Estonie
LâĂ©conomie sâaffaiblira considĂ©rablement Ă mesure que les effets de la guerre dâagression menĂ©e par la Russie contre lâUkraine se gĂ©nĂ©raliseront. La croissance du PIB rĂ©el devrait ralentir pour sâĂ©tablir Ă 0.5 % en 2023 en raison du flĂ©chissement de la demande intĂ©rieure et de la dĂ©gradation de lâenvironnement extĂ©rieur, malgrĂ© lâappui apportĂ© par la politique budgĂ©taire. La croissance rebondira en 2024 pour se hisser Ă 3.2 %. Quant Ă lâinflation, elle devrait atteindre un point culminant dâici la fin de lâannĂ©e, mais elle devrait rester Ă©levĂ©e en 2023 et ne commencer Ă refluer quâau moment oĂč les capacitĂ©s inutilisĂ©es dans lâĂ©conomie augmenteront. Pour Ă©viter dâaccentuer davantage les tensions inflationnistes, les mesures budgĂ©taires devraient ĂȘtre temporaires, cibler les groupes vulnĂ©rables et apporter une aide aux rĂ©fugiĂ©s. Ă moyen terme, une intĂ©gration aboutie de ces derniers et des programmes de reconversion pourraient contribuer Ă attĂ©nuer les tensions sur le marchĂ© du travail. De nouveaux investissements dans la sĂ©curitĂ© et les infrastructures Ă©nergĂ©tiques permettront de renforcer la rĂ©silience.
LâĂ©conomie ralentit
LâĂ©conomie estonienne sâĂ©tait vigoureusement redressĂ©e en 2021, affichant une croissance de 8.1 %, mais elle a commencĂ© Ă sâessouffler au premier semestre de 2022, bridĂ©e par le niveau Ă©levĂ© des prix de lâĂ©nergie, les perturbations des chaĂźnes dâapprovisionnement et les tensions sur le marchĂ© du travail. Lâinflation globale mesurĂ©e par la hausse des prix Ă la consommation dans le pays est lâune des plus Ă©levĂ©es de lâUnion europĂ©enne (EU) et sâest Ă©tablie Ă 22.5 % en octobre. Soutenue par une diminution de lâĂ©pargne, la consommation privĂ©e sâest affermie au premier semestre de 2022. LâentrĂ©e des rĂ©fugiĂ©s ukrainiens sur le marchĂ© du travail estonien a permis dâattĂ©nuer certaines tensions, et le taux de chĂŽmage a atteint 5.7 % en septembre, mais les entreprises continuent malgrĂ© tout de citer les pĂ©nuries de maindâĆuvre comme le principal obstacle Ă lâaugmentation de la production, en particulier dans les secteurs des services et de la construction. La confiance des entreprises et celle des consommateurs se sont effritĂ©es depuis le dĂ©but de lâannĂ©e, et les commandes Ă lâexportation sâinscrivent en baisse.
Estonie
1. Indice des prix à la consommation harmonisé, hors énergie, produits alimentaires, alcool et tabac.
Source : Base de donnĂ©es des Perspectives Ă©conomiques de lâOCDE, no 112.
PIB aux prix du marché
Pourcentage de variation, en volume (prix de 2015)
27.7 -0.4 8.1 0.8 0.5 3.2
Consommation privée 13.9 -1.1 6.7 2.2 -0.4 4.1
Consommation publique 5.4 2.9 3.9 0.1 0.6 1.6
Formation brute de capital fixe 6.9 20.6 7.0 -14.6 5.2 4.1
Demande intérieure finale 26.3 5.8 6.9 -3.3 1.2 3.6
Variation des stocksÂč 0.3 0.3 0.9 3.9 0.0 0.0
Demande intérieure totale 26.6 5.1 6.6 0.5 1.0 3.2
Exportations de biens et services 20.5 -5.3 20.0 -1.1 3.3 5.0
Importations de biens et services 19.4 0.2 21.4 -0.8 3.6 5.0
Exportations nettesÂč 1.1 -4.0 -0.9 -0.2 -0.2 0.0
Pour mémoire
Déflateur du PIB _ -0.6 5.8 15.2 7.2 2.9
Indice des prix Ă la consommation harmonisĂ© _ -0.6 4.5 20.2 10.8 2.8 IPCH sous-jacentÂČ _ 0.0 2.8 10.1 6.6 2.4 Taux de chĂŽmage (% de la population active) _ 6.8 6.2 5.0 5.3 6.0 _ 10.5 8.3 2.7 0.6 -6.2
Taux d'épargne nette des ménages (% du revenu disponible)
Solde financier des administrations publiques (% du PIB) _ -5.5 -2.4 -2.7 -3.5 -2.3
Dette brute des administrations publiques (% du PIB) _ 24.8 24.4 29.0 33.2 35.8 18.6 17.6 17.8 19.1 19.7
Dette brute des administrations publiques, définition Maastricht³ (% du PIB)
Balance des opérations courantes (% du PIB)
_ -1.0 -2.3 -1.4 -1.4 -0.3
1 Contributions aux variations du PIB en volume, montant effectif pour la premiĂšre colonne
2 Indice des prix à la consommation harmonisé, hors produits alimentaires, énergie, alcool et tabac
3. Selon la définition de Maastricht, la dette des administrations publiques comprend uniquement les crédits, les titres de créance et les numéraires et dépÎts, la dette étant exprimée en valeur nominale et non à sa valeur de marché
Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 112
StatLink2 https://stat.link/yvd8nc
Les rĂ©percussions de la guerre en Ukraine sur lâEstonie ont Ă©tĂ© relativement modĂ©rĂ©es jusquâĂ prĂ©sent, notamment grĂące Ă la rĂ©silience du secteur financier intĂ©rieur, tandis que les consĂ©quences des sanctions imposĂ©es Ă la Russie ne devraient se faire pleinement sentir sur les Ă©changes quâau deuxiĂšme semestre de lâannĂ©e. La part de la Russie dans les exportations estoniennes Ă©tait infĂ©rieure Ă 2 % avant cette annĂ©e. Ă ce jour, quelque 56 000 Ukrainiens, dont un peu plus de la moitiĂ© sont des enfants, se sont installĂ©s en Estonie, ce qui correspond Ă environ 4 % de la population de ce pays dâaccueil. Les prix Ă©levĂ©s de lâĂ©nergie expliquent pour moitiĂ© environ lâinflation globale et se sont rapidement rĂ©percutĂ©s sur les autres pans de lâĂ©conomie. Jusquâici, la demande de gaz a Ă©tĂ© satisfaite par le gaz naturel liquĂ©fiĂ© (GNL) provenant de Lituanie et par la nouvelle unitĂ© centrale de stockage achetĂ©e dans un terminal letton. Des investissements supplĂ©mentaires devant permettre Ă lâEstonie dâamplifier sa capacitĂ© de stockage sont en cours. La politique budgĂ©taire a amorti une partie de lâimpact des prix Ă©levĂ©s de lâĂ©nergie, une loi de finances rectificative adoptĂ©e en milieu dâannĂ©e ayant relevĂ© les prestations sociales et les aides aux rĂ©fugiĂ©s et accru les ressources affectĂ©es Ă la dĂ©fense.
