la cuisine, nécessitent davantage d’espace. Longueau est la boutique la plus grande avec ses 1 000 m 2 À Bruay et Merlimont, il n’y a que 400 m 2 . Jardinage, carrelage, moquette et revêtements de sol, décoration, sanitaires, robinetterie, outillage-bricolage-quincaillerie, menuiserie-bois-panneaux… Avec le temps, une grande partie des marchandises rejoignent le libreservice. Les magasins sont agencés comme des supermarchés, avec l’apparition de rayons. Dans certains Leroy-Merlin, les vendeurs mettent même en avant les baignoires et robinets en ajoutant savons, serviettes et gants de toilette aux modèles d’exposition. « On a eu un gros succès avec les salles de bains parce que l’on faisait rêver les gens », se souvient Jean-Marie Buchet. Certains clients vont jusqu’à demander à partir avec l’ensemble des produits, savons compris !
Article et publicité dans le Réveil de Berck lors de l’inauguration du nouveau magasin de Merlimont le 31 mars 1972.
De haut en bas
Le magasin de Merlimont en 1972. Nœux-les-Mines : face arrière, parking et zoo, années 1970 ; les grands bureaux, 1965 ; magasin rue Nationale, bureaux et arrière des entrepôts, années 1970.
Si l’arrivée des fils d’Adolphe à la tête de Leroy-Merlin entraîne des bouleversements profonds dans l’organisation du commerce familial, l’état d’esprit, lui, ne change pas. Comme Adolphe, Lionel et Bernard ne jurent que par la satisfaction du client. « Le principal état d’esprit a toujours été d’aimer le contact avec le client, de le satisfaire et de répondre à ses besoins », résume Jean-Claude Mortreux, directeur du magasin de Valenciennes au début des années 1990. Dans certains magasins, un bar est installé pour rendre l’attente en caisse plus acceptable – et fêter les bonnes affaires ! À Mer limont, il n’est pas rare qu’Adolphe propose une coupe de champagne aux clients impatients. Ce respect des visiteurs n’est pas une simple préoccupation de la direction. Il concerne tous les salariés. « Q uand il y avait beaucoup de clients, tout le monde était en magasin, y compris les administratifs, se souvient RoseMarie Allard, chargée de comptabilité à Longueau en 1966. On remettait la comptabilité à plus tard. »
Le souci de la clientèle passe aussi par une offre de services toujours plus poussée. Jusqu’en 1973, la société met à disposition des chauffeurs et une flotte de 150 camions pour livrer les produits chez les clients. Le choc pétrolier change la donne, mais en s’inspirant
de Conforama, les établissements Leroy-Merlin proposent le prêt de camionnettes pour les clients qui aimeraient ramener les marchandises chez eux, en payant eux-mêmes le carburant. En 1971, Leroy-Merlin ouvre également un service crédit permanent pour proposer des facilités de paiement à la clientèle.
Côté produits aussi, les Leroy cherchent à satisfaire tout le monde. Dans les années 1970, les Français dépensent davantage pour l’équipement de leur maison. Grâce à Leroy-Merlin, ils peuvent acquérir les cuisines intégrées ou les appareils électroménagers dont ils rêvent. Le bricolage est à la mode, certes, mais il n’est pas encore totalement entré dans les mœurs. C’est aussi pour cela que la direction veille à ne pas être trop spécialisée. « On a touché un peu à tous les métiers, se souvient Francis Galant, directeur du magasin de Merlimont dans les années 1990-2000. J’ai même vendu des planches à voile de marque LeroyMerlin ! » Les frères Leroy diversifient la gamme en fonction des saisons. Ils vendent des jouets, du matériel de camping… Ces rayons annexes, en marge des secteurs traditionnels, attirent une clientèle beaucoup plus large que celle
qui fréquente les boutiques spécialisées en bricolage. « C’était un mélange de Castorama et de Conforama, ajoute JeanMarie Buchet. Chaque année, la société connaissait une progression minimale de 20 %. » Jamais l’enseigne n’a vendu autant de produits différents qu’à cette époque ; en témoigne le catalogue d’une dizaine de pages devenu une bible de 130 pages, complétée par des brochures saisonnières. Du grenier au jardin, en passant par la cuisine, la chambre des enfants ou la salle de bains, le slogan « tout pour la maison », utilisé dès 1970, n’a jamais été aussi juste !
S’ils sont très différents l’un de l’autre, les frères Leroy sont aussi très complémentaires. Lionel s’investit dans l’administratif, les relations publiques, le personnel, ainsi que la mise en place et le contrôle des structures. De son côté, Bernard se charge du transport, du stockage et de la communication.
« Lion el était le négociateur, Bernard l’homme produits », r ésume Francis Galant. Avec la généralisation du libreservice et l’augmentation du nombre d’articles proposés à la vente, cette direction bicéphale a du pain sur la planche. Les magasins que Lionel,
Bernard ou Jean-Claude Roger, le secrétaire général, visitent une fois par semaine, en louant un hélicoptère, manquent d’organisation. Alors qu’il n’y avait que deux échelons – directeurs et vendeurs polyvalents – jusque dans les années 1970, les Leroy décident que chaque rayon aura désormais son chef, ses vendeurs spécialisés et son acheteur, car l’approvisionnement reste un problème majeur.
En 1972, Leroy-Merlin crée sa centrale d’achat, avec ses propres entrepôts, à Nœux. Celui du libre-service est même équipé de tapis roulants qui permettent de gagner du temps pour livrer tous les magasins en moins de vingt-quatre heures. En nouant des marchés avec les fournisseurs, Lionel et Bernard Leroy s’assurent d’avoir une gamme homogène pour les clients. Les produits concernés sont de meilleure qualité mais ils sont aussi plus chers… ce qui ne les satisfait pas vraiment. Il ne faut pas oublier que Lionel et Bernard ont tout appris aux côtés d’Adolphe !
Sans surprise, les deux frères continuent de chercher de meilleures affaires ailleurs. Ils ont la réputation d’être des acheteurs hors pair. Spécialiste des sanitaires, Bernard est le premier à aller s’approvisionner directement dans les usines en Italie, en Belgique ou en Grande-Bretagne, pour obtenir des produits que les grossistes ne
Extrait du catalogue salle de bains de 1971.
BERNARD
«
vendent pas. Passer directement par les producteurs permet de faire parfois de jolis coups. « Je me souviens avoir fait une affaire extraordinaire avec des tuyaux d’arrosage, raconte Lionel. Une usine ne savait pas quoi faire d’un lot énorme de cinquante mètres de long, cinq de large et trois de haut, que des machines à l’essai avaient percés à des intervalles irréguliers. Je les prends pour quasiment rien. On étale le tas dans la cour et l’on coupe les tuyaux à chaque endroit percé. Il y en avait de toutes les longueurs et toutes les couleurs. Cet étélà, c’était la canicule et on a tout vendu en faisant un bénéfice extraordinaire ! »
Une fois réglée la question des approvisionnements, reste celle, tout aussi épineuse, de la gestion comptable. « Les frères Leroy avaient la bosse du commerce, se souvient Roger Dedeyne, directeur de l’informatique dans les années 1970-1980. En termes de négociation, pour trouver le bon produit au bon moment, c’était de grands bonhommes. En termes de gestion, c’était plus délicat. Le système existant suffisait pour une petite structure mais pas pour une plus grande. » Les prix sont décidés sans vraiment connaître le coût d’achat. Les comptables découvrent à la fin de l’année si les magasins ont gagné de l’argent et combien. C’est ce qui pousse à la création d’un service informatique. Et il y a urgence, car le catalogue n’a cessé de s’élargir. En 1971, il comptait 8 000 références, contre 30 000 en 1976 et 45 000 en 1980. Dès 1971, Leroy-Merlin planche sur un module informatique capable d’afficher les prix d’achat, les marges et les stocks en temps réel. « Je me souviens avoir rencontré un informaticien d’Auchan qui, lorsqu’il a su que Leroy-Merlin se lançait dans la gestion unitaire, nous a traités de cinglés », raconte Roger Dedeyne. Les Leroy relèvent pourtant le défi. En 1973,
ils affichent des codes sur les produits pour que les caissières n’aient qu’à les taper. Et cette même année, leur module franchit un cap : désormais, les magasins n’ont plus rien à commander. Ils sont tous reliés à l’ordinateur central et reçoivent les marchandises en fonction de l’écoulement des stocks.
Longueau, Merlimont, Nœux-les-Mines ou Bruay, les visiteurs reconnaissent les enseignes Leroy-Merlin de loin. L’extérieur est bleu et l’intérieur orange ; c’est la couleur préférée d’Adolphe, dont le portrait trône à l’entrée. Partout, un petit lutin joyeux et ce slogan : « L’enchanteur enchante ». La publicité cherche à rendre l’enseigne plus familiale. C’est aussi pour cela que les enfants reçoivent une maquette en carton ou un ballon quand ils franchissent les portes du magasin. Le dimanche, il n’est pas rare de voir des familles arriver de loin pour passer une partie de la journée chez Leroy-Merlin. À Nœux-les-Mines, les enfants peuvent visiter le mini-zoo et demander à faire un tour en barque sur l’étang aménagé près du magasin. Toutes les fêtes sont aussi prétextes à des opérations commerciales organisées de main de maître, avec des animateurs, des annonces aux micros
et des campagnes de publicité dans les médias locaux. Avec cet esprit joyeux, il est évident que l’entreprise ne va pas laisser passer son cinquantenaire dans l’indifférence générale.
Du 1 er au 5 mai 1973, tous les clients sont invités à célébrer l’anniversaire de Leroy-Merlin. Chaque jour, des gagnants sont tirés au sort et des milliers de cadeaux sont distribués à l’entrée du magasin. Le matin, une fanfare, un petit train et des grosses têtes achetées par Adolphe au carnaval de Nice défilent en ville. Des spectacles de cirque et de marionnettes sont également organisés pour les familles. Les adultes aussi ont leurs festivités. Un chapiteau de 3 000 places est monté à Nœux-les-Mines pour proposer des concerts, des matchs de catch, une kermesse de la bière et des spectacles d’humour. Des artistes reconnus comme les Compagnons de la Chanson répondent même présents. Cette semaine de folie s’achève par un grand feu d’artifice. Comme à leur habitude, les Leroy ont vu les choses en grand et, sans surprise, ils ont aussi mis en place des promotions alléchantes. Cette semaine-là, les clients passent des moments inoubliables et le chiffre d’affaires atteint des sommets !
Catalogues promotionnels, années 1960-1970.
Équipe de foot de Nœux-les-Mines, au premier rang, Lionel (2è en partant de la gauche) et Bernard (tout à droite), 1975-1980.
Colombophilie, club de vélo, union des commerçants… Adolphe fils était très impliqué dans la vie locale. Son fils Bernard a pris la relève. Sportif et généreux, il a renoué avec le sponsoring dès 1965 en accordant des tenues et du matériel au Vélo Club Nœuxois. Le petit club porte un maillot aux couleurs de Leroy-Merlin dans les communes environnantes et sur les photos relayées par la presse régionale. Les retombées économiques ne sont pas phénoménales mais cela redynamise la vie à Nœux tout en permettant à Bernard d’assouvir ses passions. Tout le monde y trouve son compte !
En 1968, l’Union sportive nœuxoise, d’abord soutenue par les Houillères, se tourne logiquement vers Bernard Leroy pour boucler son budget. L’entreprise accepte de prendre en charge une grosse partie des besoins de ce club de football aux prétentions modestes qui navigue dans les profondeurs du classement régional. En quelques années l’USN gravit les échelons régionaux puis nationaux. Un samedi sur deux, la moitié des habitants de la ville assistent aux matchs dans un stade plein à craquer. De nombreux employés de Leroy-Merlin sont issus des rangs du club. En 1971, l’USN monte en troisième division, puis en seconde division cinq ans plus tard. En 1982, l’équipe frôle même la première division sous la houlette de Gérard Houllier, qui deviendra directeur technique national au sein de la FFF au début des années 1990.
Équipe de foot de Nœux-les-Mines, années 1970. À gauche, Vincent Leroy, fils de Lionel et directeur de Merlimont de 1978 à 1980.
Les années 1970 sont marquées par la multiplication des points de vente. L’accélération débute en 1971 avec l’ouverture d’un cinquième magasin à Louvroil, près de Maubeuge. En 1974, le Leroy-Merlin de Montsoult devient l’une des plus grandes surfaces commerciales de France avec ses 10 000 m2 et son grand parking inspiré des hypermarchés. Afin de contrer ces hypermarchés en plein essor, Leroy-Merlin passe un accord avec le distributeur agroalimentaire Gro. Les deux enseignes s’installent à Nœux dans un même libre-service, dispositif sans doute unique dans l’histoire de la grande distribution ! C ette expérience, même si elle ne dure que quatre ans, montre l’inventivité de l’enseigne pour accélérer son développement. Dans les années qui suivent, le mouvement s’accélère avec des ouvertures dans l’ouest de la France (Lucé, Tours Sud, Rennes, Saint-Malo, Caen, Nantes, La Rochelle), en Rhône-Alpes (Bourg-lès-Valence, Romans-sur-Isère, Chasse-sur-Rhône), en région parisienne (Chelles, Vitrysur-Seine, Sainte-Geneviève-des-Bois) et évidemment dans le Nord (Calais, Arras, Dunkerque, Lille). Dans certaines villes, l’arrivée de Leroy-Merlin est attendue avec impatience. Jean-Claude Mortreux se souvient par exemple de
l’ouverture du magasin de Douai, en 1973. « Quan d les camions arrivaient avec de la camelote en réassort, les clients l’achetaient au cul du bahut. C’était fou, c’était incroyable ! E n quelques jours, on a fait trois mois de commerce, c’était délirant. » En dix ans, l’enseigne passe ainsi de quatre à trente-trois magasins avec un record de seize ouvertures en 1978-1979 !
