Vie en montagne – Été/Automne 2025

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VIE EN MONTAGNE

PAR MOUNTAIN LIFE

Photo : Rab

Plus de 400 km de sentiers,

pour les petits et grands adeptes de v lo de montagne.

Vallee Bras-Du-Nord
Moulin
Mont-Sainte-Anne
Massif de Charlevoix
Photo: Louis Dionne

TABLE des MATIÈRES

À L’AVANT-PLAN

p.9 Édito: Perdre ses repères

p.10 Dans les coulisses

p.13 Des filles qui skatent

p.16 Portrait : Babette Roy domine tout, et défie la gravité

EN POINT DE MIRE

p.18 Distorsion temporelle en haute mer

p.26 La grande démocratisation de l’ultra-endurance

RUBRIQUES

p.34 Rendez-vous aux sommets

p.36 Dans la roue de Louise

p.40 Galerie photos

p.48 Le fin mot

SUR CETTE PAGE
Un lever de soleil de feu embrase la vieille forêt sous la brume matinale. Stoneham, Québec. MAXIME LÉGARÉ-VÉZINA.
EN PAGE COUVERTURE Jesse Mattner, Moby Dick, 5.11. Kamouraska. NELSON RIOUX

VIE EN MONTAGNE

ÉDITEURS ET VENTES

Ludovic Légaré ludovic@mountainlifemedia.ca

Glen Harris glen@mountainlifemedia.ca

Jon Burak jon@mountainlifemedia.ca

Todd Lawson todd@mountainlifemedia.ca

RÉDACTRICE EN CHEF

Frédérique Sauvée frederique@mountainlifemedia.ca

RÉDACTEUR EN CHEF INVITÉ ET TRADUCTION

Maxime Bilodeau maxime@mountainlifemedia.ca

DIRECTRICE DE CRÉATION ET DE PRODUCTION, DESIGNER

Amélie Légaré-Laganière amelie@mountainlifemedia.ca

DIRECTEUR DE LA PHOTOGRAPHIE

Alain Denis alain@mountainlifemedia.ca

RÉVISEURE

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DIRECTRICE DU MARKETING & DIGITAL

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ÉDITEUR WEB

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CONTRÔLEUR FINANCIER

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DIRECTEUR DE LA DISTRIBUTION

Marc Allard

COLLABORATEURS

Agathe Bernard, Anne Marie Brassard, Simon Buissières, Colin Field, Diane Grégoire, Yan Kaczynski, Maxime Légaré-Vézina, Jean-Christophe Lemay, Pauline Mathiot, Jesse Mattner, Louise Philipovitch, Ian Roberge, Alexe Root, David Savoie, Nicholas Spoonie-Rodie

Publié par Mountain Life Publishing Inc, Copyright ©2025. Tous droits réservés. Toute reproduction sans autorisation est interdite. Numéro de convention de la Poste-publications 40026703. Retourner les adresses canadiennes non livrables à : Mountain Life Magazine, CP 586, Thornbury, ON, N0H 2P0 Toute reproduction en tout ou en partie est strictement interdite. Les opinions exprimées ici sont celles de l’auteur exclusivement. Pour en savoir plus sur Mountain Life, visitez mountainlifemedia.ca. Pour distribuer Vie en montagne dans votre magasin, veuillez composer le 450-524-0135.

Financé par le gouvernement du Canada

Notre engagement envers l’environnement

Vie en montagne est imprimé sur du papier composé de matériaux issus de forêts bien gérées certifiées FSC® et d’autres sources contrôlées. Vie en montagne souscrit aussi au programme

PrintReleaf qui mesure la consommation de papier et la convertit en nombre d’arbres utilisés. Ainsi, 90 arbres seront plantés, soit l'équivalent de ceux consommés pour l'impression de ce magazine.

Écriture inclusive

Par souci de facilité et de fluidité de lecture des articles, l'équipe éditoriale de Vie en montagne a choisi de ne pas utiliser le style d'écriture inclusive dans cette édition du magazine. La neutralité des genres a toutefois été privilégiée autant que possible.

Forest Stewardship Council

Des vagues déchaînées sur des côtes rocheuses. Des couchers de soleil paisibles au bord des lacs. Et des excursions palpitantes à travers une nature spectaculaire. Voilà les aventures qui nous éveillent. Vivez-les ici.

FORGÉ PAR LA NATURE

PERDRE SES

REPÈRES

Une personne qui a perdu ses repères est déphasée, larguée, déconnectée de la réalité, étrangère au monde. C’est comme si, du jour au lendemain, elle avait débarqué dans un pays mystérieux dont elle ne pige que dalle. Ses habitudes, ses lieux de prédilection, les bruits environnants, les interactions aux issues prévisibles, tout a disparu pour laisser place à de l’inconnu. Il lui faut apprendre dès lors une nouvelle grammaire, de gré ou de force.

Lorsque vous lirez ces lignes, la naissance de l’Héritier m’aura depuis peu fait perdre mes repères. On aura beau m’avoir répété mille fois que l’arrivée d’un premier bébé représente, à l’échelle d’une vie, un tremblement de terre dont on ne soupçonne pas la force tellurique, forcément, je serai désorienté. Quelques mois auparavant, la rédactrice en chef de Vie en montagne, Frédérique Sauvée, qui m’a demandé d’assurer la permanence en son absence pour cause de maternité, sera aussi passée par cette même étape. Solidarité.

De fait, il est beaucoup question de perte de repères dans cette nouvelle édition du magazine. Notre collaboratrice Agathe Bernard raconte ainsi une expérience singulière de dépaysement en haute mer, quelque part entre les îles Canaries, le Cap-Vert et la côte ouest du Canada (page 18).

Pour sa part, Anne Marie Brassard souligne comment les femmes – y compris elle-même – s’approprient désormais les parcs de planche à roulettes, où elles ont (trop) longtemps eu un statut d’extraterrestres (page 13).

