« space lib’, des clefs pour une nouvelle urbanité »

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“Space lib”, des clés pour une nouvelle urbanité

Au-delà du défi La poursuite de la collaboration ESSEC-ESA dans le cadre des ACU se situe dans un partenariat plus large entre les deux formations. Cette collaboration se nourrit d’une réflexion innovante et d’une recherche commune sur la conception urbaine et les méthodes de projet, qui intègre les différentes dimensions de la ville et leurs inter-relations. Le thème soumis aux étudiants consistait à questionner le logement et l‘habitat dans leurs rapports aux mobilités. Les évolutions de la famille, du travail, de la vie urbaine etc. multiplient les besoins et les exigences de mobilités, entendues au sens large et non pas réduites aux seuls déplacements. Proposer la question « et si le logement était au service de la mobilité et non un frein ? » était un véritable défi lancé aux étudiants. Nous savions néanmoins que plusieurs manières d’aborder partiellement le sujet restaient possibles. Mais la réponse globale apportée par les étudiants a dépassé nos attentes. Très vite, ils ont appréhendé la problématique par une réflexion confrontant modes de vie et mode de ville. Leur réponse propose de nouvelles manières d’être de la ville et apporte une autre dimension au territoire. Une urbanité qui joue de la hauteur et du temps pour offrir de nouvelles libertés individuelles et collectives. De nouvelles formes urbaines qui expriment l’urbanité d’une société en réseaux.

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Comment la mobilité façonnera-­‐t-­‐elle l’Île de France de 2030 ? Comment articuler la mobilité et le logement, qui est traditionnellement associé à l’idée de stabilité ? Quel avenir pour l’urbain, comment éviter certaines ségrégations et ruptures à tous les échelles de la ville ? Comment créer du lien dans la ville ? Au sein de notre groupe enrichi de nationalités et d’expériences variées, nous avons confronté nos visions de la ville, telle qu’elle nous l’imaginons. Que devient la ville si…?

Le droit à la propriété, déjà affirmé dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, a influencé les modes de logement tout au long du XXème siècle. Les difficultés de l’accès au logement entravent la mobilité. A l'ère de l'avènement des nouvelles technologies, des transports et des télécommunications à grande vitesse et à prix abordables, une tendance urbaine nouvelle émerge ainsi. Celle de l'érosion du sédentarisme, des hypermobilités et de la déspatialisation des lieux urbains. Les nouvelles mutations sociétales posent question. Que devient la ville si… ? Cette question interroge les fondements même de la ville, dans tout ce qui la constitue. Que devient la ville si… le logement est pensé pour favoriser et accompagner les mobilités ? Imaginer un ou plusieurs scénarios répondant à cette question ne peut se faire sans préalablement définir différentes notions indispensables à la compréhension des enjeux liés au logement, aux mobilités, mais surtout à la ville dans son intégralité.

1 Des mobilités à la mobilité 1.1 Mobilités

Les mobilités que peinent à s’exprimer dans la ville aujourd’hui sont loin de se limiter à la personne qui se déplace par exemple de chez elle à son lieu de travail. Nous pensons à la mobilité dans son sens le plus large : ce qui se déplace peut être de l’information, des connaissances, des marchandises, des espaces. On y retrouve les PIGS : les People, Information, Goods and Spaces dont Yasmine Abbas décrit les mobilités

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quand  elle  parle  des  nĂŠo-­â€?nomades.  Dans  le  cadre  de  notre  rĂŠflexion,  nous  avons  arrĂŞtĂŠs  cinq  types  de  mobilitĂŠ  :  la  mobilitĂŠ  sociale,  la  mobilitĂŠ  Êconomique,  la  mobilitĂŠ  dans  la  gouvernance,  la  mobilitĂŠ  culturelle  et  la  mobilitĂŠ  physique.  Â

1.2 Handicaps  L’histoire  du  logement  au  20e  siècle  a  ÊtĂŠ  marquĂŠe  par  une  logique  de  sĂŠdentarisation,  de  stabilitĂŠ,  par  une  forme  particulière  de  cellule  familiale,  multipliant  les  entraves  aux  mobilitĂŠs. Â

1948

1918

1850 Loi dĂŠfinissant les conditions de salubritĂŠ et donnant le droit aux conseils municipaux de dĂŠfinir les travaux Ă effectuer SRXU DVVDLQLU OHV ORJHPHQWV