« QUAND LES CAMIONS
ARRIVAIENT AVEC DE LA CAMELOTE
RÉASSORT, LES CLIENTS
L’ACHETAIENT
AU CUL DU BAHUT. C’ÉTAIT FOU, C’ÉTAIT
INCROYABLE ! »
Pour mener à bien cette conquête territoriale, Leroy-Merlin doit embaucher. Les salaires et les primes sont relativement modestes mais les nouvelles recrues sont heureuses de participer à un projet qui fait évoluer la société. Les services centraux jouissent de l’existence d’un comité d’entreprise créé en 1968, contrairement aux magasins, juridiquement considérés comme autant de petites entreprises sans liens directs avec le siège. Malgré la croissance exponentielle que connaît Leroy-Merlin, l’ambiance, elle, reste familiale. « Même s’il y avait des chefs, personne ne jouait au chef, tout le monde allait dans le même sens », s ouligne Daniel Herf, vendeur puis chef de produit sanitaire. La direction a aussi à cœur de remercier et valoriser ceux qui font la renommée de leur enseigne auprès des clients. « Si on venait travailler le dimanche, on avait droit à cinquante francs et à un poulet », s e souvient par exemple Jean-Pierre Grymonprez, responsable de vente. À partir de 1975, des sessions de formation sont mises en place pour les vendeurs. Ceux qui en ont l’envie et la capacité sont encouragés à progresser pour devenir les futurs cadres, ou peut-être même les prochains directeurs de magasin.
Entre 1960 et 1978, le visage de LeroyMerlin a clairement changé. À la fin des années 1970, le libre-service occupe 80 % des magasins. L’entreprise compte plus de 1 500 s alariés dont 305 cadres et agents de maîtrise. Ses trente-trois magasins, bien que pas tous bénéficiaires, génèrent un chiffre d’affaires de 700 millions de francs, soit 1,4 milliard en francs constants. Et même si son assise financière et sa gestion restent optimisables, Leroy-Merlin n’a plus grand-chose à voir avec le Stock Américain d’antan !
« MÊME S’IL Y AVAIT DES CHEFS, PERSONNE NE JOUAIT AU CHEF, TOUT LE MONDE
ALLAIT DANS LE MÊME SENS. »
BERNARD LEROY ET MLLE THERET
Inauguration du vingt-troisième magasin à Tours, 1979. Au centre, en costume clair, Vincent Leroy ; à sa droite, Lise Rose Leroy Merlin Minne, fille d’Adolphe et Rose puis Lucienne Leroy, épouse de Lionel. L’équipe comptable des services centraux, 1971. Mlle Theret, chef comptable, remet une médaille du travail à Bernard Leroy, 1979.
Près d’un siècle après les débuts dans le commerce de Félicité
Drelon épouse Leroy, l’enseigne cherche un nouveau souffle. Le marché évolue vite, le management aussi et les habitudes du passé ne suffisent plus à porter Leroy-Merlin vers l’avenir. Au pied du mur, l’entreprise issue de l’alliance de deux familles va connaître une nouvelle union avec le groupe Auchan.
Leroy fils tire sa révérence le 7 avril 1978.
Si les décennies précédentes ont été marquées par les succès, la fin des années 1970 commence sous de moins bons auspices. La croissance a été trop rapide pour que les dirigeants aient le temps de revoir leur organisation. « Le client c’est le roi, l’administratif, on verra », aimaien t dire les Leroy. Ils doivent pourtant se rendre à l’évidence : la g estion familiale qui fonctionnait pour quelques dépôts ne convient pas à une enseigne qui dispose désormais de trente-quatre magasins en France, principalement dans la moitié nord du pays et à l’ouest de la vallée du Rhône. Lionel et Bernard ne peuvent plus mettre leurs talents de négociateurs au service de tous. Les magasins achètent à moins bon prix, ce qui creuse des difficultés financières. Seuls quatre lieux de vente sont rentables. Trois parviennent à l’équilibre et les vingtsix autres perdent de l’argent. Il faut agir vite, surtout que Leroy-Merlin subit de plein fouet la concurrence de grandes surfaces spécialisées dans le bricolage (Castorama), l’ameublement (Conforama) ou l’électroménager (Darty) qui ont des gammes plus approfondies à de meilleurs prix et des rendements au
mètre carré supérieurs. C’est le principe même de dépôt qui pose problème. Si l’enseigne veut perdurer, elle doit trouver un nouveau concept capable d’unir des magasins très différents, qui s’étendent sur des surfaces allant de 1 500 m 2 pour les plus petits à plus de 10 000 m2 pour les plus grands. Pour relever ce défi, Leroy-Merlin a besoin d’une aide extérieure pour s’extraire de cette impasse financière et profiter d’un regard nouveau.
Le rapprochement entre Leroy-Merlin et Auchan se fait quelques semaines après la disparition, le 7 avril 1978, d’Adolphe Leroy fils, décédé à l’âge de soixante-dix-sept ans. Lionel et Bernard savaient leur père fermement attaché à l’indépendance de son entreprise. Mais son décès ne suffit pas à expliquer l’alliance avec la famille Mulliez. Les frères Leroy ont surtout saisi une opportunité. Pour le comprendre, un petit voyage dans le temps s’impose. Dans les années 1970, le groupe Auchan est en plein développement. Il ouvre des centres commerciaux et lance des enseignes spécialisées dans le textile (Kiabi), le sport (Decathlon), la restauration rapide (Flunch) ou l’électroménager (Boulanger).
À l’époque, Gérard Mulliez et son équipe rapprochée – Roger Brouwers aux finances, Philippe Duprez aux ressources humaines et Marc Deleplanque à l’expansion – rêvent de se positionner également sur le secteur du bricolage. Convaincus qu’il s’agit du nouveau marché à conquérir, ils facilitent d’abord l’implantation de magasins Castorama sur leurs centres commerciaux d’Englos, de Valenciennes ou de Hénin-Liétard. Puis ils entament des négociations pour s’associer à Castorama. Le monde des affaires réservant parfois des surprises, ils apprennent un jour que Castorama a finalement signé un accord avec Carrefour. La déception est immense. Décidé à se positionner malgré tout sur le marché du bricolage, Gérard Mulliez imagine un temps ouvrir une filiale d’Auchan sous le nom de « Bricochan » Fin 1978, il se tourne finalement vers les frères Leroy avec une proposition alléchante. Auchan entre dans le capital de Leroy-Merlin à hauteur de 50 %. Lionel et Bernard restent aux commandes, du moins pour le moment.
L’union n’a rien d’évident. D’abord parce que Lionel et Bernard tiennent désormais les rênes de l’entreprise sous le contrôle d’un conseil de surveillance composé de Gérard Mulliez et de sa garde rapprochée et d’un comité de direction dont font partie certains cadres d’Auchan. Ensuite parce que les Mulliez et les Leroy ont des visions diamétralement opposées
des affaires. Les frères Leroy favorisent une gestion paternaliste du personnel. Le management est concentré dans les mains de quelques cadres, avec très peu de dialogue social ou de communication interne. Le fonctionnement est tellement centralisé que toutes les commandes des magasins sont passées au siège. À l’opposé, Gérard Mulliez est un adepte du management participatif. Rapidement, des tensions apparaissent, comme en témoigne Olivier Motte, entré en 1979 en tant que contrôleur de gestion et devenu par la suite directeur financier, un des premiers cadres en provenance d’Auchan à travailler chez Leroy-Merlin : « Suite à mes premières initiatives de changement, les frères Leroy ont été jusqu’à m’envoyer une lettre de mise à l’écart, rapidement suivie par une lettre de réintégration signée par Gérard Mulliez et un rappel à l’ordre pour ces derniers. » Gér ard Mulliez, lassé d’être devenu une « caution financière », pose un ultimatum aux frères Leroy : s’ils ne lui laissent pas le management, il s’en ira. Au pied du mur, Lionel et Bernard choisissent de céder la totalité de leurs parts au groupe Auchan à la fin de l’année 1981. C’est la fin d’un « mariage contre nature », pour reprendre les termes d’Yvon Jolivet, alors tout juste recruté comme directeur de la centrale d’achat (puis devenu directeur marketing dans les années 1990). Quoique. Quand la famille Mulliez reprend le contrôle de Leroy-Merlin, elle
s’engage à écrire la suite de l’histoire avec 1 700 collaborateurs qui ont, pour certains, toujours connu le management familial des Leroy. La partie est encore loin d’être gagnée.
À mesure que la famille Leroy s’éloigne des magasins, les débats s’invitent dans les discussions des salariés. Certains voient l’arrivée du groupe Auchan d’un bon œil, convaincus qu’il est temps pour l’entreprise familiale de passer à la vitesse supérieure aux côtés d’entrepreneurs qui ont déjà fait leurs preuves. D’autres appréhendent l’avenir. « P our chacun d’entre nous, c’était une remise en question, se souvient Marie-France Caudron, chargée de la comptabilité au magasin de Lens. Les méthodes très différentes mises en place par Auchan modifiaient intégralement notre façon de travailler. Certains refusaient le changement, d’autres l’acceptaient. » En reprenant les postes de management, les cadres venus du groupe Auchan tentent d’insuffler une nouvelle culture d’entreprise. « Il fallait convaincre : pa sser d’une culture de “servants” à un management fondé sur le partage du pouvoir et la participation des collaborateurs », r ésume Olivier Motte. Face à ces bouleversements,
les plus inquiets se mettent en grève. « On avait peur de perdre notre façon de travailler, se souvient Hélène Dominiczak, assistante transports au service marché, achats, logistique. L’ambiance était à la méfiance. »
Les nouveaux propriétaires travaillent d’arrache-pied pour assurer l’avenir de Leroy-Merlin. L’enseigne n’est pas assez généraliste pour faire du commerce de masse comme les hypermarchés, et pas assez spécialiste face à Castorama ? La nouvelle équipe dirigée par Christophe Dubrulle veut faire de Leroy-Merlin un multispécialiste de l’aménagement et de la décoration de la maison, un magasin du couple et des idées, où les clients peuvent compter sur les salariés pour les aider. Gammes, présentation, surface, gestion d’enseigne, communication… Tout change ! C ertains rayons comme l’ameublement, la cuisine ou les jouets, représentant à eux seuls 25 % du chiffre d’affaires dans les années 1970, disparaissent au profit d’autres comme l’outillage, l’électricité ou la quincaillerie qui voient leur nombre de références augmenter. Trop éloignés du concept, onze des trente-quatre magasins ouverts avant 1980 ferment leurs portes. À la place, Leroy-Merlin inaugure de nouveaux points de vente avec des allées plus larges et un balisage plus clair. L’ouverture du magasin de Roncq à Tourcoing, le 17 avril 1984, devient le symbole d’une révolution.
Hôtesse de caisse, 1990. À gauche : équipe du magasin de Longueau, 1980-1990.
Le bâtiment n’a aucun poteau intérieur, pour donner une impression de grandeur. Les gammes sont resserrées sur la construction, la rénovation de la maison et l’aménagement du jardin. Sur les supports de communication, le petit bricoleur tire aussi sa révérence. Il est remplacé par un triangle vert vif posé sur sa base, en symbole de stabilité et de confiance. C’est aussi durant cette période que le trait d’union entre Leroy et Merlin semble disparaître. En plus du nouveau logo, les magasins utilisent également un nouveau slogan, « Leroy Merlin, le magasin du temps libre », et les hôtesses de caisse et vendeurs, habillés en bleu et vert, portent un badge sur lequel les clients peuvent lire « J’ai du temps libre pour vous ».
En parallèle des changements dans les magasins, visibles par les clients, les cadres planchent aussi sur une refonte totale de l’organisation du travail. Le maître mot ? L a rigueur. La centrale d’achat se modernise pour livrer tous les magasins en quarante-huit heures et leur permettre de réduire leurs stocks. Les commandes sont informatisées et, pour assurer la satisfaction des clients, un service de contrôle qualité des produits est créé. L’entreprise se dote également d’un service juridique à la pointe des dispositions législatives sur l’ouverture de nouveaux magasins et la défense des consommateurs. Alors que le nombre de collaborateurs ne cesse d’augmenter, une partie des services centraux déménagent, en 1987, à Villeneuve-d’Ascq, près de Lille, ce qui facilite aussi le recrutement de nouveaux talents. En parallèle, Leroy Merlin renonce aux branches les moins rentables de son activité. La vente par correspondance est arrêtée. La menuiserie, qui fabriquait autrefois 30 000 portes par an, ferme et la filiale de construction de maisons est liquidée en 1988.
En 1981, les amateurs de cinéma découvrent Indiana Jones, une icône de la pop culture. Les fans de reggae pleurent Bob Marley et les Britanniques assistent en mondovision au mariage de Diana et du prince Charles. Cette annéelà, la gauche accède au pouvoir en France. Les Français obtiennent une cinquième semaine de congés payés et le droit de partir à la retraite à soixante ans. Le gouvernement socialiste de François Mitterrand installe aussi des ministères inédits comme celui de la Solidarité nationale ou du Temps libre. C’est à cette période que Leroy-Merlin se cherche une nouvelle identité. Et le « temps libre » colle à l’image que l’entreprise veut donner.
Alors que les années 1980 et la première moitié de la décennie 1990 sont marquées par une crise économique, une forte hausse du taux de chômage, une augmentation de la dette publique et une baisse générale du niveau de vie, de plus en plus de Français découvrent le cocooning Ils prennent plaisir à entretenir leur foyer, décorer leur intérieur et embellir leur jardin. Ces activités deviennent même des loisirs à part entière. Le « bien chez soi » devient un art de vivre, ce qui explique l’envol des grandes surfaces de bricolage. En 1984, Leroy Merlin (désormais sans trait d’union) reçoit sept millions de clients, ce qui en fait le numéro 2 en France.
Le magasin du temps libre avec l’ancien visuel de Leroy Merlin, 1982.