Par bonheur, perdre ses repères permet d’en trouver de nouveaux. C’est de ce processus d’une grande richesse humaine que nous parle Louise Philipovitch, qui a réappris à s’émerveiller de « son » Québec à l’occasion d’une virée de cyclotourisme léger en Outaouais (page 36).

Cet été, je vous souhaite de sortir de votre zone de confort pour mieux perdre vos repères.

– Maxime Bilodeau, rédacteur en chef invité

LOUISE PHILIPOVITCH
OMAR LOPEZ
AGATHE BERNARD

DANS LES COULISSES

photo :: Alexe Root

lieu :: Îles-de-la-Madeleine, QC

Du vélo de garnotte aux Îles-de-la-Madeleine ? Bonne chance ! Les bancs de sable fin qui ceinturent l’archipel en forme d’hameçon laissent peu de place à des pneus non surdimensionnés. Pourtant, à force de chercher, notre collaboratrice Alexe Root a fini par repérer un court segment faisant exception à cette règle.

« C’est un des seuls chemins qu’on a trouvé où on ne s’enfonçait pas, raconte celle qui en a alors profité pour photographier son conjoint. Ça faisait du bien de finalement rouler hors des sentiers battus, d’avoir la paix et de se sentir seuls au monde. »

Alors qu’elle immortalise la scène, Alexe a une impression apaisante de déjà-vu. « La vague tourbillonnante dans la grotte en avant-plan m’a rappelé un voyage aux Îles réalisé avec mes parents lors de mon enfance. Je suis convaincue d’avoir vu cet endroit précis jadis », affirme-t-elle. On la croit sur parole. –Maxime Bilodeau

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Des filles qui

skatent

mots :: Anne Marie Brassard

photos :: Pauline Mathiot

De plus en plus, d’un bout à l’autre du pays, elles répondent présentes dans les cours d’initiation des skateparks de la province. Elles brillent sur la scène mondiale jusqu’aux Jeux olympiques, où la discipline a récemment fait son entrée. Elles ont 8, 13, 25, 40 ans. Elles sont impétueuses et singulières. Surtout, elles ont compris qu’en se regroupant, elles forment une communauté de femmes qui s’élèvent, se motivent et se tiennent debout.

Rassembler des femmes qui partagent une passion pour l’aventure, le skate, le surf et le bien-être au féminin, c’est ce que les Québécoises derrière l’entreprise Salty Souls Experience font depuis 10 ans. J’ai participé à l’une de leurs retraites au Salvador en novembre 2024 en ne me doutant pas que j’allais y trouver un précieux bout de vérité.

Il faut dire que le décor aide à baigner dans le bonheur. La villa de type espagnole, notre havre pour la semaine, est perchée sur une falaise surplombant une plage de sable noir balayée par le va-et-vient infini des vagues du Pacifique. Le village décontracté d’El Zonte, à distance de marche, est peuplé d’habitants chaleureux, de surfeurs passionnés et d’amoureux du soleil. La trame de fond parfaite pour une semaine remplie de rires et de prises de conscience en compagnie d’une dizaine de filles venues du Québec, du Texas, de la Californie, de New York et d’ailleurs.

Toutes sont là pour différentes raisons : se retrouver, se dépasser ou décrocher, mais avec cette envie commune de se choisir et d’être la meilleure version d’elles-mêmes. Cette version qu’on oublie trop souvent, noyée sous la pile de linge sale, les allers-retours entre le travail et la garderie, une séparation et les soirs de macaroni-soupe-tomate.

Notre collaboratrice, Anne Marie, dans le feu de lʼaction.

L’EXTRATERRESTRE

J’ai 14 ans la première fois que je mets les pieds sur une planche à roulettes. C’est le début des années 2000, les filles qui skatent au Québec sont aussi rares qu’un stationnement libre chez IKEA un samedi. Je passe mes étés entourée de gars dans ma petite ville natale, à me péter la gueule, à me relever pareil, à montrer que moi aussi je suis capable. Je me sens à la fois invincible et unique, seule et déstabilisée.

Débarquer dans un parc de planche à roulettes quand tu t’appelles Virginie, Laurie ou Marie, ça prend pas mal de courage, car ça peut être intimidant. Mais ça reste intimidant. Le skateboard est un sport complexe et risqué, dominé par les hommes, où on mesure souvent la valeur d’une fille au fait qu’elle sache exécuter un kickflip. Je me suis toujours sentie un peu à la fois chez moi et extraterrestre dans cet univers.

LA PUISSANCE DES FEMMES

C’est finalement bien plus tard, dans ma trentaine, que je découvre le fameux morceau qui me manquait, grâce à cette bande de femmes audacieuses et inspirantes, unies autour d’une même passion pour le skate. On redéfinit les paradigmes à notre manière, en se tendant la main, en s’encourageant et en se soutenant. On appartient enfin à quelque chose qui nous ressemble. Et vous n’avez pas idée à quel point c’est puissant. Ce voyage était une célébration du pouvoir infini des femmes et du skateboard. Il m’a réconciliée avec cette idée toute simple que je peux être forte et féminine en même temps. Que je n’ai pas besoin d’être toujours inébranlable. Que je peux être multiple et accueillir ma douceur et ma sensibilité comme un cadeau inestimable, sans même savoir atterrir après un kickflip.

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ELLE DOMINE TO UT, ET DÉFIE LA GRAVITÉ

Babette Roy compte probablement parmi les grimpeuses les plus décorées au Canada, certainement au Québec. Après plusieurs années de compétition, rien n’indique qu’elle va accrocher ses chaussons, même si les obstacles à la performance demeurent nombreux.

À 23 ans, la compétition d’escalade a occupé plus de la moitié de sa vie. À neuf ans, déjà, elle s’accrochait à des prises en plastique pour tenter de se hisser sur le podium. Au Canada, la jeune femme a décroché tous les titres nationaux de la discipline, et elle a bien figuré dans plus de dix étapes de la Coupe du monde.