1908 /RL 5LERW TXL IDFLOLWH O¡DFKDW GX WHUUDLQ

Loi completÊe en 1919 par la loi /DXFKH /HYDVVHXU &HV ORLV HQWUDvQHQW O¡LQGLIIpUHQFH des propriÊtaires pour O¡HQWUHWLHQ GH OHXUV ELHQV Logement jugÊ non 1934 rentable par le secteur Suppression des crÊdits SULYp à la construction et abrogation des mesures GH EORFDJH GH OR\HU

/RL DVVXUDQW XQH KDXVVH rÊgulière et raisonnable des loyers compatible avec les ressources des KDELWDQWV

'X ;,;H VLqFOH j O¡LPPpGLDW DSUqV JXHUUH

CrĂŠation du service public du ORJHPHQW

Loi Siegfried : CrÊation des comitÊs locaux G¡KDELWDWLRQV j ERQ PDUFKp +%0 5HPSODFpH HQ SDU OD ORL 6WUDXVV

Loi Malraux crĂŠant les secteurs sauvegardĂŠs et favorisant la restauration, dans ces ensembles urbains, des immeubles GH TXDOLWp

Lois de dÊcentralisation : "Les communes, les dÊpartements, les rÊgions dÊfinissent dans le cadre de leurs compÊtences respectives, OHXU SULRULWp HQ PDWLqUH G¡KDELWDW

1954

1976

Programme de 12 000 logements neufs en FLWpV G¡XUJHQFH

VIIème Plan mettant O¡DFFHQW VXU O¡DPpOLRUDWLRQ TXDOLWDWLYH GH O¡KDELWDW

Des anĂŠes 50 aux anĂŠes 80

DXMRXUGKXL 5pIRUPH GH O¡DFFHVVLRQ j OD SURSULpWp DLGpH /RL G¡RULHQWDWLRQ UHODWLYH j la lutte contre les exclusions consistant à supprimer un certain nombre de dispositions existantes et à mettre en place un prêt à WDX[ ]pUR

Des annĂŠes 90 Ă DXMRXUGKXL

1945

1912

1894

1962

1928 /RL /RXFKHXU TXL SUpYRLW la rĂŠalisation sur 5 ans de 200 000 logements +%0 HW ORJHPHQWV j OR\HU PR\HQ

1977 5pSDUDWLRQ G¡HQYLURQ 5pIRUPH GX ILQDQFHPHQW XQ PLOOLRQ GH ORJHPHQWV du logement et mise en Creation du "Fonds SODFH G¡XQH SROLWLTXH GH 1DWLRQDO G¡$PpOLRUDWLRQ 1957 O¡KDELWDW DQFLHQ GH O¡+DELWDW )1$+ Loi du 7 aoÝt 1957, la politique GHV = 8 3 TXL SUHQG HQ FRPSWH OD FUpDWLRQ GH ORJHPHQWV HW G¡pTXLSHPHQWV SXEOLFV QpFHVVDLUHV HQ GpFRXOH 0LVH HQ SODFH G¡XQ SURJUDPPH GH FRQVWUXFWLRQ GH ORJHPHQWV +/0 2EMHFWLI ORJHPHQWV SDU DQ

/RL %HVVRQ PHWWDQW en oeuvre le droit au logement /RL UHODWLYH j O¡KDELWDW DFKDW GHV +/0 SDU OHV ORFDWDLUHV WUDQVIRUPDWLRQ GHV EXUHDX[ HQ ORJH

Elle  a  contribuĂŠ,  par  l’enchaĂŽnement  des  lois  et  des  dispositifs,  à  limiter  de  fait  le  droit  au  logement  et  à  la  mobilitĂŠ  des  citadins. Â

Quels sont les Handicaps liÊs au logement...? SÊdentaritÊ Accès

Manque de diversitĂŠ

Famille

Rapport public / privĂŠ

CoĂťt QualitĂŠ de vie inĂŠgale

Â

Emploi

Absence d’interaction

Environnement

Exclusion / SĂŠgrĂŠgation InstabilitĂŠ

Droit de l’urbanisme

Logement Ă vie

TemporalitĂŠ

StabilitĂŠ

Individualisme

3 Â


2 Space Lib’ : des clés pour une nouvelle urbanité

L’idée sur laquelle repose le concept que nous proposons est très simple et innovante : afin de s’affranchir des handicaps aux mobilités liés au logement, nous nous inspirons de la tortue qui transporte son habitat constamment avec elle.

