BIE SANTE ANIMALE OI - Deuxième semestre 2016

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BIE

Bulletin d’Informations Épidémiologiques Santé animale - Océan Indien

SOMMAIRE ÉDITO ...................................................................................................................................p. 1 SURVEILLANCE RÉGIONALE ................................................................................p. 2 à 5 Archipel des Comores ...............................................................................................p. 2 à 3 Madagascar ..................................................................................................................p. 3 à 4 Maurice ...............................................................................................................................p. 5 Réunion ...............................................................................................................................p. 5 SURVEILLANCE INTERNATIONALE .........................................................................p. 6 Afrique .................................................................................................................................p. 6 Asie .......................................................................................................................................p. 6 Océanie ...............................................................................................................................p. 6 ZOOM SUR... LA FIÈVRE APHTEUSE ..................................................................p. 6 à 8 Généralités ..................................................................................................................p. 6 à 7 La fièvre aphteuse à Maurice et Rodrigues en 2016 .........................................p. 7 à 8

BIE N°18 / JUILLET À DÉCEMBRE 2016

ÉDITO

C

hers amis, chers lecteurs, dans ce deuxième Bulletin d’Informations Épidémiologiques concernant l’année 2016, nous vous invitons à consulter les données régionales et internationales concernant les maladies animales qui constituent une menace pour nos îles, ainsi qu’un dossier sur la fièvre aphteuse. Au cours de ce deuxième semestre, un défi particulier a impliqué les nombreux acteurs de la santé animale de la zone. Vous le savez, une épidémie de fièvre aphteuse a durement touché les îles sœurs de Maurice et de Rodrigues. Dans cet édito, nous avons voulu revenir sur ce que cette crise a représenté pour nous tous. Et un mot clé nous vient directement à l’esprit. Solidarité. Solidarité, dès le début de la crise, lors de l’identification et du diagnostic de la maladie avec nos collègues de l’Anses. Solidarité dans les actions de lutte, lors du choix et de l’accès aux doses vaccinales, avec le concours de l’Union Européenne. Solidarité aussi, dans la réalisation de la campagne de vaccination elle-même. On se souvient des vétérinaires volontaires de Madagascar partis appuyer leurs collègues mauriciens et rodriguais. Solidarité dans les soutiens logistiques, scientifiques et techniques de la Commission de l’Océan Indien, du réseau SEGA One Health et du CIRAD. Solidarité enfin, entre les services vétérinaires de nos îles voisines. Dès le début de la crise prit place une conférence, organisée par Maurice et Rodrigues et permettant aux autres confrères de prendre les mesures de prévention qui s’imposaient. Notre réseau n’est pas uniquement un réseau de surveillance ou un réseau d’actions de recherche. C’est avant tout un réseau de personnes, de femmes et d’hommes aux nombreuses compétences, qui se connaissent, se font confiance et s’entraident. Dans cette crise, désormais sous contrôle, notre réseau a fait ses preuves. Il a montré toute l’utilité de travailler ensemble et de mutualiser nos efforts. Désormais, il importe de rester vigilants, réactifs, organisés. C’est là le cœur de nos métiers. Cette crise nous a montré à quel point la nécessité de réagir vite fait loi, et à quel point nos méthodes et nos ententes sont perfectibles. Il s’agit maintenant de continuer nos efforts communs, de nous améliorer, encore, de collaborer et d’échanger, toujours plus. L’initiative « une seule Santé » de l’océan Indien que nous avons mis en place n’en est qu’à ses débuts. Construisons lui l’avenir qu’elle mérite. Nous vous souhaitons une bonne lecture à tous,

Deodass, Harena et Eric

Directeur de la publication : Eric Cardinale Rédacteurs en chef : Harena Rasamoelina, Cécile Squarzoni Responsable éditorial : Renaud Levantidis Comité de rédaction : Harena Rasamoelina, Cécile Squarzoni, Renaud Levantidis Contacts & abonnement : secretariat.ohoi@cirad.fr Soutiens :

Retrouvez ce numéro ainsi que les archives du Bulletin d’Informations Épidémiologiques - Santé animale océan Indien sur http://www.onehealth-oi.org

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BULLETIN D’INFORMATIONS ÉPIDÉMIOLOGIQUES - SANTÉ ANIMALE - OCÉAN INDIEN

DEUXIÈME SEMESTRE 2016

SURVEILLANCE RÉGIONALE ARCHIPEL DES COMORES • Les différentes notifications enregistrées à Ngazidja pour l’espèce bovine attestent du fort impact de la theilériose en termes de morbidité et de mortalité (Figure 1).