Au moment de notre entretien, à la fin de février, elle se remettait d’une blessure à un doigt, conséquence d’une rupture de poulie, qui permet de bien serrer les prises. La hantise des grimpeurs.

Pourtant, Babette Roy ne semble pas trop s’en inquiéter. Elle sait que la forme physique reviendra bien assez vite. De toute façon, en Coupe du monde, dit-elle, toutes les compétitrices ont à peu près les mêmes capacités physiques.

C’est là où les tactiques et l’aspect mental entrent en jeu. Chaque compétitrice doit tenter de résoudre des problèmes de blocs aux prises et angles variables, pour accumuler le plus de points. Au cours des dernières années, les performances en bloc sont devenues de plus en plus acrobatiques et dynamiques, s’apparentant à celles réalisées au parkour et à la gymnastique. Un genre que Babette, une autodidacte, maîtrise bien. « Dans les dernières années, j’ai essayé de me concentrer davantage sur le mouvement », précise-t-elle. Décortiquer un mouvement d’une prise à une autre, en trouver la fluidité tout en maîtrisant la synchronisation. « Je pense qu’il n’y a pas un entraînement physique qui va te mener là. »

LE COUTEAU ENTRE LES DENTS

La motivation est toujours au rendez-vous, malgré toutes ces années à écumer les circuits de compétition. « J’y reviens sans cesse », indique Babette Roy, qui se décrit comme compétitive dans tous les domaines. « Tu ne peux pas t’ennuyer, puisque ça se renouvelle tout le temps. »

Ironiquement, moins s’identifier à l’escalade et faire autre chose dans sa vie – comme étudier – lui permettent de se mettre moins de pression pour la grimpe.

Toutefois, si la jeune femme désire participer à des événements, c’est elle qui doit prendre en charge toute la logistique, de l’achat des billets d’avion aux réservations de chambres d’hôtel. Et payer tout ça en grande partie de sa poche. Le facteur limitant pour sa participation, « ce sera toujours l’argent », souligne-t-elle.

Simon Collette est copropriétaire de la salle d’escalade Rose Bloc, sur la Rive-Sud, dans la région de Montréal. Il y gère aussi l’équipe d’athlètes dont Babette fait partie. « C’est la meilleure grimpeuse au Québec », pense-t-il. Lui-même un grimpeur depuis une dizaine d’années, il a accompagné la jeune femme lors des

épreuves en Coupe du monde. Il la décrit comme une athlète intense, qui met beaucoup d’émotions dans son escalade. Elle est un modèle pour les filles qui aspirent à faire de la compétition – Babette va parfois grimper avec des membres de l’équipe junior.

« Pour ces jeunes filles-là, c’est un moment incroyable, un peu comme si un jeune joueur de hockey pouvait faire une séance d’entraînement avec un joueur du Canadien », illustre Simon Collette. Pour lui, il ne fait pas de doute que Babette Roy réaliserait de meilleures performances si elle bénéficiait d’un meilleur soutien.

« En ce moment, c’est un peu frustrant de se dire que les grimpeurs qui représentent le Canada en escalade doivent payer pour être là », déplore-t-il. À son avis, un athlète du même calibre dans un autre sport recevrait un appui plus important.

Qu’à cela ne tienne, Babette Roy rêve à d’autres Coupes du monde. « Je me suis posé beaucoup de questions [sur la suite de ma carrière]. Mais la saison dernière, alors que j’étais à une place des demi-finales, je me suis dit que ce n’était plus le temps d’hésiter. Donc, oui, j’ai le goût de continuer », conclut l’athlète.

CENTRE D'ESCALADE ROSE BLOC

DISTORSION TEMPORELLE EN HAUTE MER

mots et photos :: Agathe Bernard

Certains considèrent la navigation hauturière comme un simple moyen d’arriver à destination. Pour d’autres, comme notre collaboratrice, c’est surtout le temps passé en mer qui compte.

« Des dauphins ! » L’éclat de voix me tire de ma torpeur, et je me précipite sur le pont. À la proue, un petit groupe de ces créatures qu’on dit très sociales plonge et réapparaît à plusieurs reprises au milieu des vagues, dans une chorégraphie savamment orchestrée. Puis, à ce moment, le vent tourne, transportant dans sa course du sable du Sahara. Le ciel s’obscurcit et une brume rougeâtre recouvre le bateau de poussière. Le calima, ce vent chaud du désert, fait des siennes. Ainsi s’égrène le quotidien sur le grand bleu, en direction du Cap-Vert. Ce sont de telles scènes qui me reviennent en tête lorsque je me remémore ma première traversée en haute mer, au début de

2024. Saviez-vous, par exemple, que la couleur de l’océan change dès qu’on dépasse le plateau continental ? Le fond marin plonge alors vers les abysses, et la couleur de l’eau devient d’un bleu violacé intense, unique en son genre. L’eau en mouvement m’a émerveillée dès notre départ du port de Las Palmas, aux îles Canaries. De là, nous nous sommes dirigés vers le sud-ouest, à environ 200 milles nautiques des côtes de l’Afrique de l’Ouest, en direction de Mindelo, un important port capverdien.

Chemin faisant, j’ai fait le plein d’images, au propre comme au figuré. Le faisceau de lune qui se reflète sur les vagues ondulantes.

L’impression de faire du surf à bord d’un voilier de 20 mètres. Le fou de Bassan qui tourbillonne autour du mât pendant 18 heures. Le son de l’eau heurtant la coque pendant que je suis allongée dans ma couchette. La bouilloire fumante réconfortante, en équilibre sur le poêle à cardan. Des rafales de vent de 41 nœuds qui nous frappent de plein fouet. Voir l’indicateur de vitesse atteindre 14 nœuds ! Le mât oscillant latéralement sous les étoiles. La sensation de propreté en lavant mes cheveux pleins de sable. Un sentiment d’espoir envers notre monde, pour la simplicité de la vie. Le silence. L’objectif de mon appareil photo a capté une fraction de tous ces moments ; ma mémoire a emmagasiné le reste.

