Italie
La croissance du PIB devrait refluer de 3.8 % en 2022 à 1.2 % en 2023 puis à 1 % en 2024. L’inflation élevée provoque une érosion des revenus réels compte tenu de la croissance atone des salaires, les conditions financières se durcissent et les aides budgétaires exceptionnelles liées à la crise énergétique sont progressivement supprimées, ce qui pèse sur la consommation et l’investissement privés. Les risques intérieurs sont globalement équilibrés. L’épargne accumulée par les ménages demeure importante, ce qui pourrait favoriser un rebond de la demande intérieure plus rapide que prévu actuellement. En revanche, des retards dans la mise en œuvre du plan national pour la reprise et la résilience pourraient réduire la croissance du PIB.
Alors que le durcissement de la politique monétaire commence à faire sentir ses effets et que les aides budgétaires liées à l’énergie accordées aux ménages et aux entreprises sont réduites, l’orientation des politiques macroéconomiques devient restrictive. La politique budgétaire modérément restrictive paraît globalement appropriée, et une poursuite de l’assainissement des finances publiques sera nécessaire au cours des années à venir pour placer le ratio d’endettement sur une trajectoire plus viable. La réalisation rapide des réformes structurelles et des investissements publics prévus dans le plan national pour la reprise et la résilience sera indispensable pour soutenir l’activité à court terme, et jeter les bases d’une croissance durable à moyen terme.
Italie 1
Source : Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, n° 113 ; et Institut national de statistique (ISTAT, Istituto Nazionale di Statistica).
StatLink2 https://stat.link/lrp1mz
Pourcentage de variation, en volume (prix de 2015)
Dette brute des administrations publiques, définition Maastricht³ (% du PIB)
1 Contributions aux variations du PIB en volume, montant effectif pour la première colonne
2 Indice des prix à la consommation harmonisé, hors produits alimentaires, énergie, alcool et tabac
3. Selon la définition de Maastricht, la dette des administrations publiques comprend uniquement les crédits, les titres de créance et les numéraires et dépôts, la dette étant exprimée en valeur nominale et non à sa valeur de marché
Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 113
L’activité se redresse
Après une contraction au dernier trimestre de 2022, le PIB réel a progressé de 0.6 % au premier trimestre de 2023. Les récents indicateurs à haute fréquence laissent entrevoir une croissance modeste à court terme. La production industrielle et les ventes au détail restent atones, mais la confiance des entreprises et des consommateurs s’est raffermie au cours des derniers mois. Le taux de chômage est historiquement bas, le nombre de postes vacants est élevé et l’emploi continue à progresser fortement, malgré une diminution de la population d’âge actif. Le dynamisme du marché du travail et les récentes baisses des prix de l’énergie stabilisent les revenus réels des ménages, favorisant un redressement modeste de la consommation privée au premier semestre de 2023.
Les baisses récentes des prix internationaux de l’énergie ont été vite répercutées, ce qui a réduit l’inflation mesurée par les prix à la consommation, qui est passée de plus de 12 % en novembre à 8.1 % en mai. Étant donné que le niveau des stocks de gaz était élevé à la fin de l’automne 2022 et que l’hiver a été doux, les stocks de gaz en avril étaient environ deux fois plus importants qu’un an auparavant. Compte tenu des progrès notables accomplis en matière de diversification géographique des approvisionnements en gaz durant l’année écoulée, le niveau des stocks pourrait s’approcher de celui des capacités de stockage avant l’hiver 2023-24. Les retombées des récentes turbulences qu’a connues le secteur bancaire international sur le secteur bancaire italien sont restées limitées jusqu’ici.
StatLink2 https://stat.link/68ic1w
Les coûts d’emprunt augmentent tandis que les aides budgétaires sont supprimées progressivement
Le durcissement de la politique monétaire dans la zone euro s’est traduit par une hausse sensible des coûts d’emprunt pour les ménages et les entreprises, les taux débiteurs des banques ayant augmenté de plus de 2 points de pourcentage au cours de l’année écoulée. Il accroît aussi le coût pour l’État du refinancement du volumineux encours de la dette publique, si bien que le coût du service de la dette devrait atteindre environ 4 % du PIB en 2024.
