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Le 15 septembre 2008, jour où la banque d’investissement Lehman Brothers déposait son bilan aux États-Unis, marque non seulement le point culminant de la plus récente crise financière, mais aussi le coup d’envoi de la financiarisation1 globale, telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Les dimensions de la faillite des banques provoquée par la crise financière étaient si colossales qu’elles ébranlèrent la confiance dans les établissements financiers traditionnels au point qu’il fallut créer un scénario neuf pour leur sauvetage et leur resocialisation. Ce sera « nous », le facteur d’identification et le référentiel pour les activités économiques collectives.

Alors que nombreux étaient celles et ceux qui pensaient que Wallstreet était terrassée, les fondements d’une stratégie nouvelle, plus puissante encore, sont posés : une stratégie où le collectif, les liens entre personnes et la décentralisation jouent un rôle essentiel. Du moins en théorie.

Les revendications qui voient alors le jour sur les places publiques occupées avant de faire le tour du globe deviennent, sans le vouloir, une invitation adressée au capitalisme financier dans la pétrin et en panne d’image.

Alors que le cataclysme financier avait fait perdre leur em ploi, leur épargne et leurs biens immobiliers à des millions de personnes, le mécontentement de ces dernières à propos des affaires sulfureuses et du pouvoir des banques fit naître le mouvement de protestation collectif « Occupy Wallstreet », qui regroupait les personnes favorables à « une économie pour et par les humains ».

L’économie « pour et par les humains » s’est effectivement mise en place, mais elle n’a plus rien à voir avec ce que les activistes imaginaient. La communauté globale a mis à profit l’une des caractéristiques du monde numérique, sa facilité d’accès, pour peupler les plateformes et s’agréger, formant finalement un groupe cible aussi vaste qu’homogène. Le nouveau « nous » a placé les liens sociaux et l’adressage ciblé des préférences des individus au centre de l’économie numérique émergeante. Les communautés en ligne deviennent les locomotives d’une machinerie globale interconnectée, formée de contenus et de données d’utilisatrices et d’utilisateurs. Le « nous » est devenu le facteur clé du capitalisme des plateformes.

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Pour illustrer les enjeux, je vais donc résumer les développements marquants survenus à partir de 2008, sur ces quinze années qui ont vu la financiarisation de notre monde et de toutes ses relations sociales et ressources naturelles et sous la bannière du nouveau « nous ».

AU CAPITALISME DES PLATEFORMES

Parmi les plateformes géantes qui dominent aujourd’hui les activités boursières internationales, certaines n’en étaient qu’à leurs balbutiements à l’époque de la crise financière de 2007–2008 et d’autres n’étaient pas nées (p. ex. Airbnb, Uber). Face book venait de démarrer en Allemagne, alors qu’Amazon développait de grands serveurs et les lançait sur le marché. Ceux qu’on appelle « Big Five »2, c’est-à-dire les premières plateformes à monopoliser la bourse, touchent des domaines d’affaires très différents, mais ont en commun la vocation de servir d’intermédiaire entre les aspirations des individus qui se servent de la toile et l’offre globale. Pour développer ce modèle d’affaires, il fallait avant tout deux choses : une grande puissance de calcul et des données en grand, en très grand nombre.

Le présent essai porte sur la question suivante : dans quelle mesure les communautés numériques peuvent-elles réellement assurer le fondement de solutions économiques de rechange ou d’activités économiques indépendantes ? Les structures collectives si instamment invoquées existent-elles réellement à l’ère de l’économie des plates-formes ? Ou ne sont-elles rien d’autre qu’un instrument de marketing destiné à faire apparaître les concentrations individuelles de pouvoir et d’argent sous un jour plus flatteur ?

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DE LA CRISE FINANCIÈRE

Dans les années 1990, les fichiers de musique ou de vidéos sont déjà partagés dans des réseau P2P décentralisés et autogérés, comme par exemple dans le cas du service de partage de fichiers Gnutella, qui fut l’un des premiers systèmes P2P entièrement décentralisés, réseau qui groupait plusieurs millions de participant.e.s.

Depuis 2006, Amazon offre non seulement des livres et une place de marché virtuelle telle que nous la connaissons au jourd’hui, mais aussi les premiers services en nuages informa tiques. Son nuage flexible, l’Elastic Compute Cloud, permet aux développeuses et aux développeurs de créer des machines virtuelles dans le nuage et de proposer des capacités de calcul pour les projets informatiques et des charges de travail dans les nuages. Ce saut technologique amorce la marche triomphale de l’informatique en nuages dans le domaine des affaires.

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Les réseaux de partage de fichiers autogérés ont marqué la culture de la jeunesse pendant quelques années. La pression juridique a toutefois sonné le glas de toutes les plateformes célèbres, telles que Napster ou Mega Upload.

L’informatique en nuages a incité l’amplification matérielle qui a contribué de manière déterminante à un développement supplémentaire du réseau social : les mégadonnées. Le nombre toujours plus grand de données personnelles qui se forment par interaction avec les médias sociaux, les places de marché en ligne et les services numériques sont la condition pour une mise en relation ciblée du produit avec sa/son destinataire en fonction de ses préférences. Les algorithmes de mise en rela tion posent la première pierre d’une machinerie de recommandation toujours plus individualisée. Le slogan d’Amazon, « Les clients qui ont acheté x ont également acheté y » est devenu un classique du marketing social sur internet.