« Il faut affronter le changement »

Au large, nous hissons d’abord la grand-voile et le foc. Emily, la capitaine, et Alex, le premier lieutenant, nous assignent différentes tâches, comme de tirer sur les lignes et de tourner les treuils. Rapidement, notre équipage se divise en deux groupes, alternant les quarts de veille toutes les quatre heures. Au début, se déplacer sur l’embarcation représente un défi. Nous trébuchons tous, comme si nous faisions nos premiers pas. Des tâches simples comme s’habiller ou se brosser les dents prennent un temps fou. La majorité de l’équipage ressent le mal de mer dans les premiers jours. Vomir ensemble nous rapproche. Beaucoup.

Mon horloge interne se cale assez vite sur le rythme des levers et des couchers du soleil. Ajoutez à l’équation l’absence complète de repères terrestres, l’horizon marin s’étendant sur trois milles depuis le cockpit, et c’est le dépaysement total. Depuis combien de temps suisje en mer ? Une minute, une heure, une vie ? Difficile à dire. Le vent du nord-est nous pousse, soulève l’arrière du bateau, qui finit par redescendre sur les vagues. C’est totalement exaltant, et c’est pour cette raison que je suis ici. J’apprends que le passé et le futur n’ont

plus de prise sur nous en haute mer, que chaque jour compte autant que le précédent.

Le peu que je connaissais sur la voile, je l’avais appris en écoutant On the Wind, un balado de 59° North Sailing qui fait la part belle aux aventures de marins. Andy Schell, le cofondateur de l’entreprise, a grandi sur les bateaux et a parcouru plus de 100 000 milles en mer. « Nous ne faisons pas ça pour devenir riches, dit-il. Ce n’est pas la raison. Nous le faisons parce que nous en rêvons. Ma mère disait toujours : “Crée le monde dans lequel tu veux vivre.”

Alors nous essayons de le faire. »

Pour Andy Schell, naviguer, c’est partager la sagesse des hautes mers avec ceux qui cherchent à l’acquérir. « L’océan est différent chaque jour. Aucun passage ne se ressemble, et aucun jour en mer n’est identique. La seule constante, c’est le changement. Au large, on ne peut pas y échapper. Il faut l’affronter. » Ce balado, cette manière de raconter des histoires, a été une source d’apprentissage immense pour moi. C’est ce qui m’a amenée à sauter dans cette aventure vers le Cap-Vert.

Festival Élévation

Plongez dans Élévation, le festival du Club Med Charlevoix au Québec, où bien-être, aventure et plaisirs en famille atteignent de nouveaux sommets.

Juin — Septembre

Tests réussis

Il faut bien remettre pied à terre un jour. En toute honnêteté, je crains ce moment. La vie sur le plancher des vaches semble compliquée et encombrée. La vie sur la plaine liquide est pure, simple et noble. La veille de notre arrivée au Cap-Vert, un fou de Bassan a commencé à tournoyer autour du bateau, cherchant à se poser sur le mât. Je l’ai suivi toute la nuit, emplie de paix, souhaitant que le temps s’étire. J’étais reconnaissante envers notre bateau Falken de nous avoir portés jusque-là. Jamais je ne m’étais sentie autant dans le moment présent. Sur l’océan, le temps semble éternel, et béni, comme s’il se relâchait enfin. C’est pourtant oublier que dans chaque départ se cache forcément une arrivée.

Après une douche chaude, une promenade dans la vibrante Mindelo, une baignade salée dans l’océan africain, une soirée avec mes amis de voile et une bande de chiens errants, je me suis réconciliée avec la terre. Sur la plage, je rencontre des musiciens qui m’invitent le soir même à souffler les bougies de mon 43e anniversaire dans un bar presque aussi minuscule que la ruelle où il se situe. Sans répétition, la musique commence et tout le monde danse, chante, s’enlace. Les boissons africaines coulent à flots.

Le lendemain, à la suggestion d’un de mes nouveaux amis, je prends le traversier pour l’île Santo Antão. Puis, je monte dans un taxi collectif qui, tout au bout d’une route volcanique sinueuse surplombant des falaises vertigineuses, me dépose à la tête d’un sentier de randonnée : Vale do Paul. Des heures plus tard, après avoir déambulé au travers de jardins en terrasses qui donnent leur nom au Cap-Vert, je débouche au sommet d’une haute crête volcanique surnommée « l’antenne ». L’accueil chaleureux de deux chèvres et d’un âne ainsi qu’un café préparé à même les fèves cultivées sur les pentes du volcan me font oublier ma fatigue.

J’ai les larmes aux yeux en m’extirpant de cette trop rare parenthèse à l’échelle d’une vie – aucun mot ne peut exprimer ma gratitude. J’ai réussi mon test du large, puis celui de la terre ferme. Mais quand aura lieu le prochain voyage ? Cette question, je me la suis d’abord posée quelque part au-dessus de l’Arctique, durant mon vol de retour, encore en mer dans mon esprit, puis à plusieurs reprises depuis l’atterrissage dans mon studio sur la côte ouest du Canada. Comment naviguer jusqu’à ce point, aux confins du temps, pour finalement revenir exactement là d’où l’on est parti ?

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Le programme certifié de PrintReleaf mesure la consommation de papier de Mounta in Life Media et de l’imprimeur Solisco, afin que des arbres soient automatiquement replantés da ns le cadre de projets de reboisement canadiens et mondiaux.