PERSPECTIVES ĂCONOMIQUES DE L'OCDE, VOLUME 2022, NUMĂRO 2 © OCDE 2022
Trouver un juste Ă©quilibre entre soutien aux plus vulnĂ©rables et nĂ©cessitĂ© de maĂźtriser lâinflation
En 2023, la politique budgĂ©taire continuera de soutenir les mĂ©nages et les entreprises face Ă la hausse du coĂ»t de la vie. Le salaire minimum sera relevĂ© de 11 % et les salaires de certains groupes dans le secteur public (comme les enseignants et les membres des forces de police), de 15 %. Le gouvernement a entrepris dâaccroĂźtre les dĂ©penses de protection sociale et dâallĂ©ger la charge fiscale sur les revenus en 2023. Ces mesures viennent sâajouter au plafonnement temporaire des prix de lâĂ©nergie adoptĂ© en faveur des mĂ©nages et des petites entreprises. LâEstonie bĂ©nĂ©ficie en outre des financements accordĂ©s au titre du Fonds de cohĂ©sion de lâUE. La montĂ©e des taux dâintĂ©rĂȘt dans la zone euro bridera la croissance, mais ces taux demeureront faibles par rapport Ă la croissance sous-jacente de lâĂ©conomie estonienne, ce qui plaidera en faveur dâun durcissement de la politique budgĂ©taire.
LâĂ©conomie devrait ralentir dans un contexte de forte inflation et de grande incertitude
La croissance du PIB rĂ©el devrait se tasser pour sâĂ©tablir Ă 0.5 % lâannĂ©e prochaine, avant de rebondir Ă 3.2 % en 2024. Lâimportant degrĂ© dâincertitude et la dĂ©gradation de la confiance des consommateurs et des entreprises freineront considĂ©rablement lâessor de la demande intĂ©rieure en 2023. Lâassombrissement des perspectives Ă©conomiques des principaux partenaires commerciaux de lâEstonie pĂšsera en outre sur la croissance de la demande extĂ©rieure. La politique budgĂ©taire permettra cependant dâamortir le repli de lâactivitĂ© en 2023. Lâinflation refluera parallĂšlement Ă lâaugmentation des capacitĂ©s inutilisĂ©es dans lâĂ©conomie pour atteindre 2.8 % en 2024. Les perspectives restent entourĂ©es dâincertitudes et de risques considĂ©rables, qui sont orientĂ©s Ă la baisse. Une nouvelle escalade de la guerre accentuerait lâincertitude et exacerberait lâinflation. Des perturbations de lâapprovisionnement Ă©nergĂ©tique en Europe pĂ©naliseraient lâactivitĂ© tant en Estonie que chez ses partenaires commerciaux. Par ailleurs, lâinflation pourrait sâavĂ©rer plus durable que prĂ©vu si les tensions sur les salaires venaient Ă prendre de lâampleur. Ă lâinverse, un dĂ©nouement rapide de la guerre rĂ©duirait lâincertitude et affaiblirait les tensions inflationnistes.
Les mesures appliquĂ©es doivent prĂ©server les incitations aux Ă©conomies dâĂ©nergie, renforcer le rĂ©seau dâĂ©nergie et favoriser la transition Ă©cologique
La politique budgĂ©taire devrait continuer de protĂ©ger les plus vulnĂ©rables contre lâinflation, mais il convient de mieux cibler les aides afin de ne pas accentuer les tensions inflationnistes, qui sont dĂ©jĂ importantes. Les mesures adoptĂ©es devraient en outre ne pas compromettre les incitations aux Ă©conomies dâĂ©nergie. La diversification des importations Ă©nergĂ©tiques et lâamĂ©lioration du rĂ©seau dâĂ©nergie et de la sĂ©curitĂ© Ă©nergĂ©tique, ainsi quâil est prĂ©vu, renforceraient la rĂ©silience de lâĂ©conomie ainsi que les moyens de parvenir Ă une croissance plus verte. Enfin, une vĂ©ritable intĂ©gration des rĂ©fugiĂ©s contribuerait Ă pallier les pĂ©nuries chroniques de compĂ©tences.