Tous ces développements sont en lien direct avec le grand collectif numérique. L’économie des plateformes ne se contente pas de l’alimenter gratuitement en données par le biais des achats, des messages postés ou de l’utilisation des services de messageries, mais aussi de promouvoir sans réserve, par ce

NUAGES INFORMATIQUES ET MÉGADONNÉES

KAGELELA6biais, la croissance effrénée des « Big Five ». Si nous en sommes là, c’est uniquement grâce au format de référence de la com munauté globale. Le collectif numérique est la condition fondamentale du développement d’internet 2.0, du réseau social et d’une concentration de ressources absolument inédite, qui se manifeste depuis 2008 environ par la mise en place de l’éco nomie de partage.L’ÉCONOMIE DE PARTAGE

L’intérêt de toutes ces idées réside dans leur volet social et du sentiment de « nous », d’appartenance qui en résulte, mais avant tout du potentiel perturbateur que ces plateformes contiennent. En effet, en l’espace de quelques années, Airbnb et Uber sont catapultées parmi les entreprises les plus puissantes au monde. Toutes les actrices et tous les acteurs de l’économie de partage ont en commun de ne pas produire de biens et de service au sens classique de l’ère industrielle, mais de créer de la valeur uniquement en misant sur un logiciel de mise en relation, basé sur des données numériques, et qu’iels créent et contrôlent eux-mêmes.

Cette économie d’un type nouveau basée sur le partage réunit les personnes animées par le souhait de partager les objets de la vie quotidienne plutôt que de les acheter et de les utiliser individuellement. Désormais, Airbnb permet de sous-louer son logement pour une courte durée ou d’offrir les chambres inoc cupées pour les capitaliser. Uber invite les personnes qui ont un véhicule d’utiliser ce dernier comme taxi à temps partiel. L’idée de l’autopartage permet d’utiliser une voiture que lors qu’on en a réellement besoin. Les projets de voisinage tels que Pumpipumpe organisent l’utilisation communautaire de la perceuse, du vélo de transport ou de la tente de camping, misant sur l’avènement d’une ère nouvelle de consommation collabo rative3, plus respectueuse de l’humain et des ressources.

Les personnes qui contribuent à l’économie de partage sont rémunérés pour leur offre et leurs tâches au prorata de leur contribution, mais ces rémunérations sont des clopinettes4 en comparaison avec les commissions engrangées et les masses

On a donc assisté, en très peu de temps, à une concentration inédite de pouvoir et d’argent, à une rupture des conditions de marché à laquelle la politique n’a pas grand-chose à répliquer.

L’effet le plus notoire de l’économie de partage dans le cadre du présent essai est la commercialisation et la financiarisation de la quasi-totalité des domaines de la vie, avant tout des relations sociales. La déferlante de la numérisation n’épargne à présent plus aucun domaine de notre condition humaine.

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En 2014, l’auteur et blogueur Sacha Lobo a mis un nom sur le phénomène : il l’a appelé « capitalisme de plateforme ». Ce nouveau type de capitalisme se distingue de l’ancien par les formidables économies d’échelle qui se répercutent simultanément sur plusieurs niveaux : la vitesse à laquelle se creusent les inégalités sociales, la perte de droits des travailleuses et des travailleurs, illustrée de manière emblématique par les ser vices de livraison de repas, le dopage des spirales de la gentrification, pour n’en nommer que quelques-uns.

de données toujours plus grandes conservées par les entreprises. Si le « nous » et la mise en commun sont les éléments de marketing constitutifs de l’économie de partage, il y a un volet exclu de ce partage : les parts de propriété et les participations de ces plateformes.

À côté de l’informatique en nuage, des mégadonnées et de l’économie de partage, l’économie de plateforme actuelle se caractérise par un aspect supplémentaire, qui découle directement de la crise financière de 2007/2008 : le bitcoin et les registres partagés (également appelés registres distribués), mécanismes couramment résumés dans la notion de « chaîne de blocs » et, plus récemment, de « Web.3 ».

LE BITCOIN ET LES DÉBUTS DU WEB.3

On n’a cesse de rappeler aux plateformes géantes leurs responsabilités entrepreneuriales, par exemple en les enjoignant à payer des impôts, puisqu’elles utilisent pour la livraison de leurs marchandises des routes et d’autres infrastructures four nies par la société. L’écho demeure faible.

La possibilité de pirater un système où la confiance ne joue aucun rôle est apparue dans l’exemple de la première organisation autonome décentralisée (Decentralized Autonomous Organisation, DAO) ; il s’agit d’une organisation numérique qui disposait d’un capital collectif de 11,5 millions d’éther, soit de 140 millions de dollars étasuniens à l’époque considérée : en 2016, un.e pirate inconnu.e a contourné un volet de sécurité insuffisant des DAO pour prélever 2,6 millions d’éthers dans le capital de la DAO. Cet acte a durablement bouleversé la confiance collective dans le système qui remplace la confiance par un code.