Imprimeur depuis 1991

LA GRANDE DÉMOCRATISATION DE L’ULTRAENDURANCE

Le commun des mortels prend désormais le départ d’épreuves d’endurance de très, très longue durée. Jadis, elles étaient pourtant l’apanage d’une petite élite sportive un brin masochiste. Que se passe-t-il ?

mots :: Maxime Bilodeau

Laurent Teboul court, marche, court, marche. Et pas qu’un peu. En 2024, le Montréalais de 55 ans a ainsi parcouru plus de 5000 km aux quatre coins du Québec, dont une trentaine d’ultramarathons sur route et sur sentier. Il a surtout bouffé tout ça (ou presque) en excellente compagnie. Ses comptes de médias sociaux sont en effet tapissés de photos de gangs qui trottinent avec lui le sourire aux lèvres. Et si repousser ses limites pouvait ne pas être uniquement souffrant, mais aussi agréable ?

Jusqu’à assez récemment, le principal intéressé était pourtant réticent à franchir de très longues distances. « J’ai longtemps cru que courir plus de 21 km pouvait nuire à la santé, provoquer des blessures, confie-t-il. Petit à petit, je me suis convaincu que ce n’est pas le cas, et qu’on peut même y prendre du plaisir. » Aujourd’hui, Laurent Teboul se fait un point d’honneur de communiquer cet état d’esprit au fil de ses aventures. « Cette attitude décontractée donne le goût d’embarquer dans le mouvement, constate-t-il. C’est contagieux ! »

UN SPORT PAS SI EXTRÊME

Les rares chiffres fiables sur le sujet ne mentent pas : la popularité de l’ultra-endurance a explosé au cours des 25 dernières années, notamment en course à pied, qui connaît une croissance exponentielle. Cette évolution est alimentée en grande partie par une plus grande participation féminine et se caractérise par une volonté de participer plutôt que de se distinguer. Un nouveau format d’épreuve inspiré de la mythique Barkley Marathon, aux États-Unis, surfe d’ailleurs sur toutes ces tendances : la course backyard.

Le principe est simple. Les participants parcourent chaque heure une boucle de 6,7 km qu’ils doivent compléter avant le prochain départ, l’heure suivante. La dernière personne à courir encore sur la piste remporte la victoire. Le concept tend à devenir moins rigide.

C’est le cas de la Backyard Ultra de Châteauguay, où une durée limite de 24 heures est fixée, ce qui représente tout de même 160 km.

« Comme la course se déroule sur un circuit fermé avec un camp de base [où se reposer], les gens sont rarement seuls et se lient d’amitié », raconte l’organisatrice Jessica Lambert.

Même son de cloche du côté de Samuel Fournier, organisateur d’un des premiers circuits d’événements du genre au Québec : EvenMust. « Ce format convivial se veut rassembleur. Il effraie moins que les courses en sentier de très longue distance, perçues comme extrêmes [car dangereuses] », indique-t-il. Il faut s’y prendre tôt pour s’inscrire à l’une ou l’autre de ces épreuves ; dès l’ouverture des inscriptions, plusieurs mois à l’avance, les dossards s’envolent vite.

« Après une semaine, c’est souvent plein. »

LES ÉVÉNEMENTS EVENMUST

SUR DEUX ROUES AUSSI

Cet appétit pour l’ultra-endurance se vérifie aussi auprès des cyclistes. Au Québec, Le Défi des 21 fait office de doyenne. Cette « petite » initiation de 339 km et 5200 m de dénivelé positif à l’ultracyclisme en sera à sa 11e édition en 2025. Là encore, les places sont rapidement comblées : la moitié trouvent preneurs en moins de 24 heures. La Race Across Québec, ou RAQ, une nouvelle venue dans le calendrier, connaît un succès analogue avec son format compact. Cela permet de compléter des boucles de centaines de bornes autour d’une unique base de vie, où il est possible de recevoir de l’assistance de l’organisation, de sa famille ou de son équipe. Pour la deuxième édition, en 2025, un parcours inédit de 1000 km mettant surtout à l’honneur les régions des Cantons-del’Est et des Laurentides sera proposé. Des distances plus courtes seront aussi offertes. « Si l’on se fie à l’année passée, il y aura peu de compétiteurs parmi nos participants, prévoient cependant David Roy-Proulx et Jesse Cabon, les coorganisateurs de la RAQ. La plupart prennent le départ pour vivre une aventure plutôt que pour disputer une course. »

Vincent Nadon fait exception ; il s’alignait sur le 500 km de la RAQ pour jouer la gagne. Celui qui a perdu le compte de ses participations à ce genre d’événement depuis ses premières armes en 2017 le confirme : l’ambiance était plutôt bon enfant en août dernier. « Contrairement à d’autres courses plus relevées, les gens engagent la conversation avec moins de réticence, car les pénalités pour sillonnage [se placer dans la zone d’aspiration d’un compétiteur] sont appliquées avec moins de sévérité », explique cet ingénieur électronique de 36 ans.

Malgré sa feuille de route bien garnie, le vétéran a connu plusieurs pépins mécaniques tout au long de son épopée. « Dès la première route de gravelle, plusieurs des accessoires sur mon vélo se sont désajustés », se souvient Vincent Nadon, qui avait en outre téléchargé le mauvais itinéraire GPS dans son ordinateur de bord au préalable. « Je me suis donc égaré à plusieurs reprises », avoue-t-il, tout en riant aujourd’hui de ses infortunes. « Comme quoi ce n’est pas toujours le plus en forme qui s’impose en ultra ! »

RACE ACROSS SERIES

PLACE À LA CROISSANCE

Ces anecdotes en disent long sur l’art subtil de s’échiner longtemps. « L’ultracyclisme est une jeune discipline sportive au Québec, font remarquer David Roy-Proulx et Jesse Cabon, de la RAQ. Il y a donc un travail de pédagogie à faire pour démythifier les questions relatives au matériel, à l’alimentation, au sommeil, à la psychologie. » Des détails qui pèsent lourd dans la balance. « Les déterminants de la performance diffèrent de ceux en vigueur sur des distances plus courtes », tranche Jessica Lambert, de la Backyard Ultra de Châteauguay.