2.1 Le concept et sa faisabilité

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2.1.1 Modularité du dispositif

Ce concept est un dispositif fondé sur une structure de base ou « infrastructure » sur laquelle viennent se greffer librement des « modules ». Les modules auront différents usages. Nous avons choisi de représenter notre dispositif sous la forme d’une maquette en Lego, car ceux-­‐ci nous donnent la flexibilité indispensable pour exprimer notre idée. Cependant, la forme proposée n’est en aucun cas l’architecture choisie pour le bâtiment. Il s’agit seulement d’un concept, qui pourra être mis en place sous différentes formes adaptées au territoire d’implantation, aux besoins de la commune…

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2.2 Nouveaux modes de vie, nouvelle urbanité 2.2.1 Urbanité Dans une démarche prospective sur la ville, comment proposer de nouvelles formes d’urbanité dans un monde en pleine mutation ?

Qu’est-­‐ce qui fait l’urbanité ? -­‐ les habitants, les communautés ; -­‐ le bâti ; -­‐ les espaces publics, collectifs, privés ; -­‐ les services ; -­‐ les infrastructures, les équipements ; -­‐ la géographie, l’environnement, l’histoire ; -­‐ les flux, les mobilités. L’urbanité est la qualité des lieux urbains. Ce sont les habitants qui la font, et pas l’inverse.

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«La ville est une somme de fragments contradictoires et complémentaires» (Ungers, Berlin as a green archipelago, 1977). Aujourd’hui ces fragments de ville sont dispersés, ne disposent d’aucune unité, ne dialoguent pas entre eux. Il nous semble indispensable d’inventer une nouvelle forme d’urbanité qui lierait ces fragments entre eux. 2.2.2 Des nouveaux modes de vie, des nouveaux modèles sociaux qui impliquent de nouveaux besoins. L’évolution des modes de vivre ensemble, des formes familiales, de la démographie implique des changements dans les besoins de logement. Par exemple : le vieillissement de la population engendre des situations d’esseulement des seniors, les nouveaux modèles de la famille recomposée et de la famille monoparentale conduisent les enfants à demeurer alternativement dans plusieurs foyers. La colocation est rendue nécessaire par l’allongement des études et la faiblesse des revenus pendant cette période, mais aussi par d’autres choix ou contraintes de vie des célibataires, personnes âgées etc. Les besoins sont aussi transformés par l’instabilité croissante des situations professionnelles, des revenus, par la déconnexion spatiale des activités quotidiennes ou professionnelles etc. Toutes ces évolutions se traduisent par des besoins spécifiques de conception et d’usage du logement, auxquels notre proposition essaie de répondre d’une façon innovante. 2.2.3 Un nouveau mode d’habiter. Nous proposons un nouveau mode d’habiter, un nouveau type de lieu de vie qui rompt avec les principes habituels de l’immobilier et favorise les différentes mobilités (physique, professionnelle, intellectuelle, sociale, économique, culturelle…). Et cela de par la forme, la mixité des usages, l’interopérabilité et la flexibilité du modèle économique d’une structure bâtie originale. Dans un siècle où la mobilité est de plus en plus à la fois imposée ou choisie, il est temps que le logement la favorise au maximum, qu’il offre aux individus un fonctionnement facile et flexible pour leurs localisations et relocalisations mais aussi une souplesse de définition de leur habitat et de son coût. Concrètement nous proposons un système de bâtiment qui physiquement s’appuie sur un pilier central, lieu de vie commune. Ce pilier porte un squelette qui propose des emplacements sur lesquels des modules à usages différents (de vie, de travail, de loisir) viennent se greffer. Chaque emplacement peut accueillir tous les types de modules. La structure centrale fournit tous les branchements nécessaires (eau, énergie…) : la pose des modules se fait en mode « plug and play ». Les modules sont totalement mobiles, facilement déplaçables d’un pilier central à un autre : il suffit d’un camion-­‐grue adapté.

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2.2.4 La rencontre du privé, du public et du collectif

Au sein du dispositif, les espaces privés, publics, collectifs se rencontrent, se mêlent, se côtoient… La ville rentre dans la structure, le privé est installé au centre du public… Le collectif sert d’articulation à l’ensemble, de point de connexion entre les habitants…

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La colonne centrale du dispositif, ou infrastructure est le lieu où sont mis en place les équipements collectifs, à disposition des habitants des modules « logement ». Des services tels que des voitures collectives, une garderie, un centre multimédia, un espace cuisine collective peuvent ainsi être proposés. La présence de services collectifs permet d'avoir des logements adaptés en prise directe avec la vie collective, pour des personnes handicapées ou âgées par exemple. Elle favorise aussi le choix

d’un mode de vie qui ne repose pas sur l’acquisition et l’intégration au logement d’équipements souvent peu rentabilisés et de réduire le besoin de surface et d’entretien de ce logement.

