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Associations
from Sion 21 n°14
by OCTANE
LA POLOGNE, SI LOINTAINE ET SI PROCHE
Si elle est peu connue de la majorité de nos concitoyens, la communauté polonaise de Sion y joue pourtant un rôle actif.
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Goût immodéré pour l’alcool et conservatisme religieux. Les Valaisans ne sont pas les seuls à devoir affronter certains préjugés. Les Polonais aussi. La réalité est pourtant bien différente. «Plusieurs prêtres de notre pays œuvrent dans les environs, mais nous sommes une structure purement laïque. Notre mission consiste à diffuser notre culture. Nous travaillons au renforcement des échanges entre nos communautés», explique Anita Siennicka Boulé qui préside l’Association polonaise du Valais, créée en 2016 à l’initiative de mères de famille qui se sont rencontrées dans le cadre de l’école polonaise. L’an passé, l’Association polonaise en Valais a proposé un cycle de trois soirées cinéma. Ces séances ont connu un vif succès, attirant bon nombre de Sédunois. La culture constitue, de fait, un vecteur qui favorise grandement les échanges. Aux yeux de beaucoup pourtant, la barrière de la langue paraît infranchissable. «Ce n’est pas le cas. Tout un chacun peut prendre des cours à Sion. Nos enfants ont la possibilité d’apprendre et de pratiquer la langue à l’école polonaise qui fonctionne depuis de nombreuses années», ajoute Ania Clivaz-Feliksiak.
> Anita Siennicka Boulé (gauche) et Malgorzata
Cybulslea Cerruti représentantes de la communauté polonaise de Sion et entourées d'objets symboliques de la Pologne, issus de l'artisanat et de collages traditionnels © Louis Dasselborne
Des migrations successives
L’an passé la Suisse et la Pologne ont célébré les 100 ans de leurs relations diplomatiques, instaurées un an après l’indépendance du pays. A cette occasion le président de la Confédération Ueli Maurer avait été accueilli à Varsovie par son homologue, le président Andrzej Duda. Comme souvent, les vagues de migrants se sont calquées sur les épisodes charnières de l’Histoire. Ainsi à Sion, ce sont les militaires internés durant la Seconde Guerre mondiale qui ont figuré parmi les premiers arrivants. Il s’agissait de simples soldats, pour la plupart des paysans, originaires de régions pauvres. Les officiers, eux, étaient placés dans des villes plus importantes où beaucoup poursuivaient leurs études. Après 1981, plusieurs familles polonaises ont émigré en Valais. Leur pays était alors en état de siège. En 1989, la chute du mur de Berlin - qui avait été amorcée par l’émergence du syndicat Solidarité - a encore davantage ouvert les frontières. «Longtemps, la Suisse est restée difficile d’accès pour nous. Ce n’est qu’avec l’entrée de la Pologne dans l’Union européenne en 2005 que nous avons pu nous y rendre de façon plus aisée», note Ania Clivaz-Feliksiak qui appartient, elle aussi, à l’association. Le programme d’échanges estudiantin Erasmus a été l’occasion de séjours prolongés en Pologne pour de jeunes Valaisans et Sédunois. Des rencontres s’y sont faites, donnant naissance à des couples mixtes dont beaucoup se sont installés en Valais.
Une diaspora très active
Il n’existe pas de recensement précis du nombre de ressortissants polonais vivant en Valais. Une partie d’entre eux sont des saisonniers employés dans l’agriculture. Ils seraient près de 600 au bénéfice d’un permis temporaire à travailler dans nos vignes et nos vergers, en particulier dans la région de Martigny et de Saxon. Comme ils maîtrisent mal le français, ces ouvriers s’intègrent peu à la vie locale. À l’inverse, Sion abrite une diaspora qui, elle, cherche à prendre une part active dans notre ville. Bon nombre de ces personnes évoluent dans le secteur de la santé. «Nous entretenons d’excellentes relations avec la Municipalité. Depuis trois ans, nous participons avec beaucoup de plaisir aux rencontres interculturelles Redida et au Chemin des Crèches», confirme Anita Siennicka Boulé.
D’autres connexions, parfois plus surprenantes, ont été développées. Nos bûcherons entretiennent notamment des contacts suivis avec leurs confrères de la patrie de Chopin et de Marie Curie. Des musiciens se produisent chez nous et plusieurs étudiants de haut niveau fréquentent la HES-SO ou la filiale de l’EPFL.
Le souvenir de Jean-Paul II
Ces passerelles vont en se multipliant. Peut-être que cette intensification des relations n’est pas étrangère à un geste fort dont un Polonais demeuré célèbre a gratifié notre cité. Lors de sa venue en terre sédunoise en juin 1984, le pape Jean-Paul II avait élevé l’église de Valère à la dignité de basilique, dans l’un de ces élans du cœur qui le caractérisaient. Lui-même issu d’une région de montagne, le souverain pontife avait été subjugué par nos paysages. Ce coup de foudre, ses compatriotes le perpétuent aujourd’hui.