Le 3 janvier 2009, une personne ou un collectif, inconnus jusqu’à ce jour, démarra sous le pseudonyme de Satoshi le réseau bitcoin qui engrangea le premier bloc. Satoshi inscrivit dans la transaction du bloc qui scella la genèse du bitcoin une information que l’on retrouve citée dans le quotidien anglais « The Times » du 3 janvier 2009 : « Chancellor on Brink of Second Bailout for Banks » (chancelier sur le seuil du deuxième sauvetage des banques). Ce titre évoque la crise financière qui mena au sauvetage des banques, symbolisant une nouvelle culture du piratage informatique, ouvertement suspicieuse par rapport à l’État et aux banques, ressenties comme frauduleuses.

La création de cryptomonnaies fonctionne dans un réseau infrastructurel globalisé d’ordinateurs qui valident anonyme ment les transactions, tout en les inscrivant dans l’infrastructure numérique public et accessible sans restriction. Le collectif numérique agit de manière autonome et décentralisée, sans les intermédiaires qui, même sous le régime de l’économie de partage, empochent une grande partie des bénéfices.

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Dans le monde bancaire traditionnel, ce sont des inter médiaires fiables qui garantissent la sécurité des transactions financières. Dans l’infrastructure de la chaîne de blocs, l’intermédiaire est remplacé par l’opération collective de validation de chacun des nœuds5. Innovation essentielle : désormais, la sécurisation des transactions se passe de la confiance en des intermédiaires et de modalités destinées à instaurer un climat de confiance. Les questions de formation des opinions, de cooptation et de communication au sein du réseau sont résolues à l’aide de mesures techniques et cryptographiques et non plus au niveau organisationnel.

Certes, certains fonds spéculatifs ont subi de lourdes pertes. Certes, le capitalisme financier a temporairement perdu de sa superbe. Il n’en demeure pas moins que l’attaque contre GameStop est à bien des égards le signe de la victoire du capi talisme. Max Haiven, activiste du domaine de la finance et chercheur en médias décrit en ces mots l’épisode : « (L’affaire GameStop) a connu un tel succès en transformant la réalité sociale en une série d’« investissements » et en transformant chacun.e d’entre nous en porteur de risques isolé et compétitif

L’idée d’une monnaie numérique commune, indépendante des banques et de l’État, a été soumise à une analyse objective. Suite aux premières expériences de transactions éparses, le bitcoin est devenu le moyen de paiement privilégié du réseau internet anonyme. Après la première explosion des prix en 2013, l’euphorie catapulta le bitcoin, devise expérimentale de re change, dans la catégorie des actifs globalement disponibles.

Début 2021, une nuée de petites investisseuses et de petits investisseurs se sont battus contre de puissants fonds spéculatifs pour l’obtention de l’action de la chaîne étasunienne de jeux vidéo GameStop. Cette action coordonnée, initiée sur la plate-forme en ligne Reddit par le groupe Wallstreetbets, est considérée par certains médias comme une prise de la Bastille des temps modernes.

GAMESTOP OU LE RÊVE DE RÉSISTER AU SYSTÈME

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On qualifie aussi le Web.3 d’« internet des propriétaires ». Tout, mais vraiment tout y a un prix et peut faire l’objet d’une transaction commerciale : le Web.3 rend possible la commercialisation de biens numériques et le commerce de ces biens. À la fin de l’année dernière, l’engouement pour les jetons non fongibles (Non Fongible Tokens, NFT) a révélé la nature pro fonde du Web.3 : la maîtrise économique des bits et des bytes et leur commercialisation sur de nouveaux marchés sociaux. Là encore, le « nous » jouait un rôle essentiel en créant les bases de l’échange de ce nouveau type de biens de placement par le biais de narratifs, du design et des rituels sociaux.

PLATEFORME, CAPITALISME DE DÉCONFITURE

que même notre résistance s’est vue transformée en facteur financier. »Lenarratif

Ce « nous » révolutionnaire qui se mobilisa à propos de GameStop s’est révélé être un essaim numérique mû par des idéologies confuses. Chacune et chacun cherchait à gagner de l’argent, par nécessité ou par plaisir, voire par vengeance. Plus on analyse le phénomène GameStop pour trouver une logique claire derrière la mobilisation sociale, plus les intentions se perdent dans le chaos. Et là où l’analyse rationnelle en perd son latin, de nouveaux et intéressants schémas apparaissent, illustrant la dynamique individuelle du collectif, multipliée par l’effet d’attraction des algorithmes numériques. Nous ne com prenons pas le fonctionnement général de cette dynamique. Et nous sommes encore moins en mesure de la maîtriser. Bienvenu dans l’univers

CAPITALISMEcyberpunk !DE

dominant à propos de l’affaire GameStop était le triomphe momentané des « petites gens » qui eurent enfin accès au casino pour se mêler aux joueurs puissants. Le casino lui-même ne changea pas pour autant.