Pour mener tous ces changements, la famille Mulliez s’entoure d’une petite équipe de « bérets rouges », comme les appelle familièrement Régis Degelcke, futur directeur général de Leroy Merlin. Il y a Olivier Motte et François Leclercq, en charge de l’opérationnel, Benoît Vernier pour les ressources humaines, Claude Mast à l’expansion, Yvon Jolivet au marketing / achats, Dominique Jonvel et Dominique Avron, directeurs régionaux, Thierry Cavrois (finance puis RH), Frédéric Motte (logistique puis RH)… Tous sont issus du « m oule » Auchan et partagent la même conviction : « Le pouvoir, cela se partage, et savoir c’est pouvoir, pouvoir c’est avoir. »
P our calmer les inquiétudes des collaborateurs, ils appliquent ainsi, dès 1982, le partage « du savoir, du pouvoir et de l’avoir ». De nombreuses sessions de formation sont mises en place pour familiariser les salariés avec les produits, l’économie de l’entreprise, les techniques de vente ou d’accueil. Un premier centre de formation est ouvert à Vitry puis un second à Nœux pour veiller à ce que tous ceux qui travaillent chez Leroy Merlin aient les moyens de réaliser de meilleures performances sur le terrain. Les anciens chefs de dépôt deviennent ainsi directeurs de magasin
et les vendeurs se professionnalisent pour répondre au mieux aux besoins des clients.
Côté « pouvoir », là aussi, il est question de partage. Les magasins sont désormais considérés comme de petites entreprises qui jouissent d’une réelle autonomie, avec un comité d’entreprise et des délégués du personnel. Les grandes décisions sont prises en commun par les chefs de secteur réunis autour du directeur. S’ils ont un doute, la personne la mieux placée pour décider est celle qui est devant le client. Convaincus de l’importance du dialogue social et du management participatif, les dirigeants encouragent les bonnes idées tout en laissant aux collaborateurs le droit à l’erreur. « On s entait que chacun était concerné et ferait tout pour le succès de la société, se souvient Benoît Vernier. L’intérêt général rejoignait l’intérêt particulier. » L’organisation des ressources humaines est d’ailleurs repensée pour développer une nouvelle politique de recrutement et de rémunération. Une grille de salaires, plus avantageuse, est élaborée. Leroy Merlin met en place le partage du résultat de chaque magasin entre tous les collaborateurs dès 1983 et la possibilité pour tous de devenir actionnaires dès 1986. En plus du savoir, et du pouvoir, l’entreprise instaure ainsi le partage de l’avoir ! « No us sommes dans une espèce de spirale du développement
des hommes qui engendre du développement économique, qui engendre du développement des hommes, et ainsi de suite », r ésume Frédéric Motte.
Une fois la confiance restaurée entre les salariés et la direction grâce à cette politique du partage, l’enseigne doit encore affirmer son identité pour se différencier de la concurrence. Dès mai 1986, vendeurs, chefs de rayon et de secteur, directeurs de magasin, administratifs et direction planchent sur un projet d’entreprise au sein duquel chaque collaborateur pourra se reconnaître. En mars 1988, le croisement des idées aboutit à un thème : « la réussite ». « C’est un projet puissant, très équilibré. Il est tourné non pas sur l’entreprise mais sur le client, ce qui donne un style particulier à la société », se souvient Olivier Motte. Toute la communication de l’entreprise est revue à l’aune de cette réussite pensée comme un engagement de la société envers elle-même mais aussi envers la clientèle. Différents slogans voient ainsi le jour : « S ur les chemins de la réussite », « Tout pour réussir »… Lancée en 1989, la « f ête de la réussite » va rapidement devenir un moment phare dans la vie des magasins. Leroy Merlin veut devenir un distributeur parfait, un spécialiste dont les gammes sont au niveau d’un concurrent spécialisé, un expert vendeur de solutions, sachant
répondre au besoin unique d’un client. Et cela fonctionne ! Entre 1981 et 1989, le nombre de collaborateurs passe de 1 700 à 5 000. Alors que la France commence à être bien dotée en grandes surfaces de bricolage et que les textes législatifs sont de plus en plus contraignants, les dirigeants cherchent aussi à s’ouvrir à de nouveaux marchés. Le 8 novembre 1989, un magasin est inauguré à Leganés, dans la périphérie de Madrid. C’est la première fois que Leroy Merlin s’implante à l’étranger. Quelques années auront ainsi suffi à Leroy Merlin pour se donner une nouvelle jeunesse et de nouveaux horizons.
« TRAVAILLER EN ÉQUIPE ET AVOIR
GOÛT DE LA PERFORMANCE : VOILÀ COMMENT NOUS POURRONS TOUJOURS MIEUX SATISFAIRE NOS CLIENTS QUI, NE L’OUBLIONS PAS, CONSTITUENT LE FONDEMENT
Divers outils de communication autour de la réussite.
À l’aube d’un nouveau millénaire, les dirigeants ont réussi à estomper les gros nuages qui flottaient au-dessus de Leroy Merlin. Mais pour assurer à l’enseigne un avenir prospère et durable, reste à lui trouver une identité et des projets partagés par tous. Pour y parvenir, les collaborateurs adoptent une démarche participative originale : la démarche Vision.
Plaquette de présentation trilingue français, anglais et espagnol, 1989.
Après avoir réussi à redresser l’entreprise, les dirigeants veulent s’assurer qu’elle pourra continuer à se développer sans se reposer uniquement sur ses bons résultats. « C’est quand il fait beau que l’on change le toit de la maison », résume a posteriori Pascal Delfosse, directeur de magasin dans les années 1990, puis directeur général de Leroy Merlin au Brésil et directeur général délégué du groupe Adeo à cette époque. En 1991, les membres du comité de direction décollent pour San Francisco où ils rendent visite aux leaders mondiaux, tous deux américains, Home Depot et Lowe’s. Dans les années qui suivent, plus de 250 cadres de Leroy Merlin s’y rendent à leur tour pour participer à des séminaires et découvrir la culture du changement en entreprise. Tous savent que Leroy Merlin doit évoluer. Reste à savoir comment faire…
En septembre 1993, une lettre suffit à tout changer. Elle est envoyée à Régis Degelcke, le directeur financier de l’époque, par Meryem Le Saget. L’experte en conduite du changement qui intervenait déjà chez Leroy Merlin l’invite à un séminaire où témoigne un certain Michael Doyle, « l’un des experts
internationaux les plus novateurs et efficaces en matière de vision stratégique pour les dirigeants », selon elle. Dans son courrier, elle promet « le début d’une grande aventure pour tous ceux qui veulent inventer et bâtir l’entreprise de demain ». Touché par l’invitation, Régis Degelcke la transmet à Damien Deleplanque qui vient de prendre la direction générale de Leroy Merlin après avoir passé une année à faire le tour de l’entreprise pour en comprendre la richesse. « Je ne sais pas ce que tu en feras mais tu ne regretteras pas d’y être allé », lui promet-il.
Et effectivement, Damien Deleplanque n’a pas regretté. « Il m ’a fallu dix minutes pour comprendre qu’il fallait me faire aider par Michael Doyle », se souvient-il. Avec son visioning , Michael Doyle propose un voyage au cœur d’une organisation pour « révéler le rêve d’une communauté de travail ». Il s’agit d’interroger tous les employés pour recueillir leurs impressions et surtout leurs idées pour la suite. D’abord sceptique, le comité de direction se laisse convaincre et l’actionnaire donne finalement carte blanche à Damien Deleplanque pour initier ce vaste mouvement d’échange au sein de
« IL M’A FALLU DIX MINUTES
POUR COMPRENDRE
QU’IL FALLAIT ME FAIRE AIDER
PAR MICHAEL DOYLE. »
l’entreprise. Et c’est ainsi que le directeur général prend la parole le 20 mars 1995, lors de la clôture de la convention internationale Leroy Merlin organisée à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris, pour présenter le projet aux salariés : « Vision est un projet très élevé, à la limite du réalisable, dont l’horizon est le long terme, qui oblige l’entreprise à se dépasser, à s’adapter et à faire évoluer ses modes de fonctionnement, prévient-il dans son discours. Il s’agit de définir de façon claire et positive ce que nous voulons faire et ce que nous voulons être. » Après le Savoir, le Pouvoir et l’Avoir, Vision symbolise le quatrième socle de la politique de partage : l e partage du Vouloir. Si la politique de partage mise en place dans les années 1980 est directement issue des pratiques du groupe Auchan, cette fois, c’est Leroy Merlin qui pousse la démarche plus loin pour assurer la transition vers une entreprise participative.
Tous les directeurs de magasin et des services internes se retrouvent d’abord à Blankenberghe, en Belgique, pour découvrir la démarche en présence de Michael Doyle. Des sessions Vision sont ensuite organisées dans chaque région avec les directeurs et chefs de secteur puis avec l’ensemble du personnel des magasins. À chaque fois, les participants sont invités à s’exprimer sur l’avenir et sur ce qu’ils souhaitent pour l’entreprise. Cette démarche suscite inévitablement quelques interrogations. Certains se demandent s’il est pertinent de se lancer dans une opération de management participatif de cette ampleur alors que l’entreprise doit déjà affronter des défis
comme la réduction du temps de travail, la concurrence du discount ou l’arrivée des caisses automatiques. D’autres doutent de l’efficacité des réunions et remettent en cause les promesses de participation. Quelques directeurs de magasin, habitués à un management un peu directif, sont même déstabilisés par ces temps d’échange organisés dans des salles sans table avec des groupes de réflexion assis en cercle pour symboliser la rupture dans la hiérarchie. À l’inverse, bon nombre de collaborateurs sont flattés d’être consultés sur l’avenir de l’entreprise. « Dans Vision, il y a visualiser, visualisons, visionnaire, résume Gérard Mulliez. La démarche de Vision, qui consiste à mettre en œuvre la capacité d’intuition et de réflexion de chaque collaborateur pour que chacun devienne visionnaire du futur de Leroy Merlin et ce, en fonction de la perspective de chacun, là où il travaille, est une démarche géniale. » Avec cette vaste opération d’intelligence collective, toutes les habitudes volent en éclats. La parole des derniers arrivés a autant de valeur que celle de salariés qui ont fait l’ensemble de leur carrière dans l’enseigne. Et celle des vendeurs ou hôtesses de caisse a autant de poids que celle des cadres. Contrairement à ceux qui dirigent, ils ne craignent pas de mettre la barre trop haut et c’est exactement ce que Damien Deleplanque recherche en sollicitant les équipes sur le terrain.
« C’EST DANS LA LIBERTÉ
QUE LES GENS FONT CE QUE VOUS AVEZ ENVIE QU’ILS FASSENT. »
Affiche Vision, 1999.
Impossible d’évoquer Vision sans parler d’un homme, Damien Deleplanque, considéré comme le père de cette démarche. Entré en 1979 chez Leroy Merlin comme chef de rayon dans le berceau historique de Nœux-les-Mines, il a ensuite pris la direction du magasin de Valence de 1980 à 1987 avant de sauter dans le wagon de l’internationalisation en prenant la tête du premier magasin espagnol, à Leganés. Confronté à des ambiances difficiles et des problèmes d’adaptation, il se rend compte, au fil de ses expériences, du pouvoir de la parole, de l’écoute et du « faire avec ». Reconnaissant envers ses équipes, il cherche surtout à les faire grandir, convaincu, pour reprendre ses mots, que « les limites des personnes sont celles qu’on leur met ou qu’elles se fixent ». Damien Deleplanque n’a que trente-cinq ans quand il prend la direction générale du groupe. « Si deux personnes travaillent ensemble et qu’elles sont d’accord, c’est qu’il y en a une de trop », lance-t-il pour justifier son choix de s’entourer de personnes aux avis divergents. Son truc à lui, c’est le terrain ! « Si tu es honnête et compétent, quand il y a une décision à prendre en magasin, le directeur général ce n’est pas moi, c’est toi », répète-t-il régulièrement. Fidèle à ses convictions, il fuit les réunions sans fin et demande d’ailleurs à son assistante de bloquer systématiquement trente jours par an dans son agenda pour des visites en magasin. Il n’est donc pas étonnant que Damien Deleplanque ait eu à cœur de promouvoir Vision dans toutes les strates de l’entreprise. La démarche était trop enthousiasmante pour qu’il n’ait pas eu envie de la faire vivre à l’ensemble des collaborateurs.
« Vision alimente la construction de la stratégie de l’entreprise, mais elle ne l’écrit pas directement », précise Yvon Jolivet. Après avoir senti le pouls de l’entreprise et exploré son âme, reste en effet à transformer les envies en avenir commun. Pour utiliser au mieux les échanges, une vingtaine d’opérateurs de saisie sont mobilisés. Ils reprennent les propositions des 12 000 collaborateurs, les enregistrent informatiquement et les transmettent à des cadres chargés d’en faire la synthèse. Ces derniers en tirent trois ambitions pour Leroy Merlin : plac er l’homme au cœur de l’entreprise, devenir la référence mondiale de la satisfaction client et se présenter comme une entreprise mondiale et prospère. Pour concrétiser ces trois points, des « gr oupes de progrès et réalisation » sont créés. Et n’en déplaise aux plus sceptiques, les idées des salariés n’ont pas été mises au placard. Vianney Lepoutre, qui a participé à la rédaction de la synthèse, est bien placé pour le dire. À l’époque, il a parfois eu l’impression de rédiger des propositions qui tenaient plus d’un rêve que d’une vision réaliste. L’avenir lui a donné tort. « Finalement, les trucs fous, on les a faits, soulignet-il quelques années plus tard en relisant les propositions. Avec un cap
commun et une dynamique collective, on sait où on va, chacun sait à quoi et comment il contribue, et ce qu’on veut construire ensemble. » Pour marquer la fin de cette première phase d’« e ntrée dans la Vision », 1 000 collaborateurs se réunissent au Louvre le 24 mars 1999. Un an après la victoire des Bleus à la Coupe du monde de football, Aimé Jacquet, entraîneur de l’équipe de France, est l’invité spécial de cette convention. « Quan d il est arrivé, la salle était en délire », se souvient Régis Degelcke. Il fallait bien un champion du monde comme lui pour symboliser la réussite de la démarche et donner aux collaborateurs une impulsion historique pour la phase « A ction », pr évue les années suivantes.