2.2.5 Mixité des usages et optimisation des occupations

L’urbanité étant la somme de différents fragments, aux usages variés, plusieurs usages peuvent être mis en place au sein du dispositif pour créer une nouvelle forme d’urbanité. Les usages proposés ici sont : -­‐ logement ; -­‐ atelier ; -­‐ potager ou jardin ; -­‐ bureau ; -­‐ commerce.

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2.2.6 Vivre dans et avec la structure

Paris, le 5 juillet 2030. Federica fait l’acquisition d’un module de logement meublé de longue durée et décide de le placer dans une structure à Montigny-­‐Bretonneux. En tant que peintre, ce lieu lui convient parfaitement comme source d’inspiration. En raison de la tranquillité et des vues naturelles, deux autres artistes David et Ariane, décident de s’installer dans la même structure. Un an plus tard, ces deux amies et d’autres artistes qui ont vécu dans la structure, décident d’acquérir un module supplémentaire pour y aménager un atelier de peinture. Ils déplacent leurs modules au sein de la structure afin d’être aussi proches que possible les uns des autres. Le dispositif leur permet, grâce à l’existence de lieux de rencontre, d’exposer leurs œuvres et même d’ouvrir une galerie pour vendre leur art.

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Pour des raisons personnelles, Federica doit déménager pour pouvoir répondre aux besoins de sa famille. Elle décide de se rapprocher de sa sœur. Elle part donc s’installer à Orsay. En 2046, Federica acquiert deux modules logement pour ses enfants Nikola et Guillermo. 5 ans plus tard, Nikola est un excellent guitariste. Il déplace son module dans une structure localisée dans un quartier qui est en train d’émerger pour sa scène musicale. Il fait là-­‐bas la connaissance de plusieurs musiciens avec qui il crée un groupe musical. Ensemble, ils achètent plusieurs modules commerciaux afin de les placer dans la structure et créer des salles de répétition et d’enregistrement pour leur groupe, qu’ils louent aussi à d’autres musiciens de leur quartier.

2.3 Nouveau modèle économique, nouveaux métiers urbains 2.3.1 Comment ça marche ? L’usager, pour trouver le lieu où il pourra s’implanter, a accès à un portail de service via Internet ou via une application smartphone, où il peut chercher les emplacements disponibles et faire son choix d’acquisition ou de location de module en fonction de ses besoins et de ses moyens.

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S’il choisit de louer un module déjà installé, il choisit sa localisation géographique (sa structure), le type de module qu’il souhaite (logement meublé ou non, atelier ou bureau, potager, commerce…) et sa surface, la temporalité de location (court ou long terme, reconductible ou non…) etc. Mais il peut aussi choisir dans une structure un emplacement qu’il louera directement pour y faire poser lui-­‐même un module qu’il aura acheté ou qu’il loue indépendamment de sa localisation. Le fonctionnement du système paraît très simple à l’usager : la plateforme est un guichet unique, qui fédère l’ensemble des entreprises concernées dans une procédure unifiée. Cependant, le fonctionnement réel et l’articulation entre ses différents acteurs sont beaucoup plus élaborés. 2.3.2 Gouvernance :

Le concept repose sur la conjonction d’une diversité d’acteurs et sur le fait que la spécialisation de chacun correspond à un seul type de risque. Chaque « métier » que notre modèle crée peut ainsi maîtriser « son » risque dans un modèle économique qui lui est propre et être assuré de rentabiliser son investissement. Les risques de base sont ceux du foncier (disponibilité et coût), de l’investissement et de la gestion de la structure porteuse, de la gestion des modules locatifs, les uns et les autres incluant un risque de vacance dépendant notamment des durées de location. Le schéma des acteurs et de leur articulation est le suivant :