Au cours des deux dernières années, marquées par la pandémie de COVID 19 ainsi que par des catastrophes naturelles toujours plus fréquentes, par les vagues de réfugié.e.s et les conflits militaires, le capitalisme de plateforme a augmenté d’un

Le compte Instagram Humans of Late Capitalism (Les humains du capitalisme tardif) met régulièrement en ligne des messages qui illustrent le cynisme immodéré d’un monde exclusivement guidé par le goût du lucre. Ainsi, le 29 janvier 2022, on montra l’image d’une plateforme de tennis produite par Adidas qui flottait sur le Great Barrier Riff australien considéré comme mort, muni d’un marquage Adidas très en vue et de l’inscription « 100% en plastique recyclé ♥  ». Le sentiment qui s’impose en faisant défiler les plus de 900 messages de ce compte est l’incrédulité ou l’absence totale de bon sens face aux dangers qui nous menacent.

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En 1900 déjà, Georg Simmel dessine dans son ouvrage Philoso phie de l’argent le psychogramme d’une société dominée par l’argent. Son questionnement central est le suivant : quelle peut

COMPRENDRE LE MONDE EN PRENANT L’ARGENT COMME REPÈRE

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on assiste à la transformation de ressources naturelles en objets spéculatifs. Ainsi, le commerce international des droits d’émission a pour effet qu’en Chine, de grandes surfaces forestières ont le statut de « réservoirs de CO2 » et sont échangées comme des produits financiers. Par conséquent, le succès des projets forestiers dans le monde ne se mesure plus en termes de conservation d’écosystèmes ou de bases vitales, mais en termes de profits engrangés sur les marchés interna tionaux.Même

cran supplémentaire, poussé à l’extrême. Il atteint aujourd’hui des sphères où l’air se fait rare. Des sphères qualifiées de « stratégie-choc » par Naomi Klein. Cette stratégie décrit le calcul politique des décideuses et des décideurs politiques qui exploitent les situations de crise dans leurs pays respectifs pour imposer des mesures qui sont utiles uniquement à une élite numériquement faible et qui accentuent encore la misère desParallèlement,autres.

les réserves naturelles ainsi que les animaux et les plantes menacés d’extinction sont transformés en produits financés par la spéculation pour être échangés sur les marchés internationaux. Les besoins de la nature, de l’être humain, des animaux sont consciemment passés sous silence. Le risque quasi inéluctable de destruction de l’environnement et de la civilisation est bien réel. La gigantesque machinerie continue de tourner, inlassablement.

Les efforts entrepris pour comprendre l’état actuel du capitalisme avec les instruments et normes de la recherche socioéconomique traditionnelle le prouvent : on est inévitablement confronté, à un moment donné, à la question du pourquoi. Que nous apporte tout l’argent du monde si les mécanismes de création et d’échange d’argent finissent par nous détruire ?

être la vision du monde si l’argent est considéré comme principe, comme ciment du monde ? L’approche de Simmel reste une référence jusqu’à nos jours lorsqu’il s’agit d’analyser une société dont la vision du monde et les interactions sociales s’articulent essentiellement autour de l’argent. Un siècle avant l’apparition de Facebook et consorts, Simmel estime que dans la société moderne, les relations sociales sont réifiées et déshumanisées. De plus, le philosophe et sociologue postule que l’économie monétaire moderne ne conduirait pas à l’isolement social, mais au contraire à l’accélération de la socialisation de l’individu

Commentmoderne.transposer le processus de socialisation de l’indi vidu esquissé par Simmel sur la nature profonde de l’économie de plateforme actuelle ? Les plateformes sociales fonctionnement, rappelons-le, selon un phénomène de collectivisation passive des utilisatrices et des utilisateurs. Dans le collectif numérique, l’individu compte tout au plus comme faire-valoir. La valeur économique de l’interaction sociale numérique se mesure à son imputabilité aux opinions populaires du collectif ainsi qu’à son aptitude à agréger des thématiques et des pré férences.Desquestions intéressantes surgissent là, à la croisée de l’économie, de la sociologie et de l’anthropologie : reste-t-il possible aujourd’hui d’agir dans l’intérêt d’une communauté plutôt que dans l’objectif exclusif de la maximisation du profit ? Y a-t-il, dans l’espace numérique, de la place pour des commu nautés motivées par des valeurs communes et des objectifs sociétaux communs ? L’argent peut-il servir de point de départ pour des activités économiques durables ?

« LET’S BUY TWITTER! »

Lorsque la plateforme de microblogage Twitter risqua la fail lite en 2016 en raison de la faible croissance de son nombre d’usagères et d’usagers et de la diminution des recettes publicitaires, le spécialiste des médias Nathan Schneider, relayé par un article très remarqué du « Guardian », lance une pierre dans la mare : « Let’s buy Twitter », propose-t-il. Ses arguments