« AVEC UN CAP COMMUN ET UNE DYNAMIQUE
COLLECTIVE, ON SAIT OÙ ON VA, CHACUN SAIT À QUOI ET COMMENT
IL CONTRIBUE, ET CE QU’ON VEUT CONSTRUIRE ENSEMBLE. »
Convention au Louvre en 1999 avec l’intervention d’Aimé Jacquet.
En 1997, la France compte entre un et deux millions de foyers abonnés à Internet en bas débit. Cette année-là, Leroy Merlin se dote de son premier intranet et, dans la foulée, d’un site vitrine sur Internet. C’est Yvon Jolivet, directeur marketing, qui a demandé à Jean-Marc Zéphir, alors responsable de la formation, de se pencher sur la création d’un site. Seul dans son bureau de la centrale d’achat, il travaille d’arrache-pied pour que la page n’affichant que les adresses et les horaires d’ouverture devienne, le 16 mars 1998, une véritable petite boutique en ligne où l’on peut acheter tout un catalogue d’outils électroportatifs. Dès le début, la dimension pédagogique est un parti-pris fort avec la mise à disposition de fiches de pose, de cours interactifs et de questions-réponses pour aider les clients dans leur choix. À l’époque, le site n’a pas de stock. Une fois par semaine, un salarié prend une camionnette et fait le tour des magasins de Lesquin, Tourcoing et Villeneuve-d’Ascq pour acheter les produits commandés sur le site et les déposer à la Poste. D’abord balbutiante, l’activité de cette « entité 380 », comme elle apparaît dans les relevés comptables, finit par décoller. Avec l’arrivée de Cdiscount et d’Amazon sur la toile, de nouveaux moyens financiers et techniques sont déployés pour le site. Ils étaient trois à travailler à la vente en ligne en 1998. En 2003, ils sont une douzaine, puis une trentaine en 2018. Les magasins qui voyaient la vente en ligne comme un concurrent direct à leurs affaires commencent à comprendre que les deux activités peuvent être complémentaires.
Dans les années 1990, les ordinateurs se multiplient dans les foyers français.
Même si la démarche Vision de Leroy Merlin occupe une partie des esprits pendant cette décennie, l’entreprise continue de grandir. Entamé dès la fin des années 1980, le développement international s’accélère dans les années 1990 avec le rachat en 1994 de Bricoman en Belgique, puis l’installation en Pologne, en Italie et au Brésil en 1996. Les équipes restent aussi mobilisées pour se tenir à l’écoute des innovations qui pourraient améliorer leurs performances. Dans les années 1990, elles peuvent ainsi profiter de plusieurs avancées technologiques. Le développement d’Internet ouvre des portes à la formation à distance. Avec le Minitel et les catalogues sur cédérom, Leroy Merlin découvre le commerce électronique. Grâce à la visioconférence enfin, des équipes de Paris, Bordeaux, Lyon, Marseille ou Lille peuvent échanger sur leurs produits et les collaborateurs ont l’occasion de participer au développement européen et mondial du groupe sans avoir à multiplier les déplacements.
Dans les rayons aussi, l’heure est à l’innovation. Les années 1990 voient
la maison mais aussi l’automatisation du fonctionnement de certains appareils électroménagers. Il s’agit d’apporter toujours plus de confort aux foyers. Puisque le jardinage est devenu une activité de loisir comme le bricolage avant lui, plusieurs magasins réorganisent aussi leurs allées pour faire de la place à un rayon jardinerie. Comme pour les autres secteurs, la centrale d’achat s’appuie sur les études de clientèle pour anticiper les besoins des clients. C’est ainsi que l’arrosage intégré est mis en avant et que les magasins se lancent dans la commercialisation de piscines hors sol. La concurrence y est rude et il faut de solides connaissances techniques pour se positionner sur le marché, mais les équipes de Leroy Merlin peuvent compter sur les formations organisées par l’enseigne pour monter en compétence.
Espaces matériaux de construction et jardinerie en magasin dans les années 1990.
En 1997, Leroy Merlin passe à la vitesse supérieure en s’installant dans 17 000 m2 de bureaux à Lezennes. Le berceau de Nœux-les-Mines, lui, ne disparaît pas. Leroy Merlin y conserve un entrepôt et un magasin. Le déménagement répond à un besoin d’espace mais aussi à une envie de se rapprocher de la métropole lilloise pour attirer de nouveaux talents. La rotation du personnel reste assez élevée, en particulier chez les chefs de secteur et les responsables de rayon. Pour la faire baisser, les ressources humaines travaillent sur la formation et l’intégration des nouvelles recrues. Côté formation, est créé en 1990 l’Institut de développement Leroy Merlin, à Villeneuve-d’Ascq, pour regrouper les activités autrefois éclatées en trois pôles. « Le but d’IDLM était d’augmenter l’employabilité des collaborateurs, soit en leur donnant les moyens d’être meilleurs dans leur job, soit en leur offrant la possibilité d’évoluer vers d’autres postes ; c’était un travail très positif et valorisant », se souvient JeanMarc Zéphir qui a pris les rênes de l’institut quelque temps après sa mise en place. Côté intégration, Leroy Merlin
lance l’opération Pilote Leroy Merlin pour donner la possibilité aux jeunes recrues de découvrir l’entreprise sous tous ses aspects. Dans les années qui suivent, le programme est complété par des rencontres avec des experts métiers, des équipes d’autres magasins, des artisans partenaires, des habitants…
Pour faciliter le renouvellement des équipes, les salariés sont également invités à parler des offres d’emploi Leroy Merlin à leurs proches. De 12 % en 1991, le nombre de personnes embauchées par cooptation passe à 20 % en 1992. Un prix de la cooptation est même créé ! Cette gestion volontariste des ressources humaines est d’autant plus importante que le passage aux trente-cinq heures fin novembre 1999 modifie toute l’organisation du temps de travail. La décennie 1990 est aussi celle de l’arrivée dans l’ère de la logistique. Leroy Merlin ouvre ainsi un quatrième entrepôt fin 1991, à Châlons-sur-Marne, et l’enseigne adopte progressivement les codes à barres européens qui lui permettent de mettre en place les premiers inventaires par portable.
Ligne 1 : formation interne IDML dans les années 1990. Lignes 2 et 3 : siège de Lezennes dans les années 1990.
Dans les années 1990, les équipes posent aussi les premières pierres du service client hors du commun qui sera développé plus tard. Après la livraison, le financement, la découpe de verre et de bois, l’encadrement ou l’aide à l’établissement de devis, certains magasins proposent le ferrage de porte, le prêt de décolleuse, de table à tapisser ou d’araseur de moquette. D’autres mettent un accent particulier sur l’accueil du client avec l’apparition de zones de détente, de points accueil enfants et de distributeurs de billets, de cabines téléphoniques, de photomatons, et c.
Ces initiatives variées et locales seront parfois généralisées. C’est notamment le cas de l’emporté marchandise, de la reprise des produits et de l’opération « artisans partenaires » qui permet aux clients de consulter en magasin une liste d’artisans qualifiés pour les aider à réaliser leurs travaux. Il en va de même pour l’assistance téléphonique lancée en août 1993 avec la mise en place d’un numéro joignable sept jours sur sept partout en France de huit heures à dixneuf heures.
Spots publicitaires à la télévision, parrainage de l’émission Téléfoot sur TF1, insertions publicitaires dans les magazines de décoration et de presse féminine, édition de catalogues… Dans les années 1990, Leroy Merlin investit tous les canaux à sa disposition pour faire connaître la marque et accroître la fréquentation en magasin. L’enseigne fait aussi évoluer son image avec un nouveau logo et une nouvelle identité visuelle déclinée sur les façades, les panneaux de parking ou les tenues vestimentaires des employés. Dans la signalétique, le ton est plus direct et plus convivial. Il en est de même dans le magazine Réussites lancé en interne en 1988 pour assurer la diffusion des informations auprès des collaborateurs. La décennie se conclut même en 1999 par la diffusion d’un nouveau slogan issu du processus Vision : « Leroy Merlin. Et vos envies prennent vie. »
Point accueil, service après-vente et accueil enfants dans un magasin Leroy Merlin, années 1990.
En juin 1992, des chefs d’État, des associations et les dirigeants de grandes entreprises se retrouvent au sommet de la Terre, organisé à Rio. Ce rassemblement planétaire contribue à la diffusion de notions clés comme l’agenda 21, le développement durable ou la responsabilité sociétale des entreprises. Dans ce contexte, Leroy Merlin décide de faire sa part du travail tout en répondant aux attentes de ses clients préoccupés par l’environnement. Patrice Pageaud, directeur de groupe produits devenu par la suite directeur développement durable, s’engage ainsi auprès des ONG pour la promotion de la gestion durable des forêts, en référençant des produits certifiés et en identifiant l’origine des bois utilisés. L’enseigne met également en avant des produits d’entretien écologiques et des objets qui permettent d’économiser l’eau, comme la chasse d’eau à double débit, la douchette à économie d’eau ou les récupérateurs.
En parallèle, les collaborateurs sont incités à s’investir dans des projets sportifs ou solidaires. Certains agissent à titre personnel, en donnant leur sang par exemple. D’autres se mobilisent à l’échelle du magasin pour soutenir une association caritative comme
Emmaüs ou le Secours populaire. En 1994, inspiré par ce qui se fait déjà chez Decathlon, les magasins de Lens et Dunkerque organisent un Bricotroc. Le principe est simple : perm ettre aux clients de revendre leur ancien matériel, ce qui les incite au passage à en acheter de nouveaux. L’opération est un tel succès que, dès 1996, le Bricotroc devient national. L’année suivante, l’enseigne se mobilise aussi aux côtés de l’association Handicap international après qu’un client, papa d’une fille handicapée, a envoyé un courrier à la direction de Leroy Merlin. Touché, Régis Degelcke lance le « c oncours des papas bricoleurs et mamans astucieuses » po ur récompenser les meilleurs aménagements qui facilitent la vie quotidienne et l’autonomie des personnes handicapées. C’est une façon de montrer que Leroy Merlin a non seulement le bricolage dans son ADN mais aussi des valeurs.
RÉGIS DEGELCKE LE PÈRE DES PAPAS BRICOLEURS
« CE QUI ANIME CHAQUE COLLABORATEUR LEROY MERLIN ? LA POSSIBILITÉ DE CHANGER SA PROPRE VIE EN PERMETTANT
Lauréats du concours des papas bricoleurs, 1997.
Après la réflexion, place à l’action ! Au début des années 2000, les équipes de Leroy Merlin mettent tout en œuvre pour accomplir les trois ambitions définies collectivement au siècle précédent : devenir la référence mondiale de la satisfaction client, mettre l’homme au cœur de l’entreprise et se développer comme une entreprise mondiale et prospère.
Le passage au nouveau millénaire a été marqué par une hausse importante des prix de l’immobilier. Face à cette augmentation, de plus en plus de consommateurs s’intéressent au « faire soi-même ». E ncore faut-il en avoir les compétences ! Pour répondre à ce nouveau besoin, Leroy Merlin a un atout de poids : son assistance téléphonique. Douze techniciens assurent une permanence de huit heures à dixneuf heures du lundi au dimanche. À l’époque, Leroy Merlin est la seule enseigne multi-spécialiste à proposer ce service. Le groupe lance aussi les ateliers de la maison pour permettre aux clients d’apprendre à utiliser les produits. Testés en 2000 à Saint-Brieuc, ces ateliers, généralement organisés le samedi, réunissent une dizaine de clients autour d’un conseiller de vente. Objectif : apprendre en pratiquant, sur une demi-journée ou une journée entière. La formule rencontre un franc succès. Quatre ans après leur mise en place, plus de 5 000 clients ont déjà profité de ces ateliers organisés dans trente-trois magasins. Ces rendez-vous sont doublement bénéfiques : vendus aux alentours de vingt-cinq euros, ils génèrent un chiffre d’affaires additionnel
et fidélisent la clientèle en l’incitant à acheter les matériaux présentés lors de l’atelier.
Pour compléter son offre, le groupe propose un service à domicile de pose de moquette, l’installation de sanitaires, de chaudières ou de stores. Côté service après-vente, Leroy Merlin met également les bouchées doubles. À partir de janvier 2000, la satisfaction des clients est mesurée quatre fois par an pour établir un baromètre partagé avec l’ensemble des équipes et pris en compte dans le calcul des primes touchées par les salariés. Au même moment est créée la « Voix du client » , un service qui gère les réclamations des clients et qui est constitué d’une équipe dédiée pour traiter les courriers, formulaires internet, mails et appels téléphoniques. Toutes ces remontées sont utiles pour refondre les guides d’achat techniques, produire davantage de contenus pédagogiques ou améliorer la gamme de produits. « À chaque fois qu’un client rencontre un problème, cela peut être une mine d’or pour trouver des sources de progrès », pr écise Maria Flament, alors à la tête de ce service. « Chaque pépin est une pépite ! » résume-t-elle.
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et jardins le service le plus adapté, les dirigeants vont jusqu’à adapter les lieux de vente aux profils des consommateurs. Ainsi, ils développent un concept de magasin nouvelle génération, associant trois univers à trois cibles clients technique pour les bricoleurs experts, l’espace projet pour les couples et familles qui aménagent leur foyer, et le coin décoration dédié aux nouveaux venus dans l’univers du bricolage, principalement des femmes.