Figure 1 - Nombre de malades et de morts associés aux différentes maladies bovines notifiées à Ngazidja durant le deuxième semestre 2016 (n = 83 malades et 44 morts) (Source : RENESMAC) 60

• Les chiffres de mortalité absolue pour cette maladie montrent une saisonnalité assez nette avec une recrudescence de cas sur le dernier trimestre de l’année (Figure 2) ;

Effectifs animaux

50 40

• Concernant l’espèce caprine un total de 27 notifications a été enregistré. La gale est nettement prédominante dans les maladies ou syndromes notifiés avec plus de 30 animaux malades signalés (11 notifications au total), comparativement à l’ecthyma contagieux (2 notifications sur l’ensemble du semestre) (Figure 3) ;

30 20 10 0 Théilériose

Babésiose

Diarrhée

Cowdriose

DermatophiloseFièvre de 3 jours Autre (atteinte Charbon non prioritaire) symptomatique

Maladies Malades

• Sur la filière volaille, la maladie de Newcastle est la plus présente avec un taux de létalité moyen avoisinant 55% pour les cas notifiés ;

Morts

• Pour Anjouan, les quelques cas notifiés portent sur de la gale affectant les bovins et les caprins, ainsi que des parasitoses digestives ;

Figure 2 - Évolution hebdomadaire du nombre de malades et de morts associés à la théilériose bovine à Nagazidja durant le deuxième semestre 2016 (n = 52 malades et 34 morts) (Source : RENESMAC) 20 18

Effectifs animaux

16 14 12 10 8 6 4 2 0 26

27

28

29

30

31

32

Juillet

33

34

35

Août

36

37

38

39

40

41

Septembre

42

43

Octobre

44

45

46

47

48

49

Novembre

50

51

52

Décembre

Semaines par mois Malades

Morts

Figure 3 - Nombre de malades associés aux différentes maladies notifiées sur les caprins à Ngazidja durant le deuxième semestre 2016 (n = 52 malades) (Source : RENESMAC) 35 30

20 15 10 5 0 Gale

Fièvre de la Vallée du Rift

Ecthyma contagieux

Diarrhée

Autre (atteinte Conjonctivite Peste des petits non prioritaire) ruminants

Maladies

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Nodules cutanés

Crédit photo : ONE HEALTH - OI

Effectifs animaux

25


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DEUXIÈME SEMESTRE 2016

• À travers le réseau SESAM de Mayotte, 75 notifications au total ont été enregistrées durant ce semestre, dont 65 portant sur les bovins (Figure 4) ; • La cause majeure relevée sur cette espèce est l’avortement (27 notifications), en second lieu, des notifications diverses ayant entrainé la mort (parasitisme, fièvre, attaques de chien...), puis viennent le charbon symptomatique et les bavites ; • 4 avortements ont également été déclarés sur les caprins ; • 5 notifications sur les volailles ont été rapportées (coccidiose, variole et attaques de chien).

Figure 4 - Nombre de malades et de morts associés aux différentes maladies bovines notifiées à Mayotte durant le deuxième semestre 2016 (n = 67 malades et 26 morts) (Source : SESAM) 30

25

15

10

Crédit photo : ONE HEALTH - OI

Effectifs animaux

20

5

0 Avortement

Autre (parasitisme, fièvre...)

Charbon symptomatique

Bavite

Dermatophilose

Démodécie

Anaplasmose ou babésiose

Maladies Malades

Morts

MADAGASCAR • L’évolution hebdomadaire des notifications de maladies transmises par les 22 sites sentinelles montre une nette augmentation par rapport au semestre dernier (508 notifications au total pour 296 pour le premier semestre 2016) (Figure 5) ; • Le nombre maximum de notifications par semaine est de 28. A noter qu’il n’y a qu’environ 5% des notifications qui comportent des données abérrantes ou incomplètes, ce qui démontre un bon fonctionnement du dispositif d’alerte, basé entre autre sur l’implication et la formation des vétérinaires de terrain ; • Les maladies notifiées sont régulièrement rencontrées sur le terrain malgache. Les ripostes à ces alertes sont réalisées directement par les services vétérinaires (publics et privés) dans le cadre de la gestion de la santé animale au niveau national ;