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Le foncier tenu par les collectivités. Il nous est paru nécessaire de laisser aux collectivités publiques un droit de regard sur la structure, un pouvoir de contrôle afin d’éviter un détournement des objectifs de mixité des usages, mixité sociale et de mixité des mobilités qui nous paraissent intrinsèques au projet. Le propriétaire du foncier serait alors un acteur spécifique, dans la majorité des cas une collectivité locale, qui à travers un bail emphytéotique laisserait à un autre opérateur -­‐ le gestionnaire d’infrastructure – le droit d’usage du terrain. La possession publique du terrain permet aussi de proposer des baux raisonnables, afin de favoriser la diversité de l’offre de modules et de services et la qualité de la gestion de l’opérateur central. Un cahier des charges négocié est associé au bail emphytéotique, qui permet à la collectivité de moduler les objectifs publics et les contraintes urbaines imposés au gestionnaire. La colonne centrale construite et gérée par une entreprise spécialisée. C’est le « nouveau métier » le plus original du dispositif. Le gestionnaire d’infrastructure, probablement adossé à un investisseur, sera responsable de la construction de l’infrastructure centrale, de son aménagement et de son entretien mais aussi de sa gestion. Dans la colonne centrale sont installés des escaliers et ascenseurs, des équipements collectifs comme des cuisines et laveries, des espaces publics à la base et sur le toit etc. Les colonnes ont un fonctionnement dit « plug and play » tant vis-­‐à-­‐vis des modules que pour elles-­‐mêmes : elles se branchent sur un socle au niveau duquel sont disposés tous les dispositifs d’alimentation en eau et énergie ou d’évacuation des eaux usées et déchets. Le gestionnaire loue les emplacements de cette infrastructure aux acteurs qui souhaitent y greffer des « modules ». Les supports de modules et leurs branchements sont produits selon un modèle unique pour assurer l’interchangeabilité des modules. On arrive ainsi à un système similaire à celui des relations entre Réseau Ferré de France et la SNCF par exemple, RFF étant le propriétaire des rails et percevant une redevance de la part de la SNCF en échange du droit d’usage des voies. Le gestionnaire rentabilise son dispositif en disposant un grand nombre de structures en des lieux névralgiques d’Île de France. Il bénéficie de la triple facilité de moduler le nombre de supports de modules d’une structure, de déplacer les structures en fonction des demandes et de négocier la location foncière selon le contexte de marché mais aussi les objectifs publics locaux.

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Les modules. Les modules sont des entités physiques habitables une fois greffées sur une colonne. Ils seront produits par des sociétés spécialisées, selon les normes qui garantissent leur interchangeabilité et selon la créativité des designers. Le gestionnaire d’infrastructure a deux types d’interlocuteurs possibles, qui vont greffer des modules sur sa colonne centrale en y louant des emplacements: - des opérateurs propriétaires de modules qu’ils louent à des usages temporaires : ils garantissent au gestionnaire une durée et quantité intéressante de locations et peuvent bénéficier d’un tarif adapté ; - des utilisateurs, propriétaires (ou locataires) d’un module : leur tarif dépendra étroitement de la nature de leur bail (durée de location et facilité de résiliation). qu’ils installent eux-­‐mêmes.. Les modules proposés par des opérateurs privés ou publics. Dans le premier cas de figure, un opérateur, propriétaire bailleur, installe des modules dans tout ou partie du territoire régional selon les besoins observés, selon la « demande » au sens économique du terme. Les opérateurs seront généralement spécialisés selon le type de module et la nature des baux (notamment la durée de location), afin de bien maîtriser leur marché et leur modèle économique. Dans tous les cas, les risques de vacance sont limités par la possibilité de déplacer les modules, voire de les retirer momentanément du marché.. Les opérateurs seront le plus souvent privés, mais on peut penser aussi, par exemple, à des organismes publics d’habitat social, à des associations gérant des logements adaptés ou d’insertion, à des collectivités locales proposant des locaux partagés pour jeunes entrepreneurs etc. On peut envisager une plateforme juridique et financière de transaction commune entre tous ces types d’opérateurs, qui permettrait à l’utilisateur d’avoir un interlocuteur unique (interface Internet et agence) pour une multitude de services gérés en réalité par autant d’opérateurs qu’il existe de type de services. Les modules en propriété directe. Dans le deuxième cas de figure, l’utilisateur achète son module auprès d’un fabriquant et loue directement, auprès du gestionnaire d’infrastructure, un emplacement pour greffer son module. Sa location sera généralement de moyenne ou longue durée. Il peut adapter sur place son installation à l’évolution de ses besoins ou « déménager » en emportant son module. Ou encore revendre sur place son module en transférant son bail. Des modules peuvent être achetés en commun : chambre d’amis partagée par plusieurs ménages proches, chambres d’adolescents entre deux conjoints séparés, atelier pour plusieurs architectes, potager etc.