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étaient aussi simples que convaincants : nous, utilisatrices et utilisateurs, sommes celles et ceux qui fournissons le travail sur Twitter. Tous les jours, nous mettons en ligne nos contenus, partageons nos réflexions et créons de la plus-value pour des personnes tierces. Et nous fournissons gratuitement nos don nées. Nous devrions avoir le droit d’aménager la plateforme pour qu’elle ait un effet positif pour nous : modérer les fils, supprimer les discours haineux, trouver des modalités de financementArminéthiques.Steuernagel, le fondateur, gérant et membre du directoire de l’entreprise d’investissement alternative Purpose Foundation, propose alors à Nathan Schneider – à la demande de ce dernier – la démarche suivante : fonder une entreprise et proposer des parts sociales qui donnent droit à des dividendes, mais à aucun droit de vote ; trouver quelque 20 pour cent de fonds propres et emprunter ou acheter les fonds restants. Quant aux droits de vote, ils seraient distribués selon une « échelle de l’engagement » qui englobe les personnes qui investissent et celles qui utilisent la plateforme, tout en confé rant davantage de contrôle à celles et à ceux qui contribuent le plus diligemment à sa prospérité, notamment les collaboratrices et les collaborateurs ainsi que les utilisatrices et les utilisateurs les plus assidu.e.s. Il proposait enfin des « actions dorées » dotées d’un droit de veto, éventuellement contrôlées par une fondation qui représenterait toutes les personnes qui utilisent la plateforme.Uneautreproposition de rachat collectif de Twitter était la suivante : on part de l’idée qu’un pour cent seulement des utilisatrices et des utilisateurs (trois millions de personnes à cette époque, donc un chiffre non négligeable) achètent des parts sociales pour une valeur de 2.300 dollars en votant à l’unanimité la création d’un coopérative. Cette mise serait remboursée pendant le processus de transition, en partie par le biais d’une cotisation, de 10 dollars par année. Cette proposition se base sur l’hypothèse que les utilisatrices et les utilisateurs de Twitter préfèrent payer une taxe de copropriétaires que de donner une chèque en blanc à la centrale de l’entreprise pour la vente de leurs données.

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On constate aujourd’hui avec intérêt que cette question n’est plus à l’ordre du jour, alors qu’Elon Musk évoque de racheter Twitter. Les voix nombreuses qui, à l’époque, s’étaient engagées en faveur de la socialisation de Twitter, semblent s’être tues entre-temps. Au lieu de concentrer les efforts pour mettre en œuvre les stratégies de reprise collective de Twitter développées il y a six ans et de remettre en place l’homme le plus riche au monde, chacune et chacun le regarde faire, tétanisé.e, en attendant son prochain coup de poker. Le montant exorbi tant que Musk déclare être prêt à payer semble tuer dans l’œuf toute velléité de résistance collective.

LE COOPÉRATIVISME DES PLATEFORMES

La résistance croissante à l’économie de partage a contribué de manière substantielle à renforcer l’engouement pour les plateformes internet organisées en coopératives ; les modèles d’affaires tels que TaskRabbit ont montré que la nouvelle éco nomie numérique provoque esclavagisme et précarisation. Vers 2015, on a compris que les applications numériques ont pris le contrôle – du moins partiellement – sur les marchés du travail traditionnels. Ce nouveau modèle du « travail sur appel » s’accompagne de pertes de droits des salarié.e.s, d’une précarisation de la protection sociale et de la suppression de la frontière entre travail et loisirs.

La première conférence internationale consacrée au coopérativisme des plateformes a eu lieu en novembre 2015. Trebor

Un mouvement est alors né qui remplit les médias aussi bien sociaux que traditionnels pendant belle lurette, affirmant rien moins que les plateformes numériques doivent rester entre les mains des utilisatrices et des utilisateurs vu que ce sont iels qui dépendent le plus de l’infrastructure. Ce sont aussi iels qui ont un intérêt prépondérant à ce que la plateforme prospère économiquement, culturellement et éthiquement. Le hashtag #Let’sBuyThisPlatform pose alors la question suivante : comment concevoir le bien commune et le pilotage collectif pour que les plateformes de cette Terre servent désormais les intérêts des personnes qui les utilisent et non l’inverse ?

On assiste déjà à la création de programmes d’accélération pour les coopératives de plateformes, comme Start.Coop aux États-Unis et Unfound en Angleterre. « Platform Cooperatives Germany » est le premier projet de mise en place de réseaux d’entreprises coopératifs dans l’espace germanophone en couragé dans le cadre d’un programme du ministère allemand de l’économie.

Se référant à des monopoleurs tels qu’Uber, de nombreux services de transports locaux et autogérés ont ainsi vu le jour. Les coursiers à vélo ont commencé à se fédérer et à tourner le dos aux grands services de livraison. S’inspirant d’Airbnb, Fairbnb a vu le jour, un service d’hébergement à court terme organisé par les municipalités et les organismes locaux. Quant au Resonate Music Streaming Collective, créé en 2017, il s’agit d’une collectivité numérique où les musiciennes et les musiciens ainsi que leurs admiratrices et admirateurs exploitent ensemble leur plateforme ; celle-ci se caractérise par un modèle de paiement équitable, Stream2Own, et par sa grande diversité culturelle. À New York, une coopérative autogérée pour les nettoyeuses et les nettoyeurs, Up & Go, organisée en collectif pour revendiquer la sécurité sociale et une rémunération digne, s’est mise en place.