Figure 5 - Évolution hebdomadaire du nombre de notifications transmises par le réseau MADSUR de Madagascar durant le deuxième semestre 2016 (n = 508 notifications) (Source : MADSUR) 30

28 25

25

24

22

22

20

19 19 19 16

15

17 17

27 27

21 19

18

17

17 17

13

13

14 11 11

10

5

1

0 26

27

28

29

30

31

32

33

34

35

36

37

38

39

40

41

42

43

44

45

46

47

48

49

50

51

Semaines

Figure 6 - Nombre de malades et de morts associés aux différentes maladies bovines notifées à Madagascar durant le deuxième semestre 2016 (n = 878 malades et 166 morts) (Source : MADSUR) 250

Effectifs animaux

200

52

• La dermatophilose et la dermatose nodulaire (et les cas notifiés de maladies non sous surveillance / «Autres maladies») sont les trois causes majeures de notification sur les bovins (près de 200 animaux malades pour chacune d’entre elles). En second lieu, les maladies causées par les tiques (babésiose, cowdriose et anaplasmose) et le charbon symptomatique sont rapportées avec des taux de létalité plus élevés. Concernant les cas notifiés sans maladie précisée, il s’agit essentiellement de syndromes digestifs et cutanés (Figure 6).

150

100

50

0

Dermatophilose Autre (atteinte non prioritaire)

Dermatose nodulaire

Babésiose

Charbon symptomatique

Cowdriose

Maladies Malades

Morts

Anaplasmose

Rage

Salmonellose

Tuberculose

FVR

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Nombre de notifications

28 26

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Figure 7 - Nombre de malades et de morts associés aux différentes maladies notifiées sur les petits ruminants à Madagascar durant le deuxième semestre 2016 (n = 36 malades et 3 morts) (Source : MADSUR) 18

16

• Les petits ruminants (11 notifications au total sur ce semestre) sont principalement touchés par de l’ecthyma contagieux. D’autres syndromes cutanés ainsi que des syndromes locomoteurs sont également rapportés (pour les notifications de maladies non prioritaires) (Figure 7) ;

14

• Pour l’espèce porcine, 79 notifications ont été enregistrées (contre 43 au premier semestre 2016) avec une très forte prédominance de la peste porcine présentant une létalité moyenne très élevée de 76% (Figure 8) ;

Effectifs animaux

12

10

8

• Concernant la rage, elle reste présente à Madagascar avec 32 notifications sur le semestre, touchant majoritairement les espèces canine (60%) et bovine (31%) (Figure 9).

6

4

2

0 Echtyma contagieux

Autre (atteinte non prioritaire)

Cowdriose

Babésiose

Maladies Malades

Morts

Figure 8 - Nombre de malades et de morts associés aux différentes maladies porcines notifiées à Madagascar durant le deuxième semestre 2016 (n = 716 malades et 468 morts) (Source : MADSUR) 600

Effectifs animaux

500

400

300

200

100

0 Pestes porcines

Autre (atteinte non prioritaire)

Maladie de Teschen

Salmonellose

rage

Maladies Malades

Morts

Figure 9 - Répartition par espèce des malades atteints de rage animale selon les notifications enregistrées à Madagascar durant le deuxième semestre 2016 (n = 32 malades) (Source : MADSUR) 7%

2%

31%

Canins

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Bovins

Félins

Porcins

Crédit photo : ONE HEALTH - OI

60%


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MAURICE Figure 10 - Nombre de malades par espèce associés aux différentes maladies et syndromes des ruminants notifiés à Maurice durant le deuxième semestre 2016 (n = 3602 malades) (Source : DSV Maurice) 800