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site enregistre vingt-cinq millions de visites et plus de 32 000 commandes. Pour assurer les livraisons, Leroy Merlin tourne une page de son histoire. En 2007, l’entrepôt de Nœux-les-Mines ferme ses portes au profit d’un centre logistique basé à Dourges. Leroy Merlin y dispose d’une capacité de stockage de 100 000 m et fonctionnels, à proximité de l’axe autoroutier le plus fréquenté au nord de Paris, de la rivière Deûle et des voies de chemin de fer. Et deux ans plus tard, un autre centre logistique ouvre dans le Sud pour offrir le meilleur service à un maximum de clients.
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Créé par Leroy Merlin en 2005, Leroy Merlin Source est le réseau de recherche de l’entreprise sur l’habitat, dont le fil rouge est l’habitat durable. Il réunit des chercheurs, des enseignants et des professionnels du champ de l’habitat qui partagent leurs savoirs et leurs connaissances avec les collaborateurs de l’entreprise. Au sein de trois pôles appelés « Habitat et autonomie », « Habitat, environnement et santé » et « Usages et façons d’habiter », ils créent des savoirs originaux à partir de leurs pratiques, réflexions et échanges, sur les évolutions de l’habitat et les modes de vie, principalement par le recours à la recherche en sciences humaines et sociales. Ils travaillent de manière transversale au sein de chantiers de recherche dont les thèmes sont définis annuellement par les membres des groupes de travail, en dialogue avec les axes stratégiques de l’entreprise. Ces travaux sont construits avec des collaborateurs de Leroy Merlin et sont ouverts à des partenariats avec des acteurs de l’habitat et des institutions publiques et privées.
Contribution Habitat durable, Damien Rondepierre, Leroy Merlin Source, illustration Bénédicte Muller.
Ouvrage Apprendre à habiter, Leroy Merlin Source, 2023.
Les résultats de ces chantiers sont communiqués d’une part aux collaborateurs de l’entreprise, sous des formes adaptées à leurs préoccupations, et d’autre part à tous les acteurs de la chaîne de l’habitat intéressés, dans une diversité de supports : rapports de recherche et synthèses, films, expositions, événements publics… Ils sont également disponibles en open source sur le site www.leroymerlinsource.fr
En 2019, Leroy Merlin a souhaité ouvrir un nouveau champ de recherche, axé sur l’évolution des métiers du retail et de la consommation. L’entreprise a donc signé un partenariat avec l’université de Lille pour la création d’une chaire industrielle : la chaire TRENDS (Transformation of Retailing Ecosystems and New Market Dynamic(s), « transformation des écosystèmes de vente au détail et nouvelle(s) dynamique(s) de marché »). Cette chaire est un lieu de rencontres, de réflexion et d’échanges entre différents acteurs qui souhaitent imaginer le commerce de demain. Elle vise à co-créer et diffuser de la connaissance, auprès de l’ensemble des parties prenantes de la société, sur la place et le rôle que devra prendre le commerce dans la société de demain.
En 2021, le partenariat signé par le magasin Leroy Merlin de Nice avec l’université Côte d’Azur, et plus particulièrement avec l’Imredd (Institut méditerranéen du risque de l’environnement et du développement durable), pour le développement de la chaire « UX for Smart Life Home and Mobility » donne à l’entreprise l’opportunité de travailler sur le sujet de la vie intelligente et de lever les verrous scientifiques qui peuvent freiner le développement technologique de nos environnements intelligents. La chaire a pour vocation de tester et d’étudier l’acceptabilité et l’impact sur les usagers des nouveaux systèmes connectés et des services numériques associés imaginés par les entreprises partenaires.
« La détection des signaux faibles que permet la recherche à travers ses méthodologies scientifiques et pluridisciplinaires est une façon pour l’entreprise d’anticiper les besoins et les attentes des habitants, consommateurs et clients. Et donc, d’être une entreprise innovante », conclut Claire Letertre, responsable de la recherche chez Leroy Merlin France.
Habitat durable, des savoirs pour penser et agir
« Et vos envies prennent vie. » À la fin des années 1990, Leroy Merlin a trouvé le slogan qui lui permet de s’imposer comme l’enseigne qui aide les gens à passer du rêve à la réalité. Attendue par les clients et les collaborateurs, la fête de la réussite devient même la fête des envies en 2001. Mais au tournant des années 2000, les consommateurs en ont assez de la publicité traditionnelle. Leroy Merlin joue une fois de plus les précurseurs en se lançant dans la création de contenus, le brand content . Dans Du côté de chez vous, un programme court conçu avec une société de production et diffusé sur TF1, la marque n’est pas le sujet. Ce sont les gens et leurs maisons surprenantes qui sont mis en avant. D’abord limité à une trentaine de secondes, le programme s’étend rapidement sur plus d’une minute et devient un vrai succès d’audience diffusé pendant vingt ans. En 2012, Du côté de chez vous abandonne peu à peu les maisons hors du commun pour se recentrer sur des habitants investis dans la conception ou la rénovation de certaines pièces de leur logement. Chaque épisode est dédié
à une problématique de décoration ou d’aménagement validée par Leroy Merlin. « E n général, une marque qui sponsorise un programme court n’est pas censée avoir un droit de regard sur le contenu, souligne Carine Negroni, chargée du programme depuis 2012. Mais pour Leroy Merlin, cela a toujours été le cas. Nous avons été les premiers sur ce modèle de brand content où la marque a la possibilité de travailler son image à travers un contenu éditorial conçu sur mesure. » Et même si le dernier épisode a été diffusé en septembre 2018, Du côté de chez vous n’a pas disparu. La marque a donné son nom au magazine (initialement nommé Maisons en vie ) que Leroy Merlin propose à ses clients. Elle se décline aussi en ligne, avec une application mobile et des réseaux sociaux proposant des vidéos, des articles et des forums de discussion qui traitent davantage de l’aménagement de la maison que des produits vendus pour les réaliser.
En 2003, les efforts déployés par les équipes depuis des années sont récompensés : l’enseigne devient le premier distributeur français sur le marché du bricolage, devant Castorama. Réunis à Villepinte le 15 mars 2006, 1 500 directeurs de magasin et chefs de secteur réfléchissent à la suite. Dix ans après le début de la démarche Vision qui a permis à l’entreprise de prendre un nouveau départ, une dynamique s’enclenche pour redonner un nouvel élan aux équipes : Vision Accélération. Objectif selon Régis Degelcke, directeur général de Leroy Merlin France en 2006 : « Être encore premier l’année prochaine mais également dans cinq ans. » Tous les collaborateurs sont à nouveau interrogés et la concertation est ouverte à des partenaires extérieurs à l’entreprise. « Quelles valeurs communes, quels fondamentaux communs, quelles innovations communes choisissons-nous pour nous développer ensemble ? » leur demande-t-on. Le terme qui revient le plus souvent est celui d’« entrepreneur ». Il vient ainsi compléter la vision de « l’homme au cœur de l’entreprise », en mettant l’accent sur la responsabilisation et l’autonomie de chaque collaborateur. En France ou à l’étranger, Leroy Merlin doit effectivement son succès à sa capacité d’adaptation aux façons d’habiter et aux modes de consommation locaux.
Avec ce nouveau cycle, les équipes tiennent aussi à approfondir leur engagement sociétal et environnemental. Début 2007, Yves Bogaert, responsable merchandising, rédige par exemple une lettre ouverte aux dirigeants intitulée « Une vision écologique pour un management environnemental ». Il y rassemble plus de soixante réflexions et pistes d’action pour inscrire le développement durable au cœur de la stratégie de l’entreprise. De nombreuses réalisations dans ce domaine permettent à Leroy Merlin d’intégrer le top 100 des meilleures actions engagées en France suivant le classement du ministère de l’Environnement. Après avoir pris part à la vie locale dans les années 1970, puis à des actions de solidarité dans les années 1990, l’enseigne profite également de cette décennie pour explorer la « r esponsabilité sociale et sociétale de l’entreprise » avec le lancement, en 2006, de sa fondation.
La structuration d’un programme de promotion interne s’accélère et crée ainsi des parcours de détection de potentiels un peu partout dans les régions, en s’appuyant également sur le développement du e-learning. Les ressources humaines attachent une importance particulière au bien-être des collaborateurs. Ceux-ci ont ainsi la possibilité de s’exprimer anonymement grâce à la « Voix des équipes ». C et équivalent interne du baromètre de satisfaction client devient un indicateur important du climat social et de la perception du travail en magasin. Les liens entre la direction et les équipes sur le terrain sont renforcés par des événements, des journaux réservés aux salariés ou l’intranet.
KAMEL ET LA CHAMBRE DE GRAND
THÉRÈSE ET LA MAGIE DE L’ASCENSEUR
L’idée vient des collaborateurs, qui sont nombreux à avoir exprimé leur envie de s’impliquer davantage en faveur des personnes handicapées, âgées ou en perte d’autonomie. Parce qu’ils travaillent chez Leroy Merlin, ils rêvent d’une fondation qui aide au maintien à domicile. En 2006, c’est chose faite. Et même si la fondation a son propre conseil d’administration et son comité d’évaluation des projets, les collaborateurs restent à la manœuvre. Ce sont eux qui détectent les projets à soutenir, via des connaissances ou lors de demandes de clients dans le magasin. Ils rédigent ensuite un dossier et le défendent auprès du comité d’évaluation. Si leur projet est sélectionné, ils en assurent la coordination et soutiennent les familles pendant le chantier, ce qui exige souvent un investissement en dehors du temps professionnel. À chaque fois, les collaborateurs vivent une expérience « enthousiasmante et tout particulièrement enrichissante sur le plan humain », souligne Marie-Christine Panitskas, responsable de la fondation de sa création en 2006 à 2018. La démarche est d’ailleurs tellement ancrée dans l’ADN de l’entreprise que la possibilité d’accompagner des familles est souvent évoquée dès la phase de recrutement. Et cela marche. En dix ans, la fondation a soutenu plus de 600 projets et mobilisé 650 salariés pour un montant moyen d’aides de 7 000 euros.
Grâce à ceux et celles qui font Leroy Merlin au quotidien, de nombreux projets vont ainsi pouvoir voir le jour. Le début des années 2000 est marqué par une forte expansion du nombre de points de vente. « Il y a e u jusqu’à dix ouvertures de magasin par an sur cette période, se souvient Michel Salaün, expansion manager de 2000 à 2006. À ce moment-là, Leroy Merlin a bénéficié du fait que les élus devaient redynamiser leurs territoires touchés par la désindustrialisation et favoriser l’installation de zones commerciales. » En 2004, le groupe inaugure même ses premiers points de vente en Russie et en Chine. L’enseigne poursuit également sa croissance externe en rachetant les trente-huit magasins OBI en France, trente magasins Aki en Espagne et au Portugal. Elle signe aussi un accord avec le groupe Domaxel (Weldom, Dom Pro, Club Partenaire) et crée de nouvelles enseignes. En 2007, le premier magasin Zodio, dédié à l’équipement, la décoration et la personnalisation de la maison, ouvre ainsi ses portes à Massy. Deux ans plus tard, c’est au tour de Kbane, une enseigne dédiée aux énergies renouvelables et à l’habitat durable, de s’implanter près de Lille.
Reste néanmoins à structurer les nouvelles activités désormais liées à Leroy Merlin.
En 2007, le groupe Adeo est créé – et l’appellation « Leroy Merlin France » apparaît comme une organisation distincte des autres implantations à l’international – pour regrouper sous une même entité la grande surface de bricolage, le hard discount, les moyennes surfaces de bricolage et les marques spécialisées. « L e nouveau nom du groupe ne devait pas traduire ce que l’entreprise faisait mais ce qu’elle voulait être, là où elle voulait aller, d’où le choix de ce verbe latin qui signifie “être en mouvement, aller vers”, mais aussi “entreprendre, affronter” », se souvient Damien Deleplanque, son premier directeur général. Toutes les entreprises du groupe sont ainsi réunies autour d’un socle commun de valeurs : la cohérence, l’honnêteté, l’esprit de performance, le respect de l’autre, la générosité, la proximité et la simplicité.
En 2008, Leroy
Merlin France
prend conscience de la nécessité de se réinventer. Les dix années qui suivent sont marquées par une série de changements. Rapport aux habitants, croisement des canaux de distribution, habitat durable et coopération, l’heure est à l’innovation !
À la fin des années 2000, l’enseigne se dit au service de tous les « habitants » et non plus seulement de ses clients. Derrière l’évolution des mots se cache l’instauration d’une démarche hautement symbolique. « On travaille pour tous les habitants, y compris ceux qui ne sont pas nos clients, car il y a moyen qu’ils le deviennent », résume Jean-Philippe Zunino, directeur du marketing et des achats de 2000 à 2006. Comme des ethnologues, les équipes veulent comprendre tous ceux qui habitent un logement, qu’ils soient ou non déjà venus chez Leroy Merlin. Des collaborateurs se déplacent directement chez les gens pour découvrir les manières de vivre et comprendre leurs motivations en matière d’achats.
L’accent est mis sur la connaissance des habitants car l’enseigne veut construire une relation durable avec eux en les accompagnant individuellement et pendant longtemps. La nouvelle carte maison introduite fin 2006 préfigure d’ailleurs le marketing par la donnée avec des promotions ciblées, le marketing direct et la communication personnalisée. À partir de 2013, l’entreprise choisit de se concentrer
sur les nouveaux emménagés avec des dispositifs spéciaux pour les repérer, leur proposer la carte maison et les réunir lors d’événements en magasin ou à l’extérieur, en se mettant notamment en contact avec les mairies qui organisent des pots d’accueil. Parmi les habitants rencontrés, certains ont un projet de bricolage ou d’aménagement mais ils n’osent pas passer à l’action par peur de ne pas savoir. Pour répondre à leurs attentes, Leroy Merlin France simplifie les choix avec trois niveaux de prix clairement affichés pour une même catégorie de produit et accentue les conseils en distribuant jusqu’à trois millions d’exemplaires des brochures de la collection Grands Guides . Le service de pose est enrichi par la réalisation de films et l’organisation d’activités commerciales comme les « rendez-vous des bricoleurs passionnés » ou le « weekend des bricoleurs » . Enfin, tous les contenus pédagogiques produits depuis des années sont regroupés sur le site leroymerlin.fr qui devient une véritable école du bricolage.
