France
La croissance du PIB rĂ©el devrait sâĂ©tablir Ă 0.8 % en 2023 et Ă 1.3 % en 2024. La guerre dâagression menĂ©e par la Russie contre lâUkraine, les perturbations des chaĂźnes dâapprovisionnement et la flambĂ©e des prix de lâĂ©nergie ont assombri les perspectives Ă©conomiques. Lâinflation devrait rester Ă©levĂ©e Ă 6.1 % en 2023 et refluer Ă 3.1 % en 2024, Ă©rodant le pouvoir dâachat des mĂ©nages et freinant la hausse de la consommation. La fragile confiance des entreprises et des mĂ©nages et la modestie de la croissance mondiale, ainsi que de fortes incertitudes, pĂšseront sur lâinvestissement et les exportations. La croissance des salaires sâaccĂ©lĂšre, du fait de la vigueur du marchĂ© du travail. Avec le ralentissement de la crĂ©ation dâemplois, le taux de chĂŽmage se stabilisera autour de 7.2 % en 2024.
La politique budgĂ©taire sera moins accommodante. Le gel temporaire des prix rĂ©glementĂ©s de lâĂ©nergie, conjuguĂ© Ă des subventions et transferts monĂ©taires, a permis de lisser les chocs provoquĂ©s par les prix de lâĂ©nergie. Ces mesures devraient ĂȘtre progressivement supprimĂ©es dâici fin 2024. Avec le recul des prix de gros de lâĂ©nergie, il est crucial dâamĂ©liorer le ciblage des mesures de soutien pour Ă©viter de nuire Ă la transition verte. Les modifications apportĂ©es Ă lâassurance-chĂŽmage et la rĂ©forme des retraites auront pour effet de rĂ©duire les dĂ©penses dans ces deux domaines. Leur impact sera toutefois en partie attĂ©nuĂ© par les consĂ©quences du vieillissement de la population et du relĂšvement des taux dâintĂ©rĂȘt, ce qui nĂ©cessitera dâamĂ©liorer lâefficacitĂ© des dĂ©penses.
France 1
Source : Base de donnĂ©es des Perspectives Ă©conomiques de lâOCDE, n° 113.
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France : Demande, production et prix
Taux
des
brute des
1 Contributions aux variations du PIB en volume, montant effectif pour la premiĂšre colonne
2 Indice des prix à la consommation harmonisé, hors produits alimentaires, énergie, alcool et tabac
3 Taux de chÎmage national, incluant les départements d'outre-mer
4. Selon la définition de Maastricht, la dette des administrations publiques comprend uniquement les crédits, les titres de créance et les numéraires et dépÎts, la dette étant exprimée en valeur nominale et non à sa valeur de marché
La croissance a ralenti
La hausse des prix de lâĂ©nergie, la guerre en Ukraine et les perturbations des chaĂźnes dâapprovisionnement ont freinĂ© le rebond du PIB qui avait Ă©tĂ© rapide en 2022. La vigueur de lâinvestissement des entreprises et la rĂ©silience du marchĂ© du travail ont Ă©tayĂ© la croissance au cours de lâhiver 2022-23, mais le PIB a stagnĂ© au quatriĂšme trimestre de 2022 et nâa progressĂ© que de 0.2 % au premier trimestre de 2023. MalgrĂ© des taux dâemploi historiquement hauts, les prix Ă©levĂ©s de lâĂ©nergie, le durcissement des conditions financiĂšres et la baisse des salaires rĂ©els ont pesĂ© sur la consommation privĂ©e et sur lâinvestissement rĂ©sidentiel. La consommation de biens a baissĂ© de 4.3 % en glissement annuel en avril, la consommation de services a ralenti et la production manufacturiĂšre dans les secteurs Ă forte intensitĂ© Ă©nergĂ©tique a chutĂ©. En mai, les prix Ă la consommation avaient augmentĂ© de 6.0 % sur douze mois, avec une inflation des prix des produits alimentaires sâĂ©tablissant Ă 13.6 % et une inflation sous-jacente Ă 4.3 %, dans un contexte dâaccĂ©lĂ©ration de la progression des salaires. NĂ©anmoins, la confiance des entreprises et celle des consommateurs ont Ă©tĂ© globalement stables au dĂ©but de 2023, sur fond de flĂ©chissement des prix de gros de lâĂ©nergie et des produits alimentaires et dâallĂšgement des tensions au niveau des chaĂźnes dâapprovisionnement.