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Scholz, professeur à la New School à New York et initiateur de la conférence, a posé la première pierre d’un modèle écono mique où des plateformes prospères peuvent être copiées, puis reconstituées selon un modèle coopératif. La propriété partagée, le pilotage commun et la préservation collective des inté rêts des travailleuses et des travailleurs forment le noyau de ce nouveau modèle d’affaires.

Dans cette économie numérique d’un type nouveau, le « nous » est organisé en structures coopératives. Il serait exagéré de dire qu’elles ont quelque chose d’équivalent à opposer au pouvoir exercé sur le marché par les grandes plateformes monopolistiques. Et pourtant, chaque année, on voit le nombre de ces entreprises et structures se multiplier. Le Platform Cooperativism Consortium, un organisme international, pilote la mise en place de coopératives de plateformes autogérées dans le monde entier et joue le rôle d’interface pour la recherche, la constitution de communautés et leur financement.

Collectivisation, socialisation et propriété collective, telles sont les devises dans ce contexte. Lorsque Kevin Kühnert, entre-temps devenu secrétaire général du parti socialiste alle mand, demandait la collectivisation de grandes entreprises telles que le groupe automobile BMW, un murmure parcourut le pays. Deux ans plus tard à Berlin, l’initiative « Deutsche Wohnen & Co enteignen » [pour faciliter l’accès à la propriété du logement et préserver le logement de la spéculation financière] est adoptée aux urnes. La grande question qui se pose face à des projets aussi ambitieux est la suivante : les personnes sont-elles prêtes à penser et à agir ensemble dans les structures décrites ? En fin de compte, il s’agit de cultiver un « nous »

Entre-temps, les structures autogérées semblent être l’issue de secours de modèles d’affaires non rentables sur la durée. Par exemple, le marché de livraison de repas en Allemagne montre clairement que des millions d’euros ont été investis pour rien pendant plus d’une décennie, sans que ces jeunes pousses qui se vouent une âpre concurrence n’aient jamais été rentables.

Le constat que cette lutte ruineuse est vaine faisant son chemin, des services de livraison organisés en coopératives voient le jour à Berlin ou à Barcelone, ou encore des projets de développement de logistiques tels que Coop Cycle, qui permettent aux conductrices et aux conducteurs de gérer leur profil professionnel et de l’emporter en cas de changement d’emploi. Enfin, le profil d’évaluation pour les travailleuses et les travailleurs de l’économie à la tâche/sur appel (en sa qualité de secteur de l’économie informelle) constitue leur principal capital et la condition sine qua non pour concevoir leur travail sur la durée.

Le capitalisme numérique ne tient donc pas toujours sa promesse de rupture des marchés. Il arrive que la logique im placable du « toujours plus haut, toujours plus vite » se heurte à des résistances. Dans le monde entier, un nombre croissant de personnes se détourne aujourd’hui du troc numérique régi par la règle implicite « confort en échange de données d’utili sation » qui a si bien fonctionné pendant quinze ans. Les structures de résistance éparses se transforment en écosystème et en réseaux qui n’ont qu’un but : orienter l’économie vers les besoins fondamentaux de l’être humain et de la nature.

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DAO,communs.DISCOET

Il y a pourtant des voix qui critiquent certains aspects des DAO, car ses principaux atouts, à savoir leur caractère décen tralisé et la prise de décision démocratique, sont aussi ses principales failles. Souvent, quelques membres seulement d’une DAO ont suffisamment de capital social pour que leurs voix pèsent davantage que celles des « membres simples ». Quant aux modalités de cooptation, elles sont fréquemment limitées. Lorsqu’il s’agit de prendre des décisions relatives aux objectifs communs, les scrutins binaires oui/non ne sont tout simple ment pas suffisants pour représenter la réalité. La formulation de nuances dans les processus de prise de position et le travail d’échanges humains indispensable au fonctionnement de l’interaction sociale dans la DAO sont encore insuffisants selon beaucoup.Lemodèle de la DisCO Coo, enregistré en Espagne, se propose de colmater cette brèche : DisCO est l’acronyme de Distri buted Cooperative Organization, soit organisation coopéra tive distributive. La gouvernance est le moteur de la DiscCO ;

coopératif, un agenda d’apprentissage et de désapprentissage, une appropriation de nouvelles structures et de nouveaux principes de pilotage

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DAOWO

Les organisations autonomes décentralisées (Decentralized Autonomous Organisation, DAO) constituent la forme la plus extrême d’autogestion horizontale et de structures de propriété gérées en commun. La DAO est une organisation numérique qui, d’un point de vue technique, se constitue du réseau informatique décentralisé formé de ses membres. La collabo ration est régie par un contrat intelligent qui formalise les règles, processus et récompenses au sein d’une communauté. Depuis l’entrée en fonction de la DAO originelle, en 2016, des milliers d’organisations du même type ont vu le jour. Les unes vendent des objets d’art, d’autres récoltent des fonds pour financer les actions en faveur du climat, d’autres encore cherchent à financer des projets sociaux par l’intermédiaire du stock de capital de la DAO.