La multiplication plus que probable des événements d’ultraendurance dans les prochaines années contribuera à ce que les adeptes prennent de l’expérience et gagnent ainsi en maturité. Car la surcharge des calendriers guette. Du moins, au Québec. « Toutes les fins de semaine d’août, il y a une épreuve cycliste quelque part », mentionne Vincent Nadon. En réaction, les organisateurs tentent de tirer leur épingle du jeu en innovant. « Pour la Beaver’s Ultra 24H, à SaintGeorges [en Beauce], nous avons carrément intégré de la pyrotechnie », illustre à ce propos Samuel Fournier. Effet « wow » garanti.

De quoi séduire une clientèle qui, justement, recherche de telles expériences. Parlez-en à Laurent Teboul. « Les coureurs de backyards recherchent des événements “le fun”, où on peut par exemple se déguiser ou inviter des non-participants à courir avec soi », souligne cet habitué. Chose certaine, l’époque où le BQ, soit le temps nécessaire pour se qualifier au prestigieux marathon de Boston, était le seul sujet de conversation valable entre coureurs est bel et bien révolue. « C’est un nouveau boom de la course à pied », conclut-il.

RACE ACROSS SERIES
Photo par Blake Jorgenson

Rendez-vous aux sommets

Le Massif et Mont-Sainte-Anne sont de hauts lieux de pratique du vélo de montagne.

mots et photos : Colin Field (traduit de l'anglais)

traduction : Maxime Bilodeau

Des milliers de personnes sont rassemblées au pied de la mythique piste de descente du Mont-Sainte-Anne pour la dernière manche de la Coupe du monde UCI, alors que Finn Iles achève ce qui aurait dû être la course de sa vie. À chaque pointage, il a été plus rapide que le leader précédent – de 2,9 secondes, puis de 3,8 secondes, puis de 4

secondes. Mais, alors qu’il survole le sentier rocailleux près du bas de la piste, son pneu avant glisse sur la roche mouillée, le faisant tomber de son vélo. Hélas, tout espoir d’un top 3 vient de s’envoler, car même s’il s’est relevé indemne, il a perdu trop de temps pour grimper sur le podium.

Après sa chute, Finn continu à descendre la piste. Il aborde le dernier virage dans une cacophonie de crécelles, de klaxons et d’applaudissements frénétiques. Il franchit le dernier saut et lâche son guidon

pour exécuter un no-hander suicidaire qui suscite à nouveau des acclamations nourries de la foule. Puis, alors qu’il vient de déraper dans l’aire d’arrivée, il retire ses lunettes et les jette dans la masse humaine en délire. Nonchalamment, ma femme lève le bras et les attrape en un instant. C’est un moment que je n’oublierai jamais et qui a fait de ce voyage l’un des meilleurs de notre famille. Nous avions rallié Québec quelques jours plus tôt afin de visiter la Belle Province. Premier arrêt : Le Massif de Charlevoix.

Nous n’avons pas été déçus. Considéré comme le plus haut sommet à l’est des Rocheuses, Le Massif figure sur mon radar depuis que je l’ai vu en image, il y a des décennies. La vue à partir de ce promontoire dominant le fleuve Saint-Laurent est irréelle. Depuis 2021, la station de ski mue en une destination de vélo de montagne durant la belle saison. Des progrès considérables ont été réalisés en l’espace de quelques années seulement.

Le Massif, qui est la propriété de Daniel Gauthier, cofondateur du Cirque du Soleil, se trouve à peine à une heure de la ville de Québec. La vision derrière ce projet est simple : offrir la meilleure expérience possible, sans dénaturer l’endroit en le transformant par exemple en un genre de Disneyland insipide. Heureusement, on peut dire que c’est mission accomplie à ce chapitre.

Après avoir pris possession de vélos de location et rencontré le directeur de l’école de ski et de vélo, Clovis Lettre-Racine, nous empruntons un mélange de pistes vertes et bleues, comme Easy Rider, Funky Funghi, 6Pack et Roulé Suisse. Les virages inclinés et autres rouleaux sont mis en exergue par les couleurs de l’automne et, à chaque fois que nous sortons des bois, nous avons droit à des coups d’œil panoramiques sur le Saint-Laurent. D’énormes porte-conteneurs et paquebots de croisière remontent et descendent la voie navigable. En roulant une heure à peine plus à l’est, dit Clovis, l’eau devient plus salée et les chances de voir des baleines augmentent.

Après un dernier de piste avec Clovis, nous nous rendons à un incroyable dîner au Camp Boule, qui surplombe la montagne et le fleuve en contrebas. Nous engloutissons une planche de charcuterie débordant de viandes et de fromages produits localement avant de passer au plat principal. Le dessert est obligatoire. Nous partageons donc des tranches de gâteau aux pommes et aux noix ainsi qu’une épaisse crème au chocolat. Une fois rassasiés, direction Les Caches de la Grande Pointe, au pied du Massif, pour y passer la nuit. Un conseil : l’automne est le moment parfait pour visiter cet endroit discret à la beauté sauvage. On s’y sent vraiment en pleine nature.

Le deuxième jour, nous montons

tranquillement jusqu’au sommet de la piste Bus Jaune de manière à entamer l’Histoire Sans Fin, une descente époustouflante de 7 kilomètres. Cette piste bleue adaptée aux familles consiste en une montagne russe de bons moments et de paysages magnifiques. Puis, nous parcourons à vive allure les mêmes pistes que la veille, en apprenant à connaître par cœur chacune de leurs racines. De petites sections de pistes noires, comme Whippette et Tite Chèvre, nous font tomber encore plus amoureux du réseau. Nous discutons de ce que serait la vie ici. Pourrions-nous simplement partir et déménager ?