700

600

Effectifs animaux

500

400

300

200

100

0 Parasitisme

Syndrome digestif

Anorexie Fièvre Léthargie

Ectoparasite

Malnutrition Maigreur

Gale

Blessure et abcès

Affection respiratoire

Syndrome Autre syndrome Affection des reproducteur (non prioritaire) membres

Affection mammaire

Décubitus

Intoxication

Affection cutanée

Avortement

Maladies / Syndromes Bovins

Caprins

Ovins

• Il a été enregistré 1076 notifications de maladies et/ou syndromes sur les ruminants en général (bovins, caprins, ovins) qui ont été classés en 16 catégories. 40% de ces notifications concernent les bovins (Figure 10) ; • Le parasitisme est la cause de notification majeure dans les trois espèces précédemment citées, largement prédominant chez les caprins ; • Les syndromes digestifs (diarrhée, météorisation...) représentent la deuxème cause de notification, puis les syndromes fébriles (anorexie, léthargie...) ; • Les ectoparasites et la gale restent assez présents chez les caprins ;

Figure 11 - Nombre de malades associés aux différentes maladies et syndromes porcins notifiés à Maurice durant le deuxième semestre 2016 (n = 680 malades) 350

300

Effectifs animaux

250

200

150

100

• Sur les porcins, 75 notifications ont été enregistrées. Le parasitisme est également l’affection la plus rapportée (plus de 300 malades sur 680) (Figure 11).

50

0 Parasitisme

Autre syndrome (non prioritaire)

Malnutrition Maigreur

Syndrome digestif

Anorexie -FièvreLéthargie

Affection respiratoire

Blessure et abcès

Syndrome reproducteur

Avortement

Maladies / Syndromes

RÉUNION • On relève la présence de Salmonella Typhimurium en filière chair avec mise en évidence au couvoir (effectif de 12 960) en septembre, entrainant la mise en place des mesures sanitaires obligatoires (APDI, abattage sanitaire) ;

• 4 cas de botulisme sur des volailles ont été déclarés sur le semestre. (Source : DAAF Réunion).

Crédit photo : ONE HEALTH - OI

• Un cas de brucellose sur un chien et une suspicion de leucose bovine enzootique ont également été notifiés en octobre ;

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VEILLE INTERNATIONALE

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Source : OIE - WAHIS

AFRIQUE • L’influenza aviaire hautement pathogène et la fièvre aphteuse sont les deux maladies qui ont été le plus notifiées. Pour la première, les foyers se situent au Maghreb (Algérie, Egypte, Tunisie), et en Afrique de l’ouest et du centre (Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Ghana, Nigeria, Togo). Pour la fièvre aphteuse, les foyers ont été déclarés en Afrique de l’ouest (Guinée-Bissau), en Afrique Australe (Angola, Mozambique, Ouganda, Zambie, Zimbabwe) et à l’Île Maurice ; • Ont aussi été notifiés des foyers de : →→ Cowdriose au Kenya ; →→ Dermatose nodulaire contagieuse au Burundi et en Namibie ; →→ Fièvre catarrhale ovine au Botswana, en Équateur et en Tunisie ; →→ Fièvre de la vallée du Rift au Niger et en Ouganda ; →→ Fièvre porcine africaine au Kenya ; →→ Influenza aviaire faiblement pathogène en Afrique du Sud ; →→ Maladie de Newcastle en Namibie ; →→ Charbon bactéridien en Tanzanie et en Zambie ; →→ Péripneumonie contagieuse bovine en Mauritanie ; →→ Peste des petits ruminants en Tunisie ; →→ Peste équine en Afrique du Sud, au Mozambique, et au Swaziland ; →→ Peste porcine africaine en Afrique du Sud et au Burundi ; →→ Syndrome ulcéreux épizootique en Afrique du Sud et au Zimbabwe ; →→ Variole du singe au Cameroun.

Carte des foyers de fièvre aphteuse dans le monde, toutes espèces confondues, du 1er juillet au 31 décembre 2016 (Source : OIE)

ASIE • L’influenza aviaire hautement pathogène a été la maladie la plus notifiée (18 notifications immédiates), avec des foyers déclarés au Bhoutan, à Hong Kong, en Inde, en Iran, en Iraq, en Israël, au Japon, au Laos, en Corée du Sud, en Chine, à Taïwan et au Vietnam ; • Ont aussi été notifiés des foyers de : →→ Fièvre aphteuse en Arabie Saoudite, en Arménie, en Mongolie →→ et en Chine ; →→ Clavelée et variole caprine en Israël et en Mongolie ; →→ Dermatose nodulaire contagieuse en Arabie Saoudite, →→ en Arménie, en Géorgie et au Kazakhstan ; →→ Fièvre porcine classique en Corée du Sud ; →→ Influenza aviaire faiblement pathogène à Hong Kong ; →→ Maladie de Newcastle en Israël ; →→ Charbon bactéridien au Kazakhstan ; →→ Peste des petits ruminants en Géorgie, aux Maldives et en Mongolie ; →→ Peste porcine classique en Corée du Sud ; →→ Rage au Kazakhstan ; →→ Syndrome dysgénésique et respiratoire du porc au Cambodge.