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Toutes ces organisations numériques décentralisées devront, dans un futur proche, montrer ce qu’elles ont à offrir en termes de coordination sociale et de pilotage de biens communs. Les DAO sont, pour beaucoup de personnes, la forme d’entreprise de l’avenir par excellence, notamment en considérant les biens communs, qu’un grand nombre de membres ont intérêt à voir prospérer et au sujet desquels de fréquents scrutins sont organisés.Au

plus tard quand des infrastructures publiques telles que le système de santé seront organisés en DAO, les aspects manquants à propos des biens communs numériques, de la cooptation à divers niveaux et de la répartition équitable du travail de care devront nécessairement être intégrés à l’infrastructure technique.

elle prend en compte et rémunère différentes formes de travail : le travail social Pro Bono, le travail de care et le travail rémunéré. Le modèle se complète d’un système hautement sophistiqué de représentation de valeurs, de coûts et de modalités de répartition au sein de l’organisation. La DisCO respecte les types de travaux généralement ignorés dans les économies tradition nelles, le travail invisible de mise en place de liens sociaux, de résolution de conflits et de réponses aux questions et requêtes desRuthmembres.Catlow, cofondatrice de l’institution culturelle Furtherfield à Londres, est considérée comme une précurseuse d’un modèle encore différent, celui des Decentralized Autonmomous Organisations (DAOWO, organisations autonomes décentrali sées avec tiers), un projet créé spécifiquement pour le domaine des arts et de la culture, et qui comporte un niveau supplémentaire, décisif : la mise en place de tout un écosystème formé de telles organisations, leur mise en réseau et la volonté de cultiver la collaboration dans un ensemble plus grand.

COLLECTIFCAPITALDU19

LE NOUVEAU « NOUS » ET LE COLLECTIF DE DEMAIN

Dans le présent essai, je me suis lancée sur les traces du nouveau « nous » en me basant sur de nombreux exemples. Le « nous » comme moteur des transactions sur les plateformes numé riques, le « nous » comme valeur de référence pour les algorithmes et le « nous » comme narratif central de l’économie de partage. Le « nous », enfin, comme rêve de changement, comme utopie sociale, comme puissant essaim.

Il est difficile à cerner, ce « nous », invoqué pour des causes aussi nombreuses que diverses : pour vendre, pour de fausses promesses, pour des rêves grand format. Telle une toile vierge, le « nous » accueille des représentations aux contenus et aux qualités les plus divers. Il fait l’objet de conceptions, de formulations, de textes et, souvent, de conjurations.

Si nous considérons le capital collectif comme quelque chose qui dépasse le seul cadre financier, par exemple comme un espace commun des possibles, comme une ressource pré-

Le « nous » coopératif doit s’attaquer à un agenda lourdement chargé de réapprentissages, nous l’avons vu plus haut : repenser la propriété, organiser la cooptation, garantir la par ticipation démocratique, autant de disciplines dont aucun.e d’entre nous ne dispose de manière innée. Elles sont même parmi les phénomènes les plus complexes et les plus compliqués qui soient.

Mais au bout du compte, qui est-il réellement ? Le nouveau « nous » a-t-il la force de « former le ciment de la cohésion », pour paraphraser le mot de Simmel à propos de l’argent ? N’estce pas sa vocation naturelle, compte tenu de l’état actuel de la planète ? La culture d’un sentiment de « nous » nouveau et authentique, d’une cohésion large, ne sont-elles pas le moyen qui permet de sortir de la misère globalisée ?

Pour que le « nous » déploie ses effets sur la durée, il a d’une part besoin d’une légitimation politique et d’autre part d’un ancrage pratique dans le monde réel. La notion du capital collectif est un point de départ intéressant à ce propos. Le « nous » coopératif s’articule lui aussi autour d’un capital commun à l’aide duquel sont imposés les intérêts du collectif.

servée et développée dans l’intérêt général, nous arrivons dans un périmètre où le « nous » peut effectivement déployer ses

KAGELELA20

Le « nous » dont nous avons besoin pour nous engager en faveur de notre espace vital et pour une culture politique démocratique prend des dimensions gigantesques, difficiles à saisir. Des dimensions qui, peut-être, dépassent notre capacité d’imagination, paralysé.e.s que nous sommes par les crises simultanées aux quatre coins de la planète. Et pourtant, la clé d’un changement durable réside exclusivement dans la culture de la vision commune d’un avenir viable.

La mise au point de systèmes monétaires et économiques de rechange est une condition décisive de cette stratégie ; ce sont eux qui permettent d’agir dans le contexte du capital collectif. Une approche complètement nouvelle du mode de fonctionnement de l’argent s’impose à cet effet. Comment cette approche nouvelle se mettra-t-elle en place ? Qui concevra et guidera le processus ? Et qui en sera bénéficiaire ? L’avenir nous le dira.

Poureffets.ce

faire, le « nous » a besoin d’un idéal commun, d’une conviction intime qui rend possible une coordination sociale d’un type inédit. Cet idéal est le point de départ d’une action organisée au niveau global. De nombreux exemples illustrent l’absence d’un tel idéal : le jeu de pouvoir d’Elon Musk à propos de Twitter, qui ne rencontre pas de résistance notable ; les hausses abusives pratiquées par les géants du pétrole et du gaz sous prétexte de guerre en Ukraine et l’instabilité politique : autant de phénomènes qui se heurtent… à un mur d’impuis sance global ; les effets toujours mieux perceptibles du chan gement climatique et la prise de conscience que même des mouvements de protestation mondiaux tels que Fridays for Future ne représentent pas (encore) de leviers suffisamment puissants pour opérer un revirement en sont la preuve.