Pour notre deuxième nuit, nous avons séjourné à Baie-Saint-Paul, à 20 km au nord du Massif, où les embruns du fleuve sentent bon la mer. Nous avons séjourné au bord de l’eau au Domaine Belle Plage et avons soupé au Bercail.

Au menu : un repas trois services composé de fruits, légumes et herbes aromatiques qui proviennent directement de leurs jardins de 5000 m2. Les portions décadentes et l’atmosphère détendue nous donnent l’impression d’être reçus comme des rois. Nous serions bien restés à Baie-SaintPaul plus longtemps, mais nous ne pouvions pas ; nous devions nous rendre au MontSainte-Anne pour la Coupe du monde de vélo de montagne. La station accueille en effet ce prestigieux circuit de l’Union cycliste internationale (UCI) depuis 1998. Il s’agit d’une étape réputée du circuit, tant pour les courses de cross-country que pour celles de descente. En 2023 et 2024, les finales de l’ensemble du circuit se sont déroulées là-bas. Amateurs de vélo de montagne, prenez note : il s’agit d’un événement à ne pas manquer.

Les organisateurs, leurs 500 bénévoles et quelques dizaines de milliers de personnes accueillent chaque année les athlètes de la Coupe du monde UCI et leurs équipes avec un enthousiasme communicatif.

Le dernier coureur à descendre la piste de la Coupe du monde UCI du Mont-SainteAnne le jour de la course est celui ayant enregistré le temps le plus rapide lors des demi-finales. Lors de notre présence, en 2024, ce casse-cou est le jeune phénomène Jackson Goldstone. Le Canadien survole le parcours accidenté à souhait comme un fakir marche sur un tapis à clous. On ne voit pas ça tous les jours.

Au premier passage, le chronomètre lui sourit ; il est 0,152 seconde plus rapide que le meneur actuel. L’excitation dans la foule est palpable. Au deuxième passage, il augmente son avance ; il est 2,258 plus rapides que n’importe qui d’autre ce jourlà. L’effervescence monte d’un cran. Au troisième passage, rebelote : il est à nouveau le plus rapide, cette fois avec un incroyable 3,567 secondes d’avance sur n’importe quel autre coureur. On frôle alors l’hystérie. Et lorsque Goldstone passe le quatrième point de chronométrage, la foule finit par exploser – il est plus rapide de 3,895 secondes.

Il coupe la ligne d’arrivée et l’écran géant révèle ce que tout le monde sait déjà : il a gagné. Avec plus de 4,3 secondes d’avance. L’énergie de la foule en délire happe Goldstone alors qu’il écrase les freins. Les dix minutes suivantes sont chaotiques. Des cris de célébration jubilatoires soulignent

à grand trait la victoire de Jackstone qui, pour sa part, réalise à peine son exploit.

Je n’arrive pas à croire que je suis témoin de cette page d’histoire qui s’écrit devant mes yeux. Mais où sont donc mes amis cyclistes en ce moment ? Quand on aime le vélo de montagne, c’est pourtant l’endroit où il faut être. La Coupe du monde UCI du Mont-Sainte-Anne est peut-être l’un des événements sportifs les plus cool au monde. En tout cas, il s’agit certainement d’un des plus mémorables auquel j’ai assisté. Les athlètes sont de véritables machines et regarder la foule perdre le nord procure une grande jouissance.

Le lendemain de l’épreuve, nous pédalons

sur les flancs du Mont-Sainte-Anne. Le réseau est énorme, avec des pistes de style enduro, de cross-country et de descente pure. Nous choisissons de nous confronter aux dernières et nous nous en tenons aux bleues et aux vertes. Malgré nos jambes et nos bras épuisés par les nombreux jours passés au Massif, nous faisons quelques descentes incroyables sous la pluie.

C’est là que je vois mon fils devenir un meilleur pilote que moi. Plus courageux en tout cas. C’est un moment doux-amer. Alors que nous descendons prudemment La Baptême, je l’aperçois avaler des séries de doubles sauts pour sa toute première fois sur la piste. Je suis probablement trop prudent, mais en le voyant foncer avec confiance et vitesse dans les virages et les sauts, je sais que j’ai fait du bon travail en tant que parent. Du moins en ce qui concerne mes priorités. Alors que nous nous apprêtons à quitter le Mont-Sainte-Anne, une manche de qualification des Championnats du monde de Pump Track débute sur la piste Velosolutions qui se trouve juste à côté des télécabines. L’entreprise de Québec façonne parmi les meilleures pistes à rouleaux sur la planète, et le fait qu’il y en ait une juste à côté de la station est incroyable.

Nous nous arrêtons un instant pour regarder, imaginant d’avoir quelque chose de similaire chez nous. Qui n’en rêve pas ?

Réapprendre l’émerveillement en parcourant l’Outaouais

Notre collaboratrice a réappris à voir la beauté que recèle notre cour arrière à l’occasion d’une équipée de bikepacking en Outaouais.

mots et illustration :: Louise Philipovitch

Le soleil plombe. L’air est chaud et humide en ce début de mai. Nos corps, qui sortent tout juste de leur dormance hivernale, peinent à pédaler dans cette moiteur. Nous profitons d’un quai en bois pour laisser nos vélos sur le côté et sauter dans un lac. Puis, tandis que notre petit groupe reprend la route et pédale à toute allure sur ces grandes routes de terre battue qui parcourent les plaines vallonnées

et rurales de l’Outaouais, je me laisse émerveiller par les alentours. Je réalise alors que j’avais besoin de ce séjour pour réapprendre à apprécier la beauté des paysages environnants.