Carte des foyers d’influenza aviaire hautement pathogène dans le monde, toutes espèces confondues, du 1er juillet au 31 décembre 2016 (Source : OIE)

OCÉANIE • L’Australie a été touchée par deux épidémies : la maladie des points blancs des poissons et la varroase des abeilles ;

ZOOM SUR... LA FIÈVRE APHTEUSE Généralités La fièvre aphteuse est une maladie virale hautement contagieuse. Les animaux bi-ongulés domestiques mais aussi sauvages en sont la cible. Affectés par de la fièvre, des aphtes douloureux et une production excessive de salive, ils sont surtout victimes d’une perte de poids durable et d’une baisse de la production de lait, ce qui justifie le fort impact économique de la maladie. ESPÈCES AFFECTÉES. La fièvre aphteuse est une maladie virale grave du bétail, hautement contagieuse, qui entraîne des répercussions économiques significatives. La maladie touche les bovins et les porcs, ainsi que les ovins, les caprins et d’autres artiodactyles. Toutes les espèces de cervidés et d’antilopes, ainsi que les éléphants et les girafes sont sensibles à la fièvre aphteuse. L’homme

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n’y est que très rarement sensible. VIRUS. La fièvre aphteuse est causée par les dénommés FMDV (Foot-and-Mouth Disease Virus), virus du genre aphthovirus de la famille des picornaviridae. Les membres de cette famille sont des virus icosaèdraux non enveloppés de petite taille (25-30 nm), qui contiennent de l’ARN à simple brin

de polarité positive (directement codant). Quand un virus de cette sorte entre en contact avec une cellule hôte, il s’attache à un récepteur et déclenche un reploiement de la membrane cellulaire. Une fois que le virus se trouve à l’intérieur de la cellule hôte, son manteau protéinique se dissout. L’ARN viral libéré est alors initialement traduit en polyprotéines. Commence alors la réplication du génome viral par


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une ARN polymérase. Les composants du manteau protéinique, synthétisés en grande quantité, s’y associent pour y assembler de nouveaux virus. Après cet assemblage, la cellule hôte éclate et les nouveaux virus sont libérés. Il y a sept sérotypes différents de la fièvre aphteuse - O, A, C, SAT-1, SAT-2, SAT-3 et Asie-1. Ces sérotypes se présentent différemment suivant les régions, le sérotype O étant le plus commun.

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fois dans sa vie. Ce caractère très contagieux justifie de strictes mesures de contrôle comprenant, outre la désinfection, la quarantaine, la destruction des animaux atteints et des interdictions d’exportation

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MODES DE CONTAMINATION. Le virus de la fièvre aphteuse est retrouvé dans toutes les excrétions et sécrétions des animaux contaminés. Il peut être présent dans le lait et dans la semence jusqu’à 4 jours avant l’apparition des signes cliniques. Les animaux qui ont guéri de l’infection peuvent être porteurs du virus. Les animaux infectés expirent notamment de grandes quantités de virus sous forme d’aérosol qui peuvent infecter d’autres animaux par les voies respiratoires ou par voie orale. Portage : 15 à 50% d’animaux porteurs durant 6 mois à 3 ans.