Je tiens à rappeler ici que nos possibilités d’intervention ne sont pas encore épuisées. Nous sommes celles et ceux qui décidons de ce qui assure « notre cohésion intime ». L’imagination est ce qui rend l’être humain unique sur cette planète. Sachons en tirer parti !

2 Par « Big Five », on entend les géants de la technologie Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft.

1 Le terme de financiarisation désigne la domination progressive de tous les domaines de la vie par les marchés du crédit et du capital.

5 On désigne par noeud une interface d’un réseau de chaîne de bloc qui enregistre une copie de la chaîne, qui est relié à d’autres ordinateurs et qui examine et valide des infor mations.

FINALESNOTES

3 Le terme de consommation collaborative (Collaborative Consumption) définit l’accès communautaire aux produits et aux services qui circulent via le partage, le don, le travail et l’échange.

4 L‘ancien porte-parole du conseil d‘administration de la Deutsche Bank, Hilmar Kopper, désigna de « peanuts » (« clopinettes ») les factures impayées d’artisans pour plusieurs dizaines de millions suite à la faillite du géant du bâtiment Jürgen Schneider. Pour son mépris de sommes dont la plupart des citoyen.ne.s ne peuvent que rêver, Kopper s’est tout de même vu gratifié de l’attribution du « non-mot de l’année » en 1994.

— DisCO Coop: Groove is in the Heart: The DisCO Elements, 2019. https://disco.coop/

— Ruth Catlow & Penny Rafferty (Hrsg.): Radical Friends: Decentralised Autonomous Organisations & the Arts, July 2022, Koenig Books.

— Naomi Klein: The Shock Doctrine, 2007, Knopf Canada.

— Nathan Schneider: Here is my plan to save Twitter! Let’s buy it! 2016, The Guardian. https://www.theguardian.com

— Max Haiven, Revenge Capitalism: The Ghosts of Empire, the Demons of Capital, and the Settling of Unpayable Debts, 2020, Pluto Press.

— Vitalik Buterin, edited by Nathan Schneider: Proof of Stake: The Making of Ethereum and the Philosophy of Blockchains, 2022, Seven Stories Press.

BIBLIOGRAPHIE

— Trebor Scholz & Nathan Schneider (Hrsg): Ours to Hack and to Own: The Rise of Platform Cooperativism, A New Vision for the Future of Work and a Fairer Internet. October 2016, OR Books.

— Georg Simmel: Philosophie de l’argent, Paris, 1987, Presses Universitaires de France.

Impression : Ast & Fischer AG

€$$@1 est une série de publications publiée par le MHB sur la thématique de l’argent. Elle fait partie de la coopération entre le MHB et la Banque nationale suisse. Les deux partenaires ouvriront en 2024 un nouveau lieu d‘expérience sur l’argent à Berne.

Conception graphique : Ronnie Fueglister, avec Yves Graber

Musée d’Histoire de Berne Helvetiaplatz 5 3005 Autrice :www.bhm.chBerneElaKagelÉditeur :Muséed’Histoire

©2022 IIIII

de Berne (MHB)

Responsabilité générale : Thomas Pauli-Gabi (directeur MHB)

Relecture : Vanessa Haussener (MHB)

Responsabilité des contenus : David Iselin (MHB)

Traduction : Irène Minder-Jeanneret

IIIII

Autrice :www.bhm.chBerneElaKagelÉditeur :Muséed’Histoire

Conception graphique : Ronnie Fueglister, avec Yves Graber Ast & Fischer AG ©2022

Impression :

Responsabilité générale : Thomas Pauli-Gabi (directeur MHB) des contenus : David Iselin (MHB)

IIIII

Responsabilité

€$$@1 est une série de publications publiée par le MHB sur la thématique de l’argent. Elle fait partie de la coopération entre le MHB et la Banque nationale suisse. Les deux partenaires ouvriront en 2024 un nouveau lieu d‘expérience sur l’argent à Berne.

Musée d’Histoire de Berne 5 3005 de Berne (MHB)

La crise financière de 2008 a vu émerger une nouvelle forme du « nous », devenue la référence pour les activités économiques collectives et marquée par le capitalisme des plates-formes et les stratégies de marketing. Une autre facette de ce « nous »-là est le développement de l’économie de partage, et, plus récemment, celle d’une utopie sociétale commune. Ce « nous » saurat-il perdurer ?

Traduction : Irène Minder-Jeanneret Relecture : Vanessa Haussener (MHB)

Ela Kagel est spécialiste des stratégies numériques ; elle travaille à l’interface de la société, de la technique et de l’économie. Elle a notamment co-fondé SUPERMARKT, un centre indépendant de culture numérique et d’économie collaborative implanté à Berlin.

Helvetiaplatz

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