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On peut également imaginer que des entreprises proposent en location des modules non localisés. L’utilisateur bénéficie alors de la double souplesse de la location de son module et de celle de son emplacement. Rien ne l’empêche de combiner la propriété de sa cellule d’habitation principale et le location de modules complémentaires selon ses besoins (enfants, travail…). 2.3.3 Coût

La modularité réduit le coût du logement lui-­‐même, on s'adapte facilement à une interprétation limitée de ses besoins strictement "privés" et on mutualise le reste dans des espaces collectifs (groupe familial, d'amis, de collègues...) ou publics, tout en multipliant les manières de vivre possibles entre "logement", "habitat" et "quartier". Ce nouveau comportement est bien producteur de nouvelles sociabilités urbaines. Il est possible de trouver dans un même ensemble des modules de niveau de prestation et donc de coût différent, ce qui facilite la réponse à des besoins sociaux divers (une collectivité peut fournir le module et subventionner la location de l'emplacement, une association peut accompagner les occupants etc.). 2.3.4 Durabilité. Ce que nous proposons, dans la lignée de la réflexion menée par Marina Trayser dans son mémoire « De l’éphémère au durable », est un modèle durable dont la forme est éphémère. En réponse à une ville figée, le dispositif que nous proposons permet la mobilité dans la ville et dans les villes et aussi dans les formes urbaines. Les colonnes et les modules, démontables et recyclables, sont facilement déplaçables ; le dispositif dans sa globalité prend des formes uniques en fonction de l’agencement des modules ; les modules sont adaptables aux besoins changeants d’une population mobile. Outre une mobilité physique, notre dispositif permet une mobilité dans le temps des formes de la ville. La souplesse du dispositif et la liberté de localisation des modules permettent d’optimiser la surface et le volume occupés : au sol grâce à la verticalité de l’ensemble mais aussi par chaque usager grâce aux espaces et services mutualisés et à l’évolutivité de son espace propre. Au total, les gains énergétiques et de consommation de ressources de toute sorte sont probablement très importants, si l’on considère l’ensemble du cycle de vie des composants du dispositif et des ménages eux-­‐mêmes,.

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2.4 Dialogue avec la ville.

Aujourd’hui la Région Ile de France a pour centre Paris. Notre dispositif permettrait de décentraliser et de multiplier les polycentres, de signaler et de valoriser une organisation en réseau de l’espace régional, réseau urbain des nouveaux réseaux familiaux, sociaux et professionnels.

Il paraît opportun de placer les dispositifs à proximité de gares ou d’autres nœuds de transports, surtout s’ils sont en position de centralité urbaine locale : - la souplesse du dispositif permettant d'optimiser les localisations en fonction des évolutions de la vie, on peut en espérer une réduction globale des déplacements, au moins des déplacements automobiles grâce à la conjugaison « nœud de transports publics / proximité de quartier » - permettre un on peut en espérer un déplacement des modules par l’intermédiaire du réseau ferré. . Les dispositifs sont pensés pour optimiser les mobilités et s’intégrer dans les dynamiques urbaines de leurs lieux d’implantation, l’idée principale étant d’intensifier chaque site.

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Pour développer un exemple de notre dispositif, nous avons choisi le faisceau sud-­‐ouest comme site d’étude et retenons des sites d’implantation situés sur la limite entre la zone urbaine et la zone rurale.

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Le dispositif permettra de répondre aux besoins de chaque territoire, pour devenir un vecteur d’intégration dans le quartier et dans la ville. Le rez-­‐de-­‐ chaussée, réservé à des usages publics pourrait par exemple accueillir une coopérative pour permettre aux producteurs de la région de vendre leurs produits, dans le cas d’une implantation en zone rurale. Nous pourrions aussi imaginer des locaux destinés à des associations étudiantes dans le cas d’une implantation à proximité d’une université.

Le concept de Space Lib’ n’est pas une structure établie prête à être installée dans n’importe quelles conditions sur n’importe quel territoire. Ce dispositif ne peut être mis en place sans une étude approfondie du site d’implantation afin d’identifier les besoins et les aspects à intensifier sur place. Une nouvelle urbanité et un nouveau mode de vie ne peuvent se développer sans un dialogue avec le quartier, la ville, le territoire. Les habitants et acteurs du dispositif pourront laisser leur empreinte sur ce lieu de vie pour des durées très variables, l’urbanité se réinventant à chaque instant.

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