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La gravité de la fièvre aphteuse est due à la facilité de propagation du virus par les modes suivants :

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→→ Introduction de la maladie dans un troupeau par de nouveaux animaux transportant le virus (dans la salive, le lait, la semence, etc.) ; →→ Utilisation d’enclos, de bâtiments ou de véhicules contaminés pour héberger et transporter des animaux sensibles ; →→ Présence de matériels contaminés tels que foin, aliments, eau, lait ou produits biologiques ; →→ Port de vêtements ou de chaussures contaminés ou utilisation d’équipements contaminés ; →→ Distribution à des animaux sensibles de viande, de produits d’origine animale, d’aliments crus ou mal cuits, contaminés par le virus ; →→ Dissémination virale par des aérosols transportés par l’air à partir d’une exploitation contaminée. La maladie procure une immunité solide et durable contre la souche responsable de l’infection, mais du fait de l’existence de souches de virus très différentes les unes des autres, un animal – qui a échappé à l’abattoir – peut contracter la maladie plusieurs

pour la viande et les autres produits animaux vers des pays non touchés par la maladie. SIGNES CLINIQUES. La période d’incubation du virus va de 1 à 14 jours (surtout 2 à 5 jours). Les symptômes durent de 8 à 15 jours. Bovins : fièvre, abattement, chute de production ; sialorrhée filante, boiterie, piétinement ; vésicules puis ulcères dans la cavité buccale, dans l’espace interdigital et sur le bourrelet coronaire des onglons, sur la mamelle et les trayons ; aspect terne du pelage ; myocardite chez les jeunes. Porcins : fièvre, prostration ; animaux couchés, en souffrance lors des mouvements ; vésicules puis ulcères (groin, chute d’onglons). Ovins et caprins : lésions discrètes et fugaces ; rares et/ou discrètes vésicules/ulcères ; agalactie ; mortinatalité et avortements. PRÉVENTION ET TRAITEMENT. La base de la prévention consiste en l’application des règles de biosécurité et de contrôle des importations définies par les services vétérinaires des pays. Une des difficultés pour vacciner contre la fièvre aphteuse réside dans la variation énorme entre sérotypes et même à l’intérieur d’un même sérotype. Il n’existe aucune protection croisée entre sérotypes et, de plus, dans un sérotype donné deux souches peuvent avoir des séquences de nucléotides qui différent de 30 %. Cela signifie que les vaccins contre la fièvre aphteuse doivent être étroitement spécifiques à la souche impliquée. La vaccination ne fournit qu’une immunité provisoire qui dure de quelques mois à quelques années. Il n’existe actuellement pas de traitement curatif. Actuellement, l’OIE (Office international des épizooties) reconnaît que dans leur relation avec la maladie les pays sont dans trois situations différentes : ou bien la fièvre aphteuse est présente avec ou sans vaccination, ou bien elle est absente grâce à la vaccination ou bien elle est absente sans qu’on ait besoin de vaccination. Ce sont les pays du troisième groupe qui ont le plus de facilité pour exporter sur les marchés.

La fièvre aphteuse à Maurice et Rodrigues en 2016 DE LA SUSPICION AU DIAGNOSTIC. La République de Maurice a connu une épizootie de fièvre aphteuse en 2016. Le premier cas a eu lieu à Rodrigues le 07 juillet 2016 sur un bovin. L’alerte a été confirmée suite à l’augmentation du nombre de cas à partir de la 3ème semaine mais les premières analyses sérologiques réalisées ont montré des résultats négatifs. Une équipe d’investigation dépêchée depuis Maurice, avec l’appui de la COI a permis de poser la suspicion, avec l’atteinte de plusieurs espèces (bovins, ovins, porcs) et un diagnostic sérologique fait par le laboratoire de Maurice le 01 août 2016 (Figure 1). L’Ile Maurice a été touchée à son tour au début du mois d’août 2016 via des animaux importés depuis Rodrigues le 15 juillet 2016. Le premier cas date du 02 août 2016 dans le village de Vallée des Prêtres dans le sud de Port-Louis. La COI, le Cirad et les services vétérinaires de Maurice ont contacté le laboratoire de référence européen ANSES le 05/08/2016 pour la réalisation d’analyses complémentaires pour le diagnostic de la fièvre aphteuse, la caractérisation du virus et plus spécifiquement l’identification du sérotype viral impliqué. Cette information est en effet indispensable pour le choix du vaccin à utiliser. Les analyses RT-PCR en temps réel ont permis de détecter le virus de la fièvre aphteuse. Le virus a été isolé à partir de 11 échantillons. Le sérotype O a été

Figure 1 - Fièvre aphteuse à Maurice et à Rodrigues en 2016 : Du premier cas jusqu’à la confirmation du sérotype et du topotype

identifié par ELISA-Ag et RT-PCR conventionnelle de typage. L’ANSES a remis ces résultats le 12/08/2016 au soir. L’analyse phylogénétique, a montré une homologie avec des séquences de type O

appartenant au topotype ME-SA lignage Ind-2001d. Le 17 août 2016, le laboratoire national de référence de Maisons-Alfort (ANSES) a communiqué ces résultats aux autorités mauriciennes. Avec la

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collaboration du laboratoire mondial de référence pour la fièvre aphteuse à Pirbright, l’analyse phylogénétique montre que cette souche est proche de celle retrouvée au Népal en 2015.