Je vivais le contrecoup du retour d’une longue aventure à vélo à l’étranger. Après plusieurs mois à parcourir d’immenses montagnes et des paysages aussi divers que grandioses, nos douces collines québécoises me semblaient soudainement bien modestes. Comment alors réhabituer mon regard sur le quotidien et retrouver l’enchantement ? J’étais face à ces questionnements quand des amis m’ont proposé un séjour de bikepacking en Outaouais.

Peu familière avec la région, j’ai immédiatement été séduite par les contrastes qui constituent l’essence de ce territoire : le Far West anglophone de Pontiac, avec ses vastes étendues et son héritage de

centenaires, vieilles granges en bois patiné par le temps, maisons ancestrales et petits commerces aux devantures semblant sortir d’un film de western, autant de vestiges qu’il nous faut savoir apprécier et conserver. À ce sujet, la poète et essayiste Marie-Hélène Voyer, dans son ouvrage L’habitude des ruines, souligne l’importance de chérir et de préserver notre patrimoine bâti. Parce qu’il constitue « les balises de notre mémoire extérieure qui irriguent notre mémoire intérieure », celuici nourrit le sentiment d’appartenance à une collectivité, écrit-elle. Et cette notion de communauté s’est justement fait ressentir tout au long du séjour. Dès la première journée, alors que nous venions de tomber par hasard sur un improbable festival de polo à vélo à Quyon, nous avons immédiatement été invités par les participants à nous joindre aux festivités. Plus tard ce jour-là, près de Low, un agriculteur nous a offert un coin de terrain où planter nos tentes pour la nuit, et a trinqué avec nous tout en nous parlant de

reliefs pour être émerveillé. Une phrase du peintre Pierre Lussier, tirée du livre Nous sommes poésie du médecin et écrivain Jean Désy, m’est revenue à l’esprit : il faut « disposer son âme à accueillir le vrai ». C’est en exerçant notre regard que nous pouvons redécouvrir la beauté du monde qui nous entoure, même dans ses détails les plus modestes. Ce voyage m’a rappelé que nos paysages possèdent une richesse qu’il nous appartient de valoriser et de célébrer. Retrouver l’émerveillement, c’est aussi un parti pris : celui de reconnaître et de défendre ce qui fait la beauté de notre territoire. C’est aller à l’encontre du consumérisme de paysage, qui nous pousse à vouloir voir toujours plus grand, et dont nous sommes tous victimes.

« Entrer en poéticité, c’est accepter qu’une portion de l’essentiel du monde nous imprègne, nous transforme, nous transporte, nous ouvre les portes d’un univers auquel nous rêvions », écrit Jean Désy. Le bikepacking permet ce subtil retour à l’enchantement du quotidien.

Exercice de patience en pleine nature, au fond des canyons de la rivière Rouge, dans les Laurentides. NICHOLAS SPOONIE-RODIE
Exploration matinale du réseau complexe de rivières qui entourent le parc national du Mont-Mégantic, dans les Cantons-de-l’Est. NICHOLAS SPOONIE-RODIE
HAUT Raphaël Malenfant cabre son vélo dans le secteur Maelström des Sentiers du Moulin, près de Québec. SIMON BUISSIÈRE
BAS Frédérique Brunet court sur le Sentier des Caps de Charlevoix après une nuit passée au refuge La Faille. IAN ROBERGE
Quelque part sur les parois surplombant les battures de la région de Kamouraska, à la recherche du délicat équilibre entre l’horizontalité et la verticalité. YAN KACZYNSKI

La montagne vous appelle…

1. Le SAC À DOS OSPREY TALON 22 est taillé sur mesure pour toute aventure estivale d’une journée – randonnée pédestre, sortie de vélo de montagne ou pique-nique au sommet. Le panneau dorsal ventilé AirScape et le harnais enveloppant épousent vos mouvements au lieu de leur nuire. Polyvalent, le Talon est muni de plusieurs compartiments de rangement, avec des emplacements pour un casque, des bâtons ou un piolet. osprey.com // 2. Les BOLS MINCES AVEC ISOLATION RAMBLER DE YETI conservent le froid et la chaleur jusqu’à la toute dernière bouchée. Disponibles en trois tailles, ils gardent les trempettes au fromage chaudes et les salades fraîches et croustillantes, quel que soit l’endroit où vous vous régalez. Conçus pour économiser de l’espace, ces bols isolés à double paroi et leurs couvercles s’emboîtent les uns dans les autres pour faciliter le rangement dans les armoires et les cuisines de camping. yeti.ca // 3. Les BOTTES MI-HAUTES OFFTRAIL HIKE LT MID GORE-TEX® THE NORTH FACE sont conçues pour les terrains techniques et imprévisibles. À la fois robustes et protectrices, elles vous aideront à tracer votre propre parcours sur les sentiers ou en dehors lors de votre prochaine randonnée ou aventure de plusieurs jours. thenorthface.com // 4. Le CHECKPOINT ALR 4 DE TREK est un vélo toute-route polyvalent et abordable, affichant le meilleur rapport qualité/prix de sa gamme de produits. Son cadre en aluminium Alpha Série 300 le rend réactif sur les chemins de pierres concassées tout en restant confortable et performant sur l’asphalte. Il offre un dégagement généreux pour les pneus, soit jusqu’à 45c, ainsi que de nombreuses fixations pour accessoires. Idéal pour explorer routes et sentiers avec confort et fiabilité. lacordee.com // 5. Le SAC À DOS OSPREY TEMPEST 22 est un modèle léger, polyvalent et conçu spécifiquement pour les femmes. Avec un panneau dorsal AirScape ventilé, un harnais et une ceinture BioStretch, il assure un ajustement précis et confortable. Ses multiples poches et fixations pour des bâtons, un casque ou un piolet en font un choix idéal pour la randonnée, le vélo ou l’alpinisme. lacordee.com

“Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j'habiterai dans l'une d'elles, puisque je rirai dans l'une d'elles, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras, toi, des étoiles qui savent rire.”

– Antoine de Saint-Exupéry, Le Petit Prince

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