Les autorités supprimeront progressivement les mesures budgétaires qui visent à atténuer les effets du choc lié aux prix de l’énergie sur les ménages et les entreprises à la mi-2023. Les mesures de soutien liées à la crise énergétique adoptées en 2022, telles que les crédits d’impôt accordés aux entreprises au titre de leurs factures d’électricité, la réduction des charges fixes liées au gaz et à l’électricité, ainsi que les aides au revenu ciblées sur les ménages modestes, ont pour la plupart été prolongées au premier semestre de 2023. Ces mesures sont toutefois devenues moins généreuses, et les autorités ont mis fin à certaines dispositions économiquement inefficientes et non ciblées, comme la diminution des droits d’accise sur les combustibles fossiles. Les économies budgétaires imputables à la suppression progressive des mesures d’aide liées à la crise et à d’autres mesures de resserrement budgétaire, notamment au durcissement des règles concernant le dispositif coûteux de « super bonus » (un crédit d’impôt accordé au titre de la rénovation des bâtiments), représentent environ 2 % du PIB en 2023. Ces économies sont en partie compensées par la progression attendue des dépenses liées au plan « Next Generation EU (NGEU) », qui devrait être de l’ordre de 1½ point de PIB. Dans l’ensemble, la conjonction de la baisse des prix de l’énergie, du resserrement des conditions financières et de la politique budgétaire légèrement restrictive devrait se traduire par un relâchement progressif des tensions inflationnistes, tout en permettant un redressement modeste de l’activité.
La croissance ne se redressera que lentement
La croissance du PIB réel devrait être modeste en 2023-24, malgré les baisses récentes des prix de l’énergie et l’augmentation attendue des dépenses liées au plan NGEU. L’érosion des revenus réels provoquée par la faible croissance des salaires dans un contexte d’inflation élevée, le démantèlement des aides budgétaires exceptionnelles liées à la crise énergétique et le resserrement des conditions financières pèsent sur la consommation et l’investissement privés. Le recul de l’inflation ne contrebalance qu’en partie ces circonstances défavorables, sachant que le choc lié aux prix de l’énergie s’est traduit par des tensions plus générales sur les prix, qui ne se dissiperont que lentement. Alors que la baisse des prix de l’énergie devrait faire reculer l’inflation à la fois directement, en atténuant l’inflation énergétique, et indirectement, en réduisant le coût des intrants des entreprises, la croissance des salaires devrait se redresser en 2023-24. L’alourdissement des coûts d’emprunt réduira l’investissement privé, surtout dans le secteur du logement, qui sera aussi pénalisé par le durcissement des conditions nécessaires pour obtenir le crédit d’impôt « superbonus ». La faiblesse de l’investissement privé neutralisera quelque peu l’effet positif induit sur l’investissement total par le rebond attendu de l’investissement public lié aux fonds du plan « Next Generation EU ». La contribution du solde extérieur à la croissance sera certes positive en 2023-24, mais la récente appréciation de l’euro limitera les gains supplémentaires de compétitivité des exportations. Les risques pesant sur la croissance sont peu ou prou équilibrés. L’épargne accumulée par les ménages demeure importante, ce qui pourrait être à l’origine d’un rebond de la demande intérieure plus rapide que prévu actuellement, à mesure que les ménages puiseront dans leur excès d’épargne. En revanche, les retombées négatives des récentes turbulences qu’a connues le secteur bancaire international ou de nouveaux retards dans l’exécution de projets d’investissement public prévus par le plan national pour la reprise et la résilience pourraient réduire la croissance.
Des réformes structurelles seront indispensables pour étayer la croissance et réduire le ratio d’endettement
L’orientation de la politique budgétaire en 2023-24 correspond à un juste équilibre entre la prudence budgétaire et le soutien à la croissance, mais un assainissement plus poussé des finances publiques sera nécessaire au cours des années à venir pour placer le ratio dette/PIB sur une trajectoire plus viable. Dans le cadre de leurs efforts d’assainissement, les autorités devraient prévoir des mesures ambitieuses de lutte contre la fraude fiscale et des examens complets des dépenses, en vue d’améliorer l’efficience des dépenses publiques. La mise en œuvre intégrale des programmes ambitieux d’investissement public et de réformes structurelles prévus par le plan national pour la reprise et la résilience pourrait accroître durablement le PIB de l’Italie, ce qui présenterait l’avantage supplémentaire de contribuer à faire baisser le ratio dette/PIB. Les réformes en cours de l’administration publique, du système judiciaire et du droit de la concurrence sont en bonne voie et demeurent capitales pour rehausser le PIB à moyen terme. Toutefois, l’exécution des dépenses financées par le plan NGEU a pris un retard considérable. Les dépenses cumulées à la fin de 2022 étaient inférieures de 50 % environ au niveau des dépenses initialement prévues, ce qui s’explique principalement par des retards dans l’exécution de projets d’investissement public. Les priorités devraient être de remplacer rapidement des projets non viables par des projets viables et de renforcer la capacité de l’administration publique à gérer et à exécuter efficacement les projets de dépenses publiques prévus par le plan national pour la reprise et la résilience. Ces projets comprennent de manière cruciale des dépenses d’infrastructure destinées à faciliter les transitions numérique et écologique, ainsi que le développement de structures publiques d’accueil préscolaire des jeunes enfants, afin de renforcer l’activité féminine dans un contexte de diminution rapide de la population en âge de travailler.