DEUXIÈME SEMESTRE 2016

campagne de vaccination. Quatre de ces vétérinaires étaient affectés à Rodrigues et les six autres sur l’Île Maurice. Le fonctionnement de ces équipes de vaccination a été standardisé en termes de mesures

Figure 2 – Fièvre aphteuse à Maurice en 2016 – Zonage et délimitations des périmètres d’intervention à la date du 18/08/2016 avant la première campagne de vaccination (source : UVS-COI)

ORGANISATION DE LA RIPOSTE. En termes de réponses, dès les premiers résultats sérologiques, un comité de crise pluridisciplinaire et impliquant les techniciens et les décideurs a été mis en place dans chaque île. La COI a apporté son expertise dans ces comités de crise pour discuter des avantages et inconvénients des différentes options de lutte possible en fonction de l’évolution du contexte. L’interdiction des mouvements d’animaux entre les deux îles et en intra-île a été instaurée. La surveillance a été renforcée dans les deux îles avec une sensibilisation des vétérinaires de terrain et des éleveurs sur les signes de la maladie afin de détecter toute apparition. Parallèlement à cette surveillance passive, une surveillance active a été mise en place. Les contacts en termes d’entrées ou de sorties d’animaux ou d’autres vecteurs mécaniques du virus, ont été tracés et enquêtés afin de détecter d’autres cas. Un abattage sanitaire ciblant les troupeaux infectés a été effectué à partir du 06 août 2016 à Rodrigues et du 08 août 2016 à l’Île Maurice. La COI a fourni le pays pour les 20000 premières doses de vaccins. La vaccination a commencé le 21 août à l’Île Maurice et le lendemain à Rodrigues. Ce premier lot de vaccin, de type aqueux était adapté seulement pour les ruminants et non pour les porcs. Grâce à l’intervention du Cirad et de la COI, l’Union Européenne a par la suite fait don de 300 000 doses de vaccins huileux, adaptés à toutes les espèces, incluant les porcs. Ce deuxième lot de vaccins est arrivé à Maurice le 10 septembre 2016. A l’Île Maurice, trois zones ont été définies (Figure 2) : la zone de protection, délimitée par un rayon de 3Km autour des foyers (élevages infectés) ; la zone de surveillance qui va jusqu’à un rayon de 10Km autour des foyers, et les zones indemnes, au-delà des 10Km. Avec le premier lot de vaccins, une vaccination en anneau a été effectuée dans un premier temps pour endiguer la diffusion de la maladie. Des équipes de vaccination partaient des périphéries de la zone de surveillance et convergeaient vers les zones de protection. Dans la zone de protection, une autre équipe faisait la vaccination et enfin dans les foyers une équipe spécifique faisait l’abattage et la désinfection. À Rodrigues, les régions non infectées et infectées ont été différenciées. Avec le premier lot de vaccins, les zones non infectées ont été priorisées afin de préserver les villages et les troupeaux indemnes. Grâce à l’appui de la COI et à la solidarité régionale du réseau, Madagascar a envoyé dix vétérinaires pour appuyer leurs collègues Mauriciens pour la

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de biosécurité, procédure de vaccination, traçabilité des animaux et données à collecter. Avec l’arrivée des doses suffisantes de vaccins et adaptées à toutes les espèces, la campagne de vaccination a été élargie à l’ensemble des territoires dans les deux îles, mais toujours en respectant les délimitations des zones dans l’organisation des équipes. Le protocole de vaccination consistait en une première dose à partir de 2 semaines d’âge, une deuxième dose à 3 à 4 semaines puis une troisième dose 4 à 6 mois après la 2ème dose. Ainsi, trois campagnes de vaccinations ont été réalisées dans les deux îles. Chacune de ces campagnes de vaccinations a atteint l’objectif de couverture d’au moins 80% de la population cible.