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2019 2020 2021 2022 2023 2024 France Prix courants milliards de EUR PIB aux prix du marchĂ© 2 440.2 -7.7 6.4 2.5 0.8 1.3 Consommation privĂ©e 1 307.4 -6.7 5.2 2.2 0.3 1.4 Consommation publique 560.6 -4.2 6.5 2.6 0.8 0.9 Formation brute de capital fixe 573.5 -7.1 10.2 2.3 0.8 0.9 Demande intĂ©rieure finale 2 441.5 -6.2 6.6 2.3 0.5 1.2 Variation des stocksÂč 22.4 -0.2 -0.6 0.8 -0.4 0.0 Demande intĂ©rieure totale 2 463.9 -6.3 6.0 3.1 0.2 1.2 Exportations de biens et services 771.4 -17.1 10.9 7.2 1.3 3.3 Importations de biens et services 795.0 -12.6 9.2 8.7 -0.5 2.4 Exportations nettesÂč - 23.7 -1.3 0.2 -0.6 0.6 0.2 Pour mĂ©moire DĂ©flateur du PIB _ 2.8 1.4 2.9 5.3 2.6 Indice des prix Ă la consommation harmonisĂ© _ 0.5 2.1 5.9 6.1 3.1 IPCH sous-jacentÂČ 0.6 1.3 3.4 4.5 3.3 Taux de chĂŽmageÂł (% de la population active) _ 8.1 7.9 7.3 7.2 7.2 _ 20.5 18.6 17.2 17.1 16.6 Solde financier des administrations publiques (% du PIB) _ -9.0 -6.5 -4.7 -4.8 -4.4 Dette brute des administrations publiques (% du PIB) _ 146.0 138.7 117.7 118.1 119.7 _ 114.7 113.0 111.8 112.2 113.9 Balance des opĂ©rations courantes (% du PIB) -1.8 0.4 -2.2 -1.6 -1.5
d'épargne brute
Pourcentage de variation, en volume (prix de 2014) Dette ménages (% du revenu disponible)
administrations publiques, définition Maastricht⎠(% du PIB)
Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 113
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MalgrĂ© une forte croissance des activitĂ©s de services, le dĂ©ficit commercial sâest accentuĂ©, atteignant 4.2 % du PIB en 2022, en raison de la hausse du coĂ»t des importations dâĂ©nergie, de difficultĂ©s persistantes dans les secteurs de lâaĂ©ronautique et de lâautomobile, ainsi que de limitations des capacitĂ©s de production dâĂ©nergie nuclĂ©aire. Les coĂ»ts budgĂ©taires bruts du plafonnement des prix de lâĂ©nergie et des mesures dâaide reprĂ©senteront 1.6 % du PIB en 2023, bien que les prix rĂ©glementĂ©s du gaz et de lâĂ©lectricitĂ© aient progressĂ© de 15 % au dĂ©but de cette annĂ©e. Sur la mĂȘme pĂ©riode, le resserrement monĂ©taire dans la zone euro va contribuer Ă inflĂ©chir progressivement la demande intĂ©rieure, notamment via une baisse du nombre de nouveaux prĂȘts immobiliers.