Soucieux d’élargir sa clientèle, et face à des autorisations commerciales de plus en plus difficiles à obtenir, le groupe tente également de s’implanter au cœur des villes. En septembre 2016, Leroy Merlin s’installe au centre de Strasbourg avec un concept store de 200 m2 décoré comme un appartement au cœur de la galerie commerciale Rivetoile.
Nouvelle signature et nouvelle campagne publicitaire de marque, 2017.
Couvertures des Grands Guides Leroy Merlin, 2011.
L’objectif est de conquérir une clientèle urbaine qui ne fréquente pas les magasins de périphérie et ne se considère pas comme « bricoleuse ». Le défi n’est pas simple. Si l’appartement de Strasbourg est toujours en activité, celui ouvert à Paris en janvier 2019 dans le quartier des Batignolles annonce sa fermeture en juin 2021. Toujours dans l’optique de s’adresser à tous, Leroy Merlin France opère aussi de nombreux changements dans ses rayons. Les produits ne sont plus réunis par types de matériaux selon une logique fabricants, mais par univers produits cohérents pour le client. Ceux pour le sol, qu’ils soient en bois, en carrelage ou en lino, sont regroupés, et les parquets, tasseaux ou fenêtres ne sont plus systématiquement ensemble, même s’ils sont tous en bois. Les conditions de reprise en magasin sont élargies. Avec ou sans ticket, produit endommagé ou non, dans les délais légaux ou pas… le slogan est clair : « A chetez sans hésiter, nous reprenons sans discuter. » Pour les clients, il s’agit d’un double message : « n’ayez pas peur d’acheter » et « vous avez le droit à l’erreur ». Avec cette nouvelle politique, Leroy Merlin France renforce ainsi son image d’enseigne qui simplifie la vie des acheteurs. De manière symbolique, l’enseigne change également de signature en 2017. « Et vos envies prennent vie » se transforme en « Et vos projets vont plus loin ». Le projet maison devient « l’aventure d’une vie » dans laquelle Leroy Merlin France est un soutien.
En 2009, près de 96 % d es Français ont un téléphone mobile ; 70 % s ont des cyberacheteurs, 81 % consultent le web avant un achat et deux sur trois y donnent leur avis. Sans surprise, c’est à cette période que les visites sur le site leroymerlin.fr explosent. En 2010, elles atteignent les soixante-dix millions, soit 34 % de plus que l’année précédente ! Devenu l’un des plus visités sur la thématique de l’aménagement de la maison, le site web leroymerlin.fr fait l’objet de toutes les attentions. Il est d’abord rénové à la rentrée 2011 avec l’ajout de nouvelles références produits. En 2013, alors que le cap des 150 millions de visites est franchi, le forum est rebaptisé « S elon vous » et repensé avec des jeux et des avatars. Et l’année suivante, le site fait un nouveau pas de géant en autorisant les clients à payer comme ils veulent et où ils veulent. Avec le succès de son site web, Leroy Merlin France ne veut pas oublier les fondamentaux : la relation client.
À distance, elle est aussi importante que lors d’achats physiques. Téléphone, web, tracts, magazine, courriers, e-mail, réseaux sociaux, smartphones… Pour se rendre toujours plus accessible, l’enseigne met à disposition des clients
Les équipes du magasin de Neuville, 2021.
une multitude de canaux pour entrer en contact avec elle. Au lieu d’installer un centre de contact national comme le font d’autres géants de la grande distribution, Leroy Merlin France fait aussi le choix de la proximité en instaurant une plateforme relationnelle magasin (PRM) dans chaque lieu de vente. Cette multiplication des points de contact entre le client et l’enseigne nécessite un nouveau mode de fonctionnement.
Avant 2010, le site internet était considéré, d’un point de vue comptable, comme un magasin complémentaire et donc potentiellement concurrent. Quel intérêt pour un magasin d’encourager la vente en ligne alors que ces ventes n’entrent pas dans son chiffre d’affaires, voire risquent de faire baisser sa prime de progrès ? P our mettre un terme à cette « c oncurrence » injustifiée, les chiffres d’affaires du site sont d’abord réintégrés dans ceux des magasins en fonction de la zone d’achat. De grandes opérations de communication interne sont menées auprès des collaborateurs pour qu’ils comprennent que Leroy Merlin France veut faire cohabiter la vente en ligne tout en maintenant le développement des magasins. Pour cela, la création d’un compte client unique national entre en chantier dès 2011. La collaboration est également poussée à un niveau supérieur avec l’arrivée, à partir de 2014, du retrait de produits en magasin à la suite d’un achat sur le
site. Rapidement, les commandes sont disponibles vingt-quatre heures sur vingt-quatre grâce à des casiers et les équipes s’engagent à offrir aux clients un retrait dans les deux heures. Ces changements sont rendus possibles grâce à la modernisation des outils utilisés par les équipes.
Au début des années 2010, l’entreprise constate qu’elle a pris du retard dans le domaine de l’innovation. « On améliorait l’existant mais on ne se décalait pas assez pour aller chercher de nouvelles parts de marché, se souvient Pascal Delfosse, directeur général délégué du groupe Adeo. On restait sur notre savoirfaire historique. »
Pour y remédier, Leroy Merlin France veut pousser plus loin la logique de l’intelligence collective, en mettant en avant le management participatif.
C’est ainsi que naît la démarche
« Demain c’est nous », en f évrier 2010. Des semaines de découvertes intitulées
« Inn over pour inventer demain » emmènent plus de 300 managers (directeurs de magasin, chefs de produits, responsable merchandising, directeurs de service...) en voyage aux quatre coins du monde pour regarder ce qui se passe ailleurs et rapporter le meilleur. Philippe Zimmermann, alors directeur général de Leroy Merlin France, en est l’initiateur :
« C’est en pleine crise que j’ai monté ça pour que chacun sorte la tête de l’eau et s’ouvre sur le monde afin d’être “entrepreneur de son futur”. » Certains partent dans la forêt amazonienne pour observer l’abattage d’arbres selon des méthodes respectueuses
de l’environnement. Ils vont aussi à Rio pour comprendre les enjeux de l’habitat dans les favelas. D’autres séjournent en Californie et découvrent que l’ouverture à l’écosystème et l’engagement sociétal peuvent être générateurs de valeur. À chaque retour de voyage, des temps d’échange sont organisés pour faire émerger des axes de transformation de manière collective. Pour faciliter le partage des bonnes idées, Leroy Merlin France se dote même d’un réseau social, Idenov, qui cumule 450 idées et commentaires en février 2012. Quelques mois plus tard, 520 ambassadeurs se retrouvent à La Villette pour le campus « Demain c’est nous ». Philippe Zimmermann en profite pour synthétiser les prochaines orientations : « Faire de Leroy Merlin une entreprise ouverte sur son écosystème, plus collaborative, une entreprise connectée en permanence à l’ensemble des habitants et dont les actions de transformation viendront amplifier son ADN habitants. »
Le fruit de ces réflexions pousse l’entreprise à « inventer la maison de demain » autour de quatre thématiques étroitement liées : la santé, les économies d’énergie, le respect de l’environnement et la facilité de vie (ce dernier point étant incarné par le travail de la fondation Leroy Merlin). Pendant toute la décennie, on assiste au développement de produits et de solutions pour construire avec tous – y compris ceux qui ne sont pas
« CE QU’ON AIME EN TANT QUE COMMERÇANT, C’EST ÊTRE UTILE. ET ON SE SENT UTILE QUAND ON PEUT AGIR ET DÉCIDER AU PLUS PRÈS DU CLIENT. »
Voyages apprenants aux quatre coins du monde dans le cadre de la démarche « Innover pour inventer demain ».
clients pour des raisons de précarité – les nouvelles façons d’habiter pour mieux vivre demain. Cet engagement en faveur de l’habitat positif englobe des enjeux à la fois environnementaux et sociétaux. À cette période, les clients deviennent de plus en plus attentifs aux produits respectueux de l’environnement. En réponse, l’enseigne accompagne les équipes pour faire émerger dans les gammes des produits plus « verts » , à l’impact environnemental plus faible grâce à l’éco-conception ou la réduction des emballages. Pour faire passer l’information aux clients, l’affichage environnemental est testé dès 2011. Environ 1 500 références produits sont ainsi mises en vente avec une note d’impact. De nombreuses animations commerciales comme les « Rendez-vous de la maison plus économe » sont aussi pensés pour répondre aux interrogations des consommateurs. Et l’enseigne est la première spécialisée dans le bricolage et le jardinage à supprimer le Roundup, l’herbicide au glyphosate toxique de
conforme à la réglementation et un budget produits garanti. En parallèle, l’entreprise s’engage avec l’organisation chaque année d’une journée « développement durable » dans t ous les magasins et services internes. Un site internet sur le covoiturage est proposé aux collaborateurs et les magasins sont invités à revoir leur gestion des déchets.
Avec plus de cent magasins, la préoccupation environnementale et énergétique s’impose dans la conception des lieux de vente. C’est pour répondre à cette exigence qu’apparaît en 2009 à Valence le premier magasin à énergie positive (c’est-à-dire produisant plus d’énergie qu’il n’en consomme) en Europe pour l’ensemble de la grande distribution. Il sera suivi en 2011 par celui de Perpignan, premier magasin neuf BBC (bâtiment basse consommation).
L’engagement de Leroy Merlin France pour l’environnement touche également les collaborateurs. À l’automne 2012, 105 salariés construisent une maison témoin aux normes de la réglementation thermique pour les bâtiments neufs, au
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L’habitat et l’habitant face aux dérèglements
Cette deuxième dimension de l’Habitat durable de LEROY MERLIN Source investit les problématiques écologiques dans l’habitat à partir de deux entrées. D’une part, il questionne la place des enjeux environnementaux et énergétiques dans le cycle de vie du cadre bâti et des équipements et matériaux utiil considère les effets réciproques
Illustrations de Bénédicte Muller, extraites de l’ouvrage Apprendre à habiter, Leroy Merlin Source, 2023.
commencement font débat, le constat que la Terre a changé d’état, de régime d’existence géologique, et est sortie des paramètres qui furent les siens au cours de l’Holocène est aujourd’hui largement étayé » (C. Bonneuil, 2022, p.39). De fait, ces évolutions majeures appellent des réponses à la hauteur de nos responsabilités qui ne peuvent plus être différées sans risques vitaux pour les différentes reconnaissance des
En parallèle, des collaborateurs inspirés par les voyages apprenants du début des années 2010 cherchent à dépasser leur seul métier de commerçant pour contribuer à une mission plus large au profit de tous les habitants, convaincus que le bien commun peut être générateur de valeur. Nicolas Cordier, qui devient fin 2013 responsable de l’engagement sociétal chez Leroy Merlin France, fait partie de ces pionniers. Grâce à ses convictions personnelles et ses expériences passées, il mène avec détermination un travail de sensibilisation afin d’emmener l’entreprise sur une voie qui ne s’inscrit pas dans une logique caritative ou une politique RSE, mais dans le cadre plus global d’une stratégie « cœur de métier » avec une approche dite « social business ».
C’est ainsi que, à partir de janvier 2014, des marchandises autrefois confiées à des soldeurs sont données à des associations qui permettent, dès la première année, l’équipement de 40 000 logements sociaux. En 2016, l’enseigne signe aussi ses premières conventions d’achats solidaires liant un magasin et une association de lutte contre le mal-logement. C’est un dispositif emblématique de l’approche social business . L’association achète les produits en rayon et, tous les trimestres, le magasin restitue la marge réalisée sur ces ventes sous la forme
de dons qu’il peut défiscaliser. Grâce à ce système, l’association et le magasin créent une relation durable et les collaborateurs deviennent des acteurs du développement local.
Les actions de transformation et d’innovation vont aussi se traduire dans les modes de travail en interne. L’enseigne met au point un concept fédérateur de symétrie des attentions collaborateurs-clients. Le principe est simple… comme bonjour. « Si on veut qu’un collaborateur dise bonjour aux clients croisés dans un magasin, il faut que son manager lui dise bonjour à chaque fois qu’il le croise, raconte Didier Fichou, ancien directeur de la relation clients. Donc pour avoir des collaborateurs orientés vers le client, il fallait qu’on ait des managers orientés vers les collaborateurs. » De là découle toute une série d’actions regroupées sous la devise « Ré-enchantons l’expérience client », avec une référence – peut-être involontaire – à l’Enchanteur Leroy Merlin des années 1960. L’attention se porte plus que jamais sur le vécu
des collaborateurs dont le ressenti est mesuré régulièrement. La mobilité interne est également soutenue par le programme « Vis ma vie ». Mis en place en 2007, ce dispositif permet à chaque collaborateur, quels que soient ses missions et son niveau hiérarchique, de passer une semaine sur un autre poste. Pour les volontaires, c’est l’occasion de découvrir d’autres métiers, d’autres magasins, et de comprendre le quotidien d’autres salariés du groupe pour coller au maître mot de la fin des années 2000 : la coopération. Cette coopération se fait même parfois en dehors de Leroy Merlin France, avec l’écosystème et les associations qui œuvrent dans le champ social.
