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Quartier libre
from Sion 21 n°14
by OCTANE
SALINS, LE SÉSAME POUR LA RIVE GAUCHE
Il y a sept ans, ce village d’altitude a uni son destin à celui de la capitale, lui apportant une belle ouverture sur le coteau. Avec à la clé un dynamisme renforcé pour l’un et l’autre.
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Photographies: ©Céline Ribordy
Cette fusion a été la résultante d’une longue histoire qui a vu se croiser à plusieurs reprises les chemins des deux communes. Les Salinsardes et les Salinsards étaient au Moyen Âge les sujets de l’évêque de Sion. Plus tard, ils sont devenus dépendants administrativement des bourgeois de cette même ville. Ce territoire présentait la particularité d’être mitoyen de celui des seigneurs de Savoie.
Une histoire mouvementée
L’évêché le fit d’abord gérer par un métral. Dans les faits, cette charge était occupée par la famille de la Tour, ceci jusqu’en 1227. En 1340, le donzel Johannod de la Tour fit l’acquisition des terres ayant appartenu à une autre lignée, celle des de Curtinal. En 1798, les «Frères communiers de Salens» eurent le pressentiment que le régime politique du Valais allait basculer. Les 56 hommes qui composaient cette entité jugèrent prudent de se répartir l’intégralité de leurs avoirs communs, de crainte qu’on ne les leur confisque. Cette décision s’avéra être une sage précaution pour la petite localité. Rattaché au Dizain d’Hérémence jusqu’en 1815, Salins fut en effet intégré au Dizain de Sion (devenu district) en 1848.
Boum démographique
Durant plusieurs siècles, la communauté rurale du coteau n’a abrité qu’un nombre restreint de résidents. En 1802, ceux-ci n’étaient encore que 232. En revanche, à partir de 1960, un essor sensible s’est produit. Salins compte aujourd’hui près de 1200 habitants. La vie de village reste vive, avec une dizaine de sociétés locales.
Une union plébiscitée
Le 1er janvier 2013, Salins a intégré la Municipalité de Sion. Les Salinsardes et les Salinsards avaient entériné ce rapprochement avec 91,4 % de oui. Il en était allé de même pour les Sédunoises et les Sédunois qui l’avaient approuvé à 84,6 %. Pour ce qui est des bourgeoisies, celle de Salins avait accepté la fusion avec son homologue à 72,5 %. Quant à ses voisins de Sion, ils l’avaient validée à 52,5 %. Ce sont près de 1 000 personnes qui avaient ainsi décidé de rejoindre la capitale et 540 bourgeois qui se sont unis à la structure équivalente de cette même cité. Outre ce rattachement, la proximité géographique de Salins a fortement contribué à attirer de nouveaux résidents.
Quand le bâtiment va…
De façon symptomatique, le secteur de la construction a connu un bel essor. Au préalable, trois ou quatre habitations y étaient bâties chaque année. Juste après la fusion, on en a dénombré entre 20 et 30. Aujourd’hui, le rythme s’est un peu apaisé. Un écoquartier de six villas est toutefois en cours d’édification au hameau d’Arvillard. Et au Saillen, ce sont 14 maisons qui vont sortir de terre. Cellesci seront chauffées par le gaz distribué par la Ville. Le prix du terrain reste plus abordable à Salins, même s'il commence à augmenter. La liaison prévue entre la gare CFF et le bas de la piste de l’Ours passera à l’ouest de ce secteur. Cette amélioration de l’offre en transports alimentera sans nul doute cette «Salinsmania».
LA PAROLE À CEUX QUI Y VIVENT
Norbert Rauber
«Je suis né à Sion, mais j’habite ici depuis l’âge de mes cinq ans. Mon père avait restauré une maison datant de 1788 à Pravidondaz. Je n’ai plus quitté le village», commente Norbert Rauber. Cet instituteur fraîchement retraité effectue toujours des remplacements et du coaching pour les étudiants de la Haute école pédagogique. Le Salins de ses jeunes années était typique de l’environnement rural d’altitude en Valais. Chaque famille possédait son coin de campagne et, souvent, du bétail. Neuf enfants sur dix n’allaient jamais en vacances. Durant leurs (très) longues pauses estivales qui s’étendaient de fin mai à début septembre, ils aidaient leurs parents aux travaux des champs. Parmi les loisirs figuraient le chant, le foot (le club local a disparu aujourd’hui) et bien sûr le ski. Rappelons que les champions internationaux Sylviane Berthod et Steve Locher sont natifs du lieu. «Dans l’ancienne école, il n’y avait qu’un seul fourneau à mazout par classe. Elle n’offrait que très peu de confort. Le nouveau centre scolaire avec ses grandes salles lumineuses et sa halle de gymnastique a métamorphosé la pratique de mon métier», souligne Norbert Rauber. Aujourd’hui, une population venue non seulement de Sion, mais aussi de Nendaz s’est établie dans l’un ou l’autre des quelque 15 hameaux qui composent Salins. Le panorama et la tranquillité constituent leurs principales motivations. Le seul bémol tient à l’espacement des différents quartiers, ce qui ne favorise pas la vie villageoise. Il existe bien un café, mais l’ouverture d’une épicerie serait souhaitable afin d’offrir un lieu de rencontre fixe où consolider ces liens.
Un nom à géométrie variable

Du point de vue purement administratif, les archives dont nous disposons font toutes référence à Salins en tant que commune et paroisse du District et du Décanat de Sion. Ces documents recensent par contre de nombreuses et subtiles variations de l’orthographe du nom de ce village. Ces mutations incluent successivement les déclinaisons «Salen» en 1227, «Salein» en 1232; «Salayn», «Saleyn» et Salens vers 1250, de même que «Salaig» à la fin du XIIe siècle. Puis, on croise «Salino» en 1308, «Salens» en 1333, «Saleyns» en 1338, «Salinis» en 1346, «Salins» en 1352, «Salens» en 1438 et «Sallens» en 1484. Par la suite, on rencontre tantôt les formes «Salens», «Sallens» et, rarement, «Salin». Notre contemporain «Salins» s'impose quant à lui à partir de 1831.
Claire-Lise Bonvin-Ecoffey
Elle n’est pas native du lieu, mais cette experte comptable indépendante vit tout de même depuis 1996 à Turin. Ce statut lui donne du recul par rapport aux évolutions récentes, à commencer par la fusion : «Même en tant qu’habitante de la Commune de Salins, je me suis toujours sentie à ma place à Sion. La capitale nous a accueillis à bras ouverts. Nous avons été entendus par les autorités qui se sont engagées en faveur de notre intégration», précise-t-elle. En sa qualité d’élue, puis de présidente du conseil général sédunois, Claire-Lise Bonvin-Ecoffey a pu suivre ce processus de près.
Mis à part les rares réticences de certains liées à la nécessité de se rendre en ville pour effectuer leurs démarches administratives, le bilan qu’elle-même en tire est très positif: «Nous sommes enchantés par l'encadrement scolaire que nous a apporté la fusion, ainsi que par les moyens dont des services tels que celui de l'édilité nous font bénéficier. Nos enfants ont maintenant accès à de multiples activités parascolaires. Un bus vient les chercher à Salins et les y ramène. La Ville de Sion a de surcroît mis à notre disposition l’ancienne poste comme salle pour nos sociétés locales. Nous la gérons nous-mêmes», se félicite-t-elle.