Les mesures budgĂ©taires permettent dâamortir en partie les chocs externes
La politique budgĂ©taire est supposĂ©e permettre un assainissement modĂ©rĂ© en 2023 et 2024. MalgrĂ© lâampleur des mesures de soutien Ă©nergĂ©tique, le dĂ©ficit budgĂ©taire a Ă©tĂ© ramenĂ© Ă 4.7 % du PIB en 2022, grĂące Ă la forte progression des recettes et Ă la disparition progressive des dĂ©penses en lien avec le COVID19. Pour 2023, le gouvernement a maintenu le plafonnement des prix du gaz et de lâĂ©lectricitĂ© et Ă©largi le dispositif de chĂšques-Ă©nergie en direction des mĂ©nages Ă faible revenu, mais supprimĂ© les baisses de taxes sur les carburants. Les prestations sociales ont Ă©tĂ© augmentĂ©es, de mĂȘme que les salaires dans la fonction publique, et les hausses des loyers ont Ă©tĂ© plafonnĂ©es. De plus, des taxes exceptionnelles appliquĂ©es aux producteurs dâĂ©lectricitĂ© et aux raffineries de pĂ©trole, contribuent Ă financer de nouvelles aides Ă©nergĂ©tiques temporaires Ă lâintention des entreprises. Les mesures de soutien Ă©nergĂ©tique direct devraient selon les estimations se chiffrer Ă 45.3 milliards EUR (1.6 % du PIB) en 2023. Les aides Ă©nergĂ©tiques sont supposĂ©es ĂȘtre pour lâessentiel supprimĂ©es en 2024, notamment via une nouvelle augmentation de 15 % des tarifs rĂ©glementĂ©s de lâĂ©lectricitĂ©. Dâautres mesures de soutien Ă lâactivitĂ© Ă©conomique seront mises en Ćuvre, parmi lesquelles, en 2023-24, 15 milliards EUR de dĂ©penses au titre du plan de relance et de nouvelles baisses de la fiscalitĂ© sur les logements et les entreprises. En revanche, la rĂ©forme de lâassurance-chĂŽmage de 2022 et la rĂ©forme des retraites prĂ©vue permettront de rĂ©aliser des Ă©conomies budgĂ©taires.
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1. Définition de Maastricht.
Source : Base de donnĂ©es des Perspectives Ă©conomiques de lâOCDE, n° 113.
La politique monĂ©taire et les conditions financiĂšres deviennent moins favorables Ă lâinvestissement dans la zone euro. Cela Ă©tant, la mise en Ćuvre du plan « Next Generation EU » favorise lâinvestissement en France, qui va bĂ©nĂ©ficier de 37.5 milliards EUR de subventions, mais aussi chez ses principaux partenaires commerciaux. Le plan de 2022 pour la rĂ©silience a accĂ©lĂ©rĂ© les financements destinĂ©s Ă la rĂ©novation et lâisolation des logements, et le plan de sobriĂ©tĂ© Ă©nergĂ©tique vise une baisse de 10 % de la consommation dâĂ©nergie dâici 2024. Les prĂȘts garantis par lâĂtat et les subventions accordĂ©es aux entreprises durement touchĂ©es contribueront Ă soutenir lâinvestissement des entreprises. Les subventions accordĂ©es aux mĂ©nages pour acquĂ©rir des vĂ©hicules et investir dans lâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique ciblent les solutions Ă©cologiques et auront pour effet dâaccroĂźtre lâinvestissement rĂ©sidentiel et la consommation de biens durables. Lâaugmentation de lâinvestissement public dans les infrastructures et la transformation numĂ©rique, de mĂȘme que les financements supplĂ©mentaires affectĂ©s Ă la formation, devraient favoriser la productivitĂ© et la croissance Ă long terme.
La demande intérieure devrait repartir lentement à la hausse
Selon les projections, la croissance du PIB ralentira pour sâĂ©tablir Ă 0.8 % en 2023 puis atteindre 1.3 % en 2024. Lâinflation pĂšse sur le pouvoir dâachat des mĂ©nages et lâeffet de rattrapage de la demande a en grande partie ralenti. La rĂ©percussion progressive de lâaugmentation passĂ©e des prix de gros de lâĂ©nergie et lâindexation du salaire minimum vont entraĂźner une hausse de lâinflation sous-jacente et des salaires en 2023, malgrĂ© le plafonnement des tarifs rĂ©glementĂ©s de lâĂ©nergie et de la hausse des loyers et lâallĂšgement des tensions sur les prix de gros de lâĂ©nergie et des produits alimentaires. Le durcissement des conditions de financement et lâaffaiblissement du marchĂ© du travail vont finir par freiner lâinflation sous-jacente et la progression des salaires, et par limiter lâinvestissement rĂ©sidentiel. Ă la faveur dâun affermissement de la demande en provenance des partenaires commerciaux, qui ne sera que progressif, les exportations, actuellement faibles, augmenteront, mais lentement. Lâinvestissement des entreprises devrait rĂ©sister, car lâaide fournie au titre du plan de lâUE pour la reprise et la rĂ©silience viendra compenser en partie les effets de lâaugmentation des coĂ»ts de financement, de la rĂ©duction des marges bĂ©nĂ©ficiaires et du niveau Ă©levĂ© de lâincertitude. Le dĂ©ficit budgĂ©taire et la dette publique devraient rester importants en pourcentage du PIB, la dette (au sens de Maastricht) dĂ©passant 113 % du PIB en 2024.