Pour permettre aux équipes de travailler mieux et plus vite ensemble, Leroy Merlin met des outils collaboratifs à disposition de ses salariés. L’intranet devient une plateforme communautaire dès 2010. C’est aussi avec cette priorité de coopération que s’ouvre en 2015 le nouveau cycle de Vision. Lors des deux précédents cycles, les collaborateurs étaient uniquement sollicités sur la période des ateliers. Le reste du processus était réservé aux managers. Cette fois, c’est différent. Tous les collaborateurs peuvent se porter volontaires pour devenir des « relais Vision », vi vre tous les temps d’ouverture, d’écoute et d’échange et jouer un rôle d’ambassadeurs auprès
de leurs collègues. Une fois de plus, ce grand exercice d’intelligence collective porte ses fruits : 32 000 idées pour 2025 sont collectées et intégrées dans une base de données accessible à tous. En mars 2017, une nouvelle feuille de route est ainsi fixée pour la décennie à venir autour de trois ambitions stratégiques : l’élan disruptif, l’évidence habitat et l’exception Leroy Merlin –l’humain au cœur. L’enseigne repart avec une nouvelle mission :
« CONSTRUISONS AVEC TOUS
Talonnée par ses concurrents historiques et de nouveaux rivaux numériques, Leroy Merlin France débute l’année 2018 avec la ferme intention de devenir le tiers de confiance de l’habitat pour tous les Français désireux d’améliorer leur cadre de vie.
C’était sans compter l’arrivée d’une crise que personne n’avait prévue.
En 2018, la feuille de route issue du nouveau cycle de Vision amène Leroy Merlin France à ne plus se considérer comme un distributeur spécialisé. L’enseigne veut proposer aux clients l’offre la plus large possible dans le domaine de l’aménagement de leur logement. « Nous devenons non plus un simple distributeur de produits mais un vendeur de solutions complètes pour l’habitat », résume Thomas Bouret, directeur général de Leroy Merlin France. Cette année-là, il réorganise la structure commerciale de Leroy Merlin France en « z ones de conquêtes ». La France est dès lors divisée en dix zones rassemblant des magasins aux typologies cohérentes de clientèle et d’habitants et qui se distinguent des régions administratives. Pour effacer peu à peu les frontières entre les magasins et le web, et fluidifier l’expérience client, les équipes souhaitent mettre en avant l’expertise de Leroy Merlin dans la mise en relation. L’entreprise ouvre ainsi son activité à des entreprises tierces. Objectif : offrir absolument tous les services dont un habitant peut avoir besoin. Un nouveau concept de location de matériel est proposé avec Loxam et, avec Leroy
Merlin Studio (sur le web) ou les corners « Parlons maison » (en magasin), l’enseigne se place comme interlocuteur unique entre des professionnels de l’habitat et des clients. Pour achever sa transition vers un modèle de plateforme, l’enseigne réfléchit aussi, dès 2018, à transformer son site en place de marché, avec des produits d’autres vendeurs. Mis en gestation, le projet va subir un coup d’accélérateur auquel personne n’avait pensé.
Le 15 mars 2020, la France entre en confinement. Tous les magasins doivent baisser leur rideau. Leroy Merlin France a huit semaines de trésorerie devant elle. L’urgence est de rouvrir les points de vente sans jamais prendre de risque pour la sécurité des salariés. Tandis qu’une partie des collaborateurs est placée en chômage partiel, des volontaires reviennent sur site. Ils assurent tous types de postes pour permettre le fonctionnement des magasins en mode dégradé. Des conseillers de vente deviennent préparateurs de commandes pour répondre à la demande en ligne. D’autres délivrent les commandes aux clients sur des parkings réorganisés à grand renfort de palettes. En parallèle, tous ceux dont le poste le permet découvrent le télétravail.
« NOUS SOMMES RÉSOLUMENT À L’AUBE D’UNE NOUVELLE PHASE POUR NOTRE ENTREPRISE : UNE ÈRE DIGITALE OÙ L’ENTREPRISE
Les gestes barrières sont respectés au magasin de Grand Parilly, 2021.
En quelques semaines, les équipes se réorganisent pour faire face à l’urgence en multipliant les précautions pour limiter drastiquement les risques de contagion. Avec la crise sanitaire, la sécurité, qui était déjà une préoccupation, devient une valeur fondamentale. Ainsi, dès fin 2020, les accidents du travail ont diminué de 22 % sur l’ensemble des sites. En 2023, la tendance se confirme : part out les indicateurs sécurité sont en progression, fruit du travail de formation et de sensibilisation mené par les référents sécurité et prévention.
Les confinements successifs jouent un rôle d’accélérateur pour certains projets comme la place de marché. Lancée en mai 2020, elle offre aux internautes un choix immense : plus de 170 000 références dès son lancement contre 40 000 à 60 000 dans les magasins physiques. Après un an de fonctionnement, la marketplace compte 650 marchands actifs avec près de 600 000 références pour quinze millions de visiteurs uniques. C’est un succès ! Après chaque réouverture postconfinement, les magasins physiques tirent aussi très bien leur épingle du jeu. Côté salariés, l’engouement est énorme et toutes les prises d’initiative sont encouragées. Côté clients, le foyer est devenu une valeur refuge pendant la crise sanitaire. Bon nombre de locataires et de propriétaires veulent investir leur temps et leur argent dans la décoration
et l’aménagement de leur cadre de vie devenu pour beaucoup leur nouveau lieu de travail.
Résultat : 2020 est une année record pour le bricolage en France avec une hausse du chiffre d’affaires de 13 %. Grâce à cet élan général, le chiffre d’affaires prévisionnel de Leroy Merlin France pour l’année 2020 est réalisé en six mois au lieu de douze. Les équipes parlent même de « remontada » ! L’enseigne a également beaucoup gagné en notoriété. En 2021, elle arrive ainsi en tête du classement des enseignes préférées des Français, devant Decathlon. Plus que jamais, les collaborateurs comprennent qu’ils travaillent pour une entreprise qui joue un rôle essentiel dans la vie de leurs concitoyens. Et pour que tous ceux qui le souhaitent puissent avoir accès à ses services, Leroy Merlin France cherche à continuer de s’implanter dans le cœur des villes, là où vit une clientèle hyperurbaine qui ne se déplace pas dans les périphéries où sont traditionnellement implantés les magasins Leroy Merlin. Après « l’appartement » ouvert en 2019 dans le XVIIe arrondissement de Paris, puis le lancement de Leroy Merlin Studio en 2021 pour accompagner les propriétaires dans la rénovation de leur habitat, l’enseigne ouvre le Kiosque, une boutique dédiée aux services, en juin 2023, dans le XVe arrondissement.
Les équipes de « l’appartement » et du Kiosque de Paris.
Après deux ans d’euphorie commerciale durant la période Covid, l’année 2022 marque un ralentissement face à un contexte international incertain et des tensions sur les ressources. Prudente, l’enseigne prend des mesures d’économie et prépare l’avenir en ciblant de nouvelles opportunités commerciales : la rénovation énergétique, la clientèle professionnelle et le marché des spécialistes. Pour mettre un pied dans le monde des spécialistes, une expérimentation avait déjà été menée dans le Sud par Jean-Luc Boschard, directeur du magasin de Nice, et Stéphane Jacqmart, chef de secteur, avec l’ouverture en 2019 d’une boutique 100 % dédiée à la cuisine. Leroy Merlin France s’attache alors à déployer le concept avec l’ouverture de points de vente dédiés à la cuisine ou à la salle de bains. En parallèle sont menées de nouvelles ouvertures de corners « Parlons maison » pour fournir toutes les expertises sur un même lieu, mettre en avant les services d’artisans locaux et construire des synergies sur les multiples canaux de vente.
Afin de conquérir ces continents, l’entreprise a besoin d’attirer de nouveaux talents. En 2021, plus de 4 000 collaborateurs ont ainsi été embauchés, portant la société à un nombre de collaborateurs record de près de 30 000 salariés en 2023. À une époque où de plus en plus de candidats cherchent un métier qui ait du sens, l’enseigne affiche ses valeurs, mais surtout des « preuves concrètes » d e ses atouts, comme la démarche Vision, les philosophies et les politiques de partage, la signature d’une charte de la diversité en 2020, les projets de sa fondation ou les partenariats avec des associations.
En 2013, l’enseigne ne comptait que trois entrepôts. Dix ans plus tard, elle a neuf entrepôts régionaux pour livrer les clients et les magasins. Trois entrepôts nationaux s’occupent aussi de l’approvisionnement des magasins. Des entrepôts web gèrent les commandes clients et des plateformes urbaines s’occupent des magasins hyperurbains, limités en superficie. Dans un monde où le numérique est devenu incontournable, Leroy Merlin France a un atout de taille par rapport à ses concurrents sur le web : elle dispose de 144 magasins et travaille avec des artisans, architectes, promoteurs immobiliers et professionnels du bâtiment. Pour conserver cet avantage, les dirigeants décident de fusionner les deux modes de vente pour construire une entreprise « phygitale », qui concilie
l’intérêt du numérique (ou digital). Pour les équipes, l’enjeu est colossal. Les vendeurs doivent par exemple apprendre à gérer un problème sur un produit vendu sur le web que le client retourne en magasin. Le stock et le client n’appartiennent plus au magasin mais à la marque. Le fonctionnement de l’entreprise n’est plus centré sur le magasin mais sur le client. À cette période, l’accent est d’ailleurs mis sur la collecte de données pour connaître un peu plus chaque jour ceux qui achètent chez Leroy Merlin France. Sur ce point, l’enseigne possède une fois de plus un coup d’avance. Les clients sont plus enclins à fournir leurs données personnelles aux marques et enseignes en lesquelles ils ont confiance.
Face aux enjeux environnementaux et sociaux, Leroy Merlin prend ses responsabilités. Cette volonté s’inscrit dans une politique RSE audacieuse lancée par le groupe Adeo avec la démarche « We make home a positive place to live » (« nous faisons de la maison un endroit à vivre positif »). Au niveau de Leroy Merlin France, les mois qui suivent la sortie de la crise Covid sont marqués
par le lancement d’une sensibilisation à grande échelle des collaborateurs grâce à des ateliers pédagogiques sur les sujets liés au climat. Les volontaires peuvent même devenir ambassadeurs auprès de leurs collègues et porter les sujets RSE au niveau local en y consacrant jusqu’à 20 % de leur temps de travail.
Comme avec la récupération des stocks laissés par l’armée américaine après 1918 et 1945, les principes de l’économie circulaire inspirent. Plusieurs initiatives sortent du lot et se modélisent pour l’ensemble des sites. Après un test à Poitiers en 2017, tous les magasins disposent, à partir de 2021, d’un espace « Presque parfaits » où les clients peuvent acheter à prix réduit les produits endommagés en magasin et ceux rendus abîmés ou incomplets. Certains magasins, comme celui de Langueux, près de SaintBrieuc, proposent des ateliers « Make-it » où les gens peuvent venir fabriquer leurs propres objets de décoration à partir de matériaux de récupération. Et Leroy Merlin fait figure de précurseur en proposant en complément de son SAV un service de revente de matériel d’occasion (perceuses, visseuses, perforateurs).
En 2022, un partenariat est noué avec la startup Lizee pour proposer un service de location d’outils et d’achats d’articles de bricolage entièrement en ligne. L’enseigne montre ainsi qu’elle favorise l’usage plutôt que l’achat.
« WE MAKE HOME A POSITIVE PLACE TO LIVE. »
Leroy Merlin affiche par ailleurs son soutien au made in France et consolide sa présence sur les marchés de la réparation et de la location. Pour maîtriser l’impact environnemental de ses produits à tous les moments de la chaîne de fabrication, l’entreprise renforce ses propres marques (Artens, Axton, Delinia, Dexter, Equation, Geolia, Inspire, Lexman, Luxens, Naterial, Sensea, Spaceo, Stander, Sterwins) lancées pour certaines dès les années 2000. Pour compléter ces dispositifs, Leroy Merlin France inaugure enfin Home Index en décembre 2022. Cent cinquante salariés du groupe ont travaillé pendant trois ans en s’appuyant sur les travaux d’experts indépendants, du Programme des Nations unies pour l’environnement et de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes) pour concevoir cet indicateur qui permet d’évaluer l’impact environnemental et social des produits. Leroy Merlin France réalise ainsi un double objectif : entraîner tous ses fournisseurs dans sa démarche vertueuse et permettre aux habitants de faire des choix plus éclairés pour leur maison. En janvier 2023, ces engagements sont résumés dans une nouvelle signature de marque ambitieuse : « On peut tout construire ensemble, même l’avenir. »
L’épuisement des ressources, le changement climatique et la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine mettent au cœur du débat les dépenses énergétiques des habitants. La rénovation énergétique des logements devient un impératif. Chacun en convient. Mais passer à l’acte n’est pas toujours simple. Leroy Merlin prend le sujet avec une conviction : le défi ne peut se relever que collectivement. Fort de sa place de leader spécialiste de l’amélioration de l’habitat, elle agrège ainsi autour d’elle acteurs publics et partenaires privés afin de proposer aux habitants un accompagnement complet et plus simple, du diagnostic du logement à la réalisation des travaux en passant par l’obtention des aides. Le tout orchestré par les nouveaux responsables rénovation énergétique, métier créé par l’enseigne et auquel elle forme une centaine de collaborateurs dès 2023. Là encore, Leroy Merlin s’installe comme tiers de confiance.
En novembre 2023, quelques semaines après sa prise de poste, Agathe Monpays, directrice générale de Leroy Merlin France, lance les premières rencontres de la rénovation énergétique au magasin de Massy, avec la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. « La rénovation énergétique est un projet [...] qui englobe des sujets à la fois sociaux, économiques, sanitaires et écologiques, qui ne peuvent être abordés seuls. C’est le sujet du bien vivre chez soi, dans un confort responsable pour l’ensemble des habitants français. »
Parce qu’elle s’inscrit dans la recherche du « bien vivre chez soi », la rénovation énergétique concerne tous les habitants, y compris les trois millions de personnes en situation d’exclusion énergétique « qu’il n’est pas question de laisser de côté », mart èle Agathe Monpays, la nouvelle directrice générale de Leroy Merlin France, dès sa prise de poste.
