grandeur Nature OUTRE-MER ĂDITO PAR ALI MADI, PRĂSIDENT DE LA FĂDĂRATION MAHORAISE DES ASSOCIATIONS ENVIRONNEMENTALES (FMAE) - CPIE MAORE
Le samedi 14 dĂ©cembre, alors que Chido sâabattait sur Mayotte, jâĂ©tais Ă La RĂ©union. Jây Ă©nonçais un discours pour les 40 ans du Conseil de la culture, de lâĂ©ducation et de lâenvironnement (CCEE) de La RĂ©union, en tant que vice-prĂ©sident du CCEE de Mayotte. MalgrĂ© lâhonneur de prendre la parole devant mes amis rĂ©unionnais, mon cĆur Ă©tait à « MaorĂ© ».
Chido nâest pas un cyclone comme les autres, mais, comme lâattestent les mĂ©tĂ©orologues, un cyclone tropical intense tel que Mayotte nâen avait plus connu depuis 90 ans. Le souvenir qui sâen approche le plus dans la mĂ©moire des Mahorais remonte Ă lâannĂ©e de mes huit ans, 1984, lorsque Kamisy avait frappĂ© notre Ăźle de plein fouet.
DĂšs le 15 dĂ©cembre, avec mes collĂšgues de la DĂ©lĂ©gation de Mayotte Ă La RĂ©union et dâautres structures, nous organisions les premiers circuits logistiques permettant dâacheminer des aides dâurgence sur lâĂźle. Je me suis envolĂ© vers Mayotte le 18. DĂšs mon arrivĂ©e, cela a Ă©tĂ© un cauchemar. Plusieurs de mes proches restaient injoignables, nous ne savions rien dâeux.
Avant dâarriver Ă destination, je ne pouvais que mâimaginer les choses. Sur place, je nâai presque rien reconnu. PrĂšs de lâaĂ©roport, il nây avait plus lâimmense baobab accolĂ© depuis toujours au cimetiĂšre, tout avait Ă©tĂ© dĂ©truit, Ă commencer par la tour de contrĂŽle. Mon fils a prononcĂ© cette phrase : « Papa, ça ressemble Ă la Palestine ». Partout, des bombes semblaient avoir Ă©clatĂ©, mon Ăźle ressemblait Ă un pays en guerre.
AprĂšs Kamisy, câĂ©tait diffĂ©rent, car en 1984, nous avions des habitations et un cadre de vie mieux adaptĂ©s, et les nombreux espaces arborĂ©s amortissaient les vents. Les noix de coco, alors en abondance, avaient Ă©tanchĂ© la soif et nourri la population pendant les premiĂšres semaines post-cyclone. Aujourdâhui, on trouve de moins en moins de manguiers, dâarbres Ă pain ou de cocotiers Ă Mayotte. Les jours qui ont suivi Chido, les habitants ont eu faim et ont eu peur de la famine. Quand jâai vu tous ces amas de tĂŽles jonchĂ©s au sol sur les pentes de KawĂ©ni et ailleurs, ces bangas effondrĂ©s, ces matelas Ă©ventrĂ©s, ces panneaux solaires brisĂ©s, ces arbres dĂ©racinĂ©s, cela formait dans le paysage dâĂ©tranges amas trĂšs colorĂ©s : rouge, vert, bleu, jaune, or, marron... Depuis, mon esprit rejette en quelque sorte les couleurs, comme sâil les avait associĂ©es au malheur et Ă toutes ces vies perdues.
TrĂšs vite, psychologiquement, jâai eu besoin dâaller chercher mes outils, ma tronçonneuse, dâenfiler mes gants. Il fallait venir en aide aux gens. Comme beaucoup dâautres, jâai achetĂ© Ă la pharmacie des mĂ©dicaments, Ă la boutique des denrĂ©es alimentaires, pour aider, me sentir dans la compassion et le partage, dans la « musada » si chĂšre Ă notre culture, et qui signifie « entraide » en shimaorĂ©.
MAYOTTE, BLESSĂE MAIS DEBOUT Vous savez, les Mahorais ont en eux une singuliĂšre capacitĂ© de rĂ©silience. AprĂšs lâĂ©tat de choc, câest une force positive et combattante qui les a animĂ©s. Les Mahorais, historiquement, ont subi bon nombre de catastrophes, des razzias perpĂ©trĂ©es par des guerriers venus de Madagascar en pirogue, etc. Forts de leur tempĂ©rament dĂ©terminĂ© et de leur force collective, ils ont rapidement pu trouver les ressources et lâorganisation nĂ©cessaires. En fait, nous avons renouĂ© avec notre esprit communautaire. Je salue ici le courage, le dĂ©vouement de tous les bĂ©nĂ©voles qui Ćuvrent sans relĂąche sur le terrain, dans les jours qui ont suivi Chido, au plus prĂšs des plus dĂ©munis.
LA COOPĂRATION RĂGIONALE Cette « calamitĂ© naturelle » renforce lâune de mes rĂ©flexions. Je pense quâil est plus que jamais nĂ©cessaire de coopĂ©rer avec les pays voisins â Madagascar, lâAfrique de lâEst et du Sud â de façon Ă favoriser un acheminement plus rapide des aides. Il nous faut rĂ©ussir Ă structurer des rĂ©seaux solides. Si Mayotte investissait par exemple dans lâagriculture Ă Madagascar, nous pourrions bĂ©nĂ©ficier dâune meilleure autonomie alimentaire en cas de catastrophe naturelle. Cette coopĂ©ration rĂ©gionale que jâappelle de mes vĆux ne sâarrĂȘterait pas au domaine alimentaire : il conviendrait dâĂ©tendre entre tous ces pays et Mayotte les flux migratoires de connaissances et de compĂ©tences pour mieux sâadapter Ă ces phĂ©nomĂšnes climatiques. Dans notre rĂ©gion, le peuple malgache, notamment, a une forte expĂ©rience des cyclones qui le conduit, par exemple, Ă disposer sur les toits en tĂŽle de lourds sacs de sable afin dâĂ©viter quâils ne sâenvolent... Les mĂ©thodes employĂ©es sont multiples et les apports rĂ©ciproques entre nos pays devraient, je crois, lâĂȘtre Ă©galement.
LES CRAINTES DES AGRICULTEURS En tant quâapiculteu mahorais, jâai perdu avec Chido 90 % de mes ruches. Et je ne suis quâun exemple parmi tant dâautres. La FMAE-CPIE Maore rĂ©unit 32 associations adhĂ©rentes et une soixantaine de structures qui gravitent dans tous les villages de lâĂźle. AprĂšs Chido, nous avons rĂ©uni nos agriculteurs, qui nous disent avoir quasiment tout perdu. De plus, des forĂȘts entiĂšres ont Ă©tĂ© mises Ă nu par le cyclone. Or, dans ces zones protĂ©gĂ©es devenues vierges, sans couvert vĂ©gĂ©tal, les agriculteurs craignent que des individus ne sâaccaparent les terres illĂ©galement pour y faire pousser des cultures. Ils redoutent aussi une aggravation des pĂ©nuries dâeau Ă Mayotte, lâeau de pluie nâĂ©tant plus retenue par les systĂšmes racinaires des arbres. Je pense que lâurgence est de replanter au plus vite dans ces espaces forestiers ravagĂ©s par Chido. Sinon, la terre va continuer de ruisseler jusquâau lagon...
Nous appelons ainsi les autoritĂ©s Ă travailler sur un plan pluriannuel de reconquĂȘte de ces espaces forestiers sur la base des documents dĂ©ja existants, comme le ShĂ©ma DĂ©partemental des Espaces Naturels Sensibles, le SchĂ©ma dâEntretien et de Restauration des RiviĂšres Ă enjeux Ă Mayotte ou le pacte des acteurs de lâenvironnement, Ă finaliser. Nous pourrions copiloter la logistique de ce plan, mettre en rĂ©seau des pĂ©piniĂ©ristes locaux, etc.
UN BESOIN URGENT DâINGĂNIERIE Je viens de participer Ă une rĂ©union en distanciel avec un rĂ©seau dâagriculteurs des Antilles, qui nous a fait part de retours dâexpĂ©riences Ă la suite dâIrma. Quelle ingĂ©nierie ont-ils dĂ©veloppĂ©e, quelle mĂ©thodologie ? Lâaccent a Ă©tĂ© mis sur des aspects pratiques, facilement reproductibles. Par exemple, dĂšs les premiers jours aprĂšs Irma, nos confrĂšres antillais se sont aperçus que les espĂšces exotiques envahissantes (EEE) prenaient le dessus sur la flore indigĂšne et endĂ©mique. Or, si les EEE sont arrachĂ©es dâun coup, on met la terre Ă nu. Câest pourquoi un plan de contrĂŽle doit ĂȘtre planifiĂ© sur quatre Ă cinq ans. La rĂ©union a aussi mis lâaccent sur lâimpossibilitĂ© de tout sauver â il faut lâaccepter â et lâimportance de focaliser notre attention sur des plantes Ă enjeux, que nous allons recenser. Par ailleurs, nous serons surpris de voir que certains arbres indigĂšnes, que lâon croit dĂ©truits, vont se rĂ©gĂ©nĂ©rer... Autant dâexpĂ©riences fructueuses pour nous Ă Mayotte.
Pour conclure, les associations environnementales de Mayotte sont prĂȘtes Ă donner beaucoup dâelles-mĂȘmes pour la reconstruction de lâĂźle. Mais nous manquons dâingĂ©nierie. Nous avons besoin de monter en compĂ©tence rapidement. Nous avons besoin de personnes qui nous aident Ă monter des projets soutenus par lâEurope. En cela, je crois beaucoup Ă la constitution de groupes de travail RĂ©union-Mayotte pour nous aider Ă nous relever de tels Ă©vĂ©nements climatiques extrĂȘmes.
Ali Madi
FAIRE UN DON à LA FONDATION DE FRANCE pour venir en aide aux populations de Mayotte touchées par le cyclone Chido : LIEN ICI
La faune a Ă©galement Ă©tĂ© rudement touchĂ©e par Chido, Ă lâimage des makis de Mayotte et des roussettes, des pollinisateurs essentiels Ă la reproduction de nombreuses plantes. © StĂ©phanie Castre
ACTU OUTRE-MER Les ouvrages de CaraĂŻbĂ©ditions sont proposĂ©s Ă la vente dans les rayons des librairies et grandes surfaces dâoutre-mer.
CARAĂBĂDITIONS, UNE MAISON DâĂDITION SPĂCIALISĂE EN OUTRE-MER
Depuis leur crĂ©ation en 2007 aux Antilles, les Ă©ditions CaraĂŻbĂ©ditions publient des ouvrages qui ont comme dĂ©nominateur commun un lien avec les territoires dâoutre-mer français et Ă©trangers, que ce soit au travers des langues locales, de lâorigine de leurs auteurs ou des thĂ©matiques et histoires qui se dĂ©roulent dans ces territoires de lâailleurs. CaraĂŻbĂ©ditions a Ă©tĂ© la premiĂšre maison dâĂ©dition Ă publier des ouvrages mondialement connus traduits en crĂ©ole de Guadeloupe, Martinique, Guyane ou La RĂ©union tels que Le Petit Prince dâAntoine de Saint-ExupĂ©ry, le roman LâĂtranger dâAlbert Camus, ou encore les BD Tintin de HergĂ©.
Dans ce numĂ©ro dâOUTRE-MER grandeur Nature, notre rĂ©dactrice Lucie Labbouz, qui vit en Guadeloupe, sâest intĂ©ressĂ©e (pages 14 et 15) au lancement du label Ă©cologique de CaraĂŻbĂ©ditions « Livres pour apprendre Ă protĂ©ger lâoutre-mer ». La nouvelle collection « Les petits hĂ©ros de la planĂšte » propose notamment aux plus jeunes lecteurs des albums Ă tirettes interactifs, qui favorisent, de maniĂšre ludique, une initiation aux questions environnementales.
LANCEMENT DU PROJET MAHEWA, DĂDIĂ AUX CANICULES MARINES DANS LES OUTRE-MER DU PACIFIQUE PortĂ© par lâIRD, avec lâappui de lâIfremer, en partenariat avec le CNRS, lâInstitut Louis MalardĂ© (ILM) et MĂ©tĂ©oFrance, le projet MaHeWa (Marine HeatWaves) vise Ă mieux comprendre les menaces que reprĂ©sentent les canicules marines en Nouvelle-CalĂ©donie, en PolynĂ©sie française et Ă Wallis-et-Futuna.
Associant lâUniversitĂ© de la Nouvelle-CalĂ©donie, lâInstitut agronomique nĂ©o-calĂ©donien (IAC) et lâUniversitĂ© de Bretagne occidentale (UBO), ce nouveau projet a Ă©tĂ© lancĂ© le 27 novembre Ă la reprĂ©sentation de lâIRD Ă NoumĂ©a, en prĂ©sence dâexperts transdisciplinaires âocĂ©anographes, biologistes, anthropologues, Ă©conomistes â et de partenaires locaux.
Ăpisodes de rĂ©chauffement extrĂȘme de lâocĂ©an, les canicules marines menacent gravement les Ă©cosystĂšmes et les sociĂ©tĂ©s insulaires du Pacifique en provoquant un blanchissement des coraux, une mortalitĂ© massive dâespĂšces marines et la prolifĂ©ration dâalgues toxiques. MaHeWa veut renforcer la rĂ©silience de ces territoires face Ă ces bouleversements climatiques grĂące Ă des solutions basĂ©es sur des connaissances scientifiques partagĂ©es, en collaboration avec les communautĂ©s locales et les gestionnaires. Ce projet cherche ainsi Ă mieux comprendre les impacts des canicules marines pour rĂ©pondre et sâadapter aux dĂ©fis quâelles posent aux Ă©cosystĂšmes et aux communautĂ©s insulaires dĂ©pendantes des ressources maritimes.
+ dâinfo ici : https://mahewa.fr/
Les Ă©pisodes de tempĂ©ratures ocĂ©aniques extrĂȘmes peuvent avoir des effets dĂ©vastateurs sur les Ă©cosystĂšmes marins. © IRD
Ces derniÚres années, la production de pommes de terre a fortement augmenté à Saint-Pierre-et-Miquelon. © Cacima
SAINT-PIERREET-MIQUELON UN NOUVEAU PLAN DE DĂVELOPPEMENT AGRICOLE DURABLE S i le nombre d â exploitant S a doublĂ© entre 2019 et 2023, l â agriculture S aint - pierrai S e et miquelonnai S e re S te trĂš S entravĂ©e par un manque d â accĂš S au foncier , de S norme S non adaptĂ©e S et de S S urcoĂ»t S de production u n nouveau plan de dĂ©veloppement agricole durable 2024-2028 a Ă©tĂ© S ignĂ© en octobre pour rĂ©pondre Ă ce S problĂ©matique S
Une orientation « plus pragmatique » qui part des « demandes du terrain » pour dĂ©velopper lâagriculture Ă Saint-Pierre-et-Miquelon. Le 27 octobre, la prĂ©fecture et la CollectivitĂ© territoriale ont signĂ© le prochain Plan de dĂ©veloppement agricole durable (PDAD) de lâarchipel.
En vigueur jusquâen 2028, cette feuille de route de la filiĂšre agricole a pour objectif de renforcer la souverainetĂ© alimentaire du territoire, alors quâĂ ce jour la production locale ne couvre que 3 % des besoins. Surtout, ce chiffre faible nâa presque pas bougĂ© ces derniĂšres annĂ©es, malgrĂ© un doublement du nombre dâexploitants â ils sont passĂ©s de quatre Ă huit âpendant le prĂ©cĂ©dent PDAD (2019-2023). Si la production de pommes de terre, de salade ou dâĆufs a sensiblement augmentĂ©, la production de volaille de chair a fortement dĂ©clinĂ© tandis que la filiĂšre ovine a disparu, le seul atelier existant ayant cessĂ© cette activitĂ©.
DES COĂTS DE PRODUCTION TROP ĂLEVĂS « Le nombre dâinstallĂ©s reste trop faible, mais ce nâest pas le seul frein », analyse Cassandre Bourgeois, conseillĂšre agricole Ă la Cacima 1. « Nous pĂątissons dâune double insularitĂ©, la plupart des agriculteurs Ă©tant installĂ©s Ă Miquelon, alors que le marchĂ© et le port principal se trouvent Ă Saint-Pierre. Cela rend lâimportation des moyens de production comme les poussins ou les semences, trĂšs longue et coĂ»teuse. »
Pour faire baisser ces coĂ»ts de production, plusieurs pistes sont Ă©voquĂ©es dans le PDAD, comme la mise en place dâoutils collectifs partagĂ©s entre les diffĂ©rents exploitants ou la crĂ©ation dâun systĂšme de fret pour les produits locaux entre Saint-Pierre et Miquelon.
activitĂ©s : production de fromages et prĂ©parations fromagĂšres, caprins, poulets de chair et accueil Ă la ferme. Le nouveau PDAD vise Ă limiter les contraintes qui se posent Ă la filiĂšre dans son dĂ©veloppement, Ă travailler sur une Ă©conomie dâĂ©chelle et Ă favoriser le dĂ©veloppement agricole. © Cacima
Mais, une fois que les porteurs de projets motivĂ©s ont Ă©tĂ© identifiĂ©s, encore faut-il avoir des terres oĂč les installer. Or, si une grande partie des terres de la plaine tourbeuse de Miquelon a Ă©tĂ© requalifiĂ©e en foncier agricole â une demande de la profession â celles-ci ne sont pas arables pour autant. Il faut encore restructurer les sols afin de pouvoir y planter une prairie ou des lĂ©gumes, ce qui demande de lâinvestissement.
« Câest la CollectivitĂ© qui a la propriĂ©tĂ© de lâessentiel du foncier. La rĂ©habilitation en terres agricoles relĂšve donc de sa compĂ©tence. Câest une demande de la filiĂšre et un axe fort du prochain PDAD. Sans cela, on ne pourra pas Ă©tendre les exploitations existantes ni installer de nouvelles personnes », nous confirme Cassandre Bourgeois.
ANTICIPER LE DĂRĂGLEMENT CLIMATIQUE Sur les dix objectifs que sâest fixĂ© le PDAD, se trouve aussi la prĂ©cision du statut dâagriculteur selon des critĂšres rĂ©pondant aux particularitĂ©s locales. Ce statut, bien quâexistant dans les textes, ne fait pas lâobjet de dĂ©cret dâapplication, ce qui, concrĂštement, freine lâobtention de certaines aides comme des dotations Ă lâinstallation ou des subventions spĂ©cifiques aux agriculteurs exerçant Ă titre dâactivitĂ© principale.
Pour assurer son dĂ©veloppement, lâagriculture miquelonnaise doit Ă©galement anticiper les dĂ©fis de demain comme le dĂ©rĂšglement climatique. « Il nâexiste pas de systĂšme assurantiel pour les exploitations et les cultures comme dans le reste du pays. Or, nous savons quâavec le dĂ©rĂšglement climatique, nous serons de plus en plus confrontĂ©s Ă des vents exceptionnellement violents, tandis que la plaine de Miquelon est de plus en plus exposĂ©e aux inondations », analyse Cassandre Bourgeois.
La concurrence â impossible Ă tenir â avec le Canada et les importations venues de lâHexagone font aussi partie des prĂ©occupations, notamment pour la culture de pomme de terre, produit trĂšs consommĂ© pour lequel les Saint-Pierrais et Miquelonais ne font pas vraiment preuve de patriotisme Ă©conomique. Le PDAD prĂ©voit ainsi « dâaccompagner la commercialisation des produits locaux », en menant un travail de sensibilisation auprĂšs des habitants.
MalgrĂ© ces difficultĂ©s structurelles, la crise qui secoue lâagriculture hexagonale nâa pas de rĂ©percussions locales, essentiellement en raison des diffĂ©rences de normes et de contexte. « On a des problĂšmes, comme partout, notamment avec la gestion de lâabattoir qui est assez compliquĂ©e », rappelle Cassandre Bourgeois. « Mais le dialogue reste apaisĂ©, facilitĂ© par le fait que ce soit un petit milieu », conclut-elle.
Rédaction : Enzo Dubesset
Exploitation Saveurs FermiÚres située dans la zone du Calvaire à Miquelon et créée en 2022 pour exercer ces
Si la filiĂšre ovine a aujourdâhui disparu de lâarchipel, deux Ă©levages caprins perdurent Ă Miquelon. Historiquement positionnĂ© sur le secteur de la pĂȘche industrielle, le territoire essaie ainsi de sâouvrir Ă de nouvelles perspectives de dĂ©veloppement en matiĂšre dâagriculture. © Cacima
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TERRE OUTRE-MER LES BALEINES Ă BOSSE, DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON AUX ANTILLES JoĂ«l Detcheverry, dit Coco, a tout de suite reconnu le mammifĂšre marin quâil vient de photographier. Ce passionnĂ© de la mer fait de la photo-identification pour mieux connaĂźtre les baleines de Saint-Pierre-etMiquelon et, en particulier, les baleines Ă bosse.
â Il faut savoir que chaque queue de baleine est unique, câest comme les empreintes digitales. Quand tu vois une queue noire avec telle tache, 10 ans aprĂšs, tu vas retrouver la mĂȘme tache au mĂȘme endroit. Le but, câest de prendre en photo la nageoire caudale des baleines. Et ensuite, Ă travers nos bases de donnĂ©es, on compare les photos avec celles quâon a dĂ©jĂ prises ici. On en a Ă peu prĂšs 1500, je crois, donc on voit celles qui reviennent rĂ©guliĂšrement. On fait du matching dâimages. La photo-identification est pratiquĂ©e sur la route de migration des baleines, depuis les Ăźles au large du Canada, puis aux ĂtatsUnis et dans les Antilles Ă©galement. Tiens, il y en a une autre lĂ -bas, juste un peu plus loin, qui souffle. On va aller la prendre en photo.
En croisant leurs clichĂ©s, les photographes cherchent Ă identifier un mĂȘme spĂ©cimen Ă deux endroits diffĂ©rents. Cette mĂ©thode permet de mieux connaĂźtre les dĂ©placements des baleines Ă bosse. Lyne Morissette, biologiste marine, professeure Ă lâInstitut des sciences de la mer de Rimouski, au Canada :
â Les baleines Ă bosse qui sont dans le Saint-Laurent, au QuĂ©bec, par exemple Ă Tadoussac pendant lâĂ©tĂ©, elles vont passer par Saint-Pierre, puis par la cĂŽte
est des Ătats-Unis et elles vont aller dans la CaraĂŻbe : Guadeloupe, Martinique, RĂ©publique dominicaine... La baleine Ă bosse est, parmi les baleines, probablement celle qui a le comportement le plus exubĂ©rant. Elle est facile Ă voir. Quiconque a eu la chance de voir une baleine Ă bosse une fois dans sa vie va sâen souvenir pour le restant de ses jours. Donc si on veut avoir la prĂ©tention de faire une diffĂ©rence pour cette espĂšce-lĂ , et bien, il faut travailler ensemble.
Travailler pour que les migrations des baleines soient plus sĂ»res, câest aussi le souhait de Roger Etcheberry, Ă©cologue basĂ© Ă Saint-Pierre-et-Miquelon.
â Les baleines Ă bosse, dans le sud, ne mangent pratiquement pas pendant plusieurs mois. Elles sont occupĂ©es Ă sâaccoupler, Ă mettre bas, etc. Comme ce sont des mammifĂšres, elles allaitent les jeunes. Elles ont encore assez dâĂ©nergie pour remonter vers nos eaux pour se nourrir. Quand elles remontent par ici, ce sont des machines Ă manger ! LĂ , elles ont besoin de se refaire de la graisse pour passer lâhiver suivant. Par contre, le plus gros problĂšme, je crois, est celui des collisions. Des baleines sont massacrĂ©es : traces dâhĂ©lices sur le dos, la moitiĂ© de la queue coupĂ©e...
Collisions avec les bateaux, pollution, empĂȘtrement dans les engins de pĂȘche : les menaces qui pĂšsent sur les cĂ©tacĂ©s sâavĂšrent nombreuses, dâoĂč lâintĂ©rĂȘt dâĂ©tablir des aires marines protĂ©gĂ©es dĂ©diĂ©es Ă la prĂ©servation des mammifĂšres marins. Aux Antilles, le sanctuaire Agoa est un dĂ©but de rĂ©ponse.
Visuel
: © Valentine Dubois
SAINTBARTHĂLEMY LA MYGALE DE LâĂLE PORTE ENFIN UN NOM ! bien connue deS habitantS de Saint-barth, cette mygale prĂ© S ente S ur la petite Ăźle antillai S e de 21 km 2 po SS Ă©dait ju S que - lĂ un S tatut incertain depuiS novembre 2024, une publication Scientifique lui attribue un nom : la mygale du banc d âanguilla.
Une publication scientifique corĂ©digĂ©e notamment par lâAssociation de recherche en arachnologie et lâAgence territoriale de lâenvironnement (ATE), vient de confirmer et rĂ©tablir le nom dâorigine de cette araignĂ©e, attribuĂ© en 1894, mais qui avait entre-temps Ă©tĂ© rĂ©trogradĂ© comme synonyme dâune autre espĂšce frĂ©quentant lâĂźle dâAntigua.
UNE MYGALE RĂPUTĂE SANS DANGER POUR LâHOMME Cette araignĂ©e, dont le corps atteint 5 centimĂštres de long, nâest pas agressive et son venin nâest pas considĂ©rĂ© comme dangereux pour lâhomme. « Si vous en croisez une chez vous, ne la tuez pas et remettez-lĂ dans la nature », tel est le message que vĂ©hicule lâATE de Saint-BarthĂ©lemy pour inciter Ă protĂ©ger lâespĂšce. RĂ©daction : StĂ©phanie Castre
La mygale du Banc dâAnguilla (Cyrtopholis antillana) est prĂ©sente uniquement sur les Ăźles de Saint-BarthĂ©lemy, Saint Martin et Anguilla.
(Urva auropunctata) sâintroduisant dans un nid de ponte de tortue imbriquĂ©e Ă Saint-Martin. ©
SAINT-MARTIN ILLUSTRATION DE LâIMPACT DâUNE ESPĂCE NON-NATIVE SUR LA FAUNE MENACĂE n on naturellement prĂ© S ente S S ur l â Ăźle , la faune et la flore exotique S peuvent gĂ©nĂ©rer de S con S Ă©quence S dommageable S pour le S Ă©co S yS tĂšme S du territoire , en mettant notamment en pĂ©ril de S e S pĂšce S indigĂšne S dĂ©jĂ en danger d â extinction . c ette petite mangou S te indienne photographiĂ©e S ur un nid de ponte de tortue imbriquĂ©e e S t un exemple de ce phĂ©nomĂšne
Si de nombreuses espĂšces endĂ©miques des CaraĂŻbes subissent aujourdâhui les impacts dâespĂšces exotiques envahissantes (EEE), « pour dâautres, plus largement prĂ©sentes dans le monde, mais Ă statut de conservation prĂ©occupant, câest une phase clĂ© de leur cycle de vie qui peut ĂȘtre menacĂ©e par la prĂ©sence dâune EEE ou la divagation dâespĂšces domestiques en milieu naturel », relate la RĂ©serve naturelle nationale de Saint-Martin. Tel est le cas de la tortue imbriquĂ©e, classĂ©e par lâUnion internationale pour la conservation de la nature (UICN) parmi les reptiles en danger critique dâextinction dans le monde, et dont les plages de Saint-Martin hĂ©bergent des sites de ponte. Ă titre dâexemple, « cette problĂ©matique rĂ©currente et parmi les premiĂšres causes mondiales dâĂ©rosion de la biodiversitĂ© insulaire est ici illustrĂ©e par la prĂ©sence dâune
mangouste indienne, venue tenter de consommer quelques Ćufs de cette tortue imbriquĂ©e encore en action de ponte sur notre littoral », poursuit la RĂ©serve.
IRONIE DE LâHISTOIRE... Ă la fin du XIXe siĂšcle, la petite mangouste indienne avait Ă©tĂ© introduite par lâhomme Ă Saint-Martin et dans les « Ăźles Ă sucre » des Antilles pour lutter contre un invasif ravageur des plantations : le rat noir (Rattus rattus). Or, ce mammifĂšre carnivore opportuniste sâattaquant aux reptiles, oiseaux, amphibiens... fait lui-mĂȘme partie des espĂšces animales les plus envahissantes du globe.
Rédaction : Stéphanie Castre
Petite mangouste indienne
RNNSM
La tortue imbriquĂ©e (Eretmochelysimbricata) subit les attaques de la petite mangouste indienne, qui dĂ©vore ses Ćufs. © RNN de Saint-Martin
LâIFRECOR DĂVELOPPE LA CARTOGRAPHIE AU SERVICE DES GESTIONNAIRES DE MILIEUX MARINS l â i nitiative françai S e pour le S rĂ©cif S corallien S ( ifrecor ) S â e S t fixĂ© pour objectif de crĂ©er de S guide S mĂ©thodologique S de cartographie S thĂ©matique S â habitat S , u S age S , pre SS ion S âS ur le S milieux rĂ©cifaux , Ă l â intention de S ge S tionnaire S dan S le S territoire S ultramarin S
Dans le cadre de son 5e programme national 20222026, lâIFRECOR articule ses actions autour de quatre grands axes stratĂ©giques. Parmi eux, lâaxe « connaĂźtre et comprendre pour mieux gĂ©rer » inclut le thĂšme « classification et cartographie des habitats rĂ©cifaux ». Il sâagit notamment de proposer aux gestionnaires et aux services de lâĂtat des outils dâaide Ă la dĂ©cision, parmi lesquels les cartes thĂ©matiques, qui reprĂ©sentent des types prĂ©cis de donnĂ©es.
SIMPLIFIER LA COMPLEXITĂ DES MILIEUX LâintĂ©rĂȘt premier dâune carte est de reprĂ©senter schĂ©matiquement, et en miniature, toute la complexitĂ© dâun territoire, pour faciliter sa comprĂ©hension et les prises de dĂ©cisions. Les cartes dâhabitat ou dâĂ©tat de santĂ© du milieu marin aident Ă caractĂ©riser lâĂ©cosystĂšme Ă©tudiĂ© et, croisĂ©es avec des cartes des pressions et dâusages, Ă quantifier les impacts potentiels des activitĂ©s humaines et les conflits dâusages sây exerçant.
AmĂ©liorer, mobiliser et valoriser les connaissances sur la biodiversitĂ© est lâun des objectifs de PatriNat, centre national dâexpertise et de donnĂ©es sur le patrimoine naturel. Depuis 2020, une nouvelle dynamique a Ă©tĂ© amorcĂ©e autour des typologies dâhabitats marins dans les territoires dâoutre-mer français. Elle provient dâune volontĂ© dâamĂ©liorer les connaissances sur la biodiversitĂ© et notamment sur les habitats, Ă lâinstar de ce qui a pu ĂȘtre rĂ©alisĂ© pour lâHexagone. De ce fait, lâIFRECOR Ćuvre depuis plusieurs annĂ©es Ă la construction de typologies dâhabitats marins et Ă la rĂ©alisation de cartes reprĂ©sentant ces habitats. Par exemple, la carte des habitats marins cĂŽtiers de Martinique (0 Ă -40 mĂštres) a Ă©tĂ© publiĂ©e en 2024, de mĂȘme que la carte de lâensemble des habitats marins cĂŽtiers â rĂ©cifaux ou non â de La RĂ©union.
Le but recherchĂ© est de poursuivre lâĂ©laboration de cartes dâhabitats pour les collectivitĂ©s dâoutre-mer ne disposant pas de carte rĂ©cente.
DES CARTES NORMALISĂES ET PARTAGĂES La premiĂšre phase de ce travail a consistĂ© Ă publier un guide afin de proposer une mĂ©thode de production cartographique permettant aux acteurs des territoires de disposer dâoutils communs et de cartes normalisĂ©es. Sâil existe en effet de nombreuses maniĂšres de figurer spatialement un milieu naturel, notamment avec lâarrivĂ©e de lâintelligence artificielle, il est nĂ©cessaire de disposer dâune mĂ©thodologie robuste, Ă©prouvĂ©e, et surtout partagĂ©e Ă lâĂ©chelle dâun territoire â et plus largement au niveau mondial â pour servir de support aux Ă©changes entre les diffĂ©rents acteurs.
Les travaux de lâIFRECOR portent aujourdâhui sur le stockage des cartes au format SIG pour quâelles puissent ĂȘtre partagĂ©es et rĂ©utilisĂ©es librement dans les territoires ultramarins, grĂące au portail Sextrant 1 GĂ©rĂ©e par lâIfremer, Sextant est une Infrastructure de donnĂ©es gĂ©ographiques (IDG) marines et littorales conçu pour « documenter, diffuser et promouvoir un catalogue de donnĂ©es relevant du milieu marin ».
INTERVIEW CROISĂE JEAN-BENOĂT NICET, EXPERT EN ENVIRONNEMENT MARIN, COFONDATEUR DU GIE MAREX, ET SĂBASTIEN GRĂAUX, DIRECTEUR DE LâAGENCE TERRITORIALE DE LâENVIRONNEMENT (ATE) DE SAINT-BARTHĂLEMY
⹠La cartographie est-elle un outil efficace pour protéger nos territoires ?
Jean-BenoĂźt Nicet - Je dirais mĂȘme que câest un outil indispensable ! On observe, en outre-mer, de plus en plus dâinteractions en milieu marin. Il me semble difficile de se passer de cartes qui reprĂ©sentent les habitats, les usages â que sont la pĂȘche, les loisirs ou le commerce â mais aussi les pressions issues des bassins versants, car câest en croisant toutes ces informations que les dĂ©cideurs pourront prendre les meilleures dĂ©cisions possibles pour leurs territoires.
SĂ©bastien GrĂ©aux - De notre point de vue de gestionnaire de la RĂ©serve naturelle de Saint-BarthĂ©lemy, nous avons besoin de lâoutil cartographique dans notre travail au quotidien. Nous nous en servons par exemple pour suivre la progression de certaines espĂšces exotiques envahissantes, comme Halophila stipulacea, en concurrence avec nos herbiers natifs. GrĂące aux cartes, nous pouvons aussi dĂ©terminer les zones Ă plus forts enjeux et imaginer des rĂ©glementations particuliĂšres pour y garantir une protection spĂ©cifique.
âą Les cartes peuvent-elles prendre en compte les impacts du changement climatique ?
Jean-BenoĂźt Nicet - Au-delĂ de la cartographie des habitats marins, lâIFRECOR va concevoir en 2025 un guide mĂ©thodologique qui facilitera la production de cartes dans le cadre dâĂ©tudes dâimpact, pour de futurs projets dâamĂ©nagement en particulier.
Ces cartes croiseront plusieurs donnĂ©es : lâintensitĂ© de la pression sur le milieu marin et son Ă©tendue spatiale, les enjeux propres Ă lâĂ©cosystĂšme tels que la sensibilitĂ© de lâhabitat... Lâimpact du changement climatique pourrait ĂȘtre reprĂ©sentĂ© sur ces cartes et servir Ă anticiper ses effets potentiels sur les territoires.
SĂ©bastien GrĂ©aux - Pour vous donner un exemple, aprĂšs le passage du cyclone Irma en 2017, nous avons dĂ» dĂ©sensabler en urgence le port afin de permettre aux secours dâarriver. La CollectivitĂ© de Saint-BarthĂ©lemy nous a sollicitĂ©s pour dĂ©finir une zone oĂč reverser le sable pompĂ©. GrĂące Ă la cartographie des habitats, nous avons pu rapidement dĂ©terminer lâendroit oĂč lâimpact serait moindre pour le milieu marin. Les cartes ont vraiment Ă©tĂ© un outil crucial Ă la suite de cet Ă©vĂ©nement climatique.
+ dâinfo ici : Guide pour les gestionnaires
Ci-dessus : aperçu de la carte des habitats de Saint-Barthélemy (EDS 2020) montrant les zones sédimentaires, mangroves, herbiers, etc.
CONCLUSIONS DE LA RĂUNION DU COMITĂ NATIONAL DE LâIFRECOR
La 16 e rĂ©union du comitĂ© national de lâIFRECOR, qui Ă©labore notamment le programme dâactions national et en assure le suivi, sâest tenue du 19 au 21 novembre 2024 au ministĂšre des Outre-mer, Ă Paris. Ce comitĂ© a Ă©tĂ© lâoccasion de faire un point dâĂ©tape Ă mi-parcours sur le 5 e programme national et de valider le premier bureau de lâIFRECOR composĂ© de reprĂ©sentants de Nouvelle-CalĂ©donie, de PolynĂ©sie française et de Saint-BarthĂ©lemy.
Rédaction et interview
:
Lucie Labbouz
MARTINIQUE CARAĂBĂDITIONS, ĂDITEUR ULTRAMARIN ENGAGĂ POUR LâENVIRONNEMENT
Ci-dessus : extrait de lâalbum Ti Racoun et les sargasses. CaraĂŻbĂ©ditions couvre la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane et La RĂ©union.
c araĂŻbĂ©dition S , mai S on d â Ă©dition fondĂ©e aux a ntille S , publie depui S prĂš S de 20 an S de S ouvrage S en lien avec leS territoireS ultramarinS. conSciente de la nĂ©ceSSitĂ© de protĂ©ger leur biodiverSitĂ©, elle a créé le label lapom, « livreS pour apprendre Ă protĂ©ger l âoutre-mer ».
UNE DĂMARCHE ENGAGĂE DEPUIS LA CONCEPTIONâŠ
Sâil existait des brochures, livrets documentaires ou autres mallettes et outils pĂ©dagogiques traitant de sujets environnementaux locaux, il nây avait pas, aux Antilles-Guyane, de collection Ă©ditoriale dĂ©diĂ©e proposant des albums, romans ou essais qui associent la lecture Ă la sensibilisation Ă lâenvironnement. Soucieux de participer Ă lâĂ©ducation au dĂ©veloppement durable par la lecture, CaraĂŻbĂ©ditions a souhaitĂ© proposer aux enfants ultramarins des livres qui leur ressemblent, afin de mieux les sensibiliser Ă la protection des milieux naturels.
Câest dans cet esprit que le label LAPOM, « Livres pour Apprendre Ă ProtĂ©ger lâOutre-Mer », est nĂ© : quand le thĂšme dâun ouvrage â album, roman, piĂšce de théùtre... â de littĂ©rature jeunesse ou adulte entrera en rĂ©sonance avec lâĂ©cologie, le logo du label sera apposĂ© sur sa couverture, pour signifier au lecteur quâune attention particuliĂšre est portĂ©e Ă la question de lâenvironnement.
⊠JUSQUâAU PROCESSUS DE FABRICATION DES OUVRAGES En cohĂ©rence avec ce nouveau label, la production des ouvrages de CaraĂŻbĂ©ditions se veut respectueuse de lâenvironnement. Ainsi, lâimprimeur liĂ© Ă la maison dâĂ©dition plante un arbre pour chaque titre imprimĂ©
et dispose dâune certification garantissant que les livres sont fabriquĂ©s avec des encres Ă©cologiques sur des papiers recyclĂ©s ou issus de forĂȘts gĂ©rĂ©es durablement.
Le label LAPOM reprĂ©sentera ainsi un repĂšre dans le monde de lâĂ©dition ultramarine pour identifier les livres Ă©voquant la protection de la planĂšte en outremer, issus dâune production Ă©coresponsable.
LE MOT DE FLORENT CHARBONNIER, CRĂATEUR ET DIRECTEUR DE CARAĂBĂDITIONS « Puisque nous pensons que tout le monde est concernĂ© et que câest par les enfants que le monde de demain sera prĂ©servĂ©, nous avons dĂ©cidĂ© de publier des ouvrages jeunesse traitant dâĂ©cologie.
Loin de tout alarmisme et de toute leçon de morale, nous pensons que chacun peut ĂȘtre acteur, que chaque petite main peut faire quelque chose, et il faut pour cela commencer par connaĂźtre, savoir, comprendre. Câest notre part du colibri que dâinstruire, en espĂ©rant que chaque ouvrage, Ă son tour, motivera des colibris et, quâau bout du compte, on se rapprochera de la part du pĂ©lican ! »
+ dâinfo ici : https://www.caraibeditions.fr/
INTERVIEW JADE AMORY, ILLUSTRATRICE
DES OUVRAGES DE LA COLLECTION
« LES PETITS HĂROS DE LA PLANĂTE », PUBLIĂS CHEZ CARAĂBĂDITIONS
âą Quelle est cette nouvelle collection ?
- Il sâagit de livres pour tout-petits, oĂč les enfants participent Ă la lecture avec les parents. Ă chaque page, ils ont une action Ă faire qui impacte lâimage, lâhistoire et lâenvironnement de maniĂšre plus large. Lâhistoire reste avant tout lâĂ©popĂ©e dâun hĂ©ros ou dâune hĂ©roĂŻne qui part Ă lâaventure en mer, en forĂȘt, dans la mangrove, mais ces petits livres Ă tirettes permettent Ă©galement de sensibiliser les plus petits et de leur montrer quâils peuvent avoir un impact positif sur la planĂšte, dĂšs le plus jeune Ăąge.
⹠Pour vous, la littérature peut-elle effectivement « Apprendre à Protéger » ?
- Bien sĂ»r ! La lecture peut ĂȘtre un vĂ©ritable vecteur de changement, surtout auprĂšs du trĂšs jeune public. Les livres Ă©ditĂ©s sous le label LAPOM informent sur lâenvironnement, de maniĂšre ludique, avant mĂȘme que lâenfant ne se questionne. En grandissant, il aura dĂ©jĂ en lui des valeurs environnementales fortes et pourra porter les actions nĂ©cessaires pour protĂ©ger la nature. Je pense que, par les gestes du quotidien, chacun peut agir dans la bonne direction. Cela aura un vrai impact si tout le monde sâengage. Pour moi, lire des ouvrages qui parlent de protection de lâenvironnement aux plus petits fait pleinement partie de ces Ă©cogestes !
Rédaction et interview : Lucie Labbouz
En haut : la collection « NoĂ©mie » prĂ©sente de courtes histoires locales pour sâimmerger dans les trĂ©sors naturels des Antilles françaises.
| Ci-dessus : aperçu dâune double page de lâalbum Embarque avec Aaron, Ă©crit par Delphine-Laure Thiriet et illustrĂ© par Jade Amory.
En haut : aperçu du livre Ti Racoun et les Sargasses. | Ci-dessus : la piĂšce Sous les plastiques, la mer de notre rĂ©dactrice Lucie Labbouz, « a vocation Ă ĂȘtre jouĂ©e par une quinzaine de jeunes, une façon de les amener Ă sâengager pour protĂ©ger encore mieux le milieu marin ».
RĂTABLIR LE BON ĂTAT DES EAUX EN MARTINIQUE : COMBIEN ĂA COĂTE ? e n m artinique , on e S time aujourd â hui qu â environ deux tier S de S riviĂšre S et de S eaux
littorale S S urveillĂ©e S par l â o ffice de l â e au ( ode ) ne S ont pa S en bon Ă©tat Ă©cologique . q uel coĂ»t reprĂ© S enterait la re S tauration d â un Ă©tat de S eaux S ati S fai S ant S ur l â Ăźle ?
COCONSTRUIRE LA POLITIQUE DE LâEAU AVEC TOUS LES ACTEURS Le bon Ă©tat des masses dâeau est un objectif gĂ©nĂ©ral, fixĂ© par la directive-cadre sur lâeau (DCE), qui harmonise la rĂ©glementation europĂ©enne en matiĂšre de gestion de lâeau. La DCE impose une gestion de la ressource par bassin hydrographique, avec des cycles de planification de six ans.
En France, le SchĂ©ma Directeur dâAmĂ©nagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) est le document permettant cette gestion Ă lâĂ©chelle du territoire. Le 3e cycle de planification du SDAGE (2022-2027) arrivant actuellement Ă mi-parcours, un diagnostic environnemental et Ă©conomique â appelĂ© Ă©tat des lieux âdoit ĂȘtre rĂ©alisĂ©. Il sâagit dâĂ©valuer lâĂ©tat des riviĂšres, des eaux souterraines et littorales, mais Ă©galement dâinventorier les usages de lâeau, les pressions et lâimpact sur les milieux aquatiques.
Cette politique est Ă©laborĂ©e collĂ©gialement avec les gestionnaires, les professionnels, les Ă©lus et les usagers. LâODE Martinique rĂ©unit ainsi les acteurs de lâeau lors de sĂ©minaires de coconstruction du SDAGE.
MOBILISER LâEXPERTISE LOCALE PAR DES ATELIERS PARTICIPATIFS Le sĂ©minaire organisĂ© le 14 novembre 2024 a rĂ©uni une soixantaine dâexperts locaux sur ce thĂšme : Ă©valuer le coĂ»t engagĂ© pour remettre en bon Ă©tat les milieux aquatiques. Il sâagissait de chiffrer les actions amĂ©liorant directement ou indirectement lâĂ©tat des masses dâeau.
En introduction des Ă©changes, la rencontre a dĂ©butĂ© par une prĂ©sentation de lâĂ©tat qualitatif des eaux en Martinique, le bilan financier des actions identifiĂ©es attenantes au SDAGE, ainsi que par la caractĂ©risation des pressions et des usages anthropiques de la ressource en eau. Un format dâatelier expĂ©rimental, initiĂ© par lâInstitut des Ressources Environnementales et du DĂ©veloppement Durable (IREEDD), bureau dâĂ©tudes dâanalyse Ă©conomique spĂ©cialiste de lâeau, a Ă©tĂ© privilĂ©giĂ© pour mobiliser activement les acteurs.
Au cours de trois ateliers thĂ©matiques, les participants ont partagĂ© leur expertise technique et Ă©conomique pour un objectif commun : cibler et chiffrer les actions de lâamĂ©lioration de lâĂ©tat des eaux.
Cette carte de 2024 ne montre aucune masse dâeau cours dâeau (MECE) en trĂšs bon Ă©tat, 15 % sont en bon Ă©tat, 40 % en Ă©tat moyen, 25 % en Ă©tat mĂ©diocre et 10 % en mauvais Ă©tat.
MAIS AU FAIT, COMMENT DĂFINIT-ON UNE MASSE DâEAU ?
Portion de cours dâeau, canal, aquifĂšre, plan dâeau ou zone cĂŽtiĂšre homogĂšne, la masse dâeau, artificielle ou non, est le dĂ©coupage Ă©lĂ©mentaire des milieux aquatiques destinĂ© Ă reprĂ©senter lâunitĂ© dâĂ©valuation de la directive-cadre sur lâeau.
CETTE DĂMARCHE AMBITIEUSE ET INTERACTIVE A ĂTĂ FRUCTUEUSE. UN RICHE MOMENT DâĂCHANGES ENTRE ACTEURS DE LâEAU, Ă RENOUVELER !
+ dâinfo ici : Retour sur les ateliers du sĂ©minaire
Rédaction : Mathilde
Edmond-Mariette
Minoton /
ODE
Martinique
LES PREMIĂRES ASSISES DE LâEAU ET DE LâASSAINISSEMENT ORGANISĂES EN OUTRE-MER l â Ă©vĂ©nement a eu lieu Ă S choelcher en m artinique , du 26 au 28 novembre 2024. i n S crit danS le cadre du plan eau dom 1 , il a eu vocation Ă aborder leS dĂ©fiS SpĂ©cifiqueS rencontrĂ©S au S ein de S territoire S ultramarin S , en matiĂšre de ge S tion de l â eau et de l â a SS aini SS ement .
UN RENDEZ-VOUS SPĂCIALEMENT DĂDIĂ AUX OUTRE-MER
Durant trois jours rythmĂ©s par des tables rondes, confĂ©rences, ateliers thĂ©matiques et visites de terrain, ces assises accueillies au Palais des CongrĂšs de Madiana ont rĂ©uni les acteurs ultramarins de la gestion de lâeau et de lâassainissement dans un contexte de changement climatique dâautant plus marquant pour les outre-mer, notamment du fait de leur caractĂšre principalement insulaire.
Cet Ă©vĂ©nement, qui a rencontrĂ© un vif succĂšs, dĂ©coule du Plan eau DOM, initiative phare pour amĂ©liorer durablement la gestion des services publics dâeau potable et dâassainissement en Martinique, en Guadeloupe, Ă Saint-Martin, en Guyane, Ă La RĂ©union, Ă Mayotte et, depuis 2024, Ă Saint-Pierre-et-Miquelon.
UN PLAN EAU DOM POUR AMĂLIORER LE SERVICE RENDU AUX USAGERS Dans les territoires dâoutre-mer, les services publics dâeau potable et dâassainissement sont confrontĂ©s Ă des difficultĂ©s spĂ©cifiques qui constituent des freins au dĂ©veloppement social, Ă©conomique et sanitaire et Ă la prĂ©servation de la biodiversitĂ©.
Si les plans dâurgence menĂ©s par le Gouvernement peuvent rĂ©pondre aux situations de crise causĂ©es par des Ă©vĂ©nements climatiques extrĂȘmes, le Plan eau DOM, lancĂ© en 2016 pour une pĂ©riode de 10 ans, accompagne les acteurs de lâeau sur le long terme dans leur intervention indispensable. Cet accompagnement se traduit notamment par un soutien aux collectivitĂ©s dâoutre-mer en matiĂšre de renforcement de leurs capacitĂ©s techniques et financiĂšres.
+ dâinfo ici : Les assises de lâeau et de lâassainissement en outre-mer
INTERVIEW NAJIB MAHFOUDHI, COORDINATEUR
INTERMINISTĂRIEL DU PLAN EAU DOM AU MINISTĂRE DE LA TRANSITION ĂCOLOGIQUE, DE LA BIODIVERSITĂ, DE LA FORĂT, DE LA MER
ET DE LA PĂCHE âą En quoi cet Ă©vĂ©nement organisĂ© en Martinique a-t-il eu un aspect inĂ©dit ?
- Tout dâabord, câest la premiĂšre fois quâune telle rencontre traitant de lâeau et de lâassainissement a lieu en outre-mer et quâelle rĂ©unit des participants dâorigines diffĂ©rentes : Ă©lus, experts, Offices de lâeau, Ătat et ses opĂ©rateurs, universitaires, associationsâŠ
Câest tout lâĂ©cosystĂšme dâacteurs de lâeau dans les outre-mer, dont nous avons besoin pour mettre en place une politique publique de lâeau fonctionnelle, qui sâest mobilisĂ© pour ces Assises !
Cela est une grande satisfaction dâavoir pu croiser ces regards divers, et dâavoir ainsi permis une transversalitĂ© entre les acteurs de lâeau et les territoires.
âą Quelles perspectives dâavenir ces assises ontelles ouvertes en outre-mer ?
- De nombreuses idĂ©es ont Ă©mergĂ© des dĂ©bats et des tables rondes, et nous sommes en train de prĂ©parer un recueil de propositions issues de ces Assises. Ce recueil sera partagĂ©, puis intĂ©grĂ© Ă la feuille de route du Plan eau DOM. Il guidera les actions Ă venir pour les prochaines annĂ©es. Nous allons ainsi travailler sur des thĂ©matiques particuliĂšres, telles que lâancrage des compĂ©tences dans les territoires ou le partage des retours dâexpĂ©riences positives.
En abordant ces sujets plus vastes que la question des infrastructures et en intĂ©grant tous les enjeux liĂ©s Ă lâeau, nous souhaitons insuffler le changement de paradigme indispensable Ă la mise en Ćuvre dâune vraie politique publique de lâeau au service des citoyens et respectueuse de lâenvironnement.
La station dâĂ©puration Leblond Ă Cayenne, premiĂšre de ce type en Guyane, est une station dite biologique
boues
TERRA-KERA GUADELOUPE 1 , UNE PASSION POUR LA BIODIVERSITĂ DE LâARCHIPEL RĂ©daction et interview : Lucie Labbouz
a moureux de la g uadeloupe et de S a biodiver S itĂ© exceptionnelle , m ike h Ă©lion e S t un botani S te pa SS ionnĂ© qui intervient dan S de nombreux domaine S liĂ© S Ă la flore : inventaire S ou S uivi S botanique S , Ă©tude S d â impact , formation de S profe SS ionnel S , S en S ibili S ation et S ortie S grand public ⊠r encontre avec un amoureux de la flore guadeloupĂ©enne .
INTERVIEW MIKE HĂLION, NATURALISTE EN GUADELOUPE ET FONDATEUR DE LâENTREPRISE TERRA-KERA
âą Comment en ĂȘtes-vous arrivĂ© Ă crĂ©er Terra-Kera, entreprise qui vous permet dâĂȘtre Ă©cologue gĂ©nĂ©raliste indĂ©pendant en Guadeloupe ?
- Jâai su trĂšs tĂŽt, au collĂšge, lors de mes premiers cours de SVT, que je me consacrerais plus tard Ă lâĂ©tude ou Ă la protection de la nature. Jâai rĂ©alisĂ© mon stage de master (BiodiversitĂ© vĂ©gĂ©tale et Gestion des Ă©cosystĂšmes tropicaux) ici, en Guadeloupe, oĂč jâai eu lâoccasion dâĂ©tudier le cactus tĂȘte Ă lâAnglais (Melocactus intortus). Ce fut mon premier contact (piquant) avec la flore de lâarchipel. Jâai continuĂ© Ă me passionner pour les plantes sur mon temps libre, en parallĂšle dâun travail sur les milieux marins.
Puis, jâai finalement rĂ©alisĂ© que je ce que je voulais, câĂ©tait travailler Ă lâĂ©tude et Ă la prĂ©servation des plantes guadeloupĂ©ennes. Câest ainsi que Terra-Kera 1 a vu le jour dĂ©but 2021 ! Je mâembarquais alors pour une aventure de plus de 3 000 espĂšces Ă chercher, reconnaĂźtre, photographier, comprendreâŠ
En haut : « Ă lâinverse des gros plans, une vue dâensemble permet aussi de capter toute la beautĂ© dâun milieu ! Ici, les crĂȘtes de la BasseTerre vues depuis la SoufriĂšre par un matin dĂ©gagĂ©. » © Mike HĂ©lion / TK | 1 Karukera : nom de la Guadeloupe donnĂ© par les Kalinagos.
En partenariat avec le PĂŽle-relais zones humides tropicales (PRZHT), dĂ©couverte de la flore de lâaire marine
François, Ă Baillif. | Terra-Kera approvisionne en graines dâespĂšces indigĂšnes deux pĂ©piniĂšres de Baie-Mahault. | Un inventaire de la flore vasculaire est en cours jusquâen mai 2025 dans la RĂ©serve naturelle nationale de la DĂ©sirade. | Cactus tĂȘte Ă lâAnglais aux Saintes.
⹠Parmis vos différents projets en Guadeloupe, pouvez-vous nous en présenter certains que vous avez particuliÚrement appréciés ?
- Ce que je fais est trĂšs large, mais toujours dans le domaine des plantes. Je peux ĂȘtre appelĂ© pour rĂ©aliser des inventaires naturalistes purs en un milieu naturel, comme ĂȘtre amenĂ© Ă faire des Ă©tudes dâimpact pour de futurs projets dâamĂ©nagement, afin de minimiser les consĂ©quences de ces projets sur les milieux.
En 2023, jâai Ă©galement menĂ© des actions de formation auprĂšs dâagents du Parc national de la Guadeloupe, pour leur apporter une connaissance gĂ©nĂ©rale en matiĂšre de botanique.
Ce que jâaime aussi beaucoup, câest la sensibilisation auprĂšs du grand public. Jâai eu lâoccasion dâorganiser des visites autour de la biodiversitĂ© ordinaire, dans le cadre des Atlas de la biodiversitĂ© communale (ABC) de diffĂ©rentes municipalitĂ©s. Et jâorganise Ă mon compte des visites en milieu naturel le weekend. Ce sont toujours des moments dâĂ©change trĂšs riches, notamment quand des GuadeloupĂ©ens participent Ă ces sorties nature, et quâils mâapprennent des noms de plantes en crĂ©ole ou des usages que je ne connaissais pas. Les balades durent deux Ă trois heures, mais je pourrais parler de plantes pendant des jours sans mâarrĂȘter !
« AU TRAVERS DE MON TRAVAIL, JE FAIS DE MON MIEUX POUR PRĂSERVER CE PETIT COIN DE PARADIS ET LUI RENDRE TOUT CE QUâIL MâOFFRE »
âą Comment avez-vous rĂ©ussi Ă dĂ©velopper votre entreprise dans le domaine de lâenvironnement ?
- Mes trois premiĂšres annĂ©es nâont pas toujours Ă©tĂ© Ă©videntes, comme pour toute entreprise, mais jâai aujourdâhui un agenda 2025 dĂ©jĂ quasiment rempli ! Il faut dire que la biodiversitĂ© de Guadeloupe est exceptionnelle, pour un « si petit » territoire. Une consĂ©quence de cette richesse est quâil y a encore beaucoup Ă faire dans le domaine environnemental. Des taxons comme les champignons, les lichens ou certains groupes dâinsectes sont Ă Ă©tudier. Et les interactions entre les plantes et les autres ĂȘtres vivants restent Ă comprendre pour la plupart. Il y a donc encore beaucoup Ă faire, tout en poursuivant les actions de prĂ©servation, de restauration et de sensibilisation. Lâenjeu est que nous puissions continuer Ă profiter de cette nature luxuriante et Ă nous Ă©merveiller de la chance que nous avons, en Guadeloupe, de vivre chaque jour au contact de cette biodiversitĂ© !
+ dâinfo ici : https://terrakera.tk/
éducative (AME) de Gros-
Photographies
Hélion
Lâiguane des Petites-Antilles (Iguana delicatissima) est en danger critique dâextinction. | Miconia angustifolia appartient aux spermatocytes âou plantes Ă graines â groupe reprĂ©sentĂ© par environ 2 500 espĂšces en Guadeloupe. Les reconnaĂźtre constitue la base du travail de Mike HĂ©lion.
Photographies
Lâalgue bulle dĂ©polie (Dyctosphaeria cavernosa), une espĂšce envahissante. |Libellule mĂąle dâaltitude (Rhionaeshna psilus). | En Guadeloupe, les fougĂšres sont prĂ©sentes des falaises sĂšches en bord de mer (comme ici, Pityrogramma chrysophylla) jusquâau sommet de la SoufriĂšre.
INTERCOâ OUTRE-MER, PARTENAIRE DE LâANEL, DONT LE 43E CONGRĂS A PORTĂ SUR LES OUTRE-MER du 2 au 6 dĂ©cembre, la guadeloupe accueillait la 43e Ă©dition du congrĂšS annuel de l âanel, qui a miS en lumiĂšre leS dĂ©fiS SpĂ©cifiqueS aux outre-mer : prĂ©Servation de la biodiverSitĂ©, impactS du changement climatique S ur le S littoraux , dĂ©veloppement durable adaptĂ© aux contexte S in S ulaire S r etour S ur cet Ă©vĂ©nement auquel i nterco â o utre - mer a activement participĂ©
« Les Outre-mer en premiĂšre ligne », tel Ă©tait lâintitulĂ© du programme de ce congrĂšs qui sâest tenu au Gosier durant cinq jours pour y rĂ©unir Ă©lus, experts et acteurs du littoral afin dâĂ©changer autour des grands enjeux qui façonnent lâavenir des territoires littoraux. LâANEL, qui avait dĂ©jĂ tenu en 2017 son congrĂšs annuel Ă La RĂ©union, affirme ainsi sa volontĂ© de mettre Ă lâhonneur les outre-mer dans le cadre de cet Ă©vĂ©nement qui sâest distinguĂ© par la richesse et la diversitĂ© des thĂ©matiques abordĂ©es (retrouver ICI la programmation).
UNE MOBILISATION REMARQUĂE Lâimportance des enjeux littoraux dans les outre-mer, ces refuges de biodiversitĂ© situĂ©s aux avant-postes des dĂ©fis climatiques, explique la prĂ©sence au congrĂšs de Fabrice Loher, ministre dĂ©lĂ©guĂ© chargĂ© de la Mer et de la PĂȘche, du directeur gĂ©nĂ©ral des Outre-mer, du commandant de la gendarmerie de Guadeloupe, mais aussi la venue de nombreux Ă©lus des littoraux de lâHexagone et des territoires ultramarins.
TĂMOIGNAGES YANNICK MOREAU,
PRĂSIDENT DE LâANEL ET MAIRE DES SABLES DâOLONNE
« Nos territoires ultramarins, joyaux de biodiversitĂ© et vigies avancĂ©es face aux dĂ©fis climatiques, ont Ă©tĂ© au cĆur de notre engagement cette annĂ©e. Les outre-mer sont confrontĂ©s aux premiers effets du changement climatique : montĂ©e des eaux, Ă©rosion cĂŽtiĂšre et menaces sur les Ă©cosystĂšmes marins.
Pourtant, ces territoires sont aussi des laboratoires dâinnovation, oĂč se dessinent les solutions de demain pour faire face Ă ces bouleversements globaux. Ce congrĂšs en Guadeloupe a fourni une occasion de partager des expĂ©riences, de dĂ©battre des meilleures pratiques et de tracer tous ensemble des pistes pour renforcer la rĂ©silience de nos littoraux. »
LYLIANE PIQUION-SALOMĂ, PRĂSIDENTE DâINTERCOâ OUTRE-MER
« Tout au long du congrĂšs, les participants ont contribuĂ© Ă construire des actions concrĂštes pour prĂ©server et valoriser les atouts naturels et Ă©conomiques de nos outre-mer. Je suis intervenue notamment sur la table ronde 3, pour mettre en avant la rĂ©silience et la crĂ©ativitĂ© des territoires ultramarins, tout en insistant sur la nĂ©cessitĂ© dâun accompagnement renforcĂ© par des politiques publiques adaptĂ©es et des mĂ©canismes de financement ciblĂ©s. Jâai aussi rappelĂ© que les savoir-faire traditionnels des outre-mer sont une ressource prĂ©cieuse pour rĂ©inventer le lien entre dĂ©veloppement et nature. Intercoâ Outre-mer sâest fortement mobilisĂ©e, en particulier lors des ateliers et de la table ronde Ă©voquĂ©s ci-aprĂšs. »
ATELIER 1 : COMMENT FAIRE DE LA LOI LITTORAL UN LEVIER ET NON UN FREIN ?
Lâessence mĂȘme de la loi Littoral est reconnue comme positive et nĂ©cessaire Ă la prĂ©servation des Ă©cosystĂšmes sensibles. Cependant, les discussions durant lâatelier ont permis dâidentifier les freins concrets rencontrĂ©s par les collectivitĂ©s dans lâapplication de cette loi, liĂ©s notamment Ă des interprĂ©tations variables et Ă des blocages administratifs. Des pistes ont Ă©tĂ© explorĂ©es pour adapter les outils juridiques et les dĂ©marches, tels que des dispositifs spĂ©cifiques tenant compte des rĂ©alitĂ©s locales, afin de transformer ces contraintes en opportunitĂ©s.
« Le groupe de travail sur la loi Littoral, conduit par lâANEL et Intercoâ Outre-mer, a Ă©mis des recommandations, notamment pour clarifier les concepts de la loi et moderniser son application. Lâimportance de mobiliser tous les acteurs (collectivitĂ©s, Ătat, acteurs Ă©conomiques, citoyens...) autour dâune gestion concertĂ©e et durable des espaces littoraux, au bĂ©nĂ©fice des territoires ultramarins et hexagonaux, a Ă©galement Ă©tĂ© confirmĂ©e », souligne EugĂšne Larcher, vice-prĂ©sident dâIntercoâ Outre-mer et maire de Les Anses dâArlet.
ATELIER 2 : DĂFAUT DâASSURABILITĂ DES COMMUNES : LA VULNĂRABILITĂ
DES COLLECTIVITĂS LOCALES EST-ELLE IRRĂMĂDIABLE ?
Cet atelier sâest consacrĂ© aux problĂ©matiques dâassurabilitĂ© des collectivitĂ©s locales face Ă lâaggravation des risques naturels, avec un focus sur les outre-mer. Joseph Peraste, maire du Marigot et membre du bureau dâIntercoâ Outre-mer, a notamment dĂ©clarĂ© : « Les collectivitĂ©s locales sont de plus en plus exposĂ©es Ă des Ă©vĂ©nements climatiques et naturels imprĂ©visibles et dĂ©vastateurs. Cette rĂ©alitĂ© engendre de nouveaux dĂ©fis dans leurs relations avec les assureurs : difficultĂ©s de contractualisation, rĂ©siliations unilatĂ©rales, retards dans les expertises et indemnisations, hausse significative des primes dâassurance. Par ailleurs, ce sujet soulĂšve des interrogations sur les impacts du changement climatique, la gestion et lâentretien des biens, les stratĂ©gies de prĂ©vention des risques, la capacitĂ© financiĂšre des collectivitĂ©s Ă y faire face, le cadre lĂ©gislatif des contrats dâassurance, et la structuration du marchĂ© de lâassurance pour rĂ©pondre Ă ces enjeux. »
TABLE RONDE 3 : LES OUTRE-MER EN 1ĂRE LIGNE POUR UN DĂVELOPPEMENT
DURABLE EN SYMBIOSE AVEC LA NATURE
Face aux dĂ©fis environnementaux, les outre-mer jouent un rĂŽle pionnier dans la recherche de solutions innovantes. Laboratoires vivants, ils expĂ©rimentent des approches originales, comme la gestion des sargasses, la protection des tortues marines ou encore le dĂ©veloppement des Ă©nergies renouvelables, dĂ©montrant ainsi quâil est possible de concilier le dĂ©veloppement Ă©conomique et la prĂ©servation de la biodiversitĂ©. Les intervenants ont soulignĂ© lâimportance de partager ces initiatives exemplaires, qui peuvent inspirer dâautres territoires littoraux, en France hexagonale et Ă lâinternational.
Rédaction
Caroline Cunisse
Stéphanie Castre
GUYANE SĂCHERESSE EN GUYANE : QUEL AVENIR CLIMATIQUE ? b ai SS e de la pluviomĂ©trie , hau SS e de S tempĂ©rature S , effacement du « petit Ă©tĂ© » de mar S ... a lor S que la g uyane connaĂźt une S Ă©chere SS e hi S torique , Ă quoi faut - il S â attendre dan S le S prochaine S annĂ©e S , avec le dĂ©rĂšglement climatique ?
Jamais le niveau dâĂ©tiage des cours dâeau guyanais nâavait Ă©tĂ© si bas en saison sĂšche. La situation est si critique quâil est presque impossible de relier les communes les plus en amont des fleuves en pirogue.
Le 29 octobre, la prĂ©fecture a mĂȘme dĂ©clenchĂ© un plan Orsec Eau afin dâassurer, via un pont aĂ©rien, le ravitaillement des communes isolĂ©es, oĂč les fleuves font normalement office de route, comme Maripasoula, PapaĂŻchton, Grand-Santi ou Camopi.
Cette situation exceptionnelle est la consĂ©quence de 18 mois de dĂ©ficit hydrique â Ă lâexception de mai 2024 â et de tempĂ©ratures anormalement hautes. Sur les 10 premiers mois de 2024, le cumul de pluie a Ă©tĂ© infĂ©rieur Ă la normale de 16 % et lâannĂ©e 2024 a Ă©tĂ© la plus chaude jamais enregistrĂ©e depuis 1968.
Les tempĂ©ratures de lâan dernier ont Ă©tĂ© de 0,2 ° C au-dessus de la moyenne de 2023, annĂ©e qui avait dĂ©jĂ marquĂ© un record de chaleur historique, selon les relevĂ©s de MĂ©tĂ©o-France.
LE RAPPORT GUYACLIMAT LâintensitĂ© historique de cette sĂ©cheresse est avant tout liĂ©e au phĂ©nomĂšne ocĂ©anique El Niño, qui sâest terminĂ© en aoĂ»t, mais dont les effets restent perceptibles. Toutefois, le dĂ©rĂšglement climatique agit en toile de fond en intensifiant, comme sur le reste de la planĂšte, les Ă©pisodes extrĂȘmes.
« Actuellement, on parle de phĂ©nomĂšne extrĂȘme, mais ces sĂ©cheresses vont devenir de plus en plus normales Ă mesure que les consĂ©quences du dĂ©rĂšglement climatique vont se faire sentir », confirme JĂ©rĂ©my Lepesqueur, mĂ©tĂ©orologue spĂ©cialiste du climat des Antilles et de la Guyane.
Ă en croire les rĂ©sultats de lâĂ©tude GuyaClimat, publiĂ©e en 2022, qui modĂ©lise les impacts locaux du changement climatique, la Guyane, Ă lâinstar du reste du bassin amazonien, va connaĂźtre un « dĂ©placement de la Zone de convergence intertropicale (ZCIT) au sud de lâĂ©quateur, lors du premier trimestre 2025 »,
En haut de page : Ă la fin de lâannĂ©e 2024, le niveau historiquement bas du Maroni a placĂ© les habitants des communes les plus en amont du fleuve dans une situation dâenclavement inĂ©dit, avec lâarrĂȘt des approvisionnements par transport fluvial. © Enzo Dubesset
Le transport en pirogue entravé par la sécheresse. © Enzo Dubesset | Températures moyennes en Guyane de 1991 à 2020 (en bleu), puis en 2023 (jaune) et 2024 (rouge). | Aperçu, en saison sÚche, de la bande littorale sans nuages (en noir) sous influence de la brise de mer.
ce qui se traduira par une « rĂ©duction des prĂ©cipitations » alors mĂȘme que cette pĂ©riode de lâannĂ©e coĂŻncide avec la saison des pluies. « Selon les scĂ©narios, il faut sâattendre Ă une baisse de pluviomĂ©trie de lâordre de 15 Ă 25% par rapport Ă la moyenne des annĂ©es 1980-2014, ce qui est vraiment significatif », prĂ©dit le mĂ©tĂ©orologue.
La variabilitĂ© des annĂ©es, plus ou moins pluvieuses en fonction de lâinfluence dâEl Niño ou de la Niña, va, elle aussi, sâattĂ©nuer, avec en consĂ©quence une tendance globale Ă lâassĂšchement de la Guyane. Le « petit Ă©tĂ© » de mars qui, selon de nombreux agriculteurs guyanais, a dĂ©jĂ presque disparu, deviendra une forme de petite saison sĂšche.
UN RISQUE DâHYPERTHERMIE Enfin, les tempĂ©ratures minimales augmenteront en Guyane de 2,5 Ă 4,5 ° C Ă lâhorizon 2100, en fonction des scĂ©narios SSP2 (Ă©missions de CO 2 contenues, scĂ©nario considĂ©rĂ© comme le plus probable) ou SSP5 (hausse des Ă©missions due Ă une dĂ©pendance aux combustibles fossiles) du GIEC. Un phĂ©nomĂšne qui augmentera le nombre de « nuits chaudes », ces nuits oĂč la tempĂ©rature reste trop Ă©levĂ©e pour permettre la bonne rĂ©gulation du corps humain.
« La principale consĂ©quence, câest le risque de multiplication des cas dâhyperthermie, notamment pour les sportifs ou les personnes travaillant en extĂ©rieur. Ă terme, une adaptation des modes de vie devra sâopĂ©rer pour limiter les efforts physiques lors des heures les plus chaudes de la journĂ©e », analyse JĂ©rĂ©my Lepesqueur.
Outre les sĂ©cheresses qui demandent de repenser les transports, lâagriculture ou encore lâapprovisionnement en eau potable de rĂ©gions entiĂšres, le dĂ©rĂšglement climatique exposera Ă©galement la Guyane Ă dâautres phĂ©nomĂšnes extrĂȘmes.
Parmi ces derniers, les pluies cinquantennales, qui dĂ©signent des pluies tropicales dont lâintensitĂ© est telle que leurs dĂ©bits ont la probabilitĂ© dâĂȘtre atteints en moyenne tous les 50 ans, risquent par exemple dâĂȘtre plus sĂ©vĂšres Ă lâavenir, avec un risque accru dâinondations.
Enfin, la montĂ©e globale du niveau de la mer â de 0,24 Ă 0,28 mĂštre dâici 2050 â expose les cĂŽtes guyanaises, dĂ©jĂ trĂšs basses, et certaines agglomĂ©rations Ă lâĂ©rosion du littoral, au risque de submersions marines en cas de grandes marĂ©es.
Rédaction : Enzo Dubesset
Graphique et image satellite
2024)
Météo-France
Commune du Haut-Maroni isolĂ©e Ă lâouest de la Guyane, comptant 11 000 habitants, Maripasoula a beaucoup souffert de la sĂ©cheresse historique de 2024. Depuis le quasi-arrĂȘt du transport fluvial fin octobre, lâapprovisionnement par avion des produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ©
sâest avĂ©rĂ© trĂšs onĂ©reux. Câest pourquoi une dizaine de restaurateurs, un boulanger et un agriculteur de la commune se sont associĂ©s, fin novembre, pour regrouper leurs commandes de marchandises depuis Cayenne et ainsi bĂ©nĂ©ficier de prix plus avantageux. © Enzo Dubesset
LA MOBILISATION CITOYENNE ANIMĂE PAR LES AGENCES RĂGIONALES DE LA BIODIVERSITĂ a vec la crĂ©ation de S a gence S rĂ©gionale S de la biodiver S itĂ© , le S r Ă©gion S , l â ofb et l â Ă© tat font le pari de S territoire S . e n outre - mer , deux arb exi S tent Ă ce jour : en g uadeloupe , depui S 2021, et Ă l a r Ă©union , depui S 2023. Z oom S ur deux action S portĂ©e S par ce S jeune S S tructure S , qui encouragent la mobili S ation collective au S ervice de la biodiver S itĂ©
Les ARB jouent un rÎle de catalyseur des énergies et des compétences territoriales. Elles impulsent une dynamique partenariale collaborative pour généraliser, au plus prÚs du terrain, les bonnes pratiques de préservation et de restauration des milieux naturels.
UNE DYNAMIQUE PARTENARIALE Les Agences rĂ©gionales de la biodiversitĂ© associent lâensemble des acteurs locaux volontaires â collectivitĂ©s, associations, acteurs socioĂ©conomiques, citoyens âpour lutter contre lâĂ©rosion de la biodiversitĂ©. Elles sont créées Ă lâinitiative de la RĂ©gion et de lâOFB, prĂ©sent dans les territoires via ses directions rĂ©gionales ou la direction des outre-mer, et sont en lien avec les services de lâĂtat en rĂ©gions et tous les acteurs concernĂ©s. Ce maillage local permet de dĂ©ployer des actions conjointes et vient renforcer lâefficacitĂ© des politiques publiques. Les ARB ont ainsi vocation Ă optimiser les projets dans les territoires et Ă les dĂ©multiplier grĂące Ă une meilleure efficience des moyens et des acteurs.
LES ARB, DES STRUCTURES MULTIFORMES ET INNOVANTES La raison dâĂȘtre des ARB et de leurs missions repose sur une dĂ©marche adaptĂ©e Ă la rĂ©alitĂ© et aux enjeux de chacun des territoires.
Les ARB sâappuient sur une diversitĂ© des formes de coopĂ©ration â en termes de statut, de choix des partenaires et de champ dâaction â et sur des dynamiques locales existantes. Elles encouragent chaque acteur Ă apporter sa contribution aux politiques publiques de reconquĂȘte de la biodiversitĂ© et elles sont le berceau dâidĂ©es et de compĂ©tences, dâoutils et de savoir-faire, de capacitĂ©s dâaction mutualisĂ©es.
TROIS MISSIONS : COORDONNER, ANIMER ET SENSIBILISER Au travers des ARB, les partenaires construisent un plan dâactions Ă lâĂ©chelle de leur territoire et en faveur de la biodiversitĂ©, qui vise Ă :
âą Piloter des stratĂ©gies et mettre en cohĂ©rence des politiques publiques, comme par exemple la stratĂ©gie rĂ©gionale pour la biodiversitĂ©, la territorialisation de la stratĂ©gie pour les aires protĂ©gĂ©es 2030, la mise en Ćuvre de la sĂ©quence « Ă©viter, rĂ©duire, compenser »...
âą Animer des rĂ©seaux dâacteurs, avec un guichet unique pour lâaccĂšs aux fonds, un rĂ©seau rĂ©gional des gestionnaires dâespaces naturels ; aider et appuyer les porteurs de projets en faveur de la biodiversitĂ©...
âą Informer, sensibiliser et mobiliser en ce qui concerne les aires marines et terrestres Ă©ducatives, la formation des Ă©lus, lors dâĂ©vĂ©nements grand public...
âą AmĂ©liorer la connaissance et sa diffusion via une stratĂ©gie rĂ©gionale de la connaissance, la collecte et la gestion des donnĂ©es, lâobservatoire rĂ©gional de la biodiversitĂ©, les sciences participativesâŠ
Utiliser des foyers dĂ©jĂ existants, pour rĂ©duire lâimpact sur la vĂ©gĂ©tation et Ă©viter lâĂ©rosion des sols. © ARB Ăźle de La RĂ©union
GAYAR PIK NIK : OBJECTIF
« ZĂRO DĂCHET » SUR LES AIRES DE PIQUE-NIQUE Ă LA RĂUNION Le 8 dĂ©cembre, lâARB de lâĂźle de La RĂ©union lançait avec le soutien de la RĂ©gion et de nombreux partenaires la premiĂšre Ă©dition de Gayar Pik Nik. Gratuit et ouvert Ă tous, lâĂ©vĂ©nement sâest tenu simultanĂ©ment sur six sites emblĂ©matiques de pique-nique, rĂ©partis entre littoral et forĂȘt : Bras-Panon, MaĂŻdo, Saint-Leu, BĂ©bour, le BrĂ»lĂ© et Grande Anse. Les pratiques Ă©coresponsables y ont Ă©tĂ© encouragĂ©es dans une ambiance conviviale : ne pas casser de bois sur place, utiliser les foyers mis Ă disposition et des couverts non jetables, respecter la tranquillitĂ© des oiseaux, emporter avec soi ses dĂ©chets... Au MaĂŻdo, les discussions ont ainsi portĂ© sur les espĂšces invasives et endĂ©miques, sur les risques de feux de forĂȘt. Ă BĂ©bour, des ateliers ont Ă©tĂ© consacrĂ©s aux oiseaux de La RĂ©union, tandis quâĂ Saint-Leu le focus a Ă©tĂ© fait sur les rĂ©cifs coralliens, la ponte des tortues, la vĂ©gĂ©talisation des plages...
Karine Pothin, directrice de lâARB de lâĂźle de La RĂ©union, tĂ©moigne : « Entre ateliers pratiques pour apprendre Ă rĂ©duire ses dĂ©chets, quizz, jeux interactifs pour petits et grands et lots Ă gagner, cette journĂ©e de pique-nique dominicale a donnĂ© lieu Ă de beaux moments de partage entre citoyens de toutes classes dâĂąge. Un ârond causĂ©â a mĂȘme Ă©tĂ© organisĂ© avec des personnes ĂągĂ©es grĂące Ă lâassociation Partazâ Lokal !
Gayar Pik Nik a trĂšs bien fonctionnĂ©. Il est important que nous allions vers le public, car si câest lui qui vient Ă notre rencontre, par exemple dans le cadre de foires, nous attirons alors des visiteurs qui sont trĂšs souvent dĂ©jĂ convaincus. Nous devons rallier Ă la cause de la biodiversitĂ© un public nouveau. Pour cela, le prochain Gayar Pik Nik devrait avoir lieu dĂšs juin 2025, sur six autres sites littoraux et forestiers de lâĂźle. »
DES ANIMATIONS SCOLAIRES AUTOUR DE LA PLANĂTE REVISITĂE DES ĂLES DE GUADELOUPE (LPRIG) La campagne LPRIG a permis dâexplorer, du 27 septembre au 10 novembre 2024, la biodiversitĂ© « nĂ©gligĂ©e » â crustacĂ©s, insectes et autres petites espĂšces â de la DĂ©sirade, de Marie-Galante et des Saintes. Une belle opportunitĂ© pour sensibiliser petits et grands Ă la richesse de la biodiversitĂ© de lâarchipel guadeloupĂ©en. Avec les chercheurs du MusĂ©um national dâHistoire naturelle et les animateurs de lâAgence rĂ©gionale de la biodiversitĂ© des Ăźles de Guadeloupe (ARB-IG), plus de 600 Ă©lĂšves et Ă©tudiants du CE1 au Master 2 ont visitĂ© les laboratoires scientifiques de la mission et participĂ© Ă de nombreuses activitĂ©s pĂ©dagogiques.
Kanell Ambroise, directrice de lâARB des Ăźles de Guadeloupe, tĂ©moigne : « En complĂ©ment de ces actions de mobilisation citoyenne, des animations ont eu lieu en fin dâannĂ©e pour prĂ©senter les missions et le mĂ©tier de naturaliste dans 25 Ă©tablissements de Guadeloupe. Au total, prĂšs de 1 500 Ă©lĂšves ont Ă©tĂ© sensibilisĂ©s. »
Rédaction
+ dâinfo ici : www.cirad.fr
UNE RĂVOLUTION DANS LA LUTTE CONTRE LES MALADIES TRANSMISES PAR LES MOUSTIQUES g rĂące Ă la technique de l â in S ecte S tĂ©rile ( ti S) renforcĂ©e , le c irad et l â i n S titut de recherche pour le dĂ©veloppement ( ird ) S â attaquent Ă la reproduction du mou S tique tigre , afin de contribuer Ă endiguer le S Ă©pidĂ©mie S de dengue et chikungunya Ă l a r Ă©union .
Depuis 2017, les Ă©pisodes de dengue sont rĂ©currents Ă La RĂ©union, avec pour principaux vecteurs les espĂšces de moustiques Aedes albopictus et Aedes aegypti La mĂ©thode de lutte, jusquâĂ prĂ©sent utilisĂ©e en France, consiste Ă pulvĂ©riser de la deltamĂ©thrine dans les zones oĂč des cas de dengue sont dĂ©clarĂ©s. Cette mĂ©thode Ă©tant peu apprĂ©ciĂ©e de la population pour son action insecticide sur dâautres espĂšces, une expĂ©rimentation de la TIS renforcĂ©e a Ă©tĂ© menĂ©e par le Cirad et lâIRD en 2021. RĂ©alisĂ©e dans la commune de Saint-Joseph, alors particuliĂšrement atteinte par la dengue, elle a permis la rĂ©duction de plus de 90 % des populations dâAedes aegypti en trois mois. En Espagne, oĂč des Ă©tudes ont Ă©tĂ© menĂ©es sur lâAedes albopictus en parallĂšle, des taux de rĂ©duction de 50 Ă 95 % ont pu ĂȘtre observĂ©s.
LA TECHNIQUE DE LâINSECTE STĂRILE (TIS) RENFORCĂE, PORTEUSE DâESPOIR
Actuellement testĂ©e dans 39 pays, la technique de lâinsecte stĂ©rile est porteuse dâespoir pour la lutte contre le virus de la dengue. Cette arbovirose Ă©tant transmise par les femelles, la TIS permet de rendre celles-ci stĂ©riles par le biais des mĂąles.
Singapour est aujourdâhui le premier pays planifiant une application de cette mĂ©thode de lutte Ă lâĂ©chelle de tout son territoire. Et La RĂ©union pourrait potentiellement lui emboĂźter le pas, avec le lancement dĂšs cette annĂ©e 2025 dâune seconde expĂ©rimentation de la TIS renforcĂ©e â 10 fois plus efficace que la TIS seule â toujours Ă Saint-Joseph, mais Ă plus grande Ă©chelle sur une zone de 200 hectares. Si ce nouvel essai, appelĂ© OPTIS, est concluant, lâextension technique de la TIS renforcĂ©e devrait ĂȘtre rĂ©alisĂ©e par une entreprise sur lâĂźle. Aux Antilles, oĂč le virus de la dengue sĂ©vit Ă©galement, un projet test de TIS est prĂ©vu en parallĂšle, portĂ© par lâARS Guadeloupe.
En 2021, les moustiques Ă©taient produits et irradiĂ©s Ă lâĂ©tranger (en Autriche). Pour cette expĂ©rimentation de 2025, toute la production est rĂ©alisĂ©e Ă La RĂ©union, grĂące au soutien financier du ministĂšre de lâEnseignement SupĂ©rieur et de la Recherche. © J. Bouyer / Cirad
© Antoine Franck / Cirad
© Marion Dailloux / Cirad
INTERVIEW JĂRĂMY
BOUYER,
DIRECTEUR DE RECHERCHE, EXPERT EN LUTTE CONTRE LES VECTEURS, COORDINATEUR DU PROJET TIS RENFORCĂE AU CIRAD
âą Quâest-ce que la TIS renforcĂ©e ?
- Elle consiste Ă relĂącher, dans des zones prĂ©cises, des moustiques mĂąles irradiĂ©s porteurs de mutations alĂ©atoires et couverts dâun biocide appelĂ© pyriproxyfĂšne. Une double action est alors observĂ©e. Dâune part, ces moustiques Ă©tant stĂ©riles, aucun individu viable nâest produit Ă la suite de lâaccouplement. Dâautre part, le biocide, transmis aux femelles lors de lâaccouplement, est ramenĂ© dans les gĂźtes larvaires par celles-ci. Et la croissance des larves contaminĂ©es nâaboutit pas.
En pratique, il sâagit de poser des piĂšges nommĂ©s ovitraps â piĂšges Ă Ćufs en français â dans lesquels des femelles sauvages viennent pondre. Ces Ćufs sont collectĂ©s afin de constituer une souche locale. AprĂšs avoir vĂ©rifiĂ© que cette souche nâest pas porteuse de virus, elle est multipliĂ©e de façon exponentielle dans un insectarium. Puis, un robot sexeur sĂ©pare automatiquement les mĂąles des femelles. Un irradiateur vient alors stĂ©riliser les populations de mĂąles, qui sont ensuite relĂąchĂ©es au sol ou par des drones.
Les piÚges à moustiques sont positionnés dans des zones stratégiques. En bout de processus, les lùchers de mùles stériles sont réalisés en petits effectifs par hectare, pour éviter un effet « essaim » qui pourrait inquiéter les habitants, bien que les mùles ne piquent pas.
que des espĂšces non cibles vivant dans les mĂȘmes habitats larvaires ne soient pas impactĂ©es par les biocides dont sont couverts les mĂąles. Câest le cas des abeilles qui pourraient accidentellement rĂ©colter du biocide en buvant dans ces habitats.
⹠Comment le projet est-il reçu par la population ?
- La municipalitĂ© de Saint-Joseph sâest montrĂ©e rĂ©ceptive lors de la premiĂšre phase dâexpĂ©rimentation et a accompagnĂ© lâĂ©quipe projet dans la sensibilisation des habitants. La technique est ainsi bien acceptĂ©e. Ce projet ne pourrait ĂȘtre menĂ© sans la confiance de la population et le soutien de la commune, qui a mis Ă disposition un local pour lâimplantation dâun laboratoire. Ce projet doit aussi son existence au soutien stratĂ©gique et financier de la RĂ©gion RĂ©gion sur fonds FEDER, que nous remercions. Enfin, lâĂtat apporte une aide prĂ©cieuse Ă travers le financement de lâirradiateur.
âą Cette technique est-elle inoffensive pour les autres espĂšces dâinsectes ?
- La TIS a lâavantage dâĂȘtre une technique trĂšs spĂ©cifique, les mĂąles relĂąchĂ©s ne sâaccouplant quâavec les femelles de lâespĂšce cible. LâexpĂ©rimentation comporte toutefois des opĂ©rations de suivi, afin de sâassurer
Tous les trois mois, du miel, du pollen, des abeilles et de la cire dâabeille seront collectĂ©s dans des ruches sentinelles afin de vĂ©rifier quâelles ne soient pas contaminĂ©es par du biocide, comme cela avait Ă©tĂ© fait Ă plus petite Ă©chelle lors de lâexpĂ©rimentation de 2021. © M. Dailloux / Cirad
Rédaction et interview
: Axelle Dorville
© Pierre Marchal
© J. Bouyer / Cirad
ĂLE DE LA RĂUNION UNE AGRICULTURE EN PLEINE MUTATION Formation par la Chambre dâagriculture auprĂšs dâagriculteurs de Mafate, sur la conduite des arbres fruitiers en vergers.
Ă l a r Ă©union comme dan S toute S le S rĂ©gion S d â outre - mer , le S agriculteur S doivent faire face aux con S Ă©quence S du dĂ©rĂšglement climatique et adapter leur S technique S de culture o livier f ontaine , S ecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la c hambre d â agriculture de l a r Ă©union , Ă©voque avec nou S le S enjeux climatique S de S on territoire
INTERVIEW OLIVIER FONTAINE, SECRĂTAIRE
GĂNĂRAL DE LA CHAMBRE DâAGRICULTURE DE LA RĂUNION
âą Le changement climatique a-t-il des rĂ©percussions visibles sur lâagriculture locale ?
- Depuis trois ou quatre ans, nous observons rĂ©ellement les effets du dĂ©rĂšglement climatique, avec une mĂ©tĂ©o de plus en plus alĂ©atoire. Les cyclones sont plus intenses, imprĂ©visibles et nous alternons entre des pĂ©riodes de fortes sĂ©cheresses et de pluies diluviennes. Cette annĂ©e, les cours dâeau et les nappes
phrĂ©atiques sont au plus bas, ce qui nous conduits Ă rĂ©flĂ©chir Ă de nouvelles stratĂ©gies pour lâavenir de lâagriculture Ă La RĂ©union.
⹠Avez-vous déjà des pistes dans ce domaine ?
- Oui, le monde agricole va devoir faire preuve dâadaptation, en maĂźtrisant mieux la ressource aquacole. Il sâagit dâenvisager des rĂ©seaux dâirrigation, des retenues dâeau, des systĂšmes de goutte-Ă -goutte, mais aussi une vĂ©ritable lutte contre le gaspillage. Les pratiques vont devoir Ă©voluer en ce sens et, dâailleurs, certains financements privilĂ©gient dâores et dĂ©jĂ ces mĂ©thodes dans la sĂ©lection des projets.
âą Quel regard portez-vous sur les normes environnementales actuelles ?
- Elles sont de plus en plus contraignantes et compliquent chaque annĂ©e davantage le travail des agriculteurs. Pourtant, ils ont fait ces 20 derniĂšres annĂ©es de nombreux progrĂšs et sâattachent Ă dĂ©velopper les bonnes pratiques. Sur lâĂźle, de nouvelles mĂ©thodes de culture sont ainsi apparues, de lâagroĂ©cologie en passant par lâagriculture biologique ou le couvert vĂ©gĂ©tal. La recherche scientifique avance, mais le transfert vers le monde agricole prend du temps et câest bien normal. Car câest tout un systĂšme qui doit Ă©voluer tout en faisant face Ă une concurrence dĂ©loyale.
âą Dâautant que lâaccord de libre-Ă©change entre lâUnion europĂ©enne et le Mercosur a Ă©tĂ© conclu. Quel est votre sentiment Ă ce sujet ?
- Cet accord nous inquiĂšte bien Ă©videmment, car les producteurs du Mercosur ne sont pas soumis aux mĂȘmes
contraintes environnementales que nous. Ici, nous devons appliquer la rĂ©glementation europĂ©enne, la rĂ©glementation française, qui est souvent encore plus contraignante, et faire face aux excĂšs de zĂšle de lâadministration locale. Tout cela va trop loin pour un secteur qui, aujourdâhui, doit en plus affronter un climat dĂ©rĂ©glĂ©.
âą Dans ce contexte, comment voyez-vous lâavenir de la profession ?
- Il nây a pas de crise de la vocation dans notre rĂ©gion et câest une chance. Les futurs agriculteurs disposent dâun cursus de formation adaptĂ© aux techniques de demain et ils sont nombreux chaque annĂ©e Ă vouloir sâinstaller. Mais les surfaces agricoles manquent et le problĂšme foncier sâavĂšre rĂ©el. Dâautant plus que lâimplantation dâun jeune agriculteur coĂ»te cher et que les outils financiers sont complexes, durs et longs Ă obtenir.
Pourtant, il est crucial aujourdâhui que ces jeunes puissent prendre la relĂšve, car 53 % des agriculteurs actuels ont plus de 53 ans. La Chambre dâagriculture sâemploie Ă rechercher des solutions et Ă mieux accompagner ces jeunes professionnels pour assurer la pĂ©rennitĂ© de lâagriculture rĂ©unionnaise.
âą Lâavenir est-il dans le dĂ©veloppement de la filiĂšre biologique de la canne Ă sucre ?
- Il pourrait en effet en faire partie et une Ă©tude de faisabilitĂ© a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e en ce sens. Mais lâindustrie sucriĂšre implique des structures importantes et il faudrait de 25 Ă 30 000 tonnes de canne biologique chaque annĂ©e pour rentabiliser une usine. Câest pourquoi nous rĂ©flĂ©chissons Ă dĂ©velopper de plus petites unitĂ©s, plus adaptĂ©es au contexte et au territoire local.
Une chose est sĂ»re, 30 agriculteurs expĂ©rimentent dĂ©jĂ la culture de la canne biologique et, dâici deux ans, nous aurons plus de visibilitĂ© sur cette filiĂšre.
Mais lĂ encore, nous devrons affronter la concurrence de grands pays producteurs comme le BrĂ©sil ou le Panama, qui ne sont pas soumis aux mĂȘmes contraintes environnementales que nous !
Rédaction et interview : Mariane Aimar
Produits agricoles transformĂ©s, mis en valeur au Village RĂ©union du Salon International de lâAgriculture 2024 Ă Paris.
Photos de lâarticle : © Chambre dâagriculture de La RĂ©union
DES BADAMIERS DE LâINDE TRANSPLANTĂS VERS LE CĆUR VERT FAMILIAL c apitale de S outre - mer , S aint - d eni S pour S uit S a mutation ver S une ville verte et durable avec la tran S plantation de plu S ieur S badamier S de l â i nde . c e S immen S e S arbre S offrant un ombrage exceptionnel ont ain S i Ă©tĂ© dĂ©placĂ© S de la rue de S p oivrier S ju S qu â au parc urbain j ean - p ierre e S peret , Ă la t rinitĂ© , oĂč il S pourront jouir d â une S econde vie
UNE OPĂRATION DĂLICATE, QUI SâINSCRIT DANS LA TRANSITION ĂCOLOGIQUE DE LA VILLE EngagĂ©e dans un tournant Ă©cologique pour faire du chef-lieu un territoire plus apaisĂ©, plus vert et plus responsable, la Ville de Saint-Denis, en collaboration avec la direction Environnement de la Ville du Port, a procĂ©dĂ© Ă la transplantation de plusieurs badamiers de lâInde, qui jalonnaient la rue des Poivriers dans le quartier de Montgaillard. « Avant leur transplantation, les racines de ces arbres de plus de 10 mĂštres de haut allaient jusquâĂ soulever les trottoirs, les rendant impraticables pour les piĂ©tons, qui risquaient de chuter
et se blesser. Des murs de clĂŽture ont par ailleurs Ă©tĂ© fissurĂ©s », souligne Ămilie Catherine, directrice des Espaces publics, Environnement et Cadre de vie de la Ville. Le badamier de lâInde (Barringtonia asiatica), arbre Ă fleurs Ă©galement appelĂ© « bonnet du prĂȘtre » ou « bonnet dâĂ©vĂȘque » peut en effet atteindre une hauteur de 30 mĂštres. « Lâarbre est un ĂȘtre vivant, Ă la recherche dâeau et de nutriments. Ses racines sont donc allĂ©es âchercherâ lâeau ».
La transplantation sâest dĂ©roulĂ©e en deux temps. Elle a dâabord Ă©tĂ© prĂ©parĂ©e Ă partir du 18 octobre, Ă travers la dĂ©coupe de la chaussĂ©e, un Ă©lagage prĂ©ventif pour stresser les sujets transplantĂ©s et lâaspiration des gravats afin de dĂ©gager au mieux leurs
De plus, le déplacement de ces
spĂ©cimens, matures et sains, permettra Ă la Ville dâentreprendre des travaux de voirie dans la rue des Poivriers, dont les trottoirs ont Ă©tĂ© partiellement dĂ©truits par la prĂ©sence des badamiers de lâInde. © Ville de Saint-Denis
LâopĂ©ration sâinscrit pleinement dans la politique de verdissement portĂ©e dĂšs le dĂ©but de la mandature actuelle. | Un reprĂ©sentant de la Ville du Port en chasuble orange entourĂ© par M. Poleya, M me Adame, M. Sambassouredy et M me Catherine, de la Ville de Saint-Denis.
racines. Ensuite, le 22 octobre a marquĂ© le dĂ©but des actions de dessouchage en prĂ©sence et sous la coordination des Ă©quipes de la Ville du Port, suivi de la replantation des arbres au parc de la TrinitĂ© JeanPierre Esperet. « Nous avons pu observer que les racines avaient aussi endommagĂ© les rĂ©seaux dâeaux usĂ©es, ce qui a compliquĂ© la tĂąche des agents pour retirer les arbres sans les abĂźmer ni endommager les rĂ©seaux », ajoute Ămilie Catherine.
Ce sont une quinzaine dâagents des deux communes qui se sont mobilisĂ©s autour de ce projet qui a permis de transplanter cinq arbres de plus de 15 ans Ă Saint-Denis, au parc de la TrinitĂ©, et quatre arbres au Port. « La Ville du Port disposant du savoir-faire nĂ©cessaire Ă lâopĂ©ration, un partenariat sâest donc mis en Ćuvre afin de âdonner une seconde vieâ Ă ces arbres », se fĂ©licite la directrice. Une alternative Ă lâabattage pour ces sujets de grande taille, sachant quâil faut patienter une vingtaine dâannĂ©es avant de les voir atteindre une telle envergure et maturitĂ©. Le parc urbain Jean-Pierre Esperet, Ă la TrinitĂ©, Ă©tant Ă proximitĂ© et soumis au mĂȘme microclimat, ce site a naturellement Ă©tĂ© retenu pour leur replantation.
« Les conditions Ă©taient rĂ©unies pour espĂ©rer une trĂšs bonne reprise des sujets transplantĂ©s et un niveau de stress diminuĂ© », considĂšre Ămilie Catherine.
REDENSIFIER LA STRATE ARBORĂE DU PARC URBAIN DE LA TRINITĂ Ce projet concourt ainsi Ă la redensification de la strate arborĂ©e du parc de la TrinitĂ©, en y ramenant trĂšs rapidement ombre et fraĂźcheur. Les plantations sur chacune des strates â herbacĂ©e, arbustive, arborĂ©e â de ce parc urbain revĂȘtent leur importance, et entrent dans une stratĂ©gie plus globale de gestion diffĂ©renciĂ©e. Ă titre dâexemple, la strate herbacĂ©e contribue Ă favoriser la protection des insectes.
Ce parc, poumon vert de Saint-Denis, est un espace de respiration et de dĂ©tente, en particulier actuellement, en pĂ©riode estivale. « La Ville de Saint-Denis, consciente du rĂ©chauffement du climat et de ses consĂ©quences Ă venir, sâengage dans la protection de la biodiversitĂ©, ce qui participe Ă la rĂ©silience du territoire face aux impacts du changement climatique », conclut Ămilie Catherine.
Les cinq arbres transplantĂ©s font lâobjet de soins constants par lâĂ©quipe de la direction de lâEnvironnement â arrosage quotidien de 15 minutes par sujet, surveillance des racines et des branches â afin que leurs feuilles se dĂ©veloppent et que les arbres sâancrent durablement dans ce nouvel environnement.
transplantation rĂ©ussie qui permettra, une fois la rĂ©fection des trottoirs terminĂ©e, lâinstallation dâarbustes fleuris et colorĂ©s.
Rédaction
Stéphanie
Castre | Pauline Bénard
Photos
© Ville de Saint-Denis
LâĂCOGĂTE DU VOLCAN A OUVERT SES PORTES ! Se fondre danS le maSSif du piton de la fournaiSe a Ă©tĂ© la clĂ© de voĂ»te de la reconStruction du gĂźte du volcan Ă l â i SS ue d â un ambitieux chantier dĂ©butĂ© en 2021, l â Ă©tabli SS ement a ouvert
S e S porte S le 15 novembre 2024. u n lieu d â accueil unique , re S pectueux de l â environnement , Ă dĂ©couvrir au cĆur d â un S ite cla SS Ă© au p atrimoine mondial de l â u ne S co .
Avec plus de 650 000 visiteurs extĂ©rieurs enregistrĂ©s en 2023, La RĂ©union demeure un formidable pĂŽle dâattractivitĂ© touristique pour ses plages, pour sa population mĂ©tissĂ©e et accueillante, mais surtout pour ses pitons, cirques et remparts inscrits au Patrimoine mondial de lâHumanitĂ©. Parmi ces espaces naturels exceptionnels figure le massif du Piton de la Fournaise oĂč le GĂźte du Volcan, nouvelle structure touristique Ă©quipĂ©e de 101 couchages et dâun restaurant aux produites locaux de 120 couverts, vient dâĂȘtre inaugurĂ©.
LE GĂTE DU VOLCAN, BALCON SUR LE MASSIF DU PITON DE LA FOURNAISE « Câest complet pour les premiers jours. Nous sommes prĂȘts ! » souriait dĂ©but novembre Yves Picard, gĂ©rant de lâancien gĂźte et prĂ©sident de lâAGGM (Association des gestionnaires des gĂźtes de montagne), en charge de la dĂ©lĂ©gation de service public de cet Ă©quipement dĂ©partemental sorti de terre Ă 600 mĂštres de lâaccĂšs au cratĂšre du Piton de la Fournaise.
Lors dâune derniĂšre visite de chantier en prĂ©sence de la presse, le prĂ©sident du DĂ©partement Cyrille Melchior a soulignĂ© le caractĂšre exceptionnel de ce chantier : « Le bĂątiment a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© en suivant une dĂ©marche de haute qualitĂ© environnementale et sâinscrit dans un principe dâĂ©cogestion, avec notamment une autonomie en eau chaude et en Ă©lectricitĂ©, ainsi quâune intĂ©gration parfaite dans le paysage. »
Lâarchitecture sâinsĂšre en effet harmonieusement dans la nature environnante. « LesbĂątimentsprennentlaforme de trois cordĂ©es Ă lâimage des formations laviques Ă surface ridĂ©e et se fondent dans le paysage, sans rompre la perception globale du massif », ajoute Julien Gemehl, architecte dâAltitude 80 Architecture.
Le GĂźte du Volcan, accessible en voiture, ainsi quâaux personnes ĂągĂ©es et PRM, se situe prĂšs du dĂ©part de la randonnĂ©e vers le majestueux Piton de la Fournaise. © Jiovanni Picard | LâĂ©cogĂźte, surmontĂ©
En haut : terrasse dâobservation. © Jiovanni Picard | Les randonneurs peuvent profiter de prestations de qualitĂ©. | Ci-dessus : aperçu du confort dâune chambre double. © Bruno Bamba / DĂ©partement de La RĂ©union | Petit dĂ©jeuner prĂ©parĂ© pour les voyageurs. © Jiovanni Picard
TĂMOIGNAGE CYRILLE MELCHIOR, PRĂSIDENT DU DĂPARTEMENT DE LA RĂUNION
« Le DĂ©partement de La RĂ©union, en tant que propriĂ©taire du domaine forestier dĂ©partemento-domanial, intervient sur plus de 100 000 hectares de milieux naturels, soit prĂšs de 40% de la surface de lâĂźle, dont des espaces naturels sensibles comme le MaĂŻdo, vĂ©ritable balcon sur le cirque de Mafate, le Piton des Neiges, plus haut sommet de lâocĂ©an Indien, ou le Piton de la Fournaise, site touristique le plus visitĂ© de lâĂźle â avec 400000 visiteurs par an â qui prĂ©sente des paysages Ă©poustouflants.
Ces sites mĂ©ritent donc toute notre attention, et tout notre engagement, pour favoriser une expĂ©rience de dĂ©couverte Ă la hauteur de nos ambitions en matiĂšre de dĂ©veloppement du tourisme vert, du tourisme des Hauts, Ă La RĂ©union. Câest la raison pour laquelle un ambitieux SchĂ©ma directeur dâamĂ©nagement et de dĂ©veloppement touristique des espaces naturels dĂ©partementaux est en cours dâĂ©laboration par la CollectivitĂ©. Il vise une amĂ©lioration qualitative de nos sites touristiques, au premier rang desquels figurent les gĂźtes dĂ©partementaux, dont lâemblĂ©matique âGĂźte du Volcanâ situĂ© au Pas de Bellecombe-Jacob.
AprĂšs trois annĂ©es de travaux, nous avons touchĂ© au but en novembre 2024 avec la livraison de ce fabuleux Ă©cogĂźte, dont la construction a reprĂ©sentĂ© une prouesse architecturale et environnementale au cĆur du Parc national. Une telle structure a vocation Ă devenir un lieu incontournable pour bon nombre de RĂ©unionnais et de touristes souhaitant dĂ©couvrir ou redĂ©couvrir ce somptueux massif du Piton de la Fournaise. Le nouveau GĂźte du Volcan rĂ©pond Ă toutes les exigences dâintĂ©gration architecturale et dâinnovation Ă©cologique. Il propose aussi dâexcellentes prestations aux visiteurs et sâinscrit dans une rĂ©elle montĂ©e en gamme de lâoffre touristique pour le territoire.
Nous nous engageons ainsi Ă offrir aux voyageurs une expĂ©rience exceptionnelle de dĂ©couverte de lâĂźle, Ă la hauteur du label âPatrimoine mondialâ ».
+ dâinfo ici : https://www.legiteduvolcan.re/
Portrait de
Cyrille Melchior
© Bruno
Bamba
Rédaction
Béatrice
Tevanee | Stéphanie Castre
PORT RĂUNION ĂLARGIT LA PRĂVENTION ET LA LUTTE CONTRE LES ESPĂCES EXOTIQUES ENVAHISSANTES a u p ort o ue S t , le foyer du g rand p ort m aritime de l a r Ă©union ( gpmdlr ) accueillait , le 14 novembre, un rendeZ-vouS inĂ©dit : la rencontre entre leS acteurS portuaireS engagĂ©S Ă l â encontre de S e S pĂšce S exotique S envahi SS ante S ( eee ). l â occa S ion d â Ă©changer S ur le S dĂ©fi S que reprĂ© S entent ce S menace S environnementale S et le S S tratĂ©gie S pour mieux le S anticiper
OrganisĂ©e par lâUnion maritime interprofessionnelle de La RĂ©union (UMIR) dans le cadre de sa commission « Gestion des risques » et en partenariat avec le GPMDLR dans le cadre de son SchĂ©ma Directeur du Patrimoine Naturel (SDPN), cette sĂ©ance de travail a Ă©tĂ© consacrĂ©e Ă un sujet majeur : la lutte contre les EEE.
SENSIBILISER LâENSEMBLE
DES AGENTS ĆUVRANT SUR LE PORT
LâĂ©vĂ©nement, qui a rassemblĂ© durant une matinĂ©e une trentaine de personnes, avait vocation Ă informer et sensibiliser les acteurs portuaires sur lâimportance de la dĂ©tection et des alertes prĂ©coces pour prĂ©venir la propagation de ces espĂšces, et ainsi prĂ©server la biodiversitĂ© rĂ©unionnaise.
PrĂ©sident de lâUMIR, Philippe Leleu a ouvert la sĂ©ance en rappelant que lâUMIR apporte depuis 22 ans son
expertise au service de la performance de lâactivitĂ© portuaire de La RĂ©union. « LâUMIR fĂ©dĂšre une quarantaine dâacteurs locaux, prĂ©sents sur toute la chaĂźne portuaire et reprĂ©sentant lâensemble de ses opĂ©rateurs. Chaque annĂ©e, nous interrogeons nos membres pour dĂ©finir les sujets prioritaires. Lâune de nos commissions travaille sur la gestion des risques, dont font partie les EEE ». Selon Philippe Leleu, pour rendre cette lutte plus efficace, il convient « de renforcer le lien entre la communautĂ© portuaire et les autoritĂ©s compĂ©tentes ».
Cela implique aussi de collaborer avec les structures de lâĂźle spĂ©cialisĂ©es dans la maĂźtrise de ces espĂšces â SEOR, SREPEN, OFB, NOI, IRI, DEAL... â « afin de rendre chaque professionnel du port, quâil soit docker, remorqueur, pilote, etc., acteur de cette lutte ». Et de poursuivre : « chacun(e) doit savoir exactement quoi faire, quand il ou elle observe une EEE sur le port ». Le ton Ă©tait donnĂ© : la clĂ© dâune action efficace contre les EEE rĂ©side avant tout dans sa dimension collective.
Une attention toute particuliĂšre a Ă©tĂ© portĂ©e Ă lâagame des colons, Ă la perruche Ă collier et au corbeau familier, des EEE susceptibles dâĂȘtre signalĂ©es rĂ©guliĂšrement dans lâenceinte portuaire. La perruche Ă collier, dont lâĂ©limination du milieu naturel est encore possible, se trouve dans une situation intermĂ©diaire entre lâagame des colons, qui a dĂ©jĂ envahi lâĂźle, et le corbeau commun, en dĂ©tection prĂ©coce. © UMIR
DES MENACES DIRECTES POUR LA BIODIVERSITĂ NATIVE DE LâĂLE Il a Ă©tĂ© rappelĂ© par la SEOR â SociĂ©tĂ© dâĂ©tudes ornithologiques de La RĂ©union â que la propagation des EEE Ă©tait liĂ©e Ă leur rĂ©sistance aux maladies, Ă leur reproduction rapide et au caractĂšre opportuniste de ces espĂšces qui sâadaptent aisĂ©ment Ă de nouveaux milieux. A contrario, la faune et la flore natives insulaires, ayant Ă©voluĂ© dans un Ă©cosystĂšme restreint, nâont pas dĂ©veloppĂ© de capacitĂ© dâadaptation. Le paille-en-queue, oiseau marin indigĂšne de lâĂźle, voit ainsi ses sites de nidification volĂ©s par le martin triste, introduit Ă La RĂ©union vers 1760 pour lutter contre les sauterelles. Autre exemple, parmi tant dâautres : le grand gecko vert de Madagascar est responsable de la destruction des populations dâun lĂ©zard endĂ©mique et protĂ©gĂ©, le gecko vert de Manapany.
DE PRĂCIEUSES CONTRIBUTIONS Pour StĂ©phane Esparon, chef de lâunitĂ© BiodiversitĂ© de la DEAL RĂ©union, le constat est clair : « nous avons besoin de ces moments dâĂ©changes avec les acteurs ». Car, malgrĂ© une rĂ©glementation Ă©toffĂ©e sur les EEE et « des associations lâappliquant trĂšs bien », il faut « agir dĂšs la phase dâintroduction, le plus fort possible, sinon cela coĂ»tera trĂšs cher, si tant est que nous puissions encore agir ». La course contre la montre est engagĂ©e.
Responsable du service Environnement et AmĂ©nagement du GPMDLR, Priscille LabarrĂšre a soulignĂ© les efforts de sensibilisation menĂ©s au port contre les EEE. Elle a citĂ© le protocole bilatĂ©ral franco-mauricien « vers blancs », mis en place du 1er novembre au 15 janvier pour empĂȘcher lâĂ©change entre les deux Ăźles des scarabĂ©es de la canne Ă sucre, ravageurs de cultures, via des
extinctions de lumiĂšre et contrĂŽles Ă bord des navires.
Bernadette Lebihan-Ardon, ancienne prĂ©sidente de la SREPEN â SociĂ©tĂ© rĂ©unionnaise pour lâĂ©tude et la protection de lâenvironnement â a ensuite mis en avant lâimportance « dâimpliquer aussi les grands transporteurs, pour quâils puissent avoir une action vertueuse ».
Des propos appuyĂ©s par Fabrice Hoarau, conseiller rĂ©gional dĂ©lĂ©guĂ© Ă lâenvironnement, qui a relevĂ© que « 140000 containers entrent chaque annĂ©e au Grand Port Maritime. Beaucoup ne sont pas contrĂŽlĂ©s. Ne vaut-il pas mieux mettre beaucoup dâargent pour contrĂŽler ces navires, que pour Ă©radiquer les EEE ? » Ensuite, le prĂ©sident de lâIRI â Initiative pour la restauration Ă©cologique en milieu insulaire â Gilles David Derand a attirĂ© lâattention sur un point. « Les moyens de contrĂŽle, la dĂ©tection prĂ©coce, cela est bien sĂ»r crucial, mais certaines EEE, comme lâarbre-pieuvre, ne sont pas interdites. Ă La RĂ©union, des centaines dâespĂšces invasives restent autorisĂ©es ! », regrette-t-il.
Les Ă©changes se sont poursuivis avec Jean-François Cornuaille de lâOFB. « Sur les 2000 EEE installĂ©es sur lâĂźle, environ 150 posent problĂšme, dont le corbeau familier, lâune des 100 espĂšces les plus problĂ©matiques au monde. Les Seychelles ont rĂ©ussi Ă lâĂ©radiquer. Ă La RĂ©union, on est au stade de dĂ©tection prĂ©coce, alors on peut y arriver plus facilement que pour dâautres espĂšces. Tandis que sur lâagame des colons, qui monte en altitude, on est dĂ©passĂ©, câest trop tard, il envahit dĂ©jĂ toute lâĂźle jusquâĂ 600 mĂštres... » Enfin, lâassociation Nature OcĂ©an Indien (NOI) a abordĂ© la notion de lâĂ©thique, avec par exemple un recours privilĂ©giĂ© Ă la nasse Ă entrĂ©e unique, plutĂŽt quâĂ la colle, pour capturer sur le port les agames des colons.
Le GPMDLR souhaite renouveler Ă lâavenir ce partage dâinitiatives, qui a Ă©tĂ© trĂšs apprĂ©ciĂ©. La prochaine Ă©tape sera dâimpliquer les grandes compagnies maritimes dans cette lutte essentielle contre les EEE.
MAYOTTE QUEL AVENIR POUR LâYLANG-YLANG DE MAYOTTE ? culture autrefoiS incontournable de lâĂźle de mayotte, l â ylang-ylang, SurnommĂ© « la fleur deS fleurS » a aujourd â hui preSque diSparu du pay S age . d epui S 2019, l â entrepreneur k a SS im f idaly cherche Ă relancer la filiĂšre
S ur un modĂšle plu S durable que celui de S concurrent S malgache S et comorien S
Deux fleurs jaunes dâylang-ylang ornent encore le blason de Mayotte, Ă©voquant la prospĂ©ritĂ© agricole de lâĂźle. Pourtant, la « fleur des fleurs », exploitĂ©e sur plus de 1 000 hectares dans les annĂ©es 70, nâest, sur lâĂźle aux parfums, guĂšre plus cultivĂ©e que dans une perspective agritouristique.
En 2017, lors du dernier recensement effectuĂ© par la Direction de lâalimentation, de lâagriculture et de la forĂȘt (DAAF) de Mayotte, lâylang-ylang nâĂ©tait plus exploitĂ© que sur une centaine dâhectares, avec une dynamique Ă la baisse. « Le modĂšle Ă©conomique est trĂšs vieillissant. On a de petits producteurs, avec de toutes petites surfaces et des coĂ»ts de production beaucoup plus Ă©levĂ©s que la concurrence », expose Kassim Fidaly, un porteur de projet qui sâest mis en tĂȘte, depuis 2019, de relancer la culture.
UN MODĂLE QUI NâEST PAS DURABLE Au-delĂ de ces contraintes Ă©conomiques, la filiĂšre se heurte aussi Ă un enjeu Ă©cologique. Comme ses concurrentes comoriennes et malgaches, la filiĂšre mahoraise nâest pas du tout durable. « Pour produire 2 Ă 2,5 kilos dâhuile essentielle, il faut une demi-tonne
SpĂ©cialisĂ©e dans la transformation de la fleur dâylang-ylang en cosmĂ©tiques rĂ©glementĂ©s, lâentreprise Neosent rĂ©pond aux problĂ©matiques spĂ©cifiques de Mayotte, en ayant notamment recours Ă lâĂ©nergie solaire afin de prĂ©server les ressources locales en bois. © Kassim Fidaly
Ă une tonne de bois et 40 m3 dâeau, car le procĂ©dĂ© de distillation est extrĂȘmement Ă©nergivore », rĂ©sume le fondateur de NĂ©osent, dont le but est justement de mettre en place une unitĂ© de production plus rĂ©siliente.
La rĂ©gion, en pleine expansion dĂ©mographique, manque dĂ©jĂ cruellement dâeau, notamment en raison de la multiplication des sĂ©cheresses, dont on sait quâelles sâaggraveront avec le dĂ©rĂšglement climatique. Quant Ă la dĂ©forestation, elle est aussi extrĂȘmement forte dans la rĂ©gion, mettant en pĂ©ril la trĂšs riche biodiversitĂ© de ces territoires.
« La culture dâylang ylang nâexplique pas entiĂšrement le recul de la forĂȘt, mais elle y a participĂ©. Ă Nosy Be [une Ăźle au nord-ouest de Madagascar], oĂč nous avons la production familiale, tous les producteurs vont chercher le bois de plus en plus loin pour assurer leurs besoins en Ă©nergie. Ce nâest pas viable », confirme Kassim Fidaly, lui-mĂȘme dâorigine malgache.
Aux Comores, la plateforme Global Forest Watch estime que 25 % de la forĂȘt a Ă©tĂ© dĂ©frichĂ©e ces 20 derniĂšres annĂ©es. Quant Ă Mayotte, si le taux de dĂ©forestation actuel (1,2 %) se maintient, la forĂȘt aura carrĂ©ment disparu en 2070.
LâĂNERGIE SOLAIRE ET LE RECYCLAGE DES EAUX Fidaly, fondateur passionnĂ© de lâentreprise Neosent, sâattelle depuis 2019 Ă structurer une filiĂšre ylang-ylang durable Ă Mayotte.
« Nous proposons de remplacer le bois par de lâĂ©nergie solaire, car câest une Ă©nergie abondante et peu chĂšre, et de recycler les eaux de refroidissement qui, aujourdâhui, sont rejetĂ©es dans la nature », annonce lâentrepreneur et auteur dâune thĂšse en photochimie. Des Ă©tudes de faisabilitĂ©, financĂ©es par lâAdeme, ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© effectuĂ©es et cette distillerie devrait voir le jour courant 2025 sur la commune de Ouangani, au centre de Mayotte.
Alors, comment Mayotte pourrait-elle retrouver la fleur qui a fait sa richesse tout en prĂ©servant un Ă©cosystĂšme dĂ©jĂ trĂšs abĂźmĂ© ? Si des initiatives un peu plus durables ont Ă©tĂ© lancĂ©es Ă Nosy Be ou aux Comores, elles sont, de lâavis de Kassim Fidaly, trop peu ambitieuses.
Pour la production, Kassim Fidaly assure travailler avec des agriculteurs sur la base dâun cahier des charges respectueux de lâenvironnement. « Lâylangylang est une plante trĂšs rĂ©sistante qui ne nĂ©cessite pas dâintrants, donc lâensemble des cultures peuvent ĂȘtre valorisĂ©es en bio. Notre objectif est dâavoir un label Ă©cologique et de pouvoir certifier que notre procĂ©dĂ© est sobre en carbone », explique-t-il.
UNE INITIATIVE RECONNUE La durabilitĂ© de la production sera, espĂšre-t-il, un critĂšre pour se dĂ©marquer sur le marchĂ©, en plus dâune formule un peu particuliĂšre, qui mettra en valeur les fractions hautes supĂ©rieures de la plante. Si la relance de la filiĂšre ne sera pas chose aisĂ©e, notamment car il reste Ă convaincre les producteurs de relancer cette culture alors que, justement, les jeunes Mahorais tendent Ă sâĂ©loigner des mĂ©tiers agricoles, le projet de Kassim Fidaly a dĂ©jĂ Ă©tĂ© reconnu au-delĂ de Mayotte. Neosent a Ă©tĂ© laurĂ©at des programmes MouvâOutremer ocĂ©an indien 2021 et French Tech Tremplin 2024, et finaliste du concours Innovation Outre-Mer 2024, des initiatives promouvant lâentrepreneuriat.
RĂ©daction : Enzo Dubesset + dâinfo ici : https://neosent.fr/
Kassim
En haut : avant Chido, champ dâylang-ylang (Cananga odorata) Ă Mayotte, un territoire considĂ©rĂ© « comme le terroir dâexception pour la production en particulier des fractions les plus raffinĂ©es de lâylang, ce qui justifie les efforts visant Ă relancer la filiĂšre », rappelle Kassim Fidaly. « Des initiatives dâagritourisme, telles que celles proposĂ©es par les partenaires de Neosent (AROmaorĂ© dâHassani Soulaimana et Le Jardin dâImany dâAnwar), peuvent aider Ă maintenir la production tout en favorisant le dĂ©veloppement Ă©conomique local », note-t-il. © Kassim Fidaly
Autres images de la double page : lâarticle a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© avant le passage du cyclone tropical intense Chido. Voici des vues de champs dâylangs et de cocotiers Ă Mayotte aprĂšs lâĂ©vĂ©nement climatique et, ci-dessous, le tĂ©moignage de Kassim Fidaly.
« Ce 1er janvier, lâheure Ă©tait au constat des dĂ©gĂąts causĂ©s aux ylangueraies. Jâai pris le temps de sillonner les routes de lâĂźle dans les principaux fiefs de lâylang-ylang, au PĂŽle dâexcellence rurale, Ă Ouangani, en allant jusquâaux plantations Guerlain Ă Combani. Entre Coconi et Kahani, le site de Valarano, avec sa forĂȘt et sa biodiversitĂ© unique, a Ă©tĂ© dĂ©vastĂ©. Le LycĂ©e agricole y dĂ©veloppe une cocoteraie pour valoriser la filiĂšre noix de coco : plus de 90% de nos cocotiers sont Ă terre. Je rends visite Ă Hassani Soulaimana dâAROmaorĂ© qui habite Ouangani. Un ami, qui fait partie de ceux qui ont permis de prĂ©server lâylang de Mayotte depuis tant dâannĂ©es. Beaucoup de dĂ©gĂąts, mais on admire la patience et la solidaritĂ© quâont les agriculteurs pour se relever. Ă VahibĂ© puis Ă Combani, la dĂ©solation est encore plus grande. Lâeau et le vent se sont dĂ©chaĂźnĂ©s sur le paysage vert de Mayotte. Je me rends alors aux anciennes plantations Guerlain, 13 hectares dâylangueraies. La quasi-totalitĂ© du site Guerlain semble dĂ©truite. Mais les ylangs sont encore lĂ ! Certes, ils ont Ă©tĂ© malmenĂ©s, mais ils sont toujours debout et ils incarnent cet espoir que nous avons de relancer la distillation. »
Photos de la double page : © Kassim Fidaly
MAYOTTE : TOUS UNIS POUR REDONNER VIE Ă LâĂLE ! d u 5 au 7 dĂ©cembre, « mon Ăźle propre », la toute premiĂšre opĂ©ration collective de nettoyage et de S en S ibili S ation initiĂ©e Ă l â Ă©chelle de l â en S emble du territoire par le conSeil dĂ©partemental et le Sidevam 976, a connu un vif S uccĂš S f ocu S
UNE OPĂRATION INĂDITE Ă MAYOTTE Durant trois jours, munis de gants et de sacs-poubelle, les scolaires, les agents de lâadministration, les salariĂ©s des entreprises et le grand public se sont mobilisĂ©s, sur un pĂ©rimĂštre prĂ©cis de nettoyage, pour collecter tous types de dĂ©chets â exceptĂ© les dangereux âdans les zones urbaines et rurales de Mayotte, les espaces naturels, les sites remarquables.
Cette opĂ©ration dâenvergure a nĂ©cessitĂ© une importante logistique. Des bennes ont Ă©tĂ© dĂ©ployĂ©es sur lâensemble du territoire pour les encombrants, les dĂ©chets dâĂ©quipements Ă©lectriques et Ă©lectroniques (DEEE), mais Ă©galement les dĂ©chets mĂ©nagers et les batteries. « Si la mise Ă disposition des dĂ©chets de la part du concitoyen a durĂ© seulement trois jours, lâopĂ©ration de collecte par les entreprises en bord de route a perdurĂ© encore les 15 jours suivants », confie le docteur Hidaya Chakrina, directrice de communication du DĂ©partement de Mayotte.
Lâensemble de la population mahoraise a Ă©tĂ© conviĂ©e Ă prendre part Ă lâopĂ©ration « Mon Ăźle propre ». © Hannah Dominique
NETTOYER, ET SURTOUT SENSIBILISER Au-delĂ du passage Ă lâaction, lâobjectif de lâopĂ©ration a Ă©tĂ© de sensibiliser la population Ă lâimportance du tri des dĂ©chets, en montrant que chaque geste compte pour prĂ©server lâenvironnement. Le prĂ©fet de Mayotte François-Xavier Bieuville a soulignĂ© : « Mayotte nâest pas une Ăźle propre, il faut le reconnaĂźtre. On a une problĂ©matique dâĂ©coresponsabilitĂ©. Il faut que nos concitoyens comprennent que le moindre dĂ©tritus, le moindre objet en plastique, la moindre canette mettent des dizaines, des centaines dâannĂ©es Ă disparaĂźtre dans la nature et impactent durablement lâenvironnement. »
Ă titre dâexemple, HabitâĂme a participĂ©, aux cĂŽtĂ©s de VINCI, Ă cette grande opĂ©ration « Mon Ăźle propre ». « Nous avons ramenĂ© nos machines pour montrer au public comment nous pouvons recycler les dĂ©chets plastiques. Chacun est reparti avec un objet quâil a fabriquĂ©, comme un peigne, un porte-clé⊠», dĂ©crit Hannah Dominique, gĂ©rante de HabitâĂme.
« MON ĂLE PROPRE », UN BILAN POSITIF, UNE OPĂRATION PĂRENNE âą 43 000 participants dans les 17 communes de lâĂźle, 185 associations, 50 partenaires privĂ©s
⹠25 000 tonnes de déchets collectés sur tout le territoire mahorais
⹠400 carcasses de véhicules évacuées au sein de la commune de Mamoudzou
Dominique
c omme chacun Sait, le 14 dĂ©cembre 2024, m ayotte a Ă©tĂ© trĂš S lourdement frappĂ©e par le cyclone tropical inten S e c hido , qui a gĂ©nĂ©rĂ© de S con S Ă©quence S dĂ©va S tatrice S pour la population et l â environnement Ă© clairage avec h annah d ominique
INTERVIEW HANNAH DOMINIQUE, COFONDATRICE ET GĂRANTE DE LA STARTUP HABITâĂME Ă MAYOTTE
âą Quel regard portez-vous sur la situation ?
- Une profonde tristesse, un sentiment dâimpuissance. Toute lâĂźle de Mayotte est Ă reconstruire. Cette catastrophe climatique a non seulement causĂ© des morts, dĂ©truit des habitations et infrastructures, mais câest Ă©galement toute la forĂȘt, la faune, la flore qui sont Ă terre. La population est privĂ©e de nourriture, dâeau, dâĂ©lectricitĂ©. Toutes les terres agricoles sont dĂ©vastĂ©es. Les coulĂ©es de boue impactent le lagon. Les lĂ©muriens sont dĂ©sorientĂ©s et sont davantage visibles en milieu urbain, et meurent trĂšs souvent sur la route. Une explosion du braconnage des tortues est Ă craindre. Les dĂ©chets sâentassent, ce qui va amener des maladies. Câest un drame Ă la fois humanitaire et environnemental.
MalgrĂ© ce paysage de dĂ©solation, une grande solidaritĂ© sâest mise en place. La population, sans relĂąche, frappe la tĂŽle pour reconstruire les habitations. Il y a aussi un sentiment de colĂšre, car Mayotte se sent abandonnĂ©e du monde.
HABITâĂME RECYCLE LE PLASTIQUE Soutenue par le DĂ©partement de Mayotte, laurĂ©ate de la 9e Ă©dition du concours Innovation Outre-Mer dans la catĂ©gorie Cleantech & recycling, HabitâĂme est une entreprise de lâĂ©conomie sociale et solidaire (ESS). Elle rĂ©cupĂšre les dĂ©chets plastiques du territoire pour les transformer en matĂ©riaux de construction de second Ćuvre, en mobilier et objets divers. De plus, elle sensibilise aux enjeux environnementaux via des ateliers en milieu scolaire, dans les entreprises et collectivitĂ©s, forme aux mĂ©tiers du recyclage... HabitâĂme emploie 13 salariĂ©s, dont sept en insertion. Elle a pour but ultime la crĂ©ation de logements modulables en kits Ă Mayotte, accessibles Ă tous et Ă base de plastique recyclĂ©.
HabitâĂme souhaite apporter son soutien en donnant des matĂ©riaux de construction, mais aujourdâhui, câest trĂšs compliquĂ©, car seulement 40 % du territoire est raccordĂ© Ă lâĂ©lectricitĂ© et notre site de production fait partie des 60 % restants. Nous accompagnons les associations Ă travers la distribution de repas, la fourniture dâaides dâurgence, etc.
âą Comment envisagez-vous lâavenir de lâĂźle ?
- Il y a un monde dâavant et un monde dâaprĂšs ! Nous devons transformer ce drame en opportunitĂ© pour repenser nos modes de consommation, construire des bĂątiments dignes et respectueux de lâenvironnement, arrĂȘter la dĂ©forestation, remettre au goĂ»t du jour une forĂȘt endĂ©mique et une terre qui sâautoprotĂšge.
Comme les locaux de nombreuses entreprises, le siĂšge de HabitâĂme a Ă©tĂ© ravagĂ© par ce cyclone hors norme. © Hannah Dominique
Rédaction et interview
: Sandrine Chopot
Le cyclone tropical intense Chido a atteint une puissance telle que Mayotte nâavait pas connu de phĂ©nomĂšne similaire depuis 90 ans. Les vents ont dĂ©passĂ© les 220 km/h et ont littĂ©ralement soufflĂ© les habitations prĂ©caires, ainsi que de nombreuses constructions en dur par ailleurs.
Chido a semĂ© la dĂ©solation partout sur lâĂźle. Le bilan humain provisoire de son passage, communiquĂ© par la prĂ©fecture de Mayotte en date du 24 dĂ©cembre, faisait Ă©tat de 39 morts et de 4 260 blessĂ©s, dont 124 griĂšvement. Photographies de la double page : Hannah Dominique
LA CADEMA MET EN ĆUVRE SON PLAN CLIMAT-AIR-ĂNERGIE TERRITORIAL (PCAET) premier outil de ce type dĂ©ployĂ© Ă m ayotte , le pcaet mi S en place depui S 2021 par la cadema Se dĂ©cline en 69 actionS portant Sur ceS thĂ©matiqueS : la rĂ©duction deS Ă©miSSionS de ga Z Ă effet de S erre , l â adaptation au changement climatique , la S obriĂ©tĂ© Ă©nergĂ©tique , la qualitĂ© de l â air et le dĂ©veloppement de S Ă©nergie S renouvelable S
Un PCAET est un outil de planification stratĂ©gique et opĂ©rationnel obligatoire pour toutes les collectivitĂ©s de plus de 20 000 habitants. RĂ©visĂ© tous les six ans, avec une Ă©valuation Ă mi-parcours, il leur permet dâapprĂ©hender lâensemble des problĂ©matiques en lien avec le changement climatique et de construire un programme dâactions adaptĂ©.
Consciente des enjeux du rĂ©chauffement climatique, la Cadema, CommunautĂ© dâagglomĂ©ration de DembĂ©niMamoudzou, a engagĂ© dĂšs lâannĂ©e 2019 des ateliers de concertation et dâĂ©changes avec les acteurs du territoire et les autoritĂ©s compĂ©tentes pour mettre en place son PCAET. « AdoptĂ© pour la pĂ©riode 20212026, le PCAET est un projet territorial de dĂ©veloppement durable qui a deux objectifs principaux : lutter contre le changement climatique et adapter notre territoire aux consĂ©quences de ce changement », explique Mouniya Mboiboi, responsable Ă la fois de la Transition Ă©cologique et Ă©nergĂ©tique et de la StratĂ©gie biodiversitĂ© Ă la Cadema.
UN PLAN DâACTIONS AMBITIEUX ! âą La mobilitĂ© douce est en plein essor au sein de la Cadema, comme le premier rĂ©seau de transport collectif interurbain du territoire. Avec ses quatre lignes, Caribus ambitionne de desservir les dĂ©placements du nord au sud de la communautĂ© dâagglomĂ©ration. De nouveaux amĂ©nagements verts, des pistes cyclables et des zones piĂ©tonnes sont prĂ©vues. Un projet qui permettra Ă la fois de dĂ©sengorger Mamoudzou et de rĂ©duire les Ă©missions de gaz Ă effet de serre.
âą Le dĂ©veloppement des Ă©nergies renouvelables couplĂ© Ă la qualitĂ© environnementale des bĂątiments forment un autre axe fort du PCAET. La Cadema engage ainsi son territoire sur la trajectoire de lâautonomie Ă©nergĂ©tique, dont le cap est donnĂ© par la programmation pluriannuelle de lâĂ©nergie (PPE). Cette derniĂšre vise Ă rĂ©duire de 10 % la demande en Ă©lectricitĂ© dâici 2030 et Ă augmenter la part des Ă©nergies renouvelables dans le mix Ă©nergĂ©tique. La construction
La Cadema prĂ©sente son PCAET au public scolaire pour le sensibiliser aux Ă©cogestes, notamment sur la maĂźtrise de lâĂ©nergie. Cette maquette de maison permet dâĂ©voquer les panneaux solaires et les matĂ©riaux biosourcĂ©s, tels la brique de terre mahoraise, le bambou et le bois. © Cadema
Pour atteindre les objectifs fixĂ©s par le PCAET, les acteurs du territoire doivent revoir Ă la baisse leur consommation Ă©nergĂ©tique en favorisant lâutilisation de nouvelles Ă©nergies dans tous les secteurs : transport, mobilitĂ©, bĂątiment, agriculture, industrie... | Mouniya Mboiboi. © Cadema
de fermes solaires, dâune centrale solaire par EDM et la pose de toitures photovoltaĂŻques auprĂšs des particuliers, participent Ă cette rĂ©duction.
âą Un plan local dâurbanisme (PLU) a Ă©tĂ© intĂ©grĂ© au PCAET. Il autorise dĂ©sormais lâĂ©lĂ©vation des bĂątiments jusquâĂ 16 mĂštres, contre 11 mĂštres auparavant.
âą La collecte des dĂ©chets a Ă©tĂ© mise en place dans les zones inaccessibles. De plus, des actions de sensibilisation auprĂšs de la population sur lâĂ©nergie, la qualitĂ© de lâair, lâeau et les dĂ©chets sont effectuĂ©es par les Ambassadeurs « Ă©cogestes » prĂ©sents sur le terrain.
« Ă ce jour, nous en sommes Ă environ 50 % des actions rĂ©alisĂ©es. Lâobjectif, dâici 2026, est dâamorcer le plus dâinitiatives possibles, voire dâen mutualiser certaines. Il ne sâagit pas uniquement du PCAET de la Cadema, câest aussi celui des communes, des acteurs Ă©conomiques publics et privĂ©s, des institutions, des citoyens. Il est important que tout un chacun puisse se
JournĂ©e contre la prĂ©caritĂ© Ă©nergĂ©tique, le 12 novembre 2024 Ă la MJC de MâGombani, en partenariat avec lâassociation Soliha. © Cadema
lâapproprier. Enfin, ce PCAET nâest pas un outil figĂ© : il va devoir sâadapter Ă la nouvelle rĂ©glementation et sâaligner sur les nouveaux objectifs fixĂ©s par la PPE », prĂ©cise Mouniya Mboiboi.
UNE RENTRĂE 2025 RICHE EN ACTUALITĂS Le dĂ©cret tertiaire est une obligation rĂ©glementaire qui engage les acteurs du tertiaire vers la sobriĂ©tĂ© en matiĂšre dâĂ©nergie. Dans ce cadre, la Cadema est laurĂ©ate du programme national ACTEE, qui finance les collectivitĂ©s primĂ©es pour leurs projets de rĂ©novation Ă©nergĂ©tique.
« Nous allons poursuivre les audits Ă©nergĂ©tiques dans les Ă©coles primaires », communique la Cadema. De plus, en collaboration avec Hawa Mayotte, association locale agréée pour la surveillance de la qualitĂ© de lâair, les rĂ©sultats de lâĂ©tude en cours sur la qualitĂ© de lâair au sein de 48 Ă©coles primaires seront publiĂ©s cette annĂ©e.
Dans le domaine de la mobilitĂ©, les choses bougent ! La phase 1 du projet Caribus va ĂȘtre lancĂ©e en dĂ©but dâannĂ©e. Les premiĂšres navettes circuleront sur un tronçon dâenviron cinq kilomĂštres. Et Mouniya Mboiboi de conclure : « 2025, câest aussi, nous lâespĂ©rons, la pose de la premiĂšre pierre du siĂšge des nouveaux bĂątiments certifiĂ©s Haute QualitĂ© Environnementale de la Cadema ! »
TAAF â VENDĂE l â admini S tration de S t erre S au S trale S et antarctique S françai S e S ( taaf ) S â e S t a SS ociĂ©e Ă
la 10 e Ă©dition du v endĂ©e g lobe , entamĂ©e le 10 novembre , et dont une partie du tracĂ© S e dĂ©roule dan S le S mer S au S trale S , prĂš S de S rare S terre S Ă©mergĂ©e S du S ud de l â ocĂ©an i ndien
Partis le 10 novembre dernier des Sables dâOlonne, les 40 skippers participant Ă la 10 e Ă©dition du VendĂ©e Globe navigueront entre les quarantiĂšmes rugissants 1 et les cinquantiĂšmes hurlants 2, dans les mers australes, parmi les plus agitĂ©es de la planĂšte.
Ce passage au large des trois districts subantarctiques français â Crozet, Kerguelen et Saint-Paul et Amsterdam â est dâautant plus symbolique que cette annĂ©e, lâadministration supĂ©rieure des TAAF est partenaire du VendĂ©e Globe. Pour elle, cet Ă©vĂ©nement mĂ©diatique offre lâoccasion de rappeler le « rapport privilĂ©giĂ© » quâentretiennent ces territoires avec le monde maritime, et les actions de la France en faveur de la biodiversitĂ© exceptionnelle de la rĂ©gion.
Les TAAF abritent en effet lâune des plus fortes concentrations dâoiseaux et de mammifĂšres marins
au monde et accueillent en permanence des Ă©quipes scientifiques et techniques, chargĂ©es dâĂ©tudier ces Ă©cosystĂšmes uniques. Des forces militaires sont aussi prĂ©sentes pour assurer la souverainetĂ© nationale et faire face aux menaces de pĂȘche illĂ©gale.
La RĂ©serve naturelle nationale des Terres australes françaises, Ă©tendue en 2022, est Ă ce jour le deuxiĂšme plus vaste espace maritime protĂ©gĂ© mondial â avec plus dâ1,6 million de km 2 â derriĂšre le parc marin Ă©tatsunien « Marae Moana » des Ăles Cook
OPĂRATIONS DE SAUVETAGE Le lien entre les TAAF et le VendĂ©e Globe sâincarne de façon plus pragmatique avec le Marion Dufresne, le navire « couteau-suisse » chargĂ© du ravitaillement de
Haut de page : excursion sur des caillebottis protĂ©geant la flore de lâĂźle de la Possession, Ă Crozet, oĂč le Marion Dufresne est au mouillage. | 1 et 2 Noms attribuĂ©s respectivement aux latitudes situĂ©es entre les 40e et 50e, puis les 50e et 60e parallĂšles dans la zone de lâocĂ©an Austral
Crozet, des Kerguelen et de Saint-Paul et Amsterdam et qui mĂšne, comme nâimporte quel navire, des opĂ©rations de sauvetage en mer lorsque cela sâavĂšre nĂ©cessaire. En 2008 et en 2016, il a par exemple Ă©tĂ© mobilisĂ© pour secourir des skippers participant Ă la course du VendĂ©e Globe.
Pour faire connaĂźtre les TAAF, ainsi que les femmes et les hommes qui y Ă©voluent, plusieurs actions ont Ă©tĂ© mises en place. Une immersion Ă bord du Marion Dufresne a par exemple Ă©tĂ© organisĂ©e, dans le cadre de laquelle les inscrits ont reçu des « colis numĂ©riques », avec des nouvelles en temps rĂ©el de lâĂ©quipage ayant assurĂ©, en dĂ©cembre, la quatriĂšme rotation australe du navire en 2024.
Navigatrice, connue, entre autres, pour avoir Ă©tĂ© la premiĂšre femme Ă avoir accompli un tour du monde en solitaire lors dâune compĂ©tition, et prĂ©sidente du Conseil consultatif des TAAF, Isabelle Autissier incarne ce pont entre les Terres australes et antarctiques françaises et le VendĂ©e Globe.
INTERVIEW ISABELLE AUTISSIER, NAVIGATRICE ET PRĂSIDENTE DU CONSEIL
CONSULTATIF DES TAAF
âą Pouvez-vous revenir sur les liens existants entre le VendĂ©e Globe, les TAAF et le Marion Dufresne, sur lequel vous effectuez actuellement lâune des quatre rotations annuelles (OP4) ?
- Au-delĂ des missions de secours que le Marion Dufresne peut ĂȘtre amenĂ© Ă rĂ©aliser comme tout autre navire, il y a plusieurs points communs entre les deux univers. Quand on se trouve en mer, on est extrĂȘmement vulnĂ©rable et nous avons cette obsession de la sĂ©curitĂ© et de lâattention au milieu dans lequel nous naviguons. Nous sommes en permanence vigilants Ă la mĂ©tĂ©o et devons faire preuve dâune grande adaptabilitĂ©. Câest aussi vrai pour le skipper en solitaire qui va devoir bricoler pour rĂ©parer son bateau que nous, sur le Marion, quand une escale ne se passe pas comme prĂ©vu.
« IL FAUT TOUT FAIRE POUR PROTĂGER CETTE PETITE OASIS DE VIE »
⹠La biodiversité des mers australes est aussi riche que menacée par le dérÚglement climatique. Quelle émotion cela provoque-t-il chez vous ?
- Quand dâun cĂŽtĂ©, on voit la biodiversitĂ© sâappauvrir tout autour de nous et, de lâautre, quâon a ici des Ă©cosystĂšmes encore trĂšs fournis et vigoureux avec de nombreuses espĂšces endĂ©miques, je pense que lâon est tous saisis de la mĂȘme Ă©motion : il faut tout faire pour protĂ©ger cette petite oasis de vie.
Le dĂ©rĂšglement climatique, qui touche avant tout les pĂŽles, a un impact particuliĂšrement grave. Ici, dans les TAAF, un rĂ©chauffement dâun degrĂ© a de grandes consĂ©quences. Cela a par exemple un effet assĂ©chant qui permet au vent dâarracher les rares plantes parvenant Ă pousser. Les oiseaux perdent alors des sites de nidification. Il y a des effets en chaĂźne. Et, vu lâisolement des populations, si elles disparaissent ou sâamoindrissent, il nây a pas de retour en arriĂšre possible.
⹠Comment, en tant que présidente du Conseil consultatif des TAAF, menez-vous ce combat pour la préservation des océans ?
- Pour sauvegarder la vie sauvage, il ne suffit pas de tracer une rĂ©serve sur une carte. Il faut avoir tous les alĂ©as en tĂȘte et une vision Ă 360 degrĂ©s. Par exemple, il faut avoir des scientifiques pour comprendre comment Ă©volue le milieu, une force militaire pour empĂȘcher la pĂȘche illĂ©gale. Mon rĂŽle, dans tout ça, câest de prodiguer des conseils au prĂ©fet ou Ă la prĂ©fĂšte des TAAF et de mâassurer que lâensemble des points de vue soient bien entendus.
Rédaction et interview : Enzo Dubesset
POLYNĂSIE FRANĂAISE TAHITI SâATTAQUE ENFIN Ă LâIMMENSE PROBLĂME DES PNEUS USĂS Les pneus sont dĂ©posĂ©s sur un tapis roulant qui les emporte vers le broyeur, oĂč ils sont tronçonnĂ©s. © Anne-Charlotte Lehartel
pour la premiĂšre foiS, une filiĂšre de valoriSation deS pneumatiqueS a vu le jour Sur la cĂŽte oueSt de tahiti en 2023, alorS que l â immenSe majoritĂ© deS pneuS uSĂ©S â au moinS 2 800 tonneS par an â terminaient danS la nature, avec effet cumulatif depuiS deS dĂ©cennieS. un broyeur leS dĂ©chiquette afin de produire de S chip S , S orte S de copeaux calibrĂ© S aux utili S ation S diver S e S .
Sur 2 400 tonnes de pneus importĂ©es chaque annĂ©e en PolynĂ©sie française â hors les pneus qui arrivent dĂ©jĂ montĂ©s sur les vĂ©hicules neufs â seules 400 tonnes au mieux Ă©taient rĂ©cupĂ©rĂ©es par Fenua Ma, syndicat chargĂ© du tri en PolynĂ©sie française et signifiant « Pays propre ». Qui, au mieux, en rĂ©expĂ©diait une infime quantitĂ© vers la Nouvelle-ZĂ©lande, mais le plus souvent les stockait en surface, Ă la suite dâincendies qui ont dissuadĂ© le syndicat de les enfouir dans des casiers. CompĂ©tent Ă Tahiti et Moorea sauf Ă Faaâa, Fenua Ma est censĂ© recueillir tous les pneus de la filiĂšre professionnelle sur cette zone, puisque les vendeurs de pneumatiques ont en principe lâobligation de sâassurer du bon traitement de leurs dĂ©chetsâŠ
Ă plusieurs reprises, le syndicat a lancĂ© des appels dâoffres restĂ©s infructueux pour ces « dĂ©chets ultimes ». ClassĂ©s comme dĂ©chets non dangereux, les pneus usĂ©s reprĂ©sentent malgrĂ© tout un risque pour lâenvironnement et la santĂ© publique en cas dâincendies (Ă©missions de gaz toxiques) ou de dĂ©pĂŽts sauvages (gĂźtes pour les moustiques). Il est interdit de les enterrer, de les abandonner dans le milieu naturel ou de les brĂ»ler.
UN NOUVEAU MATĂRIAU DE REMBLAI, Ă UN PRIX PLUS ABORDABLE Finalement, la sociĂ©tĂ© Enviropol, spĂ©cialisĂ©e dans le tri, le transfert, lâenfouissement et la valorisation
des dĂ©chets, a remportĂ© un nouvel appel dâoffres lancĂ© par le Pays. Elle a installĂ©, sur le site du Centre dâenfouissement technique (CET) de Paihoro en 2023, une machine dâorigine amĂ©ricaine opĂ©rationnelle depuis quelques mois.
Les pneus sont dĂ©posĂ©s par un opĂ©rateur sur un tapis roulant qui les emporte vers le broyeur, oĂč ils sont tronçonnĂ©s. Les fragments arrivent dans un crible Ă recirculation : ce qui ne franchit pas le crible repart dans les mĂąchoires de lâengin. Enviropol obtient au final des Ă©lĂ©ments calibrĂ©s et normĂ©s de 10 cm maximum, un matĂ©riau qui peut ĂȘtre valorisĂ©, notamment dans des tranchĂ©es drainantes, ou alors comme matĂ©riau de remblai pour des applications notamment en voirie et rĂ©seaux divers (VRD). La question des agrĂ©gats devient sensible Ă Tahiti : les pierres utilisĂ©es par les travaux publics sont prĂ©levĂ©es dans les vallĂ©es, et les concessions sont de plus en plus difficiles Ă obtenir. PlutĂŽt que dâutiliser du basalte, Enviropol propose Ă la vente ses chips de pneus Ă petit prix. Selon Fenua Ma, lâactivitĂ© va tourner entre 1 400 et 1 700 tonnes de pneus broyĂ©es par an pour deux Ă trois jours de fonctionnement par semaine, afin dâĂ©vacuer peu Ă peu le stock historique mis de cĂŽtĂ© depuis 2012. Les pneus usĂ©s ne reprĂ©sentent « que » 0,5 % du gisement global des dĂ©chets, mais les associations savent quâil y en partout dans la nature, y compris sous lâeau.
Rédaction : Damien Grivois
TĂMOIGNAGE WINIKI SAGE, PRĂSIDENT DE LA FĂDĂRATION DES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DE LâENVIRONNEMENT (FAPE-TE ORA NAHO)
« LâarrivĂ©e Ă Tahiti de ce broyeur est une bonne nouvelle, les pneus usĂ©s faisaient partie des dossiers jamais rĂ©solus. Des milliers de pneus âdisparaissentâ dans la nature chaque annĂ©e, depuis des dĂ©cennies, rien nâayant Ă©tĂ© prĂ©vu en matiĂšre de recyclage. Lors des opĂ©rations de nettoyage du lit des riviĂšres ou des lagons, les associations en rĂ©cupĂšrent des quantitĂ©s incroyables. Le tonnage de pneus collectĂ©s par Fenua Ma reste trĂšs infĂ©rieur Ă ce quâil devrait ĂȘtre : il faut impliquer davantage les importateurs. Peut-ĂȘtre faudrat-il envisager un autre broyeur destinĂ© aux autres Ăźles que Tahiti ? Si les chips de pneumatiques broyĂ©s reprĂ©sentent une alternative aux agrĂ©gats, câest encore mieux, mĂȘme si ça ne remplacera pas tout. Nous pensons quâil faut cesser les extractions dans les lits des riviĂšres, dâautant que pendant longtemps, les tonnages prĂ©levĂ©s nâont pas Ă©tĂ© contrĂŽlĂ©s. La Fape milite pour lâouverture de vraies carriĂšres. Et peut-ĂȘtre envisager dâinclure une partie de chips de pneus dans le revĂȘtement des routes, ça renforce, paraĂźt-il, leur rĂ©sistance, adhĂ©rence et confort sonore. »
Ă gauche : Winiki Sage se rĂ©jouit de lâarrivĂ©e du broyeur, mais sâinquiĂšte que seul un pneu sur quatre arrive au retraitement. © Damien Grivois | Ci-dessus : lors de chaque opĂ©ration de nettoyage, le mĂȘme constat : on retrouve des pneus usĂ©s partout. © JMM
SEUL UN PNEU SUR QUATRE RĂCUPĂRĂ PAR FENUA MA
Selon lâInstitut de la statistique de la PolynĂ©sie française (ISPF), Tahiti importe chaque annĂ©e prĂšs de 150 000 pneus rien que pour les vĂ©hicules de tourisme, sans compter les pneus dĂ©jĂ montĂ©s sur les voitures neuves, qui totalisent a minima 25 000 pneus par an.
Lâarticle L541-2 du Code de lâenvironnement national stipule que « tout producteur ou dĂ©tenteur de dĂ©chets est responsable de la gestion de ses dĂ©chets jusquâĂ leur Ă©limination ou valorisation finale, mĂȘme lorsque le dĂ©chet est transfĂ©rĂ© Ă des fins de traitement Ă un tiers. Tout producteur ou dĂ©tenteur de dĂ©chets sâassure que la personne Ă qui il les remet est autorisĂ©e Ă les prendre en charge. »
Le Pays, adhérent au syndicat Fenua Ma au titre de sa compétence sur les déchets toxiques et spécifiques (piles, batteries, huiles, médicaments, carcasses de voitures, déchets électroniques, fusées de détresse, etc.), a voulu résoudre le problÚme.
AprĂšs une premiĂšre consultation demeurĂ©e infructueuse en 2017 « en raison de rĂ©ponses financiĂšres trop Ă©levĂ©es », Fenua Ma a lancĂ© un nouvel appel dâoffres remportĂ© par Enviropol. Les pneus usĂ©s sont en principe collectĂ©s lors de leur remplacement, puis envoyĂ©s chez Fenua Ma. En rĂ©alitĂ©, le syndicat rĂ©cupĂšre aujourdâhui au mieux 25 % des pneus des seuls vĂ©hicules de tourisme.
NOUVELLECALĂDONIE VALORGA CULTIVE LES RICHESSES DES DĂCHETS ORGANIQUES depuiS Sa crĂ©ation en 2018, le cluSter valorga S â attache Ă optimiSer l â impact Ă©cologique et Ă©conomique de S initiative S de valori S ation de S dĂ©chet S organique S mi S e S en Ćuvre par S a trentaine d â adhĂ©rent S l e S objectif S pour S uivi S : rĂ©duire le S dĂ©chet S , utili S er de S produit S locaux et naturel S , crĂ©er une filiĂšre Ă©conomique .
La valorisation des dĂ©chets organiques sâest dâabord dĂ©veloppĂ©e autour de la rĂ©utilisation des dĂ©chets verts, principalement via le compostage. Recycler pour ne plus enfouir, lâenfouissement Ă©tant « un non-sens Ă©conomique et environnemental », considĂšre ChloĂ© Saglibene, animatrice du cluster Valorga. Quitte Ă payer pour que son dĂ©chet soit gĂ©rĂ©, autant le faire pour quâil soit traitĂ© plutĂŽt quâenfoui. Cet enjeu a rencontrĂ© celui du traitement des boues de stations dâĂ©puration du Grand NoumĂ©a, qui concentre deux tiers de la population calĂ©donienne. La voie du cocompostage a Ă©tĂ© retenue, explique ChloĂ© Saglibene. « Le principe est de mĂ©langer deux volumes de dĂ©chets verts pour un volume de boue. » Une plateforme privĂ©e, qui a vu le jour en 2022 Ă Tontouta, au nord de lâagglomĂ©ration, vend dĂ©sormais du compost local.
Au fil des ans, de nouveaux projets émergent chez les adhérents de Valorga. « Une société propose du lombricompostage, une autre de la microméthanisation,
qui consiste Ă produire du biogaz Ă partir de la fermentation de matiĂšres organiques. Et puis, il y a la start-up Neofly qui teste un procĂ©dĂ© innovant. Elle transforme des larves de mouches nourries de biodĂ©chets organiques issus de lâindustrie agroalimentaire locale en farine riche en protĂ©ines pour lâalimentation animale, tandis que les restes servent dâengrais. »
LEVER LES A PRIORI Dans le cadre dâun appel Ă projets Ademe national, Valorga va comparer lâimpact sur le sol, lâenvironnement, la culture â comme le maĂŻs ou le fourrage â de deux types de fertilisations, une avec des apports organiques locaux, lâautre constituĂ©e dâengrais minĂ©raux importĂ©s. LâidĂ©e est de lever les craintes et les a priori Pas toujours Ă©vident quand les pratiques sont ancrĂ©es depuis longtemps. « Il y avait une certaine rĂ©ticence au dĂ©but Ă utiliser les composts locaux en raison dâun
En haut de page : cocompostage â câest-Ă -dire mĂ©lange de dĂ©chets verts et de boues de stations dâĂ©puration â prĂ©sentĂ© par Mango Environnement, la plus grande plateforme de compostage de Nouvelle-CalĂ©donie, dans le quartier de Nessadiou Ă Bourail. © Valorga
production de fourrage, avec une dĂ©monstration dâĂ©pandage de produits organiques. © Valorga
manque de confiance dans leur qualitĂ© », note ChloĂ© Saglibene. « Faire des Ă©tudes et des dĂ©monstrations sur le terrain est le meilleur moyen de convaincre les agriculteurs », poursuit-elle. Pour aider les diffĂ©rents acteurs Ă sây reconnaĂźtre et les inciter Ă tester, la structure a rĂ©alisĂ© en 2023 un catalogue regroupant les produits disponibles, dĂ©crivant leur composition et leur utilisation.
Au-delĂ du monde agricole, le cluster explore actuellement dâautres pistes : revĂ©gĂ©talisation miniĂšre, pĂ©piniĂšre⊠« Nous avons encore pas mal de choses sur lesquelles travailler, mais ça avance petit Ă petit. » Dâautant quâavec les rĂ©centes crises â Covid, guerre en Ukraine, etc. â les articles proposĂ©s commencent Ă devenir attractifs. « Le coĂ»t des engrais importĂ©s augmente, donc on devient compĂ©titif. Cela montre aussi tout lâintĂ©rĂȘt de dĂ©velopper des filiĂšres locales. » Favoriser lâautonomie et une moindre dĂ©pendance visĂ -vis de lâimport, ainsi que la crĂ©ation dâune Ă©conomie. Lâenvironnement est Ă©galement un facteur dĂ©terminant. « Il faut prĂ©parer les cultivateurs Ă mieux entretenir les sols afin dâĂȘtre plus rĂ©silients face au changement climatique », ajoute ChloĂ© Saglibene. « On est au dĂ©but de lâhistoire du traitement des dĂ©chets organiques. » Et Valorga veut en Ă©crire la suite.
Rédaction : Anne-Claire Pophillat
RECYF : LA SECONDE VIE DES POISSONS Alors que Charles AndrĂ© cherche un projet porteur de sens et dâun intĂ©rĂȘt pour son Ăźle natale, lâidĂ©e lui vient, au retour dâune sortie de pĂȘche, de valoriser les restes de poissons de la filiĂšre hauturiĂšre, traitĂ©s jusquâalors comme nâimporte quel dĂ©chet. « Entre 1 000 Ă 1 400 tonnes partent Ă lâenfouissement chaque annĂ©e », relĂšve lâentrepreneur. Et cela reprĂ©sente un coĂ»t pour les professionnels, qui doivent payer « 16 francs Pacifique le kilo » (0,13 euro).
Or, ces rĂ©sidus organiques sont riches, naturels et bio. Les exploiter permettrait de prĂ©server lâenvironnement en Ă©vitant de les jeter, et de crĂ©er un nouveau produit local, grĂące Ă un procĂ©dĂ© dĂ©jĂ utilisĂ© un peu partout dans le monde. AprĂšs trois ans de recherche et dĂ©veloppement, lâusine dĂ©marre son activitĂ© dĂ©but 2024 Ă NoumĂ©a, Ă cĂŽtĂ© des pĂȘcheries situĂ©es Ă Nouville. Recyf produit principalement de la farine et un peu dâhuile de poisson. Leurs principales utilisations ? « Vu sa teneur en protĂ©ines, notre farine entre dans la composition de lâalimentation animale, notamment pour lâaquaculture, et surtout la crevetticulture, et peut aussi ĂȘtre utilisĂ©e comme engrais dans lâagriculture. »
Et le modĂšle fonctionne. « Nous sommes rentables tout en Ă©tant moins cher que lâimport. CâĂ©tait important que ce soit viable. » Pour Charles AndrĂ©, le process est vertueux. « Cela participe de lâĂ©conomie circulaire, permet dâĂȘtre moins dĂ©pendant des farines importĂ©es, de crĂ©er de lâemploi et dâaider le secteur de la pĂȘche en supprimant une charge financiĂšre. »
Chloé Saglibene anime le cluster Valorga, qui fédÚre les acteurs de la filiÚre valorisation des déchets organiques. © A.-C. Pophillat | Journée technique autour de la
Charles André propose des sacs de 500 kg pour les professionnels et de 20 kg pour les particuliers, qui utilisent la farine dans leurs jardins.
Des entreprises rejoignent Valorga pour valoriser leurs dĂ©chets, comme ci-dessus NoumĂ©a Archives, qui « exporte le papier broyĂ©, mais aimerait le rĂ©utiliser en local. Il y a eu des essais en tant que paillage et les agriculteurs sont contents », raconte ChloĂ© Saglibene. Câest le cas aussi de la sociĂ©tĂ© Bois du Nord, qui recycle ses connexes (copeaux, plaquettes, chips...) ou de CMF-Ecobag, pour ses rebus de carton. © Repair
Ci-dessus, de gauche Ă droite : rĂ©alisation par Valorga dâun bilan de fertilitĂ© du sol. | Formation sur le lombricompostage avec lâassociation Repair (RĂ©seau professionnel pour une agriculture innovante et responsable) proposĂ©e par lâentreprise Agri New Concept. © Valorga
La taille de lâusine est adaptĂ©e au marchĂ© local. « La ligne de production que nous avons achetĂ©e, qui fait 440 m2, est la plus petite du marchĂ© au monde », indique Charles AndrĂ© de Recyf. Parmi les projets de dĂ©veloppement : capter les dĂ©chets de la pĂȘche lagonaire. © Recyf
« Avec un kilo de dĂ©chets, on fabrique 250 grammes de farine et 50 grammes dâhuile » prĂ©cise Charles AndrĂ©. © Recyf
Recyf peut fabriquer 300 tonnes de farine de poisson par an, alors que les besoins du territoire calédonien sont estimés à 900 tonnes.
LâAFD SOUTIENT LES ĂTATS INSULAIRES DANS LEUR ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE r amener le S donnĂ©e S climatique S Ă l â Ă©chelle de S petit S Ă© tat S in S ulaire S pour leur permettre d âĂ©laborer leurS StratĂ©gieS d â adaptation : c â eSt l â objectif du projet clipSSa, lancĂ© en 2021 par l â afd l e S troi S collectivitĂ© S françai S e S du p acifique et le v anuatu pourront profiter , d â ici 2026, de ce S donnĂ©e S inĂ©dite S dan S leur combat face au dĂ©rĂšglement climatique
Les Ătats insulaires du Pacifique sont en premiĂšre ligne face au changement climatique. Ărosion cĂŽtiĂšre, ressources en eau et sĂ©curitĂ© alimentaire menacĂ©es⊠Ce sont eux qui subissent de maniĂšre la plus brutale le rĂ©chauffement global. Pour sâadapter, ils ne peuvent sâappuyer que sur les donnĂ©es existantes en termes dâĂ©volution climatique. Ces donnĂ©es, notamment celles publiĂ©es par le GIEC, sont indispensables pour Ă©laborer des stratĂ©gies au niveau mondial, mais elles ne sont pas adaptĂ©es Ă la petite Ă©chelle de ces Ătats du Pacifique.
CLIPSSA : DES DONNĂES NOUVELLES SUR LE CLIMAT FUTUR DU PACIFIQUE SUD Ă leur demande, lâAgence française de dĂ©veloppement (AFD) a initiĂ©, en 2021, le projet CLIPSSA, qui signifie « Climat du Pacifique, savoirs locaux et stratĂ©gies dâadaptation ». Quatre territoires en bĂ©nĂ©ficient : la Nouvelle-CalĂ©donie, Wallis-et-Futuna, la PolynĂ©sie française et le Vanuatu.
En lien avec lâInstitut de recherche pour le dĂ©veloppement (IRD) et MĂ©tĂ©o-France, des donnĂ©es inĂ©dites voient le jour : tempĂ©ratures, cyclones, prĂ©cipitations⊠« Des donnĂ©es qui influencent la capacitĂ© des Ătats insulaires Ă faire de lâagriculture, Ă avoir accĂšs Ă lâeau⊠», dĂ©taille Charlotte-Fleur Cristofari, experte climat Ă la direction rĂ©gionale ocĂ©an Pacifique de lâAFD.
Cette collecte de donnĂ©es va de pair avec des travaux de recherche auprĂšs des communautĂ©s locales, notamment Ă Wallis-et-Futuna, dans le but de comprendre comment les agriculteurs sâadaptent. « Ont-ils dĂ©jĂ ajustĂ©, par exemple, leurs pratiques de culture du taro ? Observent-ils un changement des cycles de prĂ©cipitations, de semences ou de rĂ©coltes ? Ces donnĂ©es sont capitales dans le cadre de la sĂ©curitĂ© alimentaire », insiste Charlotte-Fleur Cristofari. « Lâobjectif est que les pouvoirs sâemparent de ces donnĂ©es et quâils sâen servent comme outil dâaide Ă la dĂ©cision. » Afin de prendre les meilleures dĂ©cisions possibles, de maniĂšre Ă©clairĂ©e, car il en va de la survie de ces joyaux du Pacifique.
INTERVIEW CROISĂE ISAAKE TUIKALEPA, INGĂNIEUR
DâĂTUDES EN ANTHROPOLOGIE ET EN AMĂNAGEMENT DU TERRITOIRE, ET DIDIER LABROUSSE, CHEF
DâANTENNE DU SERVICE TERRITORIAL DE LâENVIRONNEMENT (STE) Ă FUTUNA
⹠Quels sont les enjeux économiques et culturels du projet CLIPSSA sur Wallis-et-Futuna ?
Isaake Tuikalepa - Lâagriculture, en plus de son rĂŽle vivrier, tient une place trĂšs importante dans la culture futunienne. Les rĂ©coltes entrent dans les circuits dâĂ©changes coutumiers, garants de la cohĂ©sion sociale. Le changement climatique et ses impacts sur lâagriculture sont un enjeu majeur pour la population locale. CLIPSSA permet de rendre compte des pratiques agricoles Ă Futuna, de comprendre leur Ă©volution et donc leur capacitĂ© dâadaptation afin dâaiguiller les politiques publiques. Les travaux ont aussi permis dâidentifier les leviers et les freins de la commercialisation des produits agricoles.
Didier Labrousse - Les changements climatiques concernent Ă©galement la pĂȘche rĂ©cifale et cĂŽtiĂšre, du fait de lâaugmentation des tempĂ©ratures ocĂ©aniques, de la variation des courants et donc du dĂ©placement des poissons, notamment les pĂ©lagiques. Il y a donc un impact sur la ressource et lâalimentation. De nombreux enjeux existent aussi par rapport Ă lâeau, ressource agricole essentielle pour la culture du taro irriguĂ©. Lâeau provient des riviĂšres Ă Futuna et les Ă©pisodes de sĂ©cheresse rarĂ©fient la ressource. Par ailleurs, les petites nappes phrĂ©atiques de Wallis sont menacĂ©es par lâĂ©lĂ©vation du niveau de la mer.
⹠Quelles sont les problématiques spécifiques à Wallis-et-Futuna ?
Isaake Tuikalepa - Principalement lâĂ©rosion cĂŽtiĂšre avec lâĂ©lĂ©vation du niveau de la mer, le blanchissement des coraux, la gestion de la ressource en eau. Les agriculteurs ont une capacitĂ© dâadaptation remarquable. Si les anciennes variĂ©tĂ©s plantĂ©es sont moins rĂ©sistantes aux changements du temps, les nouvelles variĂ©tĂ©s sâintĂšgrent facilement dans lâagriculture locale. Elles font lâobjet dâexpĂ©rimentations permettant leur usage par les agriculteurs et leur diffusion Ă plus grande Ă©chelle.
Didier Labrousse - La montĂ©e du niveau de lâocĂ©an et la frĂ©quence des alĂ©as climatiques Ă©rodent et font reculer le trait de cĂŽte. Or, lâhabitat en zone littorale et les infrastructures routiĂšres nâoffrent que peu dâalternatives de dĂ©placement et de relogement des populations. Il nâexiste quâune route cĂŽtiĂšre Ă Futuna. Câest une Ăźle haute, mais avec peu de plateaux amĂ©nageables. Cela implique donc Ă©galement une rĂ©flexion sur la rĂ©partition des sols entre urbanisation et agriculture.
PortĂ© par lâAFD, lâIRD et MĂ©tĂ©o-France, CLIPSSA aide Ă renforcer les capacitĂ©s dâadaptation de la rĂ©gion au changement climatique. + dâinfo ici : Le projet CLIPSSA
CLIPSSA est un projet qui a dĂ©butĂ© en juillet 2021, pour une durĂ©e de trois ans et demi, dâun montant de 3,8 millions dâeuros.
Photos de lâarticle : ©
Isaake Tuikalepa
WALLISET-FUTUNA Rédaction et interview : Justine Taugourdeau
VERS LâĂCOTOURISME Ă WALLIS-ET-FUTUNA lâĂ©cotouriSme permet de dĂ©couvrir un milieu naturel, tout en le reSpectant et en apprĂ©ciant leS pratique S culturelle S qui y rĂšgnent . b ien loin du touri S me de ma SS e , l â archipel de W alli Set - f utuna , grĂące Ă S a nature prĂ© S ervĂ©e entre mer et montagne au cĆur du p acifique , e S t un territoire propice Ă cette forme de touri S me durable , qui bĂ©nĂ©ficie aux communautĂ© S locale S
LA SITUATION ACTUELLE
DU TOURISME DANS LâARCHIPEL
Ă la suite des Assises des Outre-mer qui se sont tenues dâoctobre 2017 Ă fĂ©vrier 2018, le tourisme a Ă©tĂ© nommĂ© comme la toute premiĂšre solution de dĂ©senclavement de ce territoire insulaire. Depuis 2019, un pĂŽle dĂ©diĂ© au tourisme existe sur lâĂźle de Wallis et se charge de lâaccueil des visiteurs.
Lâarchipel connaĂźt un tourisme de niche dominĂ© par quelques catĂ©gories telles que le tourisme dâaffaires, majoritaire, ainsi que les tourismes de dĂ©couverte et Ă©galement religieux, ces Ăźles Ă©tant un lieu de pĂšlerinage sur les traces de Pierre Chanel, saint patron et martyr de lâOcĂ©anie, mort assassinĂ© Ă Futuna en 1841.
LE SECTEUR ĂCONOMIQUE DU TOURISME EN QUELQUES CHIFFRES
En 2023, on recensait prĂšs de 3 000 touristes Ă Walliset-Futuna. Dans le cadre de la StratĂ©gie du dĂ©veloppement touristique mise en place par lâarchipel, lâobjectif est dâatteindre 11 000 touristes annuels en 2030, soit autant que la population wallisienne.
UNE DESSERTE RESTREINTE LâaccĂšs Ă ces Ăźles reste limitĂ©. Wallis est la seule Ă possĂ©der un aĂ©roport international, la liaison avec Futuna se faisant via un Twin Otter, un petit avion dont la circulation dĂ©pend fortement des conditions mĂ©tĂ©o.
Ci-dessus : case traditionnelle, appelĂ©e « fale », avec sa toiture en feuilles de pandanus tressĂ©es. Wallis-et-Futuna souhaite sâaffirmer comme un archipel oĂč les traditions, trĂšs vivaces, rencontrent la beautĂ© brute de la nature. Photos de lâarticle : © Wallis-et-Futuna Tourisme
LE POTENTIEL DE LâĂCOTOURISME Wallis-et-Futuna est protĂ©gĂ© du tourisme de masse grĂące Ă sa configuration : lâabsence de points dâentrĂ©e adaptĂ©s dans la barriĂšre de corail de Wallis empĂȘche les bateaux de croisiĂšre dâaccĂ©der Ă lâĂźle. Ceci a pour effet dâĂ©viter la surfrĂ©quentation. Et ici, le premier critĂšre de subvention dâun amĂ©nagement touristique est le respect de la nature, de façon Ă contrĂŽler les constructions.
INTERVIEW MARION MANUOFIUA, RESPONSABLE DU PĂLE TOURISME DE WALLIS-ET-FUTUNA âą Comment dĂ©velopper lâĂ©cotourisme local ?
- Le tourisme durable est le plus adaptĂ© sur lâarchipel et celui quâon retrouve naturellement sur place. Ceci constitue donc un avantage. Le tout est maintenant de le promouvoir en augmentant lâoffre touristique et dâattirer les visiteurs de façon raisonnable. Pour cela, il faudra perfectionner notre capacitĂ© dâaccueil, en crĂ©ant par exemple un office du tourisme et aussi en dĂ©veloppant la palette des activitĂ©s disponibles.
⹠Quels sont les grands défis du développement touristique à Wallis-et-Futuna ?
- Lâenclavement de nos Ăźles est encore un critĂšre de rĂ©ticence pour les touristes, qui ne connaissent pas Wallis-et-Futuna ou optent pour des destinations voisines telles que Fidji, plus faciles dâaccĂšs. Lâobjectif est de transformer cette contrainte en avantage, en
misant sur la tranquillitĂ© de ce territoire, la prĂ©servation de sa culture et de son patrimoine naturel. De plus, le tourisme local est un secteur rĂ©cent, qui demande Ă ĂȘtre structurĂ©. Il va notamment nĂ©cessiter de sensibiliser la population locale Ă lâaccueil dâun plus grand nombre de visiteurs, et de lâencourager Ă garder son authenticitĂ©. LâamĂ©nagement touristique demandera aussi une certaine gestion, car il dĂ©pend de rĂšgles administratives reprĂ©sentant la RĂ©publique française, mais aussi de celles des rois locaux, qui ont un fort pouvoir de dĂ©cision dans les questions fonciĂšres.
⹠Quels sont les atouts écotouristiques des ßles ?
- Wallis est une Ăźle accessible depuis lâinternational. Elle possĂšde un lagon typique des Ăźles du Pacifique, et 16 motus (Ăźlots), sur lesquels on peut se rendre en pirogue et profiter dâun repas traditionnel local. GrĂące Ă son lagon, Wallis propose de nombreuses activitĂ©s nautiques : kitesurf, pirogue, plongĂ©e sousmarine... Dâailleurs, lâĂźle accueillera en 2025 la Manatai, une compĂ©tition de sports nautiques rassemblant plusieurs nationalitĂ©s du bassin pacifique. En face, lâĂźle de Futuna, bien plus sauvage, prĂ©sente un gros potentiel pour lâĂ©cotourisme. Contrairement Ă Wallis, câest une Ăźle montagneuse, moins peuplĂ©e, oĂč lâon peut explorer des sentiers avec des vues Ă couper le souffle. Enfin, la troisiĂšme Ăźle de lâarchipel, Alofi, est inhabitĂ©e, mais permet aux habitants dây dĂ©velopper lâagriculture.
Un point intĂ©ressant est quâen raison de lâisolement de lâarchipel, la quasi-totalitĂ© des produits est importĂ©e, lâapprovisionnement en denrĂ©es sâavĂšre donc trĂšs alĂ©atoire. La population fait ainsi perdurer au maximum la consommation de produits naturels locaux, pour rester le plus autonome possible. Enfin, la culture locale est encore trĂšs vivante et prĂ©sente au quotidien.
Rencontre privilĂ©giĂ©e avec le Lavelua (roi coutumier) dâUvĂ©a (Wallis). La culture locale est au cĆur des projets Ă©cotouristiques de lâarchipel.
AnakĂ©lĂ©, un site historique et naturel majeur de Futuna. | Ă plus de 16 000 kilomĂštres de lâHexagone, les Ăźles de Wallis-et-Futuna sont encore largement inexplorĂ©es par les circuits touristiques. Cependant, les activitĂ©s nautiques sây dĂ©veloppent. © Wallis-et-Futuna Tourisme
Pour passer une journĂ©e sur un motu (Ăźlot), des taxiboats sont disponibles, ou des kayaks peuvent ĂȘtre louĂ©s au spot nautique de Vakala.
| Le « Toâo Kava », cĂ©rĂ©monie coutumiĂšre permettant de rendre grĂące Ă la nature pour les bienfaits reçus. © Wallis-et-Futuna Tourisme
FĂ©dĂ©rer l â outre-Mer, FAvoriser les Ă©ChAnGes, Mettre en luMiĂšre les ACteurs de terrAin, les initiAtives pour lA proteCtion de lA nAture et le dĂ©veloppeMent durAble
grandeur Nature OUTRE-MER page facebook « e-mag outre-mer »
Un support proposĂ© par aux Ăditions Insulae 7 chemin LĂ©ona Revest - 97417 La Montagne, Ăźle de la RĂ©union
Stéphanie Castre, directrice de publication | oceindia@icloud.com
Rédaction : Stéphanie Castre, Lucie Labbouz, Enzo Dubesset, Mariane Aimar, Sandrine Chopot, Damien Grivois, Axelle Dorville, Justine Taugourdeau, Julien Mazzoni, Anne-Claire Pophillat, Mathilde Edmond-Mariette Minoton, Caroline Cunisse, Pauline Bénard, Béatrice Tevanee, Caroline Marie Conception graphique : Océindia