Lâaggravation des tensions gĂ©opolitiques et la poursuite des perturbations sur les marchĂ©s de lâĂ©nergie et dans les chaĂźnes dâapprovisionnement pourraient toucher particuliĂšrement des secteurs comme le matĂ©riel de transport, les voyages et les services touristiques en France. Certaines entreprises, fortement endettĂ©es en partie du fait des garanties de prĂȘt octroyĂ©es par lâĂtat, connaĂźtront des problĂšmes de liquiditĂ©s et de solvabilitĂ©, qui pourraient dĂ©clencher des faillites et dĂ©grader les perspectives de croissance. Il est particuliĂšrement difficile de savoir dans quelle mesure les mĂ©nages puiseront dans lâĂ©pargne substantielle quâils ont accumulĂ©e, et un taux dâĂ©pargne plus Ă©levĂ© ou plus faible que prĂ©vu aurait pour effet de freiner ou, au contraire, de stimuler la demande intĂ©rieure et la croissance.
Soutenir une croissance plus durable
Les aides inconditionnelles liĂ©es au coĂ»t de lâĂ©nergie, notamment le plafonnement des prix, devraient ĂȘtre supprimĂ©es progressivement en raison de leur coĂ»t budgĂ©taire Ă©levĂ© et des distorsions Ă©conomiques quâelles engendrent. Les mesures de soutien conçues pour attĂ©nuer lâimpact des prix toujours Ă©levĂ©s devraient rester temporaires et ĂȘtre ciblĂ©es sur les mĂ©nages les plus vulnĂ©rables. Ă mesure que les incertitudes et les tensions sur les prix se dissiperont et que la croissance sâinstallera plus fermement, il conviendra de dĂ©ployer avec dĂ©termination une stratĂ©gie budgĂ©taire Ă moyen terme destinĂ©e Ă rĂ©duire progressivement les dĂ©penses publiques et Ă en accroĂźtre lâefficience, afin de stimuler les perspectives de croissance Ă long terme et dâamĂ©liorer la viabilitĂ© Ă moyen terme des finances publiques. Cette stratĂ©gie devra sâappuyer sur une procĂ©dure dâaffectation des dĂ©penses publiques plus efficiente et plus
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transparente, au moyen dâexamens des dĂ©penses. Les efforts engagĂ©s par les pouvoirs publics pour aller encore plus loin sur la voie des solutions Ă©cologiques et des Ă©conomies dâĂ©nergie et assurer une transition Ă©quitable devront Ă©galement ĂȘtre poursuivis. Une accĂ©lĂ©ration de la rĂ©novation des logements et des Ă©conomies dâĂ©nergie favoriserait la transition Ă©nergĂ©tique Ă plus long terme, et elle devrait ĂȘtre Ă©tayĂ©e par des Ă©valuations pĂ©riodiques des dispositifs dâaide concernĂ©s. Pour soutenir la croissance et permettre des carriĂšres plus longues, comme le prĂ©voit la rĂ©forme des retraites programmĂ©e, il faudra Ă©galement assurer un large accĂšs des personnes peu qualifiĂ©es et des chĂŽmeurs de longue durĂ©e Ă la formation continue, et veiller Ă appliquer activement des normes de qualitĂ© Ă ces programmes de formation. En outre, il sera indispensable de continuer Ă renforcer lâaccĂšs Ă un enseignement de haute qualitĂ© dĂšs le plus jeune Ăąge, pour garantir une plus grande Ă©quitĂ© et continuer Ă rĂ©duire les dĂ©sĂ©quilibres entre les genres.
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