L’ÉLEVAGE À MAURICE ET RODRIGUES L’importance de l’élevage et des types d’élevages à l’île Maurice et à Rodrigues ne sont pas les mêmes. L’Île Maurice a une économie très orientée vers le tourisme. Toutefois, elle possède un cheptel de 36000 ruminants et de 21 000 porcs selon le dernier recensement réalisé en décembre 2015. Outre les quelques grands élevages bovins, gérés principalement par des structures paraétatiques, on y retrouve surtout de petits élevages familiaux. Très peu d’animaux vont sur parcours. L’Île possède aussi un cheptel important de cerfs vivants dans des chassées à l’état semi-sauvage, non loin de cochons vivants librement et sans propriétaire, appelés « cochons marrons ». Rodrigues, petite Île de 40 000 habitants située à 583 km de l’Île Maurice, fait partie de la République de Maurice tout en jouissant d’une certaine autonomie. Elle possède un cheptel de 35 000 ruminants et de 14 000 porcs. L’élevage y tient une place importante dans l’économie. L’exportation d’animaux vers Maurice, avec deux bateaux par mois, constitue une des principales sources de revenu des éleveurs. LEÇONS À TIRER. Il est très important pour chaque pays d’avoir un plan de contingence préalable et pragmatique, définissant les acteurs et leurs rôles pour ce type de crise. De plus, tous les fournisseurs potentiels des intrants utiles doivent être identifiés à l’avance (vaccins, boucles d’identification) pour éviter les délais de mise en œuvre de la riposte. La dimension sociale, politique et culturelle tient une place prépondérante et les épidémiologistes doivent pouvoir s’adapter pour ajuster les mesures de lutte. Par exemple, dans le cas de Maurice, comme beaucoup de pays du Sud, il était inconcevable de

Figure 3 - Villages touchés par la fièvre aphteuse à l’Île Maurice en 2016 (Source : UVS-COI)

BILAN ÉPIDÉMIOLOGIQUE. Les derniers cas confirmés datent du 19 septembre 2016 à l’Île Maurice du 14 octobre 2016 à Rodrigues. Cette épizootie a touché 706 élevages à l’île Rodrigues sur un total de 3500 soit environ 20%. Deux tiers des villages de l’île ont eu au moins un élevage infecté. En termes de pertes directes, 2 118 animaux sont morts de l’infection ou ont été abattus (soit 391 porcs, 299 bovins et 1428 petits ruminants), représentant 4% du cheptel de l’île. A l’île Maurice, un total de 80 élevages de ruminants ou de porcins (sur 4 000 recensés sur l’île) ont été affectés. Les abattages sanitaires ont représenté un total de 1 696 animaux. Les figures 3 et 4 montrent la répartition des villages infectés dans les deux Îles.

penser à un abattage de masse ou à de l’abattage préventif. De même, l’interdiction des mouvements restait très difficile à appliquer. La lutte contre la fièvre aphteuse à Maurice a été une réussite. Compte tenu de la petite superficie des deux Îles, la maladie aurait pu connaître une prévalence beaucoup plus élevée et même sortir du territoire pour atteindre les Îles voisines. Malgré le fait que les services vétérinaires n’étaient pas préparés à une telle éventualité, grâce à la volonté du gouvernement de Maurice et de l’assemblée régionale de Rodrigues, à la confiance entre les services vétérinaires de Maurice et de Rodrigues et l’équipe de la COI et du Cirad qui les a accompagnés, et à la solidarité régionale et internationale, les actions de lutte ont pu être menées malgré les difficultés.


BULLETIN D’INFORMATIONS ÉPIDÉMIOLOGIQUES - SANTÉ ANIMALE - OCÉAN INDIEN

Figure 4 - Villages touchés par la fièvre aphteuse à Rodrigues jusqu’à la date du 16/09/2016

Crédit photo : ONE HEALTH - OI

Les gestionnaires du risque ont su adapter les mesures en fonction de l’évolution du contexte épidémiologique, mais aussi socio-culturel. Le pays est actuellement en phase de surveillance post-vaccinale afin de demander prochainement le regain du statut indemne auprès de l’OIE.

DEUXIÈME SEMESTRE 2016

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