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L’emploi des jeunes en Afrique subsaharienne
Encadré F3.5
Les AREC, AVEC, groupes d’entraide et COOPEC : des exemples de systèmes informels d’épargne et de crédit Les associations rotatives d’épargne et de crédit (AREC) sont constituées lorsque des individus se mettent d’accord pour épargner ensemble. Elles se sont développées dans le monde entier, comme en témoignent les tontines d’Afrique de l’Ouest, les dhikutis du Népal et les arisans d’Indonésie. Leurs membres se réunissent régulièrement. Au cours de chaque réunion, tous déposent le même montant dans un pot commun, et de manière rotative, l’un d’eux en reçoit tout le contenu. Les AREC présentent des avantages : elles ne nécessitent aucune comptabilité (un atout lorsque les participants sont peu ou pas alphabétisés) ; tout le monde est témoin des transactions effectuées à chaque réunion ; et les sommes en jeu sont faibles. Leur accessibilité et leur simplicité font des AREC une importante source de services financiers, même là où existent des IMF spécialisées. Les AREC autonomisent leurs membres (dont une majorité de femmes) et aident à développer un capital social dans les communautés. Leur structure peut également être utile à la mise en œuvre de systèmes informels de protection sociale, tels que des sociétés funéraires. Elles présentent aussi des inconvénients. Les membres ne peuvent pas toujours avoir accès à l’épargne quand ils le souhaitent, et le calendrier des contributions et remboursements ne correspond pas toujours à leur situation de trésorerie. L’approche des AREC favorise les personnes dotées de revenus stables, qui peuvent apporter des contributions continues. Les associations villageoises d’épargne et de crédit (AVEC), également appelées associations cumulatives d’épargne et de crédit (ACEC), ont été tentées au début des années 1990 par CARE International, qui a mis au point un modèle standard d’AVEC fondé sur les tontines du Niger. Généralement, 15 à 25 personnes conviennent d’unir leurs forces pour épargner et emprunter pendant une période déterminée (généralement un an). Le groupe élit un comité de gestion et des compteurs d’argent. Personne d’autre ne manipule l’argent, qui est conservé dans un coffret muni de plusieurs serrures. Les détenteurs des clés ne font pas partie du comité de gestion. Le groupe détermine les services offerts (épargne, prêts) et les conditions correspondantes. Au cours des réunions régulièrement tenues, les membres achètent une à cinq actions d’épargne, dont le prix unitaire est déterminé par le groupe et reste inchangé tout au long de l’année. Ces économies permettent de capitaliser un fonds pour les prêts aux membres, qui peuvent emprunter des montants ne dépassant pas trois fois leur épargne. Les prêts sont accordés
à des individus ou à des groupes, pour une durée ne dépassant pas celle de la période en cours et à un taux d’intérêt mensuel de 5 à 10 % (même si des taux aussi faibles que 1 % ou aussi élevés que 20 % ont été observés). La tenue des livres prend trois formes : la mémorisation, des livrets où seul le solde final est acté, ou des registres centraux gardant la trace des activités financières. Lorsque la période fixée au départ s’achève, les membres du groupe partagent les économies et l’intérêt produit. Les rendements peuvent varier de 35 à 50 %, et en seulement quelques années, un groupe peut gérer 2 000 à 10 000 dollars EU. Grâce à de petites contributions périodiques, les groupes peuvent également constituer un fonds social ouvert à toute la communauté. Les membres peuvent quitter le groupe à tout moment, aux conditions fixées par le groupe. Contrairement aux AREC, les AVEC jouent, pendant une courte période, un rôle d’intermédiaire entre les épargnants et les investisseurs rassemblés au sein d’un groupe. En plus de CARE, de nombreuses organisations ont encouragé les AVEC, notamment la Fondation Aga Khan, Catholic Relief Services, Oxfam/Freedom from Hunger, PactWORTH, PLAN, le Corps de la paix des États-Unis, World Relief, et World Vision. On retrouve des AVEC dans au moins 61 pays d’Afrique, Asie et Amérique latine, avec plus de 6 millions de participants actifs. Les organisations qui les promeuvent forment les membres aux opérations et à la gouvernance de ces groupes d’épargne, mais parce que ceux-ci sont essentiellement autogérés, il subsiste un risque que des fonds disparaissent à cause de la fraude, du vol ou du défaut de remboursement. Des groupes plus importants au sein ou à proximité des zones urbaines peuvent sauvegarder leurs fonds dans une banque, et CARE teste actuellement l’utilisation de la technologie bancaire mobile pour les dépôts et retraits des fonds d’AVEC d’Afrique de l’Est. Les groupes d’entraide sont de petits groupements villageois de 10 à 20 femmes qui mettent en commun leurs économies pendant quelques mois, jusqu’à ce qu’ils disposent d’un capital suffisant pour octroyer des prêts à leurs membres ou à d’autres personnes du village. Ils ont des liens avec des banques et constituent des fédérations avec d’autres villages, pour arriver à réunir plus de capital pour les prêts. L’intérêt n’est pas redistribué aux membres, il est conservé pour le rendre productif. Largement utilisés en Inde, les groupes d’entraide ont un potentiel en Afrique, mais les efforts pour les mettre en place ont connu un suc-
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