L’entreprise entend inscrire son action dans la philosophie qui anime son engagement plus global en faveur d’un habitat digne pour tous. « Si on cherche à résoudre des problématiques sociétales avec le réflexe du carnet de chèques ou du bénévolat, on ne va pas aller loin sur l’impact sociétal qu’on pourra générer, et on ne changera pas fondamentalement le métier de l’entreprise, résume Nicolas Cordier. Il faut inscrire l’impact au cœur de la logique compétitive de l’entreprise. »
Depuis 2019, Leroy Merlin France a rejoint le collectif « St op Exclusion énergétique » qui travaille à des solutions pour transformer la vie des plus précaires sur le plan de l’habitat et de l’énergie. Leroy Merlin apporte sa contribution sur plusieurs registres.
Un registre technique, bien sûr, avec l’appui des responsables rénovation énergétique dans le cadre de chantiers de rénovation.
Un registre pédagogique également, avec la « F resque de la précarité énergétique ». C et atelier participatif d’une heure et demie prenant la forme d’un jeu de cartes a été créé par un groupe de collaborateurs Leroy Merlin et développé avec les membres du collectif Stop Exclusion énergétique et un comité scientifique. Portée par l’association pour amplifier sa diffusion depuis septembre 2023, la Fresque de la précarité a déjà permis de sensibiliser plus de 1 000 personnes.
Leroy Merlin n’en omet pas pour autant l’appui financier. La recherche de la plus grande utilité amène l’entreprise à penser des dispositifs adaptés aux besoins des acteurs de terrain, à l’instar du million d’euros remis au collectif chaque année et destiné à financer le reste à charge de 200 chantiers de rénovation pour les ménages les plus précaires, ou du soutien imaginé via les conventions d’achats solidaires.
« FAIRE SIMPLE, ENSEMBLE, AU SERVICE DE TOUS : C’EST ÇA LEROY MERLIN. »
contributions leroymerlinsource
Contribution de Leroy Merlin Source, illustration de Bénédicte Muller.
Créées en 2016, les conventions d’achats solidaires réinventent le partenariat économique entre associations et magasins. Le principe est simple : l’association achète les produits et matériaux dont elle a besoin et, chaque trimestre, le magasin lui reverse sous forme de don l’équivalent de la marge réalisée sur ces achats. Plus de 220 conventions d’achats solidaires ont été signées à fin 2023 par plus d’une centaine de magasins. Outre l’intérêt financier pour chacun, elles sont devenues le socle d’une relation durable entre les deux parties. Habitat et Humanisme, Compagnons Bâtisseurs, Lazare et beaucoup d’autres associations qui œuvrent pour l’habitat des personnes en difficulté sont non seulement des partenaires de Leroy Merlin mais trouvent surtout dans les équipes des magasins des interlocuteurs de proximité avec qui mener des actions de terrain.
Aux campagnes d’arrondi solidaire en caisse s’ajoutent ainsi la participation à des opérations de collecte de matériel auprès des habitants, telles que « l’heure
solidaire » d’Habita t et Humanisme, ou encore l’organisation de chantiers solidaires. Chaque collaborateur peut participer à l’aménagement ou la rénovation d’une résidence, d’un centre d’accueil ou d’un local associatif, en utilisant son positive impact day (« journée d’impact positif »), une journée offerte par l’entreprise chaque année pour contribuer à un projet solidaire. Depuis sa création en 2020, près de 3 000 positive impact days ont été mis à profit par les collaborateurs.
TOUT CONSTRUIRE ENSEMBLE, MÊME L’AVENIR, PASSERA PAR L’ENGAGEMENT FORT DE L’ENTREPRISE
EN FAVEUR DE L’HABITAT POSITIF ET DE LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE, POUR TOUS LES HABITANTS.
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Entre 1924 et 1960
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Début des années 1960
« L’Enchanteur Leroy Merlin »
1967 et 1968. Catalogues
L’Enchanteur Leroy-Merlin (debout sur une clé)
« La clef de vos problèmes de logement »
Début des années 1970
L’Enchanteur Leroy-Merlin (sans clef)
1975. Catalogue L’Enchanteur (stylisé et dans le O)
« La maison... Tout pour la maison »
1975-1981. Le « lutin bricoleur » : petit bricoleur coiffé d’un chapeau en forme de toit
« La maison et tout pour la maison » ;
« Tout pour la maison » ; « Tout pour la maison du jardin au grenier » ;
« Tout pour votre maison »
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1983. Changement d’identité visuelle
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« Le magasin du temps libre »
1988. Le triangle vert
« Tout pour réussir »
1999. Le triangle vert
« Et vos envies prennent vie »
2017. Le triangle vert
« Et vos projets vont plus loin »
2023. Le triangle vert
« On peut tout construire ensemble, même l’avenir »
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S’il fallait choisir un mot pour résumer l’histoire de Leroy Merlin, du réemploi des années 1920 à l’économie circulaire des années 2020, ce serait certainement le mot « famil le ». Les familles Leroy et Merlin, d’abord. Elles ont mis leurs âmes d’entrepreneurs au service des populations du bassin minier, meurtries par deux guerres destructrices. La famille Mulliez, ensuite. Avec de nouvelles gammes de produits et une refonte totale du système de management, elle a permis à l’entreprise d’entrer dans la modernité. Les familles du Pas-de-Calais, puis progressivement de toute la France et de l’étranger. Elles sont nombreuses à avoir fait confiance à Leroy Merlin pour les accompagner dans leurs projets de vie et l’aménagement de leur logement. Enfin, les familles de collaborateurs qui se sont succédé pour assurer la pérennité de l’enseigne et la transmission de la culture de
! Programmation libre En 2022, avec vous, Leroy Merlin s’engage à collecter et à reverser 1 million d’euros à l’association Stop Exclusion Énergétique.
Fort de ces liens et d’un siècle de bouleversements sociaux, économiques et environnementaux, Leroy Merlin revendique aujourd’hui son statut d’entreprise engagée. Dans un pays où quelques millions de personnes vivent dans des logements précaires ou insalubres, l’enseigne se sait plus utile
que jamais. À l’heure où le changement climatique est devenu une priorité, elle veut aussi prouver qu’il n’est pas nécessaire de produire et consommer toujours plus. Certains matériaux et objets ne demandent qu’à être réutilisés et Leroy Merlin est un partenaire de choix pour aider les habitants à rénover, entretenir et embellir leur habitat de manière durable. L’entreprise est aussi engagée pour celles et ceux dont elle facilite la vie, qu’elle fait vivre et qui la font grandir, et auxquels elle montre que tout est possible. La nomination d’Agathe Monpays à la tête de Leroy Merlin France courant 2023 en est le parfait exemple. En faisant le choix d’une jeune femme de vingt-huit ans pour accompagner l’entreprise dans sa mue digitale, Leroy Merlin confirme sa singularité. Pour que l’enseigne poursuive son développement de modèles circulaires, garde sa place de leader de l’habitat positif et lutte chaque jour davantage contre la précarité énergétique, la nouvelle directrice générale s’appuiera sur les orientations stratégiques fixées par les équipes qui l’ont précédée. Dans une famille, on ne fait jamais table rase du passé. On s’inspire des pages écrites par les générations précédentes pour rédiger, à sa façon, la suite de l’histoire.
agence-bradford.com pour Leroy Merlin France SA. Capital
euros. Siège social : Rue Chanzy 59260 Lezennes. RCS Lille B 384 560 942. Couverture BETC Shopper. Ne pas jeter sur la voie publique. O res valables du 19/10/2022 au 07/11/2022. Imprimé en France. Lenglet imprimeurs, ZI Actipôle de l’A2Avenue des 2 Vallées. 59554 Raillencourt Ste-Olle.
LE PRINTEMPS DE LA MAISON
Donnez une nouvelle énergie à vos projets
© Fonds d’archives Leroy Merlin : p 7, 9, 11, 15 (haut), 16 (gauche), 21, 24, 25, 30, 31, 36, 37, 41 (bas), 47 (carte), 50, 53, 55, 57, 62, 63 (gauche, droite et bas), 65, 67, 68 (haut), 69, 70, 71, 73 (milieu et bas), 76, 79 (bas), 82, 83, 84, 85, 86, 87, 89, 91, 95, 97, 99, 100, 101, 103, 106, 107, 109, 111, 113, 116, 119, 121, 124, 127, 134, 137, 152, 154, 156, 158, 168, 169, 170, 171, 172, 173, 174, 176 ;
© Archives familiales Alexandre Leroy : p 20, 22, 23, 26, 27, 33, 39 (portraits), 45, 47 (photos), 51, 52, 58, 59, 63 (milieu), 66, 68 (bas), 73 (haut), 77, 176 ;
© Antoine Merlet pour Leroy Merlin : 1re de couverture (femme devant outils) ;
© Valentin Brivois : 1re de couverture (hommes de profil en haut), 4e de couverture (deux hommes en noir en bas à gauche) ;
© Rémy Deluze pour Leroy Merlin : 4e de couverture (diapo en haut au milieu), 148 (1er groupe), 149 (dernier groupe), 157 (Batignolles et Kiosque), 159 ;
© Nicolas Depriester pour le studio LMFR : p 3, 161 (haut gauche), 167 ;
© Réalisation studio LMFR avec DALL·E 3 : p 4, 18, 34, 48, 74, 92, 114, 132, 150 ;
© Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-71783. Le Petit Inventeur, Albin Michel, 1925 : p 28 ;
© Alamy : p. 8, 39 (carte) ;
© Archives Terre Blanche / Roger-Viollet : p 12 (gauche) ;
© Archives Farms Inc / Alamy : p 12 (milieu) ;
© Musée Carnavalet / Roger-Viollet : p 13 (droite) ;
© Gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France : p 15 (trois annonces) ;
© Association Nœux Mémoire : p. 41 (haut) ;
© Créations artistiques Heurtier, musée de Bretagne : p 42 (gauche et droite) ;
© Roger-Viollet : p. 43 ;
© Jean-Marie Périer / Photo12 : p. 56 ;
© Unsplash : p. 94 ;
© Internet Archive Wayback Machine : p. 104 ;
© Rob Crandall / Alamy : p. 105 ;
© Phillipe Anessaut / studiophilfactory pour Leroy Merlin : p. 117, 118, 147 ;
© Leroy Merlin Source, illustrations Bénédicte Muller : p. 122, 123, 145, 165 ;
© Fondation Leroy Merlin : p. 128, 129 ;
© Adeo : p. 130, 131 ;
© Jean-Philippe Rousseille pour Leroy Merlin : p. 135 ;
© BETC : p. 136 ;
© Charles Delcourt pour Leroy Merlin : p. 139 ;
© Xavier Renoux pour Leroy Merlin : p. 142 ;
© Guillaume Cesbron pour le studio LMFR : p. 148 (2e, 3e et 4e groupes), 149 (1er, 2e et 3e groupes), 155, 161 (haut droite, bas gauche et bas droite)
© Mehdi Prevost pour le studio LMFR : p. 163 ;
© Pierre Rousseau pour Leroy Merlin : p. 165 (fresques) ;
D.R. : p. 29, 79 (haut), 143, 157 (hors Batignolles et Kiosque), 164.
Nous remercions toutes les personnes qui, par leurs témoignages, ont contribué à retracer l’histoire de Leroy Merlin France :
Jean-Marc Bequet, Bertrand Boussekey, Christophe Brassart, Corentin Brouwers, Christophe Camelot, Nicole Carton, Thierry Cavrois, Florence Cierlak, Nicolas Cordier, Dany Cretel, Claude-Hervé Cuvelier, David Dagneaux, Régis Degelcke, Maryse Deleau, Damien Deleplanque, Pascal Delfosse, Angélique Demailly, Julie Deman, Céline Depestel, Pascal Dessenne, Yves Dubreucq, Nathalie Dufour, Marc Dumetz, Hervé Durteste, Thomas Fauquembergue, Didier Fichou, Didier Fouquart, Laurent Fouquer, Amélie Fray, Romann Fermaux, Stéphane Gohon, Fabrice Gros, Frédéric Groux, Claire Guelton, Guy Guelton, Jean-Pierre Grymonprez dit « Junior », Hervé Hanquier, Yvon Jolivet, Hervé Journel, Fabienne Kaj Petelyon, Vianney Lepoutre, Dimitri Lecocq, Marie-Claire Lefebure, Damien Lefebvre, Nathalie Lemaire, Thierry Leroy, Claire Letertre, Corinne Loyez, Brigitte Masurel, Olivier Motte, Raphaël Moze, Patrice Pageaud, Marie-Christine Panitskas, Daniel Paquot, Corinne Petre, Armelle Peyron, Samuel Prevost, Emily-Marie Proy, Bruno Quargnul, Geneviève Queste, Serge Rendu, Jean-Marc Richeval, Jean-Michel Rousseau, Laurianne Queva, Stéphanie Sagette, Michel Salaun, Bruno Urbaniak, Philippe Wartelle, Christophe Willemetz, Onno Ypma, Jean-Marc Zephir.
Et plus particulièrement : Lise-Rose Leroy Minne, Alexandre Leroy, ainsi que toute l’équipe du centenaire de Leroy Merlin France : son pilote, Florence Rousseau, et la team cœur, Marianne Barthelemy, Charline Delfosse, Marine Denekre, Matthieu Deroy et Marc Renaud.
Aussi, un grand merci à toute l’équipe communication interne et institutionnelle et au Studio : Hélène Bernard, Aïcha Braconnier, Laurence Callant, Guillaume Cesbron, Nicolas Depriester, Gabrielle Haire, Christian Mairesse, Fabrice Matzke et Mehdi Prevost.
Pour restituer 100 ans d’histoire, Christine Carbonnel Saillard et Clarisse Robert (Folioscope) se sont appuyées sur la documentation interne de Leroy Merlin France (journaux internes, rapports annuels, archives photos et vidéos, etc.) et notamment sur le livre historique paru en 1996 rédigé par Loïc Dupont, ainsi que sur des sources externes (archives familiales, presse ancienne, entretiens).
En 100 ans, on en a fait